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UNIVERSITE CATHOLIQUE DE BUKAVU

(U.C.B.)
B.P. 285 BUKAVU
Faculté de Droit

Première année de graduat

COURS D’INTRODUCTION
GENERALE A L’ETUDE DU
DROIT

Dispensé par Jean-Petit MULUME ZIHALIRWA

Année académique 2017-2018


Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 1 Université Catholique de Bukavu
Par Jean-Petit MULUME ZIHALIRWA G1 Droit/2017-2018

INTRODUCTION GENERALE

Dans cette introduction, nous présenterons successivement l’objet du cours, les objectifs
poursuivis à travers ce cours, la méthodologie d’enseignement et enfin la manière dont le
contrôle des connaissances sera organisé.

I. L’objet du cours

Le présent cours est intitulé : Introduction générale à l’étude du Droit (I.G.E.D.). Il s’agit
d’une introduction générale au Droit, puisqu’il constitue pour ses destinataires, qui sont les
étudiants de la première année de graduat de la Faculté de Droit, une première mise en
contact avec les réalités de systèmes juridiques. Etant donné que ce cours constitue une
introduction générale au Droit, il tend à fournir à ses destinataires un support des données qui
traversent les différentes matières du Droit et dont ils retrouveront les applications au fur et à
mesure de leurs études1.

Ainsi, ce cours est subdivisé en trois parties. Dans un premier temps, nous nous
consacrerons, à travers la première partie, à l’examen du droit objectif. L’analyse de ce droit
nous amènera à étudier quelques notions de droit, l’élément de base du système juridique
qu’est la règle de droit, les sources de droit et, enfin, l’ordonnancement des règles juridiques.
Dans la deuxième partie de ce cours, nous nous pencherons sur l’étude des droits subjectifs.
L’analyse et la compréhension de ces droits nous conduiront d’abord à l’examen des sujets
des droits subjectifs. Par la suite, nous tâcherons de présenter la classification et le régime de
ces droits et leurs sources, avant d’étudier la création, la transmission, les modalités, le
contrôle de la mise en œuvre et l’extinction de ces droits. Enfin, dans la troisième partie, nous
analyserons la réalisation des droits en justice. A cet effet, nous étudierons l’organisation
judiciaire, la preuve en droit et le procès.

1
Jean-Louis RENCHON, Introduction aux sources et aux notions générales du Droit, introduction au droit
privé (suite), Le sujet de droit, Syllabus, Faculté de Droit, Université Catholique de Louvain, 1987-1988, p. 1-2.
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Par Jean-Petit MULUME ZIHALIRWA G1 Droit/2017-2018

II Les objectifs du cours

La programmation de ce cours vient répondre à un besoin fondamental de formation des


étudiants, qui en sont destinataires. Au regard de l’objet de ce cours, nous poursuivons à
travers cet enseignement des objectifs bien précis qu’il sied d’indiquer.

D’une manière générale, ce cours vise à donner aux étudiants une vue d’ensemble du
phénomène juridique et à les préparer à mieux comprendre les différentes matières du droit
qu’ils auront à suivre tout au long de leur cursus universitaire.

De façon spécifique, les étudiants devront, à la fin de ce cours, être capable de :


 distinguer les différentes acceptions du droit et d’expliquer les fonctions et le
fondement du droit ;
 décrire les rapports entre le droit et les autres ordres de conduite sociale ainsi ceux
entre le droit et d’autres disciplines qui lui sont auxiliaires ;
 expliquer les différents modes d’élaboration du droit et établir les relations entre eux ;
 expliquer les mécanismes de règlement des litiges et les techniques d’application du
droit ;
 décrire l’ordonnancement des règles du droit ;
 rapprocher et différencier, d’une part, les différents sujets de droit et, d’autre part, les
différents droits subjectifs ;
 situer et de justifier la place de l’ordre juridique congolais parmi les différents
systèmes juridiques ;
 construire des raisonnements juridiques bien structurés, marqués par la précision, la
rigueur notamment dans le choix et l’utilisation des concepts et la cohérence.

Ce cours vise également à doter les étudiants des compétences transversales en


contribuant à développer chez eux les capacités d’analyse et de synthèse ainsi que l’esprit
critique. Il cherche également à renforcer chez eux l’organisation du travail en groupe et
l’engagement dans ce genre de travail.
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III La méthodologie d’enseignement

La méthode qui sera suivie pour cet enseignement est celle de l’enseignement magistral.
Cependant, bien que le présent enseignement soit essentiellement magistral, nous tâcherons
de privilégier des échanges avec les étudiants destinataires de ce cours afin de susciter des
interactions entre nous grâce à des questions et réponses qui seront formulées tout au long de
ce cours.

Cet enseignement devra être complété par des lectures personnelles des étudiants axées
sur les éléments du cours afin de favoriser une meilleure compréhension des notions qui sont
développées dans cet enseignement.

Il sera organisé également des travaux pratiques à réaliser par équipe d’étudiants pour
stimuler ces derniers à travailler en équipe et approfondir certaines questions qui seront
étudiées au cours.

IV Le contrôle des connaissances

Pour permettre d’évaluer la compréhension et l’assimilation de la matière, il sera


organisé une interrogation et un examen. En principe, la forme de l’examen sera
orale. L’évaluation portera aussi sur les travaux pratiques qui seront organisés.
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Première partie : LE DROIT OBJECTIF

Chapitre I. QUELQUES NOTIONS DE DROIT

Dans ce chapitre, nous analyserons la définition du droit, ses fonctions, les systèmes
juridiques, les rapports entre le droit et les autres ordres sociaux, le fondement du droit et,
enfin, ses sciences auxiliaires.

Section 1. La définition du droit

Dans la recherche de la définition du droit, plusieurs définitions ont été formulées.


Ainsi, la définition du droit a fait et fait encore l’objet d’une littérature abondante. Définir le
droit, et de manière particulière donner une définition du droit qui emporterait l’adhésion de
tous, est à première vue une entreprise qui semble impossible2. Comme le souligne Valéry,
« Nous parlerons facilement du droit … Mais qu’est-ce que le droit ? Nous ne le savons et
nous ne le savons pas »3. Selon H.L.A. Hart, le mot « droit » a fait l’objet de plusieurs
définitions qui sont non seulement différentes et étranges, mais également paradoxales4.

En dépit de cette diversité de sens, on considère que, au regard du contexte dans


lequel le mot « droit » est employé, ce dernier peut revêtir quatre significations. Le mot
« droit » peut, selon le cas, désigner le droit objectif, le droit subjectif, le droit naturel ou une
science5.

§ 1. Le droit entendu comme droit objectif ou positif

Certains le qualifient encore de droit-normatif ou de droit-règle6 ou encore de droit


positif7. Ce droit est défini comme l’« ensemble des règles régissant la vie en société et
sanctionnée par la puissance publique »8. Il est exprimé par un ensemble des règles de droit,

2
R. ROBAYE, Comprendre le droit, Bruxelles, Vie Ouvrière, 1997, p. 8. ; A.-J. ARNAUD (dir.), Dictionnaire
encyclopédique de théorie et de sociologie du droit, 2e éd., Paris, L.G.D.J., 1993, p. 7.
3
P. VALERY citée par F. OST et M. VAN DE KERCHOVE, De la pyramide au réseau ? Pour une théorie
dialectique du droit, Bruxelles, Publications des Facultés universitaires Saint-Louis, 2002, p. 267.
4
H.L.A. HART, Le concept de droit, traduit de l’anglais par M. VAN DE KERCHOVE, 2 e éd., Facultés
Universitaires Saint-Louis, Bruxelles, 2005, p. 19.
5
R. ROBAYE, op. cit., p. 8. ; A.-J. ARNAUD (dir.), op. cit., p. 190.
6
F. LEURQUIN et H. SIMONART, Fondements du droit, syllabus, 1ère candidature, ICHEC, 1987-1988, p. 6.
7
A.-J. ARNAUD (dir.), op. cit., p. 190.
8
R. GUILLIEN et alii, Lexique des termes juridiques, 12e éd., Paris, Dalloz, 1999, p. 204.
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qui présentent des caractères particuliers9 les distinguant des autres règles de conduite, qui ne
sont pas de droit10. Dans ce sens, le droit se trouve défini par son objet à savoir : les règles
qui organisent la vie sociale11.

Généralement, le droit objectif est suivi d’un qualificatif qui précise son objet12. Ainsi,
on parle, à titre d’exemple, du droit congolais, du droit français, du droit belge, du droit des
Etats-Unis pour désigner les règles juridiques en vigueur dans ces Etats, ou du droit civil, du
droit commercial, du droit pénal, du droit constitutionnel pour désigner un ensemble des
règles juridiques relatives à un domaine précis du droit13.

On parle, d’une part, du droit objectif pour opposer ce droit aux droits subjectifs, et,
d’autre part, du droit positif pour opposer ce droit au droit naturel 14. Le droit positif est
considéré comme celui posé, créé par une volonté, par opposition au droit naturel, qui serait
non pas créé, mais plutôt découvert15.

§ 2. Le droit entendu comme droit subjectif

Au sens du droit subjectif, le droit constitue la prérogative que le droit objectif


reconnaît à une personne et dont elle peut se prévaloir dans ses rapports avec d’autres
personnes, sous la protection de l’autorité publique16. Cette faculté ou prérogative se trouve
donc reconnue à une personne en application d’une règle de droit 17 et elle est attribuée à une
personne dans son intérêt pour lui permettre de jouir d’une chose, d’une valeur ou d’exiger
d’autrui une prestation18. Cette prérogative est désignée en droit par le concept de droit
subjectif. Tel est le cas du droit de propriété, du droit de créance, du droit de vote, du droit de

9
C. LARROUMET, Droit civil. Introduction à l’étude du droit privé, T. 1, 3e éd., Paris, Economica, 1998, p.
13.
10
P. COURBE, Droit civil. Introduction générale au droit, 2e éd., Paris, Dalloz, 1990, p. 2.
11
H. SIMONART et Fr. LEURQUIN, Introduction aux sources et notions générales du droit, syllabus, 1ère
candidature, Université Catholique de Louvain, 1995, p. 3.
12
P. COURBE, op. cit., p. 1.
13
H. SIMONART et Fr. LEURQUIN, op. cit., p. 3 ; P. COURBE, op. cit., p. 1.
14
R. ROBAYE, op. cit., p. 9.
15
A.-J. ARNAUD (dir.), op. cit., p. 203.
16
P. COURBE, op. cit., p. 1.
17
P. MALINVAUD, Introduction à l’étude du droit. Cadre juridique des relations économiques, Paris, Litec,
1990, p. 2.
18
R. GUILLIEN et alii, op. cit., p. 204-205.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 6 Université Catholique de Bukavu
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se marier, etc. Les prérogatives reconnues aux sujets de droit sont évidemment et
naturellement multiples19.

Il ressort de ce qui précède qu’il existe une relation étroite entre le droit objectif et les
droits subjectifs, puisque ces derniers sont consacrés par le premier20. Ainsi, le Code civil
congolais livre III consacre, par exemple, la disposition selon laquelle « Tout fait quelconque
de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivée à le
réparer »21. Il s’agit ici d’une règle de droit qui prévoit le principe de la responsabilité civile
et personnelle, mieux le droit à la réparation en raison d’un dommage que subirait une
personne du fait d’une autre.

Il existe deux variétés de droits subjectifs, à savoir : ceux qui sont exercés par leurs
titulaires et qui comportent une spontanéité qui constitue le signe même de droits subjectifs et
ceux qui font l’objet d’un pouvoir ou d’une compétence dévolus à un agent juridique parce
que ces droits subjectifs ont été attribués à des sujets qui ne sont pas aptes à les exercer eux-
mêmes. Dans ce dernier cas, le droit subjectif, qui subsiste dans le chef de son titulaire
devient latent, anémié, car il a perdu sa vitalité originelle22.

§ 3. Le droit entendu comme science ou discipline

D’après ce sens, le droit est une science que l’on apprend ou une discipline que l’on
étudie. C’est ainsi que l’on parle d’une Faculté de Droit ou encore que l’on dit des étudiants
inscrits à la Faculté de Droit qu’ils font le Droit23.

Cette science a pour objet les normes juridiques24. Le droit constitue de la sorte un
objet de connaissance. La science du droit, c’est la connaissance de la règle de droit, de
l’ensemble des règles de droit dans leur diversité et complexité. C’est dans ce sens que l’on

19
P. COURBE, op. cit., p. 1 ; R. ROBAYE, op. cit., p. 1.
20
R. ROBAYE, op. cit., p. 10.
21
Art. 258 du décret du 30 juillet 1888 relatif aux contrats ou obligations conventionnelles, Les codes Larcier.
République Démocratique du Congo, T. I, Droit civil et judiciaire, Bruxelles, De Boeck et Larcier, 2003, p. 162.
22
F. RIGAUX., Introduction à la science du droit, Bruxelles, Ed. Vie Ouvrière, 1974, p. 26.
23
J. FALYS, Introduction aux sources et principes du droit, syllabus, candidature, Faculté de Droit, Université
Catholique de Louvain, 1973, p. 1.
24
H. KELSEN, Théorie pure du droit, traduit par Ch. EISENMANN, Paris/Bruxelles, L.G.D.J./Bruylant, 1999,
p. 77.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 7 Université Catholique de Bukavu
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parle des sciences juridiques, qui ont leurs propres lois. Comme toutes les autres sciences,
elles ont leur objet et leur méthode25.

§ 4. Le droit entendu comme droit naturel

Suivant ce sens, le droit passe pour un idéal supérieur aux règles du droit positif, une
finalité de l’agir humain, un ensemble de valeurs, de principes non écrits qui s’imposent à
toute autorité. Certains parlent encore dans ce cas du « droit universel »26. Le droit naturel
est défini comme étant un ensemble des règles idéales de conduite humaine supérieure aux
règles du droit positif qui s’imposent à tous, y compris au législateur27.

Section 2. Les fonctions du droit

Le concept de « fonction » renvoie au but poursuivi par le droit. Les fonctions du


droit sont complexes28. Outre les fonctions concrètes et directes qu’il est possible d’identifier
dans chaque règle, il en existe d’autres plus larges par lesquelles les règles de droit
participent aux fonctions du système juridique auquel elles appartiennent29.

La fonction la plus évidente d’un système juridique est d’ordonner la société30. En


effet, cette fonction essentielle du droit est à relier au fait que les relations sociales sont
tissées des conflits d’intérêts, des luttes pour l’avoir et le pouvoir, qui, à défaut d’ordre social
spontané, ne peuvent se résoudre que par la violence. Ainsi, pour éviter que les rapports
sociétaires ne se règlent dans l’anarchie, le droit vise à assurer un ordre social, c'est-à-dire il
cherche à réaliser la conciliation de multiples intérêts divergents dans le respect aussi bien de
l’individu que de la société31.

Cette fonction du droit qui consiste à ordonner la société peut être comprise aussi bien
du point de la société que du point de l’individu. Ainsi, nous examinerons, d’une part, la
structuration de la société et, d’autre part, la recherche de la facilitation de la vie individuelle

25
C. LARROUMET, Droit civil, T. 1, Introduction à l’étude du droit privé, 3e éd., Paris, Economica, 1998, p. ;
J. FALYS, op. cit., p. 1.
26
R. ROBAYE, op. cit., p. 9.
27
P. COURBE, op. cit., p. 8.
28
M. VAN HOCK, Law as communication, Oxford, Hart Publishing, 2002, p. 61.
29
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 13.
30
M. VAN HOCK, op. cit., p. 61-62.
31
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 13-14 ; J.-L. RENCHON, op. cit., p. 32-33.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 8 Université Catholique de Bukavu
Par Jean-Petit MULUME ZIHALIRWA G1 Droit/2017-2018

que poursuit le droit32. Une fonction nouvelle a également été assignée au droit et elle se
traduit par la recherche et la réalisation du développement économique et social.

§ 1. La structuration de la société

A travers cette fonction, le droit vise non seulement la structuration du pouvoir


politique, mais également la garantie de la cohésion sociale.

I. La structuration du pouvoir politique

Comme l’a fait observer Habermas, le pouvoir ne peut se développer qu’à travers un
code juridique. Cette fonction importante du droit se trouve assurée par le droit
constitutionnel. Elle implique, en ce qui concerne la résolution des conflits politiques, le
remplacement du rôle que jouait jadis l’armée par le tribunal.

La fonction du droit relativement au pouvoir politique ne se limite pas à la


structuration du pouvoir politique. Le droit légitime également et largement le pouvoir
politique. Dans les Etats modernes et particulièrement dans les Etats de droit, le droit
contribue à organiser la vie sociale en soumettant à la règle de droit l’exercice du pouvoir
politique. Dans ce cas, les différents pouvoirs législatif - exécutif et judiciaire, qui créent des
règles de droit destinées à régir les relations entre les hommes, sont eux-mêmes soumis au
respect des règles qui délimitent et circonscrivent le mode d’exercice de leur pouvoir. Il en
résulte que des limites sont imposées à l’exercice des pouvoirs susmentionnés, notamment en
vue de garantir les droits fondamentaux de chaque homme et de chaque citoyen. Cependant,
le droit se trouve également légitimé par le pouvoir politique33.

II. La garantie de la cohésion sociale

L’un des objectifs poursuivis par le droit consiste dans la réalisation de la cohésion
sociale. A cet effet, le droit régule le comportement des hommes, il règlemente leurs
conduites et de ce fait, il ordonne les relations sociales. En définissant les limites de ce qui est
permis et défendu quant à la manière dont les hommes doivent se comporter les uns vis-à-vis

32
M. VAN HOCK, op. cit., p. 62.
33
J.-L. RENCHON, op. cit., p. 25 et 36.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 9 Université Catholique de Bukavu
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des autres et en agitant la menace d’une sanction pour quiconque ne respecterait pas ces
limites, le droit contribue à rendre possible la vie sociale et les relations entre les hommes34.

Le droit contribue ainsi à créer la sécurité des rapports humains et à garantir la liberté
individuelle nécessaire à l’action humaine. Il offre un cadre dans lequel les citoyens et toute
autre personne peuvent comprendre les normes et les valeurs ainsi qu’un cadre dans lequel ils
peuvent construire des objectifs et arbitrer les conflits35.

Toutefois, le droit n’est qu’un des instruments permettant de réaliser la cohésion


sociale. En effet, le droit ne peut être d’aucune utilité ou efficacité s’il ne peut lui-même
s’appuyer sur d’autres forces de structuration et de cohésion sociale qui contribuent à la mise
en œuvre d’un certain ordre social au sein de la société36.

§ 2. La facilitation de la vie individuelle

Le droit facilite la vie individuelle et la prise des décisions des sujets de droit en
limitant leurs choix possible et en les aidant à prévoir les choix et les comportements d’autres
personnes37. Dans la recherche de la facilitation de la vie individuelle, le droit contribue à la
réduction de la complexité sociale38 et exerce les fonctions particulières ci-après :

I. La création des sphères d’autonomie

Le droit, particulièrement dans les sociétés démocratiques modernes, consacre aussi


bien une sphère autonomie privée qu’une sphère d’autonomie publique. Ainsi, le droit
garantit des espaces de liberté aux sujets de droit, qui constituent les conditions ou les
opportunités d’interaction entre les différentes personnes. Parmi ces libertés, figure
notamment la liberté contractuelle39.

34
Ibidem, p. 36.
35
M. VAN HOECKE, op. cit., p. 64-65.
36
J.-L. RENCHON, op. cit., p. 39.
37
LUHMANN, FULLER et HABERMAS cités par M. VAN HOECHE, op. cit., p. 65.
38
M. VAN HOECKE, op. cit., p. 65.
39
Idem
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 10 Université Catholique de Bukavu
Par Jean-Petit MULUME ZIHALIRWA G1 Droit/2017-2018

II. La prévention des comportements non souhaités et l’encouragement des


comportements souhaités

Le droit contient un ensemble des règles tendant à influencer les comportements des
sujets de droit. Il en est ainsi de règles du droit pénal, qui définissent les actes nuisibles et non
souhaités et qui sont incriminés et sanctionnées.

Mais, la définition et la sanction des comportements non souhaités ne sont pas que
l’apanage du droit pénal. D’autres branches du droit remplissent également cette fonction.
Tel est notamment le cas du droit de la responsabilité et du droit fiscal.

Si certaines règles du droit visent à prévenir les comportements non souhaités d’autres
favorisent, en revanche, les comportements qui sont souhaités40. Il en est ainsi des règles se
rapportant notamment aux incitants fiscaux, financiers et administratifs.

III. La coordination des comportements humains

La coordination des conduites individuelles est nécessaire aussi bien pour permettre à
des stratégies individuelles de ne pas s’opposer systématiquement que pour optimaliser des
stratégies collectives.

A titre d’illustration, pour éviter l’opposition des stratégies individuelles dans le


domaine de circulation routière, le droit intervient, à travers le code de la route, pour régir la
circulation en définissant notamment la manière dont les véhicules doivent être conduits.

Par ailleurs, pour permettre d’optimaliser les stratégies collectives, notamment en


matière sportive, l’on institue le droit d’une fédération sportive ou d’un club41.

IV. La facilitation des arrangements privés

Certaines règles de droit ne visent pas à diriger les comportements des sujets de droit
dans un sens spécifique ou désiré. Ces règles fournissent simplement les modèles qui sont par
ailleurs supplétifs ou des outils juridiques pour uniquement favoriser les arrangements privés,
qui sont plus ou moins discrétionnaires.

40
Idem
41
Idem
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 11 Université Catholique de Bukavu
Par Jean-Petit MULUME ZIHALIRWA G1 Droit/2017-2018

Tel est le cas, en matière contractuelle, de la plupart des règles relatives aux contrats
qui sont organisés par le législateur en droit congolais.

V. L’allocation des ressources

Dans l’exercice de cette fonction, le droit se charge de définir la propriété des biens
ainsi que les facultés d’en user et d’en jouir et il affecte également les biens à des sujets de
droit, personnes physiques et/ou morales.

VI. La redistribution des biens et services

Le droit assure également la fonction de répartition des biens et services. Le droit


accomplit cette fonction à travers notamment les règles sur les successions et celles sur le
financement et l’organisation des services publics42.

VII. La résolution des conflits

Compte tenu de ce que la règle de droit est impuissante à prévenir tous les conflits
entre les sujets de droit, le système juridique constitue également un mécanisme de gestion et
de résolution des conflits. L’antagonisme des intérêts contradictoires et la violence des
passions ou des émotions humaines requiert, dans une société organisée, la mise en place des
procédés institutionnels permettant de canaliser et de trancher les conflits qui déchirent les
sujets du droit.

Dès lors, la fonction d’un système juridique est également de réinstaurer la force de la
règle de droit par l’imposition d’une ou des plusieurs sanctions appropriées.
L’institutionnalisation du règlement de conflit obéit à certaines procédures qui sont établies.
Des organes sont institués pour assurer le règlement des conflits et des droits et obligations de
différentes parties concernées par les conflits sont déterminés43.

§ 3. La réalisation du développement économique et social

Au-delà de leur mission traditionnelle, notamment la justice - la sécurité et la défense


nationale - la diplomatie et l’administration publique, les Etats actuels se préoccupent

42
Ibidem
43
J.-L. RENCHON, op. cit., p. 37.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 12 Université Catholique de Bukavu
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également de la réalisation du développement économique et social dont le droit constitue un


des instruments de réalisation.

A cet effet, le droit intervient pour assurer la réglementation de différentes activités


économiques afin non seulement de déterminer les comportements des opérateurs
économiques dans le sens jugé favorable par l’Etat, mais aussi pour permettre une plus
grande croissance économique et partant l’efficacité de tous les systèmes économiques.

Dans le souci d’améliorer également le bien-être social et au regard des abus qui ont
été observés, le droit vise également à protéger et à promouvoir les intérêts des certaines
personnes et particulièrement celles considérées comme étant les plus faibles. Tel est
notamment le cas des travailleurs salariés pour lequel il a été institué un droit du travail et de
la sécurité sociale (législation sociale) et des consommateurs à travers le droit de la
consommation.

Section 3. Les systèmes juridiques

Nous allons d’abord clarifier la notion de système juridique avant d’examiner la


diversité des droits et leur groupement en familles juridiques ainsi que les principaux
systèmes juridiques contemporains.

§ 1. La notion de système juridique

En définissant le concept « droit » au sens du droit objectif, nous avons souligné que
le droit est un ensemble des règles revêtant certaines caractéristiques particulières. Ces règles
constituent un ensemble organisé.

Chaque droit constitue un système, car il emploi un certain vocabulaire correspondant


à certains concepts, il groupe les règles dans certaines catégories, il comporte l’emploi de
certaines techniques pour formuler les règles et de certaines méthodes pour les interpréter, il
est lié à une certaine conception des règles sociales qui détermine le mode d’application et la
fonction même du droit44. En outre, les différentes règles de droit se renvoient les unes aux
autres, s’explicitent les unes les autres, se complètent les unes les autres, mais également et

44
R. DAVID et C. JAUFFRET-SPINOSI, Les grands systèmes des droits contemporains, Paris, Dalloz, 2002, p.
13 et s. ; R. ROBAYE, op. cit., p. 6.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 13 Université Catholique de Bukavu
Par Jean-Petit MULUME ZIHALIRWA G1 Droit/2017-2018

plus fondamentalement que chaque règle particulière ne peut être appréhendée et comprise
que par référence à des principes généraux et à des schémas de pensées qui sont communs
aux différentes règles45.

Au regard de ce qui précède, le droit objectif ne constitue pas une simple


accumulation des règles juridiques. Les règles qui le composent se trouvent au contraire liées
entre elles par des rapports stables d’unité, de cohérence et de hiérarchie pouvant varier aussi
bien dans le temps que dans l’espace. Ce droit correspond dès lors à un tout organisé, c’est-à-
dire un système dont les éléments sont regroupés en fonction d’un certain nombre de
critères46. Il fait l’objet d’une élaboration intellectuelle47. C’est cette idée d’ensemble
organisé qu’on voudrait exprimer lorsqu’on préfère au terme "droit » le terme "d’ordre
juridique" ou de « système juridique »48.

Le concept de « système juridique » renvoie à l’idée non seulement du droit comme


ensemble organisé, mais également à l’idée du regroupement d’un certain nombre de droits
positifs en familles juridiques en raison de ressemblances que présentent ces droits positifs49.

§ 2. La diversité des droits et leur groupement en familles

A la différence des sciences comme la médecine, le droit n’a pas une vocation à
l’universalité. Chaque Etat a son propre droit et ses propres institutions. Ces institutions
peuvent notamment être différentes selon la manière dont le pouvoir est reparti au sein de
l’Etat, par exemple entre le Président et l’Assemblée nationale50. Les divers droit s’expriment
dans des langues multiples, selon des techniques diverses et ils sont élaborés pour des
sociétés dont les structures, les croyances et les mœurs sont très variées51.

Non seulement que chaque Etat possède un droit qui lui est propre, mais aussi souvent
divers droits sont appliqués concurremment à l’intérieur d’un même Etat. En outre, certaines
communautés non étatiques ont également leur droit. Ainsi, on parle, par exemple, du droit
canonique, du droit musulman, du droit juif, … Il existe également un droit international qui

45
J.-L. RENCHON, op. cit., pp. 10-11.
46
H. SIMONART et Fr. LEURQUIN, op. cit., p. 5.
47
C. LAROUMET, op. cit, p. 37.
48
J.-L. RENCHON, op. cit., p. 11.
49
P. MALINVAUD, op. cit., p. 11.
50
Idem
51
R. DAVID et C. JAUFFRET-SPINOSI, op. cit., p. 13.
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vise à régler sur un plan mondial ou sur un plan régional les rapports entre Etats et ceux du
commerce international52.

Au regard de ce qui précède, une conception pluraliste du droit admet donc la


coexistence d’une pluralité des systèmes juridiques de nature différente comme les systèmes
juridiques supra-étatiques (ordre juridique international et ordres juridiques supranationaux
tels que l’ordre juridique de l’Union européenne, de l’Union africaine, etc.), les systèmes
juridiques infra-étatique (comme les ordres juridiques corporatifs) et les systèmes juridiques
transnationaux ou déterritorialisés (comme l’ordre juridique propre à un groupe transnational
des sociétés commerciales ou l’ordre ecclésiastique)53.

Ces multiples droits étatiques qui caractérisent notre monde contemporain sont classés
en nombre limité des familles. Si l’on considère la teneur et le contenu de leurs règles, la
diversité des droits est infinie. En revanche, elle est moindre si l’on envisage les éléments
plus fondamentaux et plus stables à l’aide desquels on peut découvrir les règles, les
interpréter et en préciser la valeur. En effet, si les règles peuvent être infiniment variées, les
techniques servant à les énoncer, la manière de les classer, le mode de raisonnement employé
pour les interpréter se ramènent à un nombre restreint de types. Ainsi, il est possible de
grouper les différents droits en familles. Ce groupement permet de faciliter la présentation et
la compréhension des différents droits du monde contemporain54.

Les comparatistes classent les divers droits en grands systèmes juridiques ou en


grandes familles juridiques en fonction d’un certain nombre de paramètres tel que l’idéologie
(c’est le cas du marxisme-léninisme des pays communistes), la religion (notamment dans les
pays musulmans) et plus souvent aujourd’hui la technique juridique. Au sein de chaque
grande famille, il peut y avoir des différences importantes entre les divers droits qui
composent la famille concernée55. On range parmi les grands systèmes juridiques actuels le
droit romano-germanique, le droit du common law, le droit socialiste et les droits religieux56.

52
Idem
53
F. OST et M. VAN de KERCHOVE, op. cit., p. 187.
54
R. DAVID et C. JAUFFRET-SPINOSI, op. cit., pp. 13-15.
55
P. MALINVAUD, op. cit., p. 13.
56
R. DAVID et C. JAUFFRET SPINOSI, op. cit.
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§ 3. Les principaux systèmes juridiques contemporains

I. La famille Romano-germanique

Cette famille groupe les pays dans lesquels la science du droit s’est formée sur la base
du droit Romain, qui avait été reçue en Allemagne au XIV-XVe siècles et qui, France,
constituait le « droit écrit »57.

Cette famille de droits a son berceau en Europe. Elle s’est formée par les efforts des
universités européennes qui ont développé une science juridique commune à tous les pays de
l’Europe continentale depuis le XIIe siècle. L’épithète « romano-germanique » fut choisie
pour rendre hommage à ces efforts communs déployés à la fois dans les universités des pays
latins et celles des pays germaniques58.

Néanmoins, certains auteurs préfèrent considérer que cette famille est composée de
deux groupes distincts, à savoir, d’une part, les pays de droit latin comprenant notamment
l’Italie, l’Espagne, le Portugal, la France et la Belgique, et, d’autre part, les pays de droit
germanique tels que l’Allemagne, l’Autriche, la Scandinavie et la Suisse59.

Fondamentalement, les droits de deux sous-groupes se caractérisent par une


conception identique de la règle de droit. Celle-ci émane essentiellement de la loi et présente
un caractère général. Elle n’est pas une directive précise et détaillée donnée au juge pour
résoudre des cas concrets, mais plutôt une règle générale, laissant au juge un certain pouvoir
d’interprétation et d’appréciation pour l’appliquer aux cas concrets qui lui sont soumis. Il
s’ensuit que la jurisprudence et la doctrine jouent un rôle important d’interprétation et de
complément de la règle de droit dans ces systèmes juridiques60. Dans cette famille depuis le
XIXe siècle, un rôle prépondérant a été attribué à la loi, les divers pays composant cette
famille s’étant dotés des codes61.

57
P. MALINVAUD, op. cit., p. 13.
58
R. DAVID et C. JAUFFRET SPINOSI, op. cit., p. 16.
59
P. MALINVAUD, op. cit., p. 13.
60
Ibidem, p. 13-14.
61
R. DAVID et C. JAUFFRET-SPINOSI, op. cit., p. 16.
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Une autre caractéristique des droits de la famille Romano-germanique réside dans le


fait que ces droits ont été élaborés avant tout en vue de régler les rapports entre les hommes.
Ainsi, les règles de droit y sont conçues comme étant des règles de conduite, qui sont
étroitement liées à des préoccupations de justice et de morale.

C’est par l’effet de la colonisation que la famille de droit romano-germanique a


conquis de très vastes territoires où s’appliquent aujourd’hui des droits appartenant ou
apparentés à cette famille. L’expansion de la famille Romano-germanique a également été
réalisée par un phénomène de réception volontaire par les pays qui ne furent pas soumis à la
domination de pays européens62.

Le droit de la République Démocratique du Congo appartient également à la


famille romano-germanique. L’extension de cette famille dans ce pays s’est réalisée par
l’effet de sa colonisation par la Belgique de 1908 à 1960.

II. La famille du common law

Cette famille a pris naissance en Angleterre et se retrouve aujourd’hui dans tous les
pays de langue anglaise, c’est-à-dire dans tous les pays où l’Angleterre a développé son
influence.

Le common law se différencie fondamentalement des droits de la famille romano-


germanique en ce que le droit est d’origine jurisprudentielle dans ce système. En effet,
historiquement le droit anglais n’a jamais reçu le droit romain et partant n’a jamais raisonné
sur la base d’un droit écrit composé des règles générales à appliquer à des cas d’espèce63.
Contrairement aux droits de la famille germano-germanique, le common law a été formé par
les juges qui avaient à résoudre des litiges particuliers. Il porte encore aujourd’hui de manière
flagrante la marque cette origine.

La règle de droit du common law, moins abstraite que la règle de droit de la famille
romano-germanique, est une règle qui vise à donner sa solution à un procès et non pas à
formuler une règle générale de conduite pour l’avenir64.

62
Ibidem, p. 17.
63
P. MALINVAUD, op. cit., p. 14.
64
R. DAVID et C. JAUFFRET-SPINOSI, op. cit., p. 18.
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Il ressort de ce qui précède qu’à la différence des droits de la famille romano-


germanique, la source principale des droits de la famille du common law réside non pas dans
la loi, mais dans des décisions de justice rendues aux cas par cas et qui constituent des
précédents qui pourront être invoqué dans des affaires semblables. Dès lors, le mode de
raisonnement du juriste de common law est radicalement différent de celui de la famille de
romano-germanique. En fait, au lieu de chercher dans la loi la règle de droit ayant vocation
s’appliquer aux litiges dont il est saisi, le juriste anglais va rechercher les précédents c’est-à-
dire les décisions rendues dans des affaires de même type, argumentées sur les ressemblances
ou les différences de situation de fait qui seraient de nature à justifier que les juges retiennent
une même décision ou une décision différente. Bref, alors que le juriste romano-germanique
déduit la solution par une application logique de la règle de droit contenue dans la loi telle
qu’interprétée par la jurisprudence, le juriste anglais procède de manière empirique et
inductive en recherchant la solution qui lui parait la plus raisonnable au regard des précédents
et des opinions éventuellement dissidentes exposées par les juges dans les affaires
semblables65.

En dépit des différences qui existent entre la famille romano-germanique et celle du


common law, les pays de droit romano-germanique et ceux du common law ont eu les uns
avec les autres aux cours des siècles de nombreux contacts. Dans chacune de ces deux
familles, le droit a subi l’influence de la morale chrétienne et les doctrines philosophiques en
vogue ont mis au premier plan, depuis l’époque de la renaissance, l’individualisme, le
libéralisme et la notion de droit subjectif. Bien que le common law conserve encore sa
structure, qui est très différente de celle de droit romano- germanique, le rôle joué
actuellement par la loi dans cette famille et l’importance du droit communautaire tendent à
rapprocher les méthodes utilisées dans les deux familles juridiques. Quant au fond des
problèmes posés, des solutions très proches, inspirées d’une même idée de la justice, sont
souvent données aux questions par le droit dans les deux grandes familles juridiques66.

Cependant, si le droit anglais et de façon plus large le droit de la famille du common


law ne sont plus de nos jours exclusivement judiciaires et qu’ils connaissent désormais des
lois, ces dernières répondent à une conception différente de celle de la famille romano-
65
P. MALINVAUD, op. cit., p. 14.
66
R. DAVID et C. JAUFFRET-SPINOSI, op. cit., p. 19.
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germanique. En effet, au lieu d’établir des principes ou des règles générales, ces lois
prennent la forme d’une réglementation détaillée destinée à couvrir toutes les hypothèses
susceptibles de se présenter. Les différences fondamentales entre le common law et le droit
romano-germanique rendent particulièrement difficile la recherche d’une harmonisation de
droit entre le Royaume Uni et les pays continentaux67.

A l’instar de la famille romano-germanique, la famille du common law a connu une


expansion considérable dans le monde entier par l’effet de la colonisation et de la réception
du common law par les Etats intéressés68.

III. Les droits socialistes

La famille de droit socialiste avait eu son berceau dans l’ex U.R.S.S. où ses
conceptions avaient prévalu et où s’était développé, après 1917, un droit original. Cette
famille s’était étendue, après la deuxième guerre mondiale, aux pays de l’Europe centrale, de
l’Europe de l’Est et du Balkan, qui étaient dominés par l’U.R.S.S. Cette famille s’étend
également à la Corée du Nord et au Vietnam en Asie et au Cuba en Amérique.

Les dirigeants des pays socialistes voulaient fonder une société de type nouveau dans
laquelle il n’y aurait plus ni Etat ni droit conformément à la doctrine marxiste-léniniste, qui
était la doctrine officielle. Il s’en était suivi l’instauration d’une structure économique
nouvelle caractérisée par la collectivisation de tous les moyens de production. De ce fait, le
droit privé avait perdu sa prééminence au profit du droit public69.

Ces droits se caractérisaient par la socialisation de tous les moyens de production


notamment du sol. La propriété de ces biens appartenait à l’Etat ou au parti, à l’exception des
biens d’usage ou de consommation personnel. Il en ressort que ces droits se trouvaient en
opposition totale avec les droits des pays dits capitalistes où la règle était, au contraire, celle
de la liberté de la propriété privée70.

67
P. MALINVAUD, op. cit., p. 14 et 15.
68
R. DAVID et C. JAUFFRET-SPINOSI, op. cit., p. 18.
69
Ibidem, p. 20.
70
P. MALINVAUD, op. cit., p. 15.
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Néanmoins, les événements survenus dans l’Est de l’Europe à partir de la chute du


mur de Berlin en 1989 ont conduit à l’éclatement et à la disparition de l’U.R.S.S. qui a
conduit également à l’effacement progressif des conceptions dominantes des droits
socialistes71. Depuis lors, le droit des pays socialistes a évolué vers celui des pays romano-
germaniques. C’est ainsi que le droit de propriété privée est désormais reconnu et que le
principe de liberté du commerce et de l’industrie est consacré72.

Même si la Russie et d’autres pays ont réintégré d’une certaine manière la famille de
droit romaniste, les droits de ces pays présentent une certaine originalité, car près d’un siècle
de socialisme a laissé des traces qui ne s’effaceront pas aussitôt73. Ainsi, la propriété de l’Etat
s’estompe au fur et à mesure du mouvement de la privatisation74.

IV. Les droits religieux

Tous les droits sont plus ou moins influencés par la religion, mais ils ne sont pas pour
autant des droits religieux. Le droit religieux est défini comme étant le droit qui trouve sa
source dans une religion. C’est le cas du droit canonique, qui est le droit de l’église
catholique. Ce droit était jadis appliqué en France et régissait notamment le mariage75.

Actuellement, les droits de plusieurs Etats sont laïcisés76. Il en est ainsi également du
droit congolais77. Cependant, il subsiste encore quelques droits religieux. Tel est le cas
d’Israël qui applique la « Torah » au mariage et au divorce. L’exemple le plus remarquable
de droit religieux est celui du droit musulman, qui s’applique dans la plupart des Etats
islamiques où une partie du droit positif, plus ou moins importante selon les Etats, est
constituée par la Charia. Dans ce système, le droit est indissociable de la religion78.

71
R. DAVID et C. JAUFFRET-SPINOSI, op. cit., p. 20.
72
P. MALINVAUD, op. cit., p. 15.
73
R. DAVID et C. JAUFFRET-SPINOSI, op. cit., p. 20.
74
P. MALINVAUD, op. cit., p. 15.
75
Idem
76
Idem
77
Art. 1er, al. 1 de la Constitution de la RDC du 18 février 2006 tel que modifiée Modifiée par la Loi n° 11/002
du 20 janvier 2011 portant révision de certains articles de la Constitution, J.O. de la RDC, 52ème année, numéro
spécial, 5 février 2011.
78
P. MALINVAUD, op. cit., p. 15.
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Section 4. Le rapport entre le droit et les autres ordres sociaux

La conduite des hommes se rapporte tantôt à un ou plusieurs autres hommes, tantôt


aux objets animés et inanimés. Entre la conduite d’un homme et un autre ou d’autres
hommes, il peut y avoir soit un rapport direct soit un rapport indirect. Le meurtre constitue un
exemple du premier cas dans la mesure où il traduit une relation directe d’homme à homme,
alors que la destruction d’un objet se trouve directement dirigée à l’égard d’une chose, mais
indirectement il s’agit d’une action à l’égard des individus qui en sont intéressés et de façon
particulière son propriétaire.

Un ordre normatif qui règle la conduite humaine en tant qu’elle a rapport à d’autres
hommes directement ou indirectement constitue un ordre social. La fonction de tout ordre
social est de provoquer une certaine conduite des hommes qui lui sont soumis, d’inciter ces
derniers soit à s’abstenir des certains actes, qui sont pour tel ou tel autre motif considérés
comme nuisibles socialement, soit, au contraire, à accomplir certains actes considérés comme
socialement utiles. Il ressort de ce qui précède que les règles de droit ne sont pas les seules
normes qui règlent la conduite réciproque des hommes, c’est-à-dire les seules règles sociales,
puisqu’il en existe en fait d’autres. Il en est ainsi des règles de morale, des règles religieuses,
des règles de bienséance, etc.79. D’où, l’intérêt de l’étude des rapports entre le droit et ces
autres règles de conduite sociale.

§ 1. Le rapport entre le droit et les règles de morale

I. La notion de morale

Les règles de morale sont de normes qui établissent une opposition entre le bien et le
mal80.
La morale relève de la conscience individuelle ou collective. Ainsi, elle peut
s’entendre non seulement de la morale au sens strict qui concerne principalement l’individu,
mais également de la morale sociale tendant à répondre aux besoins du groupe dans lequel
l’individu vit81.

79
H. KELSEN, op. cit., p. 32, 33 et 35.
80
P. COURBE, op. cit., p. 5.
81
P. MALINVAUD, op. cit., pp. 26-27.
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II. Le rapprochement entre les règles morales et règles de droit

Les règles morales posent un ensemble de préceptes, à l’instar du droit, destinés à


régir l’activité humaine82.

Le développement du droit a été, de tout temps et en tout lieu, profondément influencé


par des règles morales. Ainsi, le droit de tout Etat moderne manifeste, à plusieurs égards,
l’influence qu’il a subie de la morale sociétaire qui est admise et d’idéaux moraux plus
larges83. De nombreuses règles de droit sont, en fait, empruntées à la morale. Tel est le cas du
principe du respect de la parole donnée, de la loyauté qui interdit le dol dans la conclusion
des contrats, de la bonne foi qui doit présider à leur exécution, de la conformité aux bonnes
mœurs qui est requise en matière des conventions et de la responsabilité en cas de faute. Il en
est également ainsi de la reconnaissance de l’existence d’obligation naturelle, c’est-à-dire
l’obligation simplement morale dont le créancier ne saurait obtenir l’exécution en justice,
mais que le débiteur peut exécuter spontanément. La loi rejoint également la morale
lorsqu’elle instaure, par exemple, une protection particulière en faveur de ceux qu’elle
considère être dans une position inférieure, de faiblesse. C’est le cas des salaries par rapport
à leurs employeurs, des locataires par rapport aux propriétaires et des consommateurs par
rapport aux fournisseurs.

La morale subit également l’influence du droit. Tel est notamment le cas en matière
d’homosexualité dans les pays qui l’admettent. En effet, alors que l’homosexualité était jadis
reprouvée par la morale dans ces Etats, elle se trouve aujourd’hui consacrée par le droit. Il en
ressort que le droit tire également la morale en avant notamment en matière des mœurs84.

III. Les différences entre les règles de droit et les règles morales

Ces différences sont à situer à plusieurs niveaux, à savoir : la finalité de ces règles,
leurs sources, leurs contenus et leurs sanctions.

82
P. COURBE, op. cit., p. 5.
83
H.L.A. HART, op. cit., pp. 203 et 221.
84
P. MALINVAUD, op. cit., p. 27.
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A. Du point de vue de la finalité des règles

La morale poursuit le perfectionnement intérieur de l’homme. Elle tend ainsi à la


perfection individuelle85. Cette perfectibilité de l’individu peut être réalisée par
l’accomplissement des devoirs de l’individu envers lui-même ou envers les autres. Ces
devoirs sont imposés à l’individu pour le parfaire. Cette finalité se trouve poursuivi aussi bien
par la morale que par la religion.

Cependant, contrairement à la morale et à la religion, le droit ne tend pas à la


perfectibilité de l’individu, car la fonction du droit est avant tout sociale. La règle de droit
constitue une règle d’organisation sociale. Ainsi, le droit tend à éviter l’anarchie dans les
rapports entre les membres du groupe. Il peut être considéré négativement comme l’ennemi
et le contraire du désordre et de l’anarchie86. Le droit a ainsi pour but d’assurer l’ordre social.
Il ne régit la conduite des hommes que quand ils vivent en société87.

B. Du point de vue des sources de ces règles

Alors que les préceptes de la morale résultent de la conscience individuelle ou


collective, les règles de droit sont issues, pour une grande partie, de la volonté des
gouvernants88. Toutes les règles de droit ne sont donc pas établies par les gouvernants. Il en
est ainsi des règles conventionnelles établies par des particulières à l’occasion des contrats
qu’ils concluent89 et des règles coutumières.

C. Du point de vue du contenu de ces règles

Les domaines du droit et de la morale ne se recouvrent pas. La morale se préoccupe des


devoirs de l’homme non seulement à l’égard des autres hommes (morale sociale), mais aussi
à l’égard de lui-même. Ainsi, la morale impose le devoir de charité, qui reste en dehors du
droit. De ce fait, le domaine de la morale est plus vaste que celui du droit.

85
P. COURBE, op. cit., p. 5.
86
C. LARROUMET, op. cit.
87
P. COURBE, op. cit., p. 5.
88
F. TERRE, op. cit., p. 11 ; P. COURBE, op. cit., p. 5.
89
Cf. article 33 du Code civil congolais Livre III.
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Le droit se démarque de la morale en ce qu’il formule parfois des règles qui sont
moralement neutres comme les règles sur l’organisation de l’état civil et celles sur la
publicité de droit immobilier. Dans certains cas, le droit va même jusqu’à formuler et à
consacrer des règles de nature à consolider des situations immorales. Tel est le cas d’un
voleur qui par l’effet de la prescription extinctive deviendrait propriétaire de la chose volée
après 30 ans de possession. Il en est également ainsi d’un débiteur qui se trouvera libéré et ne
pourra plus être condamné au payement en raison de la prescription extinctive, si le créancier
n’a pas réclamé le payement durant le délai fixé par la loi.

Par ailleurs, alors que la morale pose de grands principes suffisants pour guider les
consciences, par exemple l’honnêteté dans les conventions ou dans les contrats, le droit
exige, quant à lui, des règles précises pour assurer la sécurité des transactions90.

D. Du point de vue des sanctions

La morale s’impose à la conscience et ne comporte en conséquence que des sanctions


psychologiques comme le remord de l’individu et la réprobation de ses semblables. Les
violations de la règle morale sont, dès lors, sanctionnées au niveau interne, celui de la
conscience de l’individu. Mais, cette contrainte ne suffit pas pour assurer l’ordre social.

La règle de droit, quant à elle, s’impose, au besoin, par le recours à la contrainte


exercée par l’autorité publique. Cette coercition étatique permet d’assurer l’ordre social.
Ainsi, les sanctions de violation de la loi ont une origine externe et se relient plutôt à
l’autorité contraignante du pouvoir public91.

§ 2. Le rapport entre les règles de droit et les règles religieuses

I. La définition des règles religieuses

Les règles religieuses sont des commandements imposés par la religion92.

90
F. TERRE, op. cit., p. 11 ; C. LARROUMET, op. cit., p. 30 ; P. COURBE, op. cit., pp. 5 et 6.
91
P. COURBE, op. cit., p. 6.
92
Idem
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II. Le rapport entre les règles du droit et les règles religieuses quant à leur domaine

A. Le rapprochement entre les règles de droit et les règles religieuses

L’histoire, même contemporaine, révèle que les règles religieuses peuvent aussi être le
droit du pays considéré dans certains systèmes juridiques. Il en était ainsi jadis du droit
canonique qui régissait notamment le droit du mariage en France. Il en est ainsi actuellement
dans les Etats musulmans pour lesquels la charia est aussi la règle de droit.

Même si la situation a radicalement changé dans la plupart dans des pays dont le droit et
purement laïc comme c’est le cas en France et en R.D. Congo, il existe néanmoins des
convergences entre les règles religieuses et les règles de droit. Ainsi, la règle de droit
condamne au même titre que la règle religieuse un certain nombre des comportements
comme tuer son prochain, voler, convoiter la femme du prochain,…93

B. La séparation du droit et de la religion

Ce n’est pas parce que le droit s’inspire quelque fois de la religion que l’on doit
considérer que le contenu des règles de droit est essentiellement religieux. Bon nombre de
règles de droit n’ont aucun contenu religieux et s’il en est ainsi c’est parce que la finalité du
droit n’est pas la même que celle de la religion94.

Il découle de ce qui précède deux éléments. D’une part, certaines règles de droit n’ont
pas connues ou ne connaissent pas une inspiration religieuse. Elles sont ainsi religieusement
neutres. Tel est le cas des règles du code de la route ou de celles relatives au permis de
construire. D’autre part, certaines règles de droit sont en contradiction avec les règles
religieuses. Il en est ainsi de la légitime défense qui est contraire au postulat religieux selon
lequel « Il faut rendre le bien pour le mal »95.

93
P. MALINVAUD, op. cit., pp. 25 et 26.
94
C. LARROUMET, op. cit., p. 29.
95
P. COURBE, op. cit., p. 6.
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III. Le rapport entre les règles religieuses et les règles de droit quant aux sanctions

La violation d’un commandement religieux met en cause la relation de l’homme avec


Dieu. La sanction dans ce cas est donc interne. Contrairement aux sanctions religieuses, la
violation d’une règle de droit peut déboucher sur le déclenchement d’une sanction qui est
mise en œuvre par les pouvoirs publics. Cette sanction demeure de ce fait externe96.

§ 3. Le rapport entre les règles du droit et les autres règles de conduite

I. La notion d’autres règles de conduite

L’expression « autres règles de conduite » renvoie aux règles de bienveillance, de


courtoisie, aux règles de savoir-vivre, de jeux ou encore aux usages y compris les usages
relatifs à l’habillement, à la mode, etc. De manière générale, cette expression désigne ce
qu’il est d’usage de faire dans une société donnée ou dans un groupe donné97.

II. Le rapprochement entre les règles de droit et ces autres règles de conduite

A l’instar de règles juridiques, ces autres règles de conduite gouvernent la vie sociale
et se trouvent pourvues des sanctions telles que la réprobation, la pression du groupe,
l’exclusion, etc.98

S’il est vrai que ces autres règles de conduite ne constituent pas des règles de droit,
certaines de ces règles finissent néanmoins parfois par être consacrées par le droit. Ainsi,
dans certains Etats, la courtoisie qui voulait jadis qu’on cède sa place dans le transport aux
personnes âgées ou invalides, est partiellement consacrée par la réglementation qui réserve
certaines places aux handicapés, aux personnes âgées et aux femmes enceintes. Il s’agit ici de
la prise en considération de certaines situations qui furent jadis négligées par le droit. Parfois
également, l’habillement et coiffure notamment pourront été pris en considération par le juge
dans le cadre d’un litige opposant un employeur et son travailleur salarié. On permettrait ainsi
à un employeur d’exclure certaines tenues vestimentaires ou capillaires qui seraient
incompatibles avec la nature de la fonction exercée99.

96
Idem
97
P. MALINVAUD, op. cit., p. 27. ; P. COURBE, op. cit., p. 6.
98
P. COURBE, op. cit., p. 5.
99
P. MALINVAUD, op. cit., pp. 27 et 28.
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II. Les différences entre les règles de droit et les autres règles de conduite

Contrairement aux règles de droit, le respect de ces autres règles de conduite n’est pas
assuré et ne peut être assuré au moyen de la contrainte Etatique. Il en ressort que l’action en
justice se trouve exclue en ce qui concerne l’obtention du respect de ces autres règles de
conduite.

Section 5. Le fondement du droit

Même s’il est possible, sans s’interroger sur le fondement du droit, d’être un bon
praticien du droit ou un bon technicien grâce à un maniement correct des concepts et des
procédés du droit positif, il sied, cependant, de faire remarquer que l’on ne saurait saisir le
phénomène juridique en se passant de sa dimension philosophique100.

La question du fondement du droit relève de la philosophie du droit. Elle en est une


question fondamentale et consiste spécialement à savoir quelle est la justification du droit.
L’examen de cette question implique de s’interroger sur la valeur des règles de droit
existantes et plus précisément qu’est-ce qui constitue la valeur obligatoire des règles de droit
ou pour quelle raison le droit doit être obéi101. La recherche du fondement du droit conduit
donc à répondre à la question de savoir si le législateur est entièrement libre de créer la règle
de droit selon son bon plaisir. La réponse à cette question a donnée naissance à deux
conceptions fondamentalement différentes. L’on distingue, d’une part, une conception
idéaliste et, d’autre part, une conception positiviste102.

§ 1. Les doctrines idéalistes

Elles sont fondées sur le postulat du droit naturel. Elles tiennent pour certaine
l’existence du droit naturel. Ces doctrines se regroupent en quatre grands courants103.

I. La conception antique du droit naturel

Elle passe pour le premier courant de pensée, qui est très ancien et dont on retrouve
l’origine dans la philosophie aristotélicienne et dans celle reprise par la suite par les Romains.

100
C. LARROUMET, op. cit., p. 13.
101
Ibidem, pp. 31 et 32.
102
P. COURBE, op. cit., p. 8.
103
Idem
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Selon les tenants de cette conception, le droit, tel qu’il existe à un moment donné dans un
pays déterminé, doit tendre vers la consécration d’un idéal universel. On considère que le
droit positif doit être conforme à ce système idéal que la raison de l’homme lui permet de
connaitre. On doit même critiquer et refuser l’obéissance aux règles juridiques qui vont à
l’encontre de cet idéal système juridique104.

C’est ainsi que Platon estime que « une loi injuste, une loi mauvaise n’est pas une loi,
n’est pas du droit ». Cicéron, quant à lui, considère que « Il existe une loi véritable qui est la
droite raison qui s’accorde avec la nature, répandue en tous, immuable et impérissable ».
Pour les partisans de la conception antique du droit naturel, il existe un principe supérieur de
justice qui s’impose à l’homme et à la société105.

En cherchant à définir ce qui est idéalement juste, Aristote a établi une distinction
entre la justice commutative et la justice distributive. La justice commutative se situe dans les
rapports d’individu à individu. Elle tend à rétablir l’équilibre perturbé par l’action ou
l’inaction de l’un de ces individus comme, par exemple, indemniser l’exact dommage causé à
autrui, recevoir la contrepartie d’une prestation ou d’une chose fournie, etc. Il s’agit donc de
rendre à chacun son dû. La justice distributive, au contraire, tend à opérer entre les hommes
la meilleure répartition des richesses et des charges de l’Etat.

Il y a lieu à cet égard de s’interroger sur les critères à adopter pour procéder à cette
répartition. En fait, la solution dépend du type de société considérée, selon qu’elle est libérale
ou socialiste. Dans un système purement libéral, la répartition se fera en fonction du travail et
du mérite de chacun, alors que dans un système purement socialiste elle reposera sur les
besoins de chacun. Mais, étant donné que chacun conçoit la justice suivant sa sensibilité ou
même son intérêt égoïste, il appartient à l’Etat d’arbitre entre ces conceptions différentes des
membres de la société en établissant la règle de droit qui lui semblera la plus juste106.

104
C. LARROUMET, op. cit., p. 32.
105
P. COURBE, op. cit., p. 8.
106
P. MALINVAUD, op. cit., p. 22.
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II. La conception chrétienne du droit naturel

Cette conception se fonde sur l’insuffisance de la loi naturelle d’après ses tenants qui
estiment que la source authentique du droit est l’Ecriture sainte107. La loi naturelle est
considérée comme insuffisante parce que la nature de l’homme est pécheresse108.

Toutefois, les théologiens chrétiens du Moyen Age ont été influencés par les
conceptions antiques du droit naturel, même si pour eux, l’idéal vers lequel doivent tendre
toutes les règles d’organisation sociale est le reflet de la vérité divine109. Eu égard à ce que le
droit chrétien n’arrivait pas à répondre à tous les besoins de la société, Saint Thomas d’Aquin
avait reconstitué, sous l’influence d’influence d’Aristote, la doctrine du droit naturel.
Toutefois, il l’avait enrichie et refondue à la lumière de la loi chrétienne. Ainsi, Saint Thomas
d’Aquin considérait qu’entre la loi éternelle, relevée par Dieu, et la loi positive, se situe le
droit naturel qui peut être découvert par la raison. On considérait que toute loi humaine doit
concourir au bien commun. En reconnaissant un rôle à la raison au sujet aussi bien du droit
naturel que de la loi positive, l’on avait amorcé une laïcisation qui fut développée pendant la
reconnaissance110. Pour le Pape Léon XIII, les lois civiles tirent leur valeur, quand elles sont
justes, de la loi naturelle111.

III. L’école du droit naturel

A partir du XVIIe siècle, certains philosophes ont voulu laïciser le système de


référence en fonction duquel on doit porter un jugement sur les règles de droit existantes.
C’est ce que l’on a appelé l’école du droit naturel. Ses principaux tenants sont : le hollandais
Hughes de Groote nommé Grotius, l’allemand Pufendorf et le français Domat. Ces auteurs
considéraient que les principes du droit naturel peuvent être dégagés par la raison, qui est
universelle112.

Ainsi, dans son œuvre célèbre intitulé : Du droit de la guerre et de la paix (1625),
Grotius faisait remarquer que dans le droit des rapports entre Etats, il n’y a pas d’autorités

107
P. COURBE, op. cit., p. 8.
108
F. TERRE, op. cit., p. 118.
109
C. LAROUMET, op. cit., p. 32.
110
F. TERRE, op. cit., p. 119 ; P. COURBE, op. cit., p. 9.
111
LEON XIII, La condition des ouvriers « rerum novarum » (Lettre encyclique du 15 mai 1891), Maison de la
Bonne Presse, 1961, p. 11.
112
C. LAROUMET, op. cit., p. 32.
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supérieures aux Etats et dictant la loi destinée à gouverner ces rapports. Toutefois, il existe un
droit imposé par la nature des choses et que l’homme peut découvrir à la lumière de la raison.
Il en est ainsi du principe « Pacta sunt servanda », qui exige des Etats le respect des traités
conclus par eux, mieux qui impose le respect de la parole donnée113.

