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ANALYSE FINANCIERE

INITIATION A L’ANALYSE FINANCIERE

Dominique THEVENIN
Professeur de finance
Grenoble Ecole de Management
1. Séquence 1 : le circuit financier de la firme et l’analyse financière.................................................................2
1.1 Le circuit financier........................................................................................................................................2
1.2 Application:....................................................................................................................................................3
1.3 L’objet de l’analyse financière.....................................................................................................................4
1.4 La démarche de l’analyse financière...........................................................................................................6
1.5 Plan des séquences.........................................................................................................................................6
2. Séquence 2 : Le bilan financier...........................................................................................................................7
2.1 Les sources de financement..........................................................................................................................7
2.2 Les capitaux investis......................................................................................................................................8
2.3 La trésorerie...................................................................................................................................................9
2.4 Présentation du bilan financier....................................................................................................................9
3. Séquence 3 : Les soldes intermédiaires de gestion............................................................................................11
4. Séquence 4 : L’analyse par les ratios................................................................................................................16
4.1 ANALYSE DES MARGES ET DE LA RENTABILITE:........................................................................16
4.2 Les ratios d’endettement............................................................................................................................18
4.3 Analyse du BFR...........................................................................................................................................18
4.4 L’analyse de la trésorerie............................................................................................................................19
4.5 conclusion.....................................................................................................................................................19
5. Séquence 5 : L’Effet de levier de la dette, ou l’incidence de l’endettement.....................................................20
6. Séquence 6 : l’analyse par les flux....................................................................................................................23
7. Séquence 7 : Les niveaux d’information financière.........................................................................................23
7.1 Les informations générales sur le secteur d’activité et l’entreprise........................................................24
7.2 Les états comptables et financiers..............................................................................................................24
7.3 Les retraitements et reclassements nécessaires.........................................................................................25
7.3.1 Sur le bilan.............................................................................................................................................26
7.3.2 Le Compte de Résultat...........................................................................................................................28
7.4 Les comptes pro forma................................................................................................................................29
7.5 Les comptes consolidés................................................................................................................................29
8. Ouvrages à consulter.........................................................................................................................................30

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ANALYSE FINANCIERE

1. Séquence 1 : le circuit financier de la firme et l’analyse financière

La finance a pour objet de déterminer des règles de décision et de gestion qui conduisent à
maximiser la richesse des individus. L’entreprise se situe au coeur du processus de création
de richesse, richesse ensuite distribuée entre différents acteurs économiques, dont les intérêts
sont souvent contradictoires.

La théorie financière, élaborée depuis les années 50’, privilégie le point de vue des
propriétaires de la firme, c’est-à-dire de ses actionnaires. Ce sont eux, en effet, qui apportent
les fonds, prennent les risques, et souhaitent être rémunérés en conséquence. Les actionnaires
sont, de droit, souverains dans leur entreprise.

La finance définit ainsi les principes de décision dont l’objectif est de maximiser la
richesse des actionnaires, donc de maximiser la valeur de la firme. Les ressources
financières dont disposent les entreprises étant rares, des règles de décision strictes doivent
être appliquées par les dirigeants d’entreprise.

Les rôles respectifs des actionnaires, créanciers et dirigeants, dans la firme doivent être
présents à l’esprit de chacun, car, en économie à frontières ouvertes, la culture colbertiste
française laisse la place au système libéral, dans lequel la firme est valorisée en permanence
par le marché financier.

1.1 Le circuit financier

Un bref aperçu de la logique financière d’entreprise permet de décliner l’enseignement des


cours dispensés à l’ESC-Grenoble en tronc commun. Cette logique se place dans un contexte
où l’individu est rationnel1, c’est-à-dire grossièrement:
- qu’il préfère être plus riche que pauvre,
- qu’il veut être rémunéré lorsqu’il investit ou prête.

Sur un plan purement financier, la firme est considérée comme un circuit qui relie trois
fonctions:

INVESTISSEMENT / FINANCEMENT / EXPLOITATION

 Financement: L’entreprise collecte des fonds auprès de ses propriétaires (les


actionnaires) et de créanciers.
 Investissement: Ces fonds sont injectés pour financer les investissements, processus
par lequel l’entreprise se développe et valorise ses opportunités de croissance.
 Exploitation: L’investissement est ensuite exploité pendant une durée plus ou moins
longue, et génère de la richesse.

Cette richesse sert à payer d’abord:


 les consommations intermédiaires,
1
Pour approfondir la notion de rationalité de l’individu, se reporter au chapitre du Copeland & Weston, qui expose le sens donné par Von
Neumann & Morgenstern.

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 le personnel,
 les impôts.

D actionnaires
E Fonds
C propres
I
S
I dettes
investissement O
N
créanciers

R P
I R personnel
clients C O
H D
matières E U
premières S I
consommations S T
intermédiaires E E

ETAT FF
-

La richesse résiduelle est ensuite répartie entre créanciers et actionnaires. Les premiers
perçoivent une rémunération fixe, définie contractuellement; les seconds perçoivent un revenu
aléatoire, composé de la part de richesse créée qui n’a pas été dépensée au service de la dette.

Ce circuit fonctionne seulement si la richesse économique créée – il existe différents moyens


de la mesurer - après rémunération du personnel et acquittement de l’impôt, permet de
satisfaire à la fois les créanciers et les actionnaires. En effet:
 si les flux de richesse générés par l’exploitation ne permettent pas de régler le service
de la dette, il y a faillite. La valeur de la firme est nulle.
 si la richesse générée permet de régler le service de la dette, mais ne permet pas de
rémunérer suffisamment les actionnaires, ceux-ci ne peuvent maximiser leur richesse.
Ils délaissent l’entreprise pour devenir actionnaires d’autres firmes plus prometteuses
qui les rémunéreront mieux. Les dirigeants ne pourront collecter les fonds pour
investir.

La politique d’investissement cherche à ce que l’exploitation économique des actifs


dégage une richesse supérieure aux rémunérations exigées par les acteurs qui financent
la firme.

1.2 Application:

Vous devez organiser une compétition de V.T.T dans un an. Le coût de viabilisation du terrain
est estimé à deux millions € (les travaux doivent commencer immédiatement).
La compétition doit générer 10 M€ de recettes publicitaires; les frais sont évalués à 1M€ pour
la gestion administrative, 4M€ de salaires (dont le vôtre), et 2M€ de frais de prospection
commerciale.

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Vos bénéfices ne sont pas imposés. Comme votre surface financière est limitée, vous avez
trouvé le financement des 2M€: 50% seraient apportés par un actionnaire qui exige 20% de
rémunération minimum, et 50% par une banque qui exige 10%.
L’affaire sera liquidée le lendemain de la compétition.

Explications:

 L’investissement s’élève à deux millions, sa durée est un an. Son financement est
assuré par:
- le banquier qui apporte 1M€. Il faudra lui rembourser 1.1M€ dans un an.
- l’actionnaire, qui apporte 1M€. Il faudra lui verser 1.2M€ dans un an (20% de
rémunération).
Globalement, l’actionnaire et le banquier devront donc percevoir 2.3M€ dans un an.

 Exploitation:
Recettes: 10M
- Frais: 7M
Flux dégagé: 3M dans un an.

Au terme de la compétition, les flux dégagés seront répartis. Le banquier s’octroie 1.1M€, il
reste alors 1.9M€ pour l’actionnaire. Comme il exigeait 1.2M€, la richesse créée excède ses
prétentions. Il faut donc organiser la compétition.

Investissement Actionnaire Actionnaire


1M 1.9 M
2M
Banque ( > 1.2 M exigés )
1M

Banque
1.1 M
Recettes: 10M
- Frais: 7M
Flux dégagé: 3M

Remarque
Si les recettes ne s’élèvent qu’à 9.2M€, le flux dégagé est de 2.2M€. La part revenant à
l’actionnaire est alors de 1.1M€. Certes, il aura gagné 0.1M€, mais ce surplus de richesse est
inférieur à ses exigences. Vous ne pouvez donc pas organiser la compétition.
Ainsi le dégagement de richesse en faveur de l’actionnaire repose sur les prises de décision
relatives aux investissements, au mode de financement, et au mode d’exploitation, dans un
contexte de risque.

1.3 L’objet de l’analyse financière

L’approche, selon ce circuit financier permet, entre autres:

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1/ d’évaluer la performance des firmes et leur niveau de risque: c’est l’objet de l’analyse
financière.

2/ de décider dans quel projet investir et comment financer la firme: c’est l’objet de
« corporate finance », ou finance d’entreprise.

