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Le 28 juin 2022
Introduction
Il poursuit dans le second chapitre pour nous présenter les différentes étapes de la création
de l’Etat haïtien. Il se propose d’abord de nous expliquer les principales causes de l’insurrection
des esclaves et ses conséquences sur le système colonial. Il nous montre également que sous la
gouvernance de Toussaint Louverture, la situation des nouveaux libres ne s’était pas améliorée.
Ceux-ci, étant considérés comme des agriculteurs étaient obligés de travailler la terre autant que
pendant l’esclavage et étaient de ce fait privés de cette terre qui aurait dû leur revenir de droit.
L’auteur termine la première partie du texte en enchaînant dans le troisième chapitre tout
en exposant la complexité de l’affranchissement de l’ancien esclave des anciennes mentalités
acquises durant l’esclavage. L’homme haïtien est passé d’esclave à libre, donc à Maître, maitre
de lui-même, mais malheureusement sans se déposséder des multiples préjugés et mentalités
implémentés dans son inconscient par les blancs. L’auteur nous montre à travers ce chapitre,
comment Haïti, nouvel état, a sauté l'étape de la cohésion sociale qu’il définit comme étant « un
ensemble de processus sociaux qui consiste à inculquer aux gens un sentiment d’appartenance à
une même collectivité et qu’ils se sentent reconnus comme des membres faisant partie de cette
collectivité ». D'après lui, c’est l’une des principales causes des guerres civiles et des conflits
racialistes qu'a connu le pays depuis sa création jusqu'à aujourd'hui. C’est une série de mentalités
héritées du système colonialiste et esclavagiste qui empoisonnent aujourd'hui le quotidien des
haïtiens, plus précisément la masse populaire qui se retrouve privée de tout, incapable de
pourvoir même à ses besoins les plus élémentaires. Pour clore cette première partie et ce chapitre
précité, l’auteur nous parle du processus de la création de ces mentalités par les colons blancs à
cause de leur volonté d’asseoir leur supériorité sur le noir définitivement. C’est ainsi qu’Hilliard
d’Auberteuil écrit que: « l’intérêt et la sûreté veulent que nous accablions les Noirs d’un si
grand mépris que quiconque en descend jusqu'à la sixième génération, soit couvert d’une tâche
ineffaçable. »
La deuxième partie du texte qu’on pourrait appeler une partie de déconstruction est débuté
avec le quatrième chapitre qui, dans lequel, l’auteur nous présente un état des lieux. Il est destiné
à nous montrer comment les bâtisseurs de l'État-nation ne se sont pas débarrassés de ces
mentalités racialistes mais en ont fait la base de la jeune nation. C’est ainsi que peu après
l'indépendance, on assiste au début des conflits racialistes. Conflits entre les noirs et les mulâtres,
qui jadis s'étaient réunis pour combattre le système colonialiste, pour l’acquisition du pouvoir
ainsi que les richesses et privilèges qui marchent avec. Fred Doura nous montre que le bien-être
de la population n’a jamais été une priorité pour les dirigeants - noirs et mulâtres - de 1804 à nos
jours. Ils se sont tous contentés depuis toujours d’accumuler le plus de richesses que possible une
fois arrivés au pouvoir.
Il est vu également dans ce chapitre comment le jeune État se basait sur une catégorisation de
ses membres et pratiquait l'exclusion des blancs, perpétuant ainsi le racisme et en le convertissant
de ce fait en racisme d'État comme le souligne si bien l’auteur. C’est de cette manière que va se
développer ce racisme au fil du temps et donner naissance non seulement à une État racialisé
mais aussi à des groupes sociaux racialistes.
Dans le cinquième chapitre, il est question pour l'auteur de nous expliquer la création des
idéologies coloristes qui soutiennent ce préjugé de couleur. L’auteur nous parle de ces
“intellectuels organiques” qui se donnent pour occupation de créer et alimenter les idéologies de
couleur. Ces intellectuels en réalité ne font que s’assurer de leur enrichissement personnel sans
se soucier vraiment de la masse qu’ils prétendent défendre la cause. Ceux-là n'accordent pas trop
d'intérêt à la cause publique mais essaient à tout prix de protéger les leurs. Plus loin dans ce
même chapitre, l’auteur nous montre comment certains intellectuels confondent la question de
classe sociale avec les deux groupes ethniques qui composent la société haïtienne. Pour lui les
classes sociales sont « des grands groupes de la société directement liés à la production de
biens matériels qui, par le rôle qu’ils jouent dans ce processus ont des intérêts contradictoires ».