Les tenants du droit naturel pensaient avoir mis sur pied un système de référence
considéré comme rationnel et universel. En conséquence, ce système était considéré comme
valable pour toutes les règles de droit, quelles qu’elles soient, dans n’importe quel l’Etat et à
n’importe quel moment114.

IV. La conception individualiste du droit naturel.

C’est sous l’influence de Grotius et du philosophe anglais John LOCKE qu’avait


émergé l’idée du droit naturel subjectif. Ces auteurs et d’autres partisans de cette conception
considéraient qu’à l’état de nature, les hommes sont libres et égaux et que si l’organisation
politique est nécessaire pour éviter le désordre, elle est fondée sur le contrat social consenti
librement et qui préserve les prérogatives naturelles de l’homme qu’il n’a pu abandonner
telles que la liberté, l’égalité, la propriété, etc.

Cette conception a exercé une influence considérable notamment sur la Déclaration


des droits de l’homme et du citoyen de 1789, qui consacrait des droits immuables à la liberté
- à l’égalité et à la propriété individuelle, ainsi que sur la Déclaration universelle des droits de
l’homme du 10 décembre 1948115.

§ 2. Les doctrines positivistes

Elles ont en commun le rejet du droit naturel. Elles considèrent qu’il n’y a que du
droit positif et que l’on ne peut se poser la question de savoir s’il est juste ou injuste116. Selon
ces doctrines, il n’est pas besoin de justifier ou de critiquer les règles de droit existantes en
vertu de l’aspiration vers un idéal de justice. Le droit s’impose, car il existe et il n’est
constitué par rien d’autre que le droit positif. Le courant positiviste s’est développé à travers

113
P. COURBE, op. cit., p. 9.
114
Idem
115
Idem
116
Idem
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deux tendances, à savoir, d’une part, le positivisme juridique et, d’autre part, le positivisme
scientifique.

I. Le positivisme juridique

Il est encore qualifié de positivisme étatique. D’après ce courant de pensées, le


phénomène juridique s’identifie à l’Etat. Ceci signifie, d’une part, qu’il n’y a de règle de droit
que celle qui est la volonté de l’Etat par ses organes et, d’autre part, que du moment qu’une
règle est l’expression de la volonté de l’Etat, elle est une règle de droit qui s’impose de cette
seule façon. Il est alors dans ce cas vain de lui rechercher une autre justification. Le droit est
ainsi justifié par une attitude volontaire.

Dans ce cadre, le juriste allemand Ihering a considéré, au XIXe siècle, que dans une
société la contrainte de l’Etat prime toutes les autres et que l’Etat est la seule source du droit.
De même au XXe siècle, le juriste autrichien Kelsen a soutenu que les normes juridiques
s’établissent en une pyramide, chacune tirant sa force obligatoire de sa conformité à la norme
supérieure. Selon cet auteur, l’Etat est l’entité qui désigne cet ordonnancement juridique et
les règles juridiques qui existent sont justifiées par leur conformité à une règle supérieure.

Cependant, il importe de faire observer qu’en plus du fait que le droit ne se justifie
que par sa régularité formelle, ce qui n’est pas suffisant car l’ordonnancement juridique n’est
pas que la mise en jeu des procédés, la norme d’origine, dont dépend tout le système, est
quelque chose de mystérieux et à la limite on pourrait y voir l’expression d’une tendance
idéaliste, ce qui enlève alors une cohérence et toute portée au système opposé.

II. Le positivisme scientifique

A la différence du positivisme juridique où étatiste qui prétend trouver le fondement


de la règle de droit dans la volonté de l’Etat, le positivisme scientifique repose sur la
conception générale que le droit est un fait social.

Le positivisme scientifique a donné naissance à l’école historique allemande et à


l’école sociologique française. Ces deux écoles se trouvent regroupées dans un grand courant,
qui est l’école du positivisme sociologique appliqué à la science du droit. Selon cette école,
les règles juridiques sont dégagées à partir de l’observation des faits et des comportements
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sociaux. Le droit constitue alors le reflet de l’observation d’une réalité sociale et c’est la
société qui crée, elle-même, ses propres règles de droit par ses comportements et sa mentalité.

Au début du XIXe siècle, l’école historique allemande, animée principalement par


Savigny, accordait une très grande place à l’esprit du peuple et à ses aspirations en tant que
force créatrice du droit. Le droit est alors considéré comme un produit de l’évolution du
peuple. Il exprime l’âme de la nation. Dans ce cas, la loi ne fait que consacrer le résultat de
cette création historique.

L’école sociologique française s’est développée avec E. Durkheim. D’après cette


école, le droit est un fait d’une société, qui peut être observé. Il n’émane pas de la volonté
plus ou moins arbitraire des gouvernants, mais est imposé par la conscience collective du
groupe. Le droit est, dès lors, considéré comme secrété par le peuple, par la collectivité
nationale. Ainsi, la coutume constitue la règle de droit la mieux adaptée à la vie sociale, dans
la mesure où elle est créée de toute pièce par les comportements sociaux. L’autorité étatique
est appelée à observer cette coutume pour éventuellement en faire une loi. Il en ressort qu’il
n’impose pas le droit, il ne fait que confirmer un droit qui s’est créé en dehors de son
intervention117.

§ 3. Les critiques des doctrines idéalistes et positivistes

Chacune des doctrines susmentionnées relatives au fondement du droit a fait l’objet


de vives critiques.

I. Les critiques à l’égard des doctrines idéalistes

Contrairement à l’idée d’un droit qui serait commun à tous les Etats, il existe des
divergences fondamentales entre les législations de différents Etats. Ceci prouve que chaque
Etat a son propre droit.

Cependant, il existe un besoin commun à tous, à savoir la Justice, qui imposerait la


reconnaissance de quelques principes considérés comme éternels comme la protection de la
personne, le respect de la parole donnée, etc.

117
Idem
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II. Les critiques à l’égard des doctrines positivistes

Il serait dangereux de décrire les règles de droit sans porter des jugements de valeur
sur ces dernières, car cela conduirait à accepter les règles les plus despotiques sans se
préoccuper de savoir si elles sont justes. Or, il existe en tout homme un besoin inné de justice
et le juriste doit affirmer l’exigence du respect par la loi positive des valeurs fondamentales
de l’être humain lorsqu’elles sont niées par certains Etats.

Par ailleurs, s’il est vrai, selon le positivisme sociologique, que certaines règles de
droit imposées brutalement par le législateur peuvent être rejetées par le corps social qui ne
les admet point ou les admet difficilement, il y a lieu, cependant, de faire remarquer que la
valeur d’une règle de droit ne dépend pas nécessairement de l’observation de la réalité
sociale. En effet, des règles mal acceptées par le corps social au moment où elles sont
élaborées par l’autorité étatique peuvent finir par être acceptées par lui. Ainsi, le droit peut
résulter de l’observation de la réalité tout comme le droit peut modifier la réalité dans une
certaine mesure. On ne peut rejeter totalement l’idéalisme juridique dans la mesure où il est
très difficile de ne pas tenir compte de la réalité sociale et de façon particulière des
aspirations de la collectivité.

Enfin, relativement au positivisme juridique ou étatique, il importe de faire remarquer


que l’on ne peut réduire le droit au seul droit produit par l’Etat. En fait, en dehors des règles
de droit édictées par les autorités étatiques, il en existe d’autres qui ont également un
caractère juridique et qui pourtant n’émanent pas de l’Etat. Il en est ainsi des règles
conventionnelles édictées par les particuliers.

§ 4. Les critères de la validité d’une règle de droit

La validité d’une règle de droit est comprise comme l’efficacité juridique. Ainsi, est
valide la norme ou l’acte dont on reconnaît, dans un système juridique donné, qu’il doit sortir
les effets de droit que ses auteurs entendaient lui donner. Un pouvoir peut être accordé, un
droit peut être transmis ou attribué, un comportement peut être imposé, une faculté peut être
ouverte, une procédure peut être mise en place, etc.118.

118
F. OST et M. van de KERCHOVE, op. cit., p. 309.
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On distingue trois critères de validité des règles de droit :


 La validité formelle ou la légalité : elle est relative à un ordre juridique. Elle est
encore qualifiée de validité systémique ou de validité interne. Elle signifie
l’appartenance au système juridique de référence. Ainsi, est valide, la règle qui
présente les signes extérieurs d’appartenance à un système juridique. Pour l’essentiel,
la validité est appréciée en fonction de questions procédurales telles que : la règle a-t-
elle été adoptée par un auteur compétent et selon les procédures légales ? Il faut aussi
que la règle inférieure ne contredise pas le contenu des règles supérieures119.

 La validité factuelle ou l’effectivité : L’effectivité est entendue comme la capacité de


la règle à orienter le comportement de ses destinataires dans le sens souhaité par le
législateur. Cette validité est également qualifiée de validité empirique ou de validité
d’efficacité ou d’effectivité. D’après ce critère, la qualité essentielle de la règle est sa
performance, c’est-à-dire son aptitude à atteindre l’objectif poursuivi au moindre coût
économique et social. Cette validité est relative aux attitudes, aux comportements, aux
représentations des autorités et des sujets de droit120.

 La validité axiologique ou la légitimité : est relative à des valeurs méta-positives. Elle


est présentée comme acceptabilité de la norme121.

Ces trois dimensions de la validité interagissent sans pour autant s’identifier l’une à
l’autre. En effet, les règles qui viennent d’être édictées et dont la légitimité et l’effectivité
n’ont pas pu encore être éprouvées, bénéficieront, dans un premier temps, d’une présomption
de validité. Mais une norme légale dépourvue d’effectivité risque de perdre également sa
légalité, si elle tombe en désuétude. Inversement, une norme effective, mais non légale
pourrait acquérir un jour la qualité de norme légale. Par ailleurs, si une norme légale, mais
non légitime est une norme précaire, souvent, suivant un mouvement centripète, la légalité est
à elle seule un titre de légitimité122.

119
Ibidem, p. 324.
120
Ibidem, pp. 324 et 329.
121
Ibidem, p. 325.
122
Ibidem, p. 355.
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Une autre manière d’associer le facteur temporel aux rapports qui s’établissent entre les
trois critères de validité pourrait être de distinguer plusieurs séquences dans la vie d’une
norme juridique en rapportant chacune de ces séquences à une des dimensions de la validité.
Ainsi, le processus d’édiction de la règle représenterait la première phase. C’est une séquence
procédurale essentiellement redevable d’exigences formelles de compétence et de procédure.
La deuxième phase consisterait dans la mise au point définitive de son contenu et son
exposition au jugement public. La règle serait alors exposée aux critères de légitimité. La
troisième phase est celle de mise en œuvre concrète de la règle, qui relève des épreuves de
l’effectivité. La quatrième séquence se rapporterait aux tentatives de révision de la règle.
C’est un feed back législatif qui proviendrait des controversées suscitées par la légitimité de
la règle et les problèmes suscités par son application pratique123.

Section VI. Les sciences auxiliaires du droit

Plusieurs sciences, et parmi elles certaines qui n’ont a priori rien avoir avec le droit,
permettent soit une meilleure compréhension du droit existant, soit une meilleure élaboration
des règles de droit par le législateur ou par le juge. Ces sciences sont qualifiées des sciences
auxiliaires du droit124. Ainsi, il est important que la pensée juridique se tourne vers ces
disciplines pour, d’une part, mieux connaître le monde que les règles de droit ont vocation à
ordonner et, d’autre part, observer l’action et l’efficacité de ces règles 125. Il s’agit notamment
des disciplines suivantes :

§ 1. L’économie

L’économie est définie comme étant la science qui étudie la manière dont les
individus, les groupes et les sociétés utilisent les ressources rares en vue de satisfaire au
mieux leurs besoins.

La relation entre le droit et l’économie se trouve marquée par l’interdépendance, la


réciprocité entre les deux domaines. En effet, d’une part, il y a antériorité du problème
économique sur le droit en ce sens que le droit doit servir la réalité dont l’économie n’est
qu’un des aspects126. Le droit joue ainsi un rôle instrumentaliste, puisqu’il contribue à

123
Idem
124
C. LAROUMET, op. cit.
125
P. DURAND cite par Y. LEROY, op. cit., p. 395, n° 375.
126
A. JACQUEMIN et G. SCHRANS, Le droit économique, Paris, PUF, Collection « Que sais-je », 1970, p. 9.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 35 Université Catholique de Bukavu
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l’organisation et au fonctionnement du système de marché127. En tant qu’instrument au


service de l’économie, le droit assure notamment la règlementation des prix et de change.
D’où, l’intérêt d’observer les phénomènes économiques de production, de distribution et de
consommation des richesses pour juger de la valeur d’une règle de droit128.

Mais, d’autre part, on ne peut considérer le droit comme la servante de l’économie,


car la règle juridique exprime certaines exigences auxquelles l’économie est appelée à se
soumettre129. Le droit joue de cette façon un rôle politique dans la mesure où il est vecteur de
changement et impose à la théorie économique ses propres jugements et objectifs. Le droit
produit dès lors un effet d’entrainement et pousse à l’adaptation du système économique130.
La science économique doit donc tenir compte du cadre juridique dans lequel se produisent
les phénomènes économiques. Il en est ainsi des règles de droit du travail131.

Au regard de ce qui précède, le juriste ne peut ignorer les sciences économiques, qui
lui permettent de comprendre l’environnement économique dans lequel va se situer la règle
de droit. Les mécanismes des échanges économiques aussi bien internes qu’internationaux
doivent être assimilés par les juristes qui s’occupent de l’organisation juridique de ces
échanges notamment par le droit de contrat132.

Il découle des éléments susmentionnés que l’ordre juridique affecte le système


économique existant et s’en trouve lui-même affecté et que le fonctionnement harmonieux
d’un système économique déterminé requiert un certain nombre de règles de droit qui
assurent l’appropriation et l’usage des facteurs de production, des produits ou des services133.

§ 2. La sociologie

La sociologie est la science qui a pour objet l’étude des faits sociaux. Elle est à la fois
une science descriptive des phénomènes sociaux et une science explicative étant donné
qu’elle recherche des causes qui expliquent ces phénomènes.

127
T. BOURGOIGNIE, op. cit., p. 23.
128
P. COURBE, op. cit., p. 7.
129
A. JACQUEMIN et G. SCHRANS, op. cit., p. 9.
130
T. BOURGOIGNIE, op. cit., p. 23.
131
P. COURBE, op. cit., p. 7.
132
C. LARROUMET, op. cit., p. 100.
133
A. JACQUEMIN et G. SCHRANS, op. cit., p. 5.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 36 Université Catholique de Bukavu
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La sociologie présente un intérêt évident par rapport au droit en ce qu’elle relève les
besoins d’une société et permet de savoir si la règle de droit est adaptée aux besoins sociaux.
Une des branches de la sociologie, qui revêt un intérêt plus particulier par rapport au
droit, est la sociologie juridique appelée aussi sociologie du droit134. Elle a pour objet
l’analyse des phénomènes juridiques considérés comme des faits sociaux135.

L’intérêt de la sociologie du droit se situe à deux niveaux :


 Elle révèle, d’une part, l’effectivité de la règle de droit en permettant de savoir si
elle est appliquée et comment elle l’est et, d’autre part, l’efficacité de la règle de
droit en permettant de savoir si la règle juridique répond à l’objectif poursuivi, si
une réforme est souhaitable. En outre, la sociologie du droit éclaire sur les
conditions d’élaboration des règles de droit, sur les forces créatrices du droit136, en
permettant de savoir les forces sociales qui produisent ou influencent le système
juridique137. Il est donc important que les juristes s’intéressent à la problématique
de l’effectivité ou de l’efficacité du droit pour être attentifs à l’inscription des
règles juridiques dans les pratiques sociales et éviter ainsi de s’enfermer dans
« l’univers abstrait des règles »138.
 Elle adapte des méthodes de la sociologie, telles que les statistiques et les
enquêtes, à l’étude des phénomènes juridiques139.

§ 3. L’histoire

Pour rappel, l’histoire est la connaissance du passé humain. Elle recherche les faits
passés, les relie aux faits déjà connus et établit des relations de causalité qui expliquent leur
enchaînement.

L’histoire du droit, qui est une branche de l’histoire, présente une importance capitale
pour les juristes. En effet, Elle permet de connaître les conditions dans lesquelles les règles
juridiques passées sont nées, se sont développées et ont disparu. Cette connaissance permet

134
P. COURBE, op. cit., p. 6; F. TERRE, op. cit., p. 347.
135
J. CARBONNIER cite par F. TERRE, op. cit., p. 347.
136
P. COURBE, op. cit., p. 7.
137
L. M. FRIEDMAN cité par Y. LEROY, L’effectivité du droit au travers d’un questionnement en droit du
travail, Paris, L.G.D.J., 2011, p. 292, n° 269.
138
A. JEAMMAUD cité par Y. LEROY, op. cit., p. 4, n° 5.
139
C. LARROUMET, op. cit., p. 101.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 37 Université Catholique de Bukavu
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de porter sur ces règles de droit des jugements de valeur, qui éclairent la compréhension des
règles actuelles et inspirent le législateur de l’avenir140.

Cependant, au-delà de la compréhension des règles actuelles, il est essentiel, pour


comprendre l’histoire d’un peuple, de connaitre l’évolution de son droit. Ce dernier constitue
le produit d’une civilisation en constante évolution. Ainsi, les institutions tant du droit public
que du droit privé ont connu les grandes ruptures de l’histoire ou se sont affinées dans la
durée. Tel est le cas du droit administratif français qui n’a cessé de se perfectionner à partir
du début du XIXe siècle, qui est l’époque à laquelle ont été posées les bases de ce qu’il est
actuellement. Il en est de même, en droit privé, de la responsabilité civile. En effet,
l’évolution de la responsabilité civile ne peut être comprise sans la référence essentielle à
l’industrialisation du XIXe siècle, qui a permis l’affinement des techniques de réparation des
dommages tout au long du XXe siècle jusqu’à nos jours141.

§ 4. Le droit comparé

Le droit comparé est la science dont l’objet consiste dans l’étude de la comparaison
des systèmes juridiques du monde actuel et des institutions qu’ils adoptent.

On distingue le droit comparé général du droit comparé spécial. Le droit comparé


général a pour objet de dégager les traits caractéristiques d’un ou plusieurs système(s)
juridiques par rapport à d’autres. C’est ainsi que les systèmes juridiques existant de par le
monde ont été classés et qu’ils existent des familles ou catégories de systèmes juridiques. Le
droit comparé général vise à comprendre les différentes civilisations, à mettre en évidence ce
qu’elles ont en commun et ce qui les sépare. Dans le cadre du droit comparé général, on peut
ainsi comparer les systèmes juridiques d’obédience religieuse avec d’autres systèmes
juridiques tels que les systèmes de droit romano-germanique ou les systèmes de common law.

Le droit comparé spécial, quant à lui, a pour objet l’étude de tel concept, de telle
catégorie juridique, de telle institution ou tel procédé juridique dans deux ou plusieurs
systèmes juridiques. Par exemple : le divorce en droit français et en droit italien, le droit de
propriété en droit français et en droit anglais, etc.

140
P. COURBE, op. cit., p. 7.
141
C. LARROUMET, op. cit., p. 104.
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La comparaison suppose avant tout la connaissance du droit étranger, car on ne peut


comparer que ce que l’on connaît. C’est la raison pour laquelle l’étude du droit comparé
commence toujours par la connaissance du droit étranger.

Les fonctions que le droit comparé spécial peut exercer sont les suivantes :

 servir à l’amélioration du droit d’un pays dans la mesure où le droit de ce pays est
susceptible d’assimiler des institutions mises au point à l’étranger ;
 préparer une unification du droit. Il ne s’agit pas d’une unification générale, qui
est une utopie, mais plutôt d’une unification partielle, limitée à certains
domaines142.

§ 5. L’ethnologie et l’anthropologie juridique

Si l’ethnologie est la science des peuples primitifs ou mieux des peuples archaïques,
l’ethnologie juridique est la science des règles et des institutions juridiques archaïques143.

L’anthropologie juridique, quant à elle, est définie comme la discipline qui, par
l’analyse des discours oraux ou écrits - des pratiques et des représentations, étudie le
processus de juridicisation propre à chaque société et s’attache à découvrir les logiques qui le
commandent.

S’il est vrai que toutes les sociétés ne partagent pas la même vision du monde, étant
donné que les valeurs, qu’elles privilégient, diffèrent souvent de même que le contenu de leur
droit144, l’anthropologie juridique tente de discerner derrière les diversités de culture et de
droit qu’étudie le droit - la sociologie juridique et l’ethnologie juridique, ce qu’il pourrait y
avoir de juridique dans le fond naturel et, à ce titre, universel de l’homme. On peut ainsi être
conduit à découvrir ce fond commun élémentaire dans la prohibition de l’insecte et plus
largement dans la nécessité de l’échange et de la communication145.

142
Ibidem, p. 104-106.
143
F. TERRE, op. cit., p. 349.
144
N. ROULAND, L’anthropologie juridique, Paris, PUF, Collection « Que sais-je », 1990, p. 7.
145
F. TERRE, op. cit., p. 349.
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Dès lors, si l’anthropologie juridique peut consister dans la formulation d’une théorie
unitaire du droit, elle ne vise pas nullement à l’unification du contenu des systèmes
juridiques, mais plutôt à leur mise en complémentarité146.

§ 6. La philosophie du droit

Elle a pour objet de porter des jugements de valeur sur le droit existant, de le
confronter à des valeurs qu’elle explicite et hiérarchise et de projeter au-delà son idéal du
droit. La philosophie du droit exerce ainsi une fonction critique lato sensu sur le droit147.

§ 7. L’informatique juridique

Le droit ne pouvait échapper au développent récent et considérable de l’informatique.


En effet, les règles de droit multiples, complexes et éparses, qui résultent d’une législation et
d’une réglementation de plus en plus touffue, de décisions de justice nombreuses et acculées
peuvent être recensées d’une façon méthodique dans des banques des données. Elles ont
donné naissance à l’informatique juridique.

L’utilité de l’informatique juridique est essentiellement d’ordre documentaire en ce


sens qu’elle permet, lorsque la banque de données est bien conçue et que la question posée
est formulée d’une façon correcte et précise, de gagner un temps considérable par rapport à la
consultation manuelle qui se traduit par des recherches effectuées notamment dans des
ouvrages, des recueils de textes et de décisions de justice148.

§ 8. Les sciences biologiques

Si a priori les sciences biologiques semblent éloignées du droit, elles sont pourtant
nécessaires pour l’élaboration et la compréhension des règles relatives à la filiation. A titre
exemplatif, la connaissance des groupes sanguins permet une meilleure adaptation de la règle
de droit à la réalité lorsqu’il s’agit de déterminer la paternité légitime ou naturelle149.

146
N. ROULAND, op. cit., p. 9.
147
J. CARBONNIER, Sociologie juridique, Paris, PUF, 1978, p. 24.
148
C. LARROUMET, op. cit., p. 102.
149
Idem
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§ 9. Les autres disciplines auxiliaires du droit

D’autres disciplines prêtent également leur concours à l’élaboration et/ou à


l’application du droit. Il s’agit notamment de la philosophie, la logique, la psychologie, les
sciences politiques, les sciences médicales et la criminologie, la criminalistique, la pénologie
et la statistique150. C’est ainsi qu’une analyse psychologique peut contribuer à mettre en
lumière les effets produits par les normes juridiques151 sur les comportements des individus.

150
H. BEKAERT, Introduction à l’étude du droit, Bruxelles, Etablissements Emile Bruylant, 1964, pp. 166 et
167, n° 170-174.
151
Y. LEROY, L’effectivité du droit au travers d’un questionnement en droit du travail, Paris, L.G.D.J., 2011,
p. 258, n° 243.
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Chapitre II. L’ELEMENT DE BASE DU SYSTEME JURIDIQUE: LA REGLE DE


DROIT

L’examen de ce chapitre nous conduira à analyser successivement la notion de la


règle de droit, ses caractères, ses différents types, sa structure et ses destinataires.

Section 1. La notion de règle de droit

Originairement, le mot « règle » désignait exclusivement un outil et plus précisément


un instrument de mesure. La « regula » latine était une équerre. Cette acceptation demeure
conservée jusqu’aujourd’hui. Ainsi, la règle désigne un instrument qui sert à guider le crayon
- la plume, quand on trace un trait, un instrument servant à mesurer une longueur.

Une fois repris dans la langue française, ce mot désigna, parallèlement à son sens
originaire d’instrument de mesure matérielle, un instrument de mesure immatérielle. Selon ce
sens, la règle renvoie à l’idée de mesure, d’étalon, de modèle. Sa vocation est de servir de
référence au déroulement du cours des choses152.

En droit, d’aucuns définissent la règle de droit comme étant une règle de conduite
dans les rapports sociaux, générale, abstraite et obligatoire dont la sanction est assurée par la
puissance publique153.

Cependant, si cette définition de la règle de droit convient pour une certaine catégorie
de règles juridiques notamment les règles de droit pénal, il importe de faire remarquer qu’elle
est lacunaire, et partant ne s’adapte pas ou mieux ne convient pas comme définition de
certaines règles de droit. En examinant les caractères de la règle de droit, nous tâcherons de
démontrer les limites de cette définition à partir de laquelle l’on a pensé dégager les
caractères de la règle de droit. L’analyse de ces caractères nous permettra de découvrir que
les caractères qu’on reconnaît traditionnellement à la règle de droit ne sont pas déterminants,
soit parce qu’ils sont douteux, soit parce qu’ils sont insuffisants154.

152
H. SIMONART et F. LEURQUIN, Introduction aux sources et notions générales du droit, Première
candidature, Faculté de Droit, UCL, 1995, p. 6.
153
R. GUILLIEN et J. VINCENT, Lexique des termes juridiques, 12e éd., Paris, Dalloz, 1999, p. 450.
154
C. LARROUMET, op. cit., p. 30.
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Section 2. Les caractères de la règle de droit

Le fait que les règles de droit aient une forme, un contenu et des destinataires
différents ne doit pas empêcher de relever les points communs à la plupart d’entre elles155.

La question de caractères de la règle de droit est l’un des problèmes les plus
controversés de la théorie générale du droit. En effet, la difficulté provient surtout du fait que
le problème a été posé en terme trop absolu en ce sens que l’on a presque toujours voulu
dégager des caractères de la règle de droit qui seraient communs à toutes les règles
juridiques, dans tout groupement humain et à n’importe quel moment de son histoire. Or, la
conception que l’on peut avoir du droit n’est pas partout et toujours la même non seulement
parce que le domaine du droit peut être plus ou moins vaste, mais encore et surtout parce que
la contrainte peut être envisagée différemment156.

Les caractères, traditionnellement présentés comme étant ceux d’une règle de droit, se
présentent comme suit :

§ 1. La règle de droit : une règle de conduite

Les hommes étant par nature amenés à vivre en groupe et l’existence du groupe n’étant
possible que moyennant le respect de certaines règles, la règle de droit est considérée comme
ayant vocation à rendre possible la vie en commun. Elle est donc une règle de conduite
sociale157. C’est un modèle de référence pour le comportement des sujets de droit, un modèle
pour l’action158.

En tant que règle de conduite sociale, la règle de droit s’adresse au sujet de droit comme
être vivant en société pour qu’il se comporte de telle ou telle façon dans ses rapports avec ses
semblables. La règle de droit s’adresse aux membres du corps social pour leur imposer une
conduite déterminée en différentes occasions de la vie en société.

155
R. ROBAYE, op. cit., p. 21.
156
C. LARROUMET, op. cit., p. 14.
157
F. LEURQUIN et H. SIMONART, Fondements du droit, Première candidature, ICHEC, 1987-1988, p. 1.
158
P. AMSELEK et A. JEAMMAUD cité par Y. LEROY, op. cit., p. 273, n° 257.
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Cependant, s’il est vrai que la règle de droit est une règle de conduite, elle n’est pourtant
pas la seule. En fait, il existe d’autres règles de conduite sociale qui ne sont pas des règles de
droit. Il en est ainsi, pour rappel, notamment des règles religieuses et des règles morales159.

La règle de droit organise certes les rapports des hommes entre eux, mais elle ne régit ni
les actes intérieurs de l’homme (tels que ses pensées, ses vouloirs ou ses sentiments), ni les
rapports des hommes avec Dieu, ni le rapport de l’homme avec lui-même. Toutefois, si la
règle de droit ne régit pas directement ces rapports, indirectement elle intervient au sein de
ces relations dans la mesure où la conduite des hommes à l’égard d’eux-mêmes et/ou de la
divinité est susceptible d’affecter des rapports humains. La règle de droit se présente dès lors
comme une règle ayant vocation à régir tous ces rapports dans la mesure où ils peuvent
affecter les relations humaines160.

§ 2. La règle de droit : une règle sociétaire

La règle de droit n’existe que dans et par la société. L’existence d’un simple groupe, voire
d’un ensemble d’individus présentant certaines caractéristiques communes (communautés) ne
suffit pas pour donner naissance à une règle de droit. Les règles de droit ne surgissent que
lorsque le groupe s’organise en vue d’une fin sociale détermine. Autrement dit, la règle de
droit est considérée comme une règle de conduite que se donne une société et le droit apparaît
ainsi comme l’ensemble des règles de conduite sociétaires. On ne peut concevoir le droit sans
une société. D’où, la maxime romaine « ubi societas, ibi jus », c'est-à-dire, là où il y a une
société, il y a du droit.

Cependant, il existe une multitude de sociétés de tout genre, d’origines les plus variées,
poursuivant des fins diverses, s’étendant sur des territoires très différents et qui toutes
élaborent leur droit. Il y a donc autant des droits que des sociétés distinctes. D’où, l’intérêt de
la question de savoir de tous ces droits, lequel qualifie-t-on de droit étudié à la Faculté de
droit ? Le droit, dont il s’agit, est celui de la société politique. La prééminence de cette
société sur les autres formes de sociétés découle de la généralité de sa fin. En effet, ce n’est
pas un aspect particulier du bien de l’homme que poursuit la société politique, mais plutôt la
réalisation du bien de tous ses membres, abstraction faite du bien propre des individus et des

159
C. LARROUMET, op. cit., pp. 26 et 27.
160
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., pp. 1 et 2.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 44 Université Catholique de Bukavu
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groupes qui la composent. Ce bien poursuivi par la société politique est appelé le bien
commun. C’est un objectif à réaliser dans un milieu social déterminé en fonction de moyens
dont dispose la collectivité considérée. Son contenu concret varie dans le temps et dans
l’espace.

Actuellement, c’est l’Etat qui constitue la forme la plus élaborée des sociétés
politiques. La prééminence de l’Etat sur les autres sociétés vient de ce que, sur un territoire
déterminé, il est le seul compétent pour exercer l’autorité suprême sur ses membres.

Au regard de ce qui précède, la règle de droit apparaît comme étant une règle émanant
de l’Etat, une règle établie par une autorité publique161. En présentant la règle de droit comme
une règle créée par l’autorité étatique, on tend à identifier le droit à l’Etat et, dans ce cas, il
n’y aurait de règle de droit que celle émanant de l’Etat.

Cependant, une telle conception est loin d’être vraie, car le droit n’est pas un
phénomène purement étatique. Tout d’abord, dans l’histoire des civilisations, la notion d’Etat
est une notion relativement récente, alors qu’il a existé des systèmes juridiques bien avant
que la notion d’Etat soit dégagée et utilisée comme une des bases de l’organisation sociale
actuelle. Les sociétés, dans lesquelles la tribu ou le clan constituait ou constitue encore le
centre de l’organisation sociale, ne peuvent être considérées comme des sociétés sans
système juridique.

En outre, le développement des relations internationales a entraîné la création et


l’affinement d’institutions juridiques qui dépassent le cadre de l’Etat, au point qu’il est
impossible aujourd’hui de nier l’existence des règles supra-étatiques bien que leur valeur
obligatoire dépende souvent de leur approbation par les Etats.

Enfin, il existe des règles de droit infra-étatiques qui non seulement n’ont pas toujours
pour domaine d’application la société nationale ou étatique, mais encore et surtout ne sont
pas créées par un organe de l’Etat. Tel est le cas d’une règle contractuelle, si l’on considère
que certaines stipulations de contrats peuvent constituer des règles de droit. Il en est de même
des règles coutumières qui locales, régionales ou même nationales ne sont pas élaborées par

161
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., pp. 2 et 3.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 45 Université Catholique de Bukavu
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l’autorité étatique, mais sont secrétées par la société elle-même. S’il est vrai que la plupart de
règles de droit, notamment dans un pays comme la R.D. Congo, sont des règles élaborées par
l’autorité étatique et applicables à l’ensemble de la société nationale, il n’en demeure pas
moins vrai que la règle de droit ne saurait être réduite aux dimensions de l’Etat et être créée
exclusivement par l’un de ses organes162.

Même si toutes les règles de droit ne sont pas matériellement élaborées par l’autorité
publique, on estime néanmoins que, pour qu’une règle soit considérée comme une règle de
droit, il suffit que la règle, même élaborée en dehors de l’autorité publique, soit traitée par
elle-même comme étant sa règle de par l’appui qu’elle lui apporte163.

§ 3. La règle de droit : une règle obligatoire

En principe, le caractère obligatoire est le propre de toute règle. Dès lors, on le


retrouve tout naturellement dans la règle de droit. Ce caractère apparaît d’évidence lorsque la
règle interdit tel comportement notamment en définissant et en réprimant un acte bien
déterminé ou plus généralement lorsqu’elle interdit de causer un dommage à autrui. Il
importe peu que l’ordre soit exprimé de manière extrêmement précise164.

En tant que règle obligatoire, celui auquel la règle de droit s’applique est tenu de s’y
conformer le plus souvent sous la menace d’une sanction. Néanmoins, ce n’est pas la
sanction qui est le critère du caractère obligatoire de la norme juridique. Celui-ci provient de
l’opinion de la majorité de membres du corps social qui se conforment à la règle. Le sujet de
droit sait, en vertu du caractère obligatoire de la règle de droit, qu’il doit agir de telle façon et
non pas de telle autre et, dans le cas contraire, il est considéré comme transgressant la règle
de droit.

Toutefois, le caractère obligatoire de la règle de droit n’a pas toujours la même force.
C’est ainsi que l’on distingue les règles impératives des règles supplétives. Les règles
impératives sont celles qui ont un caractère obligatoire très poussé165. Une règle impérative
est celle à l’application de laquelle on ne peut pas échapper par la manifestation d’une

162
C. LARROUMET, op. cit., pp. 20 et 21.
163
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., p. 4.
164
P. MALINVAUD, op. cit., p. 32.
165
C. LARROUMET, op. cit., pp. 26 et 27.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 46 Université Catholique de Bukavu
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volonté contraire. Tel est le cas de toutes les règles pénales, des règles du droit des personnes
particulièrement en matière de filiation – d’état civil – de mariage, des règles du droit du
travail, etc.166

S’il est vrai que la plupart de règles de droit sont des règles impératives, il existe,
cependant dans certains domaines du droit, des règles qui ne sont que supplétives167. Une
règle est dite supplétive lorsque, bien que destinée à régir une situation précise, elle peut être
écartée par une violenté contraire exprimée168. A titre d’exemple, la loi dispose que les
époux, mariés sans contrat de mariage, sont soumise à un régime matrimonial qualifié de
régime légal169. Cette règle n’est, cependant, que supplétive de volonté puisqu’on peut y
déroger par un contrat de mariage170.

Les règles supplétives sont davantage rencontrées dans les hypothèses où les relations
entre les membres de la société sont fondées sur les accords de volonté, c’est-à-dire les
relations organisées par les contrats. Dans bien de cas, les dispositions de la loi, notamment
du code civil en matière contractuelle, sont des dispositions supplétives. En conséquence, les
règles ainsi élaborées ne s’appliquent aux parties à un contrat que si elles n’en n’ont pas
décidé autrement. La règle est donc dite supplétive dans la mesure où elle supplée à l’absence
de volonté des parties au contrat. Mais, si le droit de contrat est le terrain d’élection des règles
supplétives, il existe également en la matière des règles impératives que par conséquent les
volontés des parties ne peuvent pas écarter171.

§ 4. La règle de droit : une règle générale et abstraite

I. La règle de droit : une règle générale

Le caractère général de la règle de droit résulte de ce que la règle de droit est une
disposition absolument impersonnelle qui a vocation à s’appliquer à un nombre indéterminé
de personnes se trouvant dans telle situation déterminée. La règle de droit vise non pas tant
les personnes en elles-mêmes que les situations juridiques dans lesquelles elles se trouvent. Il

166
P. MALINVAUD, op. cit., p. 37.
167
C. LARROUMET, op. cit., p. 37.
168
P. MALINVAUD, op. cit., p. 35.
169
Art. 488 du Code de la famille, in Les Codes Larcier. République Démocratique du Congo, Tome I, Droit
civil et judiciaire, Bruxelles, Larcier, 2003, p. 38.
170
P. MALINVAUD, op. cit., p. 35.
171
C. LARROUMET, op. cit., p. 27.
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importe peu que le nombre de personnes soit insignifiant. Une règle de droit peut dès lors être
conçue de manière générale, même si, en fait, elle ne s’appliquera qu’à une seule personne. Il
en est ainsi des règles relatives au mode de désignation des titulaires d’une fonction par
hypothèse unique comme le Président de la République, de la Cour de cassation, etc. Dans ce
cas, la règle s’appliquera à tous les candidats, mais elle aboutira à la désignation d’un titulaire
unique172.

La règle de droit étant considérée comme une règle générale, elle n’est pas édictée
pour un cas particulier. On considère également que le caractère général de la règle de droit
découle de ce qu’elle s’applique de la même manière sur toute l’étendue du territoire qu’elle
a vocation à régir. Ceci permet d’assurer l’égalité de tous en droit173.

II. La règle de droit : une règle abstraite

La règle de droit présente un caractère abstrait en ce qu’elle vise des situations


générales et non pas la situation précise dans laquelle se trouve telle ou telle personne174. En
tant que règle abstraite, la règle de droit s’applique à un nombre indéterminé de personnes
sans les viser nommément. A titre d’exemple, les dispositions du code civil sur la protection
des mineurs s’appliquent à tous les mineurs quels qu’ils soient et non à tel mineur X ou à tel
mineur Y175.

La règle de droit étant impersonnelle, elle n’est pas faite en faveur d’une personne
particulière ou au préjudice d’une autre. Ceci constitue une garantie contre l’arbitraire176.

III. L’appréciation critique du caractère général et abstrait de la règle de droit

S’il est vrai que la plupart de règles de droit sont des règles générales et abstraites, on
peut, cependant, se demander si on doit nier le caractère de la règle de droit à une règle de
conduite sous prétexte qu’elle n’est ni générale ni abstraite. Il en est ainsi, par exemple, des
stipulations librement incluses dans un contrat par les parties à ce contrat.

172
P. MALINVAUD, op. cit., pp. 32 et 33.
173
P. COURBE, op. cit., p. 3.
174
P. MALINVAUD, op. cit., p. 33.
175
C. LARROUMET, op. cit., p. 16.
176
P. COURBE, op. cit., p. 3.
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D’aucuns prétendent que ces stipulations ne sont pas constitutives des règles de droit
au motif qu’elles s’appliquent aux relations de deux personnes nommément désignées, à
savoir les parties au contrat. Or, dans la mesure où la loi le permet, notamment quand il s’agit
d’une loi supplétive, les parties à un contrat sont libres d’y inclure les stipulations qu’elles
entendent d’y faire figurer. Ces stipulations vont les lier au même titre et de la même façon
que la loi elle-même ; autrement dit, elles ont la même force obligatoire que la loi177. Ainsi,
en droit congolais, il est prévu que « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à
ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ou
pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi »178.

Il participe de ce qui précède que ce serait en vertu d’une règle de droit générale et
abstraite que les stipulations non impersonnelles d’un contrat ont force de loi. En élaborant
des stipulations propres à régir les rapports personnels, les parties à un contrat ne font pas que
créer la règle de droit, elles la dotent, en outre, simultanément d’un régime, qui est l’œuvre de
leur volonté. Il est donc difficile de nier que les parties à un contrat créent une règle juridique
dans la mesure où elles contribuent à l’ordonnancement juridique même si ce dernier est
propre à leurs rapports personnels.

Cependant, il existe des règles d’origine contractuelle, c'est-à-dire des règles élaborées
par un acte de volonté d’un sujet de droit, qui sont générales et abstraites. Tel est le cas des
conditions générales d’un contrat qui peuvent être utilisées et sont effectivement reprises
dans un nombre infini de contrats conclus entre un professionnel et sa clientèle. La règle est
certes élaborée unilatéralement par le professionnel dans tous les cas où elle ne lui est pas
imposée par un organisme syndical dont il est membre, ce qui l’oblige à la respecter, mais
elle est contractuelle puisque l’autre partie au contrat y adhère au moment de la conclusion du
contrat179.

Ceux qui n’attribuent le caractère d’une règle de droit qu’aux seules règles qui
seraient générales et impersonnelles, considèrent que les règles juridiques sont seulement
celles qui au-delà d’un cas particulier s’imposent à l’avenir dans tous les cas semblables. En

177
C. LARROUMET, op. cit., p. 17.
178
Art. 33 du décret du 30 juin 1988 relatif aux contrats et obligations conventionnels, in Les Codes Larcier.
République Démocratique du Congo, Tome I, Droit civil et judiciaire, Bruxelles, Larcier, 2003, p. 150.
179
C. LARROUMET, op. cit., p. 18.
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ce sens, les règles juridiques auraient vocation à s’inscrire dans la durée180. D’où, le caractère
permanent de la règle de droit en ce qu’elle s’applique à chaque fois que ses conditions sont
remplies et subsistent jusqu’à ce qu’elle soit abrogée. Elle est donc applicable virtuellement à
un nombre indéfini d’hypothèses futures181. Or, la durée n’est pas inhérente à la règle de droit
et on doit considérer qu’une règle de conduite apparaît comme une règle de droit dès lors
qu’elle a pour objet d’instituer un ordre dans une relation sociale et qu’elle est obligatoire
pour ceux qui sont concernés par cette relation182.

En ce qui concerne les jugements au sens large, c’est-à-dire les décisions rendues par
les juridictions, le juge doit appliquer le droit existant tel qu’il résulte, par exemple, de la loi
ou du contrat. Cependant, l’application de la règle existante suppose très souvent une
interprétation ou une adaptation de cette règle et c’est à ce niveau que peut se situer la
création du droit par le juge. Mais, lorsqu’il s’agit de savoir si le juge peut créer, dans les
décisions qu’il rend, des règles de droit, il ne faut pas confondre deux problèmes. Il est
question de savoir si le juge applique le droit existant, auquel cas il ne crée pas des règles, ou
bien s’il peut ajouter au droit préexistant (par exemple à la loi qu’il est chargé d’appliquer) et,
en ce cas, on peut parler d’une création jurisprudentielle du droit. S’il n’est pas douteux que
la règle créée par le juge à l’occasion d’un litige sur lequel il doit statuer constitue une règle
obligatoire par les parties au litige, il n’empêche que, comme une stipulation contractuelle,
elle n’est qu’une règle particulière183.

§ 5. La règle de droit : une règle sanctionnée par la contrainte publique

I. La sanction : un caractère essentiel de la règle de droit

Beaucoup de gens considèrent que sanction serait le caractère essentiel de la règle de


droit. Ce caractère apparaît comme parfaitement naturel puisque la règle de droit est une règle
obligatoire. On peut se demander comment on pourrait être contraint de respecter une règle,
si ce n’est par la menace d’une sanction184.

180
C. LARROUMET, op. cit., p. 19.
181
P. COURBE, op. cit., p. 3.
182
C. LARROUMET, op. cit., p. 19.
183
Idem
184
Ibidem, p. 21.
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Dans le langage ordinaire, le mot « sanction » évoque l’idée de punition, qui frappe
un individu coupable. Cet usage du terme se retrouve parfois dans la sphère du droit, par
exemple, en droit pénal, lorsqu’il s’agit de sanctionner notamment des assassins, des violeurs,
des voleurs, des escrocs, etc. Cependant, il convient de faire observer que le sens juridique du
terme « sanction » est plus large185.

En effet, en plus de la sanction-peine, la sanction désigne aussi, dans un deuxième


sens, la conséquence juridique que l’on attache à la violation d’une règle de droit. Cette
conséquence peut être de nature différente selon les cas, elle peut ne pas être une peine. Selon
un troisième sens, la sanction est identifiée à la contrainte. Dans ce cas, elle est envisagée
comme la mise en œuvre de la règle de droit par la force. D’après un quatrième sens, la
sanction désigne aussi bien les conséquences désavantageuses (notamment les peines) que les
conséquences avantageuses (récompenses) édictées par une règle. Selon un cinquième sens,
la sanction est la reconnaissance officielle d’une conséquence juridique quelconque dans un
cas particulier. Cette conséquence peut être positive ou négative. Enfin, d’après un sixième
sens, la sanction désigne la reconnaissance ou la consécration d’une règle au sein d’un ordre
juridique déterminé186.

Compte tenu de ce que les règles de droit sont destinées à ordonner les rapports des
hommes entre eux, ces règles ne peuvent être laissées à la libre volonté de chacun sous peine
de manquer leur but. D’où, l’intérêt du caractère coercitif des règles de droit187. Il faut donc
que la règle de droit soit observée même par ceux qui ne s’y conformeraient pas de leur
propre gré188.

Même si la sanction est considérée comme la conséquence rattachée à l’inobservation,


à la violation des règles de droit, il importe de rappeler que la sanction n’est pas l’apanage de
seule règle de droit. En effet, toute règle de conduite obligatoire comporte, en principe, une
sanction. Toutefois, seule la règle de droit bénéficie d’une sanction socialement organisée189.

185
R. ROBAYE, op. cit., p. 24.
186
F. OST et M. VAN DE KERCHOVE, op. cit., pp. 222-230.
187
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., p. 4.
188
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 9.
189
Idem
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II. La sanction : un monopole de l’Etat

Lorsque la règle de droit est sanctionnée, on peut se poser la question de savoir si


cette sanction est chaque fois l’apanage de l’Etat. Dans les sociétés étatiques, cette question
appelle une réponse positive, car le pouvoir de sanctionner la règle de droit est considérée
comme un monopole de l’Etat. Les hypothèses que l’on pourrait avancer en sens contraire ne
sont pas probantes, puisque même si l’Etat ne sanctionne pas lui-même par l’un de ses
organes, il exerce un contrôle, par l’intermédiaire du pouvoir juridictionnel étatique, sur la
sanction. Il en est ainsi en ce qui concerne le pouvoir disciplinaire reconnu à certaines
personnes ou à certains organes qui ne relèvent pas de l’Etat.

En effet, certaines professions sont organisées en corps ou en ordre. Il en est ainsi du


corps des magistrats, de l’ordre des avocats, de l’ordre des médecins, etc. Or, le corps ou
l’ordre est investi d’un pouvoir disciplinaire envers ses membres en vertu duquel les
membres, considérés comme ayant violé les règles déontologiques du corps concerné,
peuvent se voir infligés des sanctions par des organes dudit corps habilités à cet effet.

S’il est vrai que ces ordres sont investis d’un pouvoir disciplinaire, il convient,
néanmoins, de relever que, d’une part, la création de ces organisations corporatistes est
décidée par l’Etat qui leur attribue un pouvoir disciplinaire et, d’autre part, leur pouvoir n’est
pas indépendant dans la mesure où l’autorité juridictionnelle de l’Etat en contrôle
l’exercice190.

Relativement à l’arbitrage, si, dans de très nombreuses situations, la solution des


litiges entre particuliers peut être donnée par des arbitres choisis par les parties, il y a lieu,
toutefois, de révéler que cette justice privée n’est pas totalement indépendante du pouvoir
judiciaire. En effet, d’une part, pour pouvoir obtenir l’exécution forcée d’une décision rendue
par un arbitre à la suite d’un litige, il faut que celui au profit de qui cette décision est rendue
en demande l’exequatur à une juridiction étatique, c’est-à-dire la permission de la faire
exécuter, au besoin par la force. Or, la juridiction étatique qui est saisie d’une demande
d’exequatur peut exercer un contrôler de la régularité de l’arbitrage. D’autre part, il est, en

190
C. LARROUMET, op. cit., pp. 21 et 22.
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principe et sauf exception, possible d’introduire un recours contre la décision de l’arbitre


devant une juridiction de l’ordre étatique.

Au regard de ce qui précède, nous constatons que le recours au pouvoir judiciaire en


cas de litige n’est pas toujours obligatoire. D’ailleurs, l’arbitrage a connu un développement
important de nos jours, notamment dans les affaires commerciales aussi bien dans les
rapports internationaux qu’internes, c’est-à-dire pour les affaires traitées à l’intérieur des
frontières d’un Etat. Toutefois, il existe des matières dans lesquelles la compétence du
pouvoir judiciaire est exclusive. Il en est ainsi, par exemple, pour toutes les questions qui
relèvent de l’état de personne, du statut familial (mariage, divorce, filiation), de la nationalité,
etc.191

III. La diversité des sanctions

Selon les types de règles qu’elles accompagnent, les sanctions sont de nature
différente192. Les sanctions juridiques peuvent être groupées en trois catégories.

A. Les sanctions pénales

Ce sont celles qui consistent en une répression sous forme de peines ou de mesures de
193
sûreté . Ce sont les sanctions pénales. Ces sanctions répondent à un objectif de répression
des certains comportement à travers la punition de ceux qui les commettent. La nature et la
gravité des sanctions pénales dépendent du type d’infraction aux lois qu’elles entendent
réprimer194.

L’auteur d’une infraction se verra alors frappé soit dans sa personne (peine de mort,
peine privative de liberté égale emprisonnement, mesure de sûreté comme l’internement), soit
dans ses biens (confiscation, amende), soit dans certains de ses autres droits (destitution,
interdiction ou déchéance)195.

191
C. LARROUMET, op. cit., pp. 22 et 23.
192
R. ROBAYE, op. cit., p. 25.
193
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 9.
194
R. ROBAYE, op. cit., p. 27.
195
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 9.
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B. La réparation

En plus des sanctions pénales, on rencontre une autre catégorie de sanctions qui
consistent en une réparation du préjudice causé. Cette réparation peut se faire soit par
l’exécution en nature, soit par la fourniture d’un équivalent généralement sous forme de
dommages et intérêts196.

L’exécution en nature permet d’obtenir le bénéfice exact auquel on peut prétendre sur
base de la règle qui n’a pas été respectée. Par exemple, si quelqu’un doit rembourser un prêt
d’argent et ne le fait pas, il pourra être condamné à payer cette somme à son créancier. S’il ne
s’acquitte pas volontairement, on utilisera éventuellement la force, par exemple, en réalisant
une saisie sur ses biens et en les vendant pour permettre le payement du créancier jusqu’ à
concurrence du montant dû.

Il existe, toutefois, une limite importante à l’exécution en nature lorsque l’obligation


en cause consiste dans l’obligation de faire quelque chose. En effet, on ne conçoit pas qu’on
puisse exercer une contrainte sur la personne elle-même pour l’obliger à faire quelque chose.
En droit privé, nul ne peut être contraint de faire ce qu’il ne veut pas faire. Ainsi, par
exemple, si un architecte refuse, malgré le contrat qu’il a conclu avec son client de dresser le
plan d’un immeuble, on ne peut l’obliger manu militari. La sanction du non-respect de ses
obligations par l’architecte devra, dans ce cas, être autre chose qu’une exécution en nature.

Un autre mode de réparation d’un préjudice consiste dans la réparation par équivalent,
qui est retenu lorsque l’exécution en nature n’a pas été accomplie ou n’est pas ou plus
possible ou encore lorsqu’une perte est subie injustement par quelqu’un, telle qu’une perte
financière, matérielle, sentimentale, physique, morale, etc. En cas de réparation par
équivalent, le juge alloue à la victime, à titre de réparation du préjudice subi par elle, une
somme d’argent. On dit, dans ce cas, que la réparation s’effectue par le payement des
dommages et intérêts.

On établit une distinction entre, d’une part, des dommages et intérêt compensatoires
qu’on attribue à une victime ou à un créancier lorsque l’argent alloué vise à réparer le

196
Ibidem, p. 9 et 10.
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préjudice à lui-même et, d’autre part, des dommages et intérêts moratoires qu’on alloue à un
créancier lorsqu’il s’agit de réparer les dommages nés du retard avec lequel une obligation a
été exécutée197.

C. L’annulation

Une dernière catégorie de sanctions est constituée par les sanctions qui permettent de
supprimer ou de réduire l’efficacité d’un acte accompli irrégulièrement198. La sanction qui
consisterait dans l’annulation d’un acte a pour but et pour effet de faire disparaître un acte
juridique accompli de façon irrégulière soit parce qu’on ne pouvait pas poser cet acte, soit
parce qu’on n’a pas respecté les conditions de validité de fond et/ou de forme de l’acte en
question. Par exemple, un contrat de vente pourrait être frappé par une nullité en raison du
dol qui constitue un vice de consentement commis par le vendeur et qui aura consisté dans la
tromperie de l’acheteur sur une qualité déterminante de l’objet vendu199.

Un acte d’une autorité administrative, notamment le Président de la République, un


Ministre, un Gouverneur, etc. peut être également être annulé par une juridiction
administrative en raison notamment de l’incompétence de l’auteur de l’acte, d’un vice de
forme ou de procédure.

IV. La contrainte étatique

La sanction pour être efficace, ce qui exige évidemment son effectivité, doit s’appuyer
sur la contrainte. A défaut, le comportement prescrit par la règle de droit resterait le plus
souvent lettre morte. Notre système juridique est fondé sur le recours à la force pour obtenir
le respect de la plupart de règles de droit. Ce monopole de la contrainte réservée à l’Etat est
confié à certaines institutions, à savoir : les institutions judiciaires, qui sont investies du
pouvoir de faire respecter le droit200.

Au regard de ce qui précède, nul ne peut se faire justice à soi-même. Pour permettre à
chaque personne de faire respecter ses droits, il est prévu l’action en justice qui est le mode

197
R. ROBAYE, op. cit., pp. 25 et 26.
198
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 10.
199
R. ROBAYE, op. cit., p. 26.
200
Ibidem, p. 31.
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normal pourrait faire reconnaître et sanctionner ses droits201. L’action en justice est le pouvoir
en vertu duquel une personne peut s’adresser à un juge aux fins d’obtenir de lui l’examen de
sa prétention et éventuellement faire droit à sa demande.

S’il est prévu la possibilité de recourir à la contrainte étatique pour obtenir le respect
des règles de droit, cela ne revient pas à dire que les règles de droit ne sont observées que sur
base de la contrainte. En fait, la règle de droit est, d’ordinaire, spontanément obéie et la
contrainte ne demeure que d’ultime recours. La contrainte est publique dans la mesure où elle
est décrétée et exercée par l’autorité publique comme telle et non pas par des individus ou des
groupes d’individus.

Au regard de la suprématie de la société étatique sur d’autres sociétés particulières, la


contrainte étatique revêt un caractère inconditionné. En effet, mis à part un éventuel contrôle
international, l’exercice de la contrainte étatique échappe à toute censure202.

Toutefois, si les sanctions peuvent être imposées au besoin par le recours à la force
publique, relevons que l’usage de la contrainte matérielle doit être réglementé afin que le
respect de la règle de droit ne soit pas obtenu au mépris de valeurs sociétaires jugées
essentielles. Dans les Etats modernes, le recours à la contrainte est techniquement organisé.
La mise en œuvre de la contrainte est assujettie à certaines règles ayant pour objet d’en
garantir le fonctionnement impartial et objectif et cette contrainte ne peut être exécutée que
par les seuls agents dépositaires de la force publique203.

V. La sanction dans les rapports entre Etats souverains

Dans les relations des Etats entre eux, des sanctions peuvent être infligées par un Etat
à un autre. Ceci est une façon de se rendre justice.

Cependant, il existe aussi, sur le plan international, des autorités supra-étatiques, telles
que la Cour internationale de justice ou l’Organisation des Nations Unies, qui peuvent
sanctionner les Etats. Mais, de par leur nature, les Etats ne se prêtent pas à des sanctions

201
P. MALINVAUD, op. cit., p. 34.
202
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., pp. 4 et 5.
203
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 10.
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comme les personnes privées204. Les Etats sont invités à privilégier le recours aux voies
pacifiques de règlement des différends dans les conflits qui pourraient les opposer205.

VI. Les règles de droit dépourvues de sanction

La question que l’on se pose est de savoir s’il existe des règles qui contribuent à
l’ordonnancement juridique et réalisent une organisation sociale tout en étant dépourvues de
sanctions ? Cette question se pose, non seulement en droit international public, mais aussi en
droit interne206.

A. Les règles dépourvues de sanction en droit international public

Dans les rapports entre Etats, il est difficile non seulement de concevoir, mais encore
et surtout d’appliquer des sanctions adéquates en cas de violation de ses obligations par un
Etat. C’est l’une des raisons pour lesquelles certains nient l’existence d’un véritable droit
international public pour y avoir seulement un ensemble de règles plus ou moins morales. Or,
une telle prise de position suppose non seulement qu’il n’y a des règles de droit que si la
règle est pourvue de sanctions, mais encore qu’une règle morale, à la différence d’une règle
de droit, n’est pas une règle assortie de sanction, alors qu’il existe des sanctions morales
comme il existe des sanctions juridiques.

En réalité, on ne peut nier que le droit international public impose des obligations aux
Etats notamment dans leurs rapports soit en vertu de conventions internationales bilatérales
ou multilatérales, soit au sein des organisations internationales. Il en résulte qu’il y a des
règles de droit international, qui ont pour but d’imposer l’ordre dans les relations
internationales, d’organiser les relations entre Etats. Une telle organisation mérite d’être
considérée comme un ordonnancement juridique bien qu’elle soit particulière, étant donné
que ceux auxquels elle s’applique sont des Etats souverains.

Il est vrai que les sanctions éventuellement prévues en cas de violation de ces
obligations par un Etat sont imparfaites et souvent inefficaces, mais l’absence ou
l’imperfection de la sanction ne saurait permettre d’affirmer l’inexistante d’un système

204
C. LARROUMET, op. cit., p. 23.
205
Art. 33-38 de la Charte des Nations Unies.
206
C. LARROUMET, op. cit., p. 23.
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juridique207. Sont considérées comme étant des règles imparfaites, les règles qui sont
dépourvues de contrainte, voire même de sanctions208.

B. Les règles dépourvues de sanction en droit interne

En droit interne, il existe un certain nombre de règles auxquelles il est reconnu le


caractère de règle de droit, alors qu’elles ne sont pas pourvues de sanctions efficaces ou
même qu’elles ne sont pas du tout pourvues de sanctions. On retrouve ces règles aussi bien en
droit public qu’en droit privé.

En droit public, il en est ainsi, par exemple, de la règle selon laquelle le Président de
la République est tenu de promulguer les lois votées par le parlement209. Or, aucune sanction
n’est prévue à l’encontre du Président de la République en cas de non promulgation d’une loi.
De même, très souvent, le Parlement qui a voté une loi charge le Gouvernement de prendre
notamment un décret complétant la loi, la précisant, et qui est donc nécessaire pour son
application. Or, parfois malgré le délai assigné au Gouvernement par le Parlement pour
adopter la mesure d’application de la loi, cette mesure intervient des mois et parfois des
années après l’expiration du délai fixé210. Dans le cas de la RDC, parfois elle n’intervient
même pas. Tel est le cas de l’ordonnance du Président de la République, attendue depuis
1973, devant régir les droits de jouissance régulièrement acquis sur les terres occupées par les
communautés locales211. Or, aucune sanction n’est prévue dans ce cas.

