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SEANCE N° 5

L’EXERCICE DE LA PROFESSION :
LA RESPONSABILITE DU BANQUIER

L’existence de devoirs professionnels spécifiques pesant sur les établissements de crédit et


leur organisation en tant qu’entreprises est sanctionnée par l’existence d’une responsabilité
multiforme. Le banquier répond donc des actes et des faits dommageables ou illicites commis
dans l’exercice de son activité.
Des sanctions disciplinaires peuvent être encourues par les établissements de crédit et leurs
dirigeants à raison de comportements contraires à l’éthique et à la déontologie de la
profession ou du non-respect de certaines normes de gestion.
Les sanctions disciplinaires pour infraction à la réglementation bancaire ou toutes autres
législations applicables aux établissements de crédit sont prononcées par la Commission
Bancaire de l’UMOA qui est habilitée à constater les infractions en la matière. Le régime des
sanctions disciplinaires est renforcé par des sanctions pécuniaires dont les sommes sont
recouvrées par la Banque Centrale pour le compte du Trésor public.
A côté des sanctions disciplinaires, existent des sanctions pénales (Section I). La
responsabilité civile du banquier demeure, quant à elle, soumise au droit commun. Elle
présente des traits généraux (Section II) et elle reçoit des applications spécifiques en matière
de crédit(Section III).

SECTION I : LA RESPONSABILITE PENALE

Le banquier répond au même titre que les personnes physiques ou morales de toute
infraction sanctionnée par le code pénal.

Plus particulièrement, il répond de certaines infractions relatives à la profession


bancaire et/ou aux opérations bancaires (articles 70 et s. de la loi portant réglementation
bancaire).
Les sanctions intéressent plusieurs infractions. Ce sont entre autres :
- l’exercice de l’activité d’établissement de crédit sans agrément ou au-delà des limites
de l’agrément ;
- la violation du secret professionnel ;
- la communication de documents ou renseignements inexacts à la Banque Centrale ou à
la Commission Bancaire ou le refus des contrôles prévus par la réglementation
bancaire ;
- les infractions aux règles en matière de comptabilité et d’information de la Banque
Centrale et de la Commission Bancaire.

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Des sanctions pénales sont aussi attachées aux infractions à la réglementation relative à la
lutte contre le blanchiment de capitaux.
Enfin, la Banque Centrale peut se porter partie civile pour faire appliquer effectivement les
sanctions prévues par la loi.

SECTION II : LA RESPONSABILITE CIVILE

La responsabilité civile des établissements de crédit est régie par le régime de droit
commun. Elle se fonde sur la violation d’une obligation préexistante qui oblige à réparer le
préjudice subi. Elle est généralement contractuelle dans les rapports du banquier avec son
client à raison des obligations que le contrat met à la charge du banquier (Paragraphe I). A
l’égard des tiers, la responsabilité devient délictuelle (Paragraphe II). Il est à noter que la
distinction classique entre responsabilité contractuelle et responsabilité délictuelle s’efface au
profit de la responsabilité professionnelle qui prend en compte la compétence et les moyens
dont dispose le banquier.

PARAGRAPHE I : LA RESPONSABILITE DU BANQUIER A L’EGARD


DES CLIENTS

Cette responsabilité découle tout d’abord de l’inobservation des lois et règlements en


vigueur. Elle est également consécutive à la mauvaise exécution, l’inexécution totale ou
partielle des ordres ou des opérations qui sont confiés au banquier par le client.
L’étendue de cette responsabilité dépend évidemment du contenu des obligations découlant de
chaque type d’opération. La difficulté majeure ici est de déterminer le contenu exact des
obligations assumées par la banque (obligation de moyens ou de résultat), d’autant plus que
les opérations bancaires sont d’une certaine technicité.
Cette détermination est rendue encore plus malaisée par la multiplication des clauses
d’exonération de responsabilité du banquier pour se protéger des conséquences de ses fautes
ou négligences. Elles peuvent supprimer une obligation ou simplement exonérer le banquier.
Leur effet n’est pas absolu : elles sont d’interprétation stricte et ne peuvent jouer en cas de
faute lourde ou de dol du banquier.
Le banquier peut en outre, conformément au droit commun, échapper à la responsabilité en
cas de force majeure ou de cas fortuit.
La responsabilité contractuelle du banquier vise donc à réparer le dommage prévisible
et non imputable à une cause étrangère.

