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INTRODUCTION A LA FISCALITE

PAR

Vincent KABWA KANYAMPA,


Directeur Général Adjoint des Impôts

Mai 2016
INTRODUCTION

La fiscalité désigne à la fois le système de perception des impôts et l’ensemble des lois qui
régissent les procédés de perception et enfin l’ensemble des impôts qui sont en vigueur dans
un pays à une époque donnée.

L’impôt est une prestation pécuniaire directe requise des particuliers et des collectivités par
voie d’autorité (prélèvement imposé par l’Etat au moyen de son pouvoir de contrainte), à
titre définitif (une fois payé, ne peut être remboursé) et sans contrepartie (il n’y a aucune
proportion, ni corrélation directe entre les avantages que tire le contribuable et l’impôt qu’il
paie) en vue de la couverture des charges publiques ou de l’intervention de l’Etat .

1. DISTINCTION ENTRE POLITIQUE FISCALE, SCIENCE FISCALE ET TECHNIQUE FISCALE

La politique fiscale vise l’élaboration d’un système fiscal ou projet de réforme adapté à la
situation du pays. La politique fiscale est particulière à chaque pays, elle cherche à atteindre
le but visé lorsqu’on conçoit un système fiscal donné ou lorsqu’il s’agit d’une réforme fiscale.

La science fiscale étudie les principes généraux et les aspects économiques, sociaux,
psychologiques de l’impôt (réaction du contribuable sur la nouvelle imposition).

La technique fiscale est l’ensemble des moyens et procédés mis en œuvre pour établir et
percevoir l’impôt. La technique fiscale est particulière à chaque système fiscal.

2. ELEMENTS CONSTITUTIFS DE L’IMPÔT

Il y a lieu d’en distinguer deux sortes : d’un côté, les éléments qualitatifs et, de l’autre, les
éléments quantitatifs.

Les éléments qualitatifs sont ceux relatifs au champ d’application de l’impôt, à savoir, la
matière imposable (objet de l’impôt), la personne imposable (sujet de l’impôt) et le fait
générateur.

La matière imposable est l’élément économique sur lequel l’impôt est assis c’est-à-dire sur
lequel il prend directement ou indirectement sa source. Ainsi, la matière imposable peut
être soit un bien, soit un revenu, soit une transaction, soit un service, soit encore la
personne humaine.

La personne imposable ou sujet de l’impôt est la personne obligée de payer l’impôt. Elle est
appelée contribuable, redevable ou assujetti. Il y a donc lieu de distinguer le redevable légal
du redevable effectif.

Le redevable légal ou le contribuable de droit ou collecteur d’impôt est la personne habilitée


à verser les cotisations auprès de l’Administration fiscale. Le redevable effectif ou
contribuable effectif est la personne qui supporte réellement la charge de l’impôt.

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Le fait générateur est :

- la réalisation des situations ou des événements qui donnent naissance à la dette fiscale,
en d’autres mots, pour que la créance de l’impôt naisse dans le chef du contribuable, il
faut que le contribuable se soit placé dans le champ d’application de la loi fiscale ;
- la donnée ou l’ensemble des données dont l’existence chez un individu font qu’il soit
passible de l’impôt c’est-à-dire qu’on le soumet à l’impôt. En d’autres termes, c’est le fait
qui déclenche les mécanismes d’imposition.

Il est à noter que le fait générateur est lié dans l’application de la loi fiscale dans l’espace
(territorialité de l’impôt) et dans le temps (non rétroactivité de la législation fiscale) c’est-à-
dire que les faits se produisant à l’étranger ne sont généralement pas imposables au Congo ;
il en est de même de la nouvelle imposition qui ne peut atteindre des exercices antérieurs.

Les éléments quantitatifs sont ceux qui permettent la détermination du montant de l’impôt.
Il s’agit avant tout d’évaluer la matière imposable après l’avoir déterminée, et après, lui
appliquer le tarif y afférent afin de liquider l’impôt dû.

