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Séquence théâtre Bérénice

Etude linéaire n°1 : I, 4 (v. 215-257)


Antiochus à Bérénice
Table des matières
INTRODUCTION........................................................................................................ 1
Présentation ........................................................................................................................................................ 1
Situation .............................................................................................................................................................. 1
(Projet de lecture) ............................................................................................................................................... 1
Au début de la pièce, en phase d’exposition ...................................................................................................... 1
Mouvements ....................................................................................................................................................... 2
DEVELOPPEMENT : l’analyse ................................................................................................................................... 2
MOUVEMENT 1 ................................................................................................................................................... 2
MOUVEMENT 2 ................................................................................................................................................... 3
MOUVEMENT 3 ................................................................................................................................................... 3
CONCLUSION ........................................................................................................................................................... 4
Bilan ..................................................................................................................................................................... 4
Ouverture ............................................................................................................................................................ 4

INTRODUCTION
Présentation
Pièce de théâtre, par RACINE, grand dramaturge tragique en plein siècle classique, le 17e s.

Situation
• Bérénice reine orientale, amoureuse de Titus futur empereur romain (Occident) qui ne peut
pas épouser une étrangère => dilemme amour/politique
Bérénice risque de se faire abandonner

• Antiochus qui vient de se déclarer (il aime en secret notre héroïne) sait que Bérénice n’a d’yeux
que pour Titus

(Projet de lecture)
Au début de la pièce, en phase d’exposition
Non pas un duo Titus/Bérénice, mais un trio
Le sort d’Antiochus < Bérénice < Titus < Rome
• Qui est le protagoniste ? (La chronologie dit que c’est
Antiochus premier à parler et premier à avoir vu Bérénice)
• Qui est Bérénice ? Femme qui joue avec les hommes ?
• Titus chef militaire glorieux ? Prince indécis ? Amant
fiable ?
• Antiochus ? Allié fidèle ? Amoureux éconduit ? Homme
dépendant des autres ? Confident fiable ?
Acte I sc 4 nous plonge dans un état de grande confusion : on ne sait pas à qui on a affaire

→ Personnage-titre : Bérénice
→ Premier nom dans la liste des personnages : Titus
→ Premier à parler dans l’acte I, c’est Antiochus (qui occupe les 4 premières scènes !)

Mouvements
1. V.215-233 omniprésence de Titus : l’amertume d’Antiochus
2. V.234-244 Antiochus pathétique : la passion d’Antiochus
3. V.245 à 258 fatalisme ? le faux renoncement d’Antiochus

DEVELOPPEMENT : l’analyse

MOUVEMENT 1
• Accumulation d’images du malheur « peine/ pleurâtes » même champ lexical repris d’un vers à
l’autre = veine doloriste, victimisation
• Intensité des émotions : points d’exclamation (v. 215, v.216 x2)
• V. 218 prise de conscience Titus revient en force « La valeur de Titus surpassait ma fureur. »
Titus nommé, propulsé en début d’alexandrin, sujet, accompagné de termes à connotation positive
(champ lexical de l’héroïsme, « valeur », « surpassait ») / MAIS agacement du à la propagation de
la voyelle [u] donnée par Titus qui se répand dans le reste du vers « surpassait », « fureur »
jusqu’au vers suivant avec « vertu », « attendu » (v.220), « univers » (v.221)
• V. 220-224 comparaison Titus/Antiochus qui semble à l’avantage du premier
Marques de l’éloge : « Il (Titus) premier dans le vers et la phrase, sujet du verbe « sembler »,
associé à des exploits militaires et virils (« coups ») et de manière hyperbolique (« univers », « tous
les coups »), avec une langue méliorative (« aimer », « chérir »).

SAUF QUE

Même si le comparant, Antiochus, vient après (sens des phrases, « suivre », et chronologiquement il
vient après dans la succession des vers), les tournures passives qui s’appliquent à lui-même étaient
aussi employées déjà pour Titus (« haï » répondant à « chéri ») : du pareil au même (leçon d’humilité
envoyée à Titus) : « lassé », « haï » s’appliquent tout autant à Titus un peu plus haut : « chéri »,
« aimé » => moralité, les gagnants et les perdants sont mis sur un même plan, et tout le monde est
dépendant de quelqu’un (toujours haï, chéri de / par quelqu’un, par un complément d’agent…)
• V. 225-228 anaphore « Je vois » martèlement à valeur d’insistance
• Désignations de Bérénice, son interlocutrice, la femme qu’il aime
(vous) => « Madame » => votre cœur => on (« je vois que l’on m’écoute »)= signe d’une relation
prudente et craintive entre Antiochus et Bérénice, non sans amertume

