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LES VASCULARITES RETINIENNES

I/ INTRODUCTION :
 Inflammation segmentaire ou diffuse des parois des vaisseaux rétiniens (vascularites ou périvascularites) et/ou des
capillaires.
 Elle peut se manifester principalement comme une phlébite ou une périphlébite, ou plus rarement comme une artérite
ou une capillarite, ou comme une combinaison des diverses atteintes précitées.
 Diagnostic aisé, basé sur le FO et l’AGF.
 Les étiologies sont multiples et le pronostic visuel dépond de la cause et la fréquence des complications occlusives.

RAPPEL ANATOMIQUE : BHR


Les capillaires rétiniens constituent la BHR interne
- De type continus, non fenêtrés et formés de ¢ endothéliales caractérisées par :
 Jonctions imperméables : zonulae occludens.
 Reposent sur une membrane basale continue.
 Rareté des vésicules de transport dans leur cytoplasme.

B. Fonctionnement : La BHR int est sélective :

- La perméabilité des molécules dépend de leur taille, et de leur solubilité dans les constituants membranaires.
- Le transport des molécules se fait par 2 mécanismes :

1) Transport passif : limité


 Diffusion simple : O2 et H2O.
 Pénétration intraÇre : Substances lipidiques : se combine aux lipoprotéines Mbre.
 Diffusion facilité : glucose, amino-acides.

2) Transport actif +++:
- Transfert d’1emolécule grâce à des pompes énergie-dépendantes, contre un gradient de pression (Mg 2+, K+, AA).

C. Rôle de la BHR:
- Protection contre les substances neurotoxiques et les  de leur [ ] ds le sg.
- Optimisation de l’environnement et maintient de l’homéostasie de la rétine et du vitré, en régulant les échanges ds les 2
sens :
 Glucose et aminoacides : jouent un rôle important ds le métabolisme rétinien, sont transportés de la choroïde vers
la rétine.
 L'eau, les anions organiques et la fluo vont du vitré et de la rétine, vers le sang choroïdien : mouvement
unidirectionnel car la rétine, n’ayant pas de lymphatiques, n'a pas d'autre manière d'éliminer les dérivés du
catabolisme.

II / PHYSIOPATHOLOGIE :
Mécanismes et conséquences : 3 types d’atteinte vasculaire.

1. Cascade inflammatoire dans la lumière vasculaire  : → thrombus + séquestration des cellules inflammatoires →
ischémie → hémorragies + néovascularisation.

2. Inflammation dirigée contre les antigènes spécifiques des cellules endothéliales et leurs jonctions  : → rupture de la
BHR interne + œdème rétinien.

3. Réaction à complexes immuns : → fixation aux parois vasculaires → activation de la voie du complément → lésions
pariétales vasculaires.

III/ DIAGNOSTIC POSITIF :

A/ Interrogatoire :

1. Circonstances de découverte :
 Formes asymptomatiques :
 Découverte fortuite des vascularites périphériques non compliquées lors d’un examen ophtalmologique pour un autre
motif ou systématique dans le cadre du bilan d’une maladie systémique.

 Formes symptomatiques :
 Vascularites rétiniennes aigues du pôle postérieur avec syndrome maculaire ou vascularites compliquées d’HIV :
o BAV ou brouillard visuel diffus variable.
o Myodésopsies, métamorphopsies, scotome central ou paracentral, dyschromatopsie, micropsie…

 Parfois découverte à l’angiographie lors d’une uvéite .

2. Antécédents du patient :
 ATCDs ophtalmologiques. 
 ATCDs généraux : Reynaud, maladie infectieuse (tuberculose, syphilis, HVC…), maladie de système…
 Notion de prise médicamenteuse.