3/ d’installer les dispositifs de contrôle des firmes, et s’assurer que les décisions sont prises et
exécutées dans l’intérêt de l’actionnaire. C’est l’objet d’une problématique récemment
apparue, la « corporate gouvernance », ou Gouvernement d’entreprise.

Ce cours s’intéresse au premier point évoqué.


En effet, à partir de l’information financière publiée par les entreprises, l’étude du
fonctionnement du circuit financier qui lie l’investissement, le financement, et l’exploitation,
permet de porter un jugement sur la situation financière d'une entreprise.

Cette analyse est menée à bien selon deux axes. Il a été montré ci-dessus que l’entreprise
devait dégager une rentabilité supérieure au coût des ses financements. Un premier axe
logique est donc constitué par l’analyse de la rentabilité et sa pérennité. Mais la stratégie pour
dégager des profits peut être conduite avec des prises de risques variées, que ce soit des
investissements hasardeux, ou un fort endettement. Le second axe est donc constitué de
l’étude des équilibres financiers, et des risques encourus.

L’analyse financière apparaît comme un outil d’aide à la décision. En effet, tout responsable
d'entreprise sera conduit tôt ou tard à évaluer le risque que présente un partenaire avec lequel
il entretient des relations, ou s'apprête à conclure des accords. De même, la situation
financière de la firme est examinée par de multiples acteurs économiques, dont évidemment
ses actionnaires, et ses créanciers.

Actionnaires
= propriétaires
Créanciers:
fournisseurs
défaillance
analyse
financière
Dirigeants:
clients Evaluation
management
salariés

Malgré ses imperfections et ses faiblesses, l'analyse financière est l'un des rares outils
utilisables pour établir un diagnostic. Car l’étude est effectuée à partir des informations
financières, donc des états comptables qu’elle publie, qui constituent les seuls éléments
certifiés par des professionnels qui engagent leur signature, donc leur réputation.

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Certes, certains scandales récents ont jeté le discrédit sur la qualité de l’information publiée.
En fait, il est préférable de conduire des analyses financières en gardant à l’esprit les limites
présentées par les états financiers publiés, établis en fonction de normes.

1.4 La démarche de l’analyse financière

Pour établir une analyse financière sur une entreprise, l’opérateur doit suivre une démarche
rigoureuse.
Nous venons de voir qu’il s’agissait d’étudier le fonctionnement du cycle qui lie
l’investissement, le financement et l’exploitation à partir essentiellement des états financiers
publiés.
Naturellement, les comptes reflètent l’activité de l’entreprise, mais les performances doivent
être expliquées par la pertinence des décisions managériales, et le poids de l’environnement.
Par ailleurs, les comptes, établis selon des normes comptables, fournissent une information
parfois éloignée des besoins du financier, qu’il faut donc remettre en forme. Un gros travail
doit donc préparer l’analyse proprement dite.
La démarche judicieuse est donc la suivante :
 se procurer des informations générales sur l’entreprise, qui éclairent les performances
financières,
 se procurer les états financiers,
 retraiter ces informations et les comptes si besoin,
 Mettre sous une forme financière les informations comptables,
 Mesurer, analyser, juger.

1.5 Plan des séquences


Le module d’analyse financière suit donc les séquences suivantes :
 Plan des séquences
 1: le circuit financier de l’entreprise
 2: le bilan financier
 3: les soldes intermédiaires de gestion ( SIG)
 4: l’analyse par les ratios
 5: l’effet de levier de la dette
 6: l’analyse par les flux
 7: les niveaux d’information financière et les retraitements
 8: l’utilisation du tableur
 9: la rédaction du rapport

Le lecteur aura remarqué que les numéros de séquences ne suivent pas la démarche ci-dessus.
Nous avons fait le choix pédagogique de centrer le cours sur les mécanismes financiers et
l’analyse elle-même, plus que sur la phase de collecte et retraitement de l’information. Nous
commençons donc avec une information plus réduite, de manière à travailler dès que possible
sur l’information mise en forme.

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2. Séquence 2 : Le bilan financier

Pour évaluer la performance de l’entreprise, chiffrer les éléments du cycle investissement –


financement – exploitation est nécessaire. Le travail est effectué à partir des états financiers
qui permettent de construire trois tableaux :
 un bilan financier,
 des Soldes Intermédiaires de Gestion,
 un tableau de flux.
Précisons que le tableau de flux est souvent publié par les entreprises cotées, pour se mettre
en conformité avec les pratiques internationales. C’est une obligation dans les comptes
américains, et cela le devient également avec les normes IFRS en Europe en 2005.

Pour les séquences suivantes, les comptes de l’Oréal, 2000, en euros, modifiés à des fins
pédagogiques, serviront d’illustration.

A partir du bilan, qui montre les ressources de l’entreprise, et les utilisations qu’elle en fait,
il est possible de mettre en évidence les financements de l’entreprise, et ses investissements.
Deux éléments de notre circuit sont donc isolés, et présentés sous la forme qui nous
intéresse, c’est-à-dire un bilan financier.

Ce bilan financier montre deux éléments fondamentaux sur lesquels reposera notre
diagnostic.
 le financement à titre onéreux de l’entreprise, c’est-à-dire ses fonds propres et ses
dettes financières;
 2/ les actifs économiques, ou capitaux investis, c’est-à-dire les actifs qu’elle doit
mobiliser pour dégager de la richesse: ce qu’elle a investi stricto sensu (ses
immobilisations), et les conséquences de ses investissements ( ses besoins liés à
l’exploitation et son argent frais).

2.1 Les sources de financement

 les fonds propres:


Les fonds propres représentent tous les fonds que les actionnaires ont mis à disposition de
l’entreprise. Ils figurent au passif du bilan, et on peut reprendre le total publié. Certains types
de provisions sont assimilables à des fonds propres.
Leur contrepartie n’est pas toujours monétaire, à l’actif, car les sommes mises à disposition
sont réinvesties.
Ils sont rémunérés en partie sous forme de dividendes (qui n’apparaissent pas dans le compte
de résultat), et en partie sous forme de plus value sur les marchés ( qui n’apparaissent pas du
tout dans la comptabilité), d’où l’illusion trompeuse de gratuité des fonds propres, créée par la
comptabilité.
Leur rémunération, généralement indexée sur les performances des entreprises, contribue à
rendre plus flexible l’entreprise.

 Les fonds empruntés:


Lorsque l’entreprise ne recourt pas intégralement aux fonds propres pour boucler son
financement, elle doit les emprunter. Deux possibilités principales s’offrent à elle:

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- elle peut recourir aux banques et aux établissements financiers,


- ou, si sa taille le permet, faire un appel public à l’épargne.

Ces fonds sont rémunérés de manière contractuelle, et déclenchent des sorties d’argent fixes.
L’endettement contribue donc à accroitre les risques.

Pour évaluer les fonds empruntés, il faut distinguer, dans le bilan, les financements dont
l’horizon excède un an, et ceux qui correspondent à des mobilisations court terme. Ce, pour
montrer les financements stables, et les financements précaires. La présentation change
souvent d’une entreprise à l’autre, aussi il convient d’être prudent en lisant les bilans.

Fonds propres et fonds empruntés constituent les ressources stables du


financement de la firme.

2.2 Les capitaux investis

 les immobilisations:

L’investissement est le mécanisme par lequel une personne physique ou morale cherche à
accroître sa richesse. Il consiste en un engagement de ressources financières, réalisé dans
des délais brefs, pour percevoir des revenus ultérieurs sur de longues périodes.
Les immobilisations revêtent une forme immatérielle (R&D, fonds de commerce, licence,
etc), matérielle (terrains, bâtiments, agencements, installations techniques, etc), ou
financière (titres de participations, emprunts accordés, etc).
Au bilan, nous connaissons leurs valeurs nettes comptables, et leurs valeurs d’acquisition.

 le besoin en fonds de roulement:

Lors de l’exercice de son activité, l’entreprise subit un décalage entre le moment où elle
facture à ses clients, le moment où elle perçoit le produit de ses ventes, et le moment où elle
règle ses fournisseurs.

Exemple: Soit une entreprise réalisant un CA de 12MF/an.

- si elle octroie à ses clients un crédit de 90 jours, elle n’encaissera pas la totalité de
ses 12MF de ventes au cours de l’année, car elle doit attendre 3 mois pour que ses ventes soient
réglées. Ainsi, au terme de l’année, 9MF auront été encaissés et 3MF seront encore ‘dehors’ sous
forme de créances.
- il en est de même, dans l’autre sens, avec les fournisseurs, mais le crédit obtenu des
fournisseurs compense rarement le crédit octroyé aux clients.

- les stocks - matières premières, intermédiaires, produits finis, en-cours - retardent


également l’encaissement du chiffre d’affaires et ce d’autant plus que le cycle de fabrication est long.

