Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Il y a du droit dans n’importe quelle société, et on peut dire que la première forme
de droit qui est apparu est le droit pénal, le droit de sanctionner. Le droit pénal est
la branche du droit qui a pour objet au fond de réprimer les infractions et les
prévenir. C’est-à-dire que le droit pénal est le droit du comportement. Par
conséquent, c’est un droit qui est très proche de la notion d’éthique. L’éthique est
un terme qui vient du grec « ethos » qui veut dire comportement. Ainsi, le droit
pénal vient sanctionner les comportements qui ne sont pas bons. La question qui
se pose est de définir un mauvais comportement et comment le décider. Au cœur
de cette question se trouve la figure importante du juge. Le droit pénal est
également lié à une autre notion importante : la notion d’intérêt général. C’est-à-dire
que le droit pénal a pour vocation, en réglant le comportement, d’assurer une forme
de bien commun. On règle les comportements pour que nous puissions tous agir
ensemble.
Dans cette évolution du droit pénal, il y a plusieurs périodes du droit pénal. La
première période est la période du Proche Orient.
Le Proche Orient
C’est la période qui apparait avec l’apparition de l’écriture. Nous sommes 3000
avant notre ère. C’est là qu’on trouve les premières traces du droit pénal. Ce droit
pénal oriental est un droit pénal très marqué par la Religion et par l’autorité du roi.
C’est un droit pénal donné par les dieux qui a pour objectif de préserver le pouvoir
du roi.
L’Empire Romain
La deuxième période est la période de l’Empire Romain (VIIIème siècle avant notre
ère jusqu’au VIème siècle de notre ère). Cette grande chronologie correspond à la
chronologie de l’empire romain. Dans l’Antiquité les romains sont les premiers à
étudier le droit comme une science. Ils n’ont pas étudié le droit pour des raisons
politiques ou religieuses mais scientifique. Cette science du droit se développe sur
plus d’un millénaire. C’est un millénaire de réflexion sur le droit. De plus, la
géographie de l’Empire Romain justifie l’importance de celui-ci pour le droit
moderne.
La Chute de l’Empire Romain d’Occident
Il y a une troisième grande période qui est la période dès la Chute de l’Empire
Romain d’Occident au XIIIème siècle (476-XIIIeme siècle). Cette période est
importante car elle voit l’installation des Royaumes Barbares (Goths, Wisigoths,
Francs). Ces populations vont installer des royaumes dans l’empire romain et vont
amener leurs propres traditions juridiques. Ainsi, on va avoir une coexistence du
droit romain et les droits et coutumes des royaumes barbares/germaniques du
Xème siècle au XIIIème siècle. Par suite, du Xème siècle au XIIIème siècle, on
assiste à une sorte de désagrégation du pouvoir, c’est-à-dire une disparition de
l’Etat remplacé par des autorités locales qui s’appellent des seigneurs. Ces
derniers sont des chefs militaires qui exercent une autorité militaire sur un petit
territoire. Au cours de ces périodes on assiste à la transformation évolutionnaire de
l’Etat. La question qui constitue à se poser au cours de cette évolution est « qui a le
droit de punir ? ».
Du XIIIème siècle au XVIème siècle
Par suite, la quatrième période du droit pénal est la période du XIIIème siècle au
XVIème siècle. Celle-ci est une période marquée par la construction d’un pouvoir
souverain, la construction d’un Etat qui étend sa souveraineté sur tout le territoire.
C’est la mise en place d’une justice de type publique qui remplacera toute forme de
justice privée. L’Etat concentre, dans ce cas, tous les moyens coercitifs. L’Etat, à
partir du XIIIème siècle monopolise la justice et devient un véritable régulateur des
comportements sociaux. Donc, cette période est une période où on verra l’Etat
s’imposer comme l’autorité principale pour exercer la justice qui accompagne sa
mise en œuvre de sa souveraineté. A la fin du XVIème siècle, cette période
marque la mise en place d’une réflexion sur le droit romain surtout après la
redécouverte de celui-ci.
Du XVIème au XVIIIème siècle
La Vème période est une période qui s’étend du XVIème au XVIIIème siècle. C’est
une période durant laquelle on voit les ouvrages doctrinaux consacrés au droit
pénal se multiplier de manière importante et ayant comme but d’améliorer la qualité
de la justice. C’est une période qui s’achève avec la Révolution française sous une
forme de contestation de la justice pénale. Avec les mouvements des Lumières, les
peines de justice sont considérées comme trop sévères. Au fond, on va doucement
vers une période révolutionnaire.
La période révolutionnaire (XVIII-XIX siècle)
La VIème période est la période révolutionnaire (XVIII- XIX). C’est une période où on
considère que le droit pénal ne doit pas se limiter à punir le délinquant mais il doit
l’améliorer. Jusqu’à la Vème période, il y avait un droit pénal qui est un droit de
régulation des comportements qui sanctionne le criminel. C’est un droit qui doit
impressionner pour éviter que d’autres commettent les mêmes crimes. Mais, à
partir du XVIIIème siècle et la Révolution française, la philosophie du droit pénal
change d’une philosophie de répression à une philosophie de réhabilitation. C’est là
qu’on voit le passage du « droit criminel » au « droit pénal ». C’est là qu’on voit
apparaitre, par exemple, la peine de prison. L’idée de prison est de permettre à
celui qui a été incarcéré de s’améliorer.
Du XIXème au XXIème siècle
La dernière et VIIème période est la période du XIXème au XXIème siècle. Celle-ci
est une période marquée par la codification du droit pénal dans le Code pénal et le
Code de procédure pénale. Le Code de 1984 qu’on utilise jusqu’à présent date de
1810. Cette période est aussi marquée par la prise en compte de nouveaux
intérêts. Par exemple, on trouve de nouvelles formes d’agression contre l’Etat
(terrorisme) ou les personnes qui n’existaient pas avant (sociétés). Jusqu’au
XVIIIème siècle, les 2 personnes qui apparaissent sont le criminel et la victime.
Mais la nouveauté depuis 1984 est l’apparition de l’intérêt de la société dans cette
dynamique pénale. En 1984, ce Code est également un Code qui protège à travers,
par exemple, l’équité. C’est donc un Code qui est plus favorable à la victime, aux
plus faibles.
§2. Les fonctions normatives
Il y a au moins 5 fonctions normatives du droit pénal.
1. Le droit pénal a pour vocation de sanctionner les criminels
Dans l’histoire du droit pénal, la matière est longtemps appelée droit criminel.
