Vous êtes sur la page 1sur 34

search-site

A / Épistémologie et
enseignement des sciences

Martin Riopel, Université du Québec à Montréal, dernière mise à jour le 25


novembre 2009.

Table des matières

1. 1 Épistémologie et enseignement des sciences


2. 2 Définition de la science
3. 3 Principaux courants épistémologiques
1. 3.1 Rationalisme (17e siècle)
2. 3.2 Empirisme (18e siècle)
3. 3.3 Positivisme (19e siècle)
4. 3.4 Constructivisme (20e siècle)
5. 3.5 Réalisme (20e siècle)
6. 3.6 Résumé des principaux courants épistémologiques
7. 3.7 Tableau I. Courants épistémologiques
4. 4 Limites de la classification proposée
5. 5 Conclusion
6. 6 Sources documentaires

Pour présenter les courants épistémologiques, nous allons commencer par


donner un sens précis au mot science et à l'expression activité scientifique
Nous allons ensuite présenter, un à un, les différents courants ou écoles de
1
pensée concernant l'activité scientifique en tentant de mettre en évidence les
liens possibles entre l'appartenance d'un professeur à un courant donné et sa
façon d'enseigner. Nous allons finalement conclure en soulignant les limites de
l'application de cette classification à l'enseignement des sciences.

Définition de la science

Dans le langage courant, le mot science peut avoir plusieurs sens et il


convient, avant de se lancer dans un exposé sur l'épistémologie (du grec
epistêmê « science » et logos « étude »), de bien les différencier. Selon
Robert (1995, p. 2051), dans son application la plus large, le mot science se
confond souvent avec le mot savoir ou même simplement connaissance. Cette
définition, trop large, n'est certes pas celle que nous voulons retenir dans le
cadre de cet exposé. Toujours selon le même auteur, le mot science peut aussi
être associé au savoir-faire que donnent les connaissances et, bien que ce sens
soit déjà plus restrictif, il ne nous convient toujours pas. Nous retiendrons
plutôt la définition suivante que propose Robert, en précisant qu'il s'agit du
sens moderne et courant :

« Ensemble de connaissances, d'études d'une valeur universelle, caractérisées


par un objet (domaine) et une méthode déterminés, et fondées sur des relations
objectives vérifiables. » (p. 2051)

Cette définition nous convient parce qu'elle ne fait pas référence à une, mais
bien à un ensemble de connaissances qui ont, par ailleurs, une valeur
universelle (qui s'appliquent à l'ensemble de tout ce qui existe) plutôt que
conventionnelle ou simplement arbitraire. Cette définition moderne associe
également au mot science une certaine forme de rigueur et d'objectivité qui
nous apparaît essentielle (dans la mesure où la rigueur et l'objectivité sont
possibles, ce qui, nous le verrons plus loin, ne fait pas l'unanimité).
Finalement, et nous nous attarderons plus particulièrement sur ce détail, la
définition citée mentionne que les sciences sont fondées sur des relations
vérifiables. L'adjectif vérifiable, toujours selon Robert (1995, p. 2373), fait
référence à une confrontation avec les faits ou à un contrôle de la cohérence
interne des connaissances. Il nous apparaît évident que, dans le contexte de la
définition d'une science, la seule cohérence interne d'un ensemble de
connaissances ne saurait leur donner une valeur universelle et que seule une
confrontation avec les faits garantit que ces connaissances sont applicables à
l'univers et, de ce fait, ont possiblement une valeur universelle. Nous ne
pouvons donc retenir l'énoncé qu'un ensemble de connaissances cohérentes,
par leur existence même, font partie de l'univers et par conséquent s'appliquent
à lui puisque cet argument nous contraindrait à accepter aussi comme
scientifique tout énoncé existant (considéré comme un ensemble complet),

2
dans la mesure où cet énoncé ne se contredit pas lui-même.

Granger (1995, p. 45-48) reprend l'essentiel de la définition précédente en la


séparant en trois traits principaux caractérisant la science et que nous
résumons ainsi :

1. la science vise une réalité par une recherche constante, laborieuse et


cependant créative de concepts orientés vers la description ou
l'organisation de données résistant à nos fantaisies ;
2. la science a pour objectif ultime de décrire, d'expliquer, de comprendre
et non directement d'agir ;
3. la science a le souci constant de produire des critères de validation
publiques, c'est-à-dire exposés au contrôle instruit de quiconque.

Avec son critère de réfutabilité, Popper (1985, p.230) va encore plus loin et
propose qu'un ensemble de connaissances, pour être qualifié de science, doit
non seulement être vérifié ou vérifiable, mais doit de plus s'exposer d'avance à
être réfuté par l'expérience (par expérience, nous entendons le résultat d'une
interaction avec la réalité). Ce critère de Popper, particulièrement contraignant,
fait intervenir deux idées principales soit, premièrement, la nécessité pour une
théorie scientifique de faire au moins une prédiction et, deuxièmement, la
nécessité que cette prédiction concerne une expérience nouvelle (dont on ne
connaît pas encore le résultat avec une précision suffisante) susceptible de
réfuter la théorie. En ajoutant une dimension temporelle à la définition d'une
science, Popper exclut du domaine scientifique, entre autres, toutes les théories
qui ne font que s'ajuster a posteriori aux expériences en ne prédisant rien de
nouveau. À notre avis, tout contraignante qu'elle soit, c'est cette obligation de
nouveauté qui donne tout son sens au critère de Popper et, dans le même élan,
projette les sciences modernes vers l'avant. C'est une vision opérationnelle de
la science, c'est-à-dire qu'elle implique sa propre vérification sous forme de
postulats opérationnels, et c'est pourquoi nous utiliserons cette définition
possible des sciences comme point d'ancrage de la discussion qui suit.

Évidemment, cette définition de la science ne fait pas l'unanimité.


Jarroson (1992, p. 167-168) présente trois limites quant à l'utilisation du critère
de Popper que nous résumons ainsi :

1. Il existe des propositions qui ont un sens, mais qui ne sont pas
réfutables. Par exemple, « il existe des hommes immortels » ; il faudrait
tuer tous les hommes pour démontrer que cette proposition est fausse.
2. Il est rare qu'une expérience permette de ne réfuter qu'une seule théorie
à la fois. Par exemple, quand on observe une bille qui tombe pour

3
étudier la mécanique, on admet aussi la théorie de la lumière qui permet
de voir la bille.
3. On ne peut jamais être certain de la validité d'une expérience ou d'un
ensemble d'expériences. Il faut toujours faire la conjecture fondamentale
de se fier à l'expérience.

La première limite ne pose pas de problème majeur, puisqu'on peut toujours se


restreindre à ne considérer que les théories qui sont effectivement réfutables.
La seconde limite nous contraint à considérer la science comme un ensemble,
ce qui n'est pas un problème insurmontable. Cependant, la troisième limite,
plus profonde, mérite qu'on s'y attarde. Le courant épistémologique
constructiviste, qui sera présenté un peu plus loin, reprend cet argument pour
remettre en question la possibilité d'établir des relations objectives en
proposant que le sujet connaissant est indissociable de la connaissance
produite. L'impossibilité d'établir des relations objectives invalide évidemment
le processus objectif de vérification et rend impossible l'application stricte du
critère de Popper. La définition des sciences doit alors être révisée. Dans cet
esprit, Robert (1995) rapporte que, dans le domaine de la didactique et des
sciences humaines, on utilise habituellement la définition suivante du mot
science qui ne retient que les deux premiers éléments de la définition
courante :

« Corps de connaissances ayant un objet déterminé et reconnu, et une


méthode propre; domaine organisé du savoir. » (p. 2051)

On pourrait citer à titre d’exemple Gingras (1995) :

« ce qu’on appelle la science est un savoir qui repose sur des conventions »
(p. 27)

Puisque notre travail s'inscrit dans le cadre de la didactique, il nous apparaît


prudent de prévenir le lecteur que l'usage, en didactique, ne sera pas respecté.
Pour éviter toute ambiguïté, le mot science sera utilisé dans son sens courant.
Lorsque nous ferons référence à la définition didactique ou constructiviste
d'une science, nous le mentionnerons explicitement.

Principaux courants épistémologiques

Dans les sections qui suivent, nous présenterons les principaux courants
épistémologiques concernant l'activité scientifique tels qu'énumérés dans
Bégin (1997, p. 13) ou Alters (1997, p. 50-53) soit le rationalisme,
l'empirisme, le positivisme, le constructivisme et le réalisme. Pour chacun des
courants, nous tenterons de donner une définition suffisamment précise et un

4
aperçu des implications de cette définition sur la recherche de nouvelles
connaissances, le nom de quelques scientifiques ayant défendu des positions
cohérentes avec la définition retenue, ainsi que les préférences pédagogiques
et la conception du cours de sciences que pourrait adopter un professeur qui
choisit d'appartenir à ce courant.

Rationalisme (17e siècle)

Selon Le dictionnaire actuel de l'éducation (1994, p. 1003) le rationalisme est


un courant épistémologique qui considère que « toute connaissance valide
provient soit exclusivement, soit essentiellement de l'usage de la raison ».
Selon Bégin (1997, p. 12), Alters (1997, p. 51) et Blanshard (2001), on
reconnaît généralement que des philosophes grecs comme Euclide (~300 av J.-
C.), Pythagore (569-475 av. J.-C.) et Platon (428-347 av. J.-C.) défendaient
des positions rationalistes en accordant la primauté aux idées. Cette
association se fait évidemment a posteriori puisque le courant
épistémologique rationaliste n'était pas encore défini à l'époque. Plus
récemment, on associe les mathématiciens Descartes (1596-1650) et Leibniz
(1646-1716) ainsi que le philosophe Kant (1724-1804) à ce courant qui
privilégie le raisonnement en général et plus particulièrement le raisonnement
déductif (ou analytique) qui va de l'abstrait vers le concret comme mécanisme
de production de connaissances.