B/ Examen clinique :

1. Examen ophtalmologique :
Acuité visuelle : variable selon le siège des vascularites et leur retentissement.
Annexes : une hypertrophie des glandes lacrymales → syndrome de Gougerot-Sjögren ou sarcoïdose.
Conjonctive et sclère : CPK, sclérite ou épisclérite.
Cornée : PRC (type).
CA : tyndall protéique et cellulaire, hypopion.
Iris : rubéose, nodules, SIC, atrophie sectorielle.
Tonus oculaire : uvéite hypertensive.
AIC : néovaisseaux angulaires.
Vitré : hyalite, œufs de fourmi, banquise, HIV.

Fond d’œil : confirme le diagnostic +++.

 Signes de vascularite : atteinte souvent des veines, rarement des artères


 Phase active :
 L’engainement vasculaire segmentaire ou diffus est le signe majeur +++ :
- Manchon blanc-jaunâtre périvasculaire, à bords flous, masquant +/- le vaisseau, pouvant entrainer un rétrécissement
de la lumière vasculaire (aspect moniliforme).
- Correspond à une infiltration de cellules inflammatoires des parois vasculaires et des zones péri-vasculaires.
 Dans les artérites s’ajoutent des hémorragies rétiniennes, des nodules cotonneux, des signes d’occlusion artérielle ou
artériolaire.

 Phase séquellaire :
- Blanchiment du vaisseau avec aspect déshabité (vaisseaux fantômes).
- Altérations de l’EP : lésion atrophique sous-jacente au vaisseau, migration pigmentaire le long du vaisseau.

 Dans les vascularites récidivantes, les lésions actives et séquellaires coexistent dans la plupart des cas .

 Angéite givrée : aspect d’arbre recouvert de neige intéresse le plus souvent le seul réseau veineux rétinien.

 Signes associés : valeur d’orientation.


 Uvéite intermédiaire.
 Foyers choriorétiniens : toxoplasmose, tuberculose, syphilis, sarcoïdose, choroïdites multifocales, Birdshot ….
 Foyers de rétinite : Behçet, rétinites virales, syphilis…
 Œdème maculaire, hyperhémie ou œdème papillaire.

2. Examen général : cutanéo-muqueux, pleuro-pulmonaire, ostéo-articulaire, neurologique, ORL, digestif…

C/ Examens complémentaires :
Angiographie à la fluorescéine : permet de :
 Confirmer le diagnostic et préciser la localisation et la sévérité de l'atteinte (périvasculaire, capillaropathie) :
- Les lésions actives à type de manchons blanc-jaunâtres périvasculaire sont hyperfluorescentes dès les temps
précoces avec diffusion de colorent aux temps tardifs.
- La capillaropathie ne peut être objectivée que par l’AGF qui permet de distinguer les formes ischémique, œdémateuse
ou mixte.

 Objective les complications : occlusions vasculaires, ischémie maculaire et périphérique, néovaisseaux, OMC, papillite.

OCT maculaire : permet de quantifier et de suivre l'œdème maculaire.

Bilan à demander : selon le contexte et l’orientation.


 NFS, VS, CRP, EPP.
 Sérologies : HVB, HVC, TPHA+VDRL, HIV, toxoplasmose.
 Bilan phosphocalcique, ECA, ECBU, protéinurie de 24h.
 IDR à la tuberculine, quantiféron, Rx thorax, TDM thoracique, FAN, AAN, ANCA…

IV/ DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL :


1. Plaques périartérielles cicatricielles de l'artérite de Kyrieleis sans traduction angiographique et évocatrices d'une
toxoplasmose.
2. Vascularite réactionnelle à un foyer tumoral.
3. Modification vasculaires de l’athérosclérose.
4. Rétinites pigmentaires / RD / OVR.
5. Télangiectasies rétiniennes congénitales.

VI/ ETIOLOGIES DES VASCULARITES :


 Les vascularites rétiniennes s'intègrent au cadre des uvéites intermédiaires ou postérieures. En cas d'uvéite
intermédiaire, les atteintes vasculaires sont périphériques et veineuses. En cas d'uvéite postérieure, l'atteinte est
veineuse, artérielle ou mixte.