On distingue ainsi l’impôt de quotité de l’impôt de répartition. Dans l’impôt de répartition, le


rendement global de l’impôt est connu et fixé a priori. Il suffit alors de répartir l’impôt à
plusieurs degrés administratifs entre les contribuables répertoriés au prorata de la matière
imposable. Le tarif de l’impôt se dégage de la répartition. Ainsi, l’impôt déterminé sur le plan
national est réparti d’abord entre les régions, puis entre les sous-régions et les zones, enfin
entre les contribuables de la zone.

Dans l’impôt de quotité, c’est le tarif de l’impôt et lui seul qui est fixé à priori c’est-à-dire
d’avance, mais le montant à percevoir ne l’est pas. En réalité, tous les impôts sont ceux de
quotité.

Le taux de l’impôt est spécifique lorsqu’il est exprimé en unités monétaires par unité de
quantité (mètre, mètre carré, tonne, mètre cube,etc…) de la matière imposable ( exemple le
mètre cube de bois imposé à 100 FC).

Le taux de l’impôt est au contraire, ad valorem lorsqu’il est exprimé en pourcentage de la


matière imposable évaluée en unités monétaires (tel est le cas de l’ICA à l’intérieur de 18 %
sur le montant de vente).

Le taux de l’impôt est dit fixe ou forfaitaire lorsqu’il consiste en un montant fixe quelle que
soit la valeur de la base imposable.

Par contre, l’impôt proportionnel comporte un taux constant quelle que soit l’ampleur de la
matière imposable (50 % du bénéfice réalisé).

Le taux est progressif lorsqu’il croît par rapport à la base d’imposition. L’on distingue ainsi la
progressivité globale de la progressivité par tranche.

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3. CLASSIFICATION DES IMPÔTS

3.1. Classification traditionnelle

La classification traditionnelle distingue l’impôt direct de l’impôt indirect. Un certain nombre


de critères président à cette classification dont :
- le critère de l’incidence : l’impôt direct est celui supporté directement par le
contribuable alors que dans l’impôt indirect le contribuable n’est qu’un intermédiaire qui
répercute la charge de l’impôt sur quelqu’un d’autre ;
- le critère administratif : l’impôt direct est celui perçu par l’Administration des impôts
directs (D.G.I.) et l’impôt indirect perçu par l’Administration des impôts indirects  (DGDA)
;
- le critère de la matière imposable : l’impôt direct atteint périodiquement la matière
imposable permanente ou se renouvelant régulièrement (exercice d’une activité
lucrative), tandis que l’impôt indirect atteint les événements ou faits non permanents ;
- le critère du rôle nominatif : l’impôt direct est celui perçu par voie de rôle nominatif alors
que l’impôt indirect est celui perçu sans établissement du rôle nominatif.

3.2. Classification fondée sur le champ d’application de l’impôt

Cette classification distingue l’impôt réel de l’impôt personnel et, l’impôt spécial de l’impôt
général.

L’impôt personnel est celui qui atteint la fortune ou les revenus du redevable à travers la
personne de celui-ci (exemple l’impôt personnel minimum, en abrégé IPM). Alors que
l’impôt réel est celui qui est assis sur des biens ou des activités des personnes (le capital, le
revenu, la transaction, le service) sans considération de la personne du redevable.

L’impôt général atteint une valeur ou une situation économique prise dans son ensemble
alors que l’impôt spécial ne frappe qu’un élément de cet ensemble. C’est dans ce sens qu’on
oppose l’impôt cédulaire (où les revenus sont classés en trois cédules à savoir, les revenus
mobiliers, locatifs et professionnels) de l’impôt synthétique qui frappe les revenus
considérés de façon globalisée.

3.3. Classification économique des impôts

On y distingue trois types d’impôts dont : l’impôt sur les revenus, l’impôt sur le capital et
l’impôt sur la dépense.

L’impôt sur le capital comporte diverses modalités. Il peut être conçu de la manière
suivante :
- l’impôt mesuré d’après le capital mais prélevé sur le revenu ;
- l’impôt prélevé sur le capital lui-même.

