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INSTITUT LA CONFÉRENCE H I P P O C R AT E
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La Collection Hippocrate
Épreuves Classantes Nationales
PSYCHIATRIE
Troubles de la personnalité
II-286
Dr Angéla ROUSSEVA
Chef de Clinique
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II-286
Troubles
de la personnalité
Objectifs :
– Diagnostiquer un trouble de la personnalité et apprécier son
retentissement sur la vie sociale du sujet.
– Identifier les situations d’urgence et planifier leur prise en charge.
– Argumenter l’attitude thérapeutique et planifier le suivi du
patient.
INTRODUCTION
1. Définitions
● Personnalité provient du mot latin persona qui désignait les masques portés par les acteurs de
théâtre.
● Les notions de constance et de stabilité sont essentielles à la définition de la personnalité et
permettent la distinction d’avec les symptômes dont l’apparition est ponctuelle et limitée
dans le temps.
● La personnalité est un ensemble structuré, stable, résultant de l’interaction permanente entre
l’individu et son environnement, et ce depuis les étapes les plus précoces du développement.
2. Théories de la personnalité
● Les théories de l’apprentissage et les approches comportementales ou « behavioristes » :
– Elles sont fondées sur l’étude expérimentale des conditions d’acquisition de comportements
objectivement observables d’un individu, en réaction à des stimuli de l’environnement.
● L’éthologie :
– Les travaux éthologiques ont consisté, à leur origine, en l’observation des comportements
spontanés des animaux dans leur milieu naturel, avant d’être transposés à l’observation de
l’enfant ; ces travaux ont montré en particulier la présence de périodes sensibles au cours
du développement de l’animal, pendant lesquelles la rencontre avec certains objets de rela-
tion va déterminer la forme des attachements ultérieurs (phénomène de l’empreinte).
● Les approches systémiques :
– Considèrent l’ensemble structuré formé par l’individu et un certain nombre de membres de
son entourage. Elles étudient notamment les modes de communication entre les éléments
d’un tel « système » et les conséquences possibles de leur perturbation.
● La psychologie génétique :
– A pour objet la description du développement de la personnalité ou de certains de ses
aspects essentiels comme l’intelligence (travaux de J. Piaget) ou la maturation psychomo-
trice et émotionnelle (travaux de H. Wallon).
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– Personnalité paranoïaque :
* ce diagnostic est plus souvent porté chez l’homme que chez la femme ;
* dans la tradition française, elle est constituée de quatre traits fondamentaux :
■ l’hypertrophie du moi,
■ la méfiance,
■ l’inadaptation sociale,
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* les limites du concept avec les délires paranoïaques et la schizophrénie restent mal
connues (difficultés de réalisation d’études chez les paranoïaques).
– Personnalités psychasthéniques ou obsessionnelles :
* le diagnostic de personnalité obsessionnelle est plus souvent porté chez l’homme que
chez la femme ;
* elles regroupent :
■ la personnalité psychasthénique, avec sentiment d’incomplétude, asthénie physique,
■ l’agressivité,
■ l’inaffectivité apparente,
■ l’impulsivité,
à la vie) ;
* sur le plan psychodynamique, certains mécanismes de défense caractériseraient de façon
spécifique cette organisation de la personnalité où le sens de l’identité est fondamentale-
ment perturbé : le clivage (se traduisant par la perception manichéenne du monde et par
l’alternance d’amour et de haine concernant un même objet), l’identification projective –
idéalisation de soi (ou d’autrui)/dévalorisation d’autrui (ou de soi) – et le déni.
– Personnalités narcissiques :
* hyperactives, énergiques et vaniteuses, témoigneraient de formations réactionnelles à la
crainte de la castration et d’une fixation au stade phallique du développement. Un Soi gran-
diose ne pourrait être maintenu chez ces sujets qu’au prix d’une dévalorisation constante de
l’autre. L’échec de cette défense conduit en effet à des décompensations dépressives sévères.
Troubles de la personnalité selon les critères du DSM-IV
● Ils sont notés dans l’axe II dans le système diagnostic multiaxial, l’axe I portant sur le dia-
gnostic principal (motif de la prise en charge).
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A/ Généralités
● Modalité durable de l’expérience vécue et des conduites qui dévie notablement de ce qui est
attendu dans la culture de l’individu. Cette déviation est manifeste dans au moins deux des
domaines suivants :
– La cognition (c’est-à-dire la perception et la vision de soi-même, d’autrui et des événe-
ments).
– L’affectivité (c’est-à-dire la diversité, l’intensité, la labilité et l’adéquation de la réponse
émotionnelle).
– Le fonctionnement interpersonnel.
– Le contrôle des impulsions.