• « votre cœur » synecdoque (la partie pour le tout) = Bérénice réduite à son cœur, à son sentiment
(lexique galant mais pointe de critique)
• Vous => « on » énallage glissement d’identité (personne n’est à sa place ? Antiochus dans le rôle
du confident quand il préférerait le rôle de l’amoureux ; Titus qui pense avoir le pouvoir ; Bérénice
qui se pense au centre du jeu …)
• v. 226 « Je vois que l’on m’écoute » Antiochus comme spectateur de son propre dialogue ;
distorsion entre le son/l’image (on est sur deux plans sensoriels à la fois)

MOUVEMENT 2

En apparence, discours fondé sur la pitié, le pathos mais très vite, on note la dimension maladive de
cet amour d’Antiochus pour Bérénice :

• Certes on repère le champ lexical du malheur « tristes », « en pleurant » « mélancolie »,


« désespoir », « coups » = 5 termes qui vont crescendo dans la violence
Mais Antiochus éprouve en réalité une passion dévastatrice pour Bérénice :

• Expression d’une obsession : omniprésence de Bérénice puisque sur dix vers, on la retrouve à
7 reprises (usage de la 2e personne qui renvoie à Bérénice). On la retrouve à la fois au début
(« vous ») et à la fin (du « vôtre ») ; quatre fois en fin d’alexandrin ce qui mime la trajectoire
d’Antiochus qui a fait tout ce chemin (Orient -> Occident) pour la trouver au bout du compte et
au bout du vers.

• Manière inquiétante de parler d’amour :


« Je demeurai longtemps errant dans Césarée,
Lieux charmants où mon cœur vous avait adorée. »
du Je sujet de verbe principal => substitut du discours, « mon cœur », réduction de soi, par synecdoque
à une partie de soi.

Césarée => lieu => où … = d’une ville nommée, identifiée à prestige impérial => espace générique,
anonyme, passepartout => subordonnée locative.
On déduit que l’amour l’a dépossédé de lui-même, et l’a littéralement perdu.

MOUVEMENT 3
• Jeu sur le pathos allitération en [p] ressassement « déplaisirs », « espoir », « soupirs »
• Emportement : exclamative v. 249 « Que ne fuyais-je alors ! » à l’hémistiche
• Apparente résolution :
« Mon sort est accompli. Votre gloire s’apprête. »
→ Vers morcelé à l’alexandrin ; tournures simples, affirmations catégoriques
→ Mon … votre : dans deux hémistiches différents = séparation actée
→ Le lien logique de cause à conséquence (hémistiche 2 à hémistiche 1) reste à deviner = parataxe
= radicalité, force du propos

SAUF QUE la suite de la tirade infirme cette proclamation

• « Je pars plus amoureux que je ne fus jamais. » dernier vers qui affirme au contraire la persistance
du sentiment amoureux, et de façon hyperbole : « plus… que jamais »,
• Antiochus moins pathétique et vulnérable qu’il ne le dit : 7 vers qui suivent et pour affirmer une
puissance retrouvée : 5 occurrences de la première personne, du pronom complément => pronom
sujet (« moi », « moi », « mes malheurs », double « je » au vers final)

CONCLUSION

Bilan
Antiochus, seulement 3e personnage nommé dans la liste des personnes, se voit chargé de toute
l’exposition (= pour informer le spectateur au début)
 Titus n’est pas si glorieux, Bérénice pas si irrésistible ni si clairvoyante,
 Antiochus, lui-même, pas si déterminé à repartir
 Conséquence : le jeu entre les personnages plus complexe que prévu
4e couverture :

→ Ed. Flammarion étonnants classiques : « Titus… et Bérénice… s’aiment »


→ Ed. GF préface de Bérénice par Racine « Toute l’invention consiste à faire quelque chose de
rien »
Double énonciation : Antiochus => Bérénice (amour)
Antiochus => spectateur (faux-semblants, apparences, complexité)

Ouverture
Cet extrait peut faire penser à l’œuvre d’Edmond ROSTAND,
Cyrano de Bergerac : Cyrano amoureux de Roxane mais cet
amour n’est pas réciproque puisqu’elle aime Christian.
Ci-contre : Roxane (Anne Brochet), Christian (Vincent Pérez) et au fond,
Cyrano (Gérard Depardieu) dans l’adaptation cinématographique de JPaul
RAppeneau (1989)

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