En tout état de cause, le client doit rapporter la preuve de la réunion des trois conditions
classiques que sont la faute, le préjudice et le lien de causalité.

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PARAGRAPHE II : LA RESPONSABILITE ENVERS LES TIERS

La banque est tenue de réparer tout dommage fautif causé à un tiers ou même à un de
ses clients lorsque le dommage est indépendant des relations contractuelles existant
entre eux. La victime n’allègue pas ici un manquement à une obligation contractuelle, mais
un préjudice autonome causalement relié à un fait répréhensible de la banque. La faute de la
banque est appréciée en fonction de l’activité particulière, de sa compétence, de sa technique
et des moyens dont il dispose.

En réalité, quand il s’agit du non-respect d’une prescription légale, aucune discussion n’est
possible. C’est quand il s’agit d’un fait quelconque illégitime que les discussions s’ouvrent.
On songe ainsi aux débats sur le devoir de conseil du banquier ou la surveillance de
l’affectation réelle des fonds prêtés. Le banquier peut être aussi considéré comme fautif s’il
exécute des ordres entachés d’irrégularités ou d’anomalies apparentes ou s’il néglige de
vérifier l’identité d’un contractant.
En pratique, la faute est quasiment toujours imputable à la négligence, à l’incompétence ou,
plus rarement à la volonté de nuire d’un agent de l’établissement de crédit. On retiendra, sauf
qualification pénale, la responsabilité bancaire sur le fondement des articles 1382 ou 1383
du Code civil.
Il peut être aussi appliqué le principe de la responsabilité des commettants du fait de leurs
préposés (Art. 1384 al. 5 du Code civil). Il en est ainsi du détournement des fonds d’un client
par un fondé de pouvoirs.
La banque condamnée à réparer le dommage subi par un tiers par la faute d’un de ses
préposés dispose d’un recours contre celui-ci, sauf si elle a couvert ses agissements et commis
elle-même une faute.

SECTION III : LA RESPONSABILITE EN MATIERE DE CREDIT

Une banque est avant tout un commerçant qui cherche à développer son activité, y compris
dans la distribution du crédit. L’idée que sa responsabilité civile soit engagée à la suite d’un
financement imprudent d’une entreprise ou d’un particulier a été discutée. En effet, le principe
de non-ingérence exclut que la banque se substitue à son client pour décider des moyens de
financement que celui-ci utilisera. Pourtant les crédits bancaires peuvent créer des situations
dommageables pour les tiers, par exemple en favorisant le développement d’entreprises
inconsistantes ou en permettant que survivent temporairement des entreprises en situation
désespérée. Des crédits excessifs peuvent également être ruineux pour le client lui-même.

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Le banquier peut engager sa responsabilité envers les créanciers du bénéficiaire d’un
crédit et envers le bénéficiaire lui-même. Il faut envisager deux hypothèses apparemment
contradictoires : la rupture brutale de crédit (Paragraphe I) et l’octroi abusif de crédit
(Paragraphe II).
PARAGRAPHE I : LA RUPTURE BRUTALE DE CREDIT

La question se pose surtout à l’occasion de la révocation d’une ouverture de crédit à durée


indéterminée car chaque partie a la possibilité d’y mettre fin par une volonté unilatérale. Il
s’agit d’un droit de résiliation unilatérale qui est commun à tous les contrats successifs. Mais
dans le cadre de l’ouverture de crédit, surtout s’il s’agit d’un crédit d’exploitation, la
banque est tenue d’assortir la rupture d’un délai suffisant de mise en œuvre, sous peine
de se voir imputer comme faute la brutalité de sa décision et d’avoir à en réparer
pécuniairement les conséquences dommageables.

PARAGRAPHE II : L’OCTROI ABUSIF DE CREDIT

Les crédits bancaires peuvent compromettre la sécurité des relations commerciales : un crédit
octroyé à une entreprise dont la situation est compromise a surtout pour seul effet
d’augmenter le nombre de ses créanciers et l’importance de son passif ; en créant une
apparence de solvabilité, un tel crédit fera de nouvelles victimes car les créanciers du crédité
perdront leur créance dans la disparition inéluctable de l’entreprise. Ces créanciers peuvent
demander réparation de ce préjudice né de la rupture tardive du crédit.

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