En droit privé, nous pouvons illustrer le cas des règles dépourvues des sanctions par la
consécration de l’obligation naturelle qui constitue un excellent exemple d’une règle de droit
non sanctionnée. Une obligation naturelle est une dette qui pèse sur une personne, mais celui
au profit duquel elle doit être exécutée, c’est-à-dire le créancier, ne peut exiger l’exécution
par une action en justice. On oppose l’obligation naturelle à l’obligation civile, qui est une
dette dont le créancier peut exiger l’exécution en s’adressant au tribunal. S’il est vrai que la
plupart d’obligations prévues par des règles de droit sont des obligations civiles, il existe

207
Ibidem, p. 24.
208
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 9.
209
Art. 79, al. 2 de la Constitution de la RDC.
210
C. LARROUMET, op. cit., pp. 24 et s.
211
Art. 389 de la loi 73-021 du 20 juillet 1973 telle que modifiée et complétée portant régime général des
biens, régime foncier et immobilier et régime des sûretés, in Les Codes Larcier. République Démocratique du
Congo, Tome I, Droit civil et judiciaire, Bruxelles, Larcier, 2003, p. 123.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 58 Université Catholique de Bukavu
Par Jean-Petit MULUME ZIHALIRWA G1 Droit/2017-2018

également des obligations naturelles dont le payement ne peut être que volontaire et jamais
forcé. Ceci n’enlève pas à cette obligation son caractère juridique, puisque si le débiteur s’en
acquitte volontairement, il paye une dette dont il était tenu et n’accomplit pas un acte gratuit
au profit du créancier212. C’est ainsi qu’il est prévu en droit congolais que « Tout payement
suppose une dette ; ce qui a été payé sans être dû est sujet à répétition. La répétition n’est
pas admise à l’égard des obligations naturelles qui ont été volontairement acquittées »213.

Il ressort des développements précédents que la sanction n’est pas de l’essence de la


règle de droit même si l’immense majorité de règles de droit est sanctionnée directement ou
indirectement214.

Section 3. Les types de règles de droit

D’après certains critères qui sont proposés, les règles de droit peuvent être distinguées
du point de vue de leur portée, de leur objet, de leur caractère obligatoire, du comportement
qui doit avoir lieu, de leur origine et de leur forme.

§ 1. Du point de vue de la portée des règles de droit

Au regard de la portée des règles de droit, on distingue les règles générales des règles
individuelles.

I. Les règles générales

Ce sont des règles de droit qui énoncent une solution générale applicable à une
hypothèse envisagée de manière abstraite et impersonnelle. En d’autres termes, ce sont des
dispositions qui ont vocation à s’appliquer de manière répétitive à un ensemble de situations
ou de personnes indéterminées, à savoir toutes celles qui correspondront à l’hypothèse
abstraitement prises en considération par la règle de droit.

Cette hypothèse définie de manière abstraite, c’est-à-dire sans prendre en compte un


cas individuel ou particulier, peut tantôt concerner l’ensemble de personnes qui vivent dans

212
C. LARROUMET, op. cit., p. 24 et s.
213
Art. 133 du décret du 30 juin 1888 portant Code civil des obligations précité.
214
C. LARROUMET, op. cit., p. 26.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 59 Université Catholique de Bukavu
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une société, tantôt des catégories de personnes, tantôt une seule personne abstraitement
définie215.

Exemples :
- « Quiconque a volontairement fait des blessures ou porté des coups est puni d’une
servitude pénale de huit jours à six mois et d’une amende de vingt-cinq à deux cents francs,
ou d’une de ces peines seulement »216.
- « Tout détenu qui sera évadé ou qui aura tenté de s’évader sera, pour ce seul fait,
puni d’une peine de servitude pénale d’un an au maximum » 217.
- « Le Président de la République exerce le droit de grâce. Il peut remettre, commuer
ou réduire les peines »218.

Les règles générales connaissent une double origine. Elles peuvent, tout d’abord,
émaner des autorités publiques d’un Etat. Elles peuvent ensuite être établies par des sujets de
droit auxquels l’autorité publique a conféré ou reconnu, dans les limites qu’elle précise, le
pouvoir d’élaborer des telles règles Il en est ainsi des institutions de droit international public,
des organisations représentatives d’intérêts professionnels, des collectivités - qui dans
certaines circonstances se voient reconnaître ce pouvoir219.

II. Les règles individuelles

Ce sont celles qui énoncent une injonction ou une permission individuelle donnée
à une ou à plusieurs personnes identifiées et déterminées de manière précise dans une
situation ou dans une hypothèse prise en considération de manière concrète220. La
caractéristique de la règle individuelle est de s’épuiser en sa seule application à un cas
déterminé à l’avance.

Les règles individuelles peuvent être classées d’après leurs origines. On distingue
ainsi :

215
J.-L. RENCHON, op. cit., p. 20.
216
Art. 46, al. 1er du décret du 30 janvier 1940 portant Code pénal, in Les Codes Larcier. République
Démocratique du Congo, Tome II, Droit pénal, Bruxelles, Larcier, 2003,
217
Art. 161, al. 1er du décret du 30 janvier 1940 portant Code pénal précité.
218
Art.87 de la Constitution du 18 février 2006 précitée.
219
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., pp. 6 et 7.
220
J.-L. RENCHON, op. cit., p. 21.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 60 Université Catholique de Bukavu
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- Les règles posées par des actes juridiques privés: il s’agit des règles émanant de la
volonté des particuliers. En effet, en vertu du principe général de l’autonomie de la volonté,
les particuliers ont droit de créer, par des actes juridiques privés, des règles de droit
individuelles qui régiront leurs rapports. Tel est le cas pour le testament, la vente, le louage,
etc.
- Les règles émanant de l’autorité publique : ce sont des règles posées soit par des
actes administratifs soit par des actes juridictionnels.
Les actes administratifs sont des manifestations de volonté émanant de l’Administration
publique qui ont pour objet de créer, de modifier ou de supprimer une situation juridique
concrète. Tel est le cas d’une nomination d’un fonctionnaire, de l’ordre de démolition d’un
immeuble menaçant ruine.
Les actes juridictionnels sont, quant à eux, des décisions par lesquelles les juges tranchent les
contestations qui leur sont soumises en appliquant, par des mesures particulières, des règles
générales aux cas d’espèce221. Cependant, dans certains cas, les juges n’exercent pas un rôle
qui se limite à l’application des règles générales aux cas concret, mais se voient appelés à
combler le silence du législateur en créant eux-mêmes les règles de droit devant s’appliquer
aux litiges leur soumis.

§ 2. Du point de vue de l’objet des règles

D’après l’objet des règles, on distingue, au sein des règles générales et abstraites du
droit positif, d’une part, les normes primaires et, d’autre part, les normes secondaires.

I. Les règles primaires

Ce sont celles qui régissent, de manière directe et immédiate, la conduite ou le


comportement des hommes222. Tel est le cas de la règle selon laquelle « Tout fait quelconque
de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le
réparer »223. Il en est également de la règle qui prescrit que « Sera puni d’une servitude
pénale de huit jours à six mois et d’une amende de deux cents à trois cents mille francs ou
d’une de ces peines seulement, celui qui sachant qu’il est dans l’impossibilité de payer, se
sera fait servir, dans un établissement à ce destiné, des boissons ou des aliments, qu’il y
aura consommés en tout ou en partie, se sera fait donner un logement dans un hôtel ou il

221
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., p. 7.
222
H. L. A. HART, op. cit.
223
Art. 258 du décret du 30 juin 1888 relatif aux contrats et obligations conventionnelles précité.
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s’est présenté comme voyageur ou aura pris en location une voiture de louage ». Ces faits
visés par cette règle constituent une infraction de grivèlerie224.

II. Les règles secondaires

Elles sont, quant à elles, des règles indirectes qui réglementent la compétence
attribuée à des institutions de l’Etat et/ou à des particuliers soit de créer - d’abroger ou de
modifier des règles primaires, soit de contrôler leur légalité, soit d’assurer leur application.
Ce sont, en quelque sorte, les règles qui reconnaissent, organisent et délimitent, au sein d’une
société, le pouvoir public ou privé d’élaboration et de mise en œuvre des règles primaires
organisant les droits et les obligations des hommes vivant au sein de cette société225.

Il en est ainsi de la règle selon laquelle « Le pouvoir législatif est exercé par un
Parlement composé de deux Chambres : l’Assemblée nationale et le Sénat. Sans préjudice
des autres dispositions de la présente Constitution, le Parlement vote les lois. Il contrôle le
Gouvernement, les entreprises publiques ainsi que les établissements et les services publics.
Chacune des Chambres jouit de l’autonomie administrative et financière et dispose d’une
dotation propre »226.

§ 3. Du point de vue du caractère obligatoire des règles

D’après le caractère obligatoire des règles de droit, une règle peut se présenter comme
un commandement ou comme une recommandation.

I. La règle de droit formulée comme commandement

Pour remplir sa fonction directive, plusieurs techniques s’offrent à l’autorité publique


et la plus ancienne de ces techniques est la technique purement autoritaire. Au regard de
cette technique, la règle de droit est conçue comme un commandement, une prescription. Elle
exprime des ordres positifs par lesquels elle impose ou permet ou des ordres négatifs qui, au
contraire, interdisent certains comportements.

Ces commandements ne sont pas toujours formulés de manière identique. Certains


sont exprimés explicitement. D’ailleurs, un grand nombre de règles de droit ordonnent ou
224
Art. 102 bis du décret du 30 janvier 1940 portant Code pénal précité.
225
J.-L. RENCHON, op. cit., p. 28.
226
Art. 100 de la Constitution de la RDC précitée.
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interdisent directement quelque chose227. Tel est le cas de la règle selon laquelle « Toute
personne a droit à un environnement sain et propice à son épanouissement intégral. Elle a le
devoir de le défendre »228 et celle qui prévoit que « Nul ne peut être lésé dans son travail en
raison de ses origines, de son sexe, de ses opinions, de ses croyances ou de ses conditions
socio-politiques »229.

D’autres règles contiennent des ordres ou des défenses indirects 230. Ainsi, en est-il de
la règle selon laquelle « Sera puni d’une servitude pénale de trois mois à deux ans et d’une
amende de cinq à cinquante zaïres ou de l’une de ces peines seulement, quiconque s’abstient
volontairement de porter à une personne en péril l’assistance que, sans risque pour lui ni
pour les tiers, il pouvait lui prêter, soit par son action personnelle, soit en provoquant un
secours ». C’est l’infraction à non-assistance à personne en danger231. Dans ce cas, le
législateur ordonne indirectement de porter secours aux personnes en danger.

Il arrive également que le commandement ne soit formulé ni directement ni


indirectement, mais seulement de manière implicite. La règle est alors dite dispositive, car
elle définit des droits - des capacités ou des compétences, détermine les conditions
d’ouverture de tel effet de droit ou les effets de droit de telle situation232. Il en est ainsi de la
règle selon laquelle «Tout pouvoir émane du peuple qui l’exerce directement par voie de
referendum ou d’élections et indirectement par ses représentants »233. Il en est de même de
la règle qui prévoit que « Le domicile de toute personne est au lieu où elle a son principal
établissement »234.

II. La règle de droit formulée comme recommandation

La technique utilisée par les pouvoirs publics pour diriger la conduite des hommes n’est
pas toujours autoritaire. Dans certains cas, elle plus souple. En pareille situation, le
comportement à suivre n’est plus alors prescrit, il est suggéré; les objectifs ne sont plus
imposés, mais plutôt indiqués. Les règles qui consacrent ces recommandations sont qualifiées

227
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 7.
228
Art. 53 de la Constitution de la RDC précitée.
229
Ibidem, art. 36.
230
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 7.
231
Art. 66ter du décret du 30 janvier 1960 portant Code pénal précité.
232
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 8.
233
Art. 5 de la Constitution de la RDC précitée.
234
Art. 161 de la loi 87/010 du 1eraoùt 1987 portant Code de la famille précitée.
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des règles planificatrices, programmatrices ou encore déclamatoires. Elles laissent à leurs


destinataires une totale liberté d’action235.

La technique de recommandation, dont le développement est relativement récent, se


relève apparemment mieux adaptée aux nouvelles missions de l’Etat-providence ainsi qu’au
développement du droit international. Cette technique est également parfois utilisée par l’Etat
dans le domaine du droit économique.

§ 4. Du point de vue du comportement qui doit avoir lieu

Au regard du comportement qui doit se produire, la règle de droit peut se présente


sous différentes formes. Elle peut consacrer une interdiction, un commandement ou une
permission.

La règle consacre une interdiction lorsqu’elle prohibe l’adoption de tel ou tel


comportement ou, à tout le moins, lorsqu’elle fixe les limites qui, lors de l’adoption d’un
certain nombre de comportements, ne peuvent être dépassées. C’est le cas de la plupart de
règles de droit pénal.

La règle de droit consistera en un commandement lorsqu’elle énonce des obligations


positives que les personnes, visées par l’hypothèse formulée, sont tenues d’exécuter dans les
conditions qu’elle définit. Il en est ainsi des obligations nées du mariage entre époux, entre
parents et enfants ou encore des obligations créées par un contrat.

Enfin, une règle de droit peut consacrer une permission lorsqu’elle énonce des
facultés, des compétences ou des libertés qu’elle reconnaît aux personnes visées par son
hypothèse. Ceci implique, en conséquence, une interdiction faite aux autres personnes de
porter atteinte à ces facultés, à compétences ou à ces libertés.

Dans certains autres cas, certaines règles de droit n’énoncent cependant pas comme tel
une interdiction, un commandement ou une permission. Elles se bornent simplement à
exprimer une définition, à introduire des distinctions ou à décrire les conditions de
reconnaissance d’une situation de droit à laquelle le système juridique attache, à travers

235
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., pp. 8-9.
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d’autres règles, des droits ou des obligations. En réalité, ces règles contiennent aussi, du
moins implicitement, une interdiction ou une permission. Il en est ainsi de l’interdiction de
définir ou de qualifier, selon des règles différentes, les hypothèses ou les concepts décrits par
l’auteur d’une règle de droit236.

§ 5. Du point de vue de l’origine des règles

Selon l’origine des règles juridiques, on établit une distinction entre, d’une part, les
règles de droit interne et, d’autre part, les règles de droit international.

I. Les règles de droit interne

Il s’agit des règles qui trouvent leur origine à l’intérieur d’un Etat. Tel est le cas de toutes
les règles qui émanent de l’Etat à travers les autorités publiques habilitées à cet effet ainsi que
les règles élaborées par les particuliers notamment à travers les contrats qu’ils concluent.

II. Les règles de droit international

Il s’agit d’un ensemble de règles dont la source formelle est internationale. Il en est ainsi
des règles qui constituent le droit international public au sens strict. Ce sont des règles qui
régissent les relations entre sujets de droit international ainsi que celles qui fixent le statut, les
pouvoirs et les modes de fonctionnement des institutions internationales237.

§ 6. Du point de vue de la forme des règles

Selon la manière dont les règles apparaissent, on établit une distinction entre les normes
écrites et les normes non écrites dont celles coutumières238.

Section 4. La structure et les destinataires de la règle de droit

§ 1. La structure de la règle de droit

La règle de droit est construite selon un schéma bipartite même si sa rédaction ne laisse
pas toujours clairement apparaître cette structure spécifique. Une analyse de son énoncé
permet de distinguer deux éléments articulés entre eux d’une façon logique : telle situation

236
J.-L. RENCHON, op. cit., pp. 17-18.
237
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 15.
238
A.-J. ARNAUD (dir.), op. cit., pp. 406-407.
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Par Jean-Petit MULUME ZIHALIRWA G1 Droit/2017-2018

étant donnée, telle conséquence doit s’en suivre ou plus simplement si… alors…239. Les deux
éléments dont se compose la règle de droit sont : l’hypothèse et le dispositif240.

L’hypothèse définit ou décrit la situation envisagée par la règle, c’est-à-dire la situation


de la vie des hommes ou la réalité sociale qui est réglementée ou régie par la règle de droit.

Les hypothèses envisagées par la règle de droit peuvent être soit des situations de fait soit
des situations de droit. Lorsque les hypothèses envisagées constituent des situations de fait,
les hypothèses constituent alors des actes ou des situations de la vie des hommes auxquelles
une règle de droit attache une solution juridique241.

Exemple :
- le fait de causer un dommage par sa faute242 ;
- les coups et blessures volontaires infligés à autrui243.

L’hypothèse peut aussi consister en une situation juridique. Cette dernière suppose, pour
être prise en considération, que les règles juridiques, qui l’organisent, aient été valablement
respectées ; autrement dit, la situation organisée par la règle se réfère à d’autres règles de
droit qui définissent les conditions auxquelles la reconnaissance de cette situation juridique
est subordonnée244. Ainsi, il est notamment prévu que « Les époux se doivent mutuellement
fidélité, respect et affection»245. Il convient à cet égard de faire remarquer que seuls les époux
et non les concubins sont concernés par cette obligation. L’hypothèse suppose donc, dans ce
cas, pour être prise en considération qu’il ait eu un mariage juridiquement valable, c’est-à-
dire conforme aux règles de droit qui organisent la conclusion du mariage246.

Le deuxième élément que comporte une règle de droit est le dispositif ou la solution. Le
dispositif définit ou décrit la solution ou l’effet juridique attaché par la règle de droit à la

239
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 11.
240
J.-L. RENCHON, op. cit., p. 15.
241
J.-L. RENCHON, op. cit., p. 15.
242
Hypothèse visée par l’article 258 du Code civil congolais des obligations.
243
Hypothèse prévue par l’article 46 du Code pénal congolais.
244
J.-L. RENCHON, op. cit., p. 16.
245
Art. 459 du Code de la famille précité.
246
J.-L. RENCHON, op. cit., p. 16.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 66 Université Catholique de Bukavu
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situation qu’elle vise dans l’hypothèse. La solution indique donc les conséquences juridiques
qui s’appliqueront lorsque l’hypothèse est réalisée247.

Il en est ainsi de l’obligation pour l’auteur d’un dommage d’indemniser la victime248 et de


la servitude pénale de huit jours à six mois et d’une amende de vingt-cinq à deux cents francs
ou d’une de ces peines seulement en cas de commission de l’infraction de coups et blessures
volontaires249.

§ 2. Les destinataires de la règle de droit

Les destinataires de la règle de droit, dont le nombre varie selon la règle en cause,
peuvent être rangés en trois catégories distinctes, à savoir :
- les personnes auxquelles la règle impose ou interdit un comportement déterminé ;
- les personnes pour lesquelles la règle constitue une source des droits. Ces
destinataires trouveront dans la règle un fondement pour exiger le respect de la règle à
toute autre personne et pour exercer éventuellement un recours contre elle ;
- tous ceux qui ont reçu pour fonction d’intervenir, au besoin par la force, pour que les
règles soient réellement appliquées. Ce sont tous ceux sans lesquels la règle risquerait
de n’être qu’un vœu pieux250.

247
Ibidem, p. 15.
248
Solution prévue par l’article 258 du Code civil congolais des obligations.
249
Sanction consacrée par l’article 46 du Code pénal congolais.
250
R. ROBAYE, op. cit., pp. 29-30.
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Chapitre III. LES SOURCES DU DROIT OBJECTIF

Le mot « source » évoque l’idée d’origine. Le concept désigne dans son sens propre
et dans son sens figuré une double réalité, à savoir l’origine matérielle et l’origine formelle.
L’expression « source du droit objectif » vise donc l’origine des règles de droit envisagées
sous l’angle de leur contenu (sources matérielles) et de leur mode d’élaboration (sources
formelles).

L’examen des sources du droit nous amènera donc à distinguer les sources formelles du
droit de ses sources matérielles. Les sources formelles du droit sont les divers procédés de
création des règles générales et individuelles qui forment le droit objectif251. Elles constituent
donc les procédés et actes par lesquels les normes accèdent à l’existence « juridique »,
s’insèrent dans le droit positif et acquièrent leur validité252. Ce sont les modalités
d’émergence d’un ordre juridique.

Parmi les sources formelles, on établit une distinction entre les sources obligatoires et les
sources non obligatoires. Les sources obligatoires sont celles qui, par leur seule autorité
s’imposent, aux juges. Il s’agit notamment de la Constitution, des traités internationaux, de la
loi, du règlement, de la coutume, de la convention collective et des principes généraux du
droit. Les sources non obligatoires, quant à elles, sont celles qui, en principe, ne s’imposent
pas, ne sont pas normalement obligatoires, mais jouent un rôle important dans la création du
droit253. Tel est le cas de la jurisprudence, de la doctrine, de la pratique et de l’équité.

L’analyse des sources du droit objectif nous amènera à étudier les sources formelles
obligatoires, les sources formelles non obligatoires et enfin les sources matérielles ou facteurs
du droit.

Section 1. Les sources formelles obligatoires

A travers cette section, nous analyserons, tour à tour, la classification des sources
formelles obligatoires, les conditions d’application de la loi et la sauvegarde de la cohérence
au sein de la loi au sens large.

251
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 25.
252
J.-L. BERGEL, Théorie générale du droit, 3e éd., Paris, Dalloz, 1999, p. 51, n° 42.
253
R. ROBAYE, op. cit., p. 100.
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§ 1. La classification des sources formelles obligatoires

I. Les sources supra-législatives

A. La Constitution

1. La notion de Constitution

Au sens matériel, la Constitution peut être définie comme l’ensemble de règles écrites
ou coutumières qui déterminent la forme de l’Etat (unitaire ou fédérale), la dévolution et
l’exercice du pouvoir.

Au sens formel, la Constitution désigne le document relatif aux institutions politiques


dont l’élaboration et la modification obéissent à une procédure différente de la procédure
législative ordinaire. Ce formalisme, que traduit l’expression « Constitution rigide », confère
aux règles qui en bénéficient une force juridique qui les situe à la première place dans la
hiérarchie des règles de droit.

On oppose à une Constitution rigide une Constitution souple. Une Constitution est
qualifiée de « souple », lorsque ne se distinguant pas par sa forme des lois ordinaires, elle
occupe le même rang qu’elles dans la hiérarchie des règles juridiques et peut être modifiée
par elles254.

La Constitution se situe au sommet de la hiérarchie des normes en raison de divers


facteurs à savoir :
- sa procédure d’élaboration : la Constitution peut émaner soit directement du peuple
consulté par voie de referendum, soit du parlement ;
- son objet : qui est l’organisation du pouvoir entre les diverses autorités de l’Etat. La
Constitution constitue aussi le pacte social régissant les rapports des gouvernements et
des gouvernés255.

254
R. GUILLIEN et J. VINCENT, op. cit., p. 140.
255
P. MALINVAUD, op. cit., p. 53.
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2. Le contenu de la Constitution

La Constitution constitue la loi fondamentale d’un Etat. Elle fixe sa structure, indique et
organisent les différents pouvoirs au sein de l’Etat et de diverses collectivités qui le
composent, détermine leur composition, leur assigne un domaine d’actions, fixe leurs règles
de comportement et précise le lien existant entre eux. Elle détermine également la place du
citoyen au sein de l’Etat en reconnaissant notamment en sa faveur certains droits et en
consacrant certaines libertés publiques256.

3. Le bloc de constitutionnalité

Dans le but d’étendre le contrôle de la constitutionalité des lois, il a été reconnu la valeur
constitutionnelle à d’autres règles que la doctrine range désormais sous l’intitulé de « bloc de
constitutionnalité ». Il s’agit, tout d’abord, du préambule de la Constitution et par voie de
conséquence des documents auxquels il renvoie257. En RDC, il s’agit spécialement de la
Déclaration de droit de l’homme, de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples,
des Conventions des Nations Unies sur les droits de l’enfant et de la femme ainsi que les
instruments internationaux relatifs à la protection et à la promotion des droits humains258.

Plus largement, la valeur constitutionnelle a été conférée aux principes fondamentaux


reconnus par les lois de la République. Ceci a étendu considérablement le domaine du
contrôle de la constitutionnalité et fait pénétrer le droit constitutionnel dans les diverses
branches du droit. C’est ainsi que furent consacrés, à ce titre, le principe de la liberté
d’association, du droit de la défense, de la liberté de conscience, de la liberté individuelle, de
la liberté du commerce et de l’industrie et de la libre concurrence, de la sauvegarde de la
personne humaine contre toute forme d’asservissement ou de dégradation, de l’indépendance
des professeurs d’universités, de la compétence réservée à la juridiction administrative en
matière d’actes administratifs, etc. L’attribution de la valeur constitutionnelle à ces principes
fondamentaux fut d’abord l’œuvre du Conseil constitutionnel français259.

256
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 27.
257
P. MALINVAUD, op. cit., p. 53.
258
Cf. Préambule de la Constitution de la RDC précitée.
259
P. MALINVAUD, op. cit., pp. 54-55.
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La référence faite au bloc de constitutionnalité constitue une stratégie adoptée par le


Conseil constitutionnel en vue d’élargir le texte de la Constitution stricto sensu et partant sa
mission de contrôle260.

5. Le contrôle de la constitutionnalité des lois

La Constitution occupe dans la hiérarchie des lois au sens large le point culminant. C’est
la charte solennelle du droit d’un Etat. Les législateurs y sont soumis comme tous les
citoyens, puisque c’est d’elle qu’ils tiennent leur pouvoir. Si pendant longtemps, le dogme de
la souveraineté du peuple et une interprétation trop stricte du principe de la séparation des
pouvoirs empêchaient, croyait-on, le pouvoir judiciaire de censurer, sous la forme de contrôle
de constitutionnalité, les actes du pouvoir législatif, actuellement ces idées sont fortement
ébranlées en raison de la consécration du contrôle de constitutionnalité des lois261.

Le Conseil constitutionnel français précisait que l’un des buts du contrôle de


constitutionnalité est « de permettre à la loi votée, qui n’exprime la volonté générale que
dans le respect de la Constitution, d’être sans retard amendée à cette fin ». Ainsi, « Il n’est
de loi que conforme à la constitution»262.

Le contrôle de la constitutionnalité des lois se trouve également prévu en droit


congolais. Il est exercé par la Cour constitutionnelle. A cet effet, la Constitution dispose que
« La Cour constitutionnelle peut être saisie d’un recours visant à faire déclarer une loi à
promulguer non conforme à la Constitution (…) La loi ne peut être promulguée que si elle a
été déclarée conforme à la Constitution par la Cour constitutionnelle qui se prononce dans
les trente jours de sa saisine. Passé ce délai, la loi est réputée conforme à la Constitution
»263. Elle prévoit également que « La Cour constitutionnelle est juge de l’exception
d’inconstitutionnalité soulevée devant ou par une juridiction. Toute personne peut saisir la
Cour constitutionnelle pour inconstitutionnalité de tout acte législatif ou réglementaire
(…) »264. Dans le même ordre d’idées, il est prescrit que « La Cour constitutionnelle est

260
F. OST et M. VAN DE KERCHOVE, op. cit., p. 62.
261
H. DE PAGE, Traité élémentaire de droit civil belge, Tome 1er, Introduction. Théorie générale des droits et
de la loi : les personnes, la famille, 2ème éd., Bruxelles, Etablissement Emile Bruylant, 1939, p. 242.
262
L. FAVOREU, L. PHILIP et P. ARDANT cités par F. TERRE, op. cit., p. 149.
263
Art. 139 de la Constitution de la RDC précitée.
264
Art. 162 de la Constitution de la RDC précitée.
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chargée du contrôle de la constitutionnalité des lois et des actes ayant force de loi »265. Tout
acte déclaré par la Cour constitutionnelle non conforme à la Constitution est nul et de nul
effet266.

La mise en place des Cours constitutionnelles restaurerait la primauté oubliée des


Constitutions en même temps qu’elle rouvrirait aux citoyens les voies procédurales de la
garantie des droits. Elle constitue assurément l’indice le plus révélateur de la limite de
l’omnipotence parlementaire267.

B. Les traités et accords internationaux

1. La notion de traités et accords internationaux

Actuellement, les traités internationaux constituent la source la plus importante du


international public au regard de son développement. Les traités internationaux sont
consacrés comme source du droit international à l’article 38.1 du Statut de la Cour
internationale de justice (CIJ) qui prévoit notamment que « la Cour dont la mission est de
régler, conformément au droit international, les différends qui lui sont soumis applique : a.
les conventions internationales soit générales, soit spéciales établissant des règles
expressément reconnues par les Etats en litige. »

Dans son sens large, l’expression « traité international » désigne tout accord de
volonté entre deux ou plusieurs sujets de droit international, quelle que soit sa forme ou sa
qualification (traité, conventions, pacte, charte, accord, arrangement, protocole, …), destiné à
produire des effets de droit dans leurs relations mutuelles268.

Dans un sens plus restreint, ce terme désigne les accords internationaux conclus par
écrit conformément à la Convention de Vienne du 23 mai 1969 et du 21 mars 1986.

265
Ibidem, art. 160.
266
Art. 51 de la loi organique n° 13/026 du 15 octobre 2013 portant organisation et fonctionnement de la Cour
constitutionnelle.
267
F. OST et M. VAN DE KERCHOVE, op. cit., pp. 54-55, 58.
268
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., pp. 116 et 117 ; R. GUILLIEN et J. VINCENT, op. cit., p. 519.
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2. Les espèces de traités internationaux

Du point de vue matériel, on distingue les catégories de traité suivantes :


- les traités-contrats, qui tendent à réaliser des opérations juridiques entre Etats et ont
vocation à entraîner des prestations réciproques à charge des Etats contractants269.
Dans ce cas, les contractants stipulent des prestations, en général, réciproques comme
dans un contrat privé270. Il en est ainsi d’un traité d’alliance ou d’un traité de
commerce ;
- les traités-lois ou traités normatifs sont ceux qui ont pour objet de poser des règles de
droit du fait du contenu identique de la volonté de leurs signataires271. Autrement dit,
ce sont des traités dont l’objet est de poser des règles de droit, c'est-à-dire d’établir
des situations juridiques impersonnelles et objectives272. Lorsqu’on envisage les
sources du droit objectif, ce sont les traités-lois qui doivent essentiellement retenir
l’attention273 ;
- les traités institutionnels : ce sont des traités qui donnent naissance à des institutions,
qui, elles-mêmes, sont à l’origine des règles de droit. A travers les traités
institutionnels, les Etats cherchent à mettre en place des organisations devant
constituer des lieux de rencontres, sinon permanentes à tout le moins périodiques,
pour ceux qui en font partie. Parmi les traités institutionnels figure notamment la
Charte signée à San Francisco le 26 juin 1945 et qui avait créé l’Organisation des
Nations Unies.

Du point de vue formel, les traités sont classés suivant la qualité des parties, leur
nombre, leur caractère ouvert ou fermé. D’après la qualité des parties, on distingue les traités
conclus entre Etats, entre Etats et organisations internationales et entre organisations
internationales274. Suivant le nombre des parties, on établit une distinction entre les traités
bilatéraux et les traités collectifs ou multilatéraux. Les traits bilatéraux sont ceux qui résultent
de l’accord de deux Etats seulement ou mieux de deux sujets de droit international. Les
traités multilatéraux ou collectifs sont les traités qui découlent de l’accord de plus de deux

269
F. TERRE, op. cit., p. 160.
270
R. GUILLIEN et J. VINCENT, op. cit., p. 519.
271
F. TERRE, op. cit., p. 160.
272
R. GUILLIEN et J. VINCENT, op. cit., p. 519.
273
F. TERRE, op. cit., p. 160.
274
J. COMBACAU et S. SUR, Droit international public, Paris, Montchrestien, 1993, p. 58.
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contractants ou mieux de plus de deux sujets de droit international275. Selon le caractère


ouvert ou fermé d’un traité, on sépare les traités ouverts, qui sont ceux pour lesquels les
parties souhaitent une large participation d’autres sujets de droit international, et les traités
fermés, qui sont ceux pour lesquels les parties décident de restreindre l’accès276. Sur le plan
formel, on oppose également les traités en forme solennelle, qui sont soumis à une procédure
complexe d’élaboration, aux accords en forme simplifiée, qui entrent en vigueur dès leur
signature277. Les traités en forme solennelle sont des traités dont l’élaboration s’opère
conformément aux règles générales prévues dans la Convention de Vienne susmentionnée,
alors que les accords en forme simplifiée sont conclus sans intervention formelle de l’autorité
constitutionnellement compétente et selon des procédures plus rapides, comme l’échange des
lettres, les déclarations communes, etc.278.

3. L’élaboration des traités internationaux

En tant que sujet de droit international, tout Etat a la capacité de conclure des traités.
A cet effet, il appartient au droit constitutionnel de chaque Etat de designer l’autorité
compétente pour l’engager valablement en droit international. Les Chefs d’Etat et de
Gouvernement ainsi que le Ministre des affaires étrangères jouissent, à cet égard, d’une
présomption de représentation en vertu de l’art. 7.2. A. de la Convention de Vienne du 23
mai 1969 sur le droit des traités. En droit congolais, la Constitution dispose que « Le
Président de la République négocie et ratifie les traités et accords internationaux non soumis
à ratification après délibération en Conseil des ministres. Il en informe l’Assemblée
nationale et le Senat”279.

Généralement, l’élaboration d’un traité international s’opère selon les phases


suivantes :
 la négociation : c’est la phase au cours de laquelle les termes du projet de traité sont
discutés. Elle s’opère par des représentants qualifiés des Etats. Pour les traités
bilatéraux, la négociation se fait d’ordinaire directement entre Etats. Pour les traités
multilatéraux, elle se fait, le plus souvent, dans le cadre de conférences
internationales. Lorsque le texte est arrêté, c’est-à-dire lorsque ceux qui négocient se

275
F. TERRE, op. cit., p. 160.
276
J. COMBACAU et S. SUR, op. cit., p. 58.
277
Ibidem, p. 59.
278
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 120.
279
Art. 213 de la Constitution de la RDC précitée.
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conviennent sur le contenu du texte, il est procédé à la signature. Cependant, cette


signature n’est pas l’expression du consentement de l’Etat. Elle authentifie
simplement le texte issu de la négociation dont elle marque officiellement la fin. Elle
fixe la date et le lieu qui servira a identifié le traité.
 La phase suivante consiste dans la ratification du traité. La ratification est l’acte par
lequel la volonté de l’Etat d’être lié par un traité est solennellement exprimée. C’est
un acte discrétionnaire. Elle est, d’ordinaire, portée à la connaissance des Etats co-
contractants par l’échange des instruments de ratification dans le cadre de traités
bilatéraux ou par le dépôt de ces instrument à l’endroit désigné par ces traités dans le
cas des traités multilatéraux.
 L’adhésion : les Etats n’ayant pas signé un traité peuvent, à condition que le traité en
question le permette, devenir partie à un traité par une signature différée ou par une
adhésion280.
 L’entrée en vigueur des traités a lieu au jour décidé dans le texte de celui-ci.
Fréquemment, l’entrée en vigueur des traités multilatéraux est subordonnée au dépôt
des instruments de ratification d’un certain nombre d’Etats281.

L’article 102 de la Charte des Nations Unies impose aux membres de cette organisation
de faire enregistrer, le plus tôt possible, leurs traités auprès du Secrétariat de celle-ci dans le
but d’éviter les traités secrets. Cet enregistrement est suivi d’une publication dans un recueil
des traités des Nations Unies. Le non enregistrement interdit d’invoquer le traité devant un
organe de l’ONU, notamment devant la Cour internationale de Justice. Il est possible de
procéder à un enregistrement tardif.

Les Etats ont la liberté de conclure des traités internationaux, mais l’article 53 de la
Convention de Vienne du 23 mai 1969 leur impose une limite. En effet, cet article dispose
que « Est nul tout traité qui au moment de sa conclusion se trouve en conflit avec une norme
impérative du droit international ». Il s’agit là d’une référence « jus cogens », qui traduit
l’idée d’un ordre public international auquel il ne serait point permis de déroger par traité. Il
en est ainsi, par exemple, des règles du droit international qui interdisent l’esclavage, le
génocide, etc.282

280
Art. 83 de la Convention de Vienne du 23 mai 1969 sur le droit des traités.
281
Art. 84 de la Convention de Vienne du 23 mai 1969 sur le droit des traités.
282
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., pp. 118-119.
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Le « jus cogens » est défini comme étant une norme impérative du droit international
283
général . Il s’agit d’une « norme acceptée et reconnue par la communauté internationale
des Etats dans son ensemble en tant que norme à laquelle aucune dérogation n’est permise et
qui ne peut être modifiée que par une nouvelle norme du droit international général ayant le
même caractère »284.

Lors de la signature, de la ratification ou de l’adhésion, un Etat peut formuler des


réserves indiquant par là qu’il entend exclure ou limiter certaines dispositions du traité à son
égard. Pareilles réserves ne sont, en principe, pas soumises à l’acceptation des autres Etats
contractants. Les réserves doivent être formulées par écrit et communiquées aux Etats
contractants et aux autres Etats ayant qualité pour devenir parties au traité285. La réserve est
une technique qui permet de restreindre l’engagement d’une partie à un traité international286.

4. La conformité à la Constitution des traités internationaux

Un traité international peut renfermer une disposition contraire à la Constitution.


D’où, l’intérêt de la question de savoir laquelle de ces deux sources devrait primer sur l’autre.
En droit congolais, il est institué un contrôle de la constitutionnalité des traités et accords
internationaux287. Il est consacré que si un traité comporte une disposition contraire à la
Constitution, il ne peut être approuvé ou ratifiée qu’après une révision de la Constitution. La
non-conformité d’un traité à la Constitution est appréciée par la juridiction constitutionnelle.
Ainsi, il est prévu que « Si la Cour constitutionnelle consultée par le Président de la
République, par le Premier ministre, par le Président de l’Assemblée nationale ou le
Président du Sénat, par un dixième des députés ou un dixième des sénateurs, déclare qu’un
traité ou accord international comporte une clause contraire à la Constitution, la ratification
ou l’approbation ne peut intervenir qu’après la révision de la Constitution »288.

Au regard de ce qui précède, la Constitution, en RDC, constitue une source de droit


supérieur à un traité international et c’est à la Cour constitutionnelle qu’il revient d’apprécier

283
R. GUILLIEN et J. VINCENT, op. cit., p. 311.
284
Art. 53 de la Convention de Vienne du 23 mai 1969 sur le droit des traités.
285
Ibidem, art. 23.
286
J. COMBACAU et S. SUR, op. cit., p. 133.
287
Art. 43 de la loi organique n° 13/026 du 15 octobre 2013 portant organisation et fonctionnement de la Cour
constitutionnelle.
288
Art. 216 de la Constitution de la RDC précitée.
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la conformité d’un traité international à la Constitution et non pas au juge judiciaire ni au


juge administratif, qui sont incompétents dans ce cas.

5. La conformité des lois aux traités et accords internationaux

La primauté du traité ou de l’accord international sur la loi interne découle de l’article


215 de la Constitution de la RDC. Cette primauté met obstacle à ce qu’une loi leur soit
contraire289. La Constitution de le RDC dispose à cet effet que « Les traités et accords
internationaux régulièrement conclus ont, dès leur publication, une autorité supérieure à
celle des lois, sous réserve pour chaque traité ou accord, de son application par l’autre
partie »290.

La Constitution affirme ainsi que les traités ont une valeur supérieure à celle des lois.
Ceci implique que lorsqu’il y a conflit entre les dispositions d’une loi et celles d’un traité, ces
dernières doivent prévaloir291.

Pour assurer le respect des traités et accords internationaux par les lois, il est prévu un
contrôle de la conventionalité, qui consiste dans le contrôle de la conformité des lois aux
traités et accords internationaux. Cependant, la Constitution n’organise pas expressément ce
contrôle. Ce sont donc les juridictions ordinaires et non pas la Cour constitutionnelle qui
exerce ce contrôle de conventionalité.

A la différence du contrôle exercé par la Cour constitutionnelle, il ne s’agit pas d’un


contrôle par voie d’action, qui tend à faire prononcer la non conformité d’une loi à un traité
ou à un accord international. Le contrôle est ici indirect, car c’est à l’occasion d’un litige que
l’une des parties invite le juge, par voie d’exception, à écarter l’application de la loi contraire
aux dispositions du traité292.

289
F. TERRE, op. cit., p. 155.
290
Art. 215 de la Constitution de la RDC précitée.
291
C. LARROUMET, op. cit., p. 120.
292
P. MALINVAUD, op. cit., p. 62.
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II. La loi

A. La notion de loi

De toutes les sources formelles obligatoires, la loi est assurément la plus importante à
telle enseigne que dans le langage juridique courant, le mot « loi » est souvent utilisé dans un
sens figuré pour désigner toute règle obligatoire293.

Cependant, à proprement parler, le mot « loi » est susceptible de revêtir deux sens. Ce
terme peut s’entendre dans un sens matériel ou dans un sens formel. D’après sons sens
matériel, la loi est définie par son contenu, c’est-à dire que c’est une règle de droit générale,
impersonnelle et écrite par opposition à la coutume, qui est, également générale et
impersonnelle, mais n’est pas écrite294. Le mot « loi » est ainsi entendu dans son sens large.
Selon ce sens, ce mot désigne toutes les règles unilatérales écrites formulées par l’autorité
compétente, c’est-à-dire par toute autorité publique à laquelle est reconnue le pouvoir
d’édictée pareilles règles295. D’après ce sens large de la loi, ce terme comprend également les
règlements, qui sont des actes à portée générale et abstraite, émanant du Gouvernement et
plus généralement de l’autorité administrative. Ces actes réglementaires ou règlements sont
des lois au sens matériel de ce terme296. La loi au sens large du terme comprend donc la
Constitution, la loi au sens strict est le règlement297.

D’après son sens formel, la loi est définie non pas par son contenu, mais par l’organe
qui l’élabore. Selon donc le sens strict du mot « loi », ce mot ne recouvre qu’une partie de la
loi entendue au sens large, à savoir les règles confectionnées par le pouvoir législatif au sens
constitutionnel du terme298. La loi est donc strictement parlant l’œuvre du pouvoir législatif,
c’est-à-dire du Parlement. La Constitution de la RDC dispose à cet égard que « Le pouvoir
législatif est exercé par un Parlement composé de deux Chambres: l’Assemblée nationale et
le Sénat. Sans préjudice des autres dispositions de la présente Constitution, le Parlement vote
les lois (…) »299.

293
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., p. 15.
294
C. LARROUMET, op. cit., p. 125.
295
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., p. 15.
296
C. LARROUMET, op. cit., p. 132.
297
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 26.
298
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., p. 15.
299
Art. 100 de la Constitution de la RDC.
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B. Les différentes sortes de lois au sens strict

Dans la catégorie de lois au sens strict, on établit une distinction entre lois
constitutionnelles, les lois organiques, les lois ordinaires et les lois référendaires300.

1. Les lois constitutionnelles

Il s’agit des lois qui ont pour objet de mettre en place ou de modifier la Constitution.
Elles peuvent émaner soit directement du peuple consulté par voir de referendum, soit du
congrès, c’est-à-dire de la réunion de deux Chambres du Parlement. Etant donné qu’elles ont
une valeur constitutionnelle, elles sont situées en haut de la hiérarchie de lois301.

D’autres définissent la loi constitutionnelle comme étant simplement une loi de


révision de la Constitution, adoptée selon la procédure prévue par cette dernière.
L’expression « loi constitutionnelle » est aussi employée pour designer la Constitution elle-
même302.

2. Les lois organiques

Elles ont pour objet de fixer les modalités d’organisation et de fonctionnement des
pouvoirs publics303. La loi organique est définie comme étant une loi votée par le Parlement
pour préciser ou compléter les dispositions de la Constitution304.

Les lois organiques constituent une nouvelle catégorie de lois entre les lois
constitutionnelles et les lois ordinaires. Ces lois sont soumises à des conditions particulières
d’adoption et de contrôle305. Elles font ainsi l’objet d’une procédure particulière fixée par la
Constitution et les lois ordinaires doivent s’y conformer parce qu’elles sont supérieures à
elles306.

300
P. MALINVAUD, op. cit., p. 78.
301
P. MALINVAUD, op. cit., p. 78.
302
R. GUILLIEN et J. VINCENT, op. cit., p. 325.
303
F. TERRE, op. cit., p. 184.
304
R. GUILLIEN et J. VINCENT, op. cit., p. 326.
305
Idem
306
P. MALINVAUD, op. cit., p. 79.
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Dans ce cadre, la Constitution de la RDC prévoit que « Les lois auxquelles la


Constitution confère le caractère de loi organique, sont votées et modifiées à la majorité
absolue des membres composant chaque Chambre dans les conditions suivantes:
a. la proposition de loi n’est soumise à la délibération et au vote de la première
Chambre saisie qu’à l’expiration d’un délai de quinze jours après son dépôt au
Gouvernement ;
b. la procédure de l’art.132 est applicable. Toutefois, faute d’abord entre les deux
Chambres, le texte ne peut être adopté par l’Assemblée nationale en dernière lecture
qu’à la majorité absolue de ses membres ;
c. les lois organiques ne peuvent être promulguées qu’après déclaration par la Cour
constitutionnelle obligatoirement saisie par le Président de la République, de leur
conformité à la Constitution dans un délai de quinze jours »307.

3. Les lois ordinaires

Une loi ordinaire est un acte voté par le Parlement selon la procédure législative et
dans l’une des matières que la Constitution lui réserve expressément. Cette définition fait
appel à la fois à un critère formel et à un critère matériel308.

Les lois ordinaires ont toutes la même force juridique, même si certaines d’entre elles
ont des objets spécifiques. Il en est ainsi des lois de finance, des lois de programme et des
lois-cadres309. Dans la catégorie de lois ordinaires, en plus donc des lois habituelles, certaines
lois présentent des caractères originaux310.

Les lois de finance sont celles qui prévoient et autorisent pour chaque année civile
l’ensemble des ressources et des charges de l’Etat311. La Constitution de la RDC dispose que
« Les lois de finance déterminent les ressources et les charges de l’Etat »312.

Les lois de programme sont celles qui déterminent les objectifs de l’action
économique et sociale de l’Etat313.

307
Art. 124 de la Constitution de la RDC précitée.
308
R. GUILLIEN et J. VINCENT, op. cit., p. 326.
309
P. MALINVAUD, op. cit., p. 59.
310
Ibidem, p. 78.
311
F. TERRE, op. cit., p. 185.
312
Art. 126, al. 1 de la Constitution de la RDC précitée.
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Les lois-cadres, quant à elles, sont celles qui se limitent à poser des principes
généraux et laissent au Gouvernement le soin de les développer en utilisant son pouvoir
réglementaire314.

4. Les lois référendaires

Elles peuvent intervenir en toutes matières y compris en matière constitutionnelle.


Elles se distinguent des autres lois par le fait qu’elles sont adoptées par voie de
referendum315. Elles ne constituent pas à proprement parler une catégorie à part.

C. Le domaine de la loi

1. Le principe

Le domaine de la loi se trouve limité par la Constitution, qui détermine les matières
qui sont réservées à la loi. Dès lors, la loi n’a pas vocation générale à réglementer toute
activité en tout secteur. Les matières qui ne sont pas du domaine de la loi sont déférées au
domaine réglementaire. Ainsi, ce dernier apparaît comme étant la règle et le domaine
législatif comme étant l’exception. Mais malgré son caractère d’exception, la compétence
législative s’étend à des matières fort étendues et importantes316.

En droit congolais, prévoit relativement aux considérations précédentes que « Les


matières autres que celles qui sont du domaine de la loi ont un caractère réglementaire. Les
textes à caractère de loi intervenus en ces matières peuvent être modifiés par décret si la
cour constitutionnelle, à la demande du Gouvernement, a déclaré qu’ils ont un caractère
réglementaire en vertu de l’alinéa précèdent »317.

2. Les matières intégralement législatives

Dans ces matières, il n’est pas interdit au Gouvernement d’édicter des règlements.
Ainsi, si des règlements interviennent dans ces matières, ils doivent être subordonnés à la loi

313
F. TERRE, op. cit., p. 185.
314
R. GUILLIEN et J. VINCENT, op. cit., p. 325.
315
P. MALINVAUD, op. cit., p. 78.
316
Ibidem, p. 79.
317
Art.128 de la Constitution de la RDC précitée.
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dont ils ne font qu’assurer l’exécution. Le principe hiérarchique entre la loi et le règlement se
trouve, dans ces matières, pleinement affirmé318.

Les matières entièrement législatives sont en droit congolais déterminé par l’article
122 de la Constitution. Parmi ces matières figurent notamment les droits civiques et les
garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques, le
régime électoral, les finances publiques, les sujétions imposées par la défense nationale aux
citoyens en leur personne et en leurs biens, le droit du travail et de la sécurité sociale, etc.

3. Les matières législatives pour les principes fondamentaux

Contrairement aux matières intégralement législatives, les matières législatives pour


les principes fondamentaux sont des matières dans lesquelles seuls les principes sont de la
compétence législative, le reste faisant partie de la compétence réglementaire319. Dans ce cas,
on est en présence non pas d’une véritable hiérarchie entre la loi et le règlement, mais d’un
partage de compétence entre le Parlement, qui doit se limiter à formuler dans la loi les
principes fondamentaux, et le Gouvernement, qui est libre d’en déterminer par voie
réglementaire, les modalités d’application. Ces matières sont donc concurremment confiées à
la loi et au règlement320.

En droit congolais, ces matières sont fixées par l’article 123 de la Constitution du. Il
en est ainsi de la libre administration des provinces et des entités territoriales décentralisées -
de leur compétence et de leur ressource, de la création des entreprises - établissements et
organismes publics, de l’enseignement et de la santé, etc.

D. L’élaboration de la loi au sens strict

La confection de la loi, et particulièrement de la loi ordinaire, est soumise à un certain


nombre de règles qui, pour l’essentiel, figurent dans la Constitution, dans quelques lois
particulières ainsi que dans le règlement de Chambres. L’élaboration de la loi est marquée
cinq étapes suivantes :

318
P. MALINVAUD, op. cit., p. 80.
319
C. LARROUMET, op. cit., p. 134.
320
P. MALINVAUD, op. cit., p. 80.
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1. L’initiative de la loi

Chacun des membres du pouvoir législatif a le droit de saisir l’une ou l’autre Chambre
d’une proposition de loi. L’initiative d’une loi appartient également au Gouvernement. La
Constitution de la RDC dispose à cet égard que « L’initiative des lois appartient
concurremment au Gouvernement, à chaque député et à chaque sénateur (…)»321.

Lorsque l’initiative d’une loi émane du Gouvernement, on parle de projet de loi, mais
quand elle est l’œuvre d’un ou de plusieurs membres de l’une ou de l’autre Chambre, on
parle d’une proposition de loi322.

2. L’examen des dispositions par les Chambres

Les projets et proposition de lois sont examinés, dans un premier temps, au sein des
commissions spécialisées, avant d’en débattre en séance publique.

a. Le travail en commission

Au sein de chacune des deux Chambres, il existe un certain nombre de commissions


restreintes et spécialisées. Elles ont pour tâche de procéder à un premier examen de texte de
projet ou de proposition de loi et de préparer de la sorte le travail de l’assemblée plénière323.

La Constitution de la RDC fait référence à ces commissions lorsqu’elle dispose que « Les
membres du Gouvernement ont accès aux travaux de l’Assemblée nationale et du Sénat ainsi
qu’à ceux de leurs commissions (…) »324.

Pour chaque projet ou proposition de loi, les commissions compétentes nomment un


rapporteur chargé notamment de la rédaction des rapports de la commission. Ces rapporteurs
rédigent un résumé des discussions menées au sein de la commission et les conclusions
auxquelles elle est parvenue325.

321
Art.130, al. 1 de la Constitution de la RDC précitée
322
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., p. 36.
323
Idem
324
Art.131 de la Constitution de la RDC précitée.
325
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., pp. 36 et 37.
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b. Le débat en séance publique

Dès que les travaux de la commission sont terminés, la discussion du texte en séance
publique est mise à l’ordre du jour de la Chambre concernée. Tout d’abord, il est procédé à
un échange de vue sur l’ensemble du texte introduit par l’exposé oral du rapporteur. Ensuite,
la discussion article par article s’effectue sur base du texte adopté par la commission. Aucun
quorum de présence n’est exigé326.

La Constitution de la RD Congo prévoit que « Les membres du Gouvernement ont accès


aux travaux de l’Assemblée nationale et du Sénat (…) ». Elle renchérit que « S’ils sont
requis, les membres du Gouvernement ont l’obligation d’assister aux séances de l’Assemblée
nationale et à celles du Sénat, d’y prendre la parole et de fournir aux parlementaires toutes
les explications qui leur sont demandées sur leurs activités »327. Dans le même ordre d’idées,
l’article 133 de la même Constitution prévoit que « Les membres du Gouvernement ont le
droit de proposer des amendements aux textes en discussion mais ne participent au vote »328.

L’art. 135 alinéa 1 de ce texte prévoit, quant à lui, que « Tout projet ou toute proposition
de loi est examiné(e) successivement par les deux Chambres en vue de l’adoption d’un texte
identique (…) ».

3. L’adoption du texte par les Chambres

Les opérations de vote se passent en deux temps : le texte est voté article par article
dans un premier temps et le vote sur l’ensemble du texte n’intervient que par la suite.

Il ne peut être procédé au vote que pour autant que la majorité des membres soit
présente. La décision n’est, par ailleurs, acquise que si elle recueille la majorité de suffrages
exprimés329.

Il peut arriver que les deux Chambres soient en désaccord au sujet d’un projet ou
d’une proposition de loi. En pareil cas, la solution est fournie par l’article 135 de Constitution
de la RD Congo.

326
Ibidem, p. 37.
327
Art. 131 de la Constitution de la RDC précitée.
328
Ibidem, art. 133.
329
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., p. 37.
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4. L’intervention du Président de la République

Le texte de loi adopté par les deux Chambres ou par l’une d’elles selon le cas, est
transmis au Président de la république, à qui il appartient de le sanctionner et de le
promulguer. A cet égard, la Constitution dispose que « Dans les six jours de son adoption, la
loi est transmise au Président de la République pour sa promulgation. Le premier ministre en
reçoit ampliation »330. Nous examinerons, en ce qui concerne l’intervention du Président de
la République, la sanction, la promulgation et la signature du texte lui transmis.

a. La sanction

C’est l’acte par lequel le Président de la République en sa qualité de troisième branche du


pouvoir législatif, marque son accord avec ce qui a été décidé par les Chambres législatives.
A ce moment on considère que la loi est faite. Le Président de la République est libre
d’accorder ou de refuser son accord.

Le Président de la République peut conformément à de la Constitution de la RDC 2006


demander à l’Assemblée nationale ou au Sénat une nouvelle délibération de la loi au de
certains de ses articles. Cette délibération ne peut lui être refusée. Il dispose, à cet effet, d’un
délai de quinze jours à datée de la transmission du texte adopté par le Parlement. Le texte
soumis à une seconde délibération sera lors adopté soit sous sa forme initiale soit après
modification à la majorité absolue des membres331.

b. La promulgation

C’est la déclaration par laquelle le Président de la République, en sa qualité de chef du


pouvoir exécutif, atteste l’existence de la loi et en ordonne l’exécution. C’est au moment de
la promulgation que la loi prend date. Autrement dit, la date d’une loi est celle de sa
promulgation ; c’est le jour de sa naissance.

L’acte de promulgation confère à la loi la force exécutoire. C’est dire qu’à partir de la
promulgation, la loi est en état d’être exécutée ou de devoir être exécutée. L’acte de

330
Art. 136 de la Constitution de la RDC précitée.
331
Ibidem, art.137.
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promulgation s’accompagne de l’ordre de revêtir la loi du sceau de l’Etat et de la publier332.


La promulgation confère également à la loi son caractère authentique333.

En droit congolais, l’article140 de la Constitution prévoit que « Le Président de la


République promulgue la loi dans les quinze jours de sa transmission après l’expiration des
délais prévus par les articles 136 et 137 de la Constitution. A défaut de promulgation de la
loi par le Président de la République dans les délais constitutionnels, la promulgation est de
droit ». L’article 141 du même texte prévoit, quant à lui, que « Les lois sont revêtues du
sceau de l’Etat (…) ».

c. La signature

L’accomplissement de la sanction et de la promulgation est attesté par la signature du


Président de la République apposée sur le texte de loi334.

5. La publication de loi

C’est l’acte par lequel la loi est portée à la connaissance de ses destinataires. L’article 141
de la Constitution de la RDC prévoit que les lois sont publiées au Journal official. L’article
142 renchérit en disposant que « le Gouvernement assure la diffusion en français et dans
chacune des quatre langues nationales des lois dans le délai de soixante jours à dater de la
promulgation ».

La loi acquiert, par l’accomplissement de cette formation matérielle qu’est la publication,


la force obligatoire. Cette dernière est l’aptitude de la loi à obliger ses destinataires. A partir
de la publication, la loi devient donc obligatoire335.

La Constitution de la RDC dispose cependant que « La loi entre en vigueur trente jours
après sa publication au Journal officiel à moins qu’elle n’en dispose autrement »336.

332
J. FALYS, Introduction aux sources et principes du droit, Bruxelles, Bruylant, 1981, p. 111.
333
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., p. 38.
334
J. FALYS, op. cit., p. 111.
335
J. FALYS, op. cit., p. 112.
336
Art. 142, al. 1 de la Constitution de la RDC précitée.
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E. La présentation formelle de la loi

Un texte légal comprend, en principe, les éléments suivants :


 La date : tout texte comporte une date. Cette date est celle de sa sanction et de sa
promulgation. La date d’un règlement est celle à laquelle cet acte a été adopté par son
auteur.
 L’intitulé : c’est son titre qui indique son objet.
 Le préambule : il indique sous la forme de « visa », la base juridique du texte, son
fondement. Il mentionne aussi les textes que l’acte entend modifier et, parfois, des
textes dont la référence est jugée utile. Le préambule peut renferme aussi une
justification d’opportunité du texte sous forme de « considérant ».
 La structure générale du texte : le dispositif. Le dispositif comprend des articles, qui
peuvent être divisés en alinéas. Le groupement normal d’articles se fait en chapitres,
qui peuvent être divisés en section, ces dernières peuvent, à leur, tour être divisées en
sous-sections. Les chapitres sont groupés en titres ; ces derniers en livres et ceux-ci en
parties. Chaque groupement a, en principe, son propre intitulé. Le dispositif est la
partie qui exprime la volonté de l’auteur de l’acte.
 Le champ d’application : il s’agit du champ d’application ratione materiae, ratione
loci et ratione personae du texte.
 Les définitions : on trouve de plus en plus souvent des définitions en tête du
dispositif. La définition peut porter sur un terme technique ou un terme du langage
courant dont le sens est précisé dans le texte. Mais, lorsqu’un texte fournit une
définition, celle-ci ne vaut, en principe, que pour ce texte et ses mesures d’exécution.
Le même terme peut être défini différemment dans un autre texte ou peut ne pas faire
l’objet de définition. Dans ce cas, il importe de recourir aux règles usuelles
d’interprétation.
 Les dispositions abrogatoires : elles permettent de déterminer les dispositions qui
perdent leur force obligatoire pour l’avenir et de connaître la situation des textes.
 Les dispositions modificatives : elles désignent le texte à modifier et précisent la
nature de la modification.
 Les dispositions transitoires : elles permettent de déterminer les situations juridiques
auxquelles la nouvelle loi s’appliquera.
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 L’entrée en vigueur : elle peut être différée ou avancée. Elle doit, en principe, être
fixée à une date précise ou déterminable par elle-même.
 Les annexes : ce sont des textes qui ne font pas partie du dispositif, mais qui y sont
rattachés. L’annexe peut être un texte autonome, préexistant au texte auquel elle est
annexée. Elle peut également constituer dans la mise en œuvre d’un procédé de
présentation consistant à séparer certaines parties d’une loi (tableaux, descriptions,
dessins, énumérations).
 La langue du texte : certains textes sont publiés en plusieurs langues, alors que
d’autres sont unilingues, mais publiés avec une traduction.
 La « législation par référence » : cette technique consiste en ce que l’auteur d’une
norme se réfère à une autre norme, en principe antérieure, ayant une force obligatoire
supérieure, égale ou inférieure en vue de faire appliquer la règle à laquelle il se réfère
à la matière qui est régie par la norme établie. Cette technique permet d’éviter
d’inutiles reproductions des normes, mais en rendant parfois difficile la consultation
de certains textes337.