Dans les services, si les stocks de matières premières sont limités, le stock se matérialise sous forme
d’en-cours dans les commandes. Il s’agit alors essentiellement des salaires versés pendant la
réalisation des études, que l’entreprise avance bien avant d’être réglée par son client.

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Le BFR est constitué essentiellement de:


Créances clients,
Stocks,
Charges constatées d’avance
Effets escomptés non échus,
diminués des
fournisseurs,
dettes fiscales et sociales.

Le BFR se crée dès lors que l’exploitation débute et il persiste tant que l’entreprise exploite
(le stock vendu est reconstitué aussitôt; lorsqu’une créance est payée, une nouvelle créance
naît). Il correspond donc à une somme d’argent immobilisée, qui ‘roule’ dans l’entreprise.

Comme le niveau du BFR évolue avec l’activité de l’entreprise, la manière la plus pertinente
de l’exprimer est de traduire le niveau de BFR en jours de C.A.

2.3 La trésorerie

Les ressources financières stables et les capitaux investis dans les immobilisations et le BFR
ne sont pas toujours parfaitement en phase. Cela peut provenir par exemple :
 saisonnalité marquée,
 ressources à long terme en phase d’investissement,
 préparation d’un investissement par l’entreprise.
Ce résidu correspond donc à l’argent frais, qui est disponible, où, inversement, qui fait
défaut si l’entreprise a investi sans se soucier des ressources stables. Il s’agit de la
trésorerie.

Arithmétiquement, c’est la différence entre les capitaux permanents d’une part, et les
investissements ( immo + BFR) d’autre part.
Elle comprend donc dans le bilan les postes qui n’ont pas été retenus pour l’estimation des
grandes masses précédentes :
 Les disponibilités à l’actif: valeurs mobilières de placement, la banque et la caisse,
 Les financements à court terme au passif: soldes débiteurs des banques, etc., et les
EENE.

D’où la notion de trésorerie nette.

2.4 Présentation du bilan financier

Le bilan financier est présenté de manière à montrer les capitaux investis et les financements
coûteux de l’entreprise, dans une perspective de court et long terme. Il tient en 6 ou 7
éléments.

D’un côté, on trouvera les actifs économiques, utilisés pour produire, qui comportent de toute
évidence les immobilisations nettes, et le besoin en fonds de roulement. Celui-ci est lié à la
structure de production de la firme, et au pouvoir de négociation des règlements:
l’exploitation absorbe donc des capitaux, mais elle en génère également par le biais du crédit

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fournisseur. Le total de l’actif ne mesure donc pas correctement les capitaux mobilisés pour
produire. Il faut le corriger par les ressources que génère l’exploitation. A cela sont ajoutées
les disponibilités. Bien que ces dernières ne soient pas indispensables pour exploiter, elles
sont prises en compte dans l’actif économique, car elles constituent aussi un emploi, financé
par une ressource coûteuse.
A u passif financier se trouvent les ressources coûteuses de la firme : fonds propres, fonds
empruntés, et mobilisations court terme.
L’avantage de cette présentation est de mettre aussitôt en évidence les 2 modes de
financement possibles: fonds propres, fonds empruntés, puis le déséquilibre financier
éventuel: disponibilités abondantes et inutiles, ou excès de mobilisations court terme.

Immobilisations nettes Fonds propres


Besoin en fonds de roulement Fonds empruntés
Disponibilités Mobilisations court terme

Un tableau supplémentaire d’analyse du BFR s’avère indispensable.


Parfois, il est nécessaire de créer un BFR hors exploitation, pour tenir compte de créances et
de dettes sans lien avec l’exploitation, lors de cessions, de paiement de dividendes, etc.

Certains analystes préconisent un bilan en 4 informations : Immo et BFR d’un coté, FP et


Dette nette de l’autre. La vision globale de la dette financière est améliorée, mais la
trésorerie s’en trouve occultée.

Si l’on regarde la situation de l’Oréal, nous avons le bilan suivant :

ACTIF 2000
Immobilisations incorporelles 4 641
Autres immobilisations corporelles 1 612
Immobilisations fnancières 1 352
Total immos nettes 7 605
Stocks & en-cours 1 227
Clients et comptes rattachés 2 248
Autres créances d'exploitation 950
Valeurs mobilières de placement 1 082
é
tsise
lC
,p
b
a
o
d
in
i 506
Charges constatées d'avance
Ecart de conversion actif
Charges
PASSIF à répartir
CapitalACTIF
TOTAL social 135
13 618
Primes 953
Autres réserves, divers fonds propres 4 532
Résultat de l'exercice 970
Total fonds propres 6 590

Provisions pour risques & charges 722


Dettes fnancières à plus d'un an 833
Dettes fnancières à moins d'un an 2 591
_________________________________________________________________________________________F
Dettes
inance / 10 fournisseurs et comptes de Management 2005 1 729
rattachés
Grenoble Ecole Dominique THEVENIN

Dettes fscales et sociales 1 153


TOTAL PASSIF 13 618
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Le bilan financier devient :

Actifs économiques Passif fnancier


IMMO 7 605FP 7 312
BFR 1 543DETTES MLT 833
DISPO 1 588D < 1 AN 2 591
10 736 10 736
On remarquera l’importance de la dette financière de moins d’un an. Les analystes, en
général, considèrent que la fraction des emprunts exigibles à moins d’un an fait partie des
mobilisations court terme, ce qui accentue l’impression de trésorerie « insuffisante ». Cette
pratique mélange un peu la situation à une date donnée et ce qu’elle serait dans l’année à
venir. Prudence excessive ?

3. Séquence 3 : Les soldes intermédiaires de gestion

Le bilan financier a mis en évidence, à partir du bilan, quelle est la politique


d’investissement et de financement de l’entreprise.
Le compte de résultat est la traduction de l'enrichissement (bénéfice) ou l’appauvrissement
(perte) de l'entreprise au cours d'un exercice (généralement une année). Il permet donc
d'analyser la performance économique et financière de l'entreprise au cours d'un exercice.
Cette performance se traduit par la différence des rentrées et sorties de flux liés à
l'exploitation ainsi que par la dépréciation de ses actifs. Ainsi le compte de résultat retrace
les sources d’enrichissement et d’appauvrissement de l’entreprise sur une période
donnée.
Il permet ainsi de construire un document, les Soldes Intermédiaires de Gestion, où sont
mis en évidence des grandeurs intermédiaires, qui correspondent à une succession de
marges, notamment:

 les taux de marge brute : il s’agit de la différence entre le prix de vente et le prix
d’achat des marchandises, biens et services. On parle de marge brute commerciale pour les
activités de négoce, de marge brute sur production pour les activités de services ou
industrielles, et de marge brute totale pour l’entreprise elle-même.

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inance / 11 Grenoble Ecole de Management 2005 Dominique THEVENIN
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 la valeur ajoutée = richesse créée par l'entreprise dans l'exercice de ses activités
courantes. C’est la différence entre son prix de vente et les consommations intermédiaires
incorporées dans les articles ou services vendus.

 l'excédent brut d'exploitation = flux revenant à l’entreprise généré par son


exploitation. C’est l’argent qui lui reste après avoir vendu sa production, et réglé toutes ses
dépenses d’exploitation (personnel inclus). L’EBE n’est pas affecté par la structure
financière de la firme; il doit être suffisant pour permettre à l’entreprise d’acquitter l’IS sur
son résultat d’exploitation, rémunérer la dette, et les actionnaires.

 le résultat d'exploitation : EBE diminué de l’amortissement, et des provisions, pour


constater l’usure des investissements. Il n’est pas affecté par la structure financière de
l’entreprise.

 le résultat économique: il s’agit d’ajouter au résultat d’exploitation les produits


financiers. Ce résultat mesure le mieux les activités industrielles et financières de la firme.
En effet, dans de nombreuses entreprises, les activités dites financières ne génèrent pas de
chiffre d’affaires, de marges traditionnelles, mais un revenu direct, qui est incorporé à ce
niveau dans la richesse produite.

 le résultat net: il correspond bien sur au résultat net de la comptabilité. Il est tributaire
de la politique de financement, et surtout de la volonté de lisser les résultats de la part des
dirigeants.

 la capacité d'autofinancement ou CAF: c'est ce qui reste à l'entreprise une fois qu'elle
a fait face à ses obligations, notamment fiscales. Il est souhaitable de distinguer la CAF
d'exploitation, et la CAF hors éléments exceptionnels, car la CAF globale est un amalgame
et ne permet pas de voir les ressources récurrentes.