L’expression « droit criminel » indique la priorité qui est donnée par la société a
l’acte déclencheur de l’infraction, le crime, et au dommage infligé. Cette
dénomination « droit criminel » est liée à la visibilité de l’acte infractionnel. Cela veut
dire que ce n’est pas l’intention qui est recherchée ou les circonstances qui sont
prises en compte. On sanctionne ce qui est visible. Le droit criminel est donc un
droit tourné vers la qualification de l’action, que cette action porte atteinte à un
homme, à une chose ou à l’Etat. Ce droit criminel donne un nom à l’ensemble des
actes repréhensibles, par exemple, le meurtre ou le vol. Par suite, ce droit criminel
va perfectionner son approche en recherchant à mettre en évidence la culpabilité
de l’agressant y compris en recourant à la torture. Ce droit criminel ne se limite pas
à constater le méfait qui a été commis. Il condamne l’auteur de l’infraction à réparer
le crime ou le délit soit par le versement d’une amende soit par l’exécution d’une
peine corporelle. Si le droit criminel constate en premier la matérialité du crime, il
cherche également, mais dans un temps second, à déterminer l’intention criminelle,
à savoir si le coupable a agi par négligence, spontanément ou par surprise. La
mission du droit criminel est de vérifier si l’auteur de l’infraction a agi avec
détermination en exécution d’un plan réfléchi et établi de longue date. Ainsi, le droit
criminel est un outil très fort pour contrôler la société.
2. Un droit criminel qualifié désormais de droit pénal
Le droit pénal est la conséquence d’une réflexion qui commence au XVIème siècle
et cette réflexion accompagne la construction d’un Etat moderne. C’est-à-dire que
le droit pénal devient à partir du XVIème siècle un élément de construction et de
régulation de la société politique. La période du XVIème siècle est importante car
elle marque le passage de ce qui est bon à ce qui est juste. De plus, celle-ci est la
période de la Renaissance. Elle marque aussi l’apparition de la Raison. Cette
dernière développe l’idée que l’homme est doté de la Raison, et peut donc définir
pour lui-même ce qui est juste sans avoir besoin d’aide de la religion ou de l’Etat.
C’est le développement des libertés individuelles. Cela va largement marquer le
droit pénal. Ce dernier va donc servir d’élément de structuration pour la
construction des Etats européens qui sortent des guerres de religion. Le droit pénal
sert à éviter les comportements « déviants » pour remettre les individus sur le bon
chemin.
Le droit pénal a aussi pour mission, à partir du XVIème siècle, de maintenir la paix
entre les individus. Il doit éviter de trop grandes souffrances aux coupables mais il
doit aussi prendre en compte la souffrance de la victime. Ce droit pénal
contemporain est le droit de la sécurité interne de l’Etat. Il est à la fois rattaché à
l’organisation de l’Etat, c’est-à-dire qu’il relève du droit public. Mais, il est également
rattaché aux relations entre les individus et relève du droit privé. De plus, les règles
du droit pénal ne sont pas des règles de droit privé, c’est un droit qui sort de l’ordre
privé. En effet, il y a donc un droit particulier et des juridictions particulières. Le
droit pénal est donc à la fois au service de l’Etat et au service des individus. Il doit
inspirer une forme de crainte au futurs délinquants et assurer la sécurité des bons
citoyens. Il joue un rôle dissuasif. Et, lorsqu’il punit, il a une mission d’exemplarité.
La peine doit être suffisamment sévère pour que les autres ne se livrent pas au
même crime. Le droit pénal est aujourd’hui la colonne vertébrale du comportement
humain dans tous les Etats. C’est un instrument de régulation sociale qui indique ce
qu’il ne faut pas faire sous peine d’être sanctionné au côté du droit civil qui précise
ce qu’il convient de faire sous la surveillance du droit public qui impose le maintien
de l’ordre public. Qu’on parle de droit criminel ou droit pénal, il s’agit toujours d’un
droit de répression. Ce droit pénal est l’instrument juridique de ce que le
gouvernement interdit. Le droit pénal c’est le première droit qui établit les limites
que l’Homme ne doit pas franchir.
La troisième situation est celle des peines modulables. La peine arbitraire est la
peine que le juge peut moduler pour adapter la peine le plus justement possible à
l’infraction qui a été commise. Le juge a fait un travail d’individualisation du texte
fixant la peine. L’arbitraire de la peine est le contraire du principe de fixité de la
peine. Grace a l’arbitraire, le juge peut réduire la sévérité du droit en tenant compte
de circonstances atténuantes ou bien, au contraire, il peut aggraver la sanction
lorsque les circonstances l’y conduisent. Ce qui amène le juge à arbitrer entre un
maximum et un minimum est les circonstances mais pas uniquement. Il y a des
circonstances qui relève de l’intime conviction du juge qui peuvent mener à
hausser les peines. La troisième raison qui peut mener à la hausse ou la baisse de
la peine est l’opinion publique. Ce principe de la peine arbitraire aux alentours du
XIIIème siècle. C’est-à-dire qu’il apparait en Europe le développement des villes.
Ces villes voudront s’affranchir de l’autorité des seigneurs. Donc, ils vont élaborer
un nouveau système pénal.
B. L’exécution de la peine
Il y a 2 périodes à distinguer :
La première période est celle des sociétés sans Etat, les sociétés archaïques. Dans
ces sociétés, il y a 2 agents de l’exécution de la peine : soit la victime ou un
membre de sa famille soit le peuple.
La seconde période est celle des sociétés qui ont un Etat. A partir du XIIIème
siècle, partout en Europe se met en place mais très progressivement un pouvoir de
type souveraine. Ce pouvoir de type souverain conduit à un monopole de la justice
et donc des peines au profit de l’Etat. La souveraineté incarnée par le roi est
progressive et se fait en plusieurs temps, d’abord une souveraineté judiciaire (le roi
impose sa justice a l’ensemble de son peuple) puis une souveraineté normative. Il a
ce prérogative car il est investi par Dieu d’une mission d’assurer le bien de son
peuple, de sauvegarder l’intérêt général.
C. Le choix de la peine
Il y a 3 formes fondamentales de peines :
1. La peine qui frappe le corps du délinquant. Ça peut être la prison ou la peine
de mort, etc. Dans cette catégorie on trouve les différentes formes de peines
de mort, des mutilations, des peines réfléchissantes (ce sont des peines qui
impriment dans le corps du délinquant le crime commis, par exemple,
couper la main du délinquant).
2. La peine patrimoniale. Par exemple, l’amende. Ces peines peuvent aller de
la simple amende à la confiscation totale du patrimoine. La saisine de
l’intégralité du patrimoine pose la difficulté de survie ainsi que la possibilité
que cette peine affecte les autres membres du groupe. De plus, ces peines
patrimoniales, en fonction de leur niveau, affectent plus ou moins le
délinquant.
3. La peine qui touche l’honneur, la réputation. Ces peines tantôt, elles
ridiculisent le criminel tantôt elles l’obligent à s’excuser en public.
En général, toutes ces peines sont individuelles. Mais, très souvent, ce principe de
personnalité de la peine n’est pas appliqué.
