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La culture, élément-clé

de la gestion stratégique

Stratégie

Structure Culture

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Office féd. du personnel Monique Gudet


3003 Berne Gestion stratégique: stratégie-structure-culture - imprimé le: 13.03.02
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Culture Comment définir la culture ?

Du point de vue étymologique, le terme de culture peut avoir une signification biolo-
gique ou sociologique. L'idée commune aux deux disciplines est cependant qu'il
s'agit d'un processus de soutien à de jeunes organismes en créant un environne-
ment favorable à leur croissance.

En termes sociologiques, la culture se traduit par un processus d'apprentissage;


chaque nouveau-né arrive dans un environnement déjà culturellement structuré et
apprend par l'observation et l'imitation à s'intégrer à son monde.

Dans ce sens, la culture a une histoire et est transmise de génération en génération,


formant la personnalité et l'identité des gens, influençant leurs actions et leurs va-
leurs. Chez l'individu, ce phénomène se produit de façon inconsciente lors de la for-
mation de l'opinion, s'exprime par sa manière d'être et par ses jugements de valeurs
et peut être observé directement dans son comportement. L'individu peut donc être
considéré comme le "produit" de la culture de son environnement, pour ainsi dire
son "output".

Par son comportement, l'individu exerce de son côté une influence sur son environ-
nement immédiat : d'abord sur son environnement personnel, mais également dans
le cadre professionnel. On peut donc affirmer que l'individu est lui-même un support
de sa culture, il offre un apport culturel, c'est-à-dire un "input". Ainsi, la culture est
transmise au fil des générations tout en restant relativement stable.

De même, la culture d'entreprise ou d'organisation est un système de valeurs


s'inscrivant dans le temps, admis et reproduit par tous les collaborateurs *) ou
membres.
Cette identification commune plonge ses racines dans l'évolution de l'entreprise ou
de l'organisation, dans la collaboration, dans les expériences et dans les conditions
de travail vécues en commun.

La culture d'administration désigne la culture d'entreprise propre aux administra-


tions. Lorsqu'il s'agit d'un seul office, on parle de culture d'office.

*) ce terme englobe aussi les collaboratrices...


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Les particularités de la culture d'administration

Une administration est un microcosme dont l'environnement ainsi que la structure


interne sont en général plus homogène que dans l'économie privée.

Les caractéristiques de l'administration fédérale qui marquent profondément sa


culture sont les suivantes :

1. L'histoire
La fondation d'un office se fait par décision parlementaire et non par décision d'un
individu fondateur.

2. Les tâches
Mandats officiels, parfois situation monopolistique, souvent un office est l’instance la
plus élevée du pays dans son domaine.

3. L’environnement
Un office n’est généralement pas soumis à la concurrence ni à l’économie de mar-
ché.

4. La structure
L’office est structuré selon les domaines traités et dans un ordre hiérarchique.

5. Les normes
Le fonctionnement de l'administration est réglé par les presciptions légales et dirigé
par le parlement au moyen du budget.
• Une norme qui en découle est l'interdiction de créer des réserves, privant ainsi les
directions d'office d'un important outil de gestion.
• La Loi des fonctionnaires garantit une gestion du personnel homogène et égalitaire
mais constitue un frein pour une gestion flexible des ressources humaines.
• Un autre exemple : l'attribution des places de travail. La surface des bureaux est
octroyée selon la classe de traitement et non selon les besoins réels de l'intéres
sé(e) !