Il est important de comprendre ici que, pour les rationalistes, l'expérimentation


est exclue du mécanisme de production de nouvelles connaissances.
L'expérimentation (ou l'interaction avec la réalité) sert tout au plus à vérifier ce
qui a été déduit et, dans la mesure où ce qui a été déduit relève de l'évidence,
l'expérimentation devient inutile et superflue. Pour les rationalistes, l'ensemble
de tous les raisonnements possibles englobe nécessairement l'ensemble de
toutes les expériences possibles et la raison seule suffit pour séparer les
expériences possibles dans la réalité de celles qui ne sont possibles que dans
l'imagination.

Historiquement, les connaissances associées au domaine de la géométrie ont


joué un rôle important dans l'élaboration et la justification de la position
épistémologique rationaliste. Par exemple, Britannica (2001) rapporte que
Platon, dans son dialogue intitulé Ménon, met en évidence le caractère certain,
universel et inné de la connaissance en racontant comment Socrate réussit à
faire démontrer à un jeune esclave illettré, étape par étape et sans le lui
enseigner, le théorème de Pythagore appliqué à la diagonale d'un carré. Plus
tard, au début du 17e siècle, l'inventeur de la géométrie analytique, le
mathématicien français René Descartes, reprendra la position rationaliste en

5
tentant d'appliquer la rigueur et la clarté des mathématiques au domaine de la
philosophie. Dans le même esprit, le physicien et astronome italien
Galilée (1564-1642), bien que reconnaissant l'importance de l'expérimentation
et l'observation dans la recherche de connaissances nouvelles (ayant lui-même
effectué des observations astronomiques des lunes de Jupiter et des phases de
Vénus qui ont été déterminantes) proposait dans L'essayeur en 1623 que :

« Le grand livre de l'Univers est écrit dans le langage des mathématiques. On
ne peut comprendre ce livre que si on en apprend tout d'abord le langage, et
l'alphabet dans lequel il est rédigé. Les caractères en sont les triangles et les
cercles, ainsi que les autres figures géométriques sans lesquelles il est
humainement impossible d'en déchiffrer le moindre mot »

Le courant rationaliste, que l'on associe souvent à l'Europe continentale, a


dominé le 17e siècle et, bien qu'il ne soit pas très répandu parmi les
scientifiques modernes, on le retrouve encore chez certains théoriciens qui
croient que tout l'édifice des sciences pourra un jour être déduit d'une
géométrie de l'espace reposant sur quelques évidences pures. À l'intérieur du
courant rationaliste, on distingue, entre autres, le platonisme qui croit, selon
Barreau (1995, p. 50), « à une harmonie inhérente à la nature qui se réfléchit
elle-même dans nos esprits », du criticisme de Kant (1724-1804) qui considère
que la connaissance dépend de structures inscrites a priori dans l'esprit humain
qui rendent possible la perception de la réalité.

Un professeur de science d'allégeance rationaliste aura évidemment tendance à


insister sur l'importance du raisonnement (au détriment de l'expérience) en
allant peut-être, dans les cas extrêmes, jusqu'à éliminer complètement
l'expérimentation du processus d'apprentissage de l'élève. Un cours de science
correspond, pour ce professeur, à une suite de raisonnements analytiques que
l'élève doit réussir à comprendre, à reproduire et à maîtriser.

Empirisme (18e siècle)

L'empirisme s'oppose radicalement au rationalisme en proposant que toute


connaissance provient essentiellement de l'expérience. Popper (1985, p. 217)
reconnaît a posteriori dans les propositions généralisantes du philosophe grec
Anaximène (610-545 av. J.-C.) un mode de pensée empiriste. Plus récemment,
selon Quinton (2001) on associe les philosophes anglais Bacon (1561-1626),
Locke (1632-1704) et Berkeley (1685-1753) à ce courant qui propose que les
sciences progressent en accumulant des observations dont on peut extraire des
lois par un raisonnement inductif (ou synthétique) qui va du concret vers
l'abstrait. Pour les empiristes, les observations permettent de rendre compte de

6
la réalité.

Il est important de comprendre ici que, pour les empiristes, la déduction est
exclue du mécanisme de production de nouvelles connaissances. La déduction
ne serait qu'une étape temporaire permettant de faire une hypothèse ou servant
à simplifier la description de l'ensemble des observations réalisées par les
scientifiques à une époque donnée. Les empiristes accordent d'ailleurs une plus
grande flexibilité à la définition du mot raisonnement, plus particulièrement
lorsqu'il s'agit du raisonnement inductif. En effet, puisque seules les
expériences comptent vraiment, le raisonnement a pour unique but de produire
des idées qui permettront de faire de nouvelles expériences. On privilégie donc
un raisonnement créatif plutôt que rigoureux et l'on devrait peut-être (selon
Barreau, 1995, p. 59) appeler abduction ou conjecture l'induction scientifique
qui, à partir d'un ensemble d'expériences connues, permet d'en imaginer de
nouvelles. Pour les empiristes, le manque de rigueur d'un raisonnement ne
l'empêche pas nécessairement de contribuer à la progression des connaissances
puisque la seule véritable rigueur provient de l'expérience et que la nature n'a
pas forcément de compte à rendre à la raison.

Historiquement, les travaux de Newton (1642-1726), en accordant une grande


importance aux expériences, ont contribué significativement au rayonnement
de la position empiriste. Dans la préface des Principia en 1686, Newton
propose d'ailleurs que l'observation des phénomènes précède habituellement la
démonstration :

«  the whole burden of philosophy seems to consist in this - from the


phenomena of motions to investigate the forces of nature, and then from these
forces to demonstrate the other phenomena ».

L'application de cette méthode a permis à Newton et à ses contemporains de


décrire les forces en mécanique (en particulier celle de la gravité) et de
construire un modèle corpusculaire de la lumière. Un peu plus tard,
Coulomb (1736-1806) utilisera la même méthode pour mettre en évidence la
force électrique. En chimie, Lavoisier (1743-1794) s'inspirera des travaux de
Newton sur la lumière pour jeter les bases de la chimie moderne en proposant
une méthode expérimentale permettant d'identifier les éléments fondamentaux.

Le courant empiriste, que l'on associe souvent aux Britanniques, a dominé le


18e siècle pour céder progressivement la place au positivisme durant le 19
siècle. Ce courant épistémologique, sous une forme nuancée, est encore
présent parmi les scientifiques modernes. À l'intérieur du courant empirique,
on distingue le matérialisme qui propose que tout ce qui n'est pas une

7
expérience matérielle directe n'existe pas, le sensualisme qui propose que
toutes les connaissances proviennent des sensations et l'instrumentalisme, qui
propose que toute théorie est un outil, un instrument pour l'action et qu'elle ne
nous apprend rien sur la nature de la réalité.

Un professeur de science d'allégeance empiriste aura tendance à insister sur


l'importance de l'expérimentation par les élèves dans le but de mettre en
évidence des lois approximatives ou de vérifier des hypothèses. Les
raisonnements qui permettent de déduire rigoureusement ces lois seront
considérés non-essentiels et, dans les cas extrêmes, pourront être éliminés du
processus d'apprentissage de l'élève. Un cours de science, pour ce professeur,
correspond à une suite d'expériences cruciales que l'élève doit réussir à
comprendre, à reproduire et à maîtriser.

Positivisme (19e siècle)

Bien que Feigl (2001) mentionne que le philosophe grec Sextus


Empiricus (160-210), qui vécut au tournant du 3e siècle, adoptait une position
positiviste en insistant sur la suspension de tout jugement, on attribue
généralement le courant positiviste au philosophe Auguste Comte (1718-1857)
ainsi qu'aux physiciens Mach (1838-1916), Bridgman (1882-1961) et Bohr
(1885-1962). Le courant positiviste s'inspire de l'empirisme en ce sens qu'il
s'en tient aux seuls faits d'observation, mais reconnaît l'importance du
raisonnement en ajoutant que les sciences s'efforcent, en utilisant la
mathématisation, de relier entre elles de façon aussi simple que possible les
données expérimentales (Bégin, 1997, p. 12). Ce mariage entre le
raisonnement et l'expérience apparaît déjà très clairement en 1820 dans la
définition que donne Auguste Comte et qui est citée par Kremer-
Marietti (1993, p. 6) :

« S'il est vrai qu'une science ne devient positive qu'en se fondant


exclusivement sur des faits observés et dont l'exactitude est généralement
reconnue, il est également incontestable […] qu'une branche quelconque de
nos connaissances ne devient une science qu'à l'époque où, au moyen d'une
hypothèse, on a lié tous les faits qui lui servent de base. »

Il est à noter que les positivistes insistent sur la rigueur du raisonnement


inductif qui permet de passer des faits aux hypothèses. Ainsi, des positivistes
comme le philosophe et économiste Stuart Mill (1806-1873) et le généticien
Fisher (1890-1962) ont élaboré des méthodes inductives, basées sur les
probabilités et les statistiques, pour obtenir des lois probables à partir d'un
ensemble de mesures. Cependant, force est de constater, selon Barreau (1995,

8
p. 56), qu'il n'existe pas à ce jour de stricte logique inductive qui ne contienne
pas une partie purement conventionnelle. Or, le raisonnement inductif étant
indispensable (pour les positivistes) à l'évolution des sciences (selon la célèbre
formule « voir pour prévoir » d'Auguste Comte), les théories produites n'ont
en soi aucune valeur autre que celle d'être liées aux faits. Elles ne nous
apprennent rien de la réalité qui ne soit déjà contenu dans les faits eux-mêmes.
Par conséquent, pour les positivistes, « la science décrit le comment des choses
sans rien pouvoir dire de leur pourquoi » (Le dictionnaire actuel de
l'éducation, 1994, p. 1003).