F. La codification

Plusieurs pays, sous l’influence de la France, ont réuni, pour des raisons de
commodité et d’esthétique, la plupart de textes importants dans des codes. Ces derniers sont
des ensembles structurés divisés en partie, livres, titres, chapitres, sections, sous-section,… au
sein desquels les textes sont numérotés article par article. Dans la mesure où des très
nombreux textes ont été ainsi codifiés, c’est principalement par la consultation des codes que
les juristes et les étudiants en droit accèdent à la connaissance des règles de droit.

En pratique, il faut distinguer deux types de codification suivant que la codification


concerne les lois seulement et s’accompagne d’une réforme du droit existant ou qu’elle ne
réalise qu’un classement thématique des règles en vigueur, qu’il s’agisse des lois ou des
textes de nature réglementaire. Dans l’un et l’autre cas, l’insertion d’un texte dans le code ne
lui confère aucune supériorité sur les textes restés en dehors de la codification. Un code est
une simple méthode technique. Les lois, ordonnances, décrets et arrêtés qui y figurent n’ont
d’autre valeur que celle précisée ci haut. C’est ainsi qu’ils peuvent être modifiés ou abrogés
337
A. de THEUX, I. KOVALOVSZKY et N. BERNARD, Précis de méthodologie juridique. Les sources
documentaires du droit, 2e éd., Bruxelles, Publications des Facultés universitaires Saint-Louis, 2000, pp. 143-
163.
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comme n’importe quel texte. Il faut et il suffit de respecter la procédure requise, laquelle
varie suivant la nature du texte338.

Les codes sont publiés, d’une part, par des organismes officiels dépendant du
Gouvernement339, et, d’autre part, par des éditeurs privés tels que Larcier, Dalloz,… qui
peuvent y ajouter des annotations bibliographiques ou jurisprudentielles et qui y font souvent
figurer à l’endroit qui leur parait le mieux choisi des textes officiellement non codifiés. Mais
on peut aussi les retrouver sur l’Internet.

III. Les règlements administratifs

La fonction administrative a pour objet la satisfaction des besoins d’intérêt général,


qui implique notamment l’accomplissement d’actes juridiques. Ainsi, les actes administratifs
constituent des moyens juridiques mis à la disposition de l’Administration340.

A. La notion de règlements administratifs

Alors que le pouvoir législatif appartient au Parlement, le pouvoir réglementaire


revient à l’exécutif341. Les règlements administratifs constituent des actes administratifs.
Parmi ceux-ci, on distingue les actes individuels et les actes réglementaires. Les actes
individuels concernent une ou plusieurs personnes nominativement désigné(e)s342. En
revanche, l’acte réglementaire ou le règlement est un acte de portée générale et impersonnelle
édicté par les autorités exécutives compétentes343. C’est ainsi que la Constitution de la RDC
prévoit que le Chef de l’Etat statue par voie d’ordonnance344, que le 1er Ministre dispose du
pouvoir réglementaire et statue, à cet effet, par voie de décret345.

338
P. MALINVAUD, op. cit., p. 96.
339
C’est le cas du Journal Officiel de la République Démocratique du Congo
340
F. VUNDUAWE te PEMAKO, Traité de droit administratif, Bruxelles, Larcier, 2007, p. 659.
341
P. MALINVAUD, op. cit., p. 83.
342
F. TERRE, op. cit., p. 189.
343
C. LARROUMET, op. cit., p. 136.
344
Art. 79, al. 3 de la Constitution de la RDC précitée.
345
Ibidem, art. 92, al. 1 et 2.
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Au sein des règlements, on établit une distinction entre les règlements autonomes, les
règlements d’application et les règlements exceptionnels. Le pouvoir réglementaire est donc
envisagé sous trois sortes différentes346.

B. Les sortes de règlements administratifs

1. Les règlements autonomes

a. La notion de règlement autonome

Le règlement autonome est un règlement pris spontanément et à titre exclusif dans les
matières autres que celles réservées à la loi347.

b. Le domaine du règlement autonome

Toutes les matières qui ne sont pas réservées à la loi relèvent du domaine
réglementaire en vertu de l’article 128 de la Constitution de la RDC. Dans ce cas, il n’est plus
question de hiérarchie, mais plutôt d’égalité entre la loi et le règlement, chacun ayant
compétence dans son domaine propre. D’où, les expressions de « règlement autonome » ou
« décret législatif » qui traduisent clairement l’indépendance du règlement par rapport à la
loi348.

b. Le contrôle du règlement autonome

Etant donné que le règlement autonome n’a pas à respecter la loi dans son domaine, il
n’y a pas lieu à contrôler de la légalité sous la réserve évidente que le pouvoir réglementaire
ne soit pas sorti de son domaine pour empiéter sur celui du législatif. Cependant, les
règlements autonomes sont soumis à la Constitution, aux traités internationaux et aux
principes généraux du droit dans la mesure où ces derniers peuvent être considérés comme
relevant du domaine de la loi349. Le fait que le règlement autonome échappe à une
subordination au pouvoir législatif n’empêche pas que ce règlement soit un acte administratif,
qui est, à ce titre, soumis au contrôle de légalité350.

346
C. LARROUMET, op. cit., p. 136.
347
R. GUILLIEN et J. VINCENT, op. cit., p. 450.
348
P. MALINVAUD, op. cit., p. 84.
349
Idem
350
F. TERRE, op. cit., p. 193.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 90 Université Catholique de Bukavu
Par Jean-Petit MULUME ZIHALIRWA G1 Droit/2017-2018

En RDC, le règlement autonome peut faire l’objet d’un contrôle de constitutionalité


par la Cour constitutionnelle en vertu de l’article 162 alinéa 2 de la Constitution de la RDC
qui prévoit que « Toute personne peut saisir la Cour constitutionnelle pour
inconstitutionnalité de tout acte législatif ou réglementaire ». Il peut aussi faire l’objet d’un
contrôle de la légalité par les juridictions administratives compétentes351. Lorsque le
Parlement est seul habilité à intervenir dans une matière, la loi doit toujours être considérée
comme supérieure au règlement dans la hiérarchie des règles juridiques. Ainsi, un règlement
contredisant une loi ou régissant une matière réservée au domaine de la loi peut être annulé
pour violation de la loi352.

2. Les règlements d’application

a. La notion de règlement d’application

Le règlement d’application est un règlement destiné à assurer l’exécution d’une loi. Il


s’appuie sur une loi et ne peut la violer353.

b. Le domaine des règlements d’application et leurs formes

Les règlements d’application interviennent dans les matières réservés à la loi. Parfois,
la loi, elle-même, prévoit que des règlements d’application devront être pris dans un certain
délai et, bien souvent, la loi ou certaines de ses dispositions ne pourront être appliquées
qu’une fois le décret publié. Mais en dehors de cette hypothèse, le Gouvernement peut, de sa
propre initiative, édicter des mesures d’application d’une loi dans le cadre de sa mission
exécution des lois354. L’article 92 de la Constitution de la RDC dispose à cet égard que « Le
Premier ministre assure exécution des lois et dispose du pouvoir réglementaire sous réserve
des prérogatives dévolues au Président de la République par la présente Constitution ».

L’exercice du pouvoir réglementaire comporte non seulement le droit, mais aussi


l’obligation de prendre, dans un délai raisonnable, les mesures qu’implique nécessairement
l’application de la loi355.

351
C. LARROUMET, op. cit., p. 138.
352
F. TERRE, op. cit., p. 193.
353
R. GUILLIEN et J. VINCENT, op. cit., p. 450.
354
P. MALINVAUD, op. cit., p. 85.
355
Idem
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 91 Université Catholique de Bukavu
Par Jean-Petit MULUME ZIHALIRWA G1 Droit/2017-2018

Les règlements d’application ne sont pas seulement pris par décret, il peut aussi s’agir
d’autres actes de caractère réglementaire tels que les ordonnances du Président de la
République, les arrêtés pris par les autorités subordonnées comme un Ministre (arrêté
ministériel) - un Gouverneur de province (arrêté du Gouverneur de province) ou un Maire
(arrêté municipal), etc.

La connaissance des règlements d’application d’une loi est aussi nécessaire que celle
de la loi elle-même356.

c. Le contrôle de la légalité des règlements d’application

Intervenant dans le domaine de la loi, les règlements d’application sont subordonnés à


la loi dont ils assurent l’exécution et ne peuvent aller à son encontre. C’est le principe de
légalité.

La primauté de la loi est assurée par deux procédures de contrôle de la légalité, qui
sont à la disposition des particuliers, à savoir le recours pour excès de pouvoir et l’exception
d’illégalité.

Le recours pour excès de pouvoir est un recours tendant à l’annulation d’un règlement
en cas d’irrégularité. Ce recours conduit à l’annulation de l’acte à l’égard de tous et pas
seulement du demandeur de l’annulation de l’acte jugé illégal357.

En droit congolais, il est prévu que « La Cour d’appel connaît en premier ressort des
recours en annulation pour violation de la loi, formés contre les actes ou décisions des
autorités administratives régionales et locales et des organismes décentralisés placées sous
la tutelle de ces autorités »358. L’article 147 du Code d’organisation et compétence judiciaires
consacre, quant à lui, que « La section administrative de la Cours suprême de justice
connaît, en premier et dernier ressort, des recours en annulation pour violation de la loi
formés contre les actes, règlements et décisions des autorités centrales et des organismes
décentralisés placées sous la tutelle de ces autorités ». Elle connaît également,
conformément à l’article148 du même texte, de l’appel des décisions rendues par les cours

356
Idem
357
Ibidem, p. 46.
358
Art.146 du Code d’Organisation et compétence judiciaires
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 92 Université Catholique de Bukavu
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d’appel sur recours en annulation formés pour violation de la loi contre les actes, règlements
et décisions des autorités administratives, régionale et locales.

Dès qu’ils seront installés en RDC, le Conseil d’Etat connaîtra, en premier et dernier
ressort, des recours pour violation de la loi formés contre les actes, règlements et décisions
des autorités administratives centrales. Il connaîtra aussi, en appel, des recours contre les
décisions rendues par les cours administratives359.

Contrairement au recours pour excès de pouvoir, l’exception d’illégalité tend, non pas
à faire annuler un règlement, mais seulement à écarter l’application à un particulier d’un acte
illégal sur le fondement duquel il est poursuivi. En pratique, si tous ceux à qui s’applique
l’acte irrégulier invoquent l’exception d’illégalité, cet acte, bien que non annulé, se trouvera,
en fait, paralysé dans son application si bien que le pouvoir exécutif sera amené à le
modifier360.

d. Le contrôle de constitutionnalité

En vertu de l’article 162 de la Constitution de la RDC, le règlement d’application se


trouve également soumis à un contrôle juridictionnel de sa constitutionnalité. Ce contrôle
peut être exercé par la Cour constitutionnelle.

e. Le contrôle de conventionalité

A l’instar de la loi, un règlement peut également faire l’objet du contrôle de


conventionalité. Ce contrôle s’exerce comme celui de la conventionalité de loi361.

3. Le règlement exceptionnel

Certains règlements interviennent dans le domaine législatif et, dans ce cas, ces
règlements ont une valeur de lois et ne peuvent faire l’objet d’un contrôle par une juridiction
administrative, particulièrement le Conseil d’Etat362.

359
Art. 155 de la Constitution de la RDC précitée.
360
P. MALINVAUD, op. cit., p. 86.
361
Cf. les développements présentés sur le contrôle de conventionalité de la loi.
362
C. LARROUMET, op. cit., p. 139.
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A cet égard, la Constitution de la RDC dispose que « Le Gouvernement peut, pour


l’exécution urgente de son programme d’action, demander à l’Assemblée nationale ou au
Sénat l’autorisation de prendre par Ordonnances-lois, pendant un délai limité et sur des
matières déterminées, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi (…) Les
ordonnances-lois délibérées en Conseil des ministres et ratifiées ne peuvent être modifiées
dans leur disposition que par la loi (…) »363.

C. Le régime juridique des actes administratifs unilatéraux

1. L’élaboration de l’acte administratif unilatéral

a. La compétence de l’auteur de l’acte administratif unilatéral

La compétence est le pouvoir de l’auteur de prendre une décision364. Un acte


administratif ne peut être élaboré que par une autorité habilitée à cet effet. La compétence est
d’attribution, elle ne se présume pas. Elle doit être prévue par le texte, qui organise la
matière. Ainsi, en droit administratif, l’incompétence est la règle, et la compétence
l’exception.

Toutefois, en vertu du principe de parallélisme de compétence, une autorité


administrative habilitée à prendre une décision, peut également la modifier ou l’abroger. En
outre, sur base du principe du pouvoir hiérarchique, une autorité hiérarchique peut réformer
ou annuler les décisions de ses subordonnées365.

La compétence peut être appréciée à trois niveaux. Ainsi, on distingue la compétence


matérielle ou ratione matériae, la compétence territoriale ou ratione loci et la compétence en
raison du temps ou ratione temporis366.

Au regard de la compétence matérielle, une autorité ne peut valablement prendre une


décision que dans une matière pour laquelle elle est investie. Il en ressort qu’en cas de

363
Art.129 de la Constitution de la RDC précitée.
364
F. VUNDUAWE te PEMAKO, op. cit., p. 676.
365
Ibidem, p. 677.
366
R. CHAPUS, op. cit., pp. 932-935, n° 1043-1047.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 94 Université Catholique de Bukavu
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violation de cette règle, on se trouvera dans un cas d’incompétence367. Il se réalise lorsqu’une


autorité administrative intervient dans une matière étrangère à ses attributions368.

Il existe trois formes d’incompétence :


- l’usurpation de fonction : c’est la situation dans laquelle une personne dépourvue de
toute autorité se permet d’édicter un acte administratif ; dans ce cas, l’acte est
considéré comme inexistant369 ;
- l’usurpation de pouvoir : c’est lorsqu’une personne relevant d’un autre pouvoir de
l’Etat (pouvoir législatif ou judiciaire) accomplit un acte administratif ;
- l’empiètement de fonction : c’est l’hypothèse dans laquelle une autorité
administrative pose un acte administratif dans un domaine relevant d’une autre
autorité administrative370. Cette dernière forme d’incompétence est assortie de trois
tempéraments :
 la délégation de compétence : c’est un mécanisme en vertu duquel une
autorité administrative peut céder une partie de ses attributions à une
autre autorité administrative qui lui est subordonnée371 ; elle permet de
rapprocher l’administration des administrés372 ;
 la suppléance : elle a lieu lorsqu’une loi ou un règlement prévoit qu’en
cas d’absence ou d’empêchement de l’autorité compétente, ses
attributions seront exercées, en partie ou en totalité, par une autre
autorité administrative désignée es qualités373 ;
 l’intérim : c’est la situation dans laquelle une autorité administrative
agit en lieu et place d’une autre autorité administrative qui lui est
supérieure en vertu d’une décision d’intérim, qui tire son fondement
soit d’une loi ou d’un règlement, soit du principe de la continuité et de
la régularité des services publics374.

367
F. VUNDUAWE te PEMAKO, op. cit., p. 677
368
R. CHAPUS, op. cit., p. 933, n° 1044.
369
F. VUNDUAWE te PEMAKO, op. cit., p. 677
370
Ibidem, p. 678.
371
Ibidem, p. 679.
372
R. CHAPUS, op. cit., p. 1007, n° 1115.
373
F. VUNDUAWE te PEMAKO, op. cit., p. 680.
374
Ibidem, p. 681.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 95 Université Catholique de Bukavu
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En vertu de la compétence territoriale, une autorité administrative ne peut agir


valablement que dans le ressort qui lui a été fixé par le texte qui l’investit. L’autorité
administrative doit donc se limiter à exercer ses attributions à un endroit bien déterminé 375. Il
s’en suit que l’incompétence territoriale se réalisera lorsqu’une autorité administrative exerce
ses fonctions en se trouvant dans un lieu autre que celui où elle doit siéger ou lorsqu’elle
décide sur des affaires qui sont étrangères à sa circonscription376.

La compétence en raison du temps implique que le pouvoir de poser des actes


administratifs par une autorité administrative commence lors de son entrée en fonction et
cesse à la sortie de fonctions377. Ainsi, sera considéré comme incompétente, une autorité
nommée, mais qui n’est pas encore « installée » dans ses fonctions, une personne dont le
mandat électif a expiré, celle qui est atteinte par la limite d’âge ou celle dont le délai pour
agir à expirer378.

b. La forme et la procédure de la naissance de l’acte administratif unilatéral

- La forme de l’acte administratif

La forme de l’acte, c’est son aspect ou sa présentation. L’acte administratif doit être
signé, daté, numéroté et cacheté. La signature indique l’auteur de l’acte, la date –précédé du
lieu de l’acte - en précise le moment, le numéro renvoie à la référence de l’acte dans la série
et le cachet certifie que l’acte est authentique, officiel379. Les dispositions d’un acte
règlementaire sont réparties en une suite d’articles numérotés précédés du visa des textes dont
elles procèdent, et, le cas échéant, du visa des avis recueillis lors de son élaboration.
L’inobservation de cet usage est, cependant, sans conséquence380.

Lorsque l’obligation de motiver l’acte est prévue, l’auteur de la décision doit exposer,
de façon complète et précise, les raisons de fait et de droit qui fondent sa décision381.
L’obligation de motiver répond à trois exigences :

375
Ibidem, p. 682.
376
R. CHAPUS, op. cit., pp. 933 et 934, n° 1045.
377
F. VUNDUAWE te PEMAKO, op. cit., p. 682.
378
R. CHAPUS, op. cit., p. 935, n° 1047.
379
F. VUNDUAWE te PEMAKO, op. cit., p. 685.
380
R. CHAPUS, op. cit., pp. 1033-1034 , n° 1138.
381
Ibidem, p. 1034, n° 1139.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 96 Université Catholique de Bukavu
Par Jean-Petit MULUME ZIHALIRWA G1 Droit/2017-2018

- celle de la démocratie, en ce qu’il est conforme à ses principes que les autorités
administratives rendent compte aux administrés des raisons pour lesquelles elles ont
pris leurs décisions ;
- celle d’une bonne administration, d’autant plus que l’obligation de motiver conduit
les autorités administratives à examiner attentivement le bien-fondé des décisions
qu’elles envisagent de prendre et permet, ainsi, de prévenir des décisions
insuffisamment étudiées ou difficiles à justifier ;
- celle d’un bon contrôle de l’administration, car la connaissance des motifs des
décisions permet aux intéressés de mieux apprécier s’ils peuvent introduire des
recours382.

Les actes administratifs ne sont pas revêtus d’une forme unique383. Ainsi, on distingue
les ordonnances, les décrets, les arrêtés, etc.

- La procédure de l’acte administratif

C’est le processus selon lequel l’établissement de la norme se réalise384. L’élaboration


d’un acte administratif peut faire l’objet d’une procédure destinée à éclairer l’autorité
administrative compétente ou à garantir le respect des droits et intérêts des administrés385. En
dépit du fait que le régime complexe qui s’applique à la procédure d’élaboration des actes
administratifs peut en retarder l’édiction, cette procédure se justifie par ce qu’elle permet de
créer les meilleures chances de décisions régulières et opportunes386.

Ainsi, l’élaboration d’un acte administratif peut être soumise à des procédures
particulières impliquant le respect des délais, la tenue des consultations ou l’exigence de
recueillir un avis387. Dans ce cadre, le législateur congolais prévoit notamment que « Un
décret du président de la République, pris sur proposition du Ministre ayant le travail et la
prévoyance sociale dans ses attributions, après avis du Conseil national du travail,
détermine les modalités de fixation du salaire minimum interprofessionnel garanti, des

382
Ibidem, p. 1036, n° 1139.
383
F. VUNDUAWE te PEMAKO, op. cit., p. 684.
384
G. DUPUIS, M.-J. GUEDON et P. CHRETIEN, op. cit., p. 463.
385
R. CHAPUS, op. cit., p. 938, n° 1050.
386
Ibidem, p. 1011, n° 1112.
387
F. VUNDUAWE te PEMAKO, op. cit., p. 686.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 97 Université Catholique de Bukavu
Par Jean-Petit MULUME ZIHALIRWA G1 Droit/2017-2018

allocations familiales et de la contre-valeur du logement »388. Tel est aussi le cas de la


disposition selon laquelle « Dans chaque province, les forêts sont classées suivant la
procédure fixée par décret du président de la République. Le classement s’effectue par arrêté
du ministre après avis conforme du conseil consultatif provincial des forêts concernées,
fondé sur la consultation préalable de la population riveraine. Toutefois, la création des
réserves naturelles intégrales, des parcs nationaux et des secteurs sauvegardés relèvent de la
compétence du président de la République »389.

On distingue les types suivants d’avis : l’avis conforme - qui est un avis qui doit être
recueilli et suivi par l’auteur de l’acte, l’avis obligatoire – qui est un avis qui doit être
recueilli par l’auteur de l’acte sans être tenu de s’y conformer, et l’avis facultatif – qui peut
être recueilli par l’auteur d’un acte sans qu’il ne soit tenu de remplir cette formalité390.

Certaines procédures peuvent également être contradictoires. Dans ce dernier cas,


elles visent à soumettre un projet de décision à la critique des personnes intéressées391. On
distingue la procédure contradictoire collective de la procédure contradictoire individuelle.
Dans la procédure contradictoire collective, on cherche à recueillir l’opinion du public392. Tel
est le cas de la procédure d’enquête préalable, qui a pour but de constater la nature et
l’étendue des droits que des tiers pourraient avoir sur les terres rurales demandées en
concession393. La procédure contradictoire individuelle est destinée à permettre à la personne
concernée par la décision à prendre de faire valoir ses observations394. Il en est ainsi, en
matière disciplinaire, où il est prévu que la procédure est contradictoire en ce sens que
l’agent incriminé doit recevoir notification préalable des faits qui lui sont reprochés,
qu’aucune pièce ne peut être utilisée contre lui sans qu’il n’en ait eu connaissance et qu’il
doit être mis en mesure de faire valoir ses justifications ou moyens de défense395.

388
Art. 96 du Code du travail.
389
Art. 15 de la loi 011-2002 du 29 août 2002 portant Code forestier.
390
G. DUPUIS, M.-J. GUEDON et P. CHRETIEN, op. cit., p. 470.
391
F. VUNDUAWE te PEMAKO, op. cit., p. 686.
392
Ibidem, p. 686.
393
Art. 193 de la loi 73-021 du 20 juillet 1973 telle que modifiée et complétée portant régime général des biens,
régime foncier et immobilier et régime des sûretés.
394
Ibidem, p. 686.
395
Art. 62, al. 2 de la loi 81-003 du 17 juillet 1981 portant statut du personnel de carrière des services publics de
l’Etat.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 98 Université Catholique de Bukavu
Par Jean-Petit MULUME ZIHALIRWA G1 Droit/2017-2018

Quand la procédure prévue pour l’établissement d’un acte administratif n’a pas été
suivie, il y aura, dans ce cas, vice de procédure. Ce dernier affect le processus de
l’élaboration d’une norme, contrairement au vice de forme qui ne concerne que la
présentation extérieure de l’acte administratif396.

c. Les délais de prise de décision

Il importe de distinguer selon que l’autorité administrative se trouve dans un cas de


compétence liée ou de pouvoir discrétionnaire397. La compétence liée désigne la situation
dans laquelle l’autorité administrative est obligée d’agir selon le sens déterminé par le droit,
elle n’a pas de possibilité de choix398, alors qu’un pouvoir est qualifié de discrétionnaire
lorsque l’autorité administrative qui l’exerce dispose d’une marge d’appréciation pour
prendre sa décision399.

Les délais peuvent être impératifs, soit puisqu’ils sont prescrits à peine de forclusion,
dans ce cas, aucune décision ne peut être prise après expiration du délai, soit parce qu’ils sont
prescrits à peine de nullité, auquel cas les actes pris après l’écoulement du délai prévu sont
considérés comme illégaux400.

Lorsque les délais comportent une date fixe, ils commencent à courir au premier jour
indiqué à 00h00’ pour se terminer le dernier jour à 00h00. S’ils sont fixés en quantièmes (par
exemple un mois) et que le point de départ est lié à un évènement, tel que la date de
notification, le délai, court, en principe dans ce cas, à partir du lendemain du jour de
l’évènement401.

d. La publicité de l’acte administratif unilatéral

Elle est l’opération par laquelle un acte administratif est porté à la connaissance des
intéressés ou du public. Elle rend l’acte administratif opposable aux intéressés. La

396
R. CHAPUS, op. cit., p. 945, n° 1054.
397
F. VUNDUAWE te PEMAKO, op. cit., p. 688.
398
W. BUSANE RUHANA MIRINDI, Le contrôle du pouvoir discrétionnaire de l’Administration par le juge
administratif congolais, Bruxelles, Bruylant, 2012, p. 78, n° 120.
399
M. LEROY cité par W. BUSANE RUHANA MIRINDI, op. cit., p. 78, n° 120.
400
F. VUNDUAWE te PEMAKO, op. cit., p. 688.
401
Idem.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 99 Université Catholique de Bukavu
Par Jean-Petit MULUME ZIHALIRWA G1 Droit/2017-2018

publication, qui consiste à insérer au Journal officiel un document officiel, est le mode de
publicité de règlement402.

e. Le but poursuivi par l’auteur de l’acte administratif unilatéral

Le motif de l’acte est la situation matérielle, objective, de fait ou de droit qui précède
l’acte et le justifie, alors que le but de l’acte est constitué des intentions subjectives de son
auteur, c’est-à-dire le résultat qu’il vise à atteindre403.

Une autorité administrative doit toujours agir en poursuivant l’intérêt général. Ainsi,
lorsqu’une autorité administrative agit dans un autre but que celui de l’intérêt général, elle
commet un détournement de pouvoir. Celui-ci consiste dans l’emploi par une autorité
administrative, d’un pouvoir dont elle est investie dans un but autre que celui en vue duquel il
lui a été conféré404.

2. L’exécution de l’acte administratif unilatéral

a. L’exécution normale de l’acte administratif unilatéral

Un acte administratif devient exécutoire à l’égard de l’Administration dès sa


signature. Mais, il n’est devient opposable aux administrés qu’à partir du moment où il est
publié. En principe, l’entrée en vigueur d’un acte administratif intervient dès son émission405.

Les actes administratifs jouissent d’une présomption de légalité. Ainsi, s’ils édictent
des obligations, celles-ci doivent être obéies aussi bien par les agents des services que par les
administrés. Ces derniers ne peuvent se transformer en juge de la légalité des décisions qui
s’imposent à eux. Ils ne peuvent que les contester devant l’Administration, elle-même, ou
devant le juge et sans que le recours introduit ne produise un effet suspensif de l’exécution de
la décision attaquée406.

402
Ibidem, p. 689.
403
Ibidem, p. 690.
404
Ibidem, p. 690-691.
405
Ibidem, p. 692.
406
R. CHAPUS, op. cit., p. 1071, n° 1167.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 100 Université Catholique de Bukavu
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b. L’exécution forcée de l’acte administratif unilatéral

Un acte administratif peut être exécuté sans avoir besoin de recourir à la force
publique. La règle est que l’exécution est volontaire407.

On ne peut recourir à la contrainte étatique qu’en cas de résistance de la part des


destinataires de l’acte408. Cependant, l’exécution forcée est soumise aux limitations
suivantes :
- elle suppose une mise en demeure préalable, sauf impossibilité ;
- elle doit être limitée au strict nécessaire ;
- elle se réalise aux risques et périls de l’Administration, puisque si la décision de
l’administration est déclarée illégale par le juge administratif et qu’elle a causé des
préjudices, l’Administration a l’obligation de les réparer. En outre, toute exécution
forcée illégale, même d’une décision légale, constitue une voie de fait409.

L’acte administratif bénéficie du privilège d’exécution provisionnelle, c’est-à-dire la


poursuite de son exécution malgré la contestation de l’acte en justice. Il s’agit d’un
corollaire du privilège du préalable, qui est attaché à cet acte, en vertu duquel
l’Administration n’a pas à se faire délivrer un titre exécutoire par le juge pour rendre
exécutoire ses décisions410.

3. La disparition de l’acte administratif unilatéral

a. Les modes de disparition par la volonté de l’Administration

- L’abrogation

C’est le mode de disparition de l’acte administratif par l’autorité qui avait pris la
décision411.

407
G. DUPUIS, M.-J. GUEDON et P. CHRETIEN, op. cit., p. 490.
408
F. VUNDUAWE te PEMAKO, op. cit., p. 691.
409
Ibidem, p. 693.
410
G. DUPUIS, M.-J. GUEDON et P. CHRETIEN, op. cit., p. 490.
411
F. VUNDUAWE te PEMAKO, op. cit., p. 694.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 101 Université Catholique de Bukavu
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- L’annulation

C’est l’anéantissement, avec effet rétroactif, de l’acte administratif par l’autorité


hiérarchique ou celle de tutelle en raison de l’irrégularité qui entache l’acte412.

- Le retrait

C’est un mode de disparition d’un acte administratif qui consiste, de la part de son
auteur, à anéantir rétroactivement son acte illégal413.

b. La disparition des actes administratifs par l’annulation par le juge

Le juge administratif saisi d’un recours en annulation pour excès de pouvoir peut
annuler l’acte administratif pour l’un des motifs suivants : incompétence, vice de forme,
violation de la loi et détournement de pouvoir ou de procédure414. Ce sont des vices qui
peuvent affecter la légalité des actes administratifs415.

Le recours pour excès de pouvoir est un recours contentieux introduit devant un juge
administratif par toute personne intéressée en vue d’obtenir l’annulation d’une décision, qui a
été rendue irrégulièrement par une autorité administrative416.

c. La disparition de l’acte administratif par la survenance de certains évènements

- La caducité

C’est un mode de disparition, fixé d’avance par la loi ou le règlement ou la


Constitution, en vertu duquel un acte administratif ne serait valable que pour une durée bien
déterminée. Passé ce délai, l’acte cesse de produire ses effets juridiques. La caducité opère de
plein droit à la date prévue ou à la survenance de l’évènement devant entraîner la disparition
de l’acte417.

412
Idem.
413
Ibidem, p. 695.
414
Ibidem, p. 697.
415
R. CHAPUS, Droit administratif général, T. 1, 10e éd., Paris, Montchrestien, 1996, p. 928, n° 1036 et 1037.
416
G. DUPUIS, M.-J. GUEDON et P. CHRETIEN, op. cit., p. 606.
417
R. CHAPUS, op. cit., p. 699.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 102 Université Catholique de Bukavu
Par Jean-Petit MULUME ZIHALIRWA G1 Droit/2017-2018

- La désuétude

Elle consiste en la non-application durable d’une décision administrative. Toutefois,


elle n’est pas concevable pour les règlements de police418. Ces derniers sont des mesures qui
concourent au maintien de l’ordre public419.

VI. La convention collective de travail

De nos jours, les organisations représentatives de travailleurs et d’employeurs sont en


matière sociale régulièrement appelées à intervenir dans le processus d’élaboration des règles
de droit. Ces organisations, à travers la conclusion des conventions collectives de travail,
apparaissant en droit et en fait comme de véritables auteurs des règles de conduite générales
et abstraites.

A. La notion de convention collective de travail

Une convention collective de travail est « un accord écrit relatif aux conditions et
aux relations de travail conclu entre, d’une part un ou plusieurs employeurs, une ou
plusieurs organisations professionnelles d’employeurs et, d’autre part, une ou plusieurs
organisations professionnelles de travailleurs »420.

La convention collective de travail constitue donc un accord de volonté, un contrat


résultant de négociations entre les personnes et/ou les organisations susmentionnées. Par ce
genre d’accord, les parties entendent régler les conditions de travail au sens large du terme,
c’est-à-dire les relations individuelles et collectives de travail entre employeurs et
travailleurs.

La convention collective de travail peut être conclue en vue de régler des conditions
de travail au niveau d’une ou plusieurs entreprises déterminées, au niveau d’une branche ou
d’un secteur d’activités ou encore au niveau interprofessionnel.

418
Ibidem, p. 699.
419
Ibidem, p. 546.
420
Art. 272 du Code du travail de la RDC, in Les Codes Larcier. République Démocratique du Congo, Tome
IV, Droit du travail et de la sécurité sociale, Bruxelles, Larcier, 2003, p. 32.
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Cette convention peut être conclue soit pour une durée déterminée, soit pour une
durée indéterminée, soit pour une durée déterminée avec clause de reconduction421.

B. La nature juridique de la convention collective de travail

La convention collective de travail a une nature mixte. En effet, par certain de ses
caractères, elle ressemble à un contrat de droit privé, tandis que par d’autres, elle se
rapproche de la loi ou du règlement. Cette dualité se traduit dans les expressions utilisées
pour la qualifier. Ainsi, en fonction du caractère que l’on entend privilégier, on la désigne
différemment : « convention collective de réglementation de travail », « règlement par
convention » ou « règlement convenu ».

La convention collective est contractuelle par son origine, puisqu’elle l’œuvre des
seules parties contractantes qui décident de son contenu et de sa durée. Même si une
convention collective est rendue obligatoire par une décision de l’autorité publique, il
demeure que ce qui fait la loi uniforme du secteur, c’est ce qui a été convenu par les auteurs
de la convention conclue ou non au sein d’un organe paritaire. La convention collective ne
peut faire l’objet d’une annulation par une juridiction administrative, et particulièrement le
Conseil d’état. Elle contient, par ailleurs, certaines dispositions qui ne lient que les seules
parties contractantes. Ces éléments rapprochent ainsi la convention collective de travail d’un
contrat de droit privé.

Cependant, par certains de ses effets, la convention collective de travail s’écarte du


contrat et s’apparente plutôt à la loi ou au règlement. Tout d’abord, les dispositions
normatives que contient une convention collective de travail s’appliquent de manière
impérative à tous les travailleurs sans exception d’un employeur lié par une convention
collective de travail. Dès lors, les dispositions normatives de la convention collective ne sont
pas soumises à la règle de la relativité des actes juridiques qui s’applique aux contrats de
droit privé et en vertu de laquelle les conventions n’ont d’effets qu’entre les parties qui les
ont conclues. Ensuite, les dispositions normatives individuelles des conventions collectives
de travail conclues au sein d’un organe paritaire s’imposent, de manière supplétive, aux
employeurs du secteur qui ne sont pas parties à la convention et à leurs travailleurs. Enfin, les
dispositions normatives de conventions collectives rendues obligatoires par une décision

421
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., pp. 64-65.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 104 Université Catholique de Bukavu
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d’une autorité publique obligent de manière impérative tous les employeurs et travailleurs
relevant du secteur ou des branches d’activités auxquelles s’étend la convention422.

Les clauses des contrats de travail individuels doivent se conformer aux dispositions
impératives d’une convention collective de travail423. La convention collective de travail doit
aussi se conformer aux dispositions du Code du travail, sauf si les clauses de la convention
collective qui ne sont pas conformes à ce Code sont favorables aux travailleurs424.

C. Les effets juridiques de la convention collective de travail

Traditionnellement, on considère que la convention collective du travail est constituée


de deux parties : une partie normative et une partie obligationnelle. La partie normative
contient des dispositions qui s’imposent aux parties et à des personnes qui ne sont pas parties
à la convention. La partie obligationnelle, quant à elle, n’oblige, à l’instar des contrats de
droit privé, que les parties à la convention.

Les dispositions contenues dans la partie normative peuvent être soit des dispositions
normatives individuelles soit des dispositions normatives collectives. Les dispositions
normatives individuelles sont destinées à s’intégrer dans les contrats de travail individuels.
Tel est le cas des dispositions concernant la rémunération de travailleurs, la durée
hebdomadaire du travail, etc. Les dispositions normatives collectives ont vocation à régler les
relations de groupes au sein des entreprises ou des secteurs concernés425. Les dispositions
normatives tant collectives qu’individuelles de toute convention collective de travail
s’imposent et profitent, en qualité des règles impératives, à tous les travailleurs des
employeurs liés par la convention426. Les dispositions normatives lient donc les signataires,
les membres d’organisations d’employeurs signataires ainsi que tous les travailleurs d’un
employeur lié par la convention collective.

Les dispositions obligationnelles ont, quant à elles, principalement pour but de


permettre une exécution loyale de l’accord. Il en est ainsi de l’engagement de ne pas recourir

422
Ibidem, p. 67 et 68.
423
Art. 36, al. du Code du travail précité.
424
Ibidem, art. 274.
425
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., p. 65.
426
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 82.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 105 Université Catholique de Bukavu
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à la grève pendant une période déterminée, la fixation des pénalités pour la partie ne
respectant pas la convention, etc.427

Les effets produits par une convention collective lorsqu’elle est conclue au sein d’un
organe paritaire et lorsqu’elle est rendue obligatoire par décision de l’autorité publique
compétente ont été présentés lors de l’analyse de la nature juridique de la convention
collective du travail.

V. La coutume

A. La notion de coutume

La coutume est très souvent considérée comme la source la plus ancienne du droit428.
A défaut d’une définition légale, il existe une assez grande incertitude sur ce qu’il faut
comprendre par la coutume. Selon certains, qui lui donnent un sen très large, seraient
coutumières toutes les règles de droit non textuelles. On range dans cette catégorie les
principes généraux du droit qualifiée de coutume savante, la jurisprudence du droit qualifiée
de coutume de tribunaux et la coutume au sens étroit qualifiée de coutume populaire. Dans le
cadre de ce cours, on s’en tiendra a ce sens étroit de la coutume, qui est retenu par la majorité
des auteurs.

Cependant, même ainsi limitée, la coutume soulève encore un problème de définition


en ce qu’elle est difficile à distinguer de l’usage. En principe, à la différence de la coutume,
l’usage n’est pas obligatoire. L’usage, c’est-à-dire ce qui se fait habituellement, est un
passage obligé, qui se trouve à la source de la coutume. Ainsi, on dira qu’on est en présence
d’une coutume lorsque l’usage étant devenu suffisamment fréquent et régulier est ressenti par
la collectivité comme obligatoire429. Dès lors, la coutume peut être définie comme étant une
règle qui n’est pas édictée en forme de commandement par les pouvoirs publics, mais qui est
issue d’un usage général et prolongé et de la croyance en l’existence d’une sanction en cas
d’inobservation de cet usage (opinio necesitatis)430.

427
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., pp. 65 et 66.
428
F. TERRE, op. cit., p. 196.
429
P. MALINVAUD, op. cit., p. 150.
430
R. GUILLIEN et J. VINCENT, op. cit., p. 161.
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Au regard de ce qui précède, il existe des pratiques constantes qui n’ont jamais atteint
le stade obligatoire. Il en est ainsi de la pratique de pourboire, de cadeau d’usage, etc.431

Il ressort de la définition de la coutume que cette dernière est constituée de deux


éléments : un élément matériel et un élément psychologique. L’élément matériel réside dans
un usage constant et général. L’idée de constance sous-entend une certaine ancienneté, un
ancrage dans le temps. Ainsi, il faut une pratique suffisamment répétée suivant même l’adage
populaire « une fois n’est pas coutume ». Un règle coutumière revêt également, comme la loi,
un caractère général tel qu’expliqué précédemment. De la même manière que la loi, la
coutume peut ne viser que certains professionnels, à savoir ceux auxquels elle s’applique. Tel
serait le cas des usages en matière de commerce.
L’élément psychologique réside dans la croyance, chez les sujets de droit, au caractère
obligatoire de l’usage auquel ils se conforment spontanément432. C’est l’élément
psychologique de la coutume qu’on appelait au Moyen Age l’ « opinio necessitatis »433.

B. Le rôle et la force obligatoire de la coutume

L’admission de l’existence des règles de droit d’origine coutumière suscite la question


de savoir comment ces règles de droit se situent dans la hiérarchie des normes, sont-elles
égales ou inférieures à la loi ? On distingue classiquement trois hypothèses suivant que la loi
elle-même renvoie à la coutume, que la coutume intervient dans un domaine non réglementé
par la loi ou qu’elle va à l’encontre de la loi434.

1. La coutume secundum legem

On parle de coutume secundum legem lorsque la loi, elle-même, procède par renvoie à
la coutume. En pareil cas, ce renvoie confère à la coutume la même force que la loi435.
Cependant, la coutume à appliquer ne doit pas être contraire à la loi, à l’ordre public ou aux
bonnes mœurs436.

431
P. MALINVAUD, op. cit., p. 150.
432
Ibidem, p. 151.
433
F. TERRE, op. cit., p. 198.
434
P. MALINVAUD, op. cit., p. 152.
435
Idem
436
Art. 18, al. 1er de la loi organique n° 13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et
compétences des juridictions de l'ordre judiciaire.
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Exemples :
 L’article 340 du Code de la famille dispose que « La forme des fiançailles est réglée
par la coutume des fiancés. En cas de conflit des coutumes, la coutume de la fiancée
sera d’application (...) ».
 L’article 788 du même texte prévoit que « Lorsque le droit de reprise est exercé par
un des enfants, celui-ci est tenu d’assurer les charges prévues par la coutume, en
faveur des autres enfants ». Cette disposition s’applique en cas de petits héritages.

2. La coutume praeter legem

Om parle de coutume praeter legem lorsque la coutume a vocation à s’appliquer là où


la loi est incomplète ou absente. C’est donc l’hypothèse de l’application de la coutume dans
le silence de la loi437. Dans ce cas également, la coutume à appliquer ne doit pas être contraire
à la loi, à l’ordre public ou aux bonnes mœurs438.

3. La coutume contra legem

Contrairement aux deux précédentes hypothèses où il n’y avait pas de conflit entre la
loi et la coutume, ici la question se pose en des termes différents : comment doit-on résoudre
le conflit entre une loi et une coutume qui sont incompatibles ? Il faut donc régler un
problème de hiérarchie des normes.

Le principe est que la loi est supérieure à la coutume. Il s’ensuit qu’une loi peut abolir
une coutume, alors qu’une coutume ne peut abroger une loi. Toutefois, une coutume
contraire à une loi supplétive de volonté peut être valable. En effet, vu que la loi supplétive
peut être écartée par une clause contraire, a fortiori elle peut l’être, d’une manière générale,
par une coutume contraire. Dans ce cas, il n’y a pas incompatibilité entre la loi et la coutume,
puisque la loi n’est pas obligatoire. En revanche, s’il s’agit d’une loi impérative, elle ne
pourrait être abrogée par une coutume contraire439.

437
P. MALINVAUD, op. cit., p. 153.
438
Art. 18, al. 1er de la loi organique n° 13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et
compétences des juridictions de l'ordre judiciaire.
439
P. MALINVAUD, op. cit., p. 154.
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C. La place de la coutume en droit

1. La coutume en droit international public

La coutume, en tant que source du droit international, est prévue par le Statut de la
Cour international de Justice qui dispose que « La Cour, dont la commission est de régler
conformément au droit international les différends qui lui sont soumis, applique :(…) b. la
coutume internationale comme preuve d’une pratique générale acceptée comme étant le droit
(…) »440.

La coutume internationale est une règle de droit objectif issue des pratiques générales
et constates que les Etats et les organisations internationales suivent avec la conviction d’agir
conformément au droit.

Entre la coutume et le traité, il n’existe point de hiérarchie. Ainsi, la coutume peut


modifier ou mettre fin à un traité de la même manière qu’un traité peut modifier la coutume y
déroger ou engendre une coutume en sens inverse, à condition, toutefois, que la règle
coutumière antérieure ne relève point du « jus cogens ».

L’incertitude des règles coutumières conduit assez naturellement à la conclusion des


traités de codification, qui par voie conventionnelle, aboutissent à constater par écrit des
règles coutumières préexistantes tout en les développe le cas échéant441.

2. La coutume en droit interne

La coutume est une source de droit dont l’importance en droit interne varie selon les
branches du droit. Ainsi, la coutume est exclue comme source du droit dans certaines
branches. Il en est ainsi en droit pénal en ce qui concerne l’incrimination et la sanction des
comportements prohibés, d’autant plus que la Constitution de la RDC prévoit que « (…) la
loi fixe les règles concernant : (…) 6. la détermination des infractions et des peines qui leur
sont applicables (…) »442 et que « Nul ne peut être (…) condamné qu’en vertu de la loi »443.

440
Art. 38, 1, b. du Statut de la Cour international de Justice.
441
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., pp. 116, 120-122.
442
Art. 122 de la Constitution de la RDC précitée.
443
Ibidem, art. 17, al. 2.
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Cependant, dans d’autres branches du droit comme en droit civil, en droit commercial,
en droit social, la coutume exerce un rôle important en tant que source du droit objectif444.

VI. Les principes généraux du droit

A. La notion de principes généraux du droit

Les principes généraux du droit sont des règles de droit objectif, qui peuvent ne pas
être exprimées dans les textes, mais qui sont appliquées par la jurisprudence et dotées d’un
caractère suffisant de généralité445. Ces règles, qui constituent des principes généraux, ne sont
pas écrites446.

Ils ne font pas partie du droit écrit, même s’ils sont formulés dans un texte. Ils sont
également distincts des règles coutumières447. En outre, ils ont une généralité différente de
celle attachée à une autre règle juridique, car ils visent une série indéfinie et imprévue de
situations juridiques. Mais, ils n’ont pas tous le même degré de généralité. Ainsi, certains
principes généraux du droit s’appliquent de manière transversale à toutes les branches du
droit comme le principe des droits de la défense, alors que d’autres ont une portée limitée à
une ou à certaines branches seulement448.

Le droit congolais consacre expressément les principes généraux comme source du


droit. A cet effet, le législateur prévoit que « En cas d'absence de coutume ou lorsque celle-ci
n'est pas conforme aux lois, à l'ordre public et aux bonnes mœurs, les Cours et tribunaux
s'inspirent des principes généraux du droit »449.

En droit international, les principes généraux du droit sont considérés comme une
source de ce droit en vertu de l’article 38 du Statut de la Cour internationale de Justice. La
notion de principes généraux du droit recouvre, en droit international public, des principes

444
F. TERRE, op. cit., pp. 203-204 ; H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 79-80.
445
J.-L. BERGEL, op. cit., p. 91, n° 74.
446
H. BEKAERT, op. cit., p. 172, n° 175.
447
G. van der MEERSCH cité par S. SEYS, D. DE JONGHE et F. TULKENS, « Les principes généraux du
droit », in I. HACHEZ et alii (dir.), Les sources du droit revisitées, vol. 2, Normes internes
infraconstitutionnelles, Limal, Anthemis, 2012, p. 499.
448
S. SEYS, D. DE JONGHE et F. TULKENS, op. cit., pp. 504 et 505.
449
Art. 18, al. 2 de la loi organique n° 13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et
compétences des juridictions de l'ordre judiciaire.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 110 Université Catholique de Bukavu
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communs aux systèmes juridiques de la plupart des Etats dits civilisés dont le respect est
nécessaire à toute vie sociale et qui, pour cette raison, doivent trouver à s’appliquer, à défaut
des traités ou des règles coutumières, à la communauté internationale. Il s’agit, en réalité,
d’un moyen de remédier aux lacunes du droit international. Mais, il est utilisé assez rarement
en raison du caractère divisé et pluraliste de la communauté internationale450.

Au départ, les principes généraux du droit découlaient principalement d’une longue


tradition, qui s’est transmise aux générations successives. Tantôt ces principes prennent la
forme de maximes ou d’adages en français ou en latin, tantôt ils sont énoncés dans la langue
de tous les jours. La plupart des principes de l’ancien droit, et particulièrement en France, ont
été intégrés dans des textes de loi. Tel est le cas de la règle « En fait de meuble, possession
vaut titre » et le principe de l’effet relatif du contrat. En pareil cas, il ne s’agit plus
simplement d’un principe, mais d’une loi.

D’autres principes ont été, par la suite, dégagés par la jurisprudence et la doctrine.
Cependant, certains d’entre eux ont été également absorbés par la loi. Il en est ainsi, en
procédure civile, du principe de la contradiction. On assiste donc à un double phénomène :
l’apparition du principe dans un premier temps, puis son absorption par la loi dans un
deuxième temps. A ces jours, divers principes sont en voie de formation, mais sans qu’on
puisse dire avec certitude raisonnables qu’ils deviendront des principes généraux du droit. Tel
est le cas du principe de précaution et du principe de proportionnalité, particulièrement en
droit privé451.

La jurisprudence tire certains principes généraux du droit de la loi ou de la coutume,


avec l’aide de la doctrine, sans les créer de toutes pièces452. Certains autres principes
généraux semblent empruntés à la morale, à l’équité ou au droit naturel453. Les principes
généraux du droit naissent des réalités, des aspirations ainsi que des besoins d’une société et
évoluent à son rythme. Les juges ne consacrent donc pas les principes généraux du droit à

450
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 122.
451
P. MALINVAUD, op. cit., pp. 146-148.
452
J.-L. BERGEL, op. cit., p. 92, n° 76.
453
Ibidem, p. 101, n° 89.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 111 Université Catholique de Bukavu
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partir de rien454. Ils sont créés à partir du système juridique tel qu’il existe dans toutes ses
composantes455.

B. La consécration et le champ d’application des principes généraux du droit

Il est important de s’interroger sur la question de savoir en vertu de quel critère va-t-
on décider qu’on est en présence d’un principe général du droit ? En pratique, c’est par le
biais de la jurisprudence, lorsque le juge va fonder sa solution sur une règle non écrite qui va
alors accéder au rang de principe général. Dans un premier temps, il ne sera, peut-être, fait
référence au principe que dans le corps de la décision, puis un jour, le juge le posera en règle
de droit. Ainsi, les principes vont être officiellement reconnus au travers des décisions de
jurisprudence qui les consacrent. Lorsqu’une juridiction se fonde sur un principe non écrit,
elle va le mentionner dans son visa. Elle peut, par exemple, s’exprimer en ces termes : « Vu
le principe suivant lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal du voisinage ». Il
s’agit d’un principe, qui ne figure dans aucun texte456.

Ainsi, les principes généraux n’ont pas, par eux-mêmes, une existence propre, car
c’est le juge qui leur donne force et vie. A cet égard, c’est la jurisprudence qui leur confère
leur autorité457. C’est au juge qu’il appartient de proclamer l’existence de principes généraux
du droit, d’en déterminer le contenu exact et la portée et de définir leur place dans la
hiérarchie des normes458.

Les principes généraux du droit se rapprochent de la coutume au regard de leur mode


d’élaboration, car il n’existe aucun enchaînement d’étapes formellement définies en vue de
leur établissement459.

Toutefois, toutes les règles que la jurisprudence produit « sans texte » ne sont pas
forcément des principes généraux du droit. Beaucoup de ces règles ne sont que des solutions
dégagées par le juge pour combler le silence, l’obscurité ou la contradiction de la loi460. Une

454
S. SEYS, D. DE JONGHE et F. TULKENS, op. cit., pp. 512-513.
455
Ibidem, p. 529.
456
P. MALINVAUD, op. cit., p. 148.
457
J.-L. BERGEL, op. cit., p. 90, n° 73.
458
S. SEYS, D. DE JONGHE et F. TULKENS, op. cit., p. 526.
459
Ibidem, p. 528.
460
J.-L. BERGEL, op. cit., p. 91, n° 74.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 112 Université Catholique de Bukavu
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règle n’accède au rang de principe général que si elle a été consacrée comme tel et sans
équivoque par la jurisprudence.

Il existe des principes généraux de droit privé, de droit public et certains sont
reconnus comme ayant une valeur constitutionnelle. Ce ne sont pas certainement les mêmes.
Les principes généraux de droit privé sont ceux consacrés par la Cour de cassation. Ils ne
s’appliquent qu’aux relations entre personnes privées.

Les principes généraux de droit public sont ceux consacrés par le Conseil d’Etat. Ils
ne s’appliquent qu’aux relations dans lesquelles l’Etat intervient ou l’une de ses subdivisions.
Les juridictions administratives consacrent dans des nombreux cas des principes généraux de
461
droit qui s’inspirent des règles qui figurent dans le Code civil, le Code du travail, etc. .
Traditionnellement, les principes généraux du droit occupent une place importante dans la
jurisprudence des juridictions administratives à cause, d’une part, de l’absence de
codification générale du droit administratif et de texte limitant les moyens pouvant être
invoqués en cas de violation d’une norme, et, d’autre part, du contrôle fondamental que ces
juridictions assurent sur l’exercice du pouvoir discrétionnaire par l’Administration462.

Les principes généraux à valeur constitutionnelle sont ceux consacrés comme tels par
la Cour constitutionnelle. Tel est le cas du principe de sauvegarde de la dignité de la personne
humaine. Ces principes sont consacrés à l’intention du législateur, qui doit les respecter
lorsqu’il édicte des lois nouvelles463. Ces principes font partie du bloc de constitutionnalité.
Ils sont considérés comme suffisamment fondamentaux et dotés d’une constance absolue,
d’une ancienne suffisante pour jouir de la valeur constitutionnelle, même s’ils ne découlent
pas expressément de la Constitution et qu’ils soient issus de la législation464. Ces principes
peuvent justifier l’annulation d’une loi qui leur serait contraire465.

L’institution du recours aux principes généraux du droit vise à combler les lacunes du
droit écrit et du droit coutumier466. Certains principes généraux du droit n’ont qu’une valeur

461
P. MALINVAUD, op. cit., pp. 148-149.
462
S. SEYS, D. DE JONGHE et F. TULKENS, op. cit., p. 498.
463
P. MALINVAUD, op. cit., pp. 148-149.
464
J.-L. BERGEL, op. cit., pp. 94 et 95, n° 80.
465
S. SEYS, D. DE JONGHE et F. TULKENS, op. cit., p. 507.
466
P. MALINVAUD, op. cit.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 113 Université Catholique de Bukavu
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supplétive, dans la mesure où ils ne s’appliquent qu’à défaut de textes contraires. D’où, les
règlements peuvent déroger à certains. D’autres principes généraux revêtent un caractère
supraréglementaire, en ce qu’ils s’imposent à l’Administration, mais la loi peut y déroger467.

C. Quelques exemples de principes généraux du droit

 « Error communis facit jus » : l’erreur est commune est créatrice du droit et couvre
les irrégularités éventuellement commises par les parties à un contrat ;
 « Fraus omnia corrumpit » : la fraude fait échec à toutes les règles ;
 « Nemo auditur propriam turpitudinem allegans » : nul ne peut se prévaloir de sa
propre turpitude ;
 « Nemo judex in re sua » ou « Nemo judex in propria causa» : nul ne peut se rendre
justice468 ;
 L’intérêt est la mesure des actions469 ;
 Le principe du droit au recours juridictionnel470 ;
 Le principe de sécurité juridique471 ;
 Les biens des personnes publiques sont insaisissables.

§ 2. L’application de la loi au sens large

Nous examinerons un certain nombre de problèmes qui peuvent se poser lorsqu’il


s’agit de faire application de la loi au sens large. A cet effet, nous analyserons
successivement les conditions d’application de la loi, son interprétation, et enfin l’application
de la loi dans le temps et dans l’espace.

I. Les conditions d’application de la loi

A la différence des règles d’origine coutumière ou jurisprudentielle, les textes ne


deviennent pas obligatoires du seul fait qu’ils ont été élaborés conformément aux procédures
requises. Diverses conditions s’y ajoutent. Elles peuvent varier suivant qu’il s’agit d’une loi

467
J.-L. BERGEL, op. cit., pp. 103 et 104, n° 91.
468
J. KALERE MIGABO, Cours d’Introduction générale à l’étude du droit, G1 Droit, UCB, 1994-1995, inédit.
469
H. BEKAERT, op. cit., p. 175
470
G. DUPUIS, M.-J. GUEDON et P. CHRETIEN, Droit administratif, 10e éd., Paris, Dalloz, 2007, p. 150.
471
Ibidem, p. 152.
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Par Jean-Petit MULUME ZIHALIRWA G1 Droit/2017-2018

ou d’un règlement. L’application d’une loi suppose sa promulgation, sa publication et que la


loi n’ait pas fait l’objet d’une abrogation ou de caducité472.

A. La promulgation de la loi473

Contrairement à la loi au sens strict, aucune règle de droit ne dispose que les actes
réglementaires sont soumis à la promulgation. Certains auteurs considèrent qu’étant l’œuvre
du pouvoir exécutif, ces actes sont exécutoires par nature et ne nécessitent donc pas des
formalités comparables à la promulgation de la loi. D’autres font observer que, le plus
souvent, les actes réglementaires pris par le Président de la République ou par le Premier
ministre, font l’objet d’un contreseing, ce qui pourrait être compris comme une
authentification. Mais, en fait, il n’existe pas de promulgation pour les actes réglementaires
quels qu’ils soient474.

B. La publication de la loi

Comme les lois, les actes réglementaires sont soumis à publication pour avoir la force
obligatoire475. Ainsi, il est prévu en droit congolais que « Les lois, les actes ayant force de
loi, les Décrets du Premier Ministre et les Arrêtés des Ministres sont publiés par le journal
officiel par voie d’insertion et sur son site internet. Les actes réglementaires émanant de
toute autre autorité centrale sont publiés dans la même forme que les actes législatifs »476 .
De même, « Les actes des autorités provinciales et décentralisées sont publiés au Bulletin
officiel de la province. Ainsi, les règlements des entités territoriales décentralisées sont
publiés au Bulletin officiel de la province »477 .

A l’occasion de la publication d’une loi, il peut se faire que des erreurs aient été
commises. D’où, l’intérêt de la question relative à la rectification des erreurs commises lors
de la publication d’une loi. C’est la pratique des errata. En effet, il arrive parfois que
postérieurement à la publication d’un texte, on s’aperçoive que le texte publié comporte des

472
P. MALINVAUD, op. cit., p. 90.
473
Cf. les développements présentés antérieurement au moment de l’examen de l’élaboration de la loi sur
d’autres aspects concernant la promulgation d’une loi.
474
P. MALINVAUD, op. cit., pp. 90-91.
475
Ibidem, p. 90-91.
476
Art. 2 et 3 de la loi n°10/007 du 27 fév. 2010 modifiant et complétant l’O.-L. n°68-400 du 23 oct. 1968
relative à la Publication et la notification des actes officiels, J.O.RD.C, numéro spécial, du 03 mars 2010.
477
Art. 40 de la loi organique n°08/016 du 07 oct. 2008 portant Composition, organisation et fonctionnement
des Entités territoriales décentralisées et leurs rapportes avec l’Etat et les Provinces, J.O.R.D.C., 2008.
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Par Jean-Petit MULUME ZIHALIRWA G1 Droit/2017-2018

erreurs. Au lieu de recourir à un texte rectificatif, qui devrait satisfaire aux mêmes règles de
forme, de procédure et de fond que le texte rectifié, le Gouvernement préfère souvent corriger
l’erreur ou l’omission par voie d’erratum inséré au Journal officiel.