● Ces modalités durables sont rigides et envahissent des situations personnelles et sociales très
diverses.
● Ce mode durable entraîne une souffrance cliniquement significative ou une altération du
fonctionnement social, professionnel ou dans d’autres domaines importants.
● Ce mode est stable et prolongé, et ses premières manifestations sont décelables au plus tard
à l’adolescence ou au début de l’âge adulte.
● Ce tableau n’est pas mieux expliqué par les manifestations ou les conséquences d’un autre
trouble mental.
● Ce mode durable n’est pas dû aux effets psychologiques directs d’une substance (par
exemple : une drogue donnant lieu à abus ou un médicament) ou à une affection médicale
générale (par exemple : un traumatisme crânien).
2. Personnalité schizoïde
● Mode général de détachement par rapport aux relations sociales et de restriction de la varié-
té des expressions émotionnelles dans les rapports avec autrui, qui apparaît au début de l’âge
adulte et est présent dans des contextes divers, comme en témoignent au moins quatre des
manifestations suivantes :
– Le sujet ne recherche, ni n’apprécie, les relations proches y compris les relations intrafami-
liales.
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3. Personnalité schizotypique
● Mode général de déficit social et interpersonnel marqué par une gêne aiguë et des compé-
tences réduites dans les relations proches, par distorsions cognitives et perceptuelles, et par
des conduites excentriques. Le trouble apparaît au début de l’âge adulte et est présent dans
des contextes divers, comme en témoignent au moins cinq des manifestations suivantes :
– Idées de référence (à l’exception des idées délirantes de référence).
– Croyances bizarres ou pensées magiques qui influencent le comportement et qui ne sont pas
en rapport avec les normes d’un sous-groupe culturel (par exemple, superstition, croyance
en un don de voyance, en la télépathie ou en un « sixième » sens ; chez les enfants et les ado-
lescents, rêveries ou préoccupations bizarres).
– Perceptions inhabituelles, notamment illusions corporelles.
– Pensée et langage bizarres (par exemple, vagues, circonstanciés, métaphoriques, alambiqués
ou stéréotypés).
– Idéation méfiante ou persécutoire.
– Inadéquation ou pauvreté des affects.
– Comportement ou aspect bizarre, excentrique ou singulier.
– Absence d’amis proches ou de confidents en dehors des parents au premier degré.
– Anxiété excessive en situation sociale qui ne diminue pas quand le sujet se familiarise avec
la situation et qui est due à des craintes persécutoires plutôt qu’à un jugement négatif de soi-
même.
● Ne survient pas exclusivement pendant l’évolution d’une schizophrénie, d’un trouble de
l’humeur avec caractéristiques psychotiques, d’un autre trouble psychotique ou d’un trouble
envahissant du développement.
N.B. : Les personnalités schizoïdes et schizotypiques posent un problème nosographique :
s’agit-il de troubles de personnalité individualisés ou de manifestations appartenant « au
spectre de la schizophrénie » ?
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4. Personnalité obsessionnelle-compulsive
● Mode général de préoccupation pour l’ordre, le perfectionnisme et le contrôle mental et
interpersonnel, aux dépens d’une souplesse, d’une ouverture et de l’efficacité, qui apparaît au
début de l’âge adulte et est présent dans des contextes divers, comme en témoignent au moins
quatre des manifestations suivantes :
– Préoccupations pour les détails, les règles, les inventaires, l’organisation ou les plans au
point que le but principal de l’activité est perdu de vue.
– Perfectionnisme qui entrave l’achèvement des tâches (par exemple : incapacité d’achever un
projet parce que des exigences personnelles trop strictes ne sont pas remplies).
– Dévotion excessive pour le travail et la productivité à l’exclusion des loisirs et des amitiés
(sans que cela soit expliqué par des impératifs économiques évidents).
– Est trop consciencieux, scrupuleux et rigide sur des questions de morale, d’éthique ou de
valeurs (sans que cela soit expliqué par une appartenance religieuse ou culturelle).
– Incapacité de jeter des objets usés ou sans utilité, même si ceux-ci n’ont pas de valeur sentimentale.
– Réticence à déléguer des tâches ou à travailler avec autrui, à moins que les autres ne se sou-
mettent exactement à sa manière de faire les choses.
– Se montre avare avec l’argent pour soi-même et les autres.
– Se montre rigide et têtu.
5. Personnalité antisociale
● Mode général de mépris et de transgression des droits d’autrui qui survient depuis l’âge de
15 ans, comme en témoignent au moins trois des manifestations suivantes :
– Incapacité de se conformer aux normes sociales qui déterminent les comportements légaux,
comme l’indique la répétition de comportements passibles d’arrestation.
