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Année universitaire 2022/2023

Méningités à liquidé clàir


CHARAOUI KHALIDA / faculté de médecine / Université Constantine 3

Objectifs pédagogiques
1. Diagnostiquer une méningite et une méningo-encéphalite
2. Connaitre les principaux agents responsables des méningites et méningo-
encéphalites à liquide clair
3. Hiérarchiser les examens complémentaires
4. Interpréter le résultat d’un examen du liquide cérébro-spinal (LCS)
5. Connaitre les indications des différents traitements antiinfectieux devant une
méningite et une méningo-encéphalite à liquide clair

1. Introduction
Les méningites à liquide clair posent avant tout un problème étiologique.

Si la majorité d’entre elles sont de nature virale et d’évolution bénigne, il impose au plutôt
de reconnaitre les causes qui nécessitent un traitement urgent.

2. Diagnostic positif
Urgence diagnostique et thérapeutique, évoquée devant la constatation d’un syndrome
méningé fébrile, il s’y associe parfois des signes d’encéphalite, la ponction lombaire est un
geste essentiel, elle confirme l’aspect clair du LCS et la présence d’éléments cellulaires (plus
de 10 éléments/mm3)

2.1. Clinique
Signes fonctionnels : céphalées violentes, diffuses en casque, rebelles aux traitements
antalgiques avec des vomissements faciles en jet et photophobie.

Signes physiques → rechercher la raideur méningée


Attitude en chien de fusil
Raideur de la nuque douloureuse lors de la flexion active ou passive du rachis cervical, signe
de Kernig, signe de Brudzinski, hyperesthésie cutanée. Parfois des troubles vasomoteurs
(raie Méningitique de trousseau).

Associés à fièvre et frissons

Le diagnostic est difficile dans certains cas :

1. Tableau fruste : migraine, sinusite


2. Tableau atténué par un traitement symptomatique
3. Tableau psychiatrique
4. Sujet âgé : altération de l’état de conscience
5. Nourrisson / Nouveau-né
Dans tous les cas, il est important de faire la différence entre le tableau de méningite et
celui de méningo-encéphalite, cette différence se fait essentiellement sur la clinique, la
présence de signes neurologiques centraux sont en faveur d’une encéphalite (Trouble des
fonctions supérieures, Trouble de vigilance, Signes de focalisation, Convulsions…).

L’analyse du LCS ne permet pas de faire la différence entre la méningite et la méningo-


encéphalite mais elle confirme l’atteinte méningée.

Devant tout syndrome méningé fébrile, il faut systématiquement rechercher les signes de
gravité:

1. Purpura extensif
2. Trouble de vigilance avec Glasgow ≤ 11
3. Signes de focalisation neurologique
4. Signes de souffrance du tronc cérébral
5. Convulsions
6. Instabilité hémodynamique

2.2. La ponction lombaire (PL)


Examen clé du diagnostic, elle doit être réalisée en urgence, avant toute antibiothérapie,
elle permet le diagnostic positif et étiologique. Dans la majorité des cas, aucun examen n’est
nécessaire avant de réaliser la ponction lombaire.

Contre-indications de la ponction lombaire

1. Contre-indications non neurologiques: instabilité hémodynamique ou respiratoire,


trouble de l’hémostase, infection cutanée étendue au point de ponction (la PL ne
peut se faire qu’après correction des désordres hémodynamiques et de l’hémostase)
2. Présence de signes cliniques évocateurs d’un processus expansif intracrâniens:
déficit moteur, déficit sensitif, syndrome cérébelleux
3. Présence de signes d’engagement cérébral: anomalies pupillaires, dysautonomie,
crises toniques postérieures, aréactivités aux stimulations, réactions de
décortication ou de décérébration
4. Crises convulsives persistantes

Devant les signes neurologiques, il faut d’abord faire une imagerie cérébrale (IRM ou
scanner) avant la ponction lombaire

Modalités pratiques : le patient est installé dos à la lumière, assis au bord du lit ou couché
sur le côté en chien de fusil, bien maintenu et prévenu. L’opérateur est installé avec tout le
matériel nécessaire à portée de main et il est aidé. On prélève 2 à 3 ml (40 à 60 gouttes). On
réalise de manière concomitante une glycémie veineuse pour une interprétation correcte
de la glycorachie. Acheminer les prélèvements immédiatement au laboratoire pour étude
cytologique, microbiologique et biochimique.