Cependant, cette pratique d’errata a donné lieu à des nombreux abus en ce qu’elle a
été utilisée par l’Administration pour corriger des erreurs de fond commises par l’auteur du
texte. La question se pose alors de savoir si les juges qui sont tenus d’appliquer le texte sont
également tenus par les errata, alors qu’ils n’émanent pas de l’auteur de l’acte, mais de
l’Administration qui n’a aucun pouvoir à cet effet.

S’il s’agit d’une erreur matérielle évidente, le juge doit tenir compte de l’erratum.
Mais si l’erreur touche au fond et si l’erratum conduit à modifier le sens ou la portée du texte
publié, en pareil cas, la jurisprudence est assez hostile à prendre en compte le rectificatif.
L’erratum ne saurait être pris en considération s’il a pour objet de réparer une erreur
commise par l’auteur du texte, qu’il s’agisse du parlement ou du pouvoir exécutif. Dans ce
cas, c’est à cet auteur qu’il incombe de revoir sa copie et d’adopter, suivant la procédure et
les formes requises, un nouveau texte exempt d’erreur478.

La publication de la loi entraîne l’application de la règle « Nul n’est censé ignorer la


479
loi » . Cette règle constitue, en fait, une fiction nécessaire. En effet, tout texte régulièrement
promulgué et publié, devient obligatoire pour tous et nul ne saurait se soustraire à son
application sous prétexte d’ignorance. C’est ce que signifie cette règle.

Bien que cet adage ne vise que la loi, la règle s’applique à l’ensemble des normes
juridiques, qu’il s’agisse de lois ou d’actes réglementaires. Elle s’applique également à la
jurisprudence dans la mesure où celle-ci est source de droit.

Cependant, cette présomption de la connaissance de la règle de droit ne correspond


nullement à la réalité et, bien souvent, les destinataires de la règle de droit en prennent
connaissance tardivement et à leur dépend. Même les praticiens du droit ne sauraient
prétendre connaitre l’ensemble des règles de droit positif. Il en résulte que plus qu’une
présomption, la règle pose une véritable fiction. Mais, cette fiction est nécessaire et justifiée
478
P. MILINVAUD, op. cit., p. 93.
479
Art. 62 de la Constitution de la R.D.C. du 18 février 2006 telle que modifiée et complétée.
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par la stabilité sociale, car l’application de la loi ne peut dépendre ni de la volonté de la


connaitre, ni de sa connaissance effective par les sujets de droit. A défaut d’une telle règle, la
loi ne répondrait plus à sa fonction d’application générale, si individuellement telle ou telle
personne pouvait en écarter l’application sous prétexte de son ignorance.

La fiction de connaissance de la règle de droit connaît un certain nombre


d’assouplissements. Tout d’abord, on rappellera la distinction entre les lois impératives et les
lois supplétives en faisant observer que contrairement aux lois impératives, on peut écarter
les lois supplétives en exprimant une volonté contraire. Cette mise à l’écart de la loi
supplétive, qui est généralement faite en connaissance de cause, peut aussi l’être par
ignorance. A l’extrême, on pourrait dire qu’il n’est pas nécessaire de connaitre les règles
simplement supplétives, puisqu’on n’est pas contraint de les appliquer.

En second lieu, en matière pénale, le Code pénal fait de l’erreur inévitable une cause
d’irresponsabilité. En effet, n’est pas pénalement responsable, la personne qui justifie avoir
cru, par une erreur sur le droit qu’elle n’était pas en mesure d’éviter, pouvoir légitimement
accomplir l’acte. Mais, la jurisprudence en fait une application si étroite que cette erreur est
très rarement admise.

En troisième lieu, en matière civile, l’erreur de droit peut être invoquée non pas pour
échapper à la loi, mais pour demander la nullité d’un contrat conclu à la suite d’une telle
erreur. La jurisprudence considère, en effet, que l’erreur vicie le consentement de la même
manière qu’elle porte sur la règle de droit ou sur les circonstances de fait. Parfois même, la
jurisprudence décide qu’une situation établie contrairement à la loi doit être validée, si elle a
été établie dans l’ignorance collective et invincible de la règle. C’est ce qu’on exprime par la
maxime «Error communis facit jus » (L’erreur commune est créatrice du droit)480.

480
P. MALINVAUD, op. cit., pp. 94-95.
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C. L’abrogation et la caducité de la loi

1. L’abrogation de la loi

a. La notion d’abrogation

L’abrogation est l’opération par laquelle la force obligatoire d’une règle lui est retirée
pour l’avenir et pour l’avenir seulement481.

L’abrogation et l’annulation ne sont pas à confondre. L’une et l’autre présentent le


caractère commun de consister en une mesure d’anéantissement de la force obligatoire qui
s’attache à la norme. Toutefois, la ressemblance ne s’arrête que là. En effet, les causes et les
effets de cette mesure divergent selon qu’il s’agit d’annulation ou d’abrogation.

L’annulation procède d’un jugement de valeur sur les conditions de l’établissement


de la norme. Cet établissement est jugé avoir été entaché d’un défaut qui a vicié la norme au
départ et l’a rendue malhabile à produire des effets auxquels elle tendait. Sanctionner
correctement ce vice, c’est supprimer les effets de la norme depuis qu’elle a été édictée.
L’annulation opère ainsi ex tunc. La norme cesse non seulement de produire ses effets, mais
aussi d’avoir produit ses effets. Tout ce qui a été accompli sur base d’elle disparaît
rétroactivement. Elle est censée n’avoir jamais eu la force obligatoir482e.

L’abrogation, quant à elle, procède d’un jugement de valeur sur l’adéquation aux
nécessités actuelles d’une norme dont on sait qu’elle a été correctement établie, mais qu’elle
a fait son temps. On estime qu’elle doit cesser de produire ses effets. L’abrogation opère ainsi
ex nunc. La norme cesse de produire de nouveaux effets. Elle ne cesse pas d’avoir produit ses
effets antérieurs483.

481
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., p. 49.
482
J. FALYS, op. cit., p. 120.
483
Idem
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b. Les modes d’abrogation de la loi

On distingue deux modes d’abrogation de la loi, à savoir : l’abrogation par l’autorité


compétente et l’abrogation par désuétude484.

- L’abrogation par l’autorité compétente

Une règle unilatérale écrite peut être abrogée par l’autorité ayant le pouvoir de
l’édicter ainsi que par les autorités qui lui sont supérieures. Toutefois, lorsqu’une compétence
ou un pouvoir a été attribué(e) exclusivement à une autorité déterminée, les règles émanant
de cette autorité sont à l’abri d’une abrogation directe par l’autorité supérieure.

L’abrogation peut être expresse ou tacite. L’abrogation expresse résulte de la volonté


exprimée de supprimer, pour l’avenir, la force obligatoire de la règle que l’autorité
compétente désigne. L’abrogation tacite est l’effet de la volonté non exprimée, mais certaine,
d’ôter, pour l’avenir, la force obligatoire à certaines dispositions. Cette volonté se déduit de
ce que l’autorité compétente consacre des dispositions nouvelles, qui sont inconciliables
avec les dispositions anciennes. L’abrogation d’une loi est définitive, qu’il s’agisse d’une
abrogation expresse ou tacite485.

- L’abrogation par désuétude

Il est généralement admis que des règles de droit écrit peuvent perdre leur force
obligatoire par l’abandon dans lequel ces règles tombent du fait de leur non usage486. Une
disposition de droit écrit pourrait être abrogée par désuétude, c’est-à-dire « par la double
circonstance, d’une part, qu’elle n’a plus été appliquée pendant un temps assez long encore
qu’il y ait eu matière à l’appliquer, et, d’autre part, que cette non application trouve son
origine soit dans la disparition de circonstance de faits qui ont entraînés l’adoption de la
disposition, soit dans un changement de l’opinion »487.

L’abrogation par désuétude n’est, en principe, admise qu’à l’égard des lois
supplétives. Elles seules peuvent, en effet, être régulièrement écartées par la volonté des
particuliers. S’il advient que certaines règles impératives ne soient, en fait, plus appliquées,
484
H. DE PAGE, op. cit., p. 262.
485
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., pp. 49-50.
486
Ibidem, p. 50.
487
J. RENAULD cité par J. FALYS, op. cit., p. 21.
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cela ne signifie pas pour autant qu’elles soient abrogées488. Aussi longtemps qu’une
disposition particulièrement impérative de droit écrit n’a pas été abrogée expressément, elle
reste obligatoire, sauf bien entendu si elle n’a été rendue obligatoire que pendant un certain
délai ou si l’autorité compétente décidait de la suspendre pour un temps en vue de l’abroger.
C’est le principe de la pérennité de la loi489.

c. Les effets de l’abrogation

Tout en renvoyant les éléments présentés relativement à ces effets aux


développements qui suivront au sujet de la non rétroactivité de la loi, il sied de relever que
l’abrogation expresse d’une norme ne comporte pas automatiquement abrogation tacite de ces
mesures d’exécution. Ces dernières ne seront abrogées que soit par une disposition de la
norme nouvelle les visant expressément, soit par leur inconciliabilité avec les dispositions de
la norme nouvelle, soit de par leur abrogation expresse ou tacite opérée par les dispositions
des mesures d’exécution de la norme nouvelle.

L’abrogation d’une norme est définitive, qu’il s’agisse d’abrogation expresse ou


tacite. De la sorte, une norme ancienne, abrogée tacitement par les dispositions d’une norme
nouvelle, ne s’applique plus de nouveau lorsque cette dernière est, à son tour, abrogée.

Par ailleurs, la ratification d’un traité directement applicable, n’entraîne point


abrogation, mais simple suspension des normes internes antérieures, inconciliables avec ses
termes, durant la période pendant laquelle le traité est en vigueur490.

2. La caducité

Certaines circonstances, qui ont accompagné l’édiction d’une norme, apparaissent


comme n’étant pas sans rapport avec la décision de l’établir. Cependant, la plupart du temps,
ces circonstances n’ont constitué qu’une occasion d’intervention avec cette conséquence que
leur disparition est sans effet sur la force obligatoire de la norme.

488
J. FALYS, op. cit., p. 50.
489
Ibidem, pp. 121 et 122.
490
Ibidem, pp. 122 et 123.
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Néanmoins, parfois ces circonstances constituent la raison d’être de la norme qui, bien
que conçue en termes généraux, ne visait qu’à y répondre. Dans ce cas, leur disparition
entraîne alors la caducité de la norme491.

La caducité est donc l’état de non-valeur auquel se trouve réduit un acte, qui était
pourtant initialement valable, du fait que la condition dont dépendait son efficacité n’existe
plus par l’effet d’un évènement postérieur492.

II. L’interprétation de la loi

A. La notion d’interprétation de la loi

L’interprétation précède logiquement l’application de la règle de droit. Avant de


l’appliquer, il convient de l’interpréter. Lorsqu’un texte est clair, cette opération, qui consiste
dans l’interprétation, se réalise sans difficulté. Cependant, il ne va pas de même quand le
texte est obscur ou formulé de manière très générale. Dans ce cas, l’interprète doit dégager la
signification exacte de la règle, malgré l’obscurité qui l’entoure493. Interpréter une règle de
droit c’est en définir le sens et la portée494. Différentes doctrines en rapport avec
l’interprétation des lois ont été développées pour rechercher et découvrir le sens et la portée
d’une règle de droit.

B. Les doctrines relatives à l’interprétation de la loi

A la suite de l’apparition de grands codes, trois écoles relatives à l’interprétation des


lois se sont développées.

1. L’école de l’exégèse

Au lendemain du Code civil français de 1804 et pendant la majeure partie du XIXe


siècle, la méthode exégétique s’est trouvée à l’honneur. Le prestige dont jouissait le Code
Napoléonien était à la base de l’idée que seule la volonté du législateur est source de droit et
que cette volonté est toute entière contenue dans le texte qui l’exprime. L’interprétation a été
ainsi entièrement dominée par le souci de trouver dans le texte la volonté du législateur.
491
Ibidem, p. 122.
492
G. CORNU (dir.), op. cit., p. 142.
493
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., p. 44.
494
J. RENAULD cité par J. FALYS, op. cit., p. 170.
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La doctrine de l'école de l’exégèse peut être résumée en trois grandes règles :


 Quand une loi est claire, il ne faut pas en éluder la lettre sous prétexte d’en
pénétrer l’esprit. C’est le principe d’une interprétation grammaticale ou
littérale des textes.
 Si le texte semble obscur ou incomplet, il faut retrouver la pensée du
législateur en recourant aux travaux préparatoires, aux précédents historiques
et aux procédés logiques de raisonnement. C’est le principe d’une
interprétation historique et logique.
 Si le doute persiste toujours, l'interprète fera appel aux principes généraux du
droit et à l’équité en vue de retrouver les considérations de justice, d’utilité et
de raison qui à l’époque ont dû guider le législateur495.

2. L’école historique ou évolutive

Cette école est également qualifiée de sociologique. A la fin du XIXe siècle, des
critiques de plus en plus nombreuses avaient été formulées à l’encontre de l’école de
l’exégèse à laquelle on reprochait de faire du droit l’objet d’une «géométrie» sans attache
avec les réalités sociales. Une nouvelle doctrine s’était alors développée et considérait le droit
comme une création continue de la société.

La méthode historique prônée par cette école est fondée sur l’idée que le texte possède
une existence propre à partir du moment où il sort des mains de son auteur. Ce qui importe
dès lors, ce n’est pas tellement de retracer la volonté du législateur de l’époque que les
exigences actuelles du milieu social. Le texte se réduit ainsi à une formule dont le sens doit
pouvoir s’adapter aux exigences nouvelles de la société. C’est à l’interprète que revient la
tâche d’adapter la règle496.

Deux tendances se sont dessinées dans cette école : la tendance historique et la


tendance pragmatique ou fonctionnelle. La tendance historique se force de reconstituer la
pensée qu’aurait eue vraisemblablement le législateur, s’il avait connu, à son temps, le
problème posé. Quant à la tendance pragmatique, elle se demande non point ce que le

495
J. FALYS, op. cit., pp. 170 et s. ; F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., pp. 45-46.
496
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., p. 46.
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législateur aurait fait à son temps, mais plutôt elle essaye de faire dire au texte légal tout ce
qu’il est possible et utile qu’il dise compte tenu des difficultés nouvelles.

Cependant, cette école présente le danger de prendre avec la loi des libertés
inadmissibles et de consacrer ainsi des situations dans lesquelles le droit serait laissé à
l’arbitraire des juges ou à leur discrétion497.

3. L’école scientifique

François Gény, qui est l’un des premiers à avoir réagi contre les excès de l’école de
l’exégèse, n’a pas suivi la tendance de l’école historique jugée trop excessive. Il a préconisé
une nouvelle théorie fondée sur l’idée que la loi doit être respectée, selon l’intention de son
auteur, mais uniquement dans ce que le législateur a réellement voulu. De la sorte,
l’interprète retrouve une liberté complète dès qu’il est confronté à une règle douteuse ou
obscure. Il lui appartient d’élaborer alors lui-même la solution convenable en appliquant les
principes de la libre recherche scientifique, c’est-à-dire en s’inspirant des règles
fondamentales en matière d’élaboration du droit, des nécessités sociales et des exigences du
bien commun498.

C. Les méthodes d’interprétation

1. La méthode linguistique

La méthode linguistique, appelée également méthode textuelle ou grammaticale est


celle qui consiste à analyser les éléments constitutifs essentiels du texte à interpréter pour leur
donner l’extension et la compréhension qu’ils ont habituellement. Ces éléments sont les
substantifs, les verbes, les adjectifs et les adverbes. Dans cette méthode, on procède
également à l’analyse de diverses associations et relations entre ces différents concepts 499.

2. La méthode systématique

La méthode systématique qualifiée aussi de méthode logique ou de méthode


structuraliste consiste à dégager la signification d’un texte à l’aide de son contexte législatif.

497
J. FALYS, op. cit., p. 173.
498
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., pp. 46-47.
499
P. DELNOY, Eléments de méthodologie juridique. 1. Méthodologie de l’interprétation juridique. 2.
Méthodologie de l’application du droit, 3e éd., Bruxelles, Larcier, Collection de la Faculté de droit de
l’Université de Liège, 2008, p. 155, n° 47.
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Le texte est éclairé par le contexte juridique dans lequel il se situe. Ainsi, le sens d’une règle
peut être dégagé en partant de la place qu’elle occupe dans un texte, car son objet, même s’il
n’est pas indiqué, n’est pas, en principe, différent de celui du titre sous lequel il se situe. Cette
méthode dépasse la simple analyse de la structure logique des règles dans la mesure où elle
consiste également à comprendre une règle d’après l’économie générale de la loi dans
laquelle elle se trouve, c’est-à-dire d’après d’autres règles de la même loi, voire même
d’après les idées sur base desquelles la loi a été votée500.

3. La méthode historique

La méthode historique est celle qui consiste à dégager la signification et /ou la portée
d’un texte en le replaçant dans le contexte de sa genèse. Ce contexte est constitué des
événements historiques et des dispositions qui ont précédé le texte devant faire l’objet
d’interprétation. Le recours à cette méthode se justifie par le fait que plusieurs textes sont le
produit de l’histoire501.

4. La méthode téléologique

La méthode téléologique a pour objet d’éclairer un texte par le but que le législateur
poursuit à travers lui502.

5. La méthode sociologique

La méthode sociologique consiste à éclairer un texte en tenant compte du contexte


sociologique de sa naissance ou de son application, c’est-à-dire tout ce qui fait l’état d’une
société à un moment donné (les courants idéologiques, les besoins sociaux, l’état des mœurs
et de la culture, la conception des rapports économiques, etc.). Le mot « sociologique » est
pris dans un sens large. On considère que dans un système juridique, les lois sont le produit et
le reflet notamment des idéologies dominantes, de la culture, des us et coutumes, des rapports
sociaux et économiques dont il importe de tenir compte pour dégager la compréhension et
l’extension originelles des concepts503.

500
Ibidem, pp. 165, 166 et 167, n° 48.
501
Ibidem, pp. 171 et 173, n° 49.
502
Ibidem, p. 175, n° 50.
503
Ibidem, pp. 178 et 180, n° 51.
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D. Les sources d’interprétation

On distingue quatre sources d’interprétation de la loi : l’interprétation authentique,


judiciaire, administrative et doctrinale.

1. L’interprétation authentique

C’est l’interprétation faite par l’auteur même de la règle de droit504. Ainsi,


l’interprétation authentique des lois n’appartient qu’au pouvoir législatif. L’interprétation
sera alors considérée comme législative, dès lors qu’elle est l’œuvre du pouvoir législatif505.
En effet, le législateur s’autorise parfois par une loi interprétative à préciser le sens d’une loi
antérieure, qui pouvait paraître ambiguë ou obscure. En pareil cas, la loi interprétative fait
corps avec la loi interprétée. Ce qui se traduit par une application rétroactive de la loi
interprétative à la date de la loi interprétée506.

2. L’interprétation judiciaire

C’est celle qui est donnée par les cours et tribunaux507. Dans notre système juridique,
ce sont principalement les cours et tribunaux qui usent du pouvoir d’interpréter les lois et les
règlements. L’interprétation judiciaire passe donc pour la principale filière de
l’interprétation508.

3. L’interprétation administrative

C’est celle qui est l’œuvre de l’Administration. Il s’agit donc de l’interprétation des
textes par les autorités administratives. C’est ainsi que les circulaires administratives ont pour
unique objet de préciser et de faire connaître aux différents services du ministère
l’interprétation officielle qu’un Ministre donne de tel ou tel texte de loi ou de tel règlement.
Ces circulaires ne créent donc pas des règles de droit.

Cette interprétation, qui est faite par l’Administration, s’impose à ses agents parce
qu’ils doivent obéissance à leurs supérieurs. Pour le juge judiciaire, une circulaire n’est

504
F. TERRE, op. cit., p. 408.
505
H. DE PAGE, op. cit., p. 252.
506
P. MALINVAUD, op. cit., p. 107.
507
H. DE PAGE, op. cit., p. 254.
508
F. TERRE, op. cit., p. 408.
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qu’une interprétation et, en conséquence, elle n’a pas de force obligatoire. Elle ne saurait
donc être invoquée devant une juridiction de l’ordre judiciaire, sinon comme une simple
référence à l’autorité administrative. Le juge est donc libre de s’écarter de l’interprétation de
l’Administration.

Toutefois, il en va différemment pour le juge administratif, lequel distingue entre les


circulaires suivant qu’elles ont ou non un caractère normatif. Si elles ne font qu’interpréter la
règle de droit, ce sont de simples circulaires interprétatives sans force obligatoire pour le juge
administratif. Elles ne sont donc pas soumises à un contrôle de légalité, sauf dans le cas où
l’interprétation serait contraire à une norme juridique supérieure. Si, à l’inverse, elles ajoutent
à la loi et la complètent, ce sont des circulaires réglementaires, qui, ayant valeur normative,
peuvent être invoquées devant le juge ou attaquées pour excès de pouvoir509.

4. L’interprétation doctrinale

C’est celle qui est fournie par les auteurs qui étudient ou commentent les lois. C’est
une interprétation scientifique510.

E. Quelques principes d’interprétation de la loi

1. Les principes d’interprétation déduits du postulat de rationalité du législateur

Il s’agit de principes suivants :


 le législateur est cohérent : il en résulte qu’il ne commande pas par une loi d’adopter
un comportement tout en l’interdisant par une autre loi;
 les pouvoirs normatifs sont normalement respectueux des règles juridiques qui
s’imposent à eux ;
 le législateur ne fait rien d’inutile : il en découle que si une loi est susceptible de
recevoir à la fois une interprétation qui ne lui confère aucune utilité et une autre qui
lui en donne une, il faut retenir cette dernière interprétation ;
 le législateur est raisonnable en ce qu’il ne commande rien d’impossible, il n’édicte
pas des dispositions qui peuvent avoir des conséquences économiques ou sociales
néfastes511.

509
P. MALINVAUD, op. cit., pp. 108-109.
510
H. DE PAGE, op. cit., p. 253.
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2. Les principes d’interprétation d’origine doctrinale ou jurisprudentielle

De l’examen des décisions de justice, il a été dégagé un certain nombre des principes
généralement mis en œuvre par les cours et tribunaux. Ces principes se présentent notamment
comme suit :
 Interpretatio cessat in claris : l’interprétation cesse lorsqu’un texte est clair. Quand un
texte est clair, il doit être appliqué selon le sens usuel des termes dont il se compose.
Un texte peut être considéré comme clair, lorsque sa rédaction est exempte
d’équivoque, lorsque l’interprétation selon le sens usuel de mot ne fait apparaître les
contradictions entre le texte et d’autres qui régissent la même matière ou des matières
connexes et enfin lorsque l’interprétation selon le sens usuel ne conduit pas à des
solutions absurdes ou injustes512. Selon donc ce principe, un texte clair ne doit pas
être interprété513.
 Ubi lex non distinguit, non distinguere debemus : lorsque la loi ne fait pas de
distinction, il ne faut pas en faire. Ce principe signifie don que lorsque la loi vise un
ensemble de cas, il est interdit d’exclure son application à certains d’entre eux514.
 Generalia specialibus non derogant : les dispositions générales ne dérogent pas aux
dispositions spéciales. A l’inverse de cette maxime, l’on est conduit à considérer que
les dispositions spéciales dérogent aux dispositions générales (Specialia generalibus
derogant).
 Ubi cessat legis ratio, ibi cessat ejus dispositio : la loi cesse, là où cessent ces
motifs515 ou encore l’esprit de la loi fixe les limites de son champ d’application. Ceci
veut dire que lorsque la loi ne trouve pas sa raison d’être dans le cas concerné, il ne
faut pas la lui appliquer516.
 Exceptio strictissimae interpretationis est : l’exception est de stricte interprétation. Il
ne faut donc pas étendre le champ d’application des dispositions exceptionnelles517.
Ceci signifie qu’il est interdit d’interpréter de façon extensive une disposition
exceptionnelle, c’est-à-dire une disposition qui déroge à une autre considérée comme

511
P. DELNOY, op. cit., pp. 181-186, n° 52.
512
F. TERRE, op. cit., p. 405.
513
P. DELNOY, op. cit., p. 191, n° 55.
514
Ibidem, p. 187, n° 55.
515
F. TERRE, op. cit., p. 409.
516
P. DELNOY, op. cit., p. 187, n° 55.
517
Ibidem, p. 188, n° 55.
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Par Jean-Petit MULUME ZIHALIRWA G1 Droit/2017-2018

principielle à la matière. Ce genre de disposition ne peut être appliqué en dehors de


limite que lui assignent les termes utilisés le législateur518.
 Favores ampliandi, odiosa sunt restringenda : il faut interpréter strictement les
dispositions qui imposent des charges aux particuliers, alors que celles qui leur sont
favorables doivent être interprétées largement519.
 Lorsqu’un texte n’est pas clair, il faut, au-delà des mots, rechercher la volonté réelle
de son auteur et s’y conformer. Il n’est donc pas admis, sous prétexte d’interprétation,
que le juge corrige la loi en ce qu’elle aurait d’inéquitable ou de l’actualiser dans la
mesure où elle paraîtrait vieillir520.

F. Le juge et le problème de lacunes

Le juge ne peut, sous peine de déni de justice, s’abstenir de trancher un litige qui lui
est soumis même en faisant valoir, à l’appui de son abstention, l’obscurité - l’insuffisance ou
le silence de la loi521. Etant donné qu’il est obligé de trancher le conflit, le juge doit combler
la lacune constatée et créer, pour le cas qui lui est soumis, la règle adéquate522. On se trouve
dans une lacune du droit positif, lorsqu’on est en présence d’une « situation concrète pour
laquelle nulle réglementation n’est prévue ni par le droit écrit, ni par le droit coutumier »523.

Il y a alors lieu de s’interroger sur la question de savoir comment combler les lacunes
de droit positif. En principe, en l’absence de texte et de coutume l’interprète est libre. Il n’est
lié ni par la jurisprudence établie, ni par la doctrine. Cependant, certains principes
gouvernent ce travail de libre recherche de l’interprète, à savoir:
 L’interprète jugera « selon les règles qu’il établirait s’il avait à faire acte de
législateur ». Ceci implique qu’il se place au point du bien commun, qui serait
celui du législateur.
 L’interprète doit maintenir, autant que faire se peut, des points de contact avec
le droit existant. Ceci l’amène à user des procédés logiques de raisonnement.
En fait, il arrive parfois que la loi renferme une règle résolvant un cas
analogue à celui qu’il s’agit de résoudre. L’interprète recourra alors, avec

518
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., p. 47-48.
519
P. DELNOY, op. cit., p. 189, n° 55.
520
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., p. 48.
521
J. FALYS, op. cit., p. 177.
522
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., p. 44.
523
J. RENAULD cité par J. FALYS, op. cit., p. 178.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 128 Université Catholique de Bukavu
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prudence et bon sens et pour autant que la matière le permette, au procédé de


l’analogie. Ainsi, au cas analogue, il apportera une solution analogue, alors
qu’au cas directement contraire, il appliquera, mais avec plus de
circonspection, encore la solution contraire (c’est l’hypothèse de l’argument a
contrario)524.

III. L’application de la loi dans le temps et dans l’espace

A. L’application de la loi dans le temps

1. La position du problème

L’étude des règles relatives à l’abrogation peut risquer de laisser penser qu’un conflit
est impossible entre deux textes qui se succéderaient dans le temps pour régler le même objet.
Le plus récent deviendrait obligatoire au moment même où l’autre cesserait de s’appliquer
sans qu’il n’y ait chevauchement entre ces textes. Cependant, sous cette apparente simplicité
se dissimile parfois de graves conflits de lois dans le temps525.

En effet, lorsqu’une loi succède à une autre, il se pose la question de savoir si et dans
quelle mesure la loi nouvelle peut ou doit régir les éléments des situations juridiques
survenues avant son entrée en vigueur. C’est la question de conflits de lois dans le temps526.
On parle de conflit de loi dans le temps lorsque deux lois d’un même Etat, dont l’une est
ancienne et l’autre nouvelle, ont, toutes, vocation à régir une même situation juridique527.

2. Les solutions possibles aux conflits des lois dans le temps

a. La non rétroactivité de la loi nouvelle

Le principe de la non rétroactivité tient en deux propositions, à savoir, d’une part, que
la loi nouvelle n’a pas d’effet rétroactif, c’est-à-dire qu’elle ne peut pas s’appliquer à des faits
qui ont été accompli avant son entrée en vigueur, et, d’autre part, qu’elle ne dispose que pour

524
J. FALYS, op. cit., p. 179 ; F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., p. 51.
525
P. MALINVAUD, op. cit., p. 115.
526
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., p. 51.
527
G. GATUNANGE, Droit international privé, Notes de cours, 2e licence, Faculté de Droit, U.C.B., 1999-
2000, inédit.
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l’avenir528. Au regard donc du principe de la non rétroactivité de la loi, la loi nouvelle n’est
applicable qu’aux situations à venir, les éléments futurs des situations nées sous l’empire de
la loi ancienne devant être régie par celle-ci. Dans ce cas la loi est d’application différée529.

Le principe de la non rétroactivité de la loi se trouve justifiée par le besoin de sécurité


juridique et de progrès social. Relativement à la sécurité juridique, il importe de faire
remarquer que le droit a notamment pour finalité d’organiser la vie en société de telle sorte
que soient assurées la paix et la stabilité sociale. Or, cela ne serait pas possible, si les actes
qui ont été accomplis et les situations qui ont été acquises conformément à la loi qui était en
en vigueur, pouvaient être remis en cause par une loi nouvelle. En outre, et particulièrement
en matière de contrat, toute décision est nécessairement prise en considération des règles de
droit applicable. Cette prévisibilité serait, dès lors, déjouée, s’il était possible de changer la
règle du jeu en cours sans avoir averti les parties concernées à l’avance. Ce besoin de sécurité
et de prévisibilité juridique conduit à privilégier le maintien des situations acquises, mais sans
qu’il ne conduise au maintien indéfini de la loi ancienne530.

Il y aura insécurité juridique, lorsque la solution d’un litige n’est pas connue, n’est pas
déterminable à l’avance, parce que cette solution n’est pas certaine, qu’elle est imprévisible.
Dans ce cas, les sujets de droit éprouveraient de profondes difficultés à établir des
prévisions ; ce qui serait source d’insécurité531. Au nom du principe de sécurité juridique, il
est exigé que les règles de droit soient claires, précises et portées à la connaissance de leurs
destinataires pour qu’ils puissent connaître les normes qui leur sont applicables532. La sécurité
juridique signifie donc, d’abord, que les sujets de droit doivent pouvoir comprendre le droit
applicable pour leur permettre d’agir avec certitude, ensuite, que le droit respecte leurs
prévisions juridiques et, enfin, qu’il ne doit pas, par son instabilité, ruiner leurs attentes533.

En ce qui concerne le besoin de progrès social, il est naturel de penser que la loi
nouvelle est meilleure que la loi ancienne ou, en tout cas, qu’elle correspond mieux à l’état

528
P. MALINVAUD, op. cit., p. 115.
529
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., p. 51.
530
P. MALINVAUD, op. cit., p. 115.
531
Y. LEROY, op. cit., p. 98, n° 96.
532
CJCE, 07 février 1991, aff. 18/89, Tagaras c/ Cour de justice cité par Y. LEROY, op. cit., p. 145, n° 142.
533
Y. LEROY, op. cit., p. 147, n° 143.
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des mœurs, aux besoins économiques et sociaux de l’époque. En fait, la loi ne peut être figée,
elle doit évoluer en fonction du contexte économique, social, psychologique, etc.534

Le principe de la non rétroactivité ne s’impose pas de manière générale au législateur.


Celui-ci dispose d’une certaine liberté d’y déroger. Mais, en réalité, il s’y conforme et sauf,
circonstance exceptionnelle, il ne l’écarte qu’à bon escient et dans le respect des critères ci-
haut mentionnés, à savoir : la sécurité juridique et le progrès social535.

b. La rétroactivité de la loi nouvelle

La loi nouvelle peut être d’application rétroactive. Dans ce cas, elle est déclarée
applicable à tous les éléments passés, présents et avenir des situations juridiques nées sous
l’empire de la loi ancienne ainsi qu’à toutes les situations à venir.

Au regard du principe de rétroactivité de lois, on établit une distinction entre les lois
normalement rétroactives et les lois expressément rétroactives. Les lois normalement
rétroactives comprennent notamment les lois pénales douces et les lois interprétatives.
Les lois pénales douces sont celles qui modifient une infraction ou qui diminuent la peine
encourue ou suppriment l’infraction dans un sens favorable aux personnes considérées
comme délinquantes. On considère que loin de porter atteinte à la stabilité sociale, elles
apportent plutôt un mieux-être conforme tant à l’intérêt général qu’aux intérêts particuliers. Il
est alors considéré comme étant juste et normal que soit appliquée non pas la loi ancienne
dont les pénalités ont été jugées excessives, mais la loi nouvelle considérée comme meilleure.
On parle, dans ce cas, de la rétroactivité in mitius de la loi pénale536.

Le législateur est libre d’édicter des lois expressément rétroactives, mais sous deux
réserves:
 cette liberté est écartée en matière pénale, car la non rétroactivité à valeur de principe
constitutionnel. La Constitution de la RDC dispose à cet égard que « Nul ne peut être
poursuivi, arrêté, détenu ou condamné qu’en vertu de la loi et dans les formes qu’elle
prescrit. Nul ne peut être poursuivi pour une action ou une omission qui ne constitue
pas une infraction au moment où elle est commise et au moment des poursuites. Nul

534
P. MALINVAUD, op. cit., p. 115.
535
Ibidem, p. 116.
536
Ibidem, pp. 119 et 120.
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ne peut être condamné pour une action ou une omission qui ne constitue pas une
infraction à la fois au moment où elle est commise et au moment de la condamnation.
Il ne peut être infligé de peine plus forte que celle applicable au moment où
l’infraction est commise »537 ;
 cette liberté est encadrée dans les autres matières, puisqu’il ne peut adopter des
dispositions rétroactives « qu’en considération d’un motif d’intérêt général suffisant
et sous réserve de ne pas priver de garanties légales des exigences
constitutionnelles538 ».

c. L’application immédiate de la loi nouvelle

La loi nouvelle peut également être d’application immédiate. Dans ce cas, elle est
appliquée uniquement aux éléments futurs des situations juridiques survenues avant son
entrée en vigueur ainsi qu’aux situations juridiques à venir539. Tel est le cas des lois nouvelles
en matière de procédure, et particulièrement de procédure pénale. En pareil cas, les instances
sont régies par la loi ancienne jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi nouvelle et aucun acte
posé sous l’empire de la loi ancienne n’est remis en cause. Cependant, dès la mise en vigueur
de la loi nouvelle, celle-ci prend en charge la suite de toutes les procédures commencées ainsi
que toutes les procédures qui naîtront après sa promulgation540.

B. L’application de la loi dans l’espace

1. La position du problème

Chaque Etat procède son ordre juridique propre afin de régler les relations sociales qui
se déroulent sur le territoire sur lequel il exerce sa souveraineté. Toutefois, la facilité, avec
laquelle il est possible de se déplacer au-delà des frontières et d’y nouer des relations
juridiques, provoque l’apparition d’un grand nombre de situations composées d’éléments
étrangers les uns aux autres et qui conduisent parfois à des conflits de lois541.

Il y aura conflit des lois dans l’espace lorsque les lois de deux ou plusieurs Etats ont,
toutes, vocation à régir une même situation juridique. Or, ces lois ne prévoient pas toujours

537
Art. 17 de la Constitution de la RDC précitée.
538
P. MALINVAUD, op. cit., p. 121.
539
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., p. 51.
540
NYABIRUNGU mwene SONGA, Traité de droit pénal congolais
541
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., p. 53.
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les mêmes solutions à ces situations. D’où, le risque de contradiction entre les solutions
retenues par les différents législateurs concernés et, partant, l’intérêt de la détermination de
la loi compétente, c’est-à-dire de la loi de l’Etat devant régir la situation en question542.

En matière pénale, il peut se faire qu’une infraction se réalise sur plusieurs territoires,
qu’une personne commette une infraction dans un Etat et qu’elle se réfugie dans un autre
Etat. Par ailleurs, une infraction commise à l’étranger peut léser les intérêts d’un autre
Etat543.

En droit privé, il se pose également des conflits de lois dans l’espace, qui résultent de
ce que des situations juridiques présentent des éléments d’extranéité, qui les rattachent
également à des ordres juridiques étrangers. A titre d’illustration, un mariage peut être
conclu par deux personnes de nationalité différente, une personne peut être auteur ou victime
d’un délit sur un territoire étranger, une personne peut posséder un bien meuble et/ou
immeuble à l’étranger, une personne peut passer un acte juridique comme un testament ou
un contrat sur un territoire étranger, etc.544

Pour régler ces conflits des lois dans l’espace, les Etats prennent soin, à travers les
règles de conflit des lois qu’ils édictent, de déterminer les solutions applicables à chaque type
de conflit545.

2. Les principes de solutions retenus en droit congolais

a. En droit privé

Les critères de rattachement retenus par les règles de conflit des lois sont pour
l’essentiel les suivants :

- Le critère de territorialité de la loi

En vertu de ce critère, certaines règles de droit congolais s’appliquent à toutes les


situations juridiques, caractérisées par des éléments d’extranéité, qui se créent ou se déroulent

542
G. GATUNANGE, op. cit.
543
NYABIRUNGU mwene SONGA, op. cit.
544
G. GATUNANGE, op. cit.
545
G. GATUNANGE, op. cit. ; NYABIRUNGU mwene SONGA, op. cit.
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sur le territoire national congolais. Il en est ainsi des règles concernant le statut réel qui
regroupe les matières relatives aux biens meubles et immeubles, les faits juridiques, les actes
juridiques en ce qui concerne leur forme ainsi que les lois de police et de sûreté546.

- Le critère de personnalité de la loi

D’après ce critère, certaines règles de droit congolais ne régissent que les seuls nationaux,
peu importe le lieu où ils se trouvent, en RDC ou à l’étranger. Il en est ainsi spécialement des
règles relatives au statut personnel, qui regroupent les matières relatives à l’état civil, à la
capacité, au mariage, au divorce et à l’affiliation547.

- Le critère de l’autonomie de la volonté

En vertu de ce critère, certaines situations juridiques sont soumises, en tout ou en partie, à


la loi librement choisie par les parties à un acte juridique. C’est le cas, en principe, pour les
actes juridiques privés548.

b. En droit pénal

Les conflits de lois dans l’espace sont réglés en ayant recours aux critères ci-après :

- Le critère de territorialité de la loi pénale

Selon ce critère, la loi pénale s’applique à tous les individus qui ont commis une
infraction sur le territoire du pays dans lequel cette loi et en vigueur, quelle que soit leur
nationalité ou celle de leurs victimes549.

Ce critère est davantage suivi en droit congolais, qui consacre notamment


que « L’infraction commise sur le territoire de la République est punie conformément à la
loi »550 et que « En matière répressive, le Ministère public recherche les infractions aux actes
législatifs et règlementaires qui sont commises sur le territoire de la République »551.

546
Cf. Code civil congolais, Livre Ier.
547
Cf. Code civil congolais, Livre Ier.
548
Cf. Code civil congolais, Livre Ier ; F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., p. 53-54.
549
NYABIRUNGU mwene SONGA, op. cit.
550
Art.2 du Code pénal congolais précité.
551
Art. 7 du Code d’organisation et compétence judiciaire précité.
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- Le critère de personnalité de la loi pénale

On établit, à cet égard, une distinction entre la personnalité passive et la personnalité


active. On parle de la personnalité active, lorsque la loi compétente est celle du pays dont le
délinquant est ressortissant. Par contre, on parle de la personnalité passive, quand la loi
pénale applicable est celle du pays dont est ressortissant la victime d’une infraction552.

- Le système de l’universalité de la loi pénale

C’est le système qui donne pouvoir au juge du lieu d’arrestation de connaître de toutes
les infractions quel que soit le lieu de leur commission, quelle que soit la nationalité du
délinquant ou de la victime. Ce système est encore qualifié de système de compétence
universelle de la loi pénale553.

§ 3. La sauvegarde de la cohérence au sein de la loi au sens large

La production de la loi au sens large du terme est confiée à plusieurs organes


auxquels est reconnu le pouvoir d’édicter des règles unilatérales écrites. Toutefois, le
fractionnement de la fonction normative entre plusieurs autorités prescrivant chacune des
règles de natures différente dans des domaines distincts et applicables à des entités
territoriales déterminées, crée un risque d’incohérence. En effet, d’une part, certains organes
peuvent empiéter sur les compétences reconnues à d’autres et, d’autre part, deux ou plusieurs
autorités différentes peuvent donner naissance à des règles contradictoires ou
inconciliables554.

Au regard de ce qui précède, nous voudrions examiner comment éviter qu’une règle
unilatérale écrite porte atteinte à la cohérence interne de la loi et que faire lorsqu’une telle
règle porte atteinte au principe hiérarchique et à la répartition des compétences. A cet égard,
nous étudierons le principe hiérarchique et les mécanismes visant à prévenir et à réparer les
incohérences qui prennent la forme d’empiétement des compétences.

552
NYABIRUNGU mwene SONGA, op. cit.
553
NYABIRUNGU mwene SONGA, op. cit.
554
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., pp. 44, 54-55.
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I. Le principe hiérarchique

Le droit, qui a pour fonction de créer l’ordre, doit veiller à ce que toute personne
demeure dans les limites de ses compétences et éviter, autant que faire se peut, l’apparition
des règles contradictoires. L’existence du principe hiérarchique, qui postule qu’il y ait entre
les règles unilatérales écrites une certaine gradation, permet d’éviter ou de résoudre un certain
nombre d’incohérences qui prennent la forme de commandements contradictoires. Il exige,
en effet, que l’auteur d’une règle inférieure se conforme à ce que prescrit la règle de niveau
supérieur et qu’au cas où existe deux règles contradictoires de degré différent, la préférence
soit accordée à la règle de niveau supérieur555.

C’est ainsi que les sources de droit écrit se présentent dans leur hiérarchie en RDC
comme suit: la Constitution, les traités internationaux, la loi au sens strict et les règlements.
Au sein de certaines de ces catégories d’instruments juridiques, on trouve également une
hiérarchisation de différentes espèces relevant d’un même genre. Il en est ainsi notamment au
sein de la loi au sens strict et du règlement tel qu’étudié précédemment.

Le principe hiérarchique n’est, toutefois, pas en mesure d’éviter et de résoudre toutes


les formes d’incohérences. C’est ainsi qu’il est prévu également des mécanismes visant à
prévenir et à réparer les incohérences au sein de la loi au sens large.

II. Les moyens préventifs destinés à sauvegarder la cohérence interne

Pour que règne la cohérence au sein de la loi, il est prévu, d’une part, des mesures
préventives destinées à assurer le respect de la répartition des compétences et, d’autre part,
des mesures préventives destinées à assurer le respect du principe hiérarchique556.

Dans le but d’assurer le respect de la répartition des compétences entre les différentes
autorités investies du pouvoir d’édicter des règles de droit, les mécanismes suivants
sont prévus en RDC : l’intervention de la Cour constitutionnelle et celle des autorités de
tutelle.

555
Ibidem, p. 75.
556
Ibidem, p. 76.
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La Constitution de la RDC rend obligatoire le recours au mécanisme préventif


lorsqu’il s’agit d’une loi organique en prévoyant que « (…) les lois organiques ne peuvent
être promulguées qu’après déclaration par la Cour constitutionnelle obligatoirement saisie
par le Président de la République, de leur conformité à la Constitution dans un délai de
quinze jours »557. Ce mécanisme est également prévu pour n’importe quelle loi que le
Parlement pourrait adopter. A cet effet, la Constitution de la RDC dispose que « La Cour
constitutionnelle peut être saisie d’un recours visant à faire déclarer une loi à promulguer
non conforme à la Constitution par :
1. le Président de la République dans les quinze jours qui suivent la transmission à lui
faite de la loi définitivement adoptée ;
2. le Premier ministre dans les quinze jours qui suivent la transmission à lui faite de
la loi définitivement adoptée ;
3. le Président de l’Assemblée nationale ou le Président du Sénat dans les quinze
jours qui suivent son adoption définitive ;
4. un nombre de députés ou de sénateurs au moins égal au dixième des membres de
chacune des Chambres, dans les quinze jours qui suivent son adoption définitive.
La loi ne peut être promulguée que si elle a été déclarée conforme à la Constitution
par la Cour constitutionnelle qui se prononce dans les trente jours de sa saisine. Toutefois, à
la demande du Gouvernement, s’il y a urgence, ce délai est ramené à huit jours. Passé ces
délais, la loi est réputée conforme à la Constitution »558. Lorsqu’une loi, adoptée par le
Parlement, est soumise au contrôle de la Cour constitutionnelle avant sa promulgation et que
cette Cour la déclare inconstitutionnelle et, partant, l’annule, cette loi ne peut plus sortir les
effets juridiques qui se rattachent à elle559.

Par ailleurs, le juge constitutionnel est investi de la mission de régler les conflits de
compétence ou d’attribution entre entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif560, entre
l’Etat et les provinces561 et entre les ordres de juridiction562.

557
Art. 124 de la Constitution de la RDC précitée ; Cf. également l’art. 44 de la loi organique n° 13/026 du 15
octobre 2013 portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle.
558
Ibidem, art. 139 ; Voir également l’art. 47 de la loi organique n° 13/026 du 15 octobre 2013 portant
organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle.
559
Art. 51 de la loi organique n° 13/026 du 15 octobre 2013 portant organisation et fonctionnement de la Cour
constitutionnelle.
560
Art. 57 et suivants de la loi organique n° 13/026 du 15 octobre 2013 portant organisation et fonctionnement
de la Cour constitutionnelle.
561
Ibidem, art. 61 et suivants.
562
Ibidem, art. 65 et suivants.
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Quant à l’intervention des autorités de tutelle, bon nombre de règles de droit ne


peuvent être établies par des autorités décentralisées ou ne peuvent sortir leurs effets qu’après
l’intervention des autorités de tutelle. Celles-ci sont, entre autres, chargées de s’assurer que
les autorités décentralisées n’empiètent pas sur les compétences l’une de l’autre, ni sur les
compétences de l’Etat ou des provinces563. C’est ainsi qu’il est prévu, en droit congolais,
que « Le Gouverneur de province exerce, dans les conditions prescrites dans la présente loi,
la tutelle sur les actes des entités territoriales décentralisées. Il peut déléguer cette
compétence à l’Administration du territoire »564.

Pour assurer le respect du principe hiérarchique, il est prévu l’intervention des


autorités de tutelle. En effet, lorsqu’une disposition soumet l’acte de l’autorité décentralisée à
l’avis, à l’autorisation ou l’approbation de l’autorité de tutelle, celle-ci examine également le
respect par l’autorité inférieure du principe hiérarchique565.

III. Les moyens curatifs destinés à rétablir la cohérence interne de la loi

Les moyens préventifs mis en place ne permettent pas d’empêcher l’apparition des
règles qui constituent des entorses à la répartition des compétences ou qui violent le principe
hiérarchique. Ainsi, des mesures curatives ont été envisagées pour rétablir la répartition des
compétences et veiller au respect du principe hiérarchique.

Quatre techniques peuvent être utilisées en l’encontre d’une règle de droit traduisant
un empiétement des compétences de la part de son auteur. Ces techniques aboutissent soit à
la suppression pure et simple de la règle de droit, soit à éviter qu’il en soit fait application. Le
recours à la Cour constitutionnelle, la requête à une section administrative d’une Cour
d’appel ou de la Cour suprême de justice et l’intervention des autorités de tutelle peuvent
conduire à l’anéantissement de la règle de droit, lorsque le recours est jugé fondé.
L’exception illégalité, soulevée dans le cadre d’un litige porté devant les cours et tribunaux,

563
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., p. 57.
564
Art. 95 de la loi organique n° 08/016 du 07 octobre 2008 portant composition, organisation et
fonctionnement des entités territoriales décentralisées et leur rapport avec l’Etat et les provinces précitée.
565
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., p. 58.
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peut, quant à elle, entrainer le rejet de l’application d’une règle établie en violation des règles
de compétence et/ou du principe hiérarchique566.

Section 2. Les autres sources du droit objectif

§ 1. La jurisprudence

I. La notion de jurisprudence

Dans son sens large, le mot « jurisprudence » désigne l’ensemble de jugements et


arrêts rendus par les cours et tribunaux. Dans son sens plus restreint, ce mot vise toutes les
décisions juridictionnelles tranchant une même question ou un même point de droit. De
manière beaucoup plus précise, on entend par jurisprudence, au sens restreint, l’ensemble de
décisions suffisamment concordantes et unanimes rendues par les juridictions sur une
question de droit bien précise567.

Les cours et tribunaux sont des institutions qui traditionnellement et


constitutionnellement ont la mission de dire le droit, c’est-à-dire de trancher les litiges. A cet
égard, la Constitution dispose que « Le pouvoir judiciaire est indépendant du pouvoir
législatif et du pouvoir exécutif. Il est dévolu aux cours et tribunaux qui sont : la Cour
constitutionnelle, la Cour de cassation, le Conseil d’Etat, la Haute Cour militaire ainsi que
les Cours et Tribunaux civils et militaires »568. Les jugements sont des décisions rendues par
les tribunaux, alors que les arrêts sont des décisions rendues par les cours.

II. Le rôle de la jurisprudence

L’intérêt de la jurisprudence réside notamment dans le fait qu’au-delà de leur objet


premier qui est de trancher, par des décisions d’espèce, des contestations particulières, les
décisions de justice fournissent une certaine interprétation des règles de droit existantes ainsi
qu’une certaine manière de combler les lacunes.

En outre, la jurisprudence contribue souvent à l’adaptation ou à l’’actualisation des


règles de droit. En effet, au travers de leur application aux contestations qui leur sont

566
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., pp. 58 et 59.
567
Ibidem, p. 80.
568
Art.149 de la Constitution de la RDC précitée.
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soumises, les juges ajustent fréquemment ces règles à la réalité en tenant compte de
l’évolution de la société. Il en résulte que des règles, formulées dans un passé plus ou moins
lointain, peuvent, au fil du temps et en fonction de l’évolution, être comprises de manière
différente.

Les décisions de justice contribuent, par ailleurs, à préciser le contenu et le sens de


certaines règles. Il arrive, en effet, que des règles de droit soient formulées au moyen de
concepts vagues et fort larges ou que le législateur s’exprime de façon imprécise, de manière
malheureuse ou incorrecte. En pareille situation, la jurisprudence finit par fournir aux
destinataires de ces règles des indications complémentaires sur leur contenu, leur portée et
leur signification.

Dans certains cas également, les jugements et arrêts des cours et tribunaux sont
parfois créateurs des règles de droit. En fait, le juge peut être saisi d’une contestation pour la
solution de laquelle il n’existe, à son avis, aucune règle. Dans ce cas, il doit, lui-même, sous
peine de déni de justice, créer, par voie de raisonnement, la règle applicable.

Il importe de faire remarquer que le rapprochement des décisions juridictionnelles


ayant tranchées les mêmes questions de droit ou des questions analogues peut faire apparaître
que la jurisprudence est soit incertaine ou divisée, soit, au contraire, ferme et bien établie.
Une jurisprudence hésitante ou divisée est généralement source d’insécurité. Mais, au fil du
temps, la jurisprudence a tendance à s’y uniformiser sous l’effet conjugué de la prudence des
juges et du souci d’assurer la sécurité des relations juridiques et de l’action de la Cour de
cassation569. Ainsi, il est prévu que le Procureur général peut introduire un pourvoi en
cassation en toute cause et malgré l’expiration des délais dans le seul intérêt de la loi570, afin
que la Cour puisse clarifier le sens et/ou la portée d’une règle de droit. Mais, les revirements
de jurisprudence révèlent que les juges peuvent retenir différentes interprétations au sujet
d’une même règle de droit571.

569
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., p. 95.
570
Art. 36 et 48 de loi organique n° 13/010 du 19 février 2013 relative à la procédure devant la Cour de
cassation.
571
R. GUASTINI cite par Y. LEROY, op. cit., p. 349, n° 332.
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Lorsque la jurisprudence est constante et bien établie, elle fournit, aux destinataires de
la règle, une solution jurisprudentielle, c’est-à-dire qu’elle exprime un degré de probabilité de
voir les juges adopter à l’avenir la solution consacrée par le passé. Ce degré de probabilité
est, cependant, variable. Il est plus élevé si la solution a été adoptée par les juridictions
supérieures ou, à défaut, par de nombreuses juridictions. Le fait que la solution ait été
adoptée par la cour de cassation est également important d’autant plus que cette cour est la
juridiction suprême en matière judiciaire572.

III. L’autorité de la jurisprudence

On parle de l’autorité de la chose jugée lorsque, une fois les diverses voies de recours
(opposition, appel, cassation) expirées, la décision rendue ne peut plus être remise en cause.
Toutefois, cette autorité est relative en ce sens qu’elle est limitée à l’affaire qui a été jugée et
elle ne lie nullement, pour l’avenir, le tribunal qui a rendu la décision, ni a fortiori toute autre
juridiction573.

Cependant, en droit congolais et spécialement en matière de cassation, le juge


inférieur est tenu de se conformer à la décision de la Cour suprême de justice conformément
à l’ordonnance-loi régissant la procédure devant la Cour suprême de justice qui prévoit que
« (…) la juridiction de renvoi ne peut décliner sa compétence, elle est tenue de se conformer
à la décision de la Cour sur le point de droit jugé par elle »574.

Par ailleurs, la jurisprudence en général et celle de hautes juridictions en particulier,


dont la Cour de cassation, jouit, en pratique, d’une autorité qui lui confère une certaine force
en raison particulièrement des facteurs ci-après :
 l’autorité morale dont elles sont revêtues du fait qu’elles sont composées des
magistrats expérimentés et de renom ;
 le confort intellectuel que la juge trouve à adopter une manière de juger qui a
l’assentiment commun et auquel s’ajoute la crainte de voir ses décisions
sanctionnées par des juridictions supérieures ;

572
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., pp. 95 et 96.
573
P. MALINVAUD, op. cit., pp. 158 et 164.
574
Art. 37, al. 5 de l’ordonnance-loi 82-017 du 31 mars 1982 relative à la procédure devant la Cour suprême de
justice, in Les Codes Larcier. République Démocratique du Congo, Tome I, Droit civil et judiciaire, Bruxelles,
Larcier, 2003, p. 322.
574
P. MALINVAUD, op. cit., p. 35.
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 le sentiment profond que le besoin de sécurité impose de juger de la même


manière sur tout le territoire national575.

IV. Interdiction de légiférer, prohibition des arrêts de règlement et admission des arrêts
de principe

Le fait que la jurisprudence puisse créer du droit semble heurter le principe de la


séparation des pouvoirs, et notamment la séparation entre le pouvoir judiciaire et le pouvoir
législatif. En vertu de l’interdiction de légiférer et conformément au principe de la séparation
des pouvoirs, il est interdit au pouvoir judiciaire d’empiéter sur les attributions du pouvoir
législatif. Ainsi, le pouvoir judiciaire n’a pas le droit d’édicter des dispositions qui aurait
force de lois. Le pouvoir d’élaborer les lois appartient au Parlement, qui représente la volonté
générale.

En outre, il est interdit aux juges de se prononcer par voie de disposition générale et
réglementaire sur les causes qui leur sont soumises. Ainsi, il leur est interdit la pratique des
arrêts de règlement. Dès lors, une juridiction ne pourrait se prononcer par une disposition
ayant vocation à la lier elle-même, voire à en lier d’autres à l’avenir576.

Il existe aussi, dans la jurisprudence, des arrêts qualifiés d’arrêts de principe. Une
décision de justice est ainsi qualifiée lorsqu’elle prend position sur une difficulté
d’interprétation ou d’application d’une règle de droit et pose un principe susceptible de
s’appliquer à tous les cas analogues qui se présenteront dans l’avenir. On dira alors que sont
des arrêts de principe, tous les grands arrêts qui ont, pour la première fois, affirmé une
solution ou qui sont revenus sur une solution précédemment acquise. Dans ce cas, il s’agit
d’un revirement de jurisprudence. Ces arrêts sont souvent désignés par les noms des parties.
Tel est le cas de l’arrêt Franck, de l’arrêt Desmares… Des tels arrêts ne posent pas
véritablement une règle de droit nouvelle comme le Parlement pourrait le faire, ils
interprètent une règle de droit ambiguë, obscure ou lacunaire pour l’appliquer à des
circonstances de fait qui n’ont, peut-être, pas été envisagées par la loi. On dira aussi d’un tel
arrêt qu’il fait jurisprudence577.

575
Ibidem, p. 166.
576
F. TERRE, op. cit., p. 209.
577
P. MALINVAUD, op. cit., p. 162.
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V. La publication des décisions de justice

Les décisions de justice sont publiques mais elles ne sont pas publiées comme le sont
les lois ou les règlements. Leur publication, lorsqu’elle intervient, n’ajoute rien à leur valeur,
si ce n’est la publicité qui leur est ainsi donnée et qui leur permet d’être connues par les
professionnels du droit dont les magistrats eux-mêmes. Malgré l’intérêt évident qu’il y a à
connaitre la jurisprudence, celle-ci ne fait pas l’objet d’aucune publication systématique578.

Parmi les décisions faisant l’objet d’une publication, les arrêts des juridictions
supérieures sont, ce qui est normal, proportionnellement nombreux. En RDC, la publication
des arrêts de la cour suprême se fait davantage dans les Bulletins des arrêts de la Cour
suprême de justice. Les décisions des juridictions inférieures font l’objet de publication dans
diverses revues et dans certains recueils de jurisprudence. Cependant, il est fort dommage que
la jurisprudence de juridictions congolaises ne soit pas suffisamment publiée.

§ 2. La doctrine

I. La notion de doctrine

Le mot « doctrine » désigne l’ensemble de travaux consacrés à l’étude du droit. Ces


travaux contiennent les opinions, suggestions, solutions et critiques formulées par des
personnes qui les émettent et qu’on qualifie d’auteurs.

Les ouvrages de doctrine sont un lieu des rencontres privilégiées de la législation et de


la jurisprudence en ce qu’ils sont souvent le résultat d’analyses et de réflexions critiques
portant à la fois sur la règle posée par l’autorité publique et les applications qui lui sont
procurées par le juge.

La doctrine s’exprime dans les formes les plus variées telles que :
 les encyclopédies juridiques, générales ou spécialisées, qui apparaissent
comme des recueils méthodiques ou alphabétiques passant systématiquement
en revue tout ou partie du droit tel qu’il est conçu et pratiqué au moment de
leur publication ;

578
Ibidem, p. 170.
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 les traités : ce sont des ouvrages généralement volumineux consacrés à une


branche du droit ou à une institution juridique déterminée ;
 les manuels : qui sont des ouvrages plus maniables et pratiques ;
 les monographies : ce sont des ouvrages faisant une étude complète et détaillée
d’un sujet précis ou d’une question relativement limitée ;
 les articles de revues, des chroniques de jurisprudence et des notes
d’observation579.