Historiquement, cette distinction très nette entre les observations (le comment
et les modèles mathématiques (le pourquoi) est particulièrement importante
pour comprendre ce qui a amené les positivistes à se distinguer des empiristes.
Par exemple, les travaux expérimentaux de Dalton (1766-1844) qui fondèrent
l'atomisme chimique soulevèrent la question fondamentale de l'existence réelle
des atomes. Les empiristes de l'époque croyaient en général que les atomes,
puisqu'ils étaient nécessaires pour expliquer les résultats expérimentaux,
existaient vraiment. Les positivistes s'opposaient farouchement à l'existence
des atomes parce que ceux-ci n'étaient pas directement observables : les
atomes étaient des modèles (le pourquoi) permettant d'expliquer les
expériences (le comment). Pour les positivistes, les modèles sont des créations
humaines qui n'ont strictement aucune valeur autre que d'être utiles. Les
positivistes se sont ainsi opposés catégoriquement à tout ce qui, dans les
modèles scientifiques, n'était pas directement observable. Par exemple, selon
Feigl (2001), pour les positivistes

o les infinitésimaux utilisés par Newton dans les calculs du mouvement


des corps subissant des forces n'étaient que des artifices mathématiques;
o le vide entre les atomes ne pouvait pas exister, on lui préférait un
véritable milieu : l'éther ;
o la notion d'espace et de temps absolus utilisée par Newton ne pouvait
pas être réelle, il fallait toujours que l'espace et le temps soit mesurés
par rapport à quelque chose de matériel.

Pour les positivistes, le fait que les modèles n'aient aucune valeur en eux-
mêmes ouvre la porte à la possibilité que plusieurs modèles différents (et
même contradictoires) rendent compte, avec une égale efficacité, des mêmes
observations. Ainsi, l'apparition du courant positiviste a favorisé, d'une
certaine façon, la multiplication des modèles. Le débat entre le modèle
corpusculaire de la lumière proposé par Newton et le modèle ondulatoire
proposé par Fresnel (1788-1827) en est un exemple.

9
On associe souvent au positivisme une tendance excessive à la classification et
à l'organisation. Les positivistes ont tendance à croire, par exemple, qu'il existe
une méthode expérimentale universelle qui comporte des étapes précises et qui
garantit la progression des sciences. On associe également au courant
positiviste la subordination des sciences les unes aux autres selon une
classification stricte de même qu'un ordre universel des connaissances et de la
société humaine. Dans les cas extrêmes, les thèses déformées du positivisme
ont engendré l'idéologie scientiste.

Le courant positiviste a dominé le 19e siècle et est encore présent aujourd'hui


dans les milieux scientifiques, en particulier parmi les tenants de la physique
quantique qui utilisent abondamment les probabilités et les statistiques pour
faire le lien entre leurs observations et leurs prédictions. À l'intérieur du
courant positiviste, on distingue, selon Kremer-Marietti (1993, p. 10-11), le
conventionnalisme de Poincarré (1854-1912) qui propose que les hypothèses
n'ont pas de valeur cognitive en elles-mêmes, le pragmatisme de James (1842-
1910) qui propose, selon Le Moigne (1995, p. 55), que « le vrai consiste
simplement en ce qui est avantageux pour la pensée », et le positivisme
logique de Carnap (1891-1970) qui propose que les processus cognitifs
d'élaboration des représentations doivent pouvoir être construits ou
reconstruits. Le positivisme logique est parfois présenté comme un des
précurseurs du constructivisme.

Un professeur de science d'allégeance positiviste aura tendance à reconnaître


l'importance complémentaire de l'expérimentation et du raisonnement dans
l'apprentissage de l'élève, en insistant sur la démarche qui permet d'analyser
statistiquement un ensemble de mesures afin d'obtenir un modèle aussi simple
que possible. Un cours de science correspond, pour ce professeur, à une suite
d'expériences que l'élève doit réussir à comprendre, à reproduire, à maîtriser et
à relier logiquement entre elles par un raisonnement inductif rigoureux.

Constructivisme (20e siècle)

Selon Le Moigne (1995, p. 43), on peut trouver chez les sophistes grecs


certaines idées qui peuvent être associées a posteriori au patrimoine de la
position constructiviste. Il cite par exemple la conception de l'ambiguïté du
réel d'Héraclite (550-480 av. J.-C.) et la formule de Protagoras (485-410 av. J.-
C.) : « l'homme est la mesure de toute chose » (p. 43). C'est cependant au 20e
siècle que le courant constructiviste est apparu et on reconnaît habituellement
la paternité de ce courant au mathématicien hollandais Brouwer (1881-1966)
qui avait utilisé le terme constructiviste pour caractériser sa position sur la
question des fondements en mathématiques qui s'opposait à la position

10
formaliste d'Hilbert (Largeault, 1992, p. 27). Il convient ici, pour approfondir
notre réflexion sur les sciences, et plus particulièrement sur la notion
d'objectivité, de présenter sommairement cette question des fondements en
mathématiques.

Peut-on fonder l'ensemble des mathématiques sur un seul système cohérent et


complet ?

Les mathématiciens qui ont tenté de répondre à cette question sont


habituellement regroupés en trois écoles, soit l'école logistique, qui tente de
fonder l'ensemble des mathématiques sur la logique des propositions, l'école
formaliste, qui tente de démontrer la consistance de tous les axiomes
fondamentaux des mathématiques et l'école constructiviste, qui n'accepte
comme vrai que ce que l'on peut construire (en un nombre fini d'étapes) à
partir d'idées que l'intuition accepte comme vraies.

Comme le mentionne Barreau (1995, p. 44-45), les deux premières écoles ont


rencontré des obstacles insurmontables. En effet, les membres de l'école
logistique ont constaté l'impossibilité de définir complètement la logique de
construction des mathématiques sans utiliser de résultat provenant des
mathématiques. Pour les formalistes, Gödel a démontré, en 1931, que toute
théorie assez puissante pour pouvoir englober la théorie des nombres entiers
ne peut être démontrée consistante. Finalement, même l'école constructiviste a
dû se résoudre à ne pas recouvrir, avec un seul ensemble,  tout le champ des
mathématiques classiques. Il apparaît donc impossible de réunir les
mathématiques en un système cohérent et complet qui ne contiennent pas une
composante subjective que les constructivistes appellent intuition. Comme le
conclut Barreau (1995, p. 47), « Les mathématiques marchent sur deux pieds,
l'intuition et la logique, […] le premier pas relève de l'intuition ; la logique
vient ensuite… ».

La position constructiviste sera reprise par le psychologue suisse Piaget (1896-


1980), dans les années soixante, pour expliquer le fondement des
connaissances. En effet, Piaget et Garcia (1983, p. 30) proposent que « un fait
est […] toujours le produit de la composition, entre une part fournie par les
objets, et une autre construite par le sujet ». En insistant sur le caractère
hautement construit des connaissances en général et des connaissances
scientifiques en particulier, le courant constructiviste remet en question la
possibilité de toujours obtenir des relations objectives sur lesquelles baser les
sciences. L'absence de relation objective invalide évidemment tout processus
formel de vérification et rend impossible l'application stricte du critère de
Popper (tel que présenté précédemment). En renonçant à l'objectivité, le

11
courant constructiviste considère la connaissance scientifique au même titre
que n'importe quelle autre connaissance et propose que les sciences
contruisent (plutôt que révèlent) une réalité possible à partir d'expériences
cognitives successives.

Selon Larochelle et Désautels (1992, p. 27), les constructivistes ne rejettent


pas l'existence d'une réalité ultime, mais ils affirment qu'on ne peut pas la
connaître. Pour illustrer ce propos, les auteurs utilisent l'analogie de la clé :

« Le savoir convient à la réalité comme une clé convient à une serrure. La
convenance s'applique à la clé, non à la serrure. Autrement dit, je peux
décrire la clé sans être en mesure de décrire la serrure. […] Comme la clé ne
reproduit pas la serrure, le savoir ne reproduit pas non plus la réalité. »
(p. 27-28)

Le courant constructiviste, encore peu présent dans les milieux scientifiques


traditionnels, occupe une place importante en psychologie et en didactique où
le terme constructivisme est utilisé à plusieurs niveaux différents, avec des
sens apparentés (Astolfi et al., 1997, p. 49-50). On utilisera, par exemple, le
terme constructivisme en psychologie pour décrire le modèle adopté pour
appréhender l'activité cognitive d'un sujet, alors qu'en didactique on utilisera
ce terme pour décrire certaines procédures d'enseignement où l'élève est au
cœur des apprentissages. Cette utilisation du terme côtoiera l'utilisation
épistémologique qui décrit la conception que certains didacticiens,
psychologues et professeurs ont des sciences en général. À l'intérieur du
courant constructiviste, on distingue, selon Larochelle et Désautels (1992,
p. 27), le constructivisme trivial qui propose que « le savoir ne peut pas être
transmis passivement, mais qu'il doit être construit activement par le sujet » et
le constructivisme radical qui reprend la proposition précédente en ajoutant
que « la cognition doit être vue comme une fonction adaptative qui sert à
l'organisation du monde de l'expérience plutôt qu'à la découverte d'une réalité
ontologique ».

