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« Le Soleil »
Problématiques :
- Comment ce poème parvient-il à présenter le soleil et le poète comme des alchimistes qui
métamorphosent le réel ?
- Analogie soleil / poète
- Illuminer la misère et le vice
Proposition d’introduction :
Dans son poème « Tristesses de la lune », Baudelaire représente la lune comme l’astre du spleen,
qui « laisse filer une larme furtive » qu’un poète recueille pour la mettre « loin des yeux du soleil »,
afin de l’en protéger. En effet, le soleil serait quant à lui, l’astre de l’Idéal, qui éclaire le monde et le
sublime, qui fait s’évaporer les larmes et la mélancolie. C’est notamment dans le poème « Le Soleil »
que le poète nous le décrit ainsi : LECTURE
Véritable force de la Nature, le Soleil crée la Vie et il embellit la réalité, de la même façon que la
poésie. En effet, dans la première partie de ce poème, qui se compose du premier huitain (mon
organisation s’appuie sur les différentes strophes), le poète se met en scène, inspiré par le soleil dans
sa création poétique. C’est alors un véritable éloge qu’il propose dans le second huitain, où le soleil
devient Créateur, au même titre que Dieu, et, c’est ce qui est énoncé dans la dernière strophe, au même
titre que le poète lui-même. Dès lors, il est possible de se demander comment ce poème parvient à
présenter le soleil et le poète comme des alchimistes qui métamorphosent le réel.
Le long du vieux faubourg, où pendant aux masures / Les persiennes, abri des secrètes luxures
Mise en place d’un décor réaliste avec les 3 compléments circonstanciels de lieu, de plus en plus
précis, comme si le lecteur pénétrait dans la maison pour découvrir le secret.
Mise en place d’un décor urbain, et plus particulièrement Paris (« Tableaux parisiens »), avec le
champ lexical de la ville (« faubourg », « masures », « persiennes », « ville », « toits »).
Ce décor urbain a une nuance péjorative avec les termes « vieux », « masures », « luxures », renforcée
par la rime entre « masures » et « luxures, qui associe les deux termes et allie la misère et le vice.
Complément circonstanciel de temps avec le « quand », le lecteur attend l’apparition du « je », le poète
crée du suspens.
Personnification du soleil qui châtie les vices comme une puissance divine, et dont la punition est
rendue violente grâce à l’allitération en « r » (« cruel », « frappait », « traits », « redoublés »).
Jeu sur la polysémie du terme « traits » qui renforce la violence de la punition en alliant les rayons du
soleil à des traits de flèches, mais qui annonce aussi l’analogie entre les soleil et le poète en faisant
référence aux traits de crayon.
La punition est universelle, elle frappe sur la ville et la campagne, comme le montrent l’anaphore en
« sur » et le parallélisme.
Apparition du « je » qui se promène sous le soleil « seul », la promenade se fait métaphore de la
composition poétique.
Périphrase pour parler de l’activité poétique comme une « fantasque escrime », comme un combat
d’épée qui nécessite de l’habileté et de l’entraînement.
Habileté du poète souligné par les participes présents (« flairant », « trébuchant », « heurtant »), ce
sont des activités simultanées, il peut faire plusieurs choses en même temps.
Animalisation du poète avec le verbe flairer, métaphore du chien qui cherche à manger avec son
odorat, de la même façon que le poète cherche des rimes.
Promenade métapoétique avec la comparaison entre les « mots » et les « pavés » : la poésie se trouve
par terre, la richesse se trouve dans la boue et le poète se fait chercheur d’or.
Périphrases mélioratives en parallélisme pour parler du soleil, qui contraste avec le premier
mouvement.
Rime riche entre « chlorose » et « rose », permettant d’allier l’horrible et le sublime, le laid et le beau,
la boue et l’or.
Syllepse sur le mot « vers » qui peut à la fois être l’insecte répugnant (permettant ici encore l’alliance
du laid et du beau) et le vers poétique, tiré de la beauté du paysage : le soleil se fait alors source
d’inspiration.
Mouvement ascendant, qui mime l’élévation spirituelle permise par la poésie, avec les verbes éveiller
et évaporer.
Et remplit les cerveaux et les ruches de miel
Ambiguïté dans le vers : le soleil « remplit les cerveaux […] de miel », une nourriture spirituelle ?
C’est lui qui rajeunit les porteurs de béquilles / Et les rend gais et doux comme des jeunes filles
Assonance en « i » (« lui », « rajeunit », « béquilles », « filles », « mûrir », « fleurir ») qui fait entendre
la joie et les rires provoqués par le soleil grâce au pouvoir de rajeunissement et au pouvoir de
métamorphose (il transforme les vieillards en jeune, les hommes en femmes).
,
Et commande aux moissons de croître et de mûrir / Dans le cœur immortel qui toujours veut
fleurir
Le mouvement ascendant est renforcé par le champ lexical de la floraison avec « champs »,
« moissons », « croître », « mûrir » et « fleurir », le soleil fait naître et grandir la vie.
Nouvelle comparaison du soleil à un roi (écho au roi soleil ?), à un souverain généreux mais humble,
comme on le voit avec le parallélisme qui accentue les négations avec la répétition de « sans ».
Dans tous les hôpitaux et dans tous les palais.
Souverain / soleil juste qui, de la même façon qu’il punissait tous les vices, récompense tous les
vertueux (parallélisme avec l’anaphore « dans tous les »).
Proposition de conclusion :
Pour conclure, le poème « Le Soleil » de Baudelaire évoque, de façon implicite, le pouvoir
métamorphosant de la poésie, qui parvient à transformer le réel et à passer, dans un processus
alchimique, de la boue à l’or, du Spleen à l’Idéal. La puissance du soleil est totale car il est à la fois
châtieur et guérisseur. De la même façon, la figure du poète est ambiguë, on le voit notamment avec la
progression du poème : dans la première strophe, il se dépeint comme un poète en marge qui doit se
salir les ains, puis, dans la dernière strophe, il devient poète divinisé, élu. Cette ambiguïté se
retrouvera dans le poème « L’Albatros », où le poète, comme l’oiseau et le soleil, s’élève au-dessus
des autres hommes.