II. Le rôle de la doctrine

La doctrine n’est pas une source formelle obligatoire du droit. Elle émane des
personnes non investies du pouvoir d’imposer des règles de droit obligatoires. Toutefois, elle
contribue à l’édification du droit. En effet, elle propose des interprétations des règles
juridiques, elle suggère des modifications à apporter à la législation existante et elle formule
des remarques sur la manière dont le juge applique les règles. Ses observations conduisent
parfois le législateur à élaborer, modifier ou compléter la législation dans le sens indiqué par
la doctrine. Les considérations émises à propos des décisions de justice, l’amènent, par
ailleurs, à exercer, quelque fois, une action décisive sur la jurisprudence. Bref, les critiques
formulées par la doctrine conduisent ou peuvent conduire à la formulation des suggestions
tendant à améliorer les règles de droit. Il s’agirait alors, dans ce cas, de l’étude de lege
ferenda580.

§ 3. La pratique

La pratique désigne des personnes et un objet. Les personnes sont les praticiens du
droit, mais pas tous. Il faut en exclure les auteurs, bien qu’ils puissent être des praticiens qui
contribuent à la formation de la doctrine, et les magistrats, qui sont à l’origine de la
jurisprudence. Pour l’essentiel, les praticiens ici visés sont les rédacteurs d’actes dont les
notaires, les membres des professions judiciaires notamment les avocats - les huissiers, les
juristes d’entreprises et même l’Administration.

On reconnaît à l’objet de la pratique plusieurs sens qui se complètent sous l’angle de


l’application du droit. C’est ainsi que l’on parle de « la mise en œuvre du droit, sa

579
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., pp. 99 et 100.
580
Ibidem, pp. 99 et 101.
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réalisation », « les usages établis par l’application du droit au sein d’une profession » comme
la pratique notariale. La pratique peut également désigner un comportement de fait, une façon
d’agir, de procéder dans une branche d’activité ou un genre d’opérations. Tel est le cas de
pratiques commerciales, financières, conventionnelles, etc.581

En droit privé, la pratique se manifeste essentiellement dans le domaine contractuel. Il


en est ainsi des clauses que certains professionnels insèrent dans les actes qu’ils rédigent ou
des montages contractuels ou encore des contrats standards. Lorsqu’une clause déterminée se
retrouve dans tous les contrats du même type ou lorsqu’un montage devient habituel ou
quand un contrat standard devient d’application générale, on considère alors qu’un usage
s’est établi582.

Bien que la pratique ne soit pas une source formelle obligatoire du droit, elle
constitue, néanmoins, une source formelle du droit positif. C’est ainsi que le droit congolais
prévoit que « Les conventions obligent non seulement à ce qui est exprimé, mais encore à
toutes les suites que l’équité, l’usage ou la loi donne à l’obligation d’après sa nature »583.

§ 4. L’équité

L’équité n’a jamais été clairement définie584. Le recours à l’équité permet au juge de
résoudre le conflit qui lui est soumis en reposant sa décision sur le bon sens et le sentiment de
justice. Dans ce cas, on dit que le juge a statué « ex aequo et bono » sur un cas d’espèce que
même la jurisprudence ou la doctrine ne permettait de résoudre585. L’équité exige que le droit
soit appliqué humainement avec bon, sens avec mesure. L’application trop stricte du droit
reste et doit toujours rester proscrite. Lorsque le juge statue en recourant à l’équité, il est
appelée à statuer « en considération des circonstances ». Historiquement, l’équité a pour
fonction d’adoucir le droit strict des origines et de suppléer à ses lacunes586.

581
P. MALINVAUD, op. cit., p. 177.
582
Idem
583
Art. 34 du décret du 30 juillet 1988 relatif au contrat et aux obligations contractuelles précité.
584
H. DE PAGE, op. cit., p. 23.
585
J. MIGABO KALERE, op. cit.
586
H. DE PAGE, op. cit., pp. 24-25.
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L’équité est reconnue comme source de droit en droit congolais. Ainsi, le recours à
l’équité est notamment prévu par l’article 34 du décret du 30 juillet 1988 relatif au contrat et
aux obligations contractuelles précité.

Section 3. Les sources matérielles du droit

§ 1. La notion de sources matérielles du droit

Les sources matérielles sont encore qualifiées des facteurs du droit. Il s’agit de forces
qui conçurent à la formation du droit587. Les sources matérielles tirent leur nom du fait
qu’elles fournissent aux règles leurs matières. Ce sont donc des causes de l’émergence d’un
ordre juridique588.

S’il est vrai que les règles de droit édictées par le législateur sont voulues par lui, il
convient, cependant, de faire remarquer que cette volonté n’est pas purement arbitraire. En
effet, les gouvernants doivent établir des règles qui, en principe, sont désirées et qui seront
respectées589. A cet effet, les règles édictées par le législateur sont motivées par des facteurs
divers dont le législateur devrait tenir compte. Si ce dernier cherchait à imposer une volonté
contraire à ces facteurs, son œuvre risquerait de déboucher sur un échec, car une loi édictée,
dans pareil cas, serait vite négligée ou contestée et risquerait de tomber dans l’oubli590.

§ 2. Les facteurs du droit

Cette étude n’a pas la prétention d’examiner tous les facteurs du droit, elle n’est donc
pas exhaustive. Parmi les facteurs du droit figurent notamment :

I. Le droit naturel

Cf. les développements présentés antérieurement.

II. Les règles religieuses

Cf. les développements présentés antérieurement.

587
G. RIPERT, Les forces créatrices du droit, 2e éd., Paris, L.G.D.J., 1955, p. 71.
588
R. ROBAYE, op. cit., p. 99.
589
G. RIPERT, op. cit., p. 72.
590
J. MIGABO KALERE, op. cit.
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III. Les règles morales

Cf. les développements présentés antérieurement.

IV. Les facteurs économiques

Outre les développements déjà présentés à ce sujet, particulièrement à l’occasion de


l’étude des sciences économiques comme science auxiliaire du droit, faisons remarquer qu’il
y a des éléments économiques qui peuvent constituer au tant des valeurs à prendre en compte
lors de l’élaboration de la règle de droit. En effet, le droit doit s’adapter aux structures
économiques, lesquelles résultent non seulement du comportement social, mais aussi de la
règle de droit elle-même dont l’objet consiste également à organiser l’économie selon un
modèle déterminé, libéral ou autoritaire, ainsi que les échanges dans le cadre de ce modèle591.

V. Les facteurs politiques

Le droit organise évidemment le pouvoir politique, il subit également l’influence de la


politique. Ceci explique notamment que les conditions de mode d’élaboration de la loi ne
soient point les mêmes partout et que le droit positif diffère d’un Etat à l’autre, qu’il évolue
avec le temps, qu’il accueille le changement qui marque le progrès des sociétés. En raison
des interactions inévitables entre le droit et la politique, le droit ne peut refuser d’accueillir
le choix politique d’une société à un moment donné de son histoire592.

VI. La tradition

Il s’agit de la tradition dans les comportements sociaux, dans les croyances et dans les
aspirations. On ne saurait brusquement rompre cette traduction dans certains types de
sociétés demeurées traditionnelles, vivant ainsi sur l’acquis du passé, et évoluant d’une
façon très lente. Mais, l’évolution ne se fait pas de la même façon dans tous les domaines du
droit. S’il est vrai qu’une législation qui rompt avec la tradition peut parfois provoquer un
changement des mœurs, il y a, cependant, un risque d’ineffectivité d’une règle non adoptée à
l’état de mœurs593.

591
C. LARROUMET, op. cit., p. 83.
592
J. MIGABO KALERE, op. cit.
593
C. LARROUMET, op. cit., pp. 83-84.
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VII. Le sentiment de l’opinion publique

Le législateur doit tenir compte du sentiment de l’opinion publique ou, pour employer
le langage de M. Duguit, de l’état de conscience de la masse des individus. L’opinion
publique intervient comme l’un des facteurs des exigences du bien commun. En fait, tous les
législateurs ont reconnu plus ou moins la nécessité d’adapter le droit au sentiment populaire.
Ils ont bien senti que leur œuvre demeurerait fragile, si elle heurtait trop violement les idées
et les mœurs des membres de la société594.

594
J. DABIN, La philosophie de l’ordre juridique positif spécialement dans les rapports de droit privé, Paris,
Librairie du recueil Sirey, 1929, pp. 223, 224 et 232.
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Chapitre 4. L’ORDONACEMENT DES REGLES DE DROIT

Le droit positif est le droit de la société civile. Plusieurs sociétés civiles coexistent au
sein de la communauté humaine. Parmi ces sociétés civiles, on trouve les Etats qui sont, de
nos jours, la forme la plus élaborée et aussi la plus habituelle de la société civile. Il existe
également des sociétés supranationales telles que l’Union Européenne, l’Union africaine. Il
y a, enfin, la société internationale qui se trouve en gestation.

A chacune de ces sociétés, correspond un droit positif qui se présente généralement


sous la forme d’un ensemble systématiquement organisé des normes juridiques, c’est-à-dire
sous la forme d’un ordre juridique. On distingue ainsi les ordres juridiques nationaux ou
internes, les ordres juridiques communautaires et un ordre juridique international.

Cet ordonnancement du positif de chaque société civile est le résultat d’une triple
opération de systématisation : le classement des concepts utilisés pour la formulation des
éléments des règles (hypothèse et sanctions), l’assemblement organique des règles, elles-
mêmes, en institutions juridiques et en branches du droit et le regroupement des règles de
droit sous l’égide des principes généraux du droit595.

Section 1. Le classement des concepts et des catégories

§ 1. Les concepts

La réduction du nombre de règles de droit en facilite le maniement par les sujets de


droit et les juges. Il n’est dès lors que normal que le juriste cherche à diminuer la masse des
hypothèses, des solutions et des sanctions en disposant pour des groupes d’hypothèses et en
établissant des catégories de sanctions. Si la matière s’y prête, il y aboutira en procédant
alors à des groupements des concepts, opérés selon la méthode de la répartition des
ensembles en genres et espèces. La règle énoncée pour un genre vaudra, sauf l’exception
prévue, pour chacune de ces espèces596.

L’élaboration logique du droit ne peut se faire que par l’abstraction qui permet, par le
groupement des certains éléments caractérisant une institution - un procédé - un instrument
595
J. FALYS, op. cit., p. 53.
596
Ibidem, pp. 53 et 54.
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utilisé par le droit, d’en avoir une idée très précieuse. C’est ainsi qu’est né le concept
juridique. Ce dernier est l’appréhension par le droit d’un phénomène en le dotant d’une
généralité qui recouvre de multiples applications.

Le contrat, par exemple, est un procédé qui permet la réalisation des échanges
économiques par des accords de volonté. En partant de la constatation d’une réalité qu’est
l’échange économique par la voie de la négociation, le juriste dégage le concept de
« contrat » qui n’est rien d’autre que la traduction juridique et intellectuelle de cette réalité
économique. Le concept est précis dans la mesure où un certain nombre de caractères du
contrat seront admis et les échanges économiques ne pourraient être moulés dans le concept
du contrat que s’ils présentent les éléments caractérisant le contrat. Le concept de « contrat »
est doté de généralité, car il correspond à des multiples applications particulières.

A partir de leurs éléments constitutifs, les concepts font l’objet d’une définition. Ces
définitions peuvent être énoncées par la règle de droit. C’est ainsi que le Code civil des
obligations définit le contrat. Cependant, il n’en est pas toujours ainsi. Il arrive que la règle
de droit légale utilise des concepts sans en donner la définition. Il appartient alors à ceux qui
ont pour mission d’interpréter la règle de droit, de dégager la définition du concept en
question597.

La définition d’un concept juridique doit en décrire la substance et en révéler les


éléments distinctifs. Elle doit en identifier les éléments constitutifs et caractériser les
relations qui les unissent598. Ces relations sont variables. Il peut s’agir d’un rapport de
causalité, de réciprocité, de dépendance, de condition, etc.599. Certains concepts sont définis
d’une façon rigoureuse, alors que d’autres sont flexibles, en ce qu’ils sont susceptibles d’une
appréciation subjective et évolutive. Ces derniers concepts sont parfois qualifiés de « notions
à contenu variable », flou, indéterminé600. La détermination de leur sens renvoie donc au
contexte. Il en est ainsi des notions d’équité, d’intérêt général, d’ordre public, de bonnes
mœurs, de bonne foi, de bon père de famille, de faute601.

597
C. LARROUMET, op. cit., p. 186.
598
J.-L. BERGEL, op. cit., p. 197, n° 184.
599
Ibidem, p. 199, n° 185.
600
Ch. PERELMAN et R. VANDER ELST cités par J.-L. BERGEL, op. cit., p. 199, n° 185.
601
J.-L. BERGEL, op. cit., p. 200, n° 185.
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La représentation intellectuelle générale et abstraite des phénomènes juridiques par


des concepts qui permettent de les connaître et de les saisir concerne les personnes, les
choses, les faits, les actes, les droits, les procédés techniques, les institutions, etc.602

Le langage juridique comprend des mots purement juridiques tels que les acquêts ou
l’hypothèque, qui n’ont de sens qu’en droit, sauf si, par la suite, ils sont utilisés dans le
langage courant avec un sens dérivé. Mais, il emprunte aussi des mots au langage courant
soit en leur conservant le même sens (cas du père, de la mère), soit en leur attribuant un sens
différent (tel est le cas des meubles et immeubles)603.

§ 2. Les catégories

Les différents concepts sont regroupés en catégories en fonction de leurs affinités, de


leurs points communs604. En déterminant les catégories, il ne s’agit plus d’étudier chaque
phénomène juridique en soi, mais plutôt de le comparer aux autres pour l’en rapprocher ou
l’en distinguer. On regroupe dans une même catégorie les entités qui sont les plus
profondément semblables et, de ce fait, sont soumises à un même régime juridique. On
rapproche ainsi les diverses espèces du même genre, en les opposant à des situations
différentes. Les notions et les situations juridiques sont regroupées dans des catégories en
prenant en compte leurs caractères communs, malgré les différences qui existent entre elles.
Dès lors, les diverses catégories se différencient les unes des autres par les différences entre
les traits communs des éléments qui les composent et ceux des autres catégories605.

Ces catégories manifestent un degré de généralité plus grande. Un concept doté d’une
très grande généralité peut lui même constituer une catégorie. Ainsi, le contrat est un
concept, comme précisé ci-haut, mais il est aussi une catégorie en ce sens qu’il y a plusieurs
espèces de contrats qui n’ont pas tous les mêmes traits communs ; chaque espèce correspond
à un concept plus précis que le concept général de contrat. C’est ainsi qu’on procède à une
classification des contrats. On distingue ainsi notamment les contrats à titre onéreux, les
contrats à titre gratuit. Chaque espèce peut également elle-même correspondre à une sous-
catégorie de contrat. Les relations particulières entre deux personnes procédant d’un accord

602
Ibidem, p. 195, n° 181.
603
P. JESTAZ, Le droit, 3e éd., Paris, Dalloz, Connaissance du droit, 1996, p. 80.
604
C. LARROUMET, op. cit., p. 186.
605
J.-L. BERGEL, op. cit., pp. 203 et 206, n° 189, 190 et 193.
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de volonté vont venir s’insérer dans ces sous-catégories, chacune de ces relations
correspondant à un concept déterminé, différent d’un autre. Mais si le contrat constitue une
catégorie, celle-ci vient également s’insérer dans une catégorie plus large. En effet, il y a
d’autres rapports d’obligation que ceux qui sont créés par un contrat. Ainsi, lorsque celui qui
a causé un dommage à autrui est tenu de le réparer, il naît un rapport d’obligation entre le
responsable de ce dommage (le débiteur) et la victime (le créancier). Par conséquent, le
contrat, qui est une catégorie particulière, fait partie d’une catégorie plus générale, qui est
celle des obligations, c’est-à-dire les rapports entre un créancier et un débiteur. Or, les
obligations ou droits de créance s’inscrivent aussi dans une catégorie plus vaste, à savoir les
droits patrimoniaux qui comprennent notamment aussi les droits réels. La catégorie de droits
patrimoniaux est opposée à celle des droits extrapatrimoniaux606.

En vue de leur adaptation à l’évolution sociale, les catégories juridiques sont


caractérisées par la flexibilité. Grâce à celle-ci, les catégories juridiques peuvent intégrer en
leur sein des situations juridiques nouvelles. Ainsi, elles ne doivent être ni rigides, ni
immuables, car la prolifération et l’hétérogénéité des situations nouvelles peuvent opposer
leur résistance à leur intégration dans les catégories juridiques existantes. Dans ce cas, il faut
repenser les catégories établies607.

Les catégories juridiques sont l’œuvre des juristes, ce sont leurs constructions
intellectuelles en vue d’une meilleure connaissance, d’une meilleure application du droit et
de l’amélioration du système juridique. Le recours aux catégories juridiques permet de
renforcer la rationalité et la cohérence du droit et de simplifier ce dernier608.

§ 3. La qualification

Lorsqu’on est en présence d’une situation particulière, il convient de la rattacher à une


catégorie déterminée. L’opération intellectuelle à laquelle on procède pour ce faire est la
qualification. Cette dernière consiste à habiller juridiquement une situation de fait pour la
faire entrer dans une catégorie juridique. On dit aussi que l’on détermine la nature juridique
d’une situation. En fait, déterminer la nature juridique d’une situation consiste à la faire
entrer dans une catégorie juridique dont elle doit avoir les éléments qui la caractérisent.

606
C. LARROUMET, op. cit., pp. 186-188.
607
J.-L. BERGEL, op. cit., pp. 209 et 210, n° 197 et 198.
608
Ibidem, pp. 204 et 205, n° 191 et 192.
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Par Jean-Petit MULUME ZIHALIRWA G1 Droit/2017-2018

Pour bien qualifier, il faut commencer par analyser et recenser tous les éléments de
fait de la situation. Ainsi, on en aura une vision précise et, ensuite, on procèdera à l’habillage
juridique en la faisant entrer dans telle catégorie plutôt que dans telle autre.

L’intérêt majeur de la qualification est de permettre de préciser le régime juridique


auquel sera soumise la situation qu’on qualifie, les régimes juridiques n’étant pas les mêmes,
selon qu’une situation est rattachable à telle catégorie ou à telle autre609. Ainsi, la
qualification, notamment, des personnes, des droits, des biens, des actes, des faits, des
institutions, des sanctions par leur rattachement à des catégories juridiques permet d’en
déterminer le régime juridique applicable610.

Section 2. L’assemblement organique des règles de droit

Il s’opère en deux phases : un premier regroupement se réalise au sein des institutions


juridiques et un second au sein des branches du droit.

§ 1. Les institutions juridiques

I. La notion d’institution juridique

La science juridique regroupe en une même entité organique chaque « ensemble des
normes juridiques relatives à un même fait social et tendant à une fin commune ». Chacune
de ces entités constitue une institution juridique611. Cette dernière est établie par le Droit612.

Ainsi, dans le domaine des relations de familles, l’ensemble des normes relatives au
mariage forment une institution juridique, puisque toutes ces règles, qu’elles portent sur les
rapports personnels ou pécuniaires des époux, tendent toutes à une fin commune, à savoir
l’union conjugale et l’affiliation légitime613.

609
C. LARROUMET, op. cit., p. 88.
610
J.-L. BERGEL, op. cit., p. 205, n° 191.
611
J. RENAULD cité par J. FALYS, op. cit., p. 54.
612
J.-L. BERGEL, op. cit., p. 183, n° 170.
613
J. BRETHE de la GRESSAYE et LABORDE-LACOSTE cités par J. FALYS, op. cit., p. 54.
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L’institution juridique se démarque de la règle de droit, car les règles de droit ne sont
que des éléments particuliers de l’ensemble que constituent l’institution et que cette dernière
rassemble malgré leur diversité autour d’un but et d’un esprit communs614.

L’institution juridique se distingue du statut légal, même s’ils sont proches. Lorsque
les obligations imposées par la loi au titulaire d’un droit sont importantes, on désigne
l’ensemble de ses prérogatives et obligations par l’expression « statut légal ». Le statut légal
désigne le régime juridique qui s’applique à une personne. Tel est le cas du statut d’époux, de
locataire, de propriétaire, d’employeur, de salarié, etc. Quand cet ensemble des droits et
obligations satisfait des intérêts collectifs permanents, on parle d’ « institution »615.

II. L’utilité des institutions juridiques

Chaque institution se présente comme une série des règles agencées en fonction d’une
idée fondamentale qui en constitue « le principe animateur et fédérateur »616. Ainsi, par
exemple, tout le régime de la tutelle des mineurs n’est que la mise en œuvre de l’idée
fondamentale qu’il faut protéger ces personnes contre leurs propres faiblesses et contre les
entreprises dommageables dont elle pourrait faire l’objet de la part des tiers, en ceux compris
les personnes commises à leur protection617.

Etant agencées en fonction d’un principe animateur, les règles de droit qui constituent
une institution se présentent comme une « totalité hiérarchisée » dont la clé est fournie par la
fin de l’institution et par le degré de proximité du moyen à la fin. Dans ce cas, le moyen le
plus éloigné est subordonné au moyen le plus proche et ainsi de suite. Par exemple, la loi
prescrit au tuteur de gérer, en bon père de famille, les biens du pupille. Ceci est la traduction
juridique immédiate de l’idée directrice de protection. En conséquence de cette idée, la loi
prévoit (c’est la deuxième règle subordonnée à la première) que le tuteur sera obligé de
rendre compte de la gestion. Pour éviter que le tuteur n’élude la reddition des comptes, elle
interdit tout contrat passé entre le tuteur et le mineur devenu majeur s’il n’a été précédé de la
remise d’un compte détaillé (troisième règle subordonnée) et en même temps elle sanctionne

614
J.-L. BERGEL, op. cit., p. 185, n° 172.
615
A. WEILL et F. TERRE cité par J.-L. BERGEL, op. cit., p. 185, n° 171.
616
J. DABIN cité par J. FALYS, op. cit., p. 55.
617
J. BONNECASE cité par J. FALYS, op. cit., p. 55.
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cette interdiction par la nullité relative du traité contraire à la loi(quatrième règle


subordonnée).

C’est par le fait de cette hiérarchie que les sanctions qui assortissent les règles de droit
ne peuvent être considérées isolement et abstraction faite des normes elles-mêmes. Ces
sanctions ne peuvent se présenter comme pouvant faire l’objet d’un choix opéré entre elles-
mêmes et la règle618.

Par ailleurs, un grand nombre d’institutions se prêtent à des regroupements


institutionnels plus vastes619. Ainsi, l’institution du mariage, de la filiation, de l’autorité
parentale et de l’obligation alimentaire ne sont qu’une partie d’une institution plus vaste, à
savoir la famille. Cette dernière est régie par le droit des personnes, le droit social, le droit
fiscal, le droit patrimonial, etc. D’où, les institutions juridiques se coordonnent entre elles620.

Il ressort de ce qui précède que les normes juridiques ne sont pas des règles dispersées
et indépendantes les unes des autres, en ce qu’elles s’ordonnent entre elles, se groupent, se
hiérarchisent. Dès lors, les règles de droit sont regroupées dans des ensembles organisés qui
constituent l’ordonnancement juridique d’un phénomène juridique autour d’une idée
directrice. Il s’ensuit que les institutions juridiques permettent de rassembler autour d’un
intérêt commun et d’une même inspiration des règles qui sont dispersées sous des rubriques
différentes dans des textes, mais qui sont, pourtant, complémentaires par leur finalité et
l’esprit qui les anime621. La théorie de l’institution oriente l’interprétation des règles et les
institutions juridiques contribuent à une confection harmonieuse du droit, car elles
fournissent au législateur les lignes directrices à respecter622.

III. Les caractéristiques des institutions juridiques

Les institutions juridiques se caractérisent, d’abord, par leur durabilité, puisqu’elles


supposent une certaine durée, bien qu’elles ne soient pas éternelles. Elles impliquent donc
une certaine permanence. Ainsi, la famille, les institutions politiques sont installées dans la

618
J. DABIN cité par J. FALYS, op. cit., p. 55.
619
C. Du PASQUIER cité par J. FALYS, op. cit., p. 55.
620
J.-L. BERGEL, op. cit., p. 179, n° 167 et p. 185, n° 172.
621
Ibidem, pp. 178 et 179, n° 166.
622
Ibidem, p. 180, n° 167.
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durée623 à telle enseigne que l’on dit « si les hommes passent, en général, l’institution
reste »624.

Les institutions juridiques sont également caractérisées par leur systématisme, lequel
est lié à l’organisation durable dont elles ont dotées par le droit objectif. Les institutions
juridiques supposent en vue de leur organisation un esprit fédérateur et une hiérarchie. L’idée
directrice qui les anime constitue la condition de leur cohérence et de leur homogénéité. La
finalité de l’institution juridique impose également une organisation hiérarchique de
différents éléments qui la composent625.

IV. La distinction entre les institutions-mécanismes et les institutions-organismes

A. Les institutions-organismes

Ce sont des groupements, qui ne sont pas nécessairement dotés de la personnalité


juridique, dont le statut et le fonctionnement sont régis par le droit. Il en est ainsi du
parlement, de la famille, de l’entreprise, d’un parti politique, d’un ministère, d’un
établissement public, une collectivité politique626.

B. Les institutions-mécanismes

Ce sont des faisceaux de règles qui régissent une institution-organe ou une situation
juridique déterminée par la vie sociale. Ce sont donc des ensembles organisés de règles
créées par le droit objectif627.

§ 2. Les branches du droit

La science juridique groupe les institutions en entités complexes qui vont former les
branches du droit. Une branche du droit est « un ensemble des règles de droit destinées à
régir tout un domaine spécifique des relations sociales »628.

623
Ibidem, p. 182, n° 170.
624
R. SAVATIER cite par J.-L. BERGEL, op. cit., p. 182, n° 170
625
J.-L. BERGEL, op. cit., p. 183, n° 170.
626
Ibidem, p. 181, n° 169 et p. 188, n° 175 et 176.
627
Ibidem, p. 181, n° 169 et p. 189, n° 178.
628
J. RENAULD cité par J. FALYS, op. cit., p. 55.
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La connaissance et l’étude de multiples règles de droit en vigueur dans une société


déterminée se révéleraient extrêmement difficile si le groupement rationnel de ces règles
n’avait pas été réalisé. D’après le regroupement fondé sur l'objet des règles, on établit une
distinction entre le droit public et le droit privé. Ce regroupement a été considéré comme la
« summa divisio » du droit par les romains. Cette distinction entre le droit public et le droit
privé demeure encore la plus importante. Cependant au-delà de cette distinction, il existe des
disciples mixtes qui se rattachent, selon le cas, au droit public et au droit privé629.

On entend par droit public, l’ensemble des règles de droit qui dans une société
étatique régissent l’organisation de l’Etat, l’exercice de ses différents pouvoirs et services et
les rapports de l’Etat avec les hommes qui le constituent - qui sont soumis à son pouvoir ou
bénéficient de ces services.
Le droit privé, quant à lui, se définit comme l’ensemble des règles de droit qui, à l’intérieur
d’un Etat, régissent les rapports des hommes entre eux630.

I. Le contenu de la distinction

Nous présenterons successivement les disciplines rattachées au droit public, celles


rattachées au droit privé et enfin les disciplines mixtes.

A. Les disciplines rattachées au droit public

1. Le droit constitutionnel

Le droit constitutionnel regroupe les règles de droit qui constituent la charte


fondamentale de l’organisation d’une société en Etat. Ce droit détermine la forme et la
structure de l’Etat, les principes fondamentaux relatifs à l’exercice de différents pouvoirs au
sein de l’Etat et les droits fondamentaux du citoyen au sein de cet Etat.

Les règles de droit constitutionnel sont pour la plupart inscrites en termes généraux
dans la constitution. Elles peuvent être complètes par des lois dont certaines doivent être
votées à des majorités spéciales631.

629
F. TERRE, op. cit., p. 77 ; H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., pp. 15 et 16.
630
J. RENCHON, op. cit., p. 46.
631
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 16 ; J. RENCHON, op. cit., p. 50.
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2. Le droit administratif

Il comprend les règles de droit qui régissent l’organisation et l’activité des autorités
administratives au sein de l’Etat dans leurs fonctions d’administration de la société étatique et
de prise en charge de différents services institués dans l’intérêt de la collectivité.

Les règles de droit administratif déterminent les moyens et les limites de l’action de
l’administration centrale, des administrations décentralisées (provinces, communes, etc.) et
des services publics décentralisés. Elles fixent également le statut des fonctionnaires de
l’Administration et le régime applicable aux biens et aux actes de l’administration. Elle
réglemente aussi le contrôle auquel est soumise l’Administration.

Les règles de droit administratif sont relativement éparses. Certaines d’entre elles se
retrouvent dans la Constitution, d’autres dans des lois particulières et dans une multitude de
règlements et d’autres découlent de la jurisprudence des juridictions administratives632.

3. Le droit fiscal

Il comporte des règles qui fixent les modalités suivant lesquelles les individus doivent
contribuer aux charges publiques. Ces règles organisent la perception par l’Etat des impôts
prélevés sur les biens ou sur l’activité des citoyens pour financer les charges et les dépenses
de l’Etat. Le droit fiscal appartient au droit public puisqu’il réglemente les rapports des
particuliers avec l’Etat dans l’exercice de sa fonction de perception d’impôts.

Au sein du droit fiscal, on distingue les règles qui gouvernent les impôts directs et
celles qui sont applicables aux impôts indirects. Les impôts directs sont les impôts prélevés
directement sur la base des situations durables. Il en est ainsi des revenus périodiques des
citoyens (impôts des personnes physiques prélevés sur les revenus professionnels,
immobiliers, mobiliers, etc.) ou des revenus des sociétés (impôts des sociétés ou impôts des
personnes morales).
Les impôts indirects sont les impôts qui sont prélevés indirectement lors de
l’accomplissement occasionnel par les personnes physiques ou par des personnes morales
d’un certain nombre d’actes ou d’opérations soumis à l’impôt (vente des marchandises,

632
J. RENCHON, op. cit., pp. 50 et 51 ; H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 17.
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prestation de service, vente d’un immeuble, donation d’un immeuble, dévolution d’une
succession, etc.). Tel est le cas de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), du droit
d’enregistrement, etc.

Les principes fondamentaux du droit fiscal sont prévus dans la Constitution par souci
de protection des droits fondamentaux des citoyens633.

4. Le droit des finances publiques

Le droit des finances publiques est l’ensemble des règles régissant les ressources et les
dépenses de l’Etat, des collectivités publiques et des services publics634. Ce droit règle toutes
les opérations relatives au trésor public : organisation des budgets, tenue de la comptabilité,
emprunts, etc.635

5. Le droit pénal et la procédure pénale

Au sens large du terme, le droit pénal, qualifié encore de droit criminel par certains
auteurs, comprend le droit pénal au sens strict et le droit de la procédure pénale636.

a. Le droit pénal

Il regroupe les règles juridiques qui définissent les comportements humains, qui
constituent des infractions ainsi que les peines et mesures de sûreté qui les assortissent637.

La Constitution prévoit deux principes fondamentaux en matière de droit pénal : le


principe de la légalité des incriminations et le principe de la légalité des peines638. Les règles
de droit pénal se trouvent contenues principalement dans le Code pénal ainsi que dans des
lois particulières. Le Code pénal est divisé en deux livres. Le premier correspond à la partie
du droit pénal intitulé « droit pénal général ». Il énonce les règles applicables à l’ensemble
des infractions et des sanctions. Le second correspond à la partie du droit pénal intitulé
« droit pénal spécial ». Il énonce un certain nombre d’infractions particulières (comme les

633
Idem
634
P. COURBE, op. cit., p. 14.
635
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 17.
636
J. FALYS, op. cit., p. 57.
637
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 19.
638
Cf. article 17 de la Constitution de la RDC précitée.
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infractions contre la sûreté de l’Etat, contre les personnes, contre les biens, etc.) et détermine
les sanctions applicables à ces différentes infractions639.

Etant donné que le droit de punir est réservé à l’Etat et qu’il est exercé à son nom par
des organes étatiques, certains rattachent cette branche de droit au droit public. D’autres
auteurs insistent sur le fait que la victime jouit des prérogatives importantes qui vont jusqu’ à
contraindre le Ministère public à exercer l’action publique. Ils font également observer que
de nombreux textes de droit pénal sanctionnent des atteintes aux droits et intérêts des
particuliers. Ainsi, ils soulignent le lien du droit pénal avec le droit privé640.

b. La procédure pénale

Elle est encore qualifiée de droit judiciaire pénal. Elle règle le fonctionnement de la
justice pénale. Le droit de la procédure pénale définit les règles selon lesquelles les
infractions sont recherchées et sanctions prévues par le droit pénal appliquées aux auteurs de
ces infractions641.

6. Le droit de la sécurité sociale

Il regroupe les règles qui organisent la prise en charge par la collectivité d’un certain
nombre de risques sociaux tels que la maladie, l’invalidité, le chômage, l’accident du travail,
la vieillesse, la maternité et les charges familiales qui affectent ou sont susceptibles d’affecter
l’existence de chaque homme642.

Ce droit fait partie du droit public parce que la sécurité de l’existence humaine est
organisée et prise en charge par l’Etat, qui s’est progressivement substitué à la solidarité
familiale et à l’aide privée des œuvres caritatives.

Ce droit constitue avec le droit du travail une discipline plus vaste qu’on appelle
actuellement « le droit social »643.

639
J. RENCHON, op. cit., p. 54.
640
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 19.
641
J. FALYS, op. cit., p. 57.
642
J. RENCHON, op. cit., p. 56.
643
Ibidem, pp. 57 et 58.
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7. Le droit public de l’économie

Ce droit regroupe les règles par lesquelles l’Etat intervient directement ou


indirectement dans l’organisation, la gestion et le contrôle des activités économiques.

Le droit public de l’économie a contribué à « publiciser » des relations qui à l’origine


étaient de droit privé en faisant de l’Etat un des partenaires de la vie économique. Cette
publicisation démontre la « fragilité » de la distinction entre droit public et droit privé644.

8. Le droit international public

Il comprend les règles qui régissent, dans un ordre juridique international, d’une part
les relations entre les Etats qui appartiennent à cet ordre juridique et, d’autre part, le statut -
les pouvoirs et le mode de fonctionnement des institutions internationales créées au sein de
cet ordre. Tel est le cas de l’ONU dans l’ordre juridique mondial, de l’Union européenne
dans l’ordre juridique européen créé par les Etats membres de cette organisation 645 et de
l’Union africaine.

B. Les disciplines rattachées au droit privé

1. Le droit civil

Il est la branche principale et fondamentale du droit privé dont il constitue ce qu’on


appelle « le droit commun ». Le droit civil constitue le droit commun des rapports entre les
particuliers en ce sens que de nombreux concepts ou règles qui sont les siens ont imprégné et
imprègnent encore l’ensemble du système juridique.

Originairement, le droit civil (jus civile) s’identifiait avec le droit privé, parce qu’il
était constitué par l’ensemble des règles de droit qui régissaient les relations d’intérêt privé
qui se nouaient entre les membres de la société, c’est-à-dire entre les particuliers646.
Cependant, avec le développement du commerce et des relations de travail, la matière des
transactions commerciales d’abord, celle du travail professionnel ensuite se sont détachées du
droit civil pour former des ensembles autonomes. Ainsi, le champ d’application du droit civil

644
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 17.
645
J. RENCHON, op. cit., pp. 79 et 80.
646
Ibidem, p. 60.
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est actuellement limité à la partie du droit privé qui réglemente seulement la vie privée et les
relations des hommes à l’exception des relations relevant du droit commercial et du droit de
travail647.

Le droit civil est lui-même subdivisé en différentes branches du droit correspondant


aux différentes catégories de situations ou de relations juridiques dont il assure la
réglementation648. Ce droit comprend :
 le droit des personnes : qui règle la condition juridique des individus ;
 le droit de la famille : qui traite du mariage et de la parenté sur le plan
personnel et patrimonial ;
 le droit des biens : qui classe les biens et définit les droits que les individus
peuvent acquérir sur les choses ;
 le droit des obligations : qui régit les engagements d’une personne à l’égard
d’une autre ;
 le droit des sûretés : qui régit la manière de se garantir contre le risque
insolvabilité d’un débiteur649.

2. Le droit commercial

Il régit les actes que la loi qualifie d’actes de commerce ainsi que les commerçants
dans l’exercice de leurs activités professionnelles.

La particularité du droit commercial par rapport au droit civil se marque


essentiellement par l’existence des tribunaux de commerce, la simplification des règles de
preuve et le fréquent recours à l’arbitrage650.

Les règles de droit commercial sont inscrites dans le Code de commerce (décret du 2
août 1913 relatif aux commerçants et à la preuve des engagements commerciaux), qui a subi
de profondes modifications au cours des années. Des nombreuses lois particulières sont
venues s’y ajouter. Avec l’intégration de la RDC dans l’OHADA (Organisation pour

647
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 18.
648
J. RENCHON, op. cit., p. 61.
649
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 18.
650
Ibidem, p. 19.
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l’harmonisation du droit des affaires en Afrique), les règles de ce droit communautaire


s’appliqueront également dans ce pays.

3. Le droit du travail

Il régit les relations individuelles et collectives de travail qui s’établissent entre les
employeurs privés et les travailleurs salariés placés sous leur autorité651. Mais, dans le cas de
la RDC, ce droit régit également les travailleurs des services publics de l’Etat qui sont
engagés en vertu d’un contrat de travail.

A cet effet, le Code du travail dispose que « Le présent Code est applicable à tous les
travailleurs et à tous les employeurs, y compris ceux des entreprises publiques exerçant leur
activité professionnelle sur l’étendue de la République démocratique du Congo, quels que
soient la race, le sexe, l’état civil, la religion, l’opinion politique, l’ascendance nationale,
l’origine sociale et la nationalité des parties, la nature des prestations, le montant de la
rémunération ou le lieu de conclusion du contrat, dès lors que ce dernier s’exécute en
République démocratique du Congo. Il s’applique également aux travailleurs des services
publics de l’État engagés par contrat de travail »652.

Le droit du travail trouve sa source particulièrement dans des règles impératives


établies par le législateur et dans les règles négociées par les partenaires sociaux appelés
(convention collective de travail)653. La Constitution pose également certains principes
fondamentaux en matière de travail.

C. Les disciplines mixtes

1. Le droit judiciaire privé

Il regroupe les règles de droit qui sont applicables au fonctionnement de la justice dite
civile, c’est-à-dire à l’exercice des actions en justice par lesquelles les particuliers font valoir
ou défendre leurs droits dans des litiges privés (civils, commerciaux, sociaux), qui les
opposent à d’autres particuliers. Parmi ces règles, on trouve celles qui déterminent
l’organisation des cours et tribunaux de l’ordre judiciaire, la compétence de différentes
651
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 19.
652
Art. 1 du Code du travail congolais précité.
653
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 19.
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juridictions, le déroulement de la procédure, les recours et les voies d’exécution forcée des
décisions judiciaires.

Le droit judiciaire privé est généralement rattaché au droit privé parce qu’il contient
les règles applicables à la solution judiciaire des litiges privés. Mais, il pourrait tout autant
être rangé en droit public parce qu’il régit, en réalité, l’organisation d’un de trois pouvoirs de
l’Etat et la mise en œuvre du service public de la Justice654.

2. Le droit international privé

Il regroupe les règles de droit qui, dans un ordre juridique interne, permettent de
résoudre les problèmes spécifiques qui se posent lorsque les relations juridiques privées
nouées entre des particuliers présentent un élément d’extranéité, c’est-à-dire un élément
étranger ou international par rapport à cet ordre juridique interne655.

Le droit international a pour objet de régler les conflits de lois dans l’espace, la
condition des étrangers, les conflits de nationalités et les questions d’efficacité des jugements
et des actes administratifs étrangers656.

La dénomination de cette branche de droit qui se justifie par le fait que l’objet de la
matière est international ne doit cependant pas prêter à confusion. En effet, chaque Etat
décide, en principe, souverainement sur son territoire des solutions à apporter aux problèmes
de droit international privé. Les sources de la matière sont, dès lors, principalement
nationales, même si, pour favoriser l’harmonie des solutions, les Etats sont actuellement
invités à conclure de plus en plus des conventions internationales en la matière657.

II. La valeur de la distinction entre le droit public et le droit privé

A. Le fondement de la distinction

On considère traditionnellement que le droit public et le droit privé présentent des


différences du point de vue de :

654
J. RENCHON, op. cit., pp. 78-79.
655
Ibidem, p. 80.
656
G. GATUNANGE, op. cit.
657
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., pp. 20 et 21.
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 leur objet tel que précisé précédemment ;


 leurs sujets : le droit public régirait les personnes publiques, alors que le droit privé
s’appliquerait aux particuliers ;
 leur finalité : le but du droit public est de donner satisfaction aux intérêts collectifs de
la nation en organisant le gouvernement de celle-ci et la gestion des services publics,
alors que le but du droit privé est d’assurer au maximum la satisfaction des intérêts
individuels ;
 leur technique : le droit public est essentiellement impératif, c’est un droit des
rapports de commandement, alors que le droit privé laisse une large part à la volonté
individuelle et la plupart de ses règles ne sont pas impératives, car dit-on « le meilleur
moyen de donner satisfaction aux intérêts particuliers est de laisser la liberté aux
individus » ; c’est donc un droit des rapports d’égalité658.

B. Les critiques de la distinction entre droit public et droit privé

On a reproché à cette distinction, d’une part, d’être imprécise et, d’autre part, qu’elle
méconnaît l’interpénétration croissante des techniques respectives de droit public et de droit
privé.

Cette distinction est imprécise dans la mesure où la rigidité de cette division générale
ne pourrait s’adapter à la complexité des faits sociaux d’autant plus qu’il y a maintes
questions qui relèvent à la fois du domaine du droit public et du domaine du droit privé. Il en
est ainsi en ce qui concerne notamment le droit pénal, la procédure civile et le droit du
travail659.

L’interpénétration du droit public et du droit privé se manifeste autant par le


développement de l’ordre public en droit privé que par l’application du droit privé aux
activités de l’Etat. Relativement au développement de l’ordre public en droit privé,
soulignons que les règles de droit privé sont de plus en plus impératives à cause de
l’intervention croissante de l’Etat pour assurer le succès de sa politique dans les relations
privées. Tel est le cas d’un grand nombre de règles en droit du travail.

658
F. TERRE, op. cit., p. 74 ; P. COURBE, op. cit., p. 10.
659
F. TERRE, op. cit., p. 74 ; P. COURBE, op. cit., pp. 14 et 15.
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Quant à l’application du droit privé aux activités de l’Etat, on remarque que les
prérogatives de la puissance publiques sont souvent écartées à cause de l’intervention directe
de l’Etat dans l’économie. A travers cette intervention, l’Etat se place, pour des raisons
d’efficacité, sous l’empire du droit privé en agissant notamment comme industriel, assureur,
transporteur, banquier, constructeur, etc.660

C. La persistance de la distinction entre le droit public et le droit privé

Le droit positif conserve la distinction entre le droit public et le droit privé. Cette
conservation se traduit par certaines manifestations dont voici deux principales.

1. La distinction de deux ordres de juridiction

On distingue, à cet égard, les juridictions administratives, qui connaissent des litiges
intéressant les collectivités publiques et appliquent le droit public, de juridictions judiciaires,
qui connaissent des litiges entre particuliers et appliquent le droit privé661.

2. La distinction des règles applicables

Des très larges domaines du droit positif se rattachent au droit public (droit
constitutionnel, droit des finances publiques, etc.) ou au droit privé (droit de la famille, droit
de la responsabilité civile, etc.) sans interférence. Cette distinction est notamment telle que
les règles du droit administratif sont caractérisées par un certain particularisme même quand
elles s’inspirent d’une technique du droit privé. Il en est ainsi en ce qui concerne la propriété
des biens de l’Etat, les contrats administratifs, la responsabilité de la puissance publique,
l’action en justice, etc.662

660
P. COURBE, op. cit., p. 15.
661
Idem
662
P. COURBE, op. cit., p. 16.
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Deuxième partie : LES DROITS SUBJECTIFS

Chapitre I. LES SUJETS DE DROIT

Section 1. La notion de sujet de droit

Le sujet de droit est l’être physique ou moral qu’un ordre juridique déterminé
considère comme apte à bénéficier des prérogatives conférées par des règles de droit ou à être
soumis aux impératifs de celles-ci. Il est également qualifié en terme technique de
personne663. On appelle donc « sujet de droit ou personne », tout être, qui au sein d’un ordre
juridique, est apte à être « sujet », c’est-à-dire titulaire des droits et des obligations.

La notion de sujet de droit n’est pas à confondre avec celle d’agent juridique. Ce
dernier est l’acteur des actes et des faits de la vie juridique, c’est-à-dire des comportements
humains, qui, au sein d’un ordre juridique, sont appréhendés par la règle de droit et sont
susceptibles de faire naître, modifier, transférer ou éteindre des droits et des obligations. Il
n’existe pas nécessairement des coïncidences entre l’agent juridique et le sujet de droit en ce
sens que tout sujet de droit n’est pas nécessairement apte à être agent juridique soit parce que
tel sujet de droit ne parvient pas à accéder dans l’espace où se déploient les effets juridiques
des comportements humains, soit parce que tel sujet de droit n’a pas la possibilité, en raison
des éléments spécifiques de sa personnalité, d'y accéder par lui-même, mais seulement grâce
à l’intervention d’une autre personne qui le représentera ou, à tout le moins, l’assistera664.

Parmi les sujets de droit, on distingue les personnes physiques des personnes morales.
Les personnes physiques sont les êtres humains, tous sans exception665, tandis que les
personnes morales sont des êtres immatériels créés par l’homme comme moyen de réalisation
d’un but. Lorsqu’il s’agit de viser l’aptitude à être sujet actif ou passif de droit, on parle de
personnalité juridique666. Celle-ci est définie comme étant l’aptitude à être sujet de droit,
c’est-à-dire à être titulaire des droits et des obligations667.

663
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 178.
664
J.-L. RENCHON, Le sujet de droit …op. cit., pp. 2 et 6.
665
Cf. l’article 6 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme dispose que « Chacun a le droit à la
reconnaissance en tous lieux de sa personnalité juridique ».
666
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 178.
667
J. FALYS, op. cit., p. 274.
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Section 2. Les personnes physiques

§ 1. La durée de la personnalité juridique d’une personne physique

I. Le commencement de la personnalité

En principe, c’est à partir du moment où il accède à une vie indépendante de celle de


sa mère qu’un être humain se voit reconnaître la personnalité juridique. Mais, pour que la
naissance produise cet effet, il faut que l’enfant naisse vivant et viable.

Cette règle de tradition romaine connaît, toutefois, un tempérament. La personnalité


juridique sera reconnue à l’enfant dès le moment de la conception s’il y va de son intérêt.
Dans ce cas aussi, il faudrait que l’enfant naisse vivant et viable. Cette nuance se trouve
exprimée par l’adage latin « Infans conceptus pro nato habetur quoties de commodis ejus
agitu » (L’enfant conçu est considéré comme né chaque fois qu’il y va de son intérêt) 668.
Cette exception s’applique surtout en cas de succession.

II. La fin de la personnalité

La personnalité juridique prend fin avec la mort biologique. Cependant, le moment


qu’il convient de prendre en compte pour considérer qu’il y a mort biologique a évolué avec
le temps. En effet, l’évolution de la science médicale conduit actuellement à penser que la
mort clinique est réversible tant qu’il n’y a pas arrêt complet des fonctions cérébrales. Il en
résulte donc que, outre l’arrêt cardiaque et respiratoire persistant, le constat de la mort
suppose la réunion de trois critères : l’absence totale de conscience et d’activité motrice
spontanée, l’abolition de tous les réflexes du tronc cérébral et l’absence totale de ventilation
spontanée, qui démontrent le caractère irréversible de la destruction encéphalique669.

III. Le doute quant à l’existence de la personnalité

Nous examinerons l’absence et la disparition qui sont deux institutions proches,


puisqu’elles impliquent toutes une incertitude sur l’existence d’une personne.

668
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., p. 180.
669
P. MALINVAUD, op. cit., p. 225.
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A. L’absence

Elle est définie par la loi comme étant « la situation d’une personne disparue de son
domicile ou de sa résidence, sans donner de ses nouvelles et sans avoir constitué un
mandataire général »670. En cas d’absence, aucune circonstance particulière ne renseigne sur
le manque de nouvelles.

Ainsi, en droit, le mot « absence » n’a pas la signification que lui attribue le langage
courant. D’après ce dernier, l’absent est celui qui n’est pas présent, à un moment donné, dans
un lieu où il devrait se trouver, alors qu’en droit, l’absence se caractérise par le fait qu’une
personne a cessé de paraitre au lieu de son domicile ou de sa résidence sans qu’on ait eu de
ses nouvelles. L’absence pose notamment des problèmes en droit sur le sort du patrimoine de
l’absent et celui du mariage contracté avec lui, sur les droits des héritiers présomptifs, sur la
protection des enfants mineurs de l’absent671.

B. La disparition

C’est le cas d’une personne dont on n’a pas retrouvé le corps, mais qui se trouvait
dans une situation qui mettait sa vie en péril (naufrage, tremblement de terre, etc.)672. Le
législateur congolais dispose, à cet égard, que « La présomption de vie est détruite lorsqu’une
personne a disparu dans des circonstances telles que sa mort est certaine bien que son corps
n’ait été retrouvé »673.

En dépit de la grande probabilité de la mort, la réapparition du disparu ne saurait être


exclue. Ainsi, le législateur régit la disparition qui pose des problèmes similaires à ceux liés à
l’absence en tenant compte de cette éventualité.

670
Art. 173 du Code de la famille précité.
671
B. STARCK, H. ROLAND et L. BOYER, op. cit., pp. 387 et 388, n° 1044 et 1045.
672
Ibidem, p. 390, n° 1055.
673
Art. 174 du Code de la famille précité.
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§ 2. L’étendue de la personnalité

I. La notion de capacité juridique

La capacité est l’aptitude à avoir des droits et des obligations (capacité de jouissance)
et à les mettre soi-même en œuvre (capacité d’exercice).

II. Les sortes de capacité juridique

On établit une distinction entre la capacité de jouissance et la capacité d’exercice. La


première est reconnue à toute personne, alors que la seconde n’est pas reconnue à certaines
personnes que sont les incapables. Le législateur congolais prévoit à cet égard que « Sauf les
exceptions établies par la loi, toute personne jouit des droits civils depuis sa conception, à
condition qu’elle naisse vivante »674.

Ainsi, un incapable est une personne à laquelle la loi ne reconnaît pas la faculté de
passer des actes juridiques675. Il en résulte que certaines personnes ne peuvent exercer par
eux-mêmes leurs droits ou s’engager même si elles jouissent de la personnalité juridique,
parce qu’elles n’ont pas l’intelligence ou l’expérience nécessaire676. Cependant, la capacité
est le principe et l’incapacité, l’exception. Ainsi, le législateur dispose que « Toute personne
capable peut exercer ses droits civils conformément à la loi ou à la coutume, sauf les
exceptions établies par la loi »677.

Cependant, certains individus sont privés de la jouissance de certains droits. Ceci


signifie qu’ils ne peuvent pas les acquérir. Mais, on ne conçoit pas d’incapacité générale, car
cela reviendrai à les priver de la personnalité juridique. Il n’existe donc que des incapacités
de jouissance spéciale, qui sont en nombre restreint et d’interprétation stricte678.

III. Régimes d’incapacité

Le législateur congolais organise trois régimes de protection des incapables : le


régime de représentation, le régime d’assistance et le régime d’autorisation.

674
Art. 211 du Code de la famille précité.
675
F. TERRE, op. cit., p. 264, n° 291.
676
B. STARCK, H. ROLAND et L. BOYER, op. cit., p. 398, n° 1082.
677
Art. 212 du Code de la famille précité.
678
B. STARCK, H. ROLAND et L. BOYER, op. cit., p. 397, n° 1076-1078.
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A. Le régime de représentation

La représentation est un mécanisme juridique en vertu duquel le représentant passe


l’acte juridique au nom et pour le compte du représenté qui est la personne incapable. Les
effets juridiques de l’acte passé par le représentant ne concernent que le seul représenté. Sont
soumis à ce régime : les mineurs non émancipés et les majeurs aliénés interdits679.

B. Le régime d’assistance

C’est un régime dans lequel l’incapable peut valablement passer un acte juridique,
mais à condition d’être assisté par son curateur, qui peut exercer un droit de veto en
s’opposant à l’accomplissement de l’acte.

Sont notamment soumis à ce régime : les faibles d’esprit, les prodigues, les personnes
dont les facultés corporelles sont altérées par l’âge ou la maladie et toute personne qui le
demande680. Le tribunal ne peut placer une personne sous curatelle que pour certains actes
qu’il détermine681.

C. Le régime d’autorisation

C’est un régime dans lequel, l’incapable ne peut valablement passer un acte juridique
qu’après avoir été autorisée par la personne chargée d’assurer sa protection.
Ainsi, un mineur de 15 ans ne peut conclure un contrat de travail qu’après avoir été autorisé
par ses parents ou tuteur et l’inspecteur du travail682.

La femme mariée était également soumise à un régime d’autorisation en vertu de


Code de la famille683. Tel n’est plus le cas en raison de l’égalité consacrée entre hommes et
femmes et de l’interdiction de toute discrimination fondée sur le sexe par la Constitution de la
RDC684 et les différents instruments juridiques internationaux ratifiés par la RDC dont le
Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

679
Art. 215 du Code de la famille précité.
680
Ibidem, art. 215 et 310.
681
Ibidem, art. 313.
682
Art. 6, a) du Code du travail précité.
683
Art. 448 du Code de la famille précité.
684
Art. 11, 12 et 14 de la Constitution de la RDC précitée.
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§ 3. L’identification des personnes physiques

Des intérêts considérables s’attachent à une parfaite identification des personnes en


droit. Lorsqu’il s’agit, par exemple, de poursuivre une personne en justice, il conviendra de
s’assurer de ses nom et qualité ainsi que son domicile, auquel tous ses actes d’huissier seront
signifiés et qui détermine la compétence territoriale de la juridiction. Quand il s’agit
également de contracter avec une personne, il est indispensable s’enquérir de sa nationalité,
sa capacité, son état de célibataire - de conjoint - voire de commerçant ou de non
commerçant. Il y a donc un certain nombre d’éléments qui permettent d’identifier avec
précision toute personne. Ces éléments sont relatifs à l’état de personne, au nom, au sexe, au
domicile et à la nationalité685.

I. L’état des personnes

A. La notion d’état des personnes

Emprunté au mot latin « status »686, le terme « état » désigne, en droit, un ensemble
des qualités de caractère personnel qui permettent de distinguer un individu dans la société,
dans la famille, voire même sur le plan professionnel.

Il est possible de grouper les qualités et particularités que le droit prend en


considération dans l’individu pour y attacher des conséquences juridiques au tour de trois
pôles ou trois statuts :
 le statut de droit public : on distingue de ce point de vue le national de
l’étranger et le citoyen du non citoyen. A ces statuts s’ajoutent également des
statuts qui résultent de l’exercice des charges publiques tels que la qualité de
parlementaire ou le statut de fonctionnaire ou de militaire ;
 le statut de droit civil : c’est-à-dire la position qu’occupe l’individu dans ses
relations avec d’autres personnes privées (majeur ou mineur, sain d’esprit ou
dément) et plus précisément avec celles qui constituent la famille (état
d’époux, de parent ou d’allié) ;

685
P. MALINVAUD, op. cit., p. 245.
686
Qui signifie : action de se tenir, position, situation, manière d’être.
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 le statut professionnel : il désigne l’ensemble des qualifications ou des qualités


inhérentes à l’exercice d’une profession. Il en est ainsi du statut de
commerçant, d’enseignant, de médecin ou d’avocat.

La notion d’état des personnes, telle qu’elle vient d’être explicitée, a été envisagée
dans son acceptation la plus large. Cette expression peut aussi s’entendre selon des sens plus
restreints. Ainsi, lorsqu’on parle d’état de personne dans la pratique courante on ne vise que
les seuls éléments qui rattachent l’individu à sa famille. Par ailleurs, dans le sciage du sens
que revêt habituellement la notion d’action d’état, l’expression a acquis une signification
encore plus limitée, puisqu’elle ne désigne que la situation qui résulte de la filiation687.

B. Les caractères de l’état des personnes

L’état de personne présente les caractères suivants :


 Le caractère d’ordre public : l’état de personne est régi par des dispositions d’ordre
public, puisqu’il constitue le point de départ d’un ensemble des droits et des
obligations qui intéressent directement l’ordre social. En conséquence, ses modes
d’acquisition, d’extinction et ses conséquences échappent à la volonté des individus.
Ce caractère d’ordre public confère à l’état des personnes deux particularités : son
indisponibilité et son imprescriptibilité. L’indisponibilité de l’état de personne signifie
qu’il est impossible d’y déroger par voie des conventions entre particuliers, alors que
son imprescriptibilité fait que l’état n’est pas susceptible de s’acquérir, de se perdre
ou se modifier par le seul fait de l’écoulement du temps688.
 L’indivisibilité de l’état : qui veut dire que chacun ne peut avoir qu’un seul état et à
l‘égard de tout le monde689.

II. Le nom

A. La définition du nom

C’est l’appellation qui sert à désigner une personne dans sa vie sociale et juridique,
dans l’exercice de ses droits et l’accomplissement de ses obligations690. Ainsi, le législateur

687
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., pp. 182-183.
688
Ibidem, p.183.
689
P. MALINVAUD, op. cit., p. 252.
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congolais consacre que « Tout Zaïrois est désigné par un nom composé d’un ou de plusieurs
éléments qui servent à l’identifier »691.

B. Les éléments constitutifs du nom

Le nom est composé d’éléments ci-après :


 le nom patronymique : c’est le nom de famille, qui s’acquiert essentiellement par la
filiation ;
 le prénom : c’est l’élément d’identification qui précède le nom patronymique et qui
sert à distinguer la personne dans la famille dont elle porte le nom
 les accessoires du nom, à savoir :
 le surnom : c’est l’appellation donnée à une personne par son entourage et
sous laquelle elle est, en fait, connue ;
 le pseudonyme : c’est un nom d’emprunt choisi par une personne dans
l’exercice d’une activité particulière, notamment littéraire ou artistique ;
 les titres nobiliaires : ce sont des marques de noblesse portées par certaines
personnes692. Il en est ainsi du Mwami.

C. La nature juridique du nom

Le nom est en même temps un droit de la personnalité et une institution de police.


C’est un droit de la personnalité, car il permet à toute personne d’exercer son activité sans
risque de confusion avec une toute autre personne. Il est une institution de police civile dans
la mesure où il sert à identifier une personne693.