Un professeur de science d'allégeance constructiviste aura tendance à insister


sur le caractère arbitraire ou subjectif des modèles scientifiques, en
encourageant l'élève à construire ses propres connaissances. Pour ce
professeur, l'expérimentation ne sert qu'à vérifier la cohérence interne de la
construction. Un cours de science correspond, pour ce professeur, à une suite
de modèles reconnus actuellement par le milieu scientifique que l'élève doit
réussir à comprendre, à construire et à maîtriser. Un professeur qui adopte la
conception constructiviste de la science aura évidemment aussi tendance à
adopter les procédures d'enseignement constructivistes où l'élève est au cœur

12
des apprentissages.

Réalisme (20e siècle)

Selon Bégin (1997, p. 13), le philosophe grec Aristote (384-322 av. J.-C.), par


son souci de construire certains de ses modèles à partir d'observations
systématiques de la nature, a défendu une position que l'on peut qualifier a
posteriori de réaliste. Le réalisme propose que les modèles scientifiques sont
des approximations d'une réalité objective qui existe indépendamment de
l'observateur (Bunge, 1975). Ce courant, contrairement au rationalisme, à
l'empirisme et au positivisme, ne retient pas un mécanisme précis pour la
progression des connaissances, mais reconnaît plutôt la complémentarité des
différentes approches. Selon Owens et Starkey (2001), on associe
généralement les physiciens Planck (1858-1947) et Einstein (1879-1955) à ce
courant en considérant la réaction de ce dernier : « Dieu ne joue pas aux
dés ! » par rapport à la position positiviste de Bohr (1885-1962) qui prétendait
que l'incertitude quantique, puis qu'elle est toujours mesurée, est une propriété
intrinsèque de la réalité.

C'est la reconnaissance de l'existence d'une réalité vers laquelle tendent les


modèles scientifiques (qui sont par ailleurs des constructions humaines) qui
distingue le réalisme du constructivisme. À la proposition  l'observateur
construit la réalité du constructivisme radical, le réalisme propose que
l'observateur fait partie de la réalité. La distinction est importante, puisque la
position réaliste, tout en reconnaissant le caractère hautement construit des
connaissances scientifiques, admet un mécanisme de sélection de ces
connaissances qui correspond à l'interaction avec la réalité dans le but de la
prédire. Ainsi, le critère de Popper peut être appliqué en toute rigueur, même si
la science construite, elle, comporte une composante subjective. En d'autres
mots, la réalité réagit de façon cohérente (dans la mesure où la réalité est
cohérente) peu importe le modèle choisi pour la décrire.

Il est important de noter que la position réaliste, en n'adoptant pas un


mécanisme précis pour la construction de connaissances scientifiques, ne peut
prétendre que les sciences progressent dans leur tentative de décrire la réalité.
Dans le meilleur des cas, la précision des prédictions augmente mais la
construction du modèle, qui permet de produire ces prédictions, demeure tout
aussi subjective qu'avant. Ainsi, les théories scientifiques s'inscrivent dans de
grands paradigmes qui résultent de l'accord implicite et subjectif de la
communauté scientifique (Kuhn, 1983, expliqué par Jarroson, 1992, p. 171).

Historiquement, les travaux de Michelson (1852-1931) concernant la vitesse

13
de la lumière et ceux d'Einstein sur la relativité en 1905 ont contribué à
diminuer l'influence de la position positiviste (au profit de la position réaliste)
en remettant sérieusement en question la nécessité de la notion d'éther jusque
là défendue par les positivistes. De la même façon, les travaux de
Rutherford (1871-1937) concernant le noyau atomique et ceux de Bohr (1885-
1962) sur les orbites des électrons autour du noyau ont renforcé l'hypothèse de
l'existence réelle des atomes à laquelle les positivistes s'opposaient depuis le
début. Dans ce contexte, la position réaliste se distingue de la position
positiviste en reconnaissant une certaine réalité aux modèles développés, qui
se veulent des approximations de plus en plus juste d'une réalité unique.

Selon Alters (1997, p. 45), le réalisme est très présent chez les scientifiques
contemporains et représente aussi le point de vue dominant parmi les
philosophes des sciences. Ce courant épistémologique incarne, pour
Begin (1997, p. 14), un regroupement des positions modérées des différents
courants épistémologiques et apparaît comme la vision la plus authentique en
ce qui a trait à la science contemporaine. À l'intérieur du courant réaliste, on
distingue, toujours selon Bégin (p. 13), le réalisme naïf qui est associé à « la
tendance à prendre le modèle pour la réalité » et le réalisme critique qui
propose que « les théories scientifiques sont des approximations successives
de la réalité ».

Un professeur de science d'allégeance réaliste aura tendance à souligner les


rôles complémentaires du raisonnement inductif, du raisonnement déductif et
de l'expérimentation dans la recherche de nouvelles connaissances
scientifiques, à insister sur la différence entre les modèles (qui sont produits
par les scientifiques) et la réalité (qui existe indépendamment des modèles), et
à reconnaître une composante subjective et créative dans l'élaboration des
théories scientifiques. Un cours de sciences correspond, pour ce professeur, à
une suite d'expériences, de raisonnements et de modèles que l'élève doit
réussir à comprendre, à construire et à maîtriser dans le but de prédire le
monde qui l'entoure.

Résumé des principaux courants épistémologiques

Nous résumons ici, dans un tableau, le nom des principaux courants


épistémologiques, l'époque où chacun d’eux a dominé la pensée, les tendances
pédagogiques correspondantes à chaque courant ainsi que quelques
philosophes ou scientifiques qui leur sont associés.

Tableau I. Courants épistémologiques

14
Courant Description Tendance Philosophe
pédagogique ou
scientifique
Rationalisme Toute connaissance Insister sur Platon (428-
(17e siècle) valide provient l'importance de la 347 av. J.-C.)
essentiellement de rationalisation au Descartes
l'usage de la raison.  détriment de (1596-1650)
l'expérimentation.  Leibnitz
(1646-1716)
Kant (1724-
1804)
Empirisme  Toute connaissance Insister sur Anaximène
(18e siècle) valide provient l'importance de (610-545 av.
essentiellement de l'expérimentation au J.-C.)
l'expérience.  détriment de la Bacon (1561-
rationalisation.  1626)
Locke (1632-
1704)
Newton
(1642-1726)
Berkeley
(1685-1753)
Positivisme La science progresse Reconnaître Sextus
(19e siècle) en se fondant sur des l'importance Empiricus
faits mesurés dont complémentaire de (160-210)
elle extrait des l'expérimentation et Comte (1718-
modèles par un de la rationalisation en 1857)
raisonnement insistant sur la Stuart Mill
inductif rigoureux. démarche scientifique (1806-1873)
Tout ce qui n'est pas qui fait progresser la Mach (1838-
directement science.  1916)
mesurable n'existe Bridgman
pas.  (1882-1961)
Bohr (1885-
1962)
Carnap
(1891-1970)
Constructivism Les connaissances Insister sur le Héraclite
e scientifiques caractère arbitraire ou (550-480 av.
(20e siècle) (observations et subjectif des modèles J.-C.)
modèles) sont des scientifiques en Protagoras
constructions encourageant l'élève à (485-410 av.

15
subjectives qui ne construire ses J.-C.)
nous apprennent rien connaissances.  Brouwer
de la réalité. (1881-1966)
Piaget (1896-
1980)
Réalisme  Les modèles Insister sur la Aristote (384-
(20e siècle) scientifiques sont différence entre les 322 av. J.-C.)
des constructions modèles, qui sont Reid (1710-
destinées à prédire construits par les 1796)
certains aspects scientifiques, et la Planck (1858-
d'une réalité réalité, qui existe 1947)
objective qui existe indépendamment des Russel (1872-
indépendamment de modèles. Les modèles 1970)
l'observateur.  sont des Einstein
approximations (1879-1955)
successives de la
réalité. 

Convergence historique de la classification proposée

Quand on analyse historiquement l'évolution des courants épistémologiques


proposés, on peut remarquer que, malgré les oppositions entre les positions
radicales des différents courants, les positions modérées tendent à se rejoindre
à mesure que les époques se succèdent. En effet, le positivisme du 19e siècle
(qui se réclame de l'expérience et de la logique) peut être perçu comme une
position de compromis entre le rationalisme du 17e siècle et l'empirisme du
18e siècle. De même, le constructivisme et le réalisme du 20e siècle peuvent
être perçus comme une réaction à la naïveté méthodologique du positivisme.
Ces deux courants (constructivisme et réalisme), dans leur version modérée,
insistent sur le caractère subjectif et construit des modèles scientifiques et
reconnaissent l'existence d'une réalité indépendante des modèles. Bien
entendu, ils ne s'entendent pas encore sur tous les points, en particulier sur ce
que la clé nous apprend de la serrure, mais on peut peut-être espérer que nous
assistons à une convergence des idées.

Limites de la classification proposée

Bien que les termes utilisés précédemment pour nommer les différents
courants épistémologiques se retrouvent dans la plupart des textes sur le sujet,
force est de constater qu'on ne leur associe pas toujours le même sens. Par
exemple, Astolfi et al. (1997, p. 80-81) définissent le rationalisme appliqué (tel
que proposé par Bachelard) comme une position de compromis entre
16
l'idéalisme (connaissances provenant exclusivement du travail de l'esprit) et
l'empirisme (connaissances obtenues par accumulation des faits). On notera
aisément (dans ce cas) que l'idéalisme proposé par Astolfi et al. correspond au
rationalisme de notre classification et que le rationalisme proposé par Astolfi
al. est apparenté au réalisme de notre classification. Il apparaît donc essentiel,
dans la consultation de textes sur l'épistémologie,  de toujours vérifier la
définition que les auteurs associent à chacun des termes qu'ils utilisent.