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L’impôt mesuré d’après le capital mais prélevé sur le revenu est un prélèvement qui atteint
le capital indirectement, à travers les revenus dits revenus fondés (loyers, dividendes,
intérêts) qu’il procure à ses détenteurs.

L’impôt sur le capital lui-même intervient soit parce qu’il atteint les plus values du capital
(des plus values de l’ensemble du patrimoine, ou des plus values constatées au moment de
la cession de tels biens), soit parce qu’il frappe le capital tout entier (impôt sur les
transmissions de capital, droits de mutation entre vifs, droits de succession).

En un mot, c’est un impôt qui s’effectue directement à raison de l’accroissement du capital


(plus values ou gains en capital) ; ou lors de sa transmission ou mutation à titre onéreux
(vente, échange) ou à titre gratuit (succession, donation). A ce propos, on perçoit les droits
de succession ou d’enregistrement.

L’impôt sur le revenu frappe les ressources diverses qu’une personne tire de son travail ou
de son capital ou simultanément de son travail et de son capital c’est-à-dire les revenus
mixtes.

Sont des revenus du travail : les salaires et traitements ; des revenus du capital : les revenus
fonciers et les revenus des valeurs mobilières (dividendes résultant des actions, intérêts
provenant des titres publics, par exemple des obligations etc…) ; des revenus mixtes : les
bénéfices des exploitations agricoles, industrielles ou commerciales et des professions
libérales.

L’impôt sur la dépense vise également le revenu mais il ne le frappe pas en tant que tel. Il le
saisit dans ses emplois : lors des achats des biens ou services ou même de la consommation.

4. INTERPRETATION EN DROIT FISCAL

Elle est de deux ordres :

- l’interprétation de la loi fiscale ;


- l’interprétation des faits, circonstances et opérations.

4.1. L’interprétation de la loi fiscale

L’impôt est une matière d’ordre public en ce sens qu’il est régi par un texte de lois. Il arrive
qu’en certaine circonstance une loi fiscale soit hâtivement rédigée ou ne soit pas claire, d’où
la nécessité de l’interpréter.

D’une manière générale, on distingue l’interprétation authentique de l’interprétation


administrative et judiciaire.

L’interprétation authentique consiste à interpréter une loi par une autre loi. Elle a le
caractère obligatoire et rétroagit. L’interprétation authentique s’oppose à l’interprétation
faite par l’Administration et les cours et tribunaux qui n’a pas le caractère obligatoire.

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Ainsi l’interprétation faite par les cours et tribunaux peut s’écarter de celle faite par
l’administration par voie de circulaires, notes de service … et ne sont pas liés par leur propre
jurisprudence dans la mesure où la nouvelle interprétation d’une loi annule l’interprétation
antérieure faite par la cour de cassation, cour suprême. Ceci est la conséquence du principe
d’ordre public de la loi fiscale.

Les méthodes d’interprétation sont :

- l’interprétation littérale : consiste à déterminer le sens des mots et de la construction des


phrases selon les règles grammaticales et la syntaxe. Cette interprétation n’est pas
restrictive car un mot qui a un sens large le garde ;
- l’interprétation historique : c’est celle faite selon l’histoire ou selon l’historique de la loi.
Pour ce faire, on se réfère aux travaux préparatoires pour chercher la volonté du
législateur. L’interprétation historique ou l’interprétation selon l’histoire du droit tend à
chercher le sens du texte par sa place dans l’évolution de la réglementation et par les lois
successives d’une manière déterminée ;
- l’interprétation systématique : elle consiste à tenir compte de la place occupée par
fonction de l’ensemble du système de la loi ;
- l’interprétation téléologique : celle qui tient compte du but poursuivi par le législateur.

4.2. L’interprétation des faits, circonstances et opérations

Il s’agit ici de l’application de la loi plutôt que de l’interprétation de son texte. Cette
application nécessite une interprétation de tous les éléments constitutifs de l’impôt
(assiette, fait générateur, personne assujettie) et des modalités concrètes qui concourent à
son établissement.