D. Les caractères du nom

Le nom est :
 obligatoire : en ce que toute personne doit porter un nom ;
 immuable : car il est, en principe, interdit de changer le nom autrement que
par les procédés légaux. Les deux caractères découlent du caractère
d’institution de police civile du nom ;

690
F. TERRE, op. cit., p. 287.
691
Art 56 du Code de la famille précité.
692
P. DUPONT DELESTRAINT et P. COURBE, Droit civil : les personnes, la famille et les incapacités, Paris,
Dalloz, 1990, pp. 8-11.
693
P. DUPONT DELESTRAINT et P. COURBE, op. cit., p. 11.
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 inaliénable : puisqu’il est indisponible, il est hors du commerce ;


 imprescriptible : il ne peut s’acquérir par l’usage, ni se perdre par le non-usage
prolongé. Ces deux derniers caractères résultent du caractère de droit de la
personnalité du nom694.
En outre, le nom doit être puisé dans le patrimoine culturel congolais, il ne peut
être contraire aux bonnes mœurs, ni revêtir un caractère injurieux, humiliant ou
provocateur695.

E. La protection juridique du nom

Le nom fait l’objet d’une protection sur le plan civil et sur le plan pénal à travers des
sanctions prévues à cet effet.

Sur le plan civil, en cas d’usurpation d’un nom par un tiers, le droit au nom est
protégé contre les atteintes dont il peut faire l’objet même en dehors de tout préjudice et de
toute faute. Il est notamment prévu l’action en contestation de nom. Le titulaire du nom peut
obtenir réparation de tout dommage qu’il subit du fait de l’usurpation de son nom696.

Du point de vue pénal, un certain nombre d’infractions visent à protéger le nom


contre toute usurpation697.

III. Le sexe

Le sexe constitue également un élément d’identification d’une personne. Sa


détermination ne repose plus simplement sur le seul critère morphologique. De plus en plus,
il est également tenu compte également d’autres critères, dont le critère psychologique.

IV. Le domicile et la résidence

Il est défini par la loi comme étant « Le domicile de toute personne est au lieu où elle
a son principal établissement »698.

694
Ibidem, op. cit., p. 12.
695
Art 58 du Code de la famille précité.
696
Art 67 du Code de la famille précité ; P. DUPONT DELESTRAINT et P. COURBE, op. cit., p. 12.
697
Art 69-70 du Code de la famille précité.
698
Art 161, al. 1 du Code de la famille précité.
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Le domicile n’est pas à confondre avec la résidence. Celle-ci est « le lieu où une
personne a sa demeure habituelle »699. Lorsqu’une personne n’a pas de domicile connu, la
résidence actuelle produit les effets attachés à son domicile700.

Le domicile présente un intérêt à divers points de vue :


 la signification d’un acte de procédure peut se faire à domicile ;
 la compétence d’un tribunal peut être fixée en fonction du lieu où le domicile
est situé ;
 la succession s’ouvre au dernier domicile du défunt ;
 certaines publicités destinées à renseigner des tiers se réalisent au lieu où le
domicile est situé, comme en matière de mariage ;
 le paiement d’une dette se fait, en principe, au domicile du débiteur701.

Le choix du domicile est, en principe, libre. Cependant, dans certaines situations, la


loi impose elle-même le domicile à certaines personnes. Ainsi, le législateur congolais
prévoit que « L’interdit a son domicile chez la personne qui exerce la tutelle sur lui. Le
mineur non émancipé a son domicile, selon le cas, chez ses père et mère ou la personne qui
assume l’autorité tutélaire sur lui »702.

Le domicile présente un caractère obligatoire étant donné que toute personne doit
avoir un domicile. Mais, une personne ne peut avoir qu’un seul domicile. C’est le principe de
l’unicité du domicile. A cet égard, le législateur congolais prévoit que « Nul ne peut, sauf en
cas d’élection de domicile, avoir au même moment son domicile en plusieurs lieux »703.
Toutefois, une personne peut avoir plusieurs résidences704.

Le domicile élu désigne un domicile, sans rapport avec le domicile réel, qui a été
choisi par une personne en vue de l’exécution d’un acte bien déterminé705.

699
Ibidem, art 169.
700
Ibidem, art 161, al. 2.
701
P. DUPONT DELESTRAINT et P. COURBE, op. cit., p. 13.
702
Art 166 du Code de la famille précité.
703
Ibidem, art 164.
704
Ibidem, art 171.
705
P. DUPONT DELESTRAINT et P. COURBE, op. cit., p. 16.
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V. La nationalité

Elle se définit comme « l’appartenance juridique et politique d’une personne à la


population constitutive d’un Etat »706.

D’après la Déclaration universelle des droits de l’Homme « Tout individu a droit à


une nationalité. Nul ne peut être arbitrairement privé de sa nationalité, ni du droit de
changer de nationalité »707. La Constitution de la RDC dispose, quant à elle, que « La
nationalité congolaise est une et exclusive. Elle ne peut être détenue concurremment avec
aucune autre »708.

La nationalité peut être attribuée en fonction de plusieurs critères. Elle peut


notamment l’être en raison soit de la filiation par application du principe « jus sanguinis » -
qui domine en droit congolais -, soit de la naissance sur le territoire de l’Etat concerné en
vertu du principe « jus soli »709.

La nationalité est un élément important de l’état de personne, car les étrangers ne


jouissent pas toujours, notamment en RDC, des mêmes droits que le national. S’agissant des
droits civils, l’assimilation est presque réalisée. Dans ce cadre, la loi prévoit que « L’étranger
qui se trouve sur le territoire de l’Etat indépendant du Congo y jouit de la plénitude des
droits civils. Il est protégé, dans sa personne et dans ses biens, au même titre que les
nationaux »710. En revanche, les étrangers n’ont pas, à ce jour, la jouissance des droits
civiques (droit d’élire, d’être élu ou d’être nommé à des fonctions publiques), ni de certains
droits attachés à la qualité de citoyen711, comme – par exemple – le droit d’être titulaire d’une
concession perpétuelle712.

Si les étrangers jouissent, en principe, des libertés publiques qui leur sont garanties
notamment par la Déclaration universelle des droits de l’Homme, des restrictions y sont
apportées en ce qui concerne l’entré, le séjour et l’établissement des étrangers sur le territoire
706
P. LAGARDE cité par P. MALINVAUD, op. cit., p. 269.
707
Art.15 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme.
708
Art. 10 de la Constitution de la RDC précitée.
709
P. MALINVAUD, op. cit., p. 270.
710
Art. 7 du décret du 04 mai 1895 portant Code civil des personnes, Titre II, in p. 73.
711
P. MALINVAUD, op. cit., p. 269.
712
L’article 80 de la loi du 20 juillet 1973 précitée prévoit que « La concession perpétuelle est le droit que l’État
reconnaît à une personne physique de nationalité zaïroise (…) »
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national. Toutefois, les diverses restrictions auxquelles se trouvent soumis les étrangers
peuvent être supprimées par des traités internationaux713.

Section 3. Les personnes morales

§ 1. La notion de personne morale

Les individus ne sont les seuls à se voir reconnaître la personnalité juridique. Des
entités, regroupant des biens ou des intérêts et organisées par la volonté humaine en vue d’un
but spécifique, participent également entant que telles à la vie juridique. Moyennant le
respect de certaines conditions, le système juridique reconnaît aux personnes morales, à
l’instar de personnes physiques, la qualité de sujet de droit714.

§ 2. La classification des personnes morales

Parmi les personnes morales, on distingue trois catégories: les personnes morales de
droit public, les personnes morales de droit privé et les personnes morales mixtes.

I. Les personnes morales de droit public

On les appelle encore personnes publiques. Ce sont celles qui sont créées par
l’autorité publique ou découlent de son existence même. Ces personnes jouissent des
pouvoirs propres aux fins de satisfaire un intérêt public, tantôt global tantôt spécifique715.

Ces personnes peuvent être réparties en trois catégories :


 les collectivités politiques : elles comprennent l’Etat et ses subdivisions et
forment la première catégorie. Elles exercent le pouvoir politique au sein
d’une société humaine, qui utilise notamment le procédé d’élections. La
personnalité juridique qui leur est reconnue dérive de leur qualité d’organes
essentiels à la vie politique716. En R.D.C., les subdivisions de l’Etat qui ont la
personnalité juridique sont : les provinces, les villes, les communes, les
chefferies et les secteurs. A ce titre, elles jouissent de la libre administration et

713
P. MALINVAUD, op. cit., p. 270.
714
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p.202.
715
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., p. 9.
716
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 203.
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de l'autonomie de gestion de leurs ressources humaines, économiques,


financières et techniques717.
 Les services publics personnalisés : ils constituent la deuxième catégorie. Ce
sont des organismes qui reçoivent la personnalité juridique pour gérer un ou
plusieurs intérêts publics déterminés. D’autres organismes trouvent leur
origine dans un procédé d’association et de façon particulière une association
entre pouvoirs publics.
 Les Etats, les subdivisions d’Etat et les services publics étrangers ainsi que les
organisations internationales, qui forment la troisième catégorie de personnes
publiques718.

II. Les personnes morales de droit privé

Ces personnes sont celles qui sont créées à l’initiative des particuliers719. Elles ont
pour objet des intérêts privés720.

Différents modèles de personnes morales de droit privé sont proposés par le


législateur au choix des particuliers. Ils peuvent être groupés autour de deux pôles : les
groupements de personnes (associations au sens large) et les groupements de biens
(fondations et société unipersonnelle).

A. Les groupements de personnes

Lorsque plusieurs personnes privées décident de s’associer pour poursuivre un même


objectif, elles peuvent mettre en commun leurs activités et leurs connaissances dans le but de
réaliser des bénéfices (but de lucre) ou dans un but désintéressé. On distingue ainsi les
sociétés, les associations et les syndicats. Pour acquérir la personnalité juridique, le
groupement de personnes sera tenu de se couler dans un des moules prévus par le législateur.
Il faudra faire un choix en se constituant sous la forme d’une association sans but lucratif,
d’une union professionnelle, etc.721

717
Art. 3 et 5 de la loi organique n° 08/016 du 07 octobre 2008 portant composition, organisation et
fonctionnement des Entités Territoriales Décentralisées et leurs rapports avec l'Etat et les Provinces.
718
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., pp. 203 et 204.
719
F. LEURQUIN et H. SIMONART, op. cit., pp. 140-141.
720
P. MALAURIE et L. AYNES, Droit civil : les personnes et les incapacités, 3e éd., Paris, Cujas, 1994, p. 159,
n° 159.
721
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 205.
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1. Les sociétés

Une société est constituée dans un but lucratif. Elle l’est lorsque deux ou plusieurs
personnes conviennent de mettre quelque chose en commun en vue de réaliser des bénéfices.
La recherche du profit se fera en pratiquant des actes de commerce (société commerciale) ou
des actes de nature civile (société civile)722.

Relativement au droit congolais, faisons remarquer que ce droit consacre le principe


de la commercialité par la forme en ce qui concerne les sociétés commerciales. En effet, ne
sont considérées, dans ce droit, comme des sociétés commerciales, et de façon particulière
comme des sociétés commerciales pourvues de personnalité juridique, que les sociétés qui
adoptent l’une des formes de sociétés commerciales prévues en droit congolais quel que soit
leur objet723. L’OHADA, à laquelle la RDC a adhéré, organise les sociétés suivantes : la
société en nom collectif, la société en commandite simple, la société à responsabilité limitée,
la société anonyme et le groupement d’intérêt économique, qui sont toutes dotées de la
personnalité juridique. Elle prévoit aussi le régime des sociétés de fait et des sociétés en
participation, qui ne sont pas pourvues de personnalité juridique724.

2. Les associations sans but lucratif

L’association, entendue dans un sens strict, se singularise par son objectif étranger à
toute idée de lucre. Elle se fixe, dans ce cas, comme finalité première la réalisation d’un but
725
philanthropique, scientifique, culturel, amical, etc. . Contrairement aux sociétés, les
associations ne recherchent pas des bénéfices726.

3. Les syndicats

Les syndicats sont des organisations professionnelles constituées en vue


exclusivement de l’étude, de la défense et du développement de leurs intérêts professionnels

722
Ibidem, pp. 204 et 205.
723
Art 1er du décret du Roi-souverain du 27 février 1887 sur les sociétés commerciales, in Les Codes Larcier.
République Démocratique du Congo, Tome III, Droit commercial et économique, vol. 1, Droit commercial,
Bruxelles, Larcier, 2003, p. 84.
724
Cf. Acte uniforme de l’OHADA relatif au droit des sociétés commerciales et au groupement d’intérêt
économique, adopté le 17 avril 1997.
725
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 205.
726
P. MALAURIE et L. AYNES, op. cit., p. 163, n° 389.
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ainsi que du progrès social, économique et moral de leurs membres. Il est reconnu aux
travailleurs et aux employeurs le droit de former des syndicats727.

B. Les groupements de biens

1. Les fondations

La fondation est une masse de biens qui sont affectés à une œuvre d’intérêt général et
désintéressée728. Cette œuvre peut être de caractère philanthropique, religieux, scientifique,
artistique, pédagogique, etc.

Elles sont soumises à un système de réglementation légale, elles doivent obtenir


l’approbation du Gouvernement pour fonctionner et sont placées sous le contrôle de l’autorité
publique durant toute leur existence729.

2. Les sociétés unipersonnelles

Une société unipersonnelle ou entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée est


une société dans laquelle une personne qui veut exploiter seule une entreprise dotée de
personnalité juridique, en limitant sa responsabilité, affecte certains de ses biens à son
exploitation. Le patrimoine de cette société constitue ainsi une sorte de patrimoine
d’affectation. Ce patrimoine est distinct du patrimoine de la personne qui a créé cette
entreprise730.

III. Les personnes morales de caractère mixte

On classe ici diverses personnes morales qui empruntent à la fois au droit privé et au
droit public. En effet, il existe des personnes morales qui tirent leur origine du droit public,
mais dont l’activité est régie par le droit privé et, inversement, on trouve des personnes
morales de droit privé qui présentent certains caractères des personnes morales de droit
public731.

727
Art. 230 et 237 du Code du travail précité.
728
P. MALAURIE et L. AYNES, op. cti., p. 173, n° 403.
729
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 205.
730
P. MALAURIE et L. AYNES, op. cti., pp. 174-175, n° 407.
731
Ibidem, p. 157, n° 376.
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C’est ainsi que l’Etat participe à la vie économique par l’intermédiaire des sociétés
qui peuvent revêtir soit les formes du droit privé, soit la forme d’un établissement public à
caractère industriel et commercial. Ce sont des personnes morales de droit public soumises au
droit privé732. On peut faire entrer dans cette catégorie les sociétés d’économie mixte.

Par ailleurs, certains groupements de personnes privées poursuivent des buts d’utilité
publique. Tel est le cas des ordres professionnels qui regroupent obligatoirement les membres
de certaines professions comme les avocats, les médecins, les experts- comptables, etc.733.

§ 3. La condition juridique des personnes morales

Chaque catégorie de personnes morales susmentionnées est soumise à un statut


juridique particulier. L’étude approfondie de ces réglementations spéciales relève pour les
personnes morales de droit public tantôt du droit constitutionnel, tantôt du droit administratif,
tantôt du droit international public. Quant à l‘examen du régime des personnes morales de
droit privé, il est à situer, selon le cas, dans le cadre des cours de droit civil, droit commercial
et droit du travail.

Toutefois, il existe des principes communs à l’ensemble des personnes morales et qui
s’appliquent donc, en principe, à toutes. Ils constituent un embryon de statut général des
personnes morales734. Ces principes se rapportent aux éléments ci-après :

I. L’identification de la personne morale

Les personnes morales s’identifient principalement par leurs noms. Ce nom est choisi
et ce choix est exercé en toute liberté par leurs créateurs, sous réserve du respect de certaines
règles particulières notamment en matière des sociétés commerciales. Il en est ainsi de la
règle qui interdit la concurrence déloyale découlant d’une confusion liée à l’utilisation d’un
même nom commercial.

Comme les personnes physiques, les personnes morales ont également un domicile.
Cet élément de localisation, traditionnellement dénommé « siège social» est au lieu du

732
Ibidem, p. 157, n° 377.
733
P. MALINVAUD, op. cit., pp. 236 et 237.
734
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., pp. 205 et 206.
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principal établissement d’une personne morale735. Ce siège social, et particulièrement celui


d’une société, est le lieu précisé dans le statut de cette société. Il constitue son domicile et
détermine, le plus souvent, sa nationalité736.

II. L’organisation de la personne morale

La nature abstraite de la personne morale implique qu’elle ne puisse agir, sur le plan
juridique, que par l’intermédiaire d’organes. Il s’agit de personnes physiques, qui ont reçu le
pouvoir de représenter une personne morale pour un nombre variable d’actes juridiques.
C’est dire que les actes qu’ils accomplissent dans le cadre des pouvoirs qui leur sont conférés
engagent la personne morale et elle seule. Ils ne sont point susceptibles d’entraîner une
quelconque obligation personnelle dans le chef de ceux qui les ont posés.

Pour exécuter les décisions prises par les organes, il est possible que des préposés,
c’est-à-dire des personnes qui travaillent sous l’autorité et la surveillance d’autrui, soient
engagés. Mais, contrairement aux organes, les préposés ne s’identifient pas à la personne
morale737.

III. Le patrimoine de la personne morale

Toute personne morale dispose d’un patrimoine propre. Ce patrimoine est distinct du
patrimoine personnel de chacun des membres de la personne morale738.

IV. La capacité de la personne morale

Comparée à la capacité dont peut jouir une personne physique, la capacité de la


personne morale est limitée. En réalité, toute personne morale est créée en vue d’un but
déterminé. Dès lors, le principe de spécialité postule très logiquement que la capacité ne soit
reconnue à une personne morale que dans la mesure nécessaire à la réalisation de sa fin,
c’est-à-dire dans les limites de son objet. Ainsi circonscrite, cette capacité sera, en principe,
complète739.

735
Ibidem, p. 206.
736
R. GUILLIEN et J. VINCENT, op. cit., p. 485.
737
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 207.
738
Idem
739
Idem
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V. La responsabilité de la personne morale

L’adage « Societas delinquere non potest », c’est-à-dire la société ne peut délinquer,


exprime une règle ancienne concernant la responsabilité pénale des personnes morales. En
vertu de cette règle, une personne morale ne peut être rendue responsable pénalement.
Dépourvue de volonté propre, elle ne peut - entant que telle - commettre d’infractions, ni -
partant - être sanctionnée pour pareil manquement. Dans ces conditions, l’infraction perpétrée
par l’organe ou un préposé d’une personne morale sera imputable à son auteur entant que
personne physique. Cependant, il a, plus tard, été admis la responsabilité pénale des
personnes morales et on leur applique des sanctions qui leur sont adaptées, telles que les
amendes, la fermeture, etc.

Sur le plan de la responsabilité civile, on reconnaît à la personne morale une


responsabilité directe lorsque l’un de ses organes a, dans l’exercice de ses fonctions, commis
une faute qui cause un préjudice à un tiers. Sa responsabilité sera également engagée par la
faute d’un de ses préposés qui aura entraîné un préjudice pour autrui pour autant que le fait
fautif présente un lien avec le service et ait été accompli pendant la durée de celui-ci740. La
responsabilité civile désigne l’obligation qui pèse sur une personne de réparer le dommage
qu’elle a causé à autrui741.

740
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 207.
741
G. CORNU, Vocabulaire juridique, Paris, P.U.F., 1987, p. 740.
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Chapitre II. LA CLASSIFICATION ET LE REGIME DES DROITS SUBJECTIFS

En considérant le patrimoine comme critère, les droits subjectifs se distinguent en


droits patrimoniaux et en droits extrapatrimoniaux.

Section 1. Les droits patrimoniaux

§ 1. La notion de patrimoine

Le patrimoine est défini comme l’ensemble des biens et des obligations d’une
personne envisagé comme une universalité de droit, c’est-à-dire comme une masse mouvante
dont l’actif et le passif ne peuvent être dissociés742.

Dans la conception dominante, qui rattache la notion de patrimoine à celle de


personnalité, le patrimoine apparaît à la naissance et disparaît au décès d’une personne. Il
s’ensuit que son contenu est, par essence, variable tout au long de la vie.

L’actif du patrimoine d’une personne est constitué des droits, qui sont évaluables en
argent743. Ces droits sont les droits patrimoniaux qualifiés encore de biens. Ils se subdivisent
en trois sortes. A cet égard, le législateur congolais dispose que dispose à cet égard que « Les
biens ou droits patrimoniaux sont de trois sortes : les droits de créance ou d’obligation, les
droits réels et les droits intellectuels»744.

La caractéristique du patrimoine, et ce pourquoi on le qualifie d’universalité de droit,


est que l’actif répond du passif. L’application la plus remarquable de cette corrélation est ce
qu’on appelle le droit de gage général du créancier sur les biens du débiteur745 exprimé dans
la loi comme suit : « Tous les biens du débiteur, présents et à venir, sont le gage commun de
ses créanciers et le prix s’en distribue entre eux par contribution, à moins qu’il n’y ait entre
les créanciers des causes légales de préférence »746.

742
R. GUILLIEN et J. VINCENT, op. cit., p. 385.
743
P. COURBE, op. cit., p. 74.
744
Art. 1er de la loi du 20 juillet 1973 portant régime général des biens, régime foncier et immobilier et régime
des sûretés précitée.
745
P. MALINVAUD, op. cit., p. 310.
746
Art. 245 de la loi du 20 juillet 1973 portant régime général des biens, régime foncier et immobilier et régime
des sûretés précitée.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 185 Université Catholique de Bukavu
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Ce principe de droit de gage général des créanciers signifie que le créancier impayé
peut saisir un bien quelconque du débiteur, le faire vendre et se faire payer sur le prix. Son
droit ne porte pas sur un bien déterminé, il porte sur tout ce qui, au moment de la poursuite,
appartient au débiteur.

Tous les créanciers d’un même débiteur ont ensemble le même droit de gage général
sur les biens de ce dernier. Chacun peut se faire payer sur le tout. Un créancier ne saurait être
avantagé par rapport aux autres que si sa créance est assortie d’une sûreté (privilège,
hypothèque, gage, etc.). C’est en fonction de sûretés, qui sont des causes de préférence, qu’on
oppose les créanciers chirographaires, c’est-à-dire sans garantie autre que le droit de gage
général, aux créanciers privilégiés, qui disposent de garanties en cas d’insolvabilité du
débiteur747.

Pour la doctrine classique, qui est dominante, le patrimoine se rattache à la


personnalité juridique avec laquelle il se confond. Il est un attribut de la personnalité. Selon
cette conception, le patrimoine est considéré comme la personnalité économique de l’homme,
c’est la projection pécuniaire de la personne considérée dans sa durée748.

Il découle de cette idée les conséquences suivantes :


 Seules les personnes physiques ou morales peuvent avoir un patrimoine et
réciproquement, il ne saurait y avoir de patrimoine sans une personne qui en
serait le titulaire.
 Toute personne a nécessairement un patrimoine, peu importe s’il est à un
moment donné vide de tout droit et de toute obligation ou même négatif. Il est,
pour le moins, une enveloppe, une besace riche de l’aptitude de son titulaire à
acquérir des biens ou à consentir des obligations.
 Le patrimoine étant lié indissolublement à la personne, il dure aussi longtemps
que la personnalité de son titulaire. Il en découle que le patrimoine est
intransmissible entre vifs, c’est-à-dire du vivant de son titulaire qui peut
seulement modifier son contenu en plus ou en moins. En outre, le patrimoine
ne sera transmis qu’à cause de mort, c’est-à-dire au décès pour les personnes

747
P. MALINVAUD, op. cit., pp. 310 et 311.
748
H. GAZIN cité par P. MALINVAUD, op. cit., p. 311.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 186 Université Catholique de Bukavu
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physiques et à la dissolution pour les personnes morale, ces événements


marquent la disparition de la personnalité juridique.
 Enfin, chaque personne ne peut avoir qu’un seul patrimoine. C’est le principe
de l’unité du patrimoine, qui interdit à toute personne la division de son
patrimoine en plusieurs patrimoines autonomes749.

Le droit congolais ne consacre donc pas la notion de patrimoine d’affectation. Cette


notion a eu une très grande importance dans la doctrine allemande, mais elle n’a pas été
consacrée en droit positif allemand que d’une façon limitée. D’après cette conception de
patrimoine d’affectation, indépendamment du patrimoine général, qui est l’émanation de la
personnalité juridique, ou peut envisager que l’affectation de certains biens à une activité
déterminée constitue l’actif d’un patrimoine dont le passif serait constitué par des dettes nées
dans l’exercice de cette activité. En réalité, c’est la communauté d’affectation de certains
biens à laquelle on adjoint le passif né de l’activité que suppose cette affectation qui fonde le
patrimoine. Il en résulte que seuls les éléments actifs affectés à une activité déterminée
répondent du passif créé dans le cadre de l’exercice de cette activité, à l’exclusion des autres
éléments actifs qui n’y ont pas été affectés. Ainsi, on pourrait concevoir autant de
patrimoines pour une même personne qu’elle exercice des activités différentes, chaque
patrimoine étant absolument indépendant des autres750.

§ 2. L’actif du patrimoine

Le patrimoine est une universalité. Il se trouve constitué des éléments actifs d’une
part, et des éléments passifs d’autre part. L’actif du patrimoine est constitué par les droit
patrimoniaux ou biens, alors que le passif est composé des obligations, c’est-à-dire des dettes,
qui sont des valeurs qui sortent du patrimoine pour entrer dans un autre patrimoine.

Dans ce paragraphe, nous allons particulièrement nous consacrer à l’analyse de


différentes sortes de droits patrimoniaux qui composent l’actif d’un patrimoine.

749
P. MALINVAUD, op. cit., pp. 311-312.
750
C. LARROUMET, op. cit., pp. 277-278.
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I. Les droits réels

A. La notion de droit réel

Le droit réel est celui qui porte directement sur une chose751. C’est donc le pouvoir
exercé directement par une personne sur une chose752. Les droits réels sont énumérés
limitativement et configurés par la loi. Ils ont pour objet une chose corporelle et confèrent à
leurs titulaires une maîtresse directe et immédiate sur cette chose. Par conséquent, ce qui
caractérise le droit réel est qu’il a un rapport de droit entre le sujet de droit et la chose753.

B. Les catégories de droits réels

Les seuls droits réels reconnus en droit congolais sont : la propriété, la concession
perpétuelle, les droits d’emphytéose, de superficie, d’usufruit, d’usage et d’habitation, les
servitudes foncières, le gage, le privilège et l’hypothèque754. Ces droits sont répartis en eux
catégories: les droits réels principaux et les droits accessoires755.

1. Les droits réels principaux

Ce sont ceux qui portent sur la matérialité même de la chose en sens que la chose est
placée totalement ou partiellement entre les mains du titulaire du droit. Elle est mise à sa
disposition ou à son service. Elle est utilisée ou exploitée par lui-même.

Les droits réels principaux sont subdivisés en fonction de la portée ou de l’étendue de


la mise à la disposition de la chose au profit du titulaire du droit. D’où, parmi ces droits, on
distingue le droit de propriété des autres droits réels démembrés de la propriété756.

Le droit de propriété est défini comme « le droit de disposer d’une chose d’une
manière absolue et exclusive, sauf les restrictions qui résultent de la loi et des droits réels
appartenant à autrui »757. Ce droit confère les attributs ci-après :

751
P. COURBE, op. cit., p. 74.
752
P. MALINVAUD, op. cit., p. 316.
753
J.-L. RENCHON, op. cit., p. 31.
754
Art. 1er de la loi du 20 juillet 1973 portant régime général des biens, régime foncier et immobilier et régime
des sûretés précitée.
755
J.-L. RENCHON, op. cit., p. 31.
756
Ibidem, p. 32.
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 l’usus, c’est-à-dire le droit d’user de la chose ;


 le fructus, c’est-à-dire le droit de percevoir les fruits issus de la chose
tels que les revenus, les récoltes, etc. Les fruits sont les biens produits
périodiquement et régulièrement par les choses sans altération de leur
substance ;
 l’abusus, c’est-à-dire le droit de disposer de la chose758.

Les droit réels démembrés de la propriété sont, quant à eux, les différents droits en
vertu desquels les titulaires ne bénéficient que des possibilités limitées d’utiliser ou
d’exploite la chose. En droit congolais, ces droits réels démembrés de la propriété sont : la
concession perpétuelle, le droit d’emphytéose, le droit de superficie, le droit d’usufruit, le
droit d’usage, le droit d’habitation ainsi que les servitudes foncières.
 La concession perpétuelle est « le droit que l’Etat reconnaît à une personne
physique de nationalité zaïroise de jouir indéfiniment de son fonds aussi
longtemps que sont remplies les conditions de fond et de forme prévues par la
pesante loi »759.

 L’emphytéose est « le droit d’avoir la pleine jouissance d’un terrain inculte


appartenant à l’Etat, à la charge de mettre et d’entretenir le fonds en valeur et
de payer à l’Etat une redevance en nature ou en argent »760.

 La superficie est « le droit de jouir d’un fonds appartenant à l’Etat et de


disposer des constructions, bois, arbres et autres plantes qui y sont
incorporés »761.

 L’usufruit est le droit qui confère à son titulaire le droit d’utiliser la chose et
d’en percevoir les fruits, mais non pas celui d’en disposer, qui appartient au
nu-propriétaire762.

757
Art. 14 de la loi du 20 juillet 1973 portant régime général des biens, régime foncier et immobilier et régime
des sûretés précitée.
758
R. GUILLIEN et J. VINCENT, op. cit., p. 259.
759
Art. 80 de la loi du 20 juillet 1973 portant régime général des biens, régime foncier et immobilier et régime
des sûretés précitée.
760
Ibidem, art. 110.
761
Ibidem, art. 123.
762
R. GUILLIEN et J. VINCENT, op. cit., p. 533.
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 L’usage est droit qui confère à son titulaire le droit d’utiliser la chose et d’en
percevoir les fruits, mais dans les limites de ses besoins et de ceux de sa
famille.

 Le droit d’habitation n’est qu’une variante du droit d’usage. C’est un droit réel
qui confère à son titulaire la faculté d’employer l’immeuble bâti pour son
logement personnel ou familial, mais seulement dans la mesure nécessaire à ce
logement et sans possibilité de céder ou de louer son droit763.

 Une servitude foncière est une charge imposée sur un fonds (appelé fonds
servant) pour l’usage et l’utilité d’un autre fonds (appelé fonds dominant)764.

2. Les droits réels accessoires

Les droits réels accessoires sont ceux qui servent de garantie au payement d’une
créance. Ce sont des droits accessoires en ce qu’ils sont l’accessoire d’un droit de créance.
Ils accompagnent un droit de créance dont ils constituent une « sûreté », c’est-à-dire une
garantie de l’accomplissement par le débiteur de son obligation. Ainsi, si le débiteur ne
s’exécute pas le créancier pourrait bénéficier de la valeur pécuniaire de la chose de son
débiteur en prélevant sur le prix de vente de cette chose la somme nécessaire au payement de
sa créance.

Les droits réels accessoires comprennent, en droit congolais, le privilégié,


l’hypothèque et gage.
 Le privilège est le droit que la loi reconnaît à un créancier, en raison de la
qualité de sa créance, d’être préféré aux autres créanciers sur l’ensemble des
biens de son débiteur ou sur certains d’entre eux. Tel est le cas du privilège du
trésor publie pour les dettes qu’une personne doit à l’Etat765.

763
G. CORNU (dir.), op. cit., p. 404.
764
Art. 169 de la loi du 20 juillet 1973 portant régime général des biens, régime foncier et immobilier et régime
des sûretés précitée.
765
Art. 249 de la loi du 20 juillet 1973 portant régime général des biens, régime foncier et immobilier et régime
des sûretés précitée.
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 L’hypothèque est un droit réel accessoire grevant un immeuble, qui est affecté
à l’acquittement d’une obligation766. Ce bien immeuble reste, toutefois, entre
les mains de son propriétaire. La sûreté est matérialisée par une inscription
hypothécaire prise au profit du titulaire du droit d’hypothèque dans le livre
d’enregistrement des hypothèques, sur le certificat de l’immeuble ou du droit
immobilier grevé d’hypothèque767.
 Le gage est le droit pour le créancier de se faire payer, par préférence aux
autres créanciers, lors de la vente de la chose mobilière remise par le débiteur
ou un tiers768. Le mot gage désigne également le contrat par lequel un débiteur
remet une chose mobilière à son créancier en vue de garantir le payement de la
dette. Le gage entraine, en droit civil, la dépossession du débiteur769.

C. Les effets de droits réels

Les droits réels principaux et accessoires confèrent le droit de suite et le droit de


préférence.

Le droit de suite est le droit en vertu duquel le titulaire d’un droit réel peut, pour
exercer son droit, suivre, c’est-à-dire saisir, entre les mains de toute personne, la chose qui
lui appartient ou qui est grevée d’un droit en sa faveur. C’est ainsi qu’une propriétaire d’un
immeuble peut le revendiquer contre tout détenteur.

Le droit de préférence, quant à lui, est, pour le titulaire d’un droit réel, le pouvoir
d’exercer son droit sur la chose par priorité, par préférence au titulaire d’un droit créance ou
d’un droit réel postérieur. Ainsi, par exemple, le créancier gagiste pourra se faire payer sur le
prix de vente d’un bien donné en gage par priorité à l’égard des autres créanciers du même
débiteur.

II. Les droits de créance

Appelé également droit personnel ou plus simplement obligation, le droit de créance


désigne tout rapport juridique entre deux ou plusieurs personnes en vertu duquel l’une

766
Ibidem, art. 250.
767
Ibidem, art. 264.
768
Ibidem, art. 322-324.
769
Ibidem, art. 326.
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d’elles, nommée créancier, a le droit d’exiger d’une autre personne, le débiteur, une certaine
prestation ou une abstention.

Cette prestation peut consister soit :


 dans l’obligation de « dare », c’est-à-dire l’obligation de donner, qui implique
l’obligation soit de transférer un droit, soit de constituer un droit réel ;
 dans l’obligation de « facere », c’est-à-dire l’obligation de faire, d’exécuter un acte,
une activité, un travail.

L’abstention implique une obligation de « non facere », c’est-à-dire de ne pas faire,


l’obligation de s’abstenir d’un comportement.

Du point de vue de leur origine, les droits de créance trouvent leur source soit dans un
contrat, soit dans un délit, soit dans quasi-délit soit dans un quasi-contrat770.

Du côté du créancier, l’exécution d’une prestation constitue un droit, alors que du côté
du vue du débiteur, elle est une obligation.

Contrairement aux droit réels, qui sont absolus car ils peuvent être opposés par leurs
titulaires à toute autre personne, les droits de créance sont relatifs puisqu’ils ne sont
opposables qu’aux débiteurs de manière telle qu’ils seront les seuls à pouvoir être contraints à
exécuter la prestation.

N’emportant ni droit de suite, ni droit de préférence, les droits de créance ne confèrent


aux créanciers qu’une droit de gage général sur le patrimoine de son débiteur et ne permettent
que d’appliquer la loi du concours en cas de conflit entre plusieurs créances chirographaires
saisissant771.

III. Les droits intellectuels

Le droit intellectuel consiste en un monopole d’exploitation temporaire qui porte sur


un élément immatériel, produit de la création humaine.

770
Ces différentes notions sont définies dans le chapitre sur les sources des droits subjectifs.
771
P. COURBE, op. cit.
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Cette catégorie de droits comprend les droits pécuniaires et moraux des auteurs
(écrivains, compositeurs, artistes, etc.) sur leurs œuvres, des inventeurs sur leurs découvertes
industrielles et commerciales, des dessinateurs sur leurs dessins et modèles et des producteurs
sur les signes représentatifs de leurs produits.

Ce que leurs droits intellectuels protègent de manière spécifique, ce n’est pas le


produit corporel créé par le travail de l’auteur d’une œuvre, puisque ce produit est déjà
protégé par le droit de propriété, mais plutôt l’intérêt moral et patrimonial du créateur de
façon que personne ne puisse, sans son autorisation, reproduire ou s’approprier son idée ou
son œuvre et que ce soit lui qui puisse personnellement recevoir l’honneur et disposer des
profits que son œuvre sera susceptible de produire ou de procurer772.

§ 3. Les caractères des droits patrimoniaux

Les droits patrimoniaux sont, en principe :


 cessibles : ils peuvent être cédés entre vifs, c’est-à-dire transférés d’un
patrimoine à un autre par un acte à titre onéreux ou à titre gratuit étant donné
qu’ils sont dans le commerce ;
 transmissibles : au décès d’une personne, ses droits patrimoniaux sont dévolus
à ses héritiers et légataires et s’intègrent dans leurs patrimoines ;
 saisissables : le créancier impayé a le droit de saisir ces droits en vertu de son
droit de gage général sur le patrimoine de son débiteur pour les faire vendre et
se faire payer sur le prix de la vente ;
 prescriptibles : ces droits sont susceptibles d’extinction (prescription
extinctive) et d’acquisition (prescription acquisitive) par l’effet de
l’écoulement du temps.

772
P. COURBE, op. cit.
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Section 2. Les droits extrapatrimoniaux

§ 1. La notion de droits extrapatrimoniaux

Les droits extra patrimoniaux sont des droits inhérents à la personne humaine et qui
ne sont susceptibles d’une évaluation pécuniaire. Ces droits ne sont donc pas appréciables en
argent. Ils sont hors du patrimoine.

§ 2. Les sortes de droits extrapatrimoniaux

Ces droits se subdivisent en droits publics extrapatrimoniaux et en droits privés


extrapatrimoniaux.

Les droits publics extrapatrimoniaux sont considérés comme les droits reconnus à
toute personne dans ses rapports avec l’Etat, mais qui sont aussi opposables aux personnes
privées. Parmi ces droits, on range les droits politiques (droit de vote, droit d’éligibilité, droit
à l’égalité civique et politique) et les libertés publiques telles que les libertés de penser, de
conscience, d’expression, la liberté syndicale, la liberté d’aller et de venir, la liberté de
réunion, la liberté d’association, la liberté de presse, la liberté de culte, etc.

Les droits privés extrapatrimoniaux sont, quant à eux, les droits reconnus à toute
personne dans ses relations avec les autres personnes et qui sont opposables à l’Etat, lui-
même. Les droits privés extrapatrimoniaux comprennent les droits de la personnalité et les
droits de la famille.

Les droits de la personnalité permettent à toute personne d’obtenir des autres la


reconnaissance et le respect de son individualité propre, c’est-à-dire de sa personnalité
entendue comme l’ensemble des caractéristiques physiques et morales d’une personne. Les
droits de la personnalité sont constitués des droits visant la protection de l’individualité
physique d’une personne (droit à la vie, droit à l’intégrité corporelle), des droits qui ont pour
but la protection de l’individualité morale d’une personne (droit à l’honneur et à la
considération), des droits qui poursuivent la protection de l’individualité civile d’une
personne (droit au nom, droit à l’image) et des droits tendant à la protection de la vie privée
d’une personne (droit au secret de la correspondance).
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Les droits de la famille résultent, quant à eux, de l’organisation juridique de la famille.


Ils se composent des droits découlant du mariage et de ceux résultant de la parenté.
Les droits résultant du mariage renferment les droits pour chaque époux d’obtenir
l’exécution, par son conjoint, des obligations mises à sa charge par la loi.
Les droits découlant de la parenté comprennent, entre autres, les droits des pères et mères
attachés à l’autorité parentale (droit de garde, de surveillance, d’éducation) et sur les biens de
l’enfant mineur (droit de jouissance légale, droit d’administration légale) ainsi que les droits
réciproques des ascendants et des descendants d’obtenir les aliments773.

§ 2. Les caractères des droits extrapatrimoniaux

En principe, les droits extrapatrimoniaux sont :


 incessibles : ils ne peuvent être cédés gratuitement ou moyennant une
contrepartie financière au cours de l’existence de leurs sujets de droit ;
 intransmissibles : ils ne peuvent pas être transmis à cause de mort, c’est-à-dire
qu’ils ne se transmettent pas, sauf exception, aux héritiers du sujet de droit
après sa mort. Cependant, le conjoint ou le parent du défunt acquiert le droit
de protéger la mémoire, la réputation et la pensée du défunt ;
 insaisissables : ils ne peuvent faire l’objet d’une saisie par le créancier du sujet
de droit en vue de se faire payer ;
 imprescriptibles : ils ne peuvent s’éteindre par le seul fait que leur titulaire ne
les a pas exercés pendant un certain délai appelé délai de prescription et ils ne
peuvent également s’acquérir par l’écoulement du temps.

§ 3. Les sanctions de la violation des droits extrapatrimoniaux

La violation des droits extrapatrimoniaux peut, selon le cas, entraîner des sanctions
pénales et/ou civiles.

I. Les sanctions pénales

La violation des droits extrapatrimoniaux fait l’objet des sanctions prévues par les lois
pénales diverses telles que l’emprisonnement, les amendes, etc.774
A titre d’illustration :

773
P. COURBE, op. cit., pp. 71 et 72.
774
P. COURBE, op. cit., p. 74.
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 sont punies de la peine de mort775, qui doit être considérée comme abolie
tacitement en vertu de la Constitution de la RDC776, les assassinats, les
meurtres777 et les empoisonnements778 qui sont des atteintes au droit à la vie ;
 sont punies notamment de la peine d’emprisonnement, les coups et
blessures779 et l’administration des substances nuisibles780 qui sont des
atteintes au droit à l’intégrité physique ainsi que les imputations
dommageables et les injures781 qui sont des atteintes à l’honneur ;
 sont punies notamment de la peine d’amende, la révélation du secret
professionnel782, l’attentat à l’inviolabilité du domicile783 qui constituent des
atteintes à la vie privée.

II. Les sanctions civiles

Les atteintes aux droits extrapatrimoniaux de nature privée peuvent entraîner des
sanctions qui peuvent être préventives ou réparatrices.

Un exemple des sanctions préventives consiste dans la saisie d’une publication


contenant une violation du droit à l’image ou qui constitue une atteinte à la vie privée.

Les sanctions réparatrices sont celles, à travers lesquelles, les dommages et intérêts
sont notamment alloués à la victime pour réparer le préjudice subi784.

775
A défaut pour le législateur congolais d’avoir prévu une peine de remplacement, nous estimons, à l’instar de
NYABIRUNGU mwene SONGA, que la peine de servitude pénale à perpétuité peut être, dans ce cas,
considérée comme la peine de remplacement. Cf. NYABIRUNGU mwene SONGA, op. cit.
776
L’article 61 de la Constitution dispose à cet effet que « En aucun cas, et même lorsque l’état de siège ou
l’état d’urgence aura été proclamé conformément aux articles 85 et 86 de la présente Constitution, il ne
peut être dérogé aux droits et principes fondamentaux énumérés ci-après : 1. le droit à la vie (…) ».
777
Art. 44-45 du Code pénal congolais précité.
778
Ibidem, art. 49.
779
Ibidem, art. 46-48.
780
Ibidem, art. 50.
781
Ibidem, art. 74-78.
782
Ibidem, art. 73.
783
Ibidem, art. 69-70.
784
P. COURBE, op. cit., p. 74.
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Section 3. Les limites de la distinction entre droits patrimoniaux et droits


extrapatrimoniaux

Comme pour toute classification, la différence entre ces deux catégories de droits ne
doit pas être présentée de manière radicale et absolue.

D’une part, les droits extrapatrimoniaux, même s’ils ne sont pas - entant que tels
cessibles -, sont susceptibles, lorsqu’ils ne sont pas respectés de faire naître un droit
patrimonial, tel un droit de créance. Ainsi, lorsqu’ils sont violés, les droits de la personnalité
ne pourront, en général, être réparés que par l’allocation des dommages et intérêts. Or, la
créance des dommages et intérêts est un droit patrimonial cessible et transmissible aux
héritiers.

D’autre part, les droits qui sont traditionnellement classés dans les droits patrimoniaux
peuvent, dans certaines hypothèses, présenter des caractères des droits extrapatrimoniaux. Il
existe ainsi des droits réels ou des droits de créance extrapatrimoniaux. Tel est le cas du droit
de propriété sur ce que l’on appelle « le souvenir de la famille». Ce droit est de nature
extrapatrimoniale et est soustrait au régime de la transmission successorale des droits
patrimoniaux. Il en est de même de l’obligation de fidélité entre époux, qui est un droit un
droit de créance qui consiste à exiger du conjoint qu’il s’abstienne de tout acte sexuel
extraconjugal. Mais, ce droit est de nature strictement extrapatrimoniale785. En outre, certains
biens sont insaisissable parce qu’ils sont absolument indispensables à la vie du débiteur.
Ainsi, le législateur congolais interdit la saisie des biens suivants:
 le coucher et les habits du saisi et de sa famille,
 les livres indispensables à la profession du saisi et s’il est artisan, les outils
nécessaires à son travail personnel;
 les provisions de bouche nécessaires à la nourriture du saisi et de sa famille
pendant un mois;
 une bête à corne, ou trois chèvres, ou trois moutons, au choix du saisi786.

785
J.-L. RENCHON, op. cit., pp. 12 et 14.
786
Art. 127 du Code de procédure civile, in Les Codes Larcier. République Démocratique du Congo, Tome I,
Droit civil et judiciaire, Bruxelles, Larcier, 2003, p. 281.
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Par ailleurs, certains droits intellectuels qu’on trouve dans la catégorie de droits
patrimoniaux peuvent, en réalité, comprendre des prérogatives patrimoniales et des
prérogatives extrapatrimoniales. Tel est le cas du droit d’auteur787.

787
J.-L. RENCHON, op. cit., p. 14.
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Chapitre III. LES SOURCES DES DROITS SUBJECTIFS

Si, d’une façon générale, il faut considérer que la source des droits subjectifs est à
trouver dans le droit objectif, il convient, toutefois, de s’interroger sur les situations qui, au
regard des règles générales de droit objectif, permettent d’acquérir, de transmettre ou de
perdre ces droits. En réalité, ces situations voient le jour au travers des faits juridiques au sens
large, c’est-à-dire de tous les événements de la vie sociale auxquels la règle générale de droit
objectif attache des conséquences sur le plan juridique. Dans un sens plus précis, une
distinction s’établit, au sein du concept large de faits juridiques, entre le fait juridique
proprement dit et l’acte juridique788.

Section 1. Les actes juridiques

§ 1. La notion d’actes juridiques

L’acte juridique peut être défini comme étant toute manifestation extérieure de
volonté opérée en vue de produire des effets juridiques, c’est-à-dire de faire maître, de
modifier, de transmettre ou d’éteindre une situation juridique.

En droit, l’acte juridique est souvent désigné par le seul mot « acte ». Or, ce dernier
peut revêtir deux sens différents : tantôt, il désignera l’acte juridique, lui-même, c’est-à-dire
le « negotium », l’opération juridique elle-même ; tantôt, il désignera l’acte instrumentaire,
c’est-à-dire l’écrit probatoire ou l’ « instrumentum », qui est le papier destiné à servir de
preuve de quelque chose, qui peut être soit un acte juridique, soit un fait juridique789. Nous
traiterons de l’acte pris dans le sens d’ « instrumentum » lorsque nous analyserons la preuve
en droit.

§ 2. La classification des actes juridiques

On peut opérer une classification des actes juridiques en se plaçant à différents points
de vue. On établit ainsi une distinction entre :

788
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 214.
789
J. FALYS, op. cit., pp. 201 et 202.
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I. L’acte juridique unilatéral et l’acte juridique bilatéral

Selon qu’ils sont l’expression d’une volonté unilatérale (individuelle ou collective) ou


de plusieurs volontés qui s’accordent, on distinguera l’ace juridique unilatéral de l’acte
juridique bilatéral.

L’acte juridique unilatéral est celui qui émane d’une seule volonté et qui se suffit à
elle seule en vue de produire des effets de droit. Il en est ainsi du préavis de licenciement, de
l’acceptation d’une succession, du testament, de la reconnaissance d’un effet naturel, du
permis de bâtir, etc.

L’acte juridique bilatéral, appelé encore contrat ou convention, est celui qui est
l’expression du concours de deux ou plusieurs volontés qui s’accordent en vue de produire
des effets juridiques. Tel est le cas de la vente, de la donation, du contrat du travail, du prêt,
etc.

L’acte juridique bilatéral n’est pas à confondre avec le contrat bilatéral, qualifié aussi
de contrat synallagmatique. Ce dernier est celui qui fait naître des obligations réciproques à
charge de chacune des parties. Tel est le cas de la vente, du bail. Or, un contrat peut
également être unilatéral. Un contrat est unilatéral quand il ne fait naître des obligations qu’à
charge de l’une des parties au contrat. Il en est ainsi de la donation790.

II. L’acte juridique à titre gratuit et l’acte juridique à titre onéreux

Selon que la volonté qui s’y manifeste est animée ou non d’intention purement
libérale, on distingue l’acte juridique à titre gratuit de l’acte juridique à titre onéreux.

L’acte à titre gratuit est celui dans lequel l’avantage procuré à une personne
n’implique par lui-même aucune compensation pour son auteur. On l’appelle aussi libéralité.
Cet acte procure donc à une personne un avantage sans contrepartie. Il en est ainsi du
testament, de la donation et du prêt à usage. Le législateur congolais le qualifie de contrat de
bienfaisance791.

790
Ibidem, p. 203 ; art. 2 et 3 du Code civil congolais des obligations précité.
791
Art. 5 du Code civil congolais des obligations précité.
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L’acte juridique à titre onéreux est celui qui se fait donnant-donnant, c’est-à-dire celui
dans lequel l’avantage procuré à une personne implique par lui-même une contrepartie, une
compensation, un équivalent. Tel est le cas de la vente, du louage de service et du prêt à
intérêt792.

III. L’acte juridique commutatif et l’acte juridique aléatoire

En prenant en considération le caractère de la compensation, on distingue l’acte


juridique commutatif et l’acte juridique aléatoire.

L’acte juridique commutatif est celui dans lequel la valeur de la compensation


revenant à chacune des parties est fixée et peut être appréciée au moment de la passation de
l’acte. Tel est le cas de la vente, de l’échange et du bail.

L’acte juridique aléatoire est celui dans lequel la valeur de la compensation revenant à
chacune des parties ou à l’une d’elles ne peut être évaluée au moment de sa conclusion
puisqu’elle dépend du hasard. Il en est ainsi du contrat d’assurance793.

IV. L’acte juridique entre vifs et l’acte juridique à cause de mort

Selon que la ou les volontés, qui s’y manifeste(nt), s’exprime(nt) ou ne s’exprime(nt)


pas en considération du décès d’une personne, on distingue l’acte juridique entre vifs et
l’acte juridique à cause de mort.

L’acte juridique entre vifs est celui qui est normalement destiné à produire ses effets
du vivant de son ou de ses auteur(s). Tel est le cas de la vente, du préavis de licenciement.

L’acte juridique à cause de mort est celui qui ne doit produire ses effets qu’à la mort
de son auteur ou de l’un de ses auteurs. Il en est ainsi du testament et de la donation entre
époux faite par contrat de mariage en faveur de l’époux survivant794.

792
J. FALYS, op. cit., p. 204 ; art. 6 du Code civil congolais des obligations précité.
793
J. FALYS, op. cit., p. 205 ; art. 4 du Code civil congolais des obligations précité.
794
J. FALYS, op. cit., p. 206.
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V. L’acte juridique public et l’acte juridique privé

Selon la qualité de la personne ou des personnes qui exprime(nt) leur(s) volonté(s) et


abstraction faite de la forme que peut revêtir l’acte instrumentaire qui la ou les constate, on
distingue l’acte juridique public de l’acte juridique.

L’acte juridique public est celui qui émane d’un ou des plusieurs organe(s) de la
puissance publique lorsque celle-ci entend agir par lui ou par eux en cette qualité de
puissance publique. Tel est le cas des actes de la fonction législative comme la loi, des actes
de la fonction administrative comme la nomination des fonctionnaires et l’autorisation de
bâtir, et des actes de la fonction juridictionnelle (les arrêts et jugements).

L’acte juridique privé est celui qui émane des personnes privées ou des personnes
publiques, mais n’agissant pas en la qualité de puissance publique. Il en est ainsi de la vente
entre particuliers, du contrat de fourniture à l’Administration795.

VI. Les actes conservatoires, d’administration et de disposition

Au regard de la gravité des effets juridiques produits par l’expression de la ou des


volonté(s) qui s’y manifeste(nt), on distingue, dans le droit du patrimoine, l’acte
conservatoire de l’acte d’administration et de disposition.

Un acte conservatoire est un acte juridique qui tend à maintenir le patrimoine dans son
état actuel. Tel est le cas de l’inscription d’une hypothèque sur les immeubles d’un débiteur
pour garantir le payement d’une dette à son échéance, de la souscription d’un contrat
d’assurance et de l’extinction d’une prescription.

Un acte d’administration est un acte juridique de gestion courante d’un patrimoine


visant notamment à le faire fructifier. Il en est ainsi du louage d’un immeuble, du payement
d’une dette.

795
Ibidem, pp. 207 et 2008.
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Un acte de disposition est un acte juridique modifiant de façon permanente la


composition du patrimoine. Tel est le cas de la vente d’un immeuble, de la constitution d’une
hypothèque, de la renonciation à un droit796.

VII. L’acte juridique solennel et l’acte juridique consensuel

Selon que l’existence de l’acte dépend ou non de l’accomplissement des formes


instrumentales déterminées, on distingue l’acte juridique solennel de l’acte juridique
consensuel.

L’acte juridique solennel est celui dont l’existence requiert, conformément à la loi,
l’accomplissement de certaines formes instrumentales (dites solennelles) qui en constituent
de la sorte un des éléments essentiels. Il en est ainsi du mariage797.

L’acte juridique consensuel est celui dont l’accomplissement n’est pas soumis
expressément par la loi à des formes solennelles. Il se réalise « solo consensu », c’est-à-dire
qu’il produit ses effets du seul fait de l’expression de la volonté de son auteur ou de ses
auteurs quel que soit le mode selon lequel cette volonté s'exprime du moment qu’elle est
suffisamment explicite798.

VIII. L’acte juridique instantané et l’acte juridique successif

En tenant compte du mode d’exécution des actes juridiques, on distingue l’acte


juridique instantané de l’acte juridique successif.

L’acte juridique instantané, appelé encore l’acte juridique à exécution instantanée, est
celui qui a pour objet une prestation susceptible d’être exécutée en une seule fois. Tel est le
cas de la vente, de la donation.

L’acte juridique successif ou l’acte juridique à exécution successive est celui qui
implique des prestations renouvelées dans le temps, c’est-à-dire que son exécution
s’échelonne sur un temps plus ou moins long. Il en est ainsi du bail, du contrat de travail799.

796
P. COURBE, op. cit., p. 82 ; J. FALYS, op. cit., p. 208.
797
Art. 330, 368 et suivants du Code de la famille précité.
798
J. FALYS, op. cit., p. 209.
799
J. FALYS, op. cit., p. 209.
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IX. L’acte juridique principal et l’acte juridique accessoire

Selon que l’acte juridique est la cause d’un autre acte juridique ou qu’il trouve sa
cause dans un autre acte juridique, on distingue l’acte juridique principal de l’acte juridique
accessoire.

L’acte juridique principal est celui qui est la cause et la raison d’être d’un autre acte
juridique. Il peut en être ainsi du prêt.

L’acte juridique accessoire est celui dont l’existence trouve sa cause dans
l’accomplissement d’un autre acte juridique. Tel est le cas de l’hypothèque ou du gage qui
assortit un prêt800.

X. L’acte juridique patrimonial et l’acte juridique extrapatrimonial

Selon que l’objet de l’acte juridique concerne ou ne concerne pas le patrimoine de son
ou ses auteurs, on distingue l’acte juridique patrimonial de l’acte juridique extrapatrimonial.

L’acte juridique patrimonial est celui qui rapporte au patrimoine de son ou de ses
auteur(s). Il en est ainsi du contrat de mariage, du testament, de la vente, du bail.

L’acte juridique extrapatrimonial est celui qui ne concerne pas le patrimoine de son ou
de ses auteur(s). Tel est le cas du mariage e de l’option de patrie801.

§ 3. La formation des actes juridiques

Nous analyserons, à cet égard, les conditions de validité des actes juridiques et la
sanction de la violation de ces conditions.

I. Les conditions de validité des actes juridiques

Nous examinerons aussi bien les conditions de fond que les conditions de forme.

800
Ibidem, p. 210.
801
Ibidem, p. 211.
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A. Les conditions de fond

Il s’agit de conditions prévues par le Code civil des obligations et ont été généralisées
par la jurisprudence à tous les actes juridiques. Ces conditions la volonté, la capacité, l’objet
et la cause. Le Code civil des obligations dispose à cet égard que « Quatre conditions sont
essentielles pour la validité d’une convention :
• le consentement de la partie qui s’oblige;
• sa capacité de contracter;
• un objet certain qui forme la matière de l’engagement;
• une cause licite dans l’obligation »802.

1. La volonté

L’acte juridique étant un acte de volonté exprimé en vue de produire des effets de
droit, l’existence de la volonté constitue une condition essentielle de formation de cet acte,
qu’il soit unilatéral ou bilatéral.

Le législateur consacre, à cet effet, le principe de l’autonomie de la volonté. Celle-ci


est le pouvoir reconnu, en principe, aux personnes privées par le Code civil de déterminer
librement, comme ils l’entendent - au mieux de leurs intérêts, le contenu des actes juridiques
qu’ils décident de poser. Ce principe est fondé sur une certaine conception du bien commun
selon laquelle les personnes privées doivent pouvoir disposer, en droit, d’une certaine liberté
dans l’aménagement de leurs intérêts privés.

Ce principe permet aux personnes privées de décider d’accomplir ou de ne pas


accomplir un acte juridique et d’en prendre l’initiative sans contrainte. Il leur permet aussi de
choisir, en principe librement, le genre d’actes jugés les plus appropriés à leurs intérêts en
recourant aux actes organisés ou nommés par le législateur comme la vente, le bail ou en
créant, pour leurs besoins, des actes nouveaux ou « innommés ». Entant que maîtres des actes
juridiques qu’ils passent, les particuliers disposent du droit d’en préciser le contenu et les
modalités en écartant, au besoin, les lois supplétives.

802
Art. 8 du Code civil congolais des obligations précité.
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L’autonomie de la volonté implique encore que les auteurs d’un acte juridique et
particulièrement d’une convention demeurent libres de modifier ou de résilier de commun
accord le contrat qu’ils ont conclus.

Le principe de liberté qu’exprime l’autonomie de la volonté n’est, cependant, pas


absolu. En effet, l’autonomie de la volonté se trouve limitée, car la loi impose le respect des
lois impératives et prohibitives, de l’ordre public et de bonnes mœurs aux sujets de droit803.
L’ordre public désigne, pour un pays donné et à un moment déterminé, l’état social dans
lequel la paix, la tranquillité et la sécurité publique ne sont pas troublées. Ainsi, les règles
d’ordre public s’imposent avec une force particulière, car on ne peut pas y déroger804. Les
bonnes mœurs désignent l’ensemble de règles imposées par une certaine morale sociale à un
moment donné et dans une société bien déterminée805.