A/ Vascularites rétiniennes infectieuses :


 Tuberculose, syphilis, toxoplasmose, maladie de Lyme, virus du groupe herpès (HSV, VZV, CMV, EBV).
 Autres : rickettsioses, maladie des griffes du chat, leptospirose, brucellose, Whipple, candida albicans, HIV (ID)…

B/ Vascularites rétiniennes inflammatoires :

1. Maladies oculaires pures :

Choriorétinopathie de Birdshot.

Pars-planites idiopathiques.

Vascularites rétiniennes idiopathiques :


o Rares, touchent les sujets jeunes < 40 ans.
o L'atteinte est oculaire, sans signes systémiques, et la vascularite est isolée (possibles tyndall de CA, hyalite, œdème
maculaire ou papillaire et occlusions vasculaires mais absence de lésions choroïdiennes ou rétiniennes).
o Le pronostic visuel est relativement favorable dans les formes œdémateuses sous réserve d'un traitement précoce de
l'œdème maculaire cystoïde. Les formes ischémiques et proliférantes, moins fréquentes, ont un pronostic visuel plus
réservé.

 Maladie d’Eales : caractérisée par des périphlébites occlusives et la survenue de néovaisseaux en « Seafan » à
la jonction des territoires ischémiques et non ischémiques (atteinte de la rétine pré-équatoriale). Elle serait liée à un
mécanisme d'hypersensibilité au bacille de Koch.

 Vascularites hémorragiques multifocales : vascularite occlusive dont le tableau oculaire et le pronostic visuel est
identique à celui de la maladie de Behçet. Il n'y a pas de manifestations systémiques tout au long de l'évolution.
 Angéites givrées : peut être idiopathique ou secondaire (infection ou inflammation : herpes, VIH, toxoplasmose,
lupus, maladie de Crohn, lymphomes et leucémies).

 Artérites rétiniennes avec anévrismes multiples et neuro-rétinite (IRVAN syndrome)  : l'atteinte est bilatérale,
comprend :
- Des ectasies multiples prédominant aux bifurcations du pôle postérieur sur les artères rétiniennes et de la tête du
NO.
- Des lésions exsudatives et hémorragiques marquées au pôle postérieur (artérites, tortuosité et irrégularité de
calibre artériel).
- Une ischémie de la rétine périphérique (obstructions artériolaires périphériques).

2. Maladies systémiques :
 Vascularites veineuses :
 Behçet, sarcoïdose.
 Sclérose en plaques : le risque de forme neurologique à 3 ans augmente en cas d'association NO-
périphlébites (60% /16%).
 Entéropathies (Crohn, RCH). 

 Vascularites artérielles :
 Maladie de Horton.
 Angéites nécrosantes systémiques : périartérite noueuse (PAN), granulomatose avec polyangéite (ex : Wegener). 
 Lupus érythémateux : femme jeune présentant une vascularite occlusive avec un vitré clair.
- Atteinte rétinienne : microangiopathie avec complications occlusives (aggravée par l’HTA, l'anémie et la présence d’Ac
APL).
- Atteinte choroïdienne : des DSR puis des lésions en taches de léopard à la phase cicatricielle.
 Artérites rétinienne du syndrome de Susac : rare, atteint plus volontiers les femmes jeunes.
- Associe une surdité de perception, des troubles confusionnels, des hyper-signaux à l'IRM dans la substance blanche,
le cortex cérébral, le corps calleux et les noyaux centraux, ainsi que des occlusions artérielles labiles.
- En poussée de la maladie, l'AGF peut découvrir des occlusions artérielles rétiniennes périphériques et des diffusions
de colorants segmentaires sur des artères non encore occluses. Ces signes sont transitoires et hautement évocateurs
de syndrome de Susac, mais peuvent aussi se voir dans le lupus érythémateux disséminé

D/ Syndromes paranéoplasiques : sujet > 50 ans.