D. L’utilité de la peine
La peine a d’abord permis dans les sociétés primitives d’assurer une fonction
apaisante. Elle a servi également à dédommager la victime ou sa famille. Donc
dans un premier temps, la fonction même de la peine est d’apaiser, retrouver la
paix. Plus tard, cette peine a eu pour finalité l’exemplarité du châtiment. La peine
doit avant tout prévenir un crime en frappant sévèrement le criminel. La peine est
alors fondée sur l’utilité qu’elle procure : éviter les crimes à venir. A partir du
XVIIIème siècle, s’impose l’idée que la peine est rétributive, c’est-à-dire qu’elle est
un moyen de rééduquer le criminel.
Il y a donc 3 époques. Dans la première époque, la peine sert à rétablir la paix
dans la société et vis-à-vis des Dieux. La deuxième période est celle ou la peine
doit être suffisamment sévère pour éviter que des crimes identiques soient
commis ; c’est l’exemplarité de la peine. Enfin, la troisième période est celle dans
laquelle la peine devient rétributive ; c’est-à-dire que la peine rémunère le criminel
mais dans un soucis d’amendement, de le rendre meilleur.
§2. Logique sociale de la peine
La peine n’est pas limitée au seul domaine juridique. Elle concerne également la vie
sociale en général. A partir de là, plusieurs questions se posent : La peine est-elle
le produit d’une situation politique particulière ? D’un système politique particulier ?
D’une idéologie dominante ? A travers la peine, on peut voir l’idéologie et les
valeurs de la société qui l’applique.
A. Le droit de punir : un monopole de l’État ?
Une des directions essentielles de l’histoire du droit pénal c’est l’établissement d’un
monopole étatique de l’application de la peine. C’est-à-dire que l’Etat s’affirme
comme le détenteur exclusif de l’usage de la force sans être concurrencé par
aucune autorité. Ce monopole ne s’est pas établi immédiatement. Par exemple,
dans les sociétés les plus anciennes, les particuliers, la foule, des villes, des
communautés, ont pu appliquer ou exécuter des peines. Autre exemple, le père de
famille, dans le Code civil de 1804, dispose d’un droit de punition contre ses
enfants et son épouse. Toutes ses personnes et ses communautés vont
progressivement perdre leur droit de correction au profit du seul Etat au fur et à
mesure que cet Etat impose sa souveraineté. Au XVIIIème siècle, ce monopole est
affirmé. « Il est de l’intérêt commun que les méfaits ne restent pas impunis »
comme a dit un juriste très important, JUS. Cette phrase indique que la
communauté a des intérêts au-delà des intérêts individuels. La communauté est
une troisième partie intéressée par les méfaits. Dans le Code pénal de 1894, la
société apparait comme un personnage qui a ses propres intérêts ; c’est la
nouveauté de ce Code. En effet, Jus a utilisé le terme méfait au lieu de crime pour
indiquer qu’il faut sanctionner tout comportement qui est contraire a ce qui est
attendu par la communauté. Cela met en évidence alors l’existence d’intérêts
propres à la communauté.
B. Droit de punir et options idéologiques
La peine c’est le reflet et la conséquence des grandes options idéologiques,
religieuses, sociales, qui dominent les sociétés dans les grandes périodes de leurs
évolutions. Jusqu’au XVIIème siècle, l’ancien droit pénal européen a privilégié des
peines sévères, essentiellement corporelles, a l’exemple de la peine de mort. A
partir du XIIIème siècle, il arrive que les peines corporelles soient remplacées par
des peines pécuniaires par soucis de miséricorde. A la fin du XVIIème siècle, on
assiste à une moralisation du droit pénal. Est désormais pris en compte le rapport
entre le degré de culpabilité et la sévérité de la peine. C’est l’époque où
apparaissent en Europe les premiers catalogues de peines supposées associer à
un crime une peine proportionnelle. Dans ces catalogues, on distingue les peines
capitales, les peines affectives (les peines qui touchent le corps du criminel), ou les
peines infamantes (touche à l’honneur ou à la notoriété) et les peines pécuniaires.
Au XVIIIème siècle, les modalités des peines font l’objet de nombreuses critiques
par les philosophes des Lumières qui considèrent ses peines trop cruelles. Il y a
donc un mouvement vers plus d’humanité. Montesquieu, dans l’esprit des lois,
soutient que l’exemplarité de la répression ne tient pas dans la cruauté de la peine
mais dans la certitude que le crime ne restera pas impunis. Le Code pénal de 1791
(premier code pénal français) consacre une humanisation de la peine. « La peine
de mort consistera dans la simple privation de la vie sans qu’il ne puisse jamais être
exercée aucune torture envers les condamnés ».
Puis, La peine en « droit français » (XVIIe-XIXe siècles), est une période marquée
par la finalité de la peine. Elle est marquée par une transformation de la matière car
on parle désormais de droit pénal et non pas criminel. Le droit pénal s’oriente vers
la détermination et la fixation d’une peine correspondant le plus justement possible
au crime commis et sa gravite. L’infracteur est considéré comme un malade qu’il
convient de soigner avec la peine la plus appropriée. On s’oriente vers une
approche intellectuelle du droit pénal, c’est-à-dire une réflexion sur la finalité de la
peine.
Enfin, le dernier thème sera consacré à la notion de justice en droit pénal, ce qu’on
considère juste et ce qu’on considère injuste.
Il arrive en droit mésopotamien que les membres de la famille, même s’ils n’ont pas
commis de crime, se voient infligés une peine. Par exemple, un homme coupable
d’un meurtre se voit obligé de remettre son épouse, sa fille, a la famille de la victime
en qualité d’esclave. C’est une part de l’indemnisation. Evidemment l’homme sera
puni pour le crime qu’il a commis mais il y a une sorte d’extension à la peine qui
consiste à remettre comme indemnisation son épouse et ses enfants. La question
que pose cette règle est d’abord de savoir si cette règle correspond à une peine
pour l’homicide ou bien à une forme de réparation économique du dommage
causé. Il n’y a pas dans le droit mésopotamien un principe général de
responsabilité familiale. Et l’on trouve dans d’autre régions de Mésopotamie de
règles différentes. Par exemple, dans la région de Sumer, au sud de l’Iraq actuelle,
une loi écarte expressément qu’une peine frappe des enfants d’une femme qui a
prononcé des propos blasphématoires. C’est-à-dire que la femme qui blasphème,
la loi prévoit que ses enfants ne subiront aucune peine. Cette responsabilité pénale
familiale apparait dès son origine comme limitée soit dans son objet, soit dans son
étendu.
§2. La responsabilité collective
Cette responsabilité collective, on la rencontre en Babylone. Par exemple, lorsqu’un
vol est commis dans la ville, si le voleur n’est pas capturé, toute la ville doit
indemniser la victime. En réalité, la responsabilité collective est, en fait, une forme
d’obligation faite à la communauté pour assurer le maintien de la sécurité publique.