La CAF d’exploitation correspond en fait à l’EBE diminué de l’IS; c’est la meilleure


mesure pour évaluer l’efficacité de l’exploitation, mais les renseignements dont dispose
l’analyste ne lui permettent pas toujours de la calculer (éclater l’IS dû au titre de
l’exploitation, des amortissements, des provisions, du service de la dette, etc., est une tâche
délicate).
La CAF hors éléments exceptionnels incorpore le service de la dette.

Nous joignons un tableau, non exhausitf, des SIG, pour des comptes français proches de la
liasse fiscale.

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TABLEAU DES SOLDES INTERMEDIAIRES DE GESTION


+ ventes de marchandises
- coût d’achats des marchandises vendues
= Marge Commerciale

+ Production vendue
+ Production stockée
+ Production immobilisée
= Production totale
- achat de matières premières
- var. de stocks de mat. prem.
= Marge sur production

autres achats et charges


- loyers crédit-bail
- frais du personnel intérimaire
- frais de sous-traitance (personnel)
= Consommations

+ marge commerciale
+ marge sur production
- consommations
= Valeur ajoutée

Valeur ajoutée
+ subvention d’exploitation
- impôts et taxes
- salaires et charges sociales
- frais de personnel intérimaire
- frais de sous-traitance (personnel)
= Excédent Brut d’Exploitation

EBE
+ reprises sur provisions
+ autres produits
- autres charges
- Dotations aux amort. & prov.
- quote part de crédit-bail équivalent aux dotations
= Résultat d’exploitation

+ produits financiers
- frais financiers autres qu’intérêts
= Résultat Economique avant IS (EBIT anglo-saxon)
- frais financiers (rémunération des dettes)
- quote part de crédit-bail équivalent aux frais financiers
= Résultat courant

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+ produits exceptionnels
- pertes exceptionnelles
= Résultat exceptionnel

Résultat courant
+ Résultat exceptionnel
- Participation des salariés
- impôt sur les sociétés (IS)
= Résultat net
rappel:
Vente de marchandises
+ Production vendue
= Chiffre d’affaires HT

CAPACITE D’AUTOFINANCEMENT
Méthode descendante Méthode ascendante

+ EBE Résultat Net


+ autres produits + DAP
- autres charges - reprises sur A & P
- participation des salariés + dotations financières
- impôts sur les société - reprises financières
+ dotations exceptionnelles.
= CAF d’exploitation - reprises exceptionnelles.
- plus valus de cession

CAF d’exploitation
+ Résultat financier = CAF (globale)
+ Résultat exceptionnel
= CAF (globale)

Les formules de calcul qui conduisent du compte de résultat au tableau de SIG sont jointes.
Il s’agit d’une grille type qui peut être modifiée en fonction des informations disponibles, et
du degré de précision souhaité par l’analyste. Nous vous conseillons de la reproduire sur un
tableur.

Comme nous l’avions proposé avec le bilan financier, nous communiquons les éléments pour
l’Oréal : compte de résultat déjà simplifié, et SIG.

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inance / 14 Grenoble Ecole de Management 2005 Dominique THEVENIN
ANALYSE FINANCIERE

PRODUITS D'EXPLOITATION :
Production vendue 12 671
Production stockée 200
Total des produits d'exploitation : 12 871
CHARGES D'EXPLOITATION :
Achats matières premières et appro. 2 555
Variation de stocks de matières premières -48
Autres achats et charges externes 5 989
Impôts, taxes et versements assimilés 146
Salaires et traitements 2 218
Dotation aux amortissements 386
Dotation aux provisions 85
Autres charges 59
Total charges d'exploitation : 11 390
RESULTAT D'EXPLOITATION 1 481
Produits fnanciers (rémunération du capital) 1
Charges fnancières (fnancement de la frme) 158
autres produits fnanciers 0
autres charges fnancières 2
RESULTAT FINANCIER -159
RESULTAT COURANT AVANT IMPOTS 1 322
RESULTAT EXCEPTIONNEL 0
Impôts sur les sociétés 489
RESULTAT NET 833

Les SIG en découlent, où les marges sont exprimées en % du CA :

Production vendue 12 671


CHIFFRE D'AFFAIRES 12 671
Production stockée ou immobilisée 200
Coût des marchandises vendues 0
Coût matières de la production 2 507
Autres achats et charges externes 5 989
VALEUR AJOUTEE 4 375 35%
Impôts et taxes 146
Charges de personnel 2 218
EXCEDENT BRUT D'EXPLOITATION (EBITDA) 2 011 15,9%
Dotations nettes aux amortissements et provisions 471
Autres charges et produits 59
RESULTAT D'EXPLOITATION (EBIT) 1 481 11,7%
Produits et charges fnanciers hors fnancement 1
RESULTAT ECONOMIQUE 1 480 11,7%
Frais fnanciers (y.c. quote part cr. bail) 158 1,2%
Impôt sur les sociétés 489
RESULTAT NET 833 6,6%
CAPACITE D'AUTOFINANCEMENT (CAF) 1 306 10%

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inance / 15 Grenoble Ecole de Management 2005 Dominique THEVENIN
ANALYSE FINANCIERE

4. Séquence 4 : L’analyse par les ratios

Bilan financier et Soldes Intermédiaires de Gestion procurent une vision des masses
financières qui touchent l’entreprise étudiée. Les investissements, leur financement sont
mesurés, et la richesse dégagée est expliquée. Néanmoins, ces éléments ne suffisent pas pour
mesurer si le circuit financier fonctionne correctement. Un croisement des grandeurs à
l’intérieur des tableaux, ou entre les tableaux eux-mêmes s’impose.
Le travail en question consiste à calculer des ratios financiers, mettant en évidence les
caractéristiques économiques et financières de l'entreprise. Ces ratios sont comparés au
secteur d'activité (quand cela est possible), ou suivis dans une perspective temporelle.

Ces ratios se regroupent autour des thèmes suivants :

Ils visent à déterminer comment l’entreprise assure sa rentabilité, et combien elle crée de
valeur pour les actionnaires, tout en conservant une structure financière cohérente, qui
limite les risques d'insolvabilité et d'illiquidité.

Le calcul de ces ratios met en évidence nombre de grandeurs significatives qui doivent être
interprétées.
Il est possible de calculer une infinité de ratios; mail il conviendra d'en calculer le minimum,
et surtout de cerner quelles en sont leurs limites.

Le cas de l’entreprise L’Oréal en 2000 sert encore d’illustration, et nous vous invitons à jeter
un œil dans les pages précédentes, où sont disponibles bilan financier et SIG.

4.1 ANALYSE DES MARGES ET DE LA RENTABILITE:

On explique généralement comment se forme la rentabilité de l’entreprise, définie du point de


vue de ses actionnaires, et mesurée par sa rentabilité financière, par trois grandes
composantes : l a rotation des capitaux investis, l e taux de marge, et l’impact de
l’endettement. Le rôle de l’endettement dans ce processus sera étudié en séquence 5.

La rentabilité financière,RFP, mesure la rentabilité totale de l'entreprise, qui revient à


l’actionnaire, c’est à dire combien gagne l’actionnaire pour 100 € investis dans la firme.
Elle est mesurée de la manière suivante:

* rentabilité financière = Résultat Net


Fonds Propres

Il s’agit d’une mesure évidemment très sensible à la politique de « lissage » des résultats, et il
est prudent de la considérer sur plusieurs années.

En 2000, l’actionnaire de L’Oréal perçoit donc 833 / 7302 = 11,4%.

Ce gain, revenant à l’actionnaire, est obtenu par la capacité du management à maitriser les
trois grandes composantes citées ci-dessus.

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inance / 16 Grenoble Ecole de Management 2005 Dominique THEVENIN
ANALYSE FINANCIERE

un « taux de marge » = il mesure combien l’entreprise gagne chaque fois qu’elle vend 100 €.
On peut le mesurer par Res net soit 833 / 12671 = 6,6% chez L’Oréal.
CA
Néanmoins, cette grandeur, dite « taux de marge nette », est tributaire de la politique de
provisions de la firme, de son mode de financement, et d’acquisitions. Il s’agit d’une mesure
globale, qu’il faut analyser, et expliquer, notamment en mesurant l’efficacité de l’exploitation
courante.

La mesure la plus pertinente de l’efficacité est l’EBE, car indépendante des investissements
et du financement : EBE soit 2011 / 12671 = 16% chez L’Oréal.
CA
Appelée souvent, à tort, « rentabilité commerciale », elle indique combien l’exploitation
récurrente dégage pour 100 € investis, qui serviront ensuite à payer les impôts, les intérêts des
emprunts, etc.
Un autre indicateur de marge pertinent est Résultat Economique/ CA, ici 1482 / 12671 =
11,7%, avant impôt naturellement. Il est souvent appelé marge opérationnelle dans les
entreprises.