E/ Causes toxiques : sulfamides, AINS, anti-convulsants…

VII/ COMPLICATIONS :
1. Ischémie maculaire : mauvais pronostic.
 AGF : augmentation de la zone avasculaire centrale et irrégularités ou discontinuités des capillaires périfovéolaires.
 OCT : discontinuités ou perte de la ligne des photorécepteurs et amincissement rétinien.
 Une ischémie même minime peut expliquer une mauvaise acuité visuelle, non améliorable.

2. Œdème maculaire.

3. Papillite :
 Souvent bénigne sauf dans les neuropathies optiques herpétiques rapidement cécitantes ou si foyer de toxoplasmose
adjacent à la papille (choroïdite de Jensen). Parfois, neuropathie optique ischémique antérieure dans les artérites
(maladie de Horton +++).

4. Néovascularisation :
 Les vascularites proliférantes : Behçet, sarcoïdose, pars planite, vascularites idiopathiques (Eales++), connectivites
(lupus, PAN), plus rarement tuberculose et syphilis.
 Les néovaisseaux prérétiniens ou prépapillaires  : peuvent être liés à l'inflammation ou à l'ischémie rétinienne. Cette
distinction est importante puisqu'en l'absence d'ischémie, le traitement inflammatoire seul peut permettre une
régression des néovaisseaux. À l'inverse, en cas d'ischémie étendue ( plus d'un quadrant) ou de
complications veineuses, la photocoagulation au laser des territoires ischémiques est réalisée sous corticothérapie.
 Néovaisseaux choroïdiens maculaires ou juxta-papillaires  : peuvent s'observer dans toutes les vascularites ou uvéites
postérieures avec ou sans cicatrices rétiniennes favorisantes. Cette complication est plus fréquente dans la sarcoïdose
et la maladie de Birdshot.

Étiologies des vascularites Etiologies des vascularites associées


compliquées d’occlusion veineuse à une occlusion artérielle

 Maladie de Behçet +++,  Maladie de Behçet.


sarcoïdose.  Toxoplasmose.
 Toxoplasmose (en regard du  Herpès.
foyer).  Maladie de Lyme, syphilis,
 Nécroses rétiniennes, tuberculose.
vascularites liées à l’EBV.  Connectivites et apparentés
 Rickettsioses. (Lupus, PAN, PR, Mdie de
 Connectivites (Lupus et PAN). Takayasu)
 Pars Planites.  IRVAN syndrome.
 Idiopathiques : Eales +++.  Syndrome de Susac.

VII/ TRAITEMENT :
1. Vascularites idiopathiques :
 Corticoïdes per os : 1mg/kg/j puis dégression progressive.
 Corticoïdes bolus puis relai per os : en cas de vascularites occlusives ou BAV sévère (moins de 5/10)
 Immunosuppresseurs (Azathioprine, Ciclosporine) : en cas d'échec ou de corticodépendance (dose supérieure à 40
mg).

2. Vascularites secondaires :
 Les modalités de traitement et les indications ne diffèrent pas de celles des uvéites postérieures.

3. Traitement des complications :


 La photocoagulation des zones ischémiques : indiquée si elles sont étendues sur plus d'un quadrant.
 Les IVT d’anti-VEGF : indiquées dans les formes proliférantes sévères, le syndrome d'IRVAN et les néovx
choroïdiens.

VIII/ CONCLUSION :
 Éliminer en 1er une cause infectieuse.
 La vascularite est le plus souvent un signe sémiologique des uvéites postérieures, elle est potentiellement grave de
par le risque d’occlusion vasculaire.
 L’œdème maculaire est la 1ère cause de BAV (capillaropathie œdémateuse, plus rarement ischémique).
 Les atteintes extraoculaires sont potentiellement graves excepté les vascularites idiopathiques et la maladie de
Birdshot.
 Le pronostic des VR est fonction de la localisation, l’étiologie, le traitement, les complications et le suivi au long cours +
++.
 Les éléments péjoratifs sont les formes ischémiques et l’atteinte maculaire.
 Les VR idiopathiques semblent avoir un meilleur pronostic que les autres groupes étiologiques, alors que le pronostic
visuel le plus défavorable est lié au Behçet.

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