C’est-à-dire qu’il existe un sorte de principe qui dit que chacun participe à la
sécurité de tous. Il n’y a pas de police ou d’administration qui sera chargée
d’assurer la tranquillité publique. Donc, chacun doit veiller au bien de l’autre. Cela
veut dire que, quand tous les habitants de la ville payent, indemnisent la victime, ce
n’est pas une responsabilité individuelle. La communauté dans son ensemble a
manqué à son devoir de vigilance.
Dans cette forme de responsabilité collective, il y a également la responsabilité des
tiers. Par exemple, dans la législation de Babylone, la loi du Talion peut s’appliquer
par personnes interposées. Par exemple, dans le Code d’Hammourabi, l’architecte
qui construit une maison, si la maison s’écroule et qu’elle tue le fils du propriétaire
de la maison, la loi autorise le propriétaire de la maison de tuer le fils de l’architecte.
Il y a une sorte de responsabilité collective qui s’exerce au regard des tiers. C’est-à-
dire que les tiers se retrouvent être des moyens d’exécution de la peine. Ce que
montre ce type de peine c’est qu’il n’y a, au fond, aucune personnalité juridique
dans la famille en dehors du chef de famille. Les autres membres de la famille
n’existent pas en tant que sujet de droit puisqu’ils ne sont que des moyens
d’exécution de la peine. Il n’y a qu’un seul responsable pénalement c’est le chef de
famille et sa famille est un moyen d’exécution de la peine.
Dans cette responsabilité familiale, il y a des personnes qui sont exclues du champ
de la peine y compris lorsqu’ils ont commis un délit. C’est le cas, par exemple, des
enfants ou des malades mentaux. Cela est le cas car ces personnes n’ont pas la
capacite d’avoir une intention délictuelle. En droit pénal c’est l’intention qui définit
l’imputabilité.
Section 3. L’exécution de la peine
Nous allons distinguer les peines privées et les peines publiques.
§1. Les peines privées
Dans le cas d’une vengeance privée, la loi ne prévoit pas qui puni. La peine est
privée lorsque cette peine est décidée par la victime ou par le chef de famille. La
peine est tantôt infligée par la victime elle-même mais sous le contrôle des autorités
publiques ou tantôt par les autorités publiques. Parmi les peines privées, certaines
sont des peines corporelles et certaines sont des peines patrimoniales.
Dans le cadre des peines corporelles, ce sont des peines qui atteignent
physiquement l’auteur du délit ou bien par mécanisme de substitution qui atteigne
un proche. Par exemple, le fils de l’architecte qui sera mis à mort si son père
construit mal sa maison. Ces peines corporelles privées sont souvent exécutées
dans le cadre d’une juridiction domestique. Tantôt ces peines sont laissées au
choix du chef de famille tantôt elles sont déterminées par la loi.
Les peines patrimoniales privées sont des peines qui frappent le patrimoine de
l’auteur du délit. Cette sanction patrimoniale peut être en argent, en nature voire
sous forme de substitue humain. Par exemple, lorsqu’on parlait du chef de famille
qui remet sa femme ou son enfant a la famille de la victime comme esclave. Cette
sanction patrimoniale n’est jamais attribuée à l’Etat sinon elle s’agirait d’une peine
publique. Elle est toujours attribuée à la victime. Et, elle correspond à la réparation
du dommage. La question qui se pose derrière est est-ce que la vie humaine a un
prix ?
§2. Les peines publiques
Les peines publiques sont des peines qui sont exécutées par l’autorité publique.
Elles sont en général très rares. Lorsqu’elles existent, elles concernent le meurtre, le
vol aggravé, l’adultère qui sont tous punis de la peine de mort.
Section 4. La nature des peines
Il y a une très grande variété de peines dans le droit mésopotamien. On peut déjà
remarquer qu’il n’existe pas en droit mésopotamien de peines religieuses.
§1. La légalité
La légalité est indispensable pour assurer l’ordre public et garantir à chacun une
justice égale. La légalité interdit toute poursuite de l’auteur d’une action qui ne
serait pas incriminable. Pas de texte, pas de crime. La légalité autorise l’accusation
d’infraction et donc, la poursuite à l’encontre de celui qui agit en violation de la loi.
A partir de là, le méfait est juridiquement qualifié de crime et de délit. La légalité a
pour objet de punir le coupable conformément aux dispositions de la loi, en
appliquant les seules peines établies avant même la commission de l’infraction.
C’est la question de la rétroactivité de la loi pénale qui n’est rétroactive sauf si elle
adoucit la peine.
La légalité en droit mésopotamien c’est la règle, l’arbitraire est l’exception. Par
exemple, le chef de famille peut, dans certains cas, choisir les modalités
d’exécution de la peine. En général, les peines sont arbitraires en droit
mésopotamien lorsque le crime concerne le roi, les dieux, le chef de famille. Donc
dans certains crimes que l’on peut considérer comme graves, parce qu’ils
concernent les dieux, le roi ou l’autorité du chef de famille, on aura tendance à
sortir de la légalité envers quelque chose d’arbitraire.
§2. Fixité ou modulation
Enfin, une autre circonstance qui permet de moduler la peine est la légitime
défense. Elle apparait à la fin de la République. Elle est immédiatement perçue
comme une cause absolue d’excuse donc d’impunité. Cette légitime défense
trouve en droit romain sont fondement ni sur une loi ni sur un texte mais dans le
droit naturel. Pour qu’il y air légitime défense, il faut que plusieurs conditions soient
réunis :
S’agissant des peines publiques, c’est-à-dire les peines qui sanctionnent les crimes
publiques, une seule peine existe qui est la peine de mort.
B. La sévérité des peines à l’époque impériale
Avec l’Empire, les changements sont importants. On note une aggravation des
peines, une diversité plus grandes de ces peines et surtout l’introduction d’une
double hiérarchie des peines en fonction du statut social. C’est la distinction sous
l’Empire entre les Honestiores et les Humiliores (2 catégories d’individus). Les
honestiores sont des membres de l’aristocratie romaine et les membres des
aristocraties municipales (les membres des élites locales). En effet, dans l’empire
romain, il y a plein de petites cités comme aujourd’hui qui étaient dirigées par des
groupes qui vont exercer les fonctions locales importantes. Le droit pénal est plus
sévère pour les humiliores que pour les honestiores.
On note également sous l’Empire un retour de la peine de mort. Cette peine de mort
fonctionne toujours pour les crimes politiques mais on la voit apparaitre désormais
pour des crimes de droit commun. La peine de mort pour les humiliores est toujours
cruelle. Par exemple, la condamnation aux bêtes. Alors que pour les honestiores, la
peine de mort est toujours fictive. Elle s’agit de la privation de la citoyenneté, d’une
exile forcée, etc.
C. La promotion de la peine de mort pendant l’Antiquité tardive
La politique répressive se fait sous l’Antiquité tardive par un retour au principe de la
légalité des peines. Les lois ne laissent plus aucune liberté d’appréciation au juge.