6. Le comportement dans l'organisation


En tant qu'organe exécutif et soutien du gouvernement, l'administration fédérale est
surtout axée sur la conservation et la reproduction du système. Contrairement à une
entreprise privée, la croissance d'un office s'exprime par le nombre de postes et du
budget alloués. Par conséquent, un office a du succès lorsqu'il gère un nombre très
élevé de postes et le plus gros budget possible. De manière implicite, le parlement
certifie à cet office que les tâches qu'il remplit (les produits ou services) sont consi-
dérées comme étant particulièrement importantes, difficiles ou onéreuses.
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7. Croyances et valeurs
Les croyances et valeurs caractéristiques de la culture de l'administration fédérale
s'expriment particulièrement dans les éléments suivants :

• Continuité
Le système des valeurs est surtout axé sur la continuité des objectifs de
l'administration et sur le maintien de l'appareil administratif.
Le règlement des promotions gratifie les fonctionnaires qui s'accrochent à leur
poste et empêche ainsi la mobilité, car la durée de service est considérée
comme un élément important de la qualification.

• Indépendance à l'égard des individus, rejet de l'individualisme


La responsabilité est répartie sur beaucoup de personnes différentes.
De cette façon, les tâches ingrates passent souvent de l'un à l'autre, surtout
lorsqu'il s'agit de prendre un décision.

• Morale
Un fonctionnaire ne se laisse pas corrompre, sa vie se déroule dans le
respect des valeurs et des limites imposées par la société.

• Précision
Les fonctionnaires doivent être contrôlés ou se contrôler mutuellement.
La tolérance aux erreurs est mince, que ce soit dans la collaboration ou dans
l'évaluation des performances. Ainsi, la fonction de contrôle peut être consi-
dérée comme le fil rouge qui traverse un office de haut en bas.

8. L'environnement

A l'image de toute autre organisation, l'administration fédérale est intégrée dans dif-
férents systèmes :
Un système social, politique, législatif, économique et technologique. Ces systèmes
dirigent et influencent l'accomplissement des tâches administratives et par consé-
quent le besoin de ressources.

De ce fait, chaque office présente un champ cognitif différent et développe ses ob-
jectifs et stratégies, ses structures et ses outils selon ses besoins spécifiques.
Lorsqu'un office est supprimé en tant que tel et intégré dans une autre unité d'orga-
nisation, la rencontre de deux systèmes différents et souvent ressentie douloureu-
sement, remettant ainsi en cause la collaboration efficace tant souhaitée.

9. La personnalité support de culture („le pilier“)


Les ressources humaines sont évidemment sélectionnées par rapport aux tâches et
à la stratégie des offices. Les collaborateurs sont issus des milieux les plus divers,
leurs habitudes de travail sont différentes, ainsi que leurs croyances et valeurs.
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Au fil des ans et de la collaboration, ces croyances et valeurs sont harmonisées par
le contact quotidien entre individus. Ce processus réussit d’autant mieux que les sys-
tèmes de valeur des gens sont proches.

Au cours de cette harmonisation, certaines personnes prennent plus d’influence que


d’autres, par exemple les individus d’un niveau hiérarchique élevé. Ils déterminent
par leur comportement et leur appréciation des performances, quelles sont les quali-
tés qui ont „de la valeur“ et lesquelles en ont moins ou pas du tout.

Ces croyances sont intégrées par les collaborateurs qui s’efforcent de correspondre
à l’idéal ainsi désigné. Par conséquent, ils confirment les croyances du supérieur par
leur propre comportement.

Une question que l’on pose aux collaborateurs lors d’une analyse de la culture
d’office est la suivante: „que doit-on faire dans votre office pour avoir du succès ?
Quelles sont les personnes particulièrement appréciées et pourquoi ?“ Chacun vou-
drait avoir du succès. Pour cette raison, les collaborateurs s’orientent aux croyances
exprimées de façon implicite ou explicite par les cadres. Dans un flux continu, la
culture est ainsi formée et confirmée. Lorsque ce processus est très régulier, il ren-
force la culture, parfois à tel point qu’elle repousse ou freine les changements intro-
duites dans l’office.