Etude du LCS : doit se faire dans l’heure qui suit la ponction lombaire
LCS normal
Macroscopie : Clair, eau de roche
Eléments cellulaires (leucocytes) : moins de 5 éléments/mm3 dont 60-70% des lymphocytes
et 30-50% des monocytes et ne contenant généralement ni PNN ni hématies
Glycorachie normale > 2/3 x la glycémie
Protéinorachie <0,40 g/l
Lactatorachie < 3,2 mmol/l
Examen direct négatif avec colorations spécifiques (Gram)

Dans les méningites à LCS clair, la cytologie, l’analyse biochimique et l’étude


bactériologique vont dépendre de l’étiologie. Dans tous les cas le LCS doit être envoyé
immédiatement au laboratoire pour :

Cytologie : nombre d’éléments cellulaires/mm3 et leur nature, lymphocytaire ou


polynucléaires neutrophiles ou présence d’autres cellules (hématies, cellules cancéreuses…)

Examen bactériologique : Examen direct avec coloration de Gram, Culture avec


antibiogramme si germe isolé.
Recherche d’Antigène pneumocoque, PCR méningocoque (si absence de germes à l’examen
direct)
Recherche de BK si contexte et orientation clinique (coloration de Ziehl-Neelsen à la
recherche de BAAR, PCR BK et culture spécifique).
Si contexte et signes extra-neurologiques compatibles : PCR leptospirose.
Si faible suspicion de méningite bactérienne : PCR enterovirus
Recherche de cryptocoque chez les immunodéprimés : coloration à l’encre de chine pour
examen direct, antigène dans le sang et le LCS, culture.
Sérologies : VDRL-TPHA (syphilis), borréliose de Lyme, VIH… (Selon contexte)

Analyse biochimique : protéinorachie, glycorachie (suspicion de méningite bactérienne si


glycorachie ≤ à 0,4x glycémie capillaire), lactates (si < à 3,2mmol/l méningite bactérienne
peu probable)

2.3. Bilan biologique en dehors de la ponction lombaire


Réalisé en même temps que la ponction lombaire.

Hémocultures systématiques
Prélèvements de porte d’entrée si elle existe (ORL ), biopsie d’une éventuelle lésion cutanée
purpurique à visée bactériologique( recherche de méningocoque par culture et PCR)
FNS , bilan d’hémostase, bilan hépatique
CRP, Procalcitonine
Ionogramme sanguin, Glycémie, Créatinine
Sérologies selon contexte (VIH si contexte)

Imagerie
Radiographie pulmonaire, Scanner et/ou IRM cérébral (si signes neurologiques)
3. Stratégie de prise en charge selon les résultats de la
ponction lombaire
3.1. Examen direct du LCS positif (présence de germe à l’examen
direct du LCS)
Diplocoque Gram + → pneumocoque → C3G + Dexaméthasone
Diplocoque Gram - →méningocoque → C3G + Dexaméthasone
Bacille Gram + →Listeria monocytogene → Amoxicilline+Gentamycine
BAAR à l’examen direct → Tuberculose→ traitement anti-tuberculeux

(C3G : cefotaxime ou ceftriaxone)

3.2. Examen direct du LCS négatif (Pas de germe à l’examen


direct)
1er cas : LCS normal
< 5 éléments/mm3, il peut s’agir de :
Méningisme (par exemple au cours d’une angine)
Méningite bactérienne au début
Immunodéprimé
Tout LCR prélevé dans un contexte de syndrome méningé fébrile doit être mis en culture

2ème cas Hypercellularité > 10 éléments cellulaires/mm 3 avec prédominance de


Polynucléaires neutrophiles(PNN)
> 50% PNN
Hypoglycorachie ≤ 0,4 x glycémie Méningite
Hyperproteinorachie > 1g/l purulente
Lactatorachie > 3,2 mmol/l

C’est une urgence thérapeutique → mise en route immédiate d’une antibiothérapie


urgente, probabiliste, parentérale en intraveineux, à forte dose, bactéricide, adaptée à la
suspicion diagnostique (clinique et biologique), secondairement adaptée à l’identification
de l’agent infectieux isolé et à l’antibiogramme.