Ainsi il nous fait voir que les classes sont constituées non pas en fonction de la couleur de peau
mais en fonction de la place que leurs membres occupent par rapport aux organes de production
donc économiques. “Les unes sont dominantes quel que soit la couleur de l'épiderme de ceux qui
les constituent et les autres opprimés quel que soit la couleur de la peau de ceux qui y
appartiennent”. Enfin à la fin du chapitre il nous parle de l’enjeu de la question de couleur sous
l’occupation américaine de l'île de 1915 à 1934.
Après l'indépendance en 1804, les dirigeants de la République d'Haïti auront deux idéologies
racistes référant à l'oligarchie mulâtriste et l'oligarchie noiriste. Ces idéologies sont donc dans les
avantages des intérêts des classes au lieu de la satisfaction des besoins des masses populaires.
Tout de suite après la mort de Dessalines, avec la division du pays, deux couches idéologiques
vont diriger le pays, l'aile noiriste dans le Nord avec le roi Christophe et l'aile mulâtriste dans le
Sud et l'Ouest avec le président Pétion. Et durant tout le XIX ème siècle, il y aura des
contradictions surtout sur le plan économique entre ces deux patriciats : noir et mulâtre qui vont
déboucher sur deux partis politiques à la fin de ce siècle. Le parti national prônant : "Le pouvoir
au plus grand nombre" qui représentait les noirs et le parti libéral prônant : "Le pouvoir au plus
capable" qui représentait les mulâtres.
L'idéologie noiriste, sous la couverture d'être à l'intérêt du peuple, fait comprendre à ce
dernier que son ennemi est le mulâtre ou le blanc. Alors qu'elle également, entre en jeu pour
gagner sa part de richesses. L'auteur présente donc ces idéologies noiristes comme racistes et a
présenté comme exemple Duvalier et ses alliés de l'idéologie raciste essentialiste noiriste qui
acceptent la classification de Gobineau qui laisse comprendre une supériorité originelle de la
race blanche par rapport aux autres races. Le peuple haïtien a toujours voulu voir un
gouvernement noir, pour sa fierté, sa joie, juste pour voir l'une de ses semblables au pouvoir.
Ainsi si celui-ci lui enfonce un poignard, la plaie sera moins douloureuse car elle est de l'un de
ses frères. Pour les idéologues noiristes, le pays doit être dirigé par un noir afin que ce dernier
puisse résoudre les problèmes du peuple et ils font comprendre au peuple qu'il leur faut
essentiellement un noir au pouvoir. Jean Luc (1976, 69) nous écrit que ces idéologues noiristes
se livrent toujours à des violences physiques et verbales contre ceux de la classe mulâtriste mais
n'attaquent jamais les intérêts économiques de ceux-là. Et arrivés au pouvoir, ces idéologues
montrent clairement comment ils sont infidèles aux principes fondamentaux de leur philosophie
conservatrice et racialiste.
À propos du mouvement de 1946, Jacqueline Lamartinière écrit que le Parti Communiste
Haïtien "PCH" n'était qu'une poussée politique des petits bourgeois et des féodaux noirs. Elle
arrive même à dire que la négritude qui avait dans le monde était un paravent qui cachait un
tremplin de la satisfaction de leurs intérêts personnels. Car ils arrivent que ces révolutionnaires
renient leur foi noiriste lorsque ça va de leur intérêt. Cette petite bourgeoisie intellectuelle
noiriste, en mélangeant les conflits de classe et les conflits de couleur, est donc opportuniste et
cherche par tous les moyens de capter le pouvoir pour les avantages qu'il procure. Si nous
prenons le cas du noirisme duvaliériste, nous pouvons constater cette mystification dans le sens
que François Duvalier parle de sang noir, de génie de la race, de régénération des masses
populaires, alors qu'il induisait la misère de ces mêmes masses populaires.