D’autres indicateurs mesurent l’efficacité de l’exploitation et ses composantes, par exemple


l’efficacité du personnel: CA/ effectif, ou masse salariale / CA. Attention toutefois aux
interprétations hâtives, car le secteur d’activité a une influence considérable sur ces ratios.

La rotation des capitaux investis et la rentabilité économique :

Si le taux de marge indique combien l’entreprise gagne par rapport à ses ventes, il ne faut pas
oublier qu’au préalable, elle a du investir pour produire, donc engager des capitaux. Ce sont
ces capitaux que les revenus dégagés par l’exploitation doivent rémunérer. Il faut donc
déterminer combien l’entreprise est capable de vendre chaque fois qu’elle engage 1 €. Cette
mesure est appelée rotation :
CA =12671 / 10726 = 1,1813
Actifs économiques

Elle varie énormément d’un secteur d’activité à un autre. Les capitaux engagés dans les
services ou la distribution n’ont rien à voir avec des équipements lourds et durables.

Lorsque l’on combine un taux de marge (établi par Résultat économique / CA) et la rotation,
on obtient le taux de rentabilité économique :

rentabilité économique = Résultat Economique = 1482 / 10726 = 13,8% ,


Actif Economique

Ou encore taux de marge * rotation = 11,7% * 1,1813 = 13,8%

Réco mesure l’efficacité des actifs investis, c’est-à-dire combien gagne l’entreprise pour 100 €
investis. Elle indique la richesse dégagée à la fois par l’exploitation, les investissements
financiers et le produit de la gestion de la trésorerie. Le ratio est indépendant du mode de
financement. On le calcule avant impôts, mais il est aisé de l’évaluer théoriquement après
impôts. On le notera dans ce cas réco.

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inance / 17 Grenoble Ecole de Management 2005 Dominique THEVENIN
ANALYSE FINANCIERE

En général, taux de marge et rotation se compensent partiellement sous l’effet de la


concurrence : les secteurs à rotation rapide dégagent des marges très faibles, et inversement.

Le lien entre endettement et rentabilité est étudié ensuite en séquence 5.

4.2 Les ratios d’endettement

Après avoir expliqué la formation de la rentabilité, évaluer les risques de l’entreprise est
indispensable. Ce risque provient essentiellement de l’endettement, de l’ampleur des capitaux
investis, donc du BFR, et de la trésorerie.
Les ratios suivants se proposent de vérifier que la politique d’endettement de la firme est
judicieuse.

Le levier = Dette financière


Fonds Propres

On distingue souvent deux leviers, l’un calculé sur la base de la dette financière totale, l’autre
incluant seulement la dette long terme. Il est préférable de prendre la dette financière
totale, dans la mesure où elle génère les intérêts, et estime mieux l’effet de levier.
Ce ratio a été calculé pour l’Oréal, 0,47.
Selon les secteurs, les périodes, les limites peuvent fluctuer, mais dans de nombreux secteur,
le levier ne doit pas excéder 1, seuil au-delà duquel la plupart des banques et analystes
considèrent que la dette fait peser un risque trop fort.

Un ratio, couramment dit d’endettement (Dette totale / Passif) ne signifie pas grand chose,
bien que très apprécié des comptables, dans la mesure où il intègre les comptes fournisseurs
qui viennent eux-mêmes compenser des comptes-clients.

Le poids de la dette Frais fi indique quelle part de l’EBE est utilisée pour
EBE rémunérer la dette. 7,9% chez l’Oréal.
Dans la mesure où l’EBE doit encore financer les impôts, l’usure des installations, les
dividendes, il est prudent de limiter ce ratio à 25%.

Le coût de la dette: Frais fi indique combien coûtent 100 francs empruntés.


Dettes financières

L’horizon de la dette: Dette financière


CAF
Il indique dans combien d’années les ressources d’exploitation auront éteint la dette à long
terme, si elles sont affectées uniquement à rembourser la dette. Pour l’Oréal, l’horizon est de
1,97, c’est-à-dire que L’Oréal peut en principe se désendetter en deux ans. Comme
l’autofinancement est utilisé aussi pour distribuer des dividendes, investir, il est prudent de ne
pas dépasser le seuil de 3.

4.3 Analyse du BFR

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inance / 18 Grenoble Ecole de Management 2005 Dominique THEVENIN
ANALYSE FINANCIERE

L’objectif de l’analyse du BFR est d’appréhender l’influence de chacune de ses composantes


et de juger de la qualité de son évolution tant dans le temps que par rapport au secteur ou
concurrents. L’analyse du BFR d’exploitation est très importante en diagnostic financier, car
une mauvaise gestion du BFR est l’une des principales causes de faillite d’entreprise surtout
lorsqu’il s’agit d’une PME en forte croissance.
Et faut-il le rappeler, la lourdeur du BFR mobilise plus de capitaux, donc pénalise la
rentabilité de l’affaire, et nécessite des efforts supplémentaires pour se les procurer.

Ces éléments indiquent le rapport de force entre l’entreprise, ses clients et ses fournisseurs, et
reflètent les processus techniques de son métier.

Ratios de rotation:

* stocks en jdCA= stocks x 360


CA HT

* crédit clients en jdCA Clients x 360


CA HT

* crédit fournisseurs en jdCAFournisseurs TTC x 360


CA HT

Il est préférable d’utiliser ces ratios exprimés en j de CA, plutôt que les montants absolus, ou
en jours d’achats. Chez l’Oréal, on calcule aisément que les stocks représentent 35 jours de
CA, les clients dont on attend le règlement 91 jours, et les fournisseurs sont payés sur une
base de 49 j de CA.

De même, on exprime le BFR en jours de CA, et l’on peut suivre son évolution.

4.4 L’analyse de la trésorerie

Dans le bilan financier, nous avons montré que la trésorerie de l’entreprise correspondait à
son potentiel d’argent frais disponible. On le retrouvait en faisant la différence arithmétique
des postes de bas de bilan. Cette approche montre le net de trésorerie comme un constat, qui
conduit souvent des responsables d’entreprise à évoquer des « problèmes de trésorerie ».
En fait, il est préférable d’utiliser l’autre approche, plus explicite, qui montre la trésorerie
comme la différence entre les ressources stables et les capitaux investis en Immobilisation et
BFR. Sous cet angle, la trésorerie apparaît comme la conséquence des décisions de
financement et d’investissement.

L’analyse de trésorerie est importante, car ce résidu est dangereux. Trop abondant en
permanence, il détériore la rentabilité de l’entreprise. Trop rare, il est la source de défaillance.
C’est par là en effet que vient la faillite.

4.5 conclusion

Il est possible d'utiliser de nombreux autres ratios. Il appartient à l'analyste financier de


justifier l'utilisation de ceux-ci, et surtout de savoir interpréter tous ces chiffres.

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inance / 19 Grenoble Ecole de Management 2005 Dominique THEVENIN
ANALYSE FINANCIERE

Nous ne conseillons pas l’utilisation des ratios dits de solvabilité présents dans de nombreux
manuels. Confrontant les passifs exigibles à court terme avec les actifs à court terme, les
mesures sont censées indiquées si l’entreprise peut faire face à ses engagements à court terme.
Cela suppose d’abord que les actifs soient liquidables à cette valeur, qu’ils soient
suffisamment liquides, et surtout que leur liquidation n’entraine pas l’arrêt de l’exploitation !
Ces ratios sont pertinents dans une perspective de liquidation, mais en aucun cas de continuité
d’exploitation.

En définitive, l’analyse par les ratios contient en effet de nombreux pièges:

* des ratios non significatifs, si numérateurs ou dénominateurs sont exceptionnels,


* attention aux taux d’évolution de 100, 1000, ou 100000%, non significatifs.

A partir de l’analyse par les ratios, de nombreux analystes ont tenté d’élaborer des méthodes
de prédiction de défaillance. Deux approches doivent prises avec la plus grande précaution:

1/ La comparaison des ratios par secteur: l’entreprise est-elle vraiment représentative du


secteur dont on dispose des statistiques ? Ces statistiques sont-elles fiables ? (taille de
l’échantillon, écart-type, etc.).

2/ Le score: il s’agit d’appliquer des formules où certains ratios sont pondérés. La note
obtenue serait capable de prédire les défaillances. Très appréciées des banques pour les études
de crédit, car le traitement informatique procure des gains spectaculaires de productivité, ces
méthodes sont peu fiables. Rien ne vaut l’oeil d’un analyste averti !

Nous tenons une fois encore à mettre en garde contre une utilisation non réfléchie de l’analyse
par les ratios, qui conduit à une vision purement obscurantiste de la firme.