Traitement de première intention devant la suspicion d’une méningite purulente : C3G +


Dexaméthasone (si présence d’arguments en faveur de listériose, associer Amoxicilline et
Gentamycine).

3eme cas Hypercellularité > 10 éléments cellulaires/mm3 avec prédominance de


lymphocytes
> 50% Lymphocytes
Glycorachie basse < 0,4 x glycémie → Listeria ou Tuberculose
Glycorachie normale > 2/3 x glycémie → Viral
Protéinorachie 1-2 g/l → étiologie bactérienne
Protéinorachie < 1g/l → étiologie virale
Lactatorachie < 3,2 mmol/l
4. Principales étiologies des méningites et méningo-
encéphalites lymphocytaires
4.1. Méningites lymphocytaires normoglycorachiques
Elles sont essentiellement d’origine virale se rencontrent souvent chez l’enfant et l’adulte
jeune, d’évolution favorable sauf pour la méningo-encéphalite herpétique qui est une
urgence thérapeutique (toujours rechercher des signes d’encéphalite)

Principaux virus responsables des méningites virales

1. Enterovirus : cas sporadiques toute l’année avec parfois des épidémies estivales, le
tableau méningé peut être précédé par des signes digestifs.
2. Oreillons : notion de contage 3 semaines auparavant, absence de vaccination,
parotidite.
3. Varicelle/Zona (VZV) : éruption cutanée caractéristique du virus.
4. Primo-infection à VIH : exposition à un risque sexuel ou sanguin dans les 3 semaines
précédentes.
5. Autres virus : virus herpès simplex (HSV1, HSV2), Cytomegalovirus (CMV), Epstein-
Barr virus (EBV)
Clinique : pas de signes de gravité, d’allure bénigne, syndrome méningé intense à début
brutal, fièvre élevée, présence de signes extra-méningés (myalgie, rash, signes digestifs…)
l’absence de signes neurologiques centraux écartent le diagnostic de méningo-encéphalite.
Virologie : recherche d’une primo-infection VIH en cas de facteurs de risque(PCR ARN VIH ou
antigénémie p24)
PCR enterovirus dans le LCS
Traitement : uniquement symptomatique dans la plupart des cas
Primo-infection VIH → traitement antirétroviral
Pas de traitement antiviral dans les méningites herpétiques (HSV) en l’absence de signes
d’encéphalite

Méningo-encéphalite herpétique : urgence diagnostique et thérapeutique, très grave, due à


HSV1, rarement HSV2, les lésions prédominent au niveau des lobes temporaux, secondaires
à une réactivation du virus.
Terrain : Age < 20 ans ou > 50 ans dans 80% des cas
Clinique : brutal, fièvre, trouble de comportement, troubles mnésiques, aphasie, crises
convulsives
Analyse du LCS: méningite lymphocytaire normoglycorachique
Imagerie cérébrale : lésions hypodenses fronto-temporales bilatérales asymétriques
Diagnostic confirmé par la PCR HSV dans le LCS mais n’élimine pas le diagnostic si négative
(car peut être négative jusqu’à 4 jours après le début des signes cliniques refaire la PL pour
rechercher HSV si la première est négative)
Evolution sans traitement mortalité 80% et séquelles chez la moitiés des survivants
Avec traitement : mortalité à 10% et 40% de séquelles (cognitives, comportementales,
épilepsie…)
Le pronostic est lié à la précocité de la mise en route du traitement
Traitement antiviral : à débuter en probabiliste devant tout tableau de méningo-encéphalite
lymphocytaire normoglycorachique : Aciclovir par voie intraveineuse pendant trois
semaines

4.2. Méningites lymphocytaires hypoglycorachiques


Elles sont essentiellement d’origine tuberculeuse ou listerienne, ce sont des urgences
thérapeutiques qui imposent la mise en route de traitement probabiliste devant des
arguments cliniques, épidémiologiques et biologiques.