– Tendance à tromper par profit ou par plaisir, indiquée par des mensonges répétés, l’utilisa-
tion de pseudonymes ou d’escroqueries.
– Impulsivité ou incapacité à planifier à l’avance.
– Irritabilité ou agressivité, indiquées par la répétition de bagarres ou d’agressions ;
– Mépris inconsidéré pour sa sécurité ou celle d’autrui.
– Irresponsabilité persistante, indiquée par l’incapacité répétée d’assumer un emploi stable ou
d’honorer des obligations financières.
– Absence de remords, indiquée par le fait d’être indifférent ou de se justifier après avoir bles-
sé, maltraité ou volé autrui.
– Âge au moins égal à 18 ans.
● Les comportements antisociaux ne surviennent pas exclusivement pendant l’évolution d’une
schizophrénie ou d’un épisode maniaque.
D/ Complications évolutives
1. Communes à toute pathologie psychiatrique
● Suicide ou tentatives de suicide à répétition.
● Dépression : la dépression est souvent d’évolution chronique ou la rémission est partielle.
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Devant un tableau dépressif évoluant depuis plusieurs mois ou une efficacité partielle du
traitement antidépresseur, il faut rechercher un trouble de personnalité sous-jacent (après
élimination des causes organiques ou toxiques, d’une éventuelle comorbidité psychiatrique,
d’un métabolisme rapide de la molécule ou d’une mauvaise observance du traitement).
● Abus de toxiques et de médicaments (errance thérapeutique).
● Désinsertion socioprofessionnelle.
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b) Personnalité obsessionnelle-compulsive
– La prise en charge n’est demandée qu’après une décompensation aiguë soit du sujet, soit
d’un enfant.
– Une thérapie cognitivo-comportementale ou, plus rarement, d’inspiration analytique peut
être utile.
– La prescription d’antidépresseurs est faite lors des épisodes dépressifs ou si une symptoma-
tologie de TOC apparaît (traitement sérotoninergique).
c) Personnalité antisociale
– Responsabilisation face à la loi.
– Prise en charge institutionnelle, souvent par injonction thérapeutique.
– Pas de prescription de benzodiazépines ou de carbamates : conduites toxicomaniaques.
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d) Personnalité borderline
– Psychothérapie d’inspiration analytique ou cognitivo-comportementale.
– Prescription de neuroleptiques (plutôt atypiques) lors des décompensations délirantes ou
dissociatives, maintenus au long cours à faible dose, à visée anti-impulsive. Certains psy-
chiatres prescrivent des thymorégulateurs anticonvulsivants avec de bons résultats.
– La prise en charge doit être institutionnelle.
– Les hospitalisations sont indiquées lors des décompensations aiguës ou si le risque suici-
daire est important.
e) Personnalité paranoïaque
– La prise en charge ne se fait qu’après une décompensation aiguë avec passage à l’acte auto
ou hétéroagressif ou état délirant.
– L’hospitalisation est quasi systématiquement contre le gré du patient et le plus souvent
selon les modalités d’une hospitalisation d’office. L’hospitalisation à la demande d’un tiers
(HDT) est classiquement déconseillée (le tiers devient persécuteur).
– Le suivi est difficile et se fait par injonction thérapeutique.
– La réponse aux neuroleptiques est mauvaise.
g) Personnalité narcissique
– Psychothérapie de soutien.
– Psychothérapie d’inspiration analytique très cadrée.
– Traitement antidépresseur lors des épisodes dépressifs.
G/ Résumé
● Le diagnostic de personnalité pathologique nécessite une anamnèse complète ressassant le
fonctionnement global du sujet en dehors des décompensations aiguës.
● Un trouble de personnalité peut coexister avec une autre pathologie psychiatrique de l’axe I
du DSM-IV et peut en influencer le pronostic et la prise en charge.
● La prise en charge est fonction du type de personnalité et doit porter sur les complications
évolutives, le traitement d’une pathologie psychiatrique éventuelle de l’axe I.
● L’approche est psychothérapeutique : analytique pour les personnalités histrionique, passive-
dépendante, borderline et narcissique ; institutionnelle pour les personnalités antisociales,
paranoïaque et schizoïde/schizotypique. Les thérapies cognitivo-comportementales sont
généralement efficaces en dehors des personnalités histrioniques, paranoïaque, antisociale.
● La prévention des complications évolutives doit être idéalement primaire.
● L’hospitalisation n’a de sens qu’en cas de décompensation aiguë mettant en danger le pro-
nostic vital du sujet.
● Dans le cadre des personnalités schizoïde et schizotypique, la prise en charge doit porter sur
la réinsertion socioprofessionnelle. ■
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