10. Cultures hybrides

De nombreux cas de culture hybride peuvent être observés dans l’administration fé-
dérale, soit en raison de fusions d’offices, soit à cause de l’éloignement géographi-
que de certaines divisions, de tâches différentes nécessitant un autre profil d’exi-
gences, ou d’un changement dans un niveau hiérarchique. Un nouveau directeur
peut (mais ne doit pas !) donner des impulsions entraînant un changement de
culture radical. Si ce changement ne pénètre pas jusqu’au dernier niveau du person-
nel, une culture hybride se développera. Les croyances et valeurs anciennes seront
reproduites et les nouvelles ne seront pas acceptées, ignorées ou contournées.
Lors du développement d’une stratégie, il convient donc d’être très attentif aux
cultures hybrides.
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Stratégie
Interaction entre
stratégie
structure et
Structure Culture culture

Comme toute entreprise, l’administration fédérale se situe de plus en plus dans un


champ de tensions entre deux stratégies sociopolitiques de base, à savoir le but lu-
cratif et le but social, ou plutôt : atteindre un objectif social ou atteindre un but lucratif
au travers d’un objectif social.

L’administration fédérale est un système social qui transpose des problèmes de so-
ciété en décisions et les exécute. L’environnement prend donc une très grande in-
fluence, d’un côté le champ politique et de l’autre, la clientèle, c’est-à-dire la popula-
tion.

Chaque direction d’office doit se référer à son mandat légal et politique en tant que
source de sa formulation de stratégie. Ensuite seulement, elle répartit ses res-
sources en conséquence.

Au niveau de l’office, la stratégie englobe la coordination entre les orientations stra-


tégiques de base et les domaines d’activité. Il s’ensuit le choix des structures et des
processus.

La stratégie de l’office définit donc les objectifs généraux et la marche à suivre.


Par conséquent, chaque office possède ses propres orientations stratégiques qui lui
permettent de régler ses processus internes et d’exercer à son tour une influence sur
son environnement.

Les orientations stratégiques de base s’inscrivent dans la continuité et déterminent


ainsi la tendance à la stabilité. Un des postulats les plus importants de la pensée
systémique est justement qu’à la longue, chaque système a tendance à se stabiliser.
Cette stabilité est un élément important de la culture d’administration car le rôle de
l’office est l’action dans la pérennité.
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Les stratégies intentionnelles


et les stratégies émergentes
Le schéma ci-dessous démontre l’influence réciproque entre la stratégie et la culture.
Le système de pilotage (la direction d’office) développe une stratégie, c’est la stra-
tégie intentionnelle. En réalité, la stratégie est plus ou moins suivie, selon son de-
gré d’affinité avec la culture. Souvent, ce n’est pas le cas et les collaborateurs tra-
duisent les règles et décisions autrement ou ne les appliquent pas.

Le comportement organisationnel est dirigé d’une part par la culture de l’organi-


sation, de l’autre, il la renforce (l’individu en tant que produit et reproducteur de la
culture). En pratique, les collaborateurs inventent souvent des stratégies contraires,
pour contourner des règles; on les nomme des stratégies émergentes, capables
d’invalider complètement une stratégie „officielle“.

Exemples de stratégies émergentes


Stratégies et symboles de statut.
Les surfaces de bureaux sont rarement disponibles et font l’objet d’innombrables
stratégies de la part des collaborateurs. Dans une certaine section, il y avait des bu-
reaux individuels et un bureaux à deux personnes. Ce bureau était traditionnellement
attribué à la dernière personne venue. Dans ce cas de figure, la deuxième place de
travail n’avait pas été occupée pendant un certain temps et était considérée comme
réserve pour une éventuelle nomination. Un beau jour, le deuxième pupitre avait
„migré“ aux archives. Ainsi, le bureau devenait „individuel“.

Les équipements de bureau, par ex. PC, meubles, lampes, rideaux, tableaux (du
fonds culturel ...) font souvent l’objet de stratégies personnelles et constituent des
symboles représentatifs du rang de leur „propriétaire“ dans la hiérarchie formelle ou
informelle d’un office.