1. Méningite tuberculeuse : due à Mycobacterium tuberculosis


Fréquente dans les pays endémiques (dont l’Algérie)
Terrain : immunodéprimé, infection VIH, éthylisme, sujet âgé
Absence de vaccination par le BCG
Antécédent de primo-infection tuberculeuse non traitée
Clinique : début progressif, fièvre, sueurs, syndrome méningé fruste, altération de
l’état général, manifestations psychiatriques, signes de focalisation neurologique
Biologie : hyponatrémie (par sécrétion inappropriée d’ADH)
LCS lymphocytaire avec protéinorachie > 1g/l en plus de l’hypoglycorachie.
Examen direct rarement positif, PCR BK dans le LCS, culture positive en 3 à 6
semaines.
Scanner thoracique à la recherche de séquelle de primo-infection ou de miliaire.
Traitement : quadrithérapie antituberculeuse→ pendant deux mois puis bithérapie
pendant 10 mois. Corticothérapie systématique
Mortalité et séquelles restent élevées.
Prévention : vaccination par le BCG et traitement des infections tuberculeuses
latentes.
2. Méningite à Listeria monocytogenes : due à un bacille Gram positif, présent dans
l’environnement, contamination digestive (crudités, fromages non pasteurisées…)
Terrain : Age > 50 ans, grossesse, alcoolisme, immunodépression (corticothérapie,
chimiothérapie)
Clinique : Rhombencéphalite avec syndrome méningé : début progressif, signes
d’atteinte du tronc cérébral (paralysie des nerfs crâniens)
LCS typiquement panaché (PNN et lymphocytes en proportions égales) mais parfois
purulent ou lymphocytaire avec hypoglycorachie
Examen direct positif dans 40% des cas
Hémocultures parfois positives
Traitement : Amoxicilline 21 jours avec Gentamycine 5 jours, si allergie aux
Betalactamines → cotrimoxazole en monothérapie
Mortalité 30% séquelles 30%
Prévention : pas de transmission interhumaine, règles d’hygiène alimentaires chez
les sujets à risque.

4.3. Autres causes de méningites et méningo-encéphalites


lymphocytaires
1. Bactériennes
Leptospirose
Syphilis
Mycoplasma pneumoniae
Borrelia spp
2. Virales :
Rage
3. Parasitaires
Paludisme
4. Mycosiques
Cryptocoque
5. Causes non infectieuses
Paranéoplasiques
Auto-immunes
Post-infectieuses
Médicamenteuses

4.4. Cas particuliers


 Méningite purulente aseptique : Hypercellularité à PNN mais examen direct
négatif et culture stérile
1. Méningite bactérienne décapitée par une antibiothérapie
2. Méningite bactérienne due à une bactérie fragile ou difficile à mettre en
évidence
3. Rares méningites virales
4. Méningite réactionnelle liée à un processus inflammatoire se développant au
contact des méninges : foyer infectieux paraméningé (abcès cérébral, empyème
sous dural, anévrysme mycotique d’une endocardite infectieuse,
spondylodiscites), thrombophlébite, tumeur intracrânienne
→ faire une imagerie cérébrale

 Liquide hémorragique
Deux causes sont possibles :
1. Une hémorragie méningée accompagnant ou pas une méningite bactérienne
2. Traumatique par rupture d’un vaisseau au cours du prélèvement.
Pour distinguer ces deux possibilités, on peut :
Soit Prélever le LCR dans 3 tubes différents. Seul le premier tube (voire le second)
est sanglant dans le cas de la rupture d’un vaisseau au cours du prélèvement
Soit alors centrifuger le LCR : le surnageant est xanthochromique dans le cas d’une
hémorragie méningée.
Enfin la cytologie et l’analyse biochimique du LCR permettent de distinguer une
hémorragie méningée compliquant une méningite bactérienne, d’une hémorragie
méningée sans méningite

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