5. Séquence 5 : L’Effet de levier de la dette, ou l’incidence de l’endettement .

En séquence 5, nous avions évoqué la formation de la rentabilité pour l’actionnaire comme


étant la combinaison entre la rotation des capitaux investis, le taux de marge, et l’impact de
l’endettement. Ce dernier point n’a pas été traité, et fait l’objet d’une séquence entière.

Si l’on prend le cas d’une entreprise sans dette, par définition, sa rentabilité économique après
impôts, modulo modifications mineures, est égale à la rentabilité financière. Ainsi, ce qui
revient aux actionnaires est égal à ce qui est dégagé par les actifs.
Néanmoins, la plupart des entreprises s’endettent, et la seule explication possible de la
différence entre rentabilité économique et rentabilité financière provient de la dette.

Imaginons, ceteris paribus, L’Oréal se finançant sans dette, et établissons ses bilans financiers,
et SIG. Il vient :

ctx
investis fnancement

FP
10 726 10 726

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inance / 20 Grenoble Ecole de Management 2005 Dominique THEVENIN
ANALYSE FINANCIERE

13,8%
8,7%
8,7%
après IS
Les capitaux investis restent les mêmes, car ils sont évidemment indépendants du mode de
financement, et les fonds propres financent intégralement l’entreprise.

Pour les SIG, le résultat économique ne change pas. Par contre, les 158 d’intérêts
disparaissent, et les économies fiscales générées par les intérêts aussi. Nous avons calculé le
taux d’imposition moyen de l’Oréal, qui s’élève à 37%. Il convient donc de rehausser le
résultat net de 158* (1-37%) = 100, ce qui porte le résultat net de l’Oréal à 933 au lieu de 833.

Les capitaux investis dégagent un résultat économique avant IS de 1482, et après impôts de
933. Ces 933 reviennent intégralement à l’actionnaire, et on l’obtient donc que la rentabilité
financière = 8,7% = 933 / 10 726 = rentabilité économique après IS.

Ainsi, en l’absence de dette, la rentabilité servie à l’actionnaire égale la rentabilité


économique.

Revenons maintenant à la réalité, où la rentabilité financière de L’Oréal est de 11,4%. Ceteris


paribus, la différence entre les 11,4% servis et les 8,7% dégagés par le business ne peut
provenir que de la dette ! Dans le cas précis, la dette apporte presque 3% de rentabilité
supplémentaire aux actionnaires !

Car il se met en oeuvre le mécanisme dit d’effet de levier de la dette.


ctx investis fnancement

FP
10 726 7 302
11,4%
8,7% D
après IS 3 424

Le résultat revenant à l’actionnaire est le résultat économique (1482) diminué de la somme


correspondant aux intérêts générés par la dette et majoré des économies fiscales. Le résultat
net diminue, ce qui semble pénaliser l’actionnaire, mais en fait, l’endettement réduit la mise
initiale de ce dernier, ce qui contribue à accroitre sa rentabilité.

Ainsi, si réco désigne la rentabilité économique après IS, et i le taux d’intérêt de la dette,

Résultat Economique 1  TIS 


réco 
FP  D

RFP 
Part reven ant aux ac tionnaires  R  iD  1  TIS 
 Eco
Part inves tis par le s actionna ires FP

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inance / 21 Grenoble Ecole de Management 2005 Dominique THEVENIN
ANALYSE FINANCIERE

 REco  FP  D 
  iD  1  TIS 
 1  TIS 
RFP 
FP

REco  FP  D  iD 1  TIS 


RFP  (équation 1)
FP

rEco . D  iD 1  TIS 


RFP  rEco 
FP

D
et donc, RFP  rEco 
FP
 rEco  i 1  TIS  

Rendement pour l’actionnaire

Rentabilité économique après IS

Part de rentabilité générée par la Dette

La rentabilité servie à l’actionnaire augmente lorsque la part de la dette dans le financement


s’accroît (le ratio D/FP correspond au levier financier).
Il est clair que la dette génère une rentabilité supplémentaire seulement si son coût est
inférieur à la rentabilité économique de l’entreprise.

Ce mécanisme s’appelle EFFET de LEVIER de la dette. Il est composé du levier financier


(D/FP) qui sert à amplifier le gain généré par l’écart entre la rentabilité du projet et le coût de
la dette.

Pour l’Oréal, le taux d’intérêt des emprunts peut être estimé par les intérêts versés divisés par
la dette : 158 / 3424 = 4,6%, le levier D/ FP = 3424 / 7302 = 0,47. Pour un taux d’imposition
moyen de 37%, il vient alors un effet de levier = 0,47 * ( 13,8% - 4,6%) * (1-37%) = 2,7%.
Nous vérifions au passage que le coût de la dette est très inférieur au taux de rentabilité
économique dégagé par les capitaux investis.

Au cours des années 70’, beaucoup d’entreprises en France ont utilisé le mécanisme. Celui-ci
n’est pourtant pas sans risque. En effet, si le résultat économique se détériore, et tombe à 320 :
la rentabilité économique R a chute à 3%, et à 2% après impôts.

Si L’Oréal n’a pas de dette, R FP tombe à 2% également. Avec la dette, par contre, le résultat
net passe à 100 car les intérêts ne changent pas, soit Rfp = 1,4%. L’effet de levier est devenu
négatif, et ampute donc les gains générés par le business.

Chez l’Oréal, il existe une bonne marge de sécurité, entre les 13,8% dégagés par le business et
les 4,6% du coût des dettes. Mais il est envisageable que le résultat économique ne permette
plus de payer les intérêts de la dette... Il n’y a plus d’économie d’IS, l’entreprise perd alors sur
les deux tableaux.
L’effet de levier se transforme alors en ‘effet de massue’.

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inance / 22 Grenoble Ecole de Management 2005 Dominique THEVENIN
ANALYSE FINANCIERE

L’endettement accroît donc considérablement le risque de faillite, et le risque qui pèse sur les
fonds propres.
Ce mécanisme d’effet de levier est trompeur. Au-delà de l’incitation à l’endettement, il faut
bien comprendre que la comptabilité crée une sorte de mirage. En apparence, la rentabilité
servie à l’actionnaire augmente avec l’endettement, et certains ont pu voir un bon moyen
d’atteindre les sacro saints 15% de rentabilité financière. En fait, cette rémunération
supplémentaire servie à l’actionnaire n’est que la contrepartie d’une prise de risque plus
élevée !

6. Séquence 6 : l’analyse par les flux

Une vision complémentaire à l’analyse par les ratios peut être apportée par l’étude des flux
qui affectent la firme pendant les périodes écoulées.
Par flux, nous entendons une entrée ou une sortie d’argent de la firme. Tout flux affectant le
bilan et/ ou le compte de résultat, les tableaux de SIG et le bilan financier permettent de
reconstituer les causes de l’évolution de la trésorerie de l’entreprise. Toutefois, les comptes
publiés distinguent mal ce qui est flux et ce qui n’en est pas. Aussi la tâche est-elle fastidieuse
ou impossible lorsque l’entreprise ne publie pas de tableau de flux.

Le tableau de flux est obligatoire dans les états financiers anglo-saxons, et systématique dans
les sociétés françaises cotées. En 2005, les normes IFRS l’ont rendu obligatoire. La question
des « liasses fiscales » demeure.

En général, les tableaux reconstituent le plus fidèlement possible le cycle investissement-


financement-exploitation.

Pour cela, les flux sont classés selon 2 axes:

* flux d’entrée (ressources), vs flux de sortie (emploi)


* flux d’exploitation vs flux d’investissement et/ou de financement.

Un tableau recense les flux selon ces catégories, année par année.

Variation du BFR CAF exploitation


exploitation

Investissement désinvestissement

Dividendes, intérêts, Financement:delta


rbst des dettes, etc K, nouvelles dettes

L’analyse du tableau permet de déterminer quelles grandes masses composent l’équilibre


financier de l’entreprise. La lecture des états publiés montre de nombreux postes dont
l’incidence est très faible. Nous conseillons d’analyser ces tableaux en repérant les masses les
plus significatives.

7. Séquence 7 : Les niveaux d’information financière

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inance / 23 Grenoble Ecole de Management 2005 Dominique THEVENIN
ANALYSE FINANCIERE

Si l’étude de la performance économique et financière de l’entreprise est effectuée à partir


des bilans financiers, soldes intermédiaires de gestion, des ratios, et de l’éclairage
complémentaire du tableau de flux, la fiabilité du jugement est d’autant plus grande qu’elle
repose sur des informations de bonne qualité.
La phase d’alimentation préliminaire est donc cruciale, mais elle s’avère souvent délicate,
pour deux raisons :
 la disponibilité des informations nécessaires,
 la variété des présentations de ces informations.