Les règles suivantes sont d’application :

- l’interprétation doit être stricte ou restructurée c’est-à-dire la loi fiscale doit être
appliquée à une situation concrètement définie dans toute sa rigueur sans possibilité
pour l’administration de l’aménager. Aucun privilège, aucune exemption ou majoration
n’est accordée si ce n’est par la loi ;
- pas d’interprétation par analogie : l’interprétation par analogie, c’est celle qui consiste à
appliquer une loi à des cas non prévus par elle parce que les cas prévus et non prévus
présentent entre eux des similitudes. C’est une interprétation qui est contraire au
caractère d’ordre public de la loi fiscale et elle est anti-constitutionnelle ;
- In dubio contra fiscum : lorsqu’un texte de loi en matière fiscale est obscur et susceptible
de diverses interprétations, le juge doit, en l’absence d’autres données ou éléments
d’interprétation choisir l’interprétation la plus favorable au débiteur de l’impôt.

Il doit être noté qu’en ce qui concerne l’interprétation stricte ou restrictive, la doctrine et la
jurisprudence considèrent que la règle de l’interprétation stricte en droit fiscal ne s’applique
qu’en droit fiscal matériel c’est-à-dire aux règles définissant la matière imposable, le fait
générateur et la personne assujettie. Et lorsqu’il s’agit du droit fiscal formel c’est-à-dire des
règles procédurales, la jurisprudence admet qu’en l’absence de dispositions spécifiques de
droit fiscal, le juge peut recourir aux règles applicables en matière pénale et civile.

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5. Quelques principes de Droit fiscal

Ils sont, entre autres :

- principe de l’égalité en droit fiscal : ceux qui se retrouvent dans les faits identiques
doivent payer le même impôt ;
- principe d’ordre public : l’impôt met en jeu les intérêts essentiels de l’Etat ;
l’Administration tout comme le contribuable doit se conformer aux lois fiscales en
vigueur. L’administration ne peut déroger à la loi par voie de circulaire ou d’instruction ;
- principe de la non rétroactivité de la législation fiscale : les lois fiscales prévalent pour
l’avenir et non pour le passé ; en d’autres mots, l’impôt nouvellement créé ne peut
atteindre des exercices antérieurs ;
- principe non bis in idem : en principe une matière ne doit pas être imposée deux fois
dans le chef du même contribuable pour une même nature d’impôts.

6. NOTION DE DOUBLE IMPOSITION

On distingue :

- la double imposition nationale ;


- la double imposition internationale (même revenu taxé deux fois dans deux pays
différents) ;
- la double imposition économique : une même matière imposable est taxée deux fois
dans le chef de deux redevables différents ;
- la double imposition juridique : c’est le cas de dividende transitaire c’est-à-dire dividende
versé à la société mère pour être distribuée aux actionnaires.

6. CLASSIFICATION DES IMPÔTS DANS LE SYSTEME FISCAL CONGOLAIS

6.1. Impôts directs

A. Impôts réels

- impôt foncier ;
- impôt sur les véhicules ;
- impôt sur la superficie des concessions minières et d’hydrocarbures.

B. Impôts cédulaires sur les revenus

I. Revenus professionnels

- sur bénéfices des entreprises sociétaires et individuelles ou familiales.


- sur profits des professions libérales ;
- sur les rémunérations : IPR et IER.

II. Revenus locatifs

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III. Revenus mobiliers

6.2. Impôts indirects

A. Taxe sur la valeur ajoutée

- à l’intérieur ;
- à l'importation.

B. Droits de consommation ou d'accise

- à l’intérieur ;
- à l’importation.

C. 1. Droits d'enregistrement en matière foncière et immobilière

- droits fixes ;
- droits proportionnels.

2. Droits d'enregistrement en matière d'actes de sociétés

- droits fixes ;
- droits proportionnels.

D. Droits de douane

- à l’importation ;
- à l’exportation .

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