Le système de la peine fixe est rétabli. Simultanément, le nombre d’infractions
s’accroit. Apparaissent des délits contre l’ordre économique, contre la religion,
contre les prescriptions fiscales. La législation de l’Antiquité tardive est une
législation répressive. La peine de mort est désormais précédée par des supplices
atroces. Par ailleurs, sont fixés, à l’époque tardive, plusieurs principes qui
concernent la peine sans pour autant fixer une hiérarchie ou d’échelle des peines.
On trouve dans le Digeste une forme de gradation des peines capitales pour attirer
l’attention sur l’irréversibilité de certaines peines et donc, sur la difficulté pour le
juge de décider de leur application. Pour indiquer une méthode de décision au
juge, le Digeste attire l’attention du juge sur une correspondance entre la gravité de
l’infraction et la sévérité de la peine. Le Digeste fournit aussi au juge des instruction
d’évaluation en l’autorisant à prendre en compte 7 éléments liés à l’infraction : la
cause, la personne, le lieu, le temps, la qualité, la quantité et le résultat. Le Digeste
introduit donc clairement le pouvoir d’appréciation du juge qui peut mitiger la peine
en une peine plus douce. Le Digeste souligne donc la liberté relative du juge pénal
qui est moins un applicateur mécanique de la loi qu’un interprète réaliste et
raisonnable de la loi.
Le Code de Justinien apporte dans son livre IX un complément de législation
pénale. Le Code de Justinien introduit la règle « Non bis in idem ». (On ne peut pas
poursuivre une personne une nouvelle fois pour des faits déjà jugés). Le Code
réaffirme la distinction entre crime intentionnel et crime accidentel. Il affirme que,
quel que soit l’âge du délinquant, il n’y a pas d’impunité pour le délinquant. Le
Code rappelle la nécessité de l’existence d’un dommage, donc la nécessité d’une
qualification criminelle pour qu’une peine puisse être imposée.
§2. L’application des peines
A. Les inégalités sociales
Une double gradation des peines s’est établie fermement sous l’Empire en
distinguant d’un côté des honestiores et de l’autre les humiliores. Cette double
gradation a fini par rapprocher les humiliores des esclaves dans l’exécution de la
peine. La nouvelle procédure, la cognitio extra ordinem, a puissamment contribué à
la distinction entre ces 2 catégories, humiliores et honestiores. La liberté
d’appréciation des juges est le fondement de cette répression inégalitaire. Le droit
romain n’a jamais isolé en termes de concepts spécifiques les notions actuelles
d’amnistie, de grâce et de réhabilitation. Sous le République, l’idée d’une mise en
cause d’un jugement, de la remise d’une peine, est une idée qui dérange qui est le
signe d’un Etat en décomposition. Par exemple, au IIIème siècle de n.è., Ulpien
s’oppose à l’idée même d’une voie de recours en considérant qu’un second juge
n’est pas forcement meilleur que le premier.
B. Grâce et pardon
Sous l’Empire, le droit de grâce apparait à partir du IIème siècle de n.è. il est fondé
sur l’idée d’une générosité personnelle de l’empereur. Dans l’idéologie impériale, le
droit de grâce est un droit régalien qui appartient à l’empereur par excellence. Ce
droit est exercé sans aucune justification. Le droit de remettre des peines est
conforme à un renforcement de l’absolutisme.
Le droit de la peine endroit romain a connu une certaine évolution qui dépend de
chaque époque. Chaque époque présente sa législation pénale comme une
amélioration (plus sage, plus équitable, plus douce, plus efficace). Toutes ces
législations nouvelles sont censées reformer, corriger, les législations antérieurs
réputées moins bonnes. Le droit pénal romain c’est élaboré au fur et à mesure des
besoins sociaux et non en fonction de présupposés moraux. En mêlant de la loi des
XII Tables aux compilations de Justinien, le droit pénal romain livre des solutions
nécessaires à assurer la sécurité de l’Etat. Il s’agit de préserver la République.
Le droit pénal romain se contente de guider le praticien en lui fournissant les
matériaux juridiques utiles à sa compréhension : la qualification criminelle et la
répression pénale. Le droit pénal romain indique aux praticiens la voie à suivre pour
la résolution des conflits. Ce droit pénal est le régulateur des tensions et des
déviances humaines face à l’utilité publique. Ce droit pénal romain tel qu’il existe
dans la compilation de Justinien va servir de base a la reconstruction du droit pénal
européen à partir essentiellement du XIIIème siècle, puis dans les développements
postérieurs à la Renaissance et enfin, dans les codifications de la fin du XVIIIème
siècle. Le juge pénal romain a énoncé plusieurs principes du droit pénal européen :
l’innocence de l’accusé, l’individualité de la responsabilité pénale, l’incrimination de
la tentative, la légitime défense, la complicité, la défense des intérêts fondamentaux
de l’Etat, les circonstances aggravantes, la personnalité des peines, la règle non
bis in idem et enfin la gradation des peines. La disparition de l’empire romain dans
la partie occidentale de l’Europe à partir de 476 entraine une mise en sommeil du
droit romain. Cette disparition laisse un vaste espace juridique dans lequel vont
s’introduire des pratiques juridiques nouvelles importées par les populations
germaniques. Ces pratiques mêlées aux usages romains vont donner naissance à
une identité juridique pénale originale.
La justice concédée
Les justices seigneuriales, municipales et ecclésiastiques sont présentées sous
l’Ancien Régime dans la doctrine comme les bénéficiaires d’une concession royale,
seule conception qui est compatible avec le principe de la souveraineté
monarchique. Les justices seigneuriales vont subsister en très grands nombres
jusqu’à la Révolution française. Parmi ces justices pénales, certaines disposent de
la haute justice, c’est-à-dire d’une compétence judiciaire totale y compris pénale.
Alors que d’autres juridictions seigneuriales ne disposent que d’une basse justice,
c’est-à-dire une compétence judiciaire imputée de la justice pénale.
Progressivement, ces justices seigneuriales vont perdre leur compétence pénale au
profit des seules juridictions royales. Les justices seigneuriales voient finalement
leur compétence limitée aux affaires civiles et assurent, a la veille de la Révolution,
une justice de proximité.
Les justices municipales vont également décliner tout au long de l’Ancien Régime.
Dès le XVIème siècle, les textes royaux retirent à ces justices municipales toute
compétence pénale. A la veille de la Révolution, seules quelques villes ont
conservé leurs compétence judiciaire. Quant aux juridictions de l’Eglise, elles ne
connaissent, a la veille de la Révolution, que des matières purement spirituelles et
disciplinaires, c’est-à-dire que les juridictions de l’Eglise ont perdu tout sauf
quelques questions sur le mariage.