D'autre part, cette classification est le fruit d'une longue réflexion entreprise
par les philosophes, les scientifiques et les didacticiens à propos de l'histoire
des sciences et ne correspond pas forcément à l'idée que se fait spontanément
un scientifique de la science. Comme le fait remarquer Alters (1997, p. 39), la
conception qu'un scientifique se fait de la science peut dépendre du sujet : il
peut, par exemple, avoir des tendances positivistes quant à l'interprétation de la
physique quantique et des tendances rationalistes quant à l'interprétation de la
courbure de l'espace-temps. Ainsi, la classification retenue est une liste des
tendances dans la communauté scientifique en général et, bien qu'on associe au
moins un scientifique célèbre à chaque courant, il ne faut pas conclure qu'on
peut associer un seul courant épistémologique à chaque scientifique. On peut
mentionner par exemple Newton (1642-1727), que nous avons associé au
courant empiriste (qui dominait son époque), mais qu'on associe aussi parfois
au courant réaliste.

Une difficulté supplémentaire apparaît quand on tente de déterminer la


conception que les professeurs se font de la science, car ceux-ci ne sont
habituellement pas impliqués dans un domaine précis de recherche
scientifique. Leur rôle consiste plutôt à présenter plusieurs théories
scientifiques pour lesquelles leur allégeance épistémologique est souvent mal
définie. Il peut en résulter une confusion qui n'est probablement pas sans
rapport avec le fait que plusieurs professeurs de sciences sont incapables de
formuler une conception de la science qui soit à la fois profonde et
cohérente (Gallagher, 1991, p. 127). L'appartenance d'un professeur à un
courant épistémologique donné est donc souvent très difficile à établir, et les
effets de cette appartenance sur son enseignement sont très difficiles à
mesurer.

Conclusion

Dans ce document, nous avons présenté les cinq principaux courants


épistémologiques, soit le rationalisme, l'empirisme, le positivisme, le
constructivisme et le réalisme. Nous avons constaté que chaque courant
propose une conception de la science qui lui est propre et que cette conception

17
n'est pas toujours conciliable avec la conception proposée par les autres
courants.

Étant donné le fait qu'un scientifique donné n'appartient pas nécessairement à


un seul courant épistémologique, il ne faut pas se surprendre que la conception
qu'un professeur de science se fait de la science ne soit pas toujours cohérente
et que son appartenance à un courant épistémologique donné ne soit pas facile
à établir. On peut aussi comprendre que les effets de cette appartenance sur
son enseignement soient très difficiles à mesurer.

Ce que l'on peut obtenir, par contre, c'est un portrait des préférences
pédagogiques et une conception du cours de science qui soient cohérentes avec
l'appartenance d'un professeur à un courant donné. Et ce que l'on peut espérer,
pour le bénéfice des élèves, c'est que les scientifiques, les philosophes et les
professeurs s'entendent sur une conception de l'activité scientifique de façon à
ce que les élèves puissent acquérir une vision unifiée et cohérente de la
science.

Sources documentaires

o Alters, B. J., Whose Nature of Science ?, Journal of Research in Science


Teaching, vol. 34, no 1, p. 39-55, 1997.
o Astolfi, J.-P. et Develey, M., La didactique des sciences, Paris, Seuil,
127 p., 1993.  
o Astolfi, J.-P., Darot, É., Ginsburger-Vogel, Y. et Toussaint, J., Mots-
clés de la didactique des sciences. Paris, De Boeck, 193 p., 1997.
o Barreau, H., L'épistémologie, Paris, PUF, 127 p., 1995.
o Baudouin, J., Karl Popper, Paris, PUF, 128 p, 1995.
o Beaugrand, J. P., Démarche scientifique et cycle de la recherche, In
M. Robert, Fondements et étapes de la recherche scientifique en
psychologie, St-Hyacinthe, Edisem, p. 1-35, 1988.
o Begin, R., Conception de la science et intervention pédagogique,
Spectre, vol. 26, no 2, p. 10-16, 1997.
o Bunge, M. A., Philosophie de la physique, Paris, Seuil, 299 p., 1975.
o Blanshard, B., Rationalism, Chicago, Encyclopaedia Britannica
(http://www.britannica.com), 2001.
o Feigl, H., Positivism, Chicago, Encyclopaedia Britannica
(http://www.britannica.com), 2001.
o Galilée, G., Dialogues sur les deux grands systèmes du monde, Paris,
Seuil, 660 p., 1992.
o Galilée, G., L’Essayeur, Paris, Les Belles Lettres, 307 p., 1990.
o Gallagher, J. J., Prospective and Practicing Secondary School Science

18
Teachers' Knowledge and Beliefs about the Philosophy of Science,
Science Education, 75, 121-133, 1991.
o Gingras, F.-P., Sociologie de la connaissance, In B. Gauthier, Recherche
sociale, Sainte-Foy, Presses de l'Université du Québec, p. 17-46, 1995.
o Giordan, A., Les nouveaux modèles sur apprendre : pour dépasser le
constructivisme ?, Perspecives, Vol. XXV, no 1, mars 1995, UNESCO.
o Giordan, A. et De Vecchi, V. Les origines du savoir, Paris, Delachaux et
Niestlé, 212 p., 1987.
o Granger, G.-G., La science et les sciences, Paris, Presses Universitaires
de France, 127 p., 1995.
o Guilbert, L., La démarche scientifique: fiction ou réalité?, Spectre, vol.
25, no 2, p. 18-22, 1996.
o Jarroson, B., Invitation à la philosophie des sciences, Paris, Seuil,
234 p., 1992.
o Johsua, S. et Dupin, J.-J., Introduction à la didactique des sciences et
des mathématiques, Paris, Presses Universitaires de France, 422 p.,
1999.
o Kremer-Marietti, A., Le positivisme, Paris, PUF, 128 p., 1993.
o Kuhn, T. S., La structure des révolutions scientifiques, Paris,
Flammarion, 246 p., 1983.
o Largeault, J., L'intuitionnisme, Paris, PUF, 135 p., 1992.
o Larochelle, M. et Désautels, J., Autour de l'idée de science, Sainte-Foy,
Presses de l'Université Laval, 314 p., 1992.
o Lawson, A. E., Research on the Acquisition on Science Knowledge :
Epistemological Foundations of Cognition, In D. L. Gabel, Handbook of
Research on Science Teaching and Learning, Toronto, Maxwell
Macmillan Canada, p. 131-176, 1994.
o Le Moigne, J.-L., Les épistémologies constructivistes, Paris, PUF,
127 p., 1995.
o Legendre, R., Dictionnaire actuel de l'éducation, Montréal, Guérin,
1500 p., 1993.
o Millar, D., Millar, I., Millar, J. et Millar M., The Cambridge Dictionary
of Scientists, Cambridge, Cambridge University Press, 387 p., 1996.
o Newton, I., The Principia: Mathematical Principles of Natural
Philosophy, University of California Press, 974 p., 1999.
o Novak, J. D., Learning Science and the Science of Learning. Studies in
Science Education, vol. 15, p. 77-101, 1988.
o Owens, J. et Starkey, H., Realism, Chicago, Encyclopaedia Britannica
(http://www.britannica.com), 2001.
o Paris, C. et Bastarache, Y., Philosopher: pensée critique et
argumentation, Québec, C.G. inc., 369 p., 1995.
o Popper, K., Conjectures et réfutations, Paris, Payot, 610 p., 1985.
o Popper, K., La logique de la découverte scientifique, Paris, Payot,
19
480 p., 1973.
o Quinton, A. M., Empiricism, Chicago, Encyclopaedia Britannica
(http://www.britannica.com), 2001.
o Rival, M., Les grandes expériences scientifiques, Paris, Seuil, 205 p.,
1996.
o Robert, P., Le nouveau petit Robert, Paris, S.N.L., 2551 p., 1995.
o Séguin, M. et Villeneuve, B., Astronomie et astrophysique : cinq
grandes idées pour explorer et comprendre l'univers (2e édition), St-
Laurent, E.R.P.I., 618 p., 2002.

  Connexion   Activités récentes sur le site   Conditions   Signaler un abus  


Imprimer la page  |    Powered by Google Sites

20
Épistémologie
Ne doit pas être confondu avec scientisme.

L'épistémologie (du grec επιστήμη épistémê - « connaissance », « science » - et


λόγος logos - « discours ») désigne soit le domaine de la philosophie des
sciences qui étudie les sciences particulières, soit la théorie de la connaissance
en général.