Stratégies d’autonomie
De nombreux offices sont en fait constitués de plusieurs unités d’administration
ayant fusionné sur décision parlementaire. Par conséquent, la stratégie intention-
nelle de la direction se concentre sur l’intégration, les gains de synergie, la rationali-
sation. Les stratégies émergentes, souvent soutenues par des cultures d’offices dif-
férentes voire antinomiques peuvent faire échouer toute tentative de conciliation.
Lorsque ces cultures sont particulièrement fortes, des luttes intestines peuvent em-
poisonner le climat durant des années.

Action de la structure sur la culture


La hiérarchie est un élément très important de la culture d’administration. Par consé-
quent, les structures d’un office sont hiérarchiquement ordonnées. Mais, dans cha-
que départment ou presque, la hiérarchie est formée sur la base d’autres croyances,
par exemple:
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hiérarchie militaire implique un grade militaire


hiérachie scientifique ″ un doctorat
hiérarchie politique ″ un diplomate

Le déroulement du processus de travail est souvent basé sur la hiérarchie. En parti-


culier le flux d’informations se fait „selon les échelons“. La culture, dans ce cas, se
distingue par une grande distance sociale entre les différents niveaux. Les collabora-
teurs ne s’identifieront pas volontiers avec les objectifs et stratégies d’un tel office.

Comment changer la culture ?


La culture change lorsque le comportement, les valeurs, attitudes et croyances de
chaque membre d’une organisation changent. Une direction d’office qui développe
des stratégies doit donc réfléchir en même temps quelle structure et quelle change-
ment de culture seront nécessaire à leur réalisation.

Exemple: la privatisation d’un office fédéral

Au travers de sa stratégie, l’office veut se donner les moyens d’élaborer un produit


ou un service selon des principes de gestion, de se maintenir sur le marché,
d’évaluer et de prendre des risques, de se servir de ses avantages, de profiter
d’éventuelles opportunités, etc.

La structure qui permettra à cet office de gagner en flexibilité, n’est certainement pas
la traditionnelle structure hiérarchique, mais une structure qui favorise la coopération
et raccourcit les voies de communication.

La culture doit stimuler la motivation des collaborateurs, les aider à s’identifier au


produit et à l’office, à trouver un sens à leur travail, leur procurer du plaisir et l’envie
de progresser personnellement.

La règle la plus élémentaire pour un changement de culture est de procéder par éta-
pes. Le système des valeurs, en tant que base de toute activité humaine, ne peut
pas être changé dans ce contexte. Il conviendrait plutôt de mettre l’accent sur le sys-
tème cognitif, c’est-à-dire, les processus d’apprentissage, tout en introduisant des
changements structurels (des signes matériels de l’accélération des voies de com-
munication accompagnés par des signes psychologiques, dans le sens de „rituels de
renoncement“).
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Les changements qui influencent la culture :

! Mise en évidence des objectifs de l’office et flux d’informationsur ces objectifs,


la politique générale de l’office, les difficultés et problèmes à résoudre en
semble, mais aussi les succès de l’office.

! Revue des performances et qualifications basée sur des critères clairs.


Honorer les performances.

! Mise à niveau professionnelle de tous les collaborateurs. Les cadres des


fonctions dirigeantes devraient avoir une formation en gestion d’entreprise.

! Remplacer les départs à la retraite par du sang neuf, c’est-à-dire du person


nel jeune, formé au management.

Les six questions stratégiques


que la direction d’un office doit se poser à chaque début d’année :

1. Que voulons-nous faire ? ➔ Objectifs

2. Comment voulons nous le faire ? ➔ Stratégies

3. Quels sont les risques ? ➔ Scénarios

4. Quels sont nos besoins ? ➔ Ressources

5. Quelle organisation voulons-nous ? ➔ Structure

6. Quelle culture voulons-nous ? ➔ Culture


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Transparent

La culture d’entreprise

est l’ensemble explicite


et implicite des

! règles

! croyances et
valeurs partagées

! principes

! attitudes

qui oriente toutes les actions des


individus dans une entreprise

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