La justice déléguée
Cette délégation de la justice correspond à une délégation par le pouvoir royal a
des agents royaux d’une autorité juridictionnelle. Cette autorité repose en partie sur
la concession d’une charge publique que l’on appelle un office. Un office est l’Etat
qui vend une fonction publique a un individu qui va exercer, contre rémunération,
cette fonction. Donc, il y a des officiers qui rendent la justice parmi d’autres
fonctions qu’ils accomplissent. La vente des offices permet a l’Etat de faire rentrer
de l’argent. En effet, la vente des offices par l’Etat va largement se multiplier à cette
période. Le problème est que, quand un officier devient propriétaire de son office, il
peut en disposer comme il veut sans intervention de l’Etat. Par suite, le roi ne peut
pas les révoquer. L’Etat n’arrive plus à contrôler son administration.
La justice retenue
C’est la justice rendue par le roi directement. Par exemple, chaque fois que le roi
intervient directement dans le cours de la justice, comme avec les lettres de
cachet, c’est de la justice retenue. Le roi peut soit intervenir dans la justice elle-
même soit il intervient dans l’exécution de la peine, par exemple, en la suspendant,
l’aménagement, la repoussant, etc.
Introduction du droit criminel jusqu’au XVIIème siècle
Ce droit criminel est toujours marqué par une très forte diversité normative. Des
règles de droit criminel apparaissent dans certaines coutumes appliquées devant
les juridictions seigneuriales ou municipales. Ces règles sont complétées par des
ordonnances royales. Ce droit pénal, à partir du XIIIème siècle, est marqué par le
développement de la procédure inquisitoire, par une multiplication des peines
corporelles qui témoignent d’une volonté plus grande de sévérité. Ce droit
coutumier criminel va perdre de son influence au fur et a mesure que les
ordonnances royales se multiplient. Donc, à partir du XVIème siècle, un nouveau
droit criminel se met en place organisé autour des ordonnances royales. Ce droit
criminel nouveau répond aux attente des populations d’une justice plus
compréhensible et plus juste. C’est une sorte de réaction contre à la fois l’autorité
seigneuriale et contre a la fois la complexité judiciaire.
Ce droit criminel nouveau doit être le régulateur de l’ensemble de la société et non
plus le serviteur d’une féodalité en voie de disparition d’où plusieurs mesures
importantes. L’édit de Paris de 1534 de François Ier précise que « le droit criminel
est établi dans l’intérêt de tous pour mettre un terme aux attaques des bandits de
grand chemin ». De plus, l'ordonnance de Villers-Cotterêts de 1539 est
l’ordonnance qui fait du français la langue de l’administration : « le droit criminel
doit être exercé de manière prioritaire. C’est de la responsabilité des juges de se
saisir des affaires criminelles avant toutes les autres et de garantir la légalité de
l’inculpation. Par suite, 1560, l’ordonnance d’Orleans nous dit le suivant : « les juges
doivent agir conformément aux textes sinon leur responsabilité personnelle est
engagée avec révocation de leur charge ». Le dernier texte est écrit en 1566,
l’ordonnance de moulins qui insiste sur la rapidité des poursuites pénales en
instaurant que le juge compètent doit être celui du lieur de la commission de
l’infraction.
Dès le XIIIème siècle, le fondement de la répression est à la fois proportionnel et a
la fois dissuasif. L’acte repréhensible mérite une sanction proportionnée. En même
temps, cette sanction doit servir à l’instruction du public et a la prévention de
nouveaux désordres. Cela explique que jusqu’au XVIIème siècle vont s’efforcer à
prononcer des peines sévères, exemplaires et inévitables.
A. Des peines sévères
La sévérité des peines se traduit par une régression très forte du nombre
d’amendes. Dès le XIIIème siècle, ces amendes sont remplacées par des peines
corporelles jugées beaucoup plus dissuasives. Pour être dissuasive, la peine doit
être inévitable.
Les peines infamantes sont les peines qui atteignent le criminel dans sa réputation
(Fama en romain). C’est-à-dire que ce sont des peines qui vont placer le criminel
dans des positions ridicules ou humiliantes. Par exemple, la peine du pilori. Le pilori
est un poteau, un pilier sur lequel on attache le criminel et on lui met une pancarte
autour du coup disant son crime. Un autre exemple est la peine de course. La
course est une peine qui consiste à faire courir le condamné dans les rues de la
ville où il réside avec autour de son coup une pancarte disant le crime qu’il a
commis. Après lui, il y a un homme qui crie très fort pour attirer l’attention de tout le
monde pour regarder le criminel.
D. Peines corporelles et éliminatrices
Ce sont les peines les plus graves. Par exemple, la peine de mort qui est à la fois
corporelle et éliminatrice, les mutilations qui sont seulement corporelles et le
bannissement qui est simplement une peine limitatrice. Dans le détail, la peine de
mort élimine le coupable et doit jouer un rôle dissuasif. Les modalités de la peine
de mort sont très nombreuses. Ça peut être la pendaison, la décapitation, le
bucher, etc. il faudra attendre l’époque moderne pour qu’il y ait une uniformisation
de la peine de mort. Les mutilations sanctionnent des infractions diverses souvent
de manière symbolique en frappant la partie du corps qui a rendu le crime
possible. Par exemple, le voleur a la main coupée. Ces mutilations ont pour fonction
de marquer, c’est-à-dire de permettre la reconnaissance, l’identification, par le
publique des criminels. A partir du XVIème siècle, les mutilations deviennent moins
fréquentes et moins cruelles. A la fin de l’Ancien Régime, a la veille de la Révolution
Française, la pratique encore et la main coupée en cas de parricide. Le
bannissement est une peine a durée déterminée ou à perpétuité. Généralement,
c’est une peine prononcée a titre accessoire, qui intervient en complément d’une
autre peine. En effet, le bannissement était utilisé come une méthode efficace de
s’en débarrasser du criminel comme les prisons n’existaient pas à l’époque.
§2. La détermination de la peine
A. La fixité
La fixité des peines caractérise les charte de franchises et les coutumes. Cette
fixité a laissé place ensuite à l’arbitraire du juge.
B. L’arbitraire
Plusieurs raisons expliquent ce développement de l’arbitraire, en particulier, le
caractère incomplet de la législation royale qui laisse souvent le soin au juge
d’adapter des peines souvent vagues a des cas concrets. Le degré d’arbitraire du
juge peut varier d’une juridiction a l’autre. Cette liberté reconnue au juge de
moduler la peine est la contrepartie stricte de sa soumission au système de
preuves légales. Le système de preuves légales est un système dans lequel,
lorsque la preuve est rapportée, le juge doit impérativement sanctionner sans
aucune place pour son intime conviction. Une seule question se pose donc au juge
dans ce système, les preuves exigées par la loi ont-elles étaient rapportées ?
Thème 4. La peine en « droit français » (XVIIe-XIXe siècles)
Propos liminaires
§1. Repères chronologiques
En 1789, les Etats généraux deviennent l’Assemblée Nationale et la souveraineté
est transférée du roi a la Nation. Plusieurs régimes vont se succéder alors, les
régimes révolutionnaires, une assemblée constituante jusqu’en 1791, puis une
assemblée législative jusqu’en septembre 1792, puis une Convention jusqu’en 1795
puis le Directoire qui dure jusqu’en 1799.