Sommaire

[masquer]

 1 Définition
 2 Usage du mot
 3 Histoire
o 3.1 Epistémologie cartésienne
o 3.2 Epistémologie kantienne
o 3.3 Le tournant positiviste logique
o 3.4 Épistémologie contemporaine
 3.4.1 Critiques du positivisme logique
 3.4.1.1 Quine et l'« épistémologie naturalisée »
 3.4.1.2 Bertrand Russell
 3.4.1.3 Pierre Duhem
 3.4.2 La phénoménologie de Husserl
 3.4.3 Systémique et constructivisme épistémologique
 4 Les questions épistémologiques
o 4.1 La production des connaissances
o 4.2 La nature des connaissances
o 4.3 L'organisation des connaissances
o 4.4 L'évolution des connaissances
 5 La production de la connaissance
o 5.1 Induction
o 5.2 Vérification
o 5.3 Falsification
o 5.4 Les critiques holistes
 6 La nature des connaissances
o 6.1 Falsificationnisme
o 6.2 Relativisme

21
 7 L'organisation des connaissances
 8 Dynamiques de la science
o 8.1 Continuisme et discontinuisme
o 8.2 Internalisme et externalisme
 9 Institutions
 10 Courants épistémologiques et auteurs
 11 Annexes
o 11.1 Articles connexes
 11.1.1 Par champ scientifique
o 11.2 Liens externes
o 11.3 Bibliographie
o 11.4 Sources
o 11.5 Notes et références

Définition

L'épistémologie serait selon la « tradition philosophique francophone », une


branche de la philosophie des sciences qui « étudie de manière critique la
méthode scientifique, les formes logiques et modes d'inférence utilisés en
science, de même que les principes, concepts fondamentaux, théories et résultats
des diverses sciences, afin de déterminer leur origine logique, leur valeur et leur
portée objective »1. Dans la tradition philosophique anglo-saxonne,
l'épistémologie se confondrait avec la théorie de la connaissance, et ne porterait
donc pas spécifiquement sur la connaissance scientifique. Il arrive néanmoins
que ce terme soit ici utilisé comme synonyme de « philosophie des sciences »2.
La distinction entre ces différentes acceptions, et notamment le rapport de
l'épistémologie à la philosophie des sciences, n'est cependant pas clairement
établie3. D'autre part, l'épistémologie « continentale » peut également traiter
d'objets non scientifiques4. Le mot est également employé parfois pour désigner
telle ou telle théorie de la connaissance. La différence entre ces deux traditions
portera donc sur l'attention portée à la connaissance scientifique plutôt qu'à la
connaissance générale.

Jean Piaget5 proposait de définir l’épistémologie « en première approximation


comme l’étude de la constitution des connaissances valables », dénomination
qui, selon Jean-Louis Le Moigne, permet de poser les trois grandes questions :

 Qu’est ce que la connaissance (la question gnoséologique) ?


 Comment est-elle constituée ou engendrée (la question méthodologique) ?
 Comment apprécier sa valeur ou sa validité ?

L'enquête épistémologique peut ainsi porter sur plusieurs aspects : les modes de
production de la connaissance, les fondements de cette connaissance, la
22
dynamique de cette production. Plusieurs questions en découlent : qu'est ce
qu'une connaissance ? Comment est-elle produite? Comment est-elle validée?
Sur quoi se fonde-t-elle? Comment les connaissances sont-elles organisées?
Comment évoluent-elles (et notamment, progressent-elles?)?

À cela s'ajoute parfois une dimension normative de l'analyse. Il ne s'agit plus


seulement de décrire la connaissance, mais de définir ce qui constitue une
« bonne » connaissance.

Enfin, on doit distinguer une épistémologie générale, qui porte implicitement


l'idée d'une certaine unité de la science, des épistémologies particulières, qui
reposent sur l'idée d'une pluralité, parfois présentée comme irréductible, des
différentes sciences. On parle alors d'épistémologie de la physique, de la
biologie, des sciences humaines, ...

Longtemps, l'épistémologie a porté sur le « contenu » de la science, la science


en tant qu'institution humaine étant laissée à d'autres disciplines, notamment la
sociologie. La question sur la nature de la science se confondait alors avec celle
sur la nature de la connaissance scientifique. Ces dernières décennies, ce partage
est devenu moins évident, sous l'effet d'une part de certains courants de la
sociologie réclamant un « droit de regard » sur ce contenu, sous l'influence
d'autre part de certains épistémologues qui jugent nécessaire, pour mieux
comprendre la connaissance scientifique, de porter attention aux dimensions
concrètes de l'activité scientifique.

Usage du mot

Le mot est un emprunt à l'anglais epistemology, formé en 1856 par le fichtéen


James Frederick Ferrier6 pour traduire l'allemand Wissenschaftslehre7. On a
considéré néanmoins - peut-être à tort - que la problématique de Fichte était
éloignée de la problématique kantienne et l'on a attribué le concept
d'épistémologie à Eduard Zeller, lequel utilise le mot allemand
Erkenntnistheorie (« théorie de la connaissance ») dans un sens kantien8.

C'est dans cette acception que le mot épistémologie apparaît pour la première
fois en France en 19019, dans la traduction de l'introduction de l'Essai sur les
fondements de la géométrie de Bertrand Russell, notamment de ce passage :
« Ce fut seulement de Kant, le créateur de l'Épistémologie, que le problème
géométrique reçut sa forme actuelle »10.

À la traduction de l'œuvre de Russell est annexé un Lexique philosophique


rédigé par Louis Couturat, qui en son entrée Epistémologie donne à ce mot le
sens d'une « théorie de la connaissance appuyée sur l'étude critique des Sciences,
ou d'un mot, la Critique telle que Kant l'a définie et fondée »11. Couturat

23
introduirait ainsi une première confusion entre théorie de la connaissance et
philosophie des sciences12. Cette évolution n'est pas sans conséquence13.

Histoire

L'épistémologie moderne tire donc son origine dans la philosophie de la


connaissance kantienne. Mais elle puise également à des traditions plus
anciennes, dont la cartésienne. C'est au début du XXe siècle que l'épistémologie
se constitue en champ disciplinaire autonome.

Epistémologie cartésienne

Dans le Discours de la méthode, Descartes pose 4 règles qu'il doit appliquer afin
de mener sa réflexion. La troisième de ces règles affirme que la simplicité a une
valeur épistémologique.

« Construire par ordre mes pensées, en commençant par les objets les plus
simples et les plus aisés à connaître pour monter peu à peu, comme par
degrés, jusqu'à la connaissance des plus composées ».

Epistémologie kantienne

Article détaillé : Kant.

Kant offre un changement de perspective radical vis-à-vis de l'empirisme : c'est


une véritable révolution épistémologique, qu'il qualifie lui-même par
l'expression célèbre de « révolution copernicienne ». Hume avait déjà placé le
sujet au centre de la connaissance. Kant,lui, va jusqu'à affirmer que la véritable
origine de la connaissance est dans le sujet et non dans une réalité par rapport à
laquelle nous serions passifs.

Il reprend certains principes des empiristes « Ainsi, dans le temps, aucune


connaissance ne précède l'expérience, et toutes commencent avec elle » explique
t-il dans Critique de la raison pure.

Ainsi pour Kant, note Claude Mouchot dans Méthodologie économique, « l'objet
en soi, le noumène, est et restera inconnu » et « nous ne connaitrons jamais que
les phénomènes » et en cela Kant reste très actuel. Selon les termes de Kant
(Critique de la raison pure) « il n’y a que les objets des sens qui puissent nous
être donnés (...) ils ne peuvent l’être que dans le contexte d’une expérience
possible ».

Actuel, Kant le reste également par sa « reconnaissance de l'existence de cadres


(spatio-temporels), au travers desquels le réel se présente à nous » écrit encore

24
Claude Mouchot. Toutefois, le caractère a priori de ces cadres ne peut plus être
accepté aujourd'hui, suite notamment à la remise en cause de la notion d'espace-
temps de la mécanique classique (seule existante au temps de Kant) par la
mécanique relativiste. Tout au moins pouvons-nous considérer ces cadres
comme étant construits par le sujet, ce qui est le point de vue du
constructivisme.

Le tournant positiviste logique

Article détaillé : Positivisme logique.

Épistémologie contemporaine

Critiques du positivisme logique

Quine et l'« épistémologie naturalisée »

Avec l'article Deux Dogmes de l'empirisme, Willard Van Orman Quine critique
deux aspects centraux du positivisme logique. Le premier est la distinction entre
vérités analytiques et vérités synthétiques : il y aurait des propositions vraies
indépendamment des faits, qui seraient vraies en vertu de leur seule
signification. Le second dogme, le réductionnisme, est la théorie selon laquelle
les énoncés doués de sens peuvent être reformulés en énoncés portant sur des
données de l'expérience immédiate (dans ce cas un énoncé analytique serait un
énoncé confirmé par l'expérience dans tous les cas).

Ce texte constitue une attaque en règle contre l'héritage théorique du positivisme


logique. Comme le note Quine lui-même, "Another effect is a shift toward
pragmatism" : Les deux dogmes de l'empirisme marque le grand retour du
pragmatisme dans la philosophie américaine, au sein même du mouvement
intellectuel qui l'avait évincé de la scène intellectuelle : la philosophie analytique
(sous sa forme empiriste).

Avec l'« épistémologie naturalisée », Quine, dans un point de vue naturaliste,


affirme que la philosophie de la connaissance et des sciences constituent elles-
mêmes une activité scientifique, corrigée par les autres sciences, et non pas une
« philosophie première » fondée sur une métaphysique.

Bertrand Russell

Bertrand Russell introduit la notion de knowledge by acquaintance


(Connaissance directe) et knowledge by description (Connaissance par
description) en philosophie pour désigner deux types fondamentaux de
connaissance.

25
Pierre Duhem

Opposé à toute interprétation matérialiste et réaliste de la chimie et de la


physique, Pierre Duhem proposa une conception qu'on qualifiera ensuite
d'« instrumentaliste » de la science dans La Théorie physique. Son objet et sa
structure (1906). Selon l'instrumentalisme, la science ne décrit pas la réalité au-
delà des phénomènes mais n'est qu'un instrument le plus commode de
prédiction.

La phénoménologie de Husserl

Pour Edmund Husserl, la phénoménologie prend pour point de départ


l'expérience en tant qu'intuition sensible des phénomènes afin d'essayer d'en
extraire les dispositions essentielles des expériences ainsi que l'essence de ce
dont on fait l'expérience.

Article détaillé : phénoménologie.

Systémique et constructivisme épistémologique

Avec la publication en 1967 de l'encyclopédie de la Pléiade et notamment de


l’article ‘’Logique et connaissance scientifique’’, Jean Piaget opère une
renaissance du constructivisme épistémologique, notamment à partir des
travaux de Bachelard14, renaissance que préfigurait déjà les critiques du
positivisme logique évoquées ci-dessus.

