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Commentaire.
Dictatus Papae. Grégoire VII.
Le document à notre disposition est une lettre qui fait office de texte canonique, c’est-
à-dire conforme aux règles de l’Eglise, à visée législative. Il s’intitule Dictatus Papae, se
compose de vingt-sept propositions faites par le pontife Grégoire VII et est publié vers 1074-
1075. Dans cette lettre, le pape affirme son autorité sur l’Eglise universelle et sur les princes.
Le Dictatus Papae énonce pour la première fois les principes de la théocratie pontificale,
c'est-à-dire ceux qui placent le pouvoir spirituel au-dessus du pouvoir temporel. Son auteur,
Grégoire VII, de son vrai nom Hildebrand de Soana, fut pape et évêque de Rome de 1073 à
1085. Il est celui qui a donné son nom à la réforme grégorienne, réforme qui a pour but
d’établir la primauté papale sur le monde laïque ainsi que purifier les mœurs de l’Eglise, dans
la succession des papes depuis Léon IX. Le document est à destination notamment des princes
et évêques et fut distribué par les légats du pape dans les royaumes et empires de la chrétienté.
Nous verrons donc comment, par la refonte de l’Eglise établi le Dictatus Papae, Grégoire VII
impose les bases de la théocratie pontificale.
Dans un premier temps, nous étudierons le redressement spirituel et la réorganisation
hiérarchique de l’Eglise. Puis, nous analyserons la distinction des pouvoirs religieux et laïques
en vue d’une domination du spirituel sur le temporel.
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Cornella Paul Histoire des modèles politique.
Torcol Romane TD n°11. Séance 3.
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La hiérarchisation de l’Eglise.
→ L'Église est organisée entre le clergé régulier – dirigé par les abbés – et le
clergé séculier – dirigé par les évêques. Le pape s’impose au-dessus de ces
hiérarchies préexistantes, centralisant le pouvoir catholique. Ceci s’observe
notamment dans les propositions 3 et 25. Il dirige également l’organisation
territoriale de l’Eglise, qui ne s’effectue donc plus à niveau local (proposition
7).
→ Par la légitimation spirituelle, il est le vrai chef de l’Eglise. Lui et ses légats
(ses représentants) ont donc autorité sur le reste des membres. C’est en effet un
des objectifs de la publication du Dictatus Papae. Grégoire VII est un des
premiers papes à mettre en place la bureaucratisation de l’Eglise. Dans la
proposition 4, il dit « son légat, dans un concile, est au-dessus de tous les
évêques, même s’il leur est inférieur par l’ordination, et il peut prononcer une
sentence de déposition », constituant une nouvelle étape de cette
hiérarchisation par l’importance donnée au poste de légat.
→ De plus, Grégoire VII centralise le pouvoir. Les conciles – assemblées
d’évêques et de théologiens – et les synodes – assemblées réunies pour
l’examen des problèmes de la vie ecclésiastique à tous les niveaux – avaient
auparavant lieu au niveau local, ce qu’il réforme avec le Dictatus Papae. «
Aucun synode ne peut être appelé général sans son ordre. » (proposition 16), et
les « causae maiores […] doivent être portées devant lui » (proposition 21)
faisant que toute la vie ecclésiastique est réorganisée de manière à ce que toute
décision passe par lui.
Ces assemblées qui constituaient le cœur de la vie politique de l’Eglise ne sont
plus primordiales pour lui (proposition 25).
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Alors que, comme l’expliquait Grégoire VII, par les vices, les péchés, la divergence et
la désorganisation, la foi catholique était devenue risible et ridicule 2, ce redressement ainsi
que la réorganisation visaient à requalifier l’Eglise comme unie et seule messagère de Dieu
sur Terre, la permettant de s’imposer en tant qu’organe dominant du pouvoir temporel en
Europe.
2
Platelle, H. (1982). Chapitre II - Dieu et César : la période grégorienne. Dans : Georges Duby éd.,
L'Eurasie: XIe-XIIIe siècles (pp. 183-225). Paris: Presses Universitaires de France. P. 5.
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Ce texte, qui s’est maintenu dans les archives de Vatican, est un témoignage
majeur dans l’Histoire de l’Eglise qui représente cette période. Cependant, il reste un
texte figé montrant des intentions mais sa mise en place se fait progressivement.
L’écrit n’a donc pas de conséquences immédiates et l’étude de la théocratisation
pontificale doit se faire d’un point de vue plus distant.
Par ailleurs, il n’est pas l’unique texte qui marque la volonté de domination
spirituelle de l’Eglise à l’époque : on peut par exemple parler de In nomine Domini,
texte de 1059 établissant entre autres l’élection des papes par les cardinaux.
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Articles.
Charles de Miramon, « L’invention de la Réforme grégorienne. Grégoire VII au XIXe siècle, entre
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Internet.
Jean-Urbain COMBY, « DICTATUS PAPAE », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 9
février 2022 https://www.universalis.fr/encyclopedie/dictatus-papae/
Marcel PACAUT, « INVESTITURES, QUERELLE DES », Encyclopædia Universalis [en ligne],
consulté le 9 février 2022. https://www.universalis.fr/encyclopedie/querelle-des-investitures/
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