Par suite, il y a la période napoléonienne avec le Consulat qui dure jusqu’en 1804 et
enfin, jusqu’en 1815, le Premier Empire.
Puis, on entre dans une troisième période qui est la période de la monarchie
constitutionnelle. De 1815 à 1830 c’est la Restauration. Puis, de 1830 à 1848 c’est
la Monarchie de Juillet, c’est la période de Louis Phillipe.
Enfin, la dernière période est une période plutôt républicaine, 1848 à 1852, c’est la
Seconde République. 1852- 1870, c’est le Second Empire. Enfin, 1870-1940, la
IIIème République.
§2. Aperçu de la tradition juridique française (XVIIe-XIXe siècles)
Les hommes de la Révolution souhaitent une nouvelle justice, une justice qui serait
plus en lien avec les idées des Lumières. En quelques semaines entre l’été et
l’automne de 1789, la complexité de l’Ancien Régime est remplacée par un
système d’une nouvelle simplicité. Cette simplification tient essentiellement au
transfert de la souveraineté vers les citoyens. Ce transfert de la souveraineté va se
traduire dans l’organisation judiciaire par la promotion de modes alternatives de
règlement des conflits. Il n’est pas fraternel de faire des procès. De plus, seule la
nation est l’interprète de la loi, autrement dit, le juge n’a jamais à interpréter la loi.
Conséquence, les révolutionnaires font disparaitre les facultés de droit, les avocats
disparaissent également. Enfin, le barreau ne va réapparaitre que jusqu’en 1804.
Cette justice révolutionnaire est marquée par des principes nouveaux, en
particulier, par la séparation des pouvoirs consacrée à l’article 16 de la DDHC. A
partir de là, il existe un pouvoir judiciaire spécifique libéré de l’autorité monarchique
mais limité a une stricte compétence puisqu’il ne doit pas empiéter sur le législatif
et l’exécutif.
Dans cette conception, le rôle du juge est limité à l’application mécanique de la loi.
En accord avec le principe d’égalité des citoyens, les juges sont élus. En matière
criminelle, la formule du juris est adoptée. Rendre la justice au peuple, comme ont
fait les révolutionnaires, c’est réduire au minimum la place du parquet trop liée à
l’exécutif. Sous la Révolution Française, le ministère public voit ses pouvoirs limités
à l’application de la loi dans les jugements et à l’exécution des sentences. Cette
justice repensée est également marquée par une rationalisation de l’organisation
judiciaire. Cette justice nouvelle s’exerce désormais dans le cadre de
circonscriptions administratives d’un genre nouveau, c’est l’apparition des
départements et la disparition des provinces. Cette organisation juridictionnelle
nouvelle construite autour des départements est simplifiée. Elle distingue nettement
entre la justice civile et la justice pénale. En 1790, est instauré un droit d’appel. Il y
a 3 juridictions : civile, pénale et cassation.
La justice civile est organisée autour de 3 sortes de juges mises en place en 1790 :
les arbitres, les juges de paix et les juges de tribunaux de districts. Les décisions
rendues dans le cadre des tribunaux de district sont portées devant un autre
tribunal de district sous la forme d’un appel circulaire. Dans les cantons on a les
juges de paix. Dans le district on a un tribunal de district. Quand on fait appel à une
décision rendue par le juge de paix, on va au tribunal de district. Pour un appel
contre une décision du tribunal de district, on va devant un autre tribunal de district.
En 1790, on crée un tribunal de cassation chargé de veiller à l’application de la loi
par les juridictions inferieures. Ce tribunal de cassation ne tranche pas les litiges.
Sa mission est de veiller à l’observation de la loi par les juridictions inférieures. Ils
cassent les jugements de dernier ressort pour violation de la loi et renvoient le
plaideurs devant une autre juridiction civile ou pénale. Si les juges de fond
persistent dans leur refus de tenir compte de la décision rendue par le Tribunal de
cassation, ce tribunal de cassation doit saisir le législateur pour lui demander
d’interpréter le texte.
L’organisation de la justice pénale à l’époque révolutionnaire dépend de la gravité
de l’infraction. Elle se compose de 3 degrés : un tribunal de police municipal, un
tribunal de police correctionnel et un tribunal criminel au niveau des départements.
La mise en route de l’action publique incombe soit à la victime soit au juge qui peut
se saisir d’office soit à un particulier appliquant le principe de la dénonciation civile.
Cette organisation judiciaire va être réorganisée de nouveau à l’époque
napoléonienne (à partir de 1799). Il s’agit à cette époque de centraliser et de
renforcer le pouvoir exécutif. Il faut éviter le danger d’une nouvelle révolution d’où le
fait que l’institution judiciaire est placée sous l’autorité du gouvernement. Elle
s’inscrit dans le mouvement de codification entrepris par Bonaparte : le Code civil
de 1804, Code de procédure civile de 1806, Code d’instruction criminelle de 1808,
et Code pénal de 1810.
Apparait en 1804, la cour d’appel. En 1806, sont créés les conseils des
prudhommes et en 1807, les tribunaux de commerce. Tous les magistrats sont des
professionnels nommés par le chef de l’Etat. La justice criminelle reste organisée
de la même façon mais avec une innovation importante qui est le ministère public
qui est désormais à l’origine des poursuites pénales.
S’agissant de la justice administrative, elle est organisée à 2 degrés : conseil de
préfecture au niveau des départements et un Conseil d’Etat dont les fonction
s’inscrivent dans les registres législatifs, administratifs et contentieux.
Parmi les sources du droit, il y a une qui est peut-être la plus importante qui est la
DDHC (1789). Cette DDHC est le triomphe du droit naturel dont les idées
s’inscrivent désormais dans le droit. Ce qui prime dans la DDHC n’est plus l’Etat
mais désormais l’individu placé au cœur du droit. L’homme a des droits naturels, ce
sont des droits fondamentaux qui font l’objet d’une déclaration, la DDHC. Dans ce
système de la DDHC, l’individu est au cœur du droit. La conception du droit naturel
apparait dans l’Antiquité grecque puis elle est reprise chez les juristes romaines.
On la trouve reprise également à l’époque médiévale mais avec des sens tout à fait
différents. Pour simplifier, le droit naturel dans l’Antiquité est d’agir conformément à
des principes supérieurs dictés par la vie en cité alors qu’à l’époque médiévale, ce
droit naturel devient un droit religieux. Mais, dans les 2 cas, il n’y a pas de place
pour la raison humaine. Il faut attendre la philosophie des Lumières (XVIIIème
siècle) pour que l’homme devient considéré comme doté de raison et capable de
faire seul les choix qui lui semblent justes. C’est-à-dire que c’est à partir du
XVIIIème siècle qu’on distingue plus clairement le droit, la morale et l’éthique.