Ces travaux inspireront plusieurs auteurs liés à la systémique dont Paul


Watzlawick publient les textes en 1980 dans l’ouvrage L’invention de la réalité
– Contributions au constructivisme15 ou encore Edgar Morin qui , note Jean-
Louis Le Moigne14, offre au constructivisme son ‘’discours de la méthode’’ avec
‘’La Méthode’’16 ; tandis que Herbert Simon renouvelle la classification des
sciences avec ‘’Les sciences de l’artificiel’’17.

Les questions épistémologiques

On retrouve dans ces différentes questions des aspects descriptifs et normatifs.

Contexte de découverte et contexte de justification : Pendant longtemps, la


question de la découverte ne relève pas de l'épistémologie, mais au mieux de la
psychologie. Les choses changent progressivement.

La production des connaissances

26
Quelles méthodes? Quelles formes de validations? La question de l'induction, de
la déduction, ... On trouve ici la question de l'explication, de l'interprétation, ...

Un exemple volontiers cité18 est l'étonnement des mathématiciens grecs devant


le fait que la diagonale du carré ne puisse correspondre à aucune fraction
irréductible p/q, à une époque où on n'imaginait de nombres que rationnels
(l'irrationalité de pi était encore inconnue). En effet, on aurait eu alors (p/q)² = 2,
soit p² = 2 q². Cela aurait impliqué que p² soit pair, soit p = 2k ; mais en ce cas p²
aurait valu 4k² et la fraction p/q n'aurait pas été irréductible, ce qui était contraire
à l'hypothèse.

La nature des connaissances

Le problème de la démarcation (identifié comme étant le problème de Kant par


Karl Popper19) s'articule à celui de la justification des théories soit selon une
méthode inductive, soit une méthode hypothético-déductive (sur ce point, un
philosophe comme Popper pense que les théories scientifiques ne peuvent être
justifiées, même sur la base d'un très grand nombre d'observations empiriques,
mais seulement évaluées à partir de tests dont la logique consiste à tenter de
mettre à l'épreuve les connaissances scientifiques). Toutefois, ce problème
d'épistémologie concerne plus directement la question de savoir comment
identifier ou démarquer les théories scientifiques des théories métaphysiques.
C'est aussi le problème des fondements de la connaissance scientifique, ainsi que
la question du réalisme/antiréalisme, et celui du rapport au vrai. Ce qui mène
également à la question du relativisme. Il y a aussi la question de l'unité de la
science.

L'organisation des connaissances

Théorème, Théories, modèles, hypothèses, lois, principes...

L'évolution des connaissances

Continuisme et discontinuisme, internaliste et externalisme. Ce qui renvoie à


nouveau au problème du relativisme.

La production de la connaissance

Induction

L'induction consiste à se fonder sur l'observation de cas singuliers pour justifier


une théorie générale ; c'est l'opération qui consiste à passer du particulier au
général. Le problème est de savoir s'il peut être épistémiquement valide de
croire que les théories universelles sont justifiées voire vérifiées par la seule

27
prise en compte d'un grand nombre d'observations singulières passées. Par
exemple, nous avons observé que le soleil, jusqu'ici, se lève le matin. Mais rien
ne semble justifier notre croyance au fait qu'il se lèvera encore demain. Ce
problème avait été jugé insoluble par Hume, pour lequel notre croyance relevait
de l'habitude consistant à voir telle cause susciter tel effet, ce qui ne présume pas
que ce soit le cas dans la réalité. Cette position non réaliste fut critiquée par Kant
et Popper pensant possible d'atteindre une certaine objectivité dans les théories
empiriques.

Il existe des formes très variées de théories de l'induction allant des plus naïves
aux plus sophistiquées (tout comme pour la théorie de la réfutation).

Vérification

Article détaillé : Théorie vérificationniste de la signification.

Les philosophes positivistes fondateurs du Cercle de Vienne, pensaient que le


seul critère de démarcation qui puisse être valide, (afin d'éliminer la
métaphysique), était la vérifiabilité des énoncés singuliers, seules données des
sens capables de permettre la vérification des théories générales de la science, à
la condition qu'elles soient suffisamment nombreuses et bien observées.

Pour Karl Popper, adversaire des thèses et du projet du Cercle de Vienne,


aucune théorie scientifique générale n'a jamais pu être établie par une
quelconque forme d'induction, donc être vérifiée ; et aucune théorie scientifique
n'est logiquement ou même empiriquement vérifiable si l'on admet sous ce terme
la notion de certitude ou de vérification avec certitude. Karl Popper soutient
même qu'une théorie ne peut être scientifique que si elle est potentiellement
fausse (réfutable), et même fausse en comparaison de la vérité certaine à
laquelle elle prétendrait se rapprocher.

Dans le domaine de la science empirique, la vérification devrait plutôt être


assimilable à la corroboration (Karl Popper), c'est-à-dire à une forme relative et
non absolue de vérité, toujours dépendante des tests scientifiques qui ont pu être
réalisés par une communauté de chercheurs. Ainsi, en science, la vérification des
théories seraient donc toujours relative à des tests eux-mêmes relatifs à d'autres
tests précédents et toujours améliorables, et jamais absolue.

Falsification

Article détaillé : Réfutabilité .

Le terme de falsification bien qu'impropre est assimilé à celui de réfutation.


Rendu célèbre par l'œuvre de Karl Popper, ce terme implique la possibilité

28
d'évaluer empiriquement les énoncés généraux de la science par l'intermédiaire
de tests. Seules les théories formulées de manière à pouvoir permettre la
déduction logique d'un énoncé particulier capable potentiellement de les falsifier
(ou réfuter), peuvent, pour Karl Popper, être considérées comme scientifiques et
non métaphysiques.

Mais Popper propose qu'il existe deux niveaux de falsifiabilité. La falsifiabilité


logique, et la falsifiabilité empirique ; sachant qu'un énoncé falsifiable d'un point
de vue logique ne l'est peut-être pas d'un point de vue empirique. Par exemple,
l'énoncé "tous les hommes sont mortels" est logiquement falsifiable, mais
empiriquement infalsifiable puisque aucun être humain ne pourrait vivre assez
vieux pour vérifier qu'un homme est immortel.

Karl Popper a toujours soutenu qu'aucune falsification empirique ne pouvait être


certaine, car il est toujours possible de sauver une théorie d'une falsification par
l'adoption de stratagèmes ad hoc. En conséquence, pour Popper, le critère de
démarcation reposant sur la falsification, doit avant tout être un critère
méthodologique puisque tout reposerait, en dernier ressort, sur les décisions de
la communauté scientifique, pour accepter ou rejeter la valeur d'un test, d'une
falsification ou d'une corroboration20.

Les critiques holistes

La nature des connaissances

C'est notamment la question de la démarcation.

Falsificationnisme

Karl Popper critique le raisonnement par induction. Ce dernier a certes une


valeur psychologique mais pas une valeur logique. De nombreuses observations
cohérentes ne suffisent pas à prouver que la théorie qu'on cherche à démontrer
soit vraie. A contrario, une seule observation inattendue suffit à falsifier une
théorie. Ainsi, mille cygnes blancs ne suffisent pas à prouver que tous les cygnes
sont blancs ; mais un seul cygne noir suffit à prouver que tous les cygnes ne sont
pas blancs. Voir Paradoxe de Hempel.

Il en résulte qu'une théorie ne peut être « prouvée » mais seulement considérée


comme non invalidée jusqu'à preuve du contraire. Partant de là, on peut
distinguer :

 les théories impossibles à réfuter (par l'observation ou l'expérience)


 les théories qui peuvent être invalidées.

29
Seules les théories potentiellement réfutables (celles associables à des
expériences dont l'échec prouverait l'erreur de la théorie) font partie du domaine
scientifique; c'est le « critère de démarcation des sciences » (entendre par là : des
sciences dures).

Relativisme

Article détaillé : anarchisme épistémologique.

Paul Feyerabend observait à l'exemple de la naissance de la mécanique


quantique que souvent l'avancement scientifique ne suit pas de règles strictes.
Ainsi, selon lui, le seul principe qui n'empêche pas l'avancement de la science
est « a priori tout peut être bon » (ce qui définit l'anarchisme épistémologique).
Il critique donc l'aspect réducteur de la théorie de la réfutabilité et défend le
pluralisme méthodologique. Il existe selon lui une très grande variété de
méthodes différentes adaptées à des contextes scientifiques et sociaux toujours
différents. De plus, il remet en question la place que la théorie de la réfutabilité
accorde à la science, en en faisant l'unique source de savoir légitime, et le
fondement d'une connaissance universelle qui dépasse les clivages culturels et
communautaires. Enfin, Feyerabend critique le manque de pertinence pour
décrire correctement la réalité du monde scientifique et des évolutions des
discours et pratiques scientifiques.

Son œuvre principale, Contre la méthode. Esquisse d'une théorie anarchiste de


la connaissance, fut reçue très négativement par la communauté scientifique, car
elle accusait la méthode scientifique d'être un dogme et soulevait la question de
savoir si la communauté doit être aussi critique par rapport à la méthode
scientifique que par rapport aux théories qui en résultent.