Pour que la volonté puisse produire ses effets, en tant qu’élément constitutif de l’acte
juridique, il faut que cette volonté ne soit pas viciée. A cet égard, le législateur congolais
dispose que « II n’y a point de consentement valable, si le consentement n’a été donné que
par erreur, ou s’il a été extorqué par violence ou surpris par dol »806. Ainsi, on distingue
trois types de vice de consentement, à savoir :
 l’erreur : c’est une représentation fausse ou inexacte de la réalité, qui entraîne
une discordance entre la volonté réelle et la volonté déclarée. C’est le cas
notamment de l’erreur sur la substance de la chose qui constitue l’objet de
l’acte ;
 le dol : c’est l’emploi d’un moyen frauduleux pour surprendre le consentement
d’une personne avec laquelle on envisage de passer l’acte juridique ;
 la violence : c’est la contrainte exercée sur la volonté d’une personne soit par
la force matérielle, soit par des menaces pour la déterminer à consentir à un
acte juridique. Mais à vrai dire, ce n’est pas l’acte de violence qui constitue le
vice du consentement, mais plutôt la crainte que cet acte de violence inspire807.

803
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., pp. 86-88 .
804
G. CORNU (dir.), op. cit., p. 714.
805
Ibidem, p. 133.
806
Art. 9 du Code civil congolais des obligations.
807
P. COURBE, op. cit., p. 84 ; J. FALYS, op. cit., p. 222.
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A ces vices de la volonté, on ajoute également la lésion. Celle-ci se révèle en cas de


déséquilibre dû à une disproportion manifeste des prestations prévues dans un contrat808.
Cette disproportion pourrait se justifier par le fait qu’une partie abuse, au moment de la
formation du contrat, des faiblesses, de l’ignorance, des besoins ou des passions de l’autre
partie809.

2. La capacité

Pour rappel, elle est l’aptitude à être titulaire des droits et des obligations et à les
exercer. Le principe posé est que toute personne peut consentir à un acte juridique, sauf dans
le cas où la loi a expressément prévu qu’elle est incapable. A cet effet, il est prévu que
« Toute personne peut contracter, si elle n’en est pas déclarée incapable par la loi »810.

3. L’objet

L’objet d’un acte juridique est ce sur quoi porte la volonté. Cet objet peut consister
soit dans la création d’un droit, soit dans sa modification, soit dans sa transmission, soit dans
son extinction811. Il s’agit donc l’opération juridique visée par une partie ou les parties à
l’acte812.

L’objet de l’acte ne se confond pas avec l’objet de l’obligation. Ce dernier est ce à


quoi le débiteur s’est engagé813.

Cet objet doit répondre aux exigences suivantes :


 il doit exister ou pouvoir exister : il faut, en principe, que l’objet existe au
moment de la passation de l’acte. Toutefois, même si la chose n’existe pas
encore, les choses futures peuvent être l’objet d’une obligation814. Mais, on ne
saurait valablement s’engager à une prestation impossible, d’autant plus que
« à l’impossible, nul n’est tenu » ;

808
F. TERRE, op. cit., p. 263.
809
Art. 131bis du Code civil congolais des obligations.
810
Art. 23 du Code civil congolais des obligations.
811
P. COURBE, op. cit., pp. 86-87.
812
G. MARTY et P. RAYNAUD, op. cit., p. 171, n° 171.
813
B. FAGES, Droit des obligations, 3e éd., Paris, L.G.D.J., 2011, p. 154, n° 149.
814
Ibidem, p. 167, n° 156.
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 il doit être licite : il doit être conforme à l’ordre public et aux bonnes
mœurs815 ;
 il doit être déterminé ou déterminable pour permettre au débiteur de savoir à
quoi il s’engage et au créancier, ce qu’il peut réclamer. Lorsqu’une obligation
porte sur un corps certain, c’est-à-dire une chose non fongible, individualisée,
la chose doit être désignée dans l’acte. S’il s’agit d’une chose de genre, c’est-
à-dire une chose fongible, dont il existe un nombre indéfini d’exemplaires
identiques et interchangeables, elle doit être déterminée dans son espèce et
dans sa quotité. Toutefois, la quantité peut n’être que déterminable en
fonction des paramètres sur lesquels les parties se sont préalablement mis
d’accord816.

4. La cause

La cause d’un acte juridique est le motif déterminant de la volonté817. Cette cause doit
être licite. Il est ainsi interdit de fonder un acte juridique sur une cause illicite. A cet égard, le
législateur congolais prévoit que « La cause est illicite quand elle est prohibée par la loi »818.

Toute obligation a nécessairement une cause. Cela découle de la règle d’après laquelle
« L’obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir
aucun effet »819. La cause permet de préciser en vue de quoi, à quelle fin l’auteur d’un acte
juridique l’a accompli820. Cependant, elle peut ne pas être mentionnée dans un acte juridique.
A cet effet, le législateur congolais prévoit que « La convention n’est pas moins valable,
quoique la cause n’en soit pas exprimée »821.

B. Les conditions de forme

Sauf dispositions contraires, les actes juridiques, ne sont, en principe, soumis à aucune
règle de forme. C’est le principe du consensualisme. A la différence du principe de
l’autonomie de la volonté, celui du consensualisme a trait au mode de formation des actes
815
G. MARTY et P. RAYNAUD, Droit civil : les obligations. Les sources, T. 1, 2e éd., Paris, Sirey, 1988, pp.
172-177, n° 173-176.
816
B. FAGES, op. cit., pp. 158-159, n° 153.
817
P. COURBE, op. cit., p. 87.
818
Art. 32 du Code civil congolais des obligations.
819
Art. 30 du Code civil congolais des obligations.
820
F. TERRE, op. cit., p. 267.
821
Art. 31 du Code civil congolais des obligations.
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juridiques. Il signifie que les actes juridiques se forment et partant existent par le seul effet de
la volonté de celui ou de ceux qui l’accomplissent, c’est-à-dire par le seul fait du
consentement des parties à l’acte juridique.

Toutefois, l’existence de certains actes est parfois subordonnée à l’accomplissement


de certaines formalités. Il en est ainsi de la rédaction d’un écrit (testament) et de la
célébration devant l’officier de l’état civil (mariage). Pareils actes sont appelés actes
solennels.

Par ailleurs, l’existence d’autres actes juridiques est, dans certains cas, subordonnée à
la remise d’une chose. Tel est le cas, par exemple, du contrat de prêt. Ces actes juridiques
sont qualifiés d’actes réels822.

II. La sanction de la violation des conditions de validité des actes juridiques

L’acte juridique défectueux pourrait essentiellement être sanctionné par la nullité.

A. La notion de nullité

La nullité est une sanction prononcée par le juge et consistant dans la disparition
rétroactive de l’acte juridique qui ne remplit pas les conditions requises pour sa formation823.

B. Les sortes de nullité

On distingue deux sortes de nullité : la nullité absolue et la nullité relative.

L’acte juridique nul de nullité absolue est celui qui, quoique réunissant des éléments
nécessaires à son existence, est frappé d’inefficacité en raison de la violation d’une règle
d’ordre public ou de bonne mœurs.

Cette inefficacité est absolue en ce sens que toute personne intéressée peut s’en
prévaloir, que la juge doit la soulever d’office à l’occasion d’un litige qui concerne l’acte,
qu’elle peut être soulevée à tout moment et même pour la première fois en instance de

822
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., pp. 89-90.
823
R. GUILLIEN et J. VINCENT, op. cit., p. 359.
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cassation, qu’elle ne peut être couverte par la confirmation de l’acte et qu’elle se prescrit au
bout de trente ans. Mais, cette prescription n’éteint que l’action en nullité et non l’exception
de nullité824. Confirmer l’acte, c’est lui conférer la validité qui lui manquait en renonçant à
invoquer la nullité825.

L’acte juridique nul de nullité relative est celui qui, quoique réunissant des éléments
nécessaires à son existence, est frappé d’inefficacité en raison de la violation d’une règle
établie dans le seul but de protéger des intérêts privés.

La nullité est relative en ce sens que l’acte subsiste si la personne que la règle de droit
a voulu protéger ou son représentant n’estime pas devoir s’en plaindre. Ainsi, cette nullité
peut être couverte par la confirmation de l’acte, elle ne peut être invoquée que par les
personnes que la loi tenait à protéger (et par leurs représentants) et non pas par toute personne
intéressée. L’action en nullité relative se prescrit, en principe, par dix ans826.

§ 4. Les effets des actes juridiques

I. Les effets des actes unilatéraux

Lorsque les conditions de l’acte unilatéral sont réunies, cet acte entraîne à l’égard de
son auteur des effets de droit. Cet acte ne peut produire, à l’égard des tiers, un effet
obligataire, c’est-à-dire il ne peut les rendre débiteurs. Toutefois, l’acte unilatéral est de
nature à créer une situation opposable aux tiers étant donné qu’il modifie une situation
juridique.

En droit administratif, les effets de l’acte unilatéral sont plus forts. Dans un très grand
nombre de cas, cet acte prend la forme d’une décision exécutoire, qui non seulement modifie
l’ordonnancement juridique existant, mais aussi produit un effet de contrainte827.

824
J. FALYS, op. cit., pp. 250 et 251 ; F. TERRE, op. cit., p. 277.
825
F. TERRE, op. cit., p. 276.
826
J. FALYS, op. cit., pp. 251 et 252.
827
F. TERRE, op. cit., p. 277.
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II. Les effets des contrats

A. Les effets des contrats de droit privé

On distingue les effets internes de l’acte juridique de ses effets externes.

1. Les effets internes de l’acte juridique

Ce sont les droits et obligations que l’acte a pour objet de créer, de modifier, de
transmettre ou d’éteindre. C’est à ces effets que s’applique le principe de la relativité de l`acte
juridique. D’après ce principe, les effets internes d’un acte juridique se limitent à ceux qui
l’ont voulu. Ceux qui ne l’ont pas voulu sont tiers, c’est-à-dire des étrangers à l’acte. Ils ne
peuvent ni en tirer profit, ni y être obligés. Ce principe est exprimé par le législateur
congolais dans la règle selon laquelle « Les conventions n’ont d’effet qu’entre les parties
contractantes; elles ne nuisent point au tiers, et elles ne lui profitent que dans le cas prévu
par l’article 21 »828.

Cependant, certains actes juridiques entraînent des effets dans le chef des personnes
n’ayant pas soit directement, soit indirectement participé à l’acte. Ainsi, beaucoup d’actes
unilatéraux ont pour but de produire des effets dans le chef des personnes qui ne les ont pas
voulus. Tel est le cas en cas de reconnaissance d’un enfant naturel. Dans certains cas, les tiers
peuvent se prévaloir des effets internes d’un contrat auquel ils n’ont pas été parties. Il en est
ainsi en cas de stipulation pour autrui et des conventions collectives de travail, etc.

La stipulation pour autrui est un contrat par lequel une personne, appelée stipulant,
obtient d’une autre personne, le promettant, qu’elle exécute une prestation au profit d’une
troisième personne, appelée tiers bénéficiaire.

Au regard de ce qui précède, l’acte juridique, qui réunit les conditions de formation
requises par la loi, oblige la personne de qui il émane. Ce principe est énoncé en matière
contractuelle par le législateur congolais, qui consacre, à cet effet, que « Les conventions
légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être
révoquées que de leur consentement mutuel ou pour les causes que la loi autorise. Elles

828
Art. 63 du Code civil congolais des obligations.
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doivent être exécutées de bonne foi »829. Cet article pose le principe de la convention-loi qui
signifie que la volonté exprimée dans l’acte a, pour son auteur ou ses auteurs, la même force
obligatoire que la loi établie par le législateur830. Ce principe est encore qualifié de principe
de l’effet obligatoire du contrat831.

2. Les effets externes de l’acte juridique

C’est le principe de l’opposabilité de l’acte juridique aux tiers qui s’applique à l’égard
des tiers. Ce principe signifie que les tiers sont tenus de reconnaître l’existence des actes
régulièrement constitués entre parties et de respecter les effets que ces actes produisent.

Cependant, ce principe connaît des limitations. Ainsi, les tiers ne seront pas liés par
l’existence des actes juridiques s’il y a eu fraude ou s’ils avaient acquis des droits sur la chose
avant la passation des actes concernés.

B. Les effets des contrats administratifs

Le contrat administratif est celui passé par une personne publique ou pour son compte
et soumis au droit administratif soit par disposition expresse de la loi, soit en raison de la
présence des clauses exorbitantes du droit commun dans ses stipulations, soit parce qu’il
confère à son titulaire une participation directe à l’exécution d’une activité de service
public832. Les clauses exorbitantes du droit commun sont les prérogatives de puissance
publique, qui tantôt lui permettent d’agir, tantôt le protègent des actions extérieures833.

Le contrat administratif présente des particularités par rapport au contrat de droit


privé. En effet, étant donné que l’acte juridique se relie au fonctionnement d’un service
public ou du fait des clauses exorbitantes qu’il comporte, l’Administration dispose des
pouvoirs importants : l’exécution du contrat s’opère sous sa surveillance et son contrôle, elle
est investie d’un pouvoir de direction, elle est dotée d’importants pouvoirs de sanction ainsi
que d’un pouvoir de modification unilatérale des prestations dues par son cocontractant. Ce
pouvoir s’accompagne, en contrepartie, d’un droit à indemnisation en faveur du

829
Ibidem, art. 33.
830
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., p. 91.
831
F. TERRE, op. cit., p. 277.
832
R. GUILLIEN et J. VINCENT, op. cit., p. 144.
833
R. CHAPUS, op. cit., p. 431, n° 530.
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cocontractant. En outre, l’Administration dispose d’un pouvoir de résiliation du contrat. Les


exigences de la continuité de service public ont également entraîné l’admission de la théorie
de l’imprévision en matière de contrat administratif. Cette théorie fut rejetée au sujet des
contrats de droit privé834.

La théorie de l’imprévision permet aux titulaires du contrat administratif de demander


à l’Administration l’indemnisation partielle du préjudice qu’ils subissent au cas où la
survenance d’événements imprévisibles et extérieurs aux parties vient bouleverser le prix de
revient des prestations835.

III. Les effets des actes collectifs

Souvent, l’acte collectif est caractérisé par une vocation à l’extension de ses effets
juridiques à d’autres personnes que celles qui ont participé à l’élaboration de l’acte
directement ou par leurs représentants. Ainsi, cet acte s’accorde mal avec le principe de
l’effet relatif des actes juridiques. Tel est le cas en particulier pour les conventions collectives
de travail. Dans d’autres situations où la naissance d’un acte requiert une délibération, la loi
de la majorité permet, sous réserve des conditions et des limites établies, d’imposer l’acte à
créer à la minorité, sauf si l’unanimité est exigée836.

Section 2. Les faits juridiques

§ 1. La notion de faits juridiques

Le fait juridique peut être défini comme étant tout événement quelconque susceptible
produire des effets juridiques soit parce qu’ils se réalisent sans l’intervention de la volonté
humaine, soit qu’ils résultent de l’activité volontaire de l’homme, mais sans qu’il y ait de la
part de celui-ci une intention d’agir dans le champ du droit et notamment de provoquer les
effets de droit que la loi attache à ce comportement837.

§ 2. La classification des faits juridiques

Nous distinguerons les faits juridiques involontaires des faits juridiques volontaires.

834
F. TERRE, op. cit., p. 278.
835
R. GUILLIEN et J. VINCENT, op. cit., p. 279.
836
F. TERRE, op. cit., p. 279.
837
J. FALYS, op. cit., p. 202.
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I. Les faits juridiques involontaires

Ce sont des événements qui de produisent indépendamment d’une volonté humaine. Il


s’agit des événements de la vie des personnes physiques, des événements naturels et de
l’écoulement du temps.

A. Les événements de la vie des personnes physiques

Parmi ces événements qui créent, modifient, transmettent ou éteignent les droits
subjectifs selon le cas figurent :
 la naissance : elle est la source de la personnalité juridique et, en conséquence,
elle fait acquérir notamment les droits de la personnalité et ceux de la famille ;
 la majorité : elle fait cesser l’incapacité pesant sur les mineurs et leur confère,
en principe, la pleine capacité ;
 la santé : l’état de santé physique ou mentale (maladie) d’une personne peut
avoir des conséquences sur l’exécution de ses obligations et surtout sur sa
capacité juridique ;
 le décès: il éteint les droits de la personnalité et les droits de la famille du
défunt. Il entraîne la transmission du patrimoine du défunt aux personnes que
la loi appelle à la succession838.

B. Les événements naturels

Certains événements naturels peuvent entraîne des conséquences juridiques. C’est le


cas de la foudre, de l’inondation, de la tempête, du tremblement de terre. Ces événements
naturels sont des faits de force majeure s’ils sont imprévisibles et irrésistibles. En
conséquence, ils libèrent de toute responsabilité le débiteur qui, par leur fait, a été empêché
d'exécuter son obligation839.

838
P. COURBE, op. cit., p. 94.
839
Idem
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C. L’écoulement du temps

Le droit positif attache des conséquences juridiques à l’écoulement du temps que nous
avons analysées précédemment en traitant de la prescription acquisitive et de la prescription
extinctive.

II. Les faits juridiques volontaires

A la différence des faits de la nature auxquels la volonté de l’homme est, par


définition même, étrangère, les faits de l’homme supposent une volonté, au moins sous-
jacente, de celui qui les accomplit. Souvent, il aura voulu les accomplir, même s’il n’a pas
voulu les conséquences juridiques que la loi y attache. Ces faits dépendent de la volonté de
l’homme, mais leurs effets sont déterminés par la loi. Il s’agit des délits, des quasi-délits et
des quasi-contrats.

Le délit est un fait volontaire, alors que le quasi-délit est un fait involontaire. Mais,
ces deux faits sont illicites et causent à autrui un dommage. En conséquence, ils constituent
des événements générateurs du droit à la réparation de la victime.

Les quasi-contrats sont des faits licites et volontaires d’où découlent des obligations
soumises à un régime s’apparentant à celui des contrats. Cependant, dans un quasi-contrat,
contrairement au contrat, il y a absence d’accord de volonté des parties.

On distingue trois sortes de quasi-contrats, à savoir:


 la gestion d’affaires, qui consiste pour une personne (le gérant) à accomplir des
actes d’administration dans l’intérêt d’un tiers (le géré ou le maître de l’affaire)
sans que ce dernier n’en ai été chargé. La gestion d’affaires consiste donc à
s’occuper des affaires d’une autre personne sans son consentement ;
 l’enrichissement sans cause, qui consiste pour une personne à s’enrichir
injustement au détriment d’autrui. La personne qui s’est appauvrie peut réclamer
une compensation à celui qui s’est enrichi pour rétablir l’équilibre.
L’enrichissement sans cause donne lieu à l’action de « in rem verso » ;
 le payement de l’individu, qui consiste dans le payement d’une dette qui n’existe
pas ou à laquelle on n’est pas tenu, du moins à l’égard de celui à qui on la paie et
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sans avoir la volonté de payer une dette d’autrui. Il est la principale application de
la théorie de l’enrichissement sans cause.

Ces trois hypothèses ont en commun le fait qu’un avantage injuste a été retiré. Ce fait
constitue un fait qui, par la volonté de la loi, donne naissance à un droit subjectif, à savoir un
droit à indemnité au profit de la victime840.

840
P. COURBE, op. cit., p. 96.
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Chapitre IV. LES MODES DE CREATION, LA TRANSMISSION, LES


MODALITES, LE CONTROLE DE MISE EN ŒUVRE ET L’EXTINCTION DES
DROITS SUBJECTIFS
Section 1. Les modes de création des droits subjectifs

On distingue le mode ordinaire du mode dérivé.

La création des droits subjectifs se réalise suivant un mode originaire lorsque les
droits naissent directement sur la tête de leurs titulaires. Pareille acquisition s’opère sans qu’il
ait eu transmission par un précèdent titulaire.

Cependant, lorsque les droits, dont une personne est titulaire, proviennent d’un
précèdent titulaire qui les lui a transmis, l’acquisition de ces droits est considérée comme
réalisée selon un mode dérivé841.

Section 2. La transmission des droits subjectifs

En prenant en considération l’origine de la transmission des droits, on distingue la


transmission qui est fondée sur la volonté des particuliers de celle qui repose sur la loi.

La transmission des droits peut trouver son origine dans la volonté unilatérale ou
bilatérale des particuliers. Il en est ainsi d’une transmission qui trouve son origine dans le
testament ou encore dans un contrat tel que la vente, la donation, etc.

La transmission peut également tirer sa source dans la loi. Tel est le cas des règles qui
fixent le régime de la succession ab intestat (succession légale) et des celles qui déterminent
les conditions de la prescription acquisitive, lorsque l’écoulement du délai a pour effet de
faire acquérir un droit réel à celui qui en a fait l’exercice. Une prescription est extinctive
lorsqu’elle fait perdre un droit réel ou un droit personnel du fait de l’inaction prolongée du
titulaire de ce droit.

Il existe également différents modes de transmission des droits subjectifs selon que
considère l’étendue de la transmission ou le moment de celle-ci.

841
H. SIMONART et F. LEURQUIN, op. cit., pp. 215 et 216.
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Du point de vue de l’étendue des droits transmis, on distingue :


 la transmission universelle : lorsque l’ensemble du patrimoine (actif et passif)
d’une personne passe à une autre personne ;
 la transmission à titre universel : lorsqu’une personne cède à une autre une
fraction du contenu de son patrimoine ;
 la transmission à titre particulier : lorsque seul un droit ou des droits bien
déterminé(s) sont transférés à une autre personne.

Du point de vue du moment de transmission, on distingue :


 la transmission entre vifs : qui a lieu lorsque les effets de l’acte se réalisent du
vivant de son auteur ;
 la transmission à cause de mort : qui s’opère au moment du décès de la
personne qui est à l’origine de l’acte ou de la transmission.

Section 3. Les modalités des droits subjectifs

En règle générale, l’acte juridique produit ses effets de façon immédiate et définitive.
Autrement dit, d’un point de vue temporel, la naissance - la modification - la transmission et
l’extinction des droits subjectifs qui découle de l’acte, est pur et simple. Dans certains cas,
cependant, les parties peuvent souhaiter modaliser les effets produits par l’acte. Elles peuvent
alors décider de faire dépendre les conséquences juridiques de leur manifestation de volonté
d’un événement futur qu’elles déterminent. Les modalités, qui affectent les droits subjectifs,
se distinguent au regard de la nature des événements futurs (terme ou condition) et au regard
des effets qui s’attachent à la réalisation de l’événement considéré (suspensif, extinctif ou
résolutoire).

§ 1. Le terme

I. La définition du terme

Le terme est un événement futur et de réalisation certaine dont la survenance retarde


l’exigibilité d’un droit (dans ce cas, le terme est suspensif) ou dont la survenance entraîne
l’extinction du droit (dans ce cas, on parle de terme extinctif)
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II. Les sortes de terme

On distingue le terme suspensif du terme extinctif.

Le terme suspensif ne suspend pas la naissance d’un droit. Dès la conclusion de l’acte,
le droit existe dans son principe. Il ne suspend que l’exigibilité d’un droit. Ainsi, longtemps
que le terme court, l’exécution de l’obligation ne peut être réclamée. Ce terme est un
événement futur de réalisation certaine, c'est-à-dire qui doit certainement se réaliser.

Le terme extinctif est un également un événement futur de réalisation certaine, mais


qui met fin à un droit quand cet évènement se produit. Ainsi, l’acte produit normalement ses
effets jusqu’à l’arrivée du terme. Ce n’est qu’à l’échéance que le droit prend fin et seulement
pour le futur. Les effets déjà produits par l’acte restant donc acquis.

§ 2. La condition

I. La définition de la condition

La condition est un événement futur, mais de réalisation incertaine auquel est


subordonnée tantôt la naissance (condition suspensive), tantôt l’extinction (condition
résolutoire) d’un droit.

II. Les sortes de condition

On établit une distinction entre la condition suspensive et la condition résolutoire.

Ccontrairement au terme suspensif, la condition suspensive empêche la naissance du


droit. Tant que la condition ne se réalisera pas, le créancier conditionnel n’aura aucun droit.
Tout exercice du droit lui est, dès lors, interdit. La seule chose dont il dispose, c’est une
chance, un droit aléatoire. Seule la réalisation de la condition suspensive met fin à
l’incertitude, en ce qu’à ce moment-là, le droit naît alors. Lorsque l’événement envisagé ne se
réalise pas, l’acte conditionnel est censé n’avoir jamais été établi.

La condition résolutoire est celle qui met fin au droit, si elle se réalise. Tant qu’elle ne
se réalise pas, tout se passe comme si le droit était pur et simple. Le droit naît complètement
dès la conclusion de l’acte. Si cette condition se produit, l’acte cessera de produire ses effets
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pour l’avenir, mais, en outre, tous les effets qu’il aurait pu produire dans le passé seront, en
principe, supprimés. L’effet rétroactif de la condition est, toutefois, assorti de tempérament.
Ainsi, pour les actes à prestations successives, la réalisation de la condition résolutoire
n’opère que pour l’avenir.

Mais, lorsqu’il est acquis que la condition ne se réalisera pas, le droit conditionnel
devient définitif. Il continuera comme par le passé à produire ses effets.

Section 4. Le contrôle de la mise en œuvre des droits subjectifs

Tout exercice des droits subjectifs n’est pas nécessairement correct. Il se peut qu’à
l’occasion de l’exercice d’un droit, une personne physique ou morale soit sortie du cadre du
droit tel qu’il a été fixé par les règles de droit objectif. Dans ce cas, il y a illégalité dans la
mise en œuvre des droits. En effet, les prérogatives que la loi confère aux titulaires des droits
subjectifs ne sont jamais illimitées. Le législateur s’attache à circonscrire explicitement ou
implicitement le droit qu’il accorde. Lorsque les droits subjectifs s’exercent en
méconnaissance des attributs qui les constituent, il y a, en effet, défaut des droits et le
comportement est qualifié d’illégal.

Il se peut également que tout en respectant les limites légales du droit, son titulaire
l’ait utilisé d’une manière qui dépasse manifestement les limites de l’exercice normal de
celui-ci par une personne prudente ou diligente. On parle dans ce cas d’abus de droit.

L’analyse des décisions judiciaires rendues en matière d’abus de droit permet de


dégager certains critères de l’abus de droit. Ainsi, on parle d’abus de droit lorsque :
 l’exercice du droit n’est pas utile : c’est le cas lorsque l’intention de nuire est
le mobile déterminant de l’auteur de l’acte et que, partant, l’usage du droit ne
présente aucun intérêt pour son titulaire. Il en est aussi ainsi si le titulaire d’un
droit l’a exercé sans aucun intérêt, par témérité - légèreté ou imprudence, tout
en causant un dommage à autrui ;
 l’exercice du droit n’est pas indispensable : dans ce cas, le titulaire du droit
n’est pas dénué de tout intérêt à l’exercer, mais il l’exerce d’une manière qui
cause un dommage énorme, alors qu’il pouvait réaliser l’intérêt qu’il poursuit
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 220 Université Catholique de Bukavu
Par Jean-Petit MULUME ZIHALIRWA G1 Droit/2017-2018

en exercent son droit d’une autre manière qui entraînerait un préjudice


moindre pour l’intérêt général ou l’intérêt des tiers ;
 l’exercice du droit n’est pas proportionnel au but poursuivit : même si la
manière dont le titulaire exerce son droit s’est révélée utile et indispensable, il
faut encore qu’elle soit proportionnelle au but poursuivi.

Un contrôle juridictionnel permet de sanctionner l’acte qui aurait été accompli de


manière abusive. La sanction peut consister, si possible, en une réparation en en nature. Il
s’agit de réduire l’exercice du droit à usage normal. Cependant, en général, le préjudice causé
par l’usage abusif du droit est réparé par l’allocation des dommages et intérêts. C’est une
réparation par équivalent.

Section 5. L’extinction des droits subjectifs

Il existe plusieurs causes d’extinction des droits. La doctrine établit une distinction
entre ces causes suivant que la volonté du titulaire du droit intervient ou non.

Les causes d’extinction qui procèdent de la volonté des titulaires des droits sont :
 le paiement : c’est l’exécution d’une obligation ;
 la renonciation : c’est l’acte par lequel une personne abandonne volontairement un
droit ;
 la remise de dette : c’est une convention par laquelle, le créancier libère partiellement
ou totalement le débiteur de sa dette sans avoir reçu tout le paiement ou une partie du
paiement ;
 la dation en paiement : c’est la remise, à titre de paiement et de l’accord des deux
parties, d’une chose différente de celle qui faisait l’objet de l’obligation ;
 la novation : c’est la convention par laquelle une obligation est éteinte et remplacée
par une obligation nouvelle. On distingue la novation par changement de créancier, la
novation par changement de débiteur et la novation par changement d’objet842 ;
 la compensation : c’est l’extinction des deux dettes réciproques jusqu’à concurrence
de la plus faible. Ces dettes devraient, en principe, être certaines, liquides et
exigibles843.

842
Art. 163 du Code civil congolais des obligations
843
Ibidem, art. 181 et s.
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Certaines autres causes ne résultent de la loi. Il en est ainsi :


 du décès d’une personne, surtout dans les contrats « intuitu personae »844 ;
 de la confusion : c’est un mode d’extinction d’une obligation juridique par la réunion,
sur la même tête, de deux qualités : celle de créancier et de débiteur845 ;
 la prescription extinctive ;
 la résolution : c’est la sanction consistant dans l’effacement rétroactif des obligations
nées d’un contrat synallagmatique à la suite de l’inexécution par l’une des parties de
ses obligations ;
 de perte de la chose : si cette perte intervient sans la faute du débiteur et avant qu’il ne
soit mis en demeure846 ;
 la faillite : c’est la situation d’un commerçant qui a cessé ses paiements et dont le
crédit se trouve ébranlé847.

844
Tel est le cas en matière de contrat de travail en cas de décès du travailleur.
845
Ibidem, Art. 192.
846
Ibidem, art. 194.
847
Art. 1er, 6 et suivants du décret du 27 juillet 1934 sur les faillites, in Les Codes Larcier. République
Démocratique du Congo, Tome IV, Droit commercial et économique, vol. 1, Droit commercial, Bruxelles,
Larcier, 2003, pp. 6 et s.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 222 Université Catholique de Bukavu
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Troisième partie : LA REALISATION DES DROITS EN JUSTICE

Chapitre I. L’ORGANISATION JUDICIAIRE

Tout titulaire d’un droit devrait pouvoir le faire respecter et faire sanctionner les
atteintes qui pourraient y être portées. Mais, nul ne peut se faire justice à soi-même. La
sanction du droit ne peut émaner que de l’autorité publique investie de ce pouvoir. Au sein de
l’Etat, il existe des institutions chargées de dire le droit, c’est à –dire de trancher les litiges.
Ce sont les institutions sont les juridictions. A cet égard, la Constitution de la RDC dispose
que « Le pouvoir judiciaire est indépendant du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif. Il est
dévolu aux cours et tribunaux qui sont : la Cour constitutionnelle, la Cour de cassation, le
Conseil d’Etat, la Haute Cour militaire ainsi que les Cours et Tribunaux civils et
militaires »848. Mais, il existe également des modes non juridictionnels de règlement des
différends.

Section 1. Les juridictions

La compétence de toute juridiction est, en principe, définie par le texte qui l’institue.
Ainsi, lorsqu’une personne entend exercer une action en justice, il importe de connaître la
juridiction compétente. D’une part, il faut rechercher quel est, compte tenu de la nature du
litige, le tribunal compétent parmi les diverses catégories de juridictions. C’est la question de
la compétence d’attribution ou compétence matérielle ou encore la compétence « ratione
materiae ». D’autre part, il faut déterminer la compétence territoriale ou « ratione loci »,
c’est- à- dire en raison du lieu et la compétence personnelle pour les affaires pénales. On
établit une distinction entre les juridictions nationales ou étatiques et les juridictions
internationales.

§ 1. Les juridictions étatiques

Il existe différents ordres de juridictions. Ainsi, on distingue l’ordre constitutionnel,


les juridictions de l’ordre judiciaire et les juridictions de l’ordre administratif. Cette
distinction est l’une des conséquences du principe de la séparation des pouvoirs exécutif et
judiciaire.

848
Art. 149 de la Constitution de la RDC précitée.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 223 Université Catholique de Bukavu
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I. L’ordre constitutionnel

Il n’est constitué que de la Cour constitutionnelle849. Cette juridiction est compétente


pour connaître :
 du contrôle de la constitutionnalité des lois et des actes ayant force de loi850 ;
 des recours en interprétation de la Constitution851 ;
 de contentieux des élections présidentielles et législatives et du référendum852 ;
 des conflits de compétence entre le Pouvoir exécutif et le Pouvoir législatif
ainsi qu’entre l’Etat et les Provinces853 ;
 des recours contre les arrêts rendus par la Cour de cassation et le Conseil
d’Etat, mais uniquement en tant qu’ils se prononcent sur l’attribution du litige
aux juridictions de l’ordre judiciaire ou administratif854 ;
des infractions politiques de haute trahison, d’outrage au Parlement, d’atteinte
à l’honneur ou à la probité ainsi que des délits d’initié et des autres infractions
de droit commun commises par le Président de la République et le Premier
ministre dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions. Elle
est également compétente pour juger leurs co-auteurs et complices855.

L’organisation et le fonctionnement de cette juridiction sont régis par la loi organique


n° 13/026 du 15 octobre 2013 portant organisation et fonctionnement de la Cour
constitutionnelle.

II. L’ordre judiciaire

L’ordre de juridictions judiciaires est composé des cours et tribunaux civils et


militaires, qui sont placés sous le contrôle de la Cour de cassation856. Les
juridictions judiciaires connaissent des litiges relevant du droit privé et des affaires relatives
aux lois pénales. Elles sont nombreuses et diverses. Elles peuvent être classées suivant divers
critères.

849
Art. 157 de la Constitution de la RDC précitée.
850
Ibidem, art. 160.
851
Ibidem, art. 161.
852
Ibidem, art. 161, al. 2.
853
Ibidem, art. 161, al. 3.
854
Ibidem, art. 161, al. 4.
855
Ibidem, art. 163 et s.
856
Ibidem, art. 153.
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Quant à l’étendue de la compétence, on distingue les juridictions de droit commun,


qui ont une compétence générale pour tous les litiges qui ne leur sont pas spécialement
enlevées et les juridictions spécialisées dont la compétence est limitée aux litiges qui leur
sont spécialement attribués. Parmi les juridictions spécialisées, figurent notamment les
tribunaux militaires, les tribunaux de travail, les tribunaux de commerce, les tribunaux pour
enfants, la Cour des comptes, etc.

Quant à leur rôle, on distingue les juridictions civiles, les juridictions commerciales et
les juridictions de travail qui sont toutes chargées de trancher les litiges entre particuliers et
les juridictions pénales ou répressives qui ont pour mission de connaître des infractions et
d’appliquer des peines à leurs auteurs.

En ce qui concerne la hiérarchie des juridictions, on distingue :


 les juridictions de premier degré, qui doivent être saisies en premier de tout litige ;
 les juridictions du second degré, qui, en vertu de la règle du double degré de
juridiction, sont instituées pour donner, à tout plaideur mécontent de la décision
rendue par la juridiction saisie au premier degré, l’occasion de soumettre une seconde
fois son affaire à une autre juridiction hiérarchiquement supérieure. Ceci constitue
une garantie de bonne justice ;
 et enfin, la juridiction de cassation dont le rôle est de contrôler l’exacte application du
droit par les juridictions de fond et d’assurer ainsi l’unité d’interprétation des règles
de droit. A cet effet, la Constitution de la RDC prévoit que « (…) la Cour de cassation
connaît des pourvois en cassation formés contre les arrêts et jugements rendus en
dernier ressort par les Cours et Tribunaux civils et militaires »857.

En droit congolais, les juridictions de droit commun se présentent de la manière suivante


selon l’ordre décroissant : la Cour de cassation, les Cours d’appel, les Tribunaux de grande
instance et les Tribunaux de paix.

Il est prévu l’installation d’un ou plusieurs tribunaux de paix dans chaque territoire, ville
et commune. Mais, dans certains cas, il peut être créé un seul tribunal de paix pour deux ou

857
Ibidem, art. 153, al. 2.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 225 Université Catholique de Bukavu
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plusieurs communes, villes ou territoires858. Jusqu’à ce jour, les tribunaux de paix ne sont pas
installés dans certaines parties de la RDC, notamment à Bukavu. Partout où ces tribunaux ne
sont pas encore installés, les conflits relevant de leur compétence doivent être soumis, en
premier ressort, aux tribunaux de grande instance859.

L’organisation et la compétence des juridictions sont régies par la loi organique portant
organisation, fonctionnement et compétences des juridictions de l'ordre judiciaire860.

III. L’ordre administratif

L’ordre de juridictions administratives comprend le Conseil d’Etat ainsi que des


Cours et Tribunaux administratifs861. Ces juridictions n’ont pas encore fait l’objet
d’organisation et d’installation en RDC. Cependant, il est prévu que le Conseil d’Etat
connaîtra, en premier et dernier ressort, des recours pour violation de la loi, formés contre les
actes, règlements et décisions des autorités administratives centrales. Il connaîtra aussi en
appel des recours contre les arrêts des Cours administratives d’appel et, exceptionnellement,
des demandes d’indemnités relatives à la réparation d’un préjudice exceptionnel, matériel ou
moral découlant d’une mesure prise par les autorités de la République, s’il n’existe pas
d’autres juridictions compétentes en la matière862. Les juridictions administratives
connaissent des litiges en matière administrative.

§ 2. Les juridictions internationales

I. La Cour international de Justice

Elle a été instituée dans le cadre du Traité des Nations Unies pour juger les conflits
entre les Etats membres qui ont accepté sa compétence. En outre, cette Cour exerce, sous
forme d’avis, les fonctions de conseil juridique auprès de différents organes de l’ONU. Elle
joue également le rôle de juge administratif suprême en ce qui concerne la fonction publique
internationale. Ainsi, elle est compétente pour intervenir, sous forme d’avis obligatoires,

858
Art. 7 de la loi organique n° 13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétences
des juridictions de l'ordre judiciaire.
859
Ibidem, art. 151.
860
Loi organique n° 13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétences des
juridictions de l'ordre judiciaire.
861
Art. 154 de la Constitution de la RDC précitée.
862
Ibidem, art. 155.
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comme juge d’appel de fait des juridictions administratives de l’Organisation internationale


du Travail et du Tribunal administratif des Nations Unies. Cette Cour siège à La Haye.863.

II. Les tribunaux pénaux ad hoc

Ces juridictions ont été créées pour répondre à des situations exceptionnelles et c’est
ainsi que leur existence est limitée dans le temps864. Ce sont donc des juridictions non
permanentes qui ont fait leur apparition après la deuxième guerre mondiale en vue de juger
les responsables des violations flagrantes et généralisées du droit humanitaire (tueries
massives, détention et viol massifs organisés, massacre ethnique dans certains cas, etc), qui
ont été commises. Il s’agit des Tribunaux de Nüremberg et de Tokyo, du Tribunal pénal
international pour l’ex-Yougoslavie et celui pour le Rwanda865 ainsi que du Tribunal spécial
pour la Sierra Leone.

III. La Cour pénale internationale

Cette Cour est une juridiction permanente qui a pour mission de connaître des
infractions de génocide, de crimes contre l’humanité, de crimes de guerre et de crime
d’agression. Ces crimes sont considérés comme étant les crimes les plus graves touchant
l’ensemble de la Communauté internationale. Cette juridiction a été instituée par le Statut de
Rome866.

Elle est installée à La Hay (Pays-Bas). Cette juridiction ne statue que subsidiairement,
c’est-à-dire au cas où les personnes poursuives ne pourraient être jugées ou ne seraient pas
jugées par leurs pays.

IV. Les juridictions de droit communautaire

Certains ordres juridiques supranationaux se sont dotés de juridictions qui ont


principalement pour mission de veiller à l’application du droit communautaire par les Etats
membres et d’assurer l’interprétation du droit communautaire. Il en est ainsi, par exemple, de
la Cour commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA (Organisation pour l’harmonisation
du droit des affaires en Afrique) et de la Cour de justice de l’Union européenne.

863
M.-L. RASSAT, Institutions judiciaires, Paris, P.U.F., Collection Premier cycle, 1993, pp. 224-225.
864
A. HERAUD et A. MAURIN, op. cit., p. 289.
865
J. VINCENT, op. cit., p. 309, n° 59-9.
866
Art. 5 et suivants du Statut de Rome de la Cour pénale internationale.
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Section 2. Le personnel judiciaire

Le personnel judiciaire est constitué des magistrats, des agents de la police judiciaire
des parquets, des officiers de police judiciaire et des agents de l’ordre judiciaire des Cours,
Tribunaux et Parquets civils et militaires867.

§ 1. Les magistrats

On distingue les magistrats du siège ou juges et les magistrats debout. Les magistrats
du siège ont pour fonction de juger, de trancher des litiges. Les magistrats debout appelés
encore magistrats du parquet ou officiers du Ministère public sont, quant à eux, des agents du
pouvoir exécutif auprès des tribunaux. Ils représentent en justice les intérêts de l’Etat et de la
collectivité toute entière. Ils sont indépendants de la juridiction auprès de laquelle ils exercent
leur mission. Il y a un parquet attaché à chaque juridiction.

Le Ministère public assiste à toutes les audiences de la Cour suprême de justice, des
cours d’appel, de la Cour de sûreté de l’État et des tribunaux de grande instance 868. Il peut,
selon les cas, intervenir soit par voie d’avis, soit par voie d’action869.

En matière pénale, le Ministère public déclenche, au nom de l’Etat, l’action publique


et traduit les présumés délinquants devant les juridictions compétences. Il est partie principale
au procès pénal870.

En matière civile, rarement partie principale au procès, il intervient par voie de


réquisition ou comme partie jointe dans un certain nombre d’affaires relatives à la protection
des personnes ou de l’ordre public. Ainsi, la loi dispose que, en matière de droit privé, « Il
peut agir par voie d’action principale dans l’intérêt de toute personne physique lésée qui
serait inapte à ester en justice, à assurer sa défense et à y pourvoir »871.

867
Art. 1er de la loi organique n° 13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et
compétences des juridictions de l'ordre judiciaire.
868
Ibidem, art. 66.
869
Ibidem, art. 67.
870
Idem.
871
Art. 68, al. 3 de la loi organique n° 13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et
compétences des juridictions de l'ordre judiciaire.
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Il exerce des activités extrajudiciaires telles que la surveillance des tous les officiers
de police judiciaire, des officiers publics et des officiers ministériels, sauf les agents du greffe
et de l’office des huissiers872.

§ 2. Les auxiliaires de la justice

I. Les auxiliaires du juge

Certains de ces auxiliaires le sont de façon permanente dans la mesure où


l’administration de la justice n’est pas possible sans leur concours (les greffiers, les
personnels de police judiciaire, alors que d’autres ne participent aux procédures que si le
tribunal fait recours à eux (notamment les techniciens comme les experts)873.

A. Les greffiers

Tout tribunal, quel qu’il soit, comporte un greffier (ou un secrétaire). Les greffiers ont
pour rôle d’assister le juge dans tous ses actes : rédaction, signature et conservation des
décisions de justice, délivrance de copies de dites décisions, tenue de certaines registre, etc.

B. Les personnels de police judiciaire

Les agents de la police judiciaire des parquets sont des officiers de police judiciaire.
Leur compétence s’étend à toutes les infractions et sur tout le territoire de la RCD874. La
police judiciaire a notamment pour mission de constater les infractions à la loi pénale, d’en
rassembler les preuves et d’en rechercher les auteurs875.

C. Les huissiers

Les huissiers sont des officiers ministériels. Ils ont pour mission d’assurer la police
de l’audience, de dresser des constats à la demande du juge ou des particuliers, de signifier
aux parties les actes de procédure et les jugements et de faire exécuter même par la force, les
décisions de justice.

872
Ibidem, art. 66, al. 3.
873
B. STARCK, H. ROLAND et L. BOYER, Introduction au droit, 5e éd., Paris, Litec, 2000, p. 311, n° 819.
874
Art. 4 de la loi organique n° 13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétences
des juridictions de l'ordre judiciaire.
875
B. STARCK, H. ROLAND et L. BOYER, op. cit, p. 313, n° 823.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 229 Université Catholique de Bukavu
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Ces greffiers, ces personnels de police judiciaire et les huissiers sont des agents de
l’ordre judiciaire. A cet effet, le législateur congolais dispose que « Sont agents de l’ordre
judiciaire: les fonctionnaires et agents administratifs des greffes, des secrétariats des
parquets, des services de la police judiciaire des parquets ainsi que les huissiers, lorsque
ceux-ci sont de carrière. Ils sont tous régis par le statut du personnel de carrière des services
publics de l’État »876.

D. Les experts

Ce sont des auxiliaires occasionnels du juge qui ont pour rôle de lui apporter, dans le
cadre d’un litige, des informations purement techniques. Il en est ainsi des médecins, des
comptables, des chimistes, etc. Il s’agit donc des spécialistes expérimentés dans un métier, un
art ou une science877.

II. Les auxiliaires des justiciables : les avocats et défenseurs judiciaires

Les avocats et les défenseurs judiciaires exercent une profession libérale pour laquelle
sont exigées certaines conditions d’aptitude et d’honorabilité. Ils représentent les parties, qui
sont leurs clients, assistent les parties et plaident devant les juridictions, ils consultent et
rédigent pour autrui des actes juridiques.

Section 3. Les modes non juridictionnels de règlement des litiges

Le règlement des conflits peut se réalise pas toujours par le recours aux modes
juridictionnels. A côté de ces derniers, il existe également des modes non juridictionnels,
qualifiés encore des modes alternatifs de règlement des conflits. Ces modes alternatifs ont en
commun que le fait que les parties ne cherchent pas à régler leurs conflits par un acte
juridictionnel. Les parties visent à régler amiable leurs conflits878.

Les principaux modes non juridictionnels de règlement des conflits sont :

876
Art. 3 de la loi organique n° 13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétences
des juridictions de l'ordre judiciaire.
877
B. STARCK, H. ROLAND et L. BOYER, op. cit., p. 315, n° 829.
878
J. VINCENT et alii, Institutions judiciaires. Organisation. Juridictions Gens de justice, Paris, Dalloz, 2003,
p. 38 et 40, n° 30 et 31.
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 La conciliation : c’est un mode grâce auquel les parties en présence s’entendent


directement pour mettre fin à leur conflit, au besoin avec l’aide d’un tiers, qui est le
conciliateur. Les parties s’efforcent de rapprocher leurs points de vue jusqu’à aboutir
à un accord constaté dans un document appelé « procès-verbal de conciliation »879.
 La médiation : elle se rapproche de la conciliation en ce que, à l’instar du conciliateur,
le médiateur n’a pas non plus à trancher lui-même le litige. Le médiateur se distingue
du conciliateur par son rôle plus actif s’exprimant par la recherche des éléments d’une
entente qu’il propose aux parties en conflit, mais sans pouvoir la leur imposer880.
 L’arbitrage : est un mode de règlement à travers lequel les parties confient leur litige à
des arbitres en vue de le trancher. On distingue la clause compromissoire du
compromis d’arbitrage. La clause compromissoire est la convention par laquelle les
parties à un contrat conviennent de soumettre à l’arbitrage le litige qui naitrait de leur
contrat881. Le compromis d’arbitrage est la convention par laquelle les parties en
conflit décident de soumettre leur litige à l’arbitrage. A cet effet, elles désignent les
arbitres et précisent au moins l’objet de leur litige. Ainsi, alors que la clause
compromissoire intervient avant que le conflit ne naisse, le compromis d’arbitrage
suppose qu’il existe déjà un litige auquel il est postérieur882.
 La transaction : c’est « un contrat par lequel les parties terminent une contestation
née, ou préviennent une contestation à naître »883.

879
Ibidem, p. 43, n° 34.
880
Ibidem, p. 48, n° 38.
881
Art. 160 du Code de procédure civile congolais.
882
MATADI NENGA GAMANDA, op. cit., pp. 647, 651 et 654, n° 739, 742 et 748.
883
Art. 583 du Code civil congolais des obligations.
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Chapitre II. LA PREUVE EN DROIT

La preuve est la démonstration de la véracité d’une affirmation. Ce mot désigne aussi


le procédé technique utilisé en vue d’établir l’existence d’un droit ou d’un fait884. Lorsqu’une
partie a introduit une demande en justice, le succès de cette dernière dépend de la manière
dont cette demande est soutenue par des preuves. D’où, l’intérêt de l’étude de la preuve des
droits subjectifs

Section 1. La nécessité de prouver en droit

La preuve présente une importance capitale en droit qui se traduit par l’adage selon
lequel « Idem est non esse et non probari » (Tout ce qui n’est pas prouvé est considéré
comme inexistant). Toute personne soucieuse de défendre ses droits doit, en conséquence,
appuyer ses prétentions par des moyens que le droit admet et qui sont des moyens de preuve.

Section 2. L’objet de la preuve

L’examen de cette section nous amène à répondre à la question de savoir : quoi doit-
on prouve ? En droit, on ne peut prouver que les faits et les actes en vertu des adages
suivants « Jura novit curia », qui signifie que « La cour connaît le droit » et « Da mihi
factum, dabo tibi jus » qui veut dire « Donnes moi le fait, je te donnerai le droit ».

En principe donc, on ne prouve pas le droit, on l’évoque. Cependant, la coutume et le


droit étranger doivent être prouvés885. En effet, les juges ne peuvent connaître toutes les lois
de tous les Etats du monde886.

Parmi les faits (les actes) à prouver, on distingue :


 les faits pertinents : ce sont les faits qui sont en rapport avec le litige,
 les fait concluants : ce sont ceux qui, à les supposer établis, entraîneraient
l’application de la règle de droit ;
 les faits contestés : ce sont ceux qui sont mis en cause par la partie adverse et
qui sont en rapport avec le litige. Le fait qu’un fait ne soit pas contesté, ne
dispense pas l’autre partie à le prouver887.

884
F. TERRE, op. cit., p. 419.
885
B. STARCK, H. ROLAND et L. BOYER, op. cit., pp. 563 et 564, n° 1517-1519.
886
G. GATUNANGE, op. cit.
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Section 3. La charge de la preuve

Nous voulons répondre à la question de savoir : qui doit prouver ? Il est un principe
que la charge de la preuve incombe au demandeur. D’où, l’adage « Actori incumbit
probatio ».

Cependant, ce principe n’est pas absolu. En effet, les parties, et particulièrement en


matière de droit privé, peuvent convenir que la charge de la preuve incombera à telle partie
plutôt qu’à telle autre.

En outre, pour sauvegarder ses intérêt, chaque partie peut, même lorsqu’elle n’est pas
obligée, décider de soutenir sa prétention par des moyens de preuve qu’elle détiendrait. Enfin
le principe de collaboration des parties à d’administration de la justice, peut amener le juge à
ordonner à une partie la production des moyens de preuve.

Section 4. Les moyens de preuve

Nous voulons répondre directement à la question de savoir : comment prouver ? Nous


examinerons d’abord les modes de preuve avant d’étudier l’admissibilité des preuves.

§ 1. Les modes de preuve

On distingue les preuves directes des preuves indirectes.

I. Les preuves directes

Il s’agit de :

A. La preuve littérale ou preuve par écrit

Parmi les preuves littérales, on distingue les actes sous seing privé des actes
authentiques.

Les actes authentiques sont ceux établis par un officier public (par exemple, le
notoire) ayant la compétence d’instrumenter et dans le respect des formes prévues par la loi.

887
F. TERRE, op. cit., p. 441.
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Les actes authentiques peuvent être revêtus de la formule exécutoire. Ainsi, ils sont
susceptibles d’exécution forcée. La loi attache une force probante particulière à ces actes.

Les actes sous seing privé sont ceux établis et signés par les parties elles-mêmes.

B. L’aveu

C’est une déclaration par laquelle une personne tient pour vrai un fait qui peut
produire contre elle des conséquences juridiques.

L’aveu est judiciaire lorsque la déclaration est faite en justice. Dans le cas contraire,
l’aveu est extrajudiciaire.

C. Le témoignage

C’est l’acte par lequel une personne atteste l’existence d’un fait dont elle a eu
personnellement connaissance. On l’appelle encore preuve testimoniale ou la preuve par
témoin.

D. Le serment

On distingue le serment décisoire du serment supplétoire. Le serment décisoire ou


litisdécisoire est celui qui est déféré par une partie à l’autre et dont la prestation ou le refus
termine la contestation. Le serment supplétoire, quant à lui, n’a pas pour effet de lier le juge
lorsqu’il a été déféré ou refusé. Il est laissé à la discrétion du juge.

II. Les preuves indirectes ou présomptions

Les preuves indirectes ou les présomptions sont les conséquences que la loi
(présomptions légales) ou le magistrat (présomptions humains) tire d’un fait connu à un fait
inconnu.

Les présomptions peuvent réfragables ou irréfragables. Les présomptions irréfragables


sont encore appelées « juris et de jure ». Ce sont des présomptions que l’on ne peut pas
renverser. Elles n’admettent pas, contrairement aux présomptions réfragables, une preuve
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contraire. Les présomptions réfragables sont encore qualifiées de présomptions « juris


tantum » ou présomptions simples ou présomptions relatives.

§ 2. L’admissibilité des preuves

L’admissibilité des preuves permet de savoir les moyens de preuve qui sont admis
pour établir une prétention888. Elle dépend du système probatoire dans lequel on se trouve.
On distingue, d’une part, le système de preuve légale ou réglementée et, d’autre part, le
système de preuve libre ou morale ou système de l’intime conviction du juge.

I. Le système de preuve légale

Dans ce système, les modes de preuve sont réglementés. La loi établit une certaine
hiérarchie entre les différents moyens de preuve et attache une force probante à chaque
moyen. Tous les moyens de preuve n’ont donc pas la même force probante889.

Ce système est consacré en droit civil où on pose le principe de la prééminence de la


preuve écrite. Le législateur congolais dispose à cet effet que « II doit être passé acte
authentique ou sous signature privée, de toutes choses excédant la somme ou valeur de [deux
mille] francs, même pour dépôts volontaires; et il n’est reçu aucune preuve par témoins
contre et outre le contenu aux actes, ni sur ce qui serait allégué avoir été dit avant, lors ou
depuis les actes, encore qu’il s’agisse d’une somme ou valeur moindre de [deux mille]
francs »890. Mais ce système n’est pas non absolu en droit civil. Ainsi, les faits juridiques
peuvent, par exemple, être prouvés par toute voie de droit891.

II. Le système de preuve libre

Dans ce système, les moyens de preuve ne sont pas hiérarchisés. Les parties sont
libres de prouver leurs allégations par n’importe quel moyen de droit et il appartient au juge
de les apprécier. Ce système se rencontre en matière commerciales et en matière pénale. En
matière commerciale, le législateur congolais consacre que « (…) les engagements
commerciaux pourront être constatés par la preuve testimoniale dans tous les cas où le

888
F. TERRE, op. cit., p. 420.
889
Ibidem, p. 481
890
Art. 217, al. 1 du Code civil congolais des obligations.
891
F. TERRE, op. cit., p. 482.
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tribunal croira devoir l’admettre »892. Il renchérit en disposant que « Indépendamment des
moyens de preuve admis par le droit civil, les engagements commerciaux pourront être
constatés par la preuve testimoniale, ou par présomptions, dans tous les cas où le tribunal
croira devoir l’admettre et sauf les exceptions prévues par la loi. Dans les mêmes cas, il
pourra être prouvé contre et outre le contenu aux actes »893.

Il convient, cependant, de faire remarquer qu’on ne rencontre pas un domaine du droit


où l’application d’un de ces systèmes est absolue. C’est ainsi que, par exemple, en matière
civile, le délit, le quasi-délit et le quasi-contrat se prouvent par toute voie.

892
Art. 217, al. 2 du Code civil congolais des obligations.
893
Art. 9 du décret du 02 août 1913 sur les commerçants et la preuve des engagements commerciaux.
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Chapitre III. LE PROCES

Section 1. L’action en justice

§ 1. La définition de l’action en justice

L’action en justice est un pouvoir reconnu aux sujets de droit de s’adresser à la justice
(tribunal) pour obtenir le respect de leurs droits. Il s’agit d’un pouvoir légal en vertu duquel
une personne peut saisir une autorité juridictionnelle (juridiction) pour obtenir que la
prétention qu’elle soutient soit retenu avec force légale et qu’une décision exécutoire soit
prise aux fins de protéger ou de restaurer son droit.

L’action en justice n’est pas à confondre avec la demande en justice, même si elles
sont en étroite relation. L’action est le droit de saisir le juge en vue de faire valoir son droit,
alors que la demande est la mise en œuvre de l’action par la partie qui saisit le juge d’une
prétention894.

§ 2. Les conditions de l’action en justice

Il y a trois conditions, à savoir : l’intérêt et la qualité à agir.

I. L’intérêt

On ne peut agir en justice que si l’on y a intérêt et dans le mesure de cet intérêt. Ce
principe est exprimé par l’adage « Pas d’intérêt pas d’action »895. Néanmoins, cet intérêt doit
répondre aux exigences suivantes pour être pris en compte. Ainsi, il doit être :
 légitime, c’est-à-dire juridiquement protégé ;
 né et actuel : il ne doit pas être éventuel, hypothétique. Cependant, ceci ne
signifie pas qu’on ne peut pas demander réparation d’un préjudice future qui
est certain ;
 direct et personnel : on rejette ainsi l’action populaire qui permettrait à
n’importe quel citoyen de dénoncer la violation d’une règle de droit. Celui qui

894
MATADI NENGA GAMANDA, op. cit., p. 157, n° 143.
895
F. TERRE, op. cit., p. 510.
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agit en justice doit chercher à servir son intérêt propre et non pas l’intérêt
général dont la défense doit être assurée par le Ministère Public896.

II. La qualité

La qualité pour agir en justice désigne le titre en vertu duquel une personne agit.
Ainsi, une personne peut agir à titre personnel, en qualité de créancier du titulaire du droit ou
de son héritier. Toutefois, si toute personne ayant intérêt à agir a, en principe, qualité pour le
faire, cette qualité est, dans certains cas, réservée uniquement à quelques personnes. Il en est
ainsi des actions en nullité relative et des actions en divorce qui sont réservées aux époux897.

III. La capacité

Il s’agit de l’aptitude que possède une personne à faire valoir les droits dont elle se
prétend titulaire. La capacité d’agir en justice réfère dont à la capacité d’exercice.

Seules les personnes physiques qui sont reconnues capables peuvent agir en justice.
Les incapables en peuvent agir que par leurs représentants. Les personnes morales n’agissent
que par le truchement de leurs représentants légaux ou statutaires898.

§ 3. La classification des actions en justice

Les actions en justice se répartissent en fonction de la nature ou de l’objet des droits


qu’elles tendent à protéger.

Au regard de la nature du droit protégé, on distingue, d’une part, les actions


personnelles et les actions réelles. L’action personnelle, formée par le créancier contre le
débiteur, tend à la protection d’un droit de créance. Cependant, certaines actions personnelles
n’ont pas un caractère patrimonial spécialement en matière familiale. Les plus importantes de
ces actions se relient à l’état des personnes. Ce sont les actions d’état. Il en est ainsi des
actions en divorce, celles relatives à la filiation, etc. L’action réelle est celle qui vise à
protéger un droit réel (droit de propriété, droit d’usufruit, etc.).

896
J.-J. TAISNE, op. cit., p. 100 ; A. HERAUD et A. MAURIN, Institutions judiciaires, 6e éd., Paris, Dalloz,
Aide-mémoire, 2006, p. 146 ; F. TERRE, op. cit., p. 510.
897
F. TERRE, op. cit., p. 511.
898
MATADI NENGA GAMANDA, op. cit