Cette première démarche à mettre en oeuvre, pour établir un jugement sur la rentabilité et le
risque présentés, doit donc être suivie d’un tri, d’un retraitement des informations pour les
formater sous une forme plus financière. L’analyste se heurte très vite à des difficultés.

7.1 Les informations générales sur le secteur d’activité et l’entreprise.

il est bon de se procurer des études sectorielles, études du marché; passé et
perspectives. La concurrence, les points clés de l’actualité sur la période étudiée.
Cf études spécialisées, magazines, presse économique et financière.
Nous recommandons plus particulièrement Les Echos, la Tribune, Investir, et Option
Finance.

Informations générales sur la cible: passé, perspectives, activités, stratégie,


organisation, ses managers, etc.
Cf: presse économique,(mêmes références), rapports annuels, BALO 2.

Il faut prendre garde:


 aux rapports d’activités qui embellissent souvent la réalité, car sont des supports
publicitaires,
 aux petites entreprises, qui communiquent peu d’information,
 aux plus importantes, qui ne communiquent souvent que ce qu'elles désirent :
conformes sur un plan formel aux réglementations, elles sont souvent insuffisantes.

Toutes ces informations sont destinées à procurer une compréhension globale de


l'entreprise, de sa culture, de son passé, de son évolution récente, de la compétence de son
équipe managériale, de ses cycles de production, etc., etc.

Des progrès ont été constatés en France dans ce domaine, notamment dans les firmes cotées
sur le marché. En dépit des scandales récents, en particulier aux Etats-Unis, la contrainte
que le marché exerce sur les dirigeants des firmes les dissuade normalement de pratiquer le
« moral hasard », et de duper les acteurs du marché. De nombreux progrès restent
néanmoins à faire dans ce domaine.

7.2 Les états comptables et financiers

Pour assurer une gestion financière efficace, et pour des raisons fiscales et informatives, les
firmes se doivent de tenir une comptabilité au jour le jour de leurs transactions. Elle permet
de rendre périodiquement compte de la situation financière de l'entreprise aux apporteurs de
2
BALO/ Bulletin des Annonces Légales et Officielles

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inance / 24 Grenoble Ecole de Management 2005 Dominique THEVENIN
ANALYSE FINANCIERE

fonds (une obligation légale et contractuelle) et aux autorités fiscales (une obligation
légale).

La tenue de la comptabilité des transactions en France est résumée dans deux types de
documents:
- la liasse fiscale, document destiné aux autorités fiscales
- le rapport annuel, document destiné principalement aux actionnaires,

Les états comptables constituent le point de départ de toute analyse financière. Sans eux, il
est inutile de commencer les travaux: ce sont les seules pièces officielles qui communiquent
des chiffres financiers. Il est nécessaire de se procurer au moins les 3 derniers états
comptables pour autoriser une analyse et un jugement adéquats. Ils peuvent être obtenus
de plusieurs manières:
 dans les rapports annuels des sociétés (destinés principalement à l'information des
actionnaires (seules les sociétés cotées en Bourse sont tenues de les publier),
 dans des bases de données type Diane, sur Internet (sociétés.com),
 auprès de sociétés de renseignements commerciaux,
 au Greffe du Tribunal de Commerce, en forme de liasse fiscale établie à l'intention
des autorités fiscales3.
 Sur les sites web de la plupart des sociétés cotées.

Seule la liasse fiscale est soumise à un formalisme précis, établis aux normes du Plan
Comptable 1982. Les rapports annuels des sociétés peuvent donc présenter des niveaux de
précision très variés.
L’inconvénient avec la liasse fiscale est que ses informations sont purement patrimoniales,
coupent les cheveux en quatre, et sont peu financières. Son utilisation nécessite donc un
long travail de retraitements, qui peut être accéléré par un logiciel ou un tableur.
Inversement, les rapports d’activités des sociétés cotées sont moins normés, mais leur cible
de communication est le marché financier. Les informations sont plus financières, et
nécessitent en principe moins de retraitements. Les entreprises françaises cotées utilisent
des présentations assez proches des pratiques internationales, largement inspirées de la
culture anglo saxonne. On peut donc utiliser rapidement les informations, en allant chercher
des précisions dans les notes d’information.
De nombreuses sociétés cotées publient leurs comptes en monnaie étrangère, et aux normes
américaines. Au-delà des bilans présentés la tête en bas, et des comptes de résultat présentés
par destinations, les principales grandeurs ont leurs correspondances dans les bilans
financiers et SIG. En général, le bilan financier est même carrément publié !

A partir de 2005, les entreprises cotées européennes devront présenter leurs comptes aux
normes IFRS. Aux antipodes des principes franco français, ces normes privilégient la « juste
valeur », c’est-à-dire la valorisation des bilans en valeurs de marché.

7.3 Les retraitements et reclassements nécessaires

3
Toutes les sociétés commerciales sont en effet tenues de déposer leurs comptes au Greffe dans les 3 mois qui
suivent la clôture de leur exercice. Les amendes étant modiques, presque 1/3 des entreprises ne déposent pas
leurs comptes au Greffe ... qui constitue par ailleurs la source d'alimentation des bases de données type Diane.
Les seuls lieux où figurent à coup sûr les comptes des entreprises sont, et pour cause, les centres des impôts, et
les banques, qui n'ont pas le droit de les communiquer à des tiers.

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inance / 25 Grenoble Ecole de Management 2005 Dominique THEVENIN
ANALYSE FINANCIERE

En raison de la diversité des formes de publication, il est difficile de fournir ici une liste
exhaustive des informations à reformater. Certaines le seront déjà dans les comptes que
vous aurez entre les mains. Nous donnons ici les principales manipulations à effectuer.

7.3.1 Sur le bilan

Le bilan mesure le patrimoine de l’entreprise à un moment donné, donc il évalue ses


ressources (fonds propres, dettes diverses), et ses utilisations (investissements, stocks,
créances clients, liquidités). Il s’agit donc de la photographie, à un instant donné, de ce dont
elle dispose (actifs) pour accomplir ses missions, et des sources de financement de ses actifs
(passifs).
Les postes suivants sont particulièrement concernés par les retraitements :

ACTIF
Frais d'établissement Ils constituent ce qui est communément appelé
Frais de recherche et "actif fictif" ; en effet, ces postes sont dépourvus
développement de toute valeur vénale.
Charges à répartir Il s'agit en fait de charges qui sont inscrites au
Primes de remboursement des bilan dans le seul but d'être étalées dans le temps.
obligations En ce qui concerne notamment les frais de
recherche et développement, l'activation peut
d'ailleurs traduire des difficultés de l'entreprise, et
servir à masquer des pertes.

Ce sont des non valeurs qui doivent être


éliminées de l'actif (en contrepartie, ils sont
retranchés des capitaux propres au passif).
Cependant, le retraitement des frais de recherche
et développement ne sera pas effectué dans une
entreprise high tech, pour laquelle ils s'inscrivent
dans l'activité normale.
Immobilisations D'une manière générale, les immobilisations
figurent au bilan pour leur valeur nette comptable,
qui ne correspond que rarement à leur valeur de
réalisation. Il faut donc la corriger d e s
éventuelles plus ou moins values latentes qui les
concernent.

Charges constatées d'avance Les charges constatées d'avance représentent une


créance pour la société ; elles doivent donc leur
être rattachées dans le bilan financier.

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inance / 26 Grenoble Ecole de Management 2005 Dominique THEVENIN
ANALYSE FINANCIERE

Ecart de conversion - Actif L'écart de conversion - Actif représente une perte


de change latente pour l'entreprise ; dans une
optique plus économique que comptable, il
convient de corriger les fonds propres de
l'entreprise pour tenir compte de cette perte :
l'écart de conversion est donc éliminé de l'actif
et, en contrepartie, il est retranché des fonds
propres.
PASSIF
Produits constatés d'avance Les produits constatés d'avance représentent une
dette pour la société ; ils doivent donc leur être
rattachés dans le bilan financier.
Ecart de conversion - Passif L'écart de conversion - Passif représente un gain
de change latent pour l'entreprise ; dans une
optique plus économique que comptable, il
convient de corriger les fonds propres de
l'entreprise pour tenir compte de ce gain : l'écart
de conversion est donc rattaché aux fonds
propres.
DIVERS
Effets escomptés non échus Les effets reçus par la société et portés à
l'escompte sont traités en comptabilité comme un
règlement pur et simple de la créance, dans la
mesure où a lieu le règlement par la banque : les
E.E.N.E. ne figurent donc plus au bilan dans les
créances, mais ils doivent être mentionnés en
annexe par la société.
Cependant, tant que les effets escomptés non
échus ne sont pas arrivés à échéance, il subsiste
un risque d'impayé ; et en cas de défaillance du
débiteur, c'est l'entreprise qui en supportera les
conséquences ; ainsi, le montant des E.E.N.E. doit
ê t r e réintégré aux créances d'exploitation à
l'actif, et ajouté au montant des dettes à moins
d'un an (concours bancaires), comme si la
banque avait en fait avancé à l'entreprise le
montant correspondant.