L'organisation des connaissances

Dynamiques de la science

Continuisme et discontinuisme

Bachelard et l'« obstacle épistémologique » : Gaston Bachelard définit, en 1934,


dans un article intitulé La formation de l'esprit scientifique, ce dernier comme
étant « la rectification du savoir, l'élargissement des cadres de la
connaissance ». Pour lui, le scientifique doit se dépouiller de tout ce qui
constitue les « obstacles épistémologiques internes », en se soumettant à une
préparation intérieure afin que sa recherche progresse vers la vérité. La notion
d'obstacle épistémologique est ce qui permet de poser le problème de la
connaissance scientifique : c'est à partir du moment où celui-ci est surmonté,
donnant lieu à une « rupture épistémologique », que l'on atteint le but

30
recherché. Les obstacles sont, pour Bachelard, non seulement inévitables, mais
aussi indispensables pour connaître la vérité. Celle-ci en effet n'apparaît jamais
par une illumination subite, mais au contraire, après de longs tâtonnements,
« une longue histoire d'erreurs et d'errances surmontées ».

Bachelard dénonce l'opinion que nous laisse l'expérience empirique et son


influence sur la connaissance scientifique : « le réel n'est jamais ce que l'on
pourrait croire, il est toujours ce qu'on aurait dû penser », dit-il. « La science
s'oppose formellement à l'opinion : l'opinion ne pense pas, elle traduit des
besoins en connaissances. » La connaissance scientifique consistera à revenir
sans arrêt sur le déjà découvert.

Mettant l'accent sur la discontinuité dans le processus de la construction


scientifique, Thomas Kuhn discerne des périodes relativement longues pendant
lesquelles la recherche est qualifiée de « normale », c'est-à-dire qu'elle s'inscrit
dans la lignée des paradigmes théoriques dominants, périodes pendant lesquelles
de brefs et inexplicables changements constituent une véritable « révolution
scientifique ». Le choix entre les paradigmes n'est pas fondé rationnellement.
Cette posture implique que chaque paradigme permet de résoudre certains
problèmes et, de là, les paradigmes seraient incommensurables.

Internalisme et externalisme

La vision internaliste ne prend en compte que l’histoire des idées scientifiques,


de découverte en découverte : les savants sont un monde à part, qui progresse
indépendamment du reste. La science se nourrit d’elle-même. Il est ainsi
possible de comprendre l’histoire des sciences sans se référer au contexte
culturel. L’important, ce sont les étapes de progression de l’histoire scientifique.

La vision externaliste rend au contraire la science dépendante de l’économie, de


la psychologie, etc. Cela amène à des conséquences différentes suivant le
contexte21.

Institutions

En France, l'épistémologie a le statut institutionnel d'une discipline à part,


distincte de la philosophie et de l'histoire : elle constitue ainsi la section 72 du
CNU. Elle y occupe plusieurs dizaines de laboratoires, dont notamment l'IHPST,
le CREA, REHSEIS, le Centre François Viete, les Archives Henri Poincaré, le
Centre Georges Canguilhem, l'Institut Jean Nicod, l'IRIST, l'unité Savoirs et
Textes, ou le GRS, qui regroupent des centaines de chercheurs. Elle intéresse
plus d'une vingtaine d'écoles doctorales et des sociétés savantes comme la SPS
ou la SFHST ou des listes de diffusion comme Theuth.

31
Bibliographie

 Gaston Bachelard: Le nouvel esprit scientifique 1968. (ISBN


2080810561)
 Jean C. Baudet, Mathématique et vérité, L'Harmattan, Paris, 2005.
 Alan Chalmers, Qu'est-ce que la Science ? - Popper, Kuhn, Lakatos,
Feyerabend, La Découverte, 1987, (ISBN 2707117137)
 Pierre Duhem: Sozein ta phainomena. Essai sur la Notion de Théorie
physique de Platon à Galilée ISBN (ISBN 2711608050)
 Paul Feyerabend Contre la méthode
 Angèle Kremer-Marietti, Philosophie des sciences de la nature, PUF,
1999; L'Harmattan, 2007.
 Alexandre Koyré, Études galiléennes, Paris, Hermann, 1939
 Alexandre Koyré, Du monde clos à l’univers infini, 1957 (ISBN
2070712788) ; Études d'histoire de la pensée scientifique.
 Thomas Samuel Kuhn: La structure des révolutions scientifiques (ISBN
2080811150).
 Imre Lakatos Preuves et réfutations
 Dominique Lecourt, L’épistémologie historique de Gaston Bachelard
(1969), 11e éd. augmentée, Vrin, Paris, 2002.
 Dominique Lecourt, Dictionnaire d'histoire et philosophie des sciences
(1999), 4e éd. Quadrige/PUF, Paris, 2006.
 Dominique Lecourt, La philosophie des sciences (2001), 5e éd. Que sais
je ?/PUF, Paris, 2010
 Jean-Louis Le Moigne, Les Épistémologies Constructivistes, Que sais-
je ?, PUF.
 Edgar Morin, La Méthode (6 volumes), La Connaissance de la
connaissance (t. 3), 1986, Le Seuil, Nouvelle édition, coll. Points
 Jean Piaget Introduction à l'épistémologie génétique, Presses
universitaires de France, 1950, Paris : Tome I: La pensée mathématique;
Tome II: La pensée physique; Tome III: La pensée biologique, la pensée
psychologique et la pensée sociale.
 Henri Poincaré: La Science et l'Hypothèse (ISBN 2080810561); Science
et Méthode (ISBN 2841741494)
 Karl Popper: Logique de la découverte scientifique ISBN (ISBN
2228880108), Misère de l'historicisme, La connaissance objective ISBN
(ISBN 2080814052)
 Jules Vuillemin, La philosophie de l'algèbre, PUF, 1962.
 Pierre Wagner, dir., Les Philosophes et la science, Gallimard, folio-essais,
Paris, 2002, rééd. 2005, 2008.

Sources

32
 Jean-Michel Besnier, Les Théories de la Connaissance, PUF, coll. « Que
sais-je ? », Paris, 2005 (ISBN 978-2-13-055442-4)
 Jean Dhombres, Angèle Kremer-Marietti: "L'épistémologie : état des
lieux et positions" Ed.: Ellipses Marketing, 2006 (ISBN 2729828370)

Notes et références

1. ↑ Nadeau, p. 209
2. ↑ Wagner, p. 42
3. ↑ Soler, p. 29
4. ↑ On peut ainsi signaler l'existence d'une "épistémologie des affects"
développée par un philosophe français, Pascal Nouvel
5. ↑ Cité par Jean-Louis Le Moigne dans son « Que sais-je » Les
Épistémologies Constructivistes.
6. ↑ J. F. Ferrier, Institutes of Metaphysics, 1854, p. 64. Epistemology or
Theory of Knowing
7. ↑ Emmanuel Renault, Hegel, la naturalisation de la dialectique, Paris,
Vrin, p. 286
8. ↑ Renault, p. 287
9. ↑ Dictionnaire historique de la langue Française, p. 710
10.↑ « It was only through Kant, the creator of modern Epistemology, that
the geometrical problem received a modern form » (Bertrand Russell, An
Essay on the Foundations of Geometry [archive], Routledge, 1996
[1897], p. 11, trad. in Wagner, p. 39)
11.↑ reproduit in Wagner, p. 40
12.↑ Wagner, p. 39
13.↑ Wagner, p. 41
14.↑ a et b Jean-Louis Le Moigne, Le Constructivisme, tome 1
15.↑ L'invention de la réalité, Contributions au constructivisme, 1981.
Plusieurs auteurs sous la direction de Paul Watzlawick, notamment Ernst
von Glasersfeld et Heinz von Foerster, trad. Seuil, 1985 réed. 1984 et trad.
1988
16.↑ …….
17.↑ The science of the artificial, (1969), MIT Press, traduction et postface
par Jean-Louis Le Moigne, La science des systèmes, science de
l’artificiel, (1974), EPI éditeurs, Paris. Réédition chez Éd. Dunod en
1991. Réédité en 2004 sous le nom de Les sciences de l'artificiel, Éditions
Gallimard, Coll. Folio Essais
18.↑ Entre autres dans le volume de la Pléiade consacré à l'épistémologie
19.↑ Karl Popper. Les deux problèmes fondamentaux de la théorie de la
connaissance. Hermmann
20.↑ Karl Popper. Le réalisme et la science. Hermann

33
21.↑ Voir ou revoir la série télévisuelle de Jacob Bronowski "L’évolution de
l’homme" ("The Ascent of Man") de la BBC qui l’a rendu célèbre auprès
du grand public cultivé, disponible aussi en francophonie
22.↑ Maître de conférences en informatique et en épistémologie, IUFM de
Poitou-Charentes
23.↑ Psychanalyste et intervenant en argumentation à l'Université de
Provence

[enrouler]

v · d · m

Philosophie

Philosophie occidentale · Philosophie orientale


Indienne (Bouddhisme) • Chinoise • Grecque
Antique
(Hellénistique) • Juive
Histoire Médiévale Chrétienne (Scolastique) • Islamique • Japonaise
Moderne Empirisme • Rationalisme
Contemporaine Analytique • Continentale
Logique • Métaphysique • Épistémologie • Éthique • Politique •
Esthétique
Branches Mathématique • Sciences • Droit • Art •
Philosophie de Action • Nature • Histoire • Religion •
Lumières
Anarchisme • Aristotélisme • Communisme • Cynisme •
Déconstructionnisme • Déisme • Déontologie • Dualisme • Égoïsme •
Épicurisme • Existentialisme • Féminisme • Fonctionnalisme •
Écoles de Scepticisme • Réalisme • Idéalisme • Objectivisme • Libéralisme •
pensée Socialisme • Nihilisme • Humanisme • Phénoménologie •
Platonisme • Naturalisme • Transhumanisme • Relativisme •
Thomisme • Utilitarisme • Atomisme • Herméneutique • Stoïcisme •
Matérialisme • Spiritualisme • Positivisme
Portail de la philosophie

 Portail de la philosophie

34

Vous aimerez peut-être aussi