La DDHC est un texte de l’urgence. C’est-à-dire que pour le législateur, il est
essentiel de révéler au monde entier des droits imprescriptibles que tout être
humain possède en essence.
Le 26 aout 1789, la DDHC est votée. 1991, le CC intègre la DDHC dans le bloc de
constitutionnalité qui s’impose au législateur. Le concept même de déclaration n’est
pas un acte législatif ordinaire. Ce n’est pas créer un système nouveau, c’est
révéler au sens religieux du terme. C’est rendre publics des droits qui préexistent à
tout organisation politique parce qu’il relève de la nature. Une telle révélation
suppose que soit détruit tout ce qui masquait, dissimulait, l’existence de ces droits
ou de leur exercice : c’est de faire disparaitre le système de privilège. La
déclaration est donc à la fois un acte destructeur de l’Ancien Régime et c’est en
même temps fonder un régime juridique nouveau. Les droits déclarés en 1789 sont
des droits qui s’imposent au législateur. Ils préexistent à la Constitution et à la loi.
Ces 2 sources doivent tout faire pour mettre en œuvre ces droits naturels. Ces
droits sont naturels, inaliénables et sacrés.
La DDHC est un texte bref, 17 articles, aucun ne dépassant quelques lignes. Les
droits naturels de l’homme sont énoncés à l’article 2 : la liberté, la propriété, la
sûreté et résistance a l’oppression. Ces droits sont naturels, c’est-à-dire qu’ils
existent en dehors de toute reconnaissance par le droit positif (le droit applicable
maintenant). Ils sont inaliénables, l’homme ne peut pas y renoncer. Ils sont
imprescriptibles (ne peuvent pas être perdus par prescriptions, quand on n’en use
pas). De plus, la liberté dans la DDHC a une définition très large « tout ce qui ne
nuit pas à autrui ». Plusieurs articles de la DHHC déclinent à cette liberté, par
exemple, la liberté d’expression, de conscience, d’opinion. Ce sont toutes des
libertés individuelles. Il n’est jamais fait mention dans le texte de liberté collective.
La propriété, article 17, est inviolable et sacrée. Cela n’est pas vrai car elle peut
être limitée par la loi. La sûreté est la base de tous les grands principe du droit
pénal moderne. La présomption d’innocence, article 9. Le principe de légalité des
délits et des peines, article 7. La non-rétroactivité de la loi pénal, article 8. La
résistance a l’oppression est un pivot entre le droit naturel et la loi lorsque la loi viole
le droit naturel, on utilise la résistance a l’oppression. On a le droit de ne pas
l’appliquer. Enfin, l’égalité est consacrée a l’article1er de la DDHC. Cette égalité se
traduit dans les faits par l’égalité devant la loi, l’égalité devant les impôts et l’égalité
devant les emplois publics.
D’après la DDHC, c’est au législateur de poser les règles de droit. A l’article 6 de la
DDHC, la loi est définie comme l’expression de la volonté générale. Autrement dit,
la loi s’impose à tous car elle est l’émanation de la volonté collective. Seule cette
volonté collective peut être le garant et l’arbitre des libertés. Donc, dans l’esprit des
révolutionnaires, la loi règne sans partage. En théorie il n’y a pas d’autres sources
du droit. Le XVIIIème siècle, c’est le siècle du culte de la loi. La loi est censée avoir
toutes les qualités. Elle est générale, elle est abstraite, elle est tournée vers l’avenir,
elle est juste. La coutume, a l’inverse, conserve, préserve, les disparités entre les
individus. Elle est tournée vers le passée. La loi est réputée infaible car elle exprime
la volonté générale et cette dernier ne peut pas se tromper. La loi tient sa
supériorité de ses qualités techniques. Ecrite, la loi est claire, précise et sure. Elle
est égale pour tous et s’adresse à tous. La liberté politique est définie comme
l’obéissance aux lois. D’abord, à la première des lois, la Constitution, mais aussi
aux lois ordinaires. Pour les révolutionnaires, « si les lois sont bonnes les mœurs
seront bonnes » (Diderot). Les révolutionnaires ont fait de la loi un instrument de
transformation de la société. La fonction législative est organisée de telle sorte
qu’elle ait une primauté sur les autres fonctions de l’Etat, exécutive et judiciaire. La
nouveauté de cette loi tel que définie par les révolutionnaires est surtout dans
l’intensité de la loi. C’est-à-dire que la loi reforme les institutions publiques,
l’administration, transforme la société civile et finalement concrétise les droits
individuels.
Le code pénal de 1810 fait suite au code d’instruction criminelle de 1808. Ce code
d’instruction criminel est le résultat de la prise en compte des améliorations
successives de la procédure. Il a pour objective de déterminer la procédure qui
doit être suivie par le juge lors de l’instruction criminelle puis lors du prononcé de
jugement et enfin lors de son exécution. Ce code d’instruction criminelle (CIC) veille
a protégé les juges de l’influence publique pour garantir une justice au-dessus de
tout soupçon. Ce CIC veille au respect du droit de la défense, il élimine les moyens
anormaux de chercher la preuve. Pour faciliter les poursuites, il établit l’enquête du
juge, la recherche des preuves, l’audition des témoins, l’examen de l’affaire et enfin
il précise les modalités de recours. Le code pénal de 1810 est un code sévère qui a
renoncé à l’optimisme révolutionnaire. C’est une autre philosophie qui désormais
s’impose celle de l’utilitarisme de la peine. La nécessité de la peine la rend légitime
car elle prévient le crime en vertu de son pouvoir d’intimidation.
Dans l’organisation des peines, le code néglige l’amendement au profit de la
répression. Les peines perpétuelles reprennent leur place entre la peine de mort et
la peine a durée déterminée. L’un des traits les plus caractéristiques du
renoncement à l’optimisme pénal c’est l’introduction d’une peine accessoire inédite
en Europe : la surveillance de haute police qui frappe de plein droit les condamnés
aux travaux forcés après l’exécution de leur peine. Lorsqu’on est condamné aux
travaux forcés, certains revenaient du bagne mais on continuait à les surveiller.
Le code pénal de 1810 n’a jamais été l’objet d’une refonte mais plusieurs lois l’ont
amendée jusqu’à son abrogation le 1er mars 1994. Dans leur ensemble, ces lois
tendent vers un adoucissement du système pénal et pénitentiaire.
Ex : en 1981 : l’abolition de la peine de mort.
Le nouveau code de 1994 est organisé pour mieux répondre aux souffrances
spécifiques de la société. Il étend une protection spécifique personnes
particulièrement faibles. Le code pénal poursuit les atteintes à la personne humaine
et tout spécialement les atteintes à l’intégrité physique et psychique. Ce nouveau
code pénal est clairement dédié à la sécurité intérieure, au maintien de la paix
sociale, bref, a la protection des intérêts supérieurs de l’Etat.
Réflexions conclusives. Ethique et justice