Parler de racisme se réfère à un système de croyances individuelles ou collectives et des
constructions selon lesquelles il existe des races dans l'espèce humaine et une hiérarchie entre
elles. Selon Christelle Gomis, c'est dans les années 1720 à Saint Domingue qu'apparaissent des
termes distinctifs de couleur à partir des ordonnances locales et royales. Où on indiquait alors
quatre degré de couleur : nègre, mulâtre, quarteron et blanc dans les actes notariés. Et c'est de là
que les blancs et les mulâtres se donnaient l'impression d'une supériorité dans leur imagination.
Sous aucun gouvernement avant celui de Boyer, la question agraire n'a été résolue au
bénéfice des masses paysannes mais ça s'est empiré sous le gouvernement de ce dernier. Et
même après sa chute, aucun changement ne s'est produit, même les promesses faites par les
leaders du mouvement de 1843 pour renverser Boyer n'ont été tenues. Et après, ce fut la politique
de doublure où des illettrés noirs étaient au service des deux patriciats noir et mulâtre. Sous
Sténio Vincent, avec le massacre de Perejil, celui-ci n'a pas réagi contre ce carnage en essayant
pendant un mois de touffeur cette affaire. Pourtant des Haïtiens de toutes couches sociales
montraient leur mécontentement face à la passivité de ce gouvernement. Rita Indiana, une
écrivaine dominicaine affirme à propos de ce massacre qu'il s'agit de nettoyage ethnique légal. Et
avec Lescot au pouvoir, par sa politique de préjugé de couleur et de favoritisme en faveur des
mulâtres et cette politique arrivait même dans les emplois dans l'administration, l'économie du
pays sera conservée entre les mains de cette classe.
Il est à comprendre que ce double patriciat coloriste a utilisé des stratégies en manipulant
l'émotivité des masses populaires afin d'arriver à leur fin. Alors en Haïti, il n'y a guère la
démocratie mais de préférence des dirigeants au comportement de prédateur, qui encouragent la
corruption en souriant des rentes du trésor public à ceux qui font partie de leur petite
communauté de couleur et la conséquence de tout ça est une Haïti qui n'a connu et qui reproduit
que d'échec politico-économique et social à travers l'histoire de 1804 à nos jours.
Le chapitre onze du texte, titré : 1843 et 1946 Révolutions ou fantasmes des idéologues noiristes,
est subdivisé en cinq parties. La première partie se porte sur une interrogation fondamentale
touchant un possible rapport d’identification entre la révolution et la couleur de l’épiderme du
dirigeant au pouvoir. Dans cette partie, l’auteur part du constat qu’en Haiti la corruption est un
phénomène et systémique. Qu’ils soient du côté des noirites ou de mulâtres, les changements de
régime n’étaient pas nécessairement des révolutions par rapport à ce que l’auteur appel une
culture nouvelle portée par la révolution même comme phénomène. La révolution dépasse l’idée
d’un type racialiste d’une couleur de l’épiderme. Elle se caractérise au contraire par l’abolition
ou la suppression des rapports de production et leurs remplacements par d’autres. Tel n’était pas
le cas pour ce qui se passait à Haïti en 1843 et 1946, d’où la raison de parler de fantasme au lieu
de révolution dans ce cas. C’est cette idée qui sera développée dans les quatre autres parties sous
des aspects différents où l’auteur jugera l’idée de mythes des idéologues noiristes comme plus
adéquate à la situation du pays à la date précitée que celle de révolutions. L’impossibilité des
oligarques racialistes à trouver des consensus rend, selon l’auteur, l’œuvre collective auto-
deconstructrice de l’État haïtien. Le seul espoir face à ce processus destructeur est que les idées
anciennes l’idéologie noiriste ou mulatriste sont appelées à disparaitre afin que d’autres
idéologies correspondant aux nouvelles conditions matérielles et aux nouveaux besoins puissent
émerger. C’est ce qu’il entend par processus de destruction créatrice.