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inance / 27 Grenoble Ecole de Management 2005 Dominique THEVENIN
ANALYSE FINANCIERE

Crédit-bail Le crédit-bail est une formule alternative à


l'acquisition d'immobilisations par emprunt
classique. Dans l'optique comptable, c'est la
vision patrimoniale du bilan qui est privilégiée :
les équipements financés par crédit-bail ne
figurent donc pas à l'actif du bilan comptable,
puisque l'entreprise utilisatrice n'en est pas
juridiquement propriétaire ; l'entreprise verse une
redevance périodique, qui apparaît dans le compte
de résultat de l'entreprise : c'est la seule traduction
comptable du crédit-bail. Mais l'entreprise est
tenue de mentionner dans son annexe une
information détaillée le concernant (montant de son
engagement, montant des redevances restant à payer, valeur
des biens correspondants au moment de la signature du
contrat, ainsi que montant des dotations aux amortissements
que l'entreprise aurait du constater si elle était propriétaire
des biens en question).
Le bilan financier intègre le crédit-bail comme s'il
s'agissait d'immobilisations acquises par
emprunt : la valeur nette des biens est ajoutée
aux immobilisations à l'actif, et elles est ajoutée
également au passif dans les dettes financières.
Le compte courant des associés Nous pensons préférable de le porter en dettes
s ’il est rémunéré, et en fonds propres sinon.

Dividendes Comptes après répartition : r i e n à f a i r e .


Comptes avant répartition : tenter de trouver
l’information, retirer les dividendes à payer des
fonds propres et les passer en « autre dette ».

Nota :Le crédit-bail est maintenant retraité dans les comptes publiés par les sociétés cotées.

7.3.2 Le Compte de Résultat

Le compte de résultat est la traduction de l'enrichissement (bénéfice) ou l’appauvrissement


(perte) de l'entreprise au cours d'un exercice (généralement une année). Le compte de
résultat permet donc d'analyser la performance économique et financière de l'entreprise au
cours d'un exercice. Cette performance se traduit par la différence des rentrées et sorties de
flux liés à l'exploitation ainsi que par la dépréciation de ses actifs. Ainsi le compte de
résultat retrace les sources d’enrichissement et d’appauvrissement de l’entreprise sur une
période donnée alors que le bilan fournit une situation des emplois et des ressources de la
société arrêtée à une date donnée.

Certains retraitements sont nécessaires :

Sous-traitance: elle fait partie comptablement des achats, alors qu’il s’agit d’externaliser
des coûts de main d’oeuvre. On rectifie aisément dans les SIG.

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ANALYSE FINANCIERE

Crédit-bail: un bien acquis en crédit-bail ne donne pas lieu à amortissement, et donc à une
diminution d’IS liée à l’amortissement; en revanche, il génère des loyers déductibles que le
comptable traite en “ autres achats et charges externes ”, mélangeant ainsi l’exploitation et
le mode de financement. Le retraitement consiste donc à supprimer le loyer de crédit-bail de
ce poste, et répartir son montant forfaitairement pour un 1/3 en frais financiers, et 2/3 en
amortissements équivalents. On obtient ainsi une meilleure estimation de l’EBE, et du coût
du financement.
Le crédit bail est déjà retraité dans les comptes publiés des sociétés cotées.

En conclusion, il est indispensable que l'analyste ait un regard critique sur toutes les
informations qu'il parvient à obtenir. Une ou plusieurs visites (s’il n’est pas de l’entreprise)
avec l'entreprise ou des entretiens avec les services opérationnels (s’il est de l’entreprise) est
un bon moyen de valider ou infirmer les premières interrogations que l'analyse ne manquera
pas de susciter.

7.4 Les comptes pro forma

Certains opérations bouleversent la structure des entreprises : fusions, cessions de filiales,


abandon d’activités, acquisitions, etc. D’un exercice à l’autre, les comptes s’en trouvent
profondément affectés. Il est donc fréquent de publier des comptes dits pro forma, c’est-à-
dire une reconstitution théorique de la situation qui aurait prévalu si l’opération n’avait pas
eu lieu. Ces comptes permettent de comparer dans une perspective de continuité entre deux
exercices.
Bien entendu, les comptes pro forma sont édités une seule fois.
Si ces comptes sont utiles, les entreprises peuvent en abuser. C’est souvent un bon moyen
de montrer que les comptes pro forma sont meilleurs que la réalité, et faire ainsi patienter
les analystes sur la réalité. L’utilisation abusive dans les années 2001 et 2002 les a un peu
discrédités.
D’une manière générale, les entreprises recourent de plus en plus souvent à la publication
de comptes théoriques où l’effet d’une mauvaise réalité est neutralisé. En 2003 et 2004, les
comptes pro forma sont moins utilisés, mais on communique des chiffres d’affaires et des
résultats « hors impact de la fluctuation des changes », l’évolution du cours de l’€ étant
défavorable aux entreprises facturant en $.

7.5 Les comptes consolidés

Lorsque la société étudiée comporte plusieurs filiales, il est indispensable de se procurer ses
comptes consolidés, qui reflètent l’activité et les engagements extérieurs de la firme.

En effet les comptes traditionnels, dits comptes sociaux, mesurent uniquement la société de
la tête du groupe. Généralement, il s’agit d’une holding qui détient les titres, ne vend pas de
prestations, finance ses filiales ou se refinance auprès d’elle, etc. Souvent, les comptes de la
société mère ne sont pas pertinents.
Il faut alors établir des comptes consolidés, qui incorporent le périmètre des sociétés sur
lesquelles la mère exerce une forte influence, soit par :
 détention directe de titres,
 un mandat de gestion, comme les syndic de copropriété.

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inance / 29 Grenoble Ecole de Management 2005 Dominique THEVENIN
ANALYSE FINANCIERE

L’opération, techniquement complexe, consiste à substituer les titres de participation du


bilan par les fonds propres des filiales. Pour cela, on élimine les opérations internes et on
cumule les bilans et compte de résultat.

On retrouve 3 méthodes, appliquées selon le degré de contrôle de la mère :


 pour les fortes détentions, on utilise l’intégration globale. Bilans et comptes de
résultats sont cumulés après élimination des opérations internes. Néanmoins, si le
contrôle est < 100%, on a trop additionné, et une partie du bénéfice revient en fait à
des tiers. Il s’agit des « intérêts minoritaires », que l’on retranche du compte de
résultat pour obtenir les « résultat net part du groupe », et que l’on passe dans les
fonds propres. Ces fonds propres sont en quelques sorte fictifs, et il faut les retraiter
dans l’ « autre dette ».
 Pour les détentions intermédiaires, l’intégration est proportionnelle. On additionne
alors les proratas détenus.
 Pour les détentions plus faibles, on calcule par « mise en équivalence », en prenant
le prorata des fonds propres.
Pour ces deux derniers cas, apparaît au compte de résultat une rubrique « quote part des
sociétés intégrées ou mises en équivalence », que l’on peut retraiter en produits financiers
ou éléments exceptionnels.

Il reste enfin à exposer la question des Goodwills ou écarts d’acquisition. Ces éléments
apparaissent en actifs incorporels après des fusions ou des acquisitions. En général, le prix
d’achat des filiales est > valeurs comptables. La différence apparaît donc dans la
consolidation, et génère un goodwill. Ce prix payé élevé est ensuite amorti sur longue
période : jusqu’à 40 ans aux USA ! On en trouve donc la trace dans les états financiers.
Le retraitement consiste à conserver en immobilisations le goodwill en question, mais son
amortissement ne correspond pas à un amortissement classique. Il est donc préférable de
l’isoler.

Dans le tableur fourni par nos soins aux étudiants de GEM, les retraitements de la
consolidation sont effectués automatiquement.

8. Ouvrages à consulter
ALBOUY Michel, décisions financières et création de valeur
CHARREAUX : Gestion Financière, Litec
LEVASSEUR et QUINTARD: Gestion Financière, Economica
SOLNIK: Gestion financière, Litec
TONDEUR et TOURON, Comptabilité en IFRS, Editions d’Organisation
VERNIMEN: Finance d’entreprise, analyse et gestion. Dalloz

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inance / 30 Grenoble Ecole de Management 2005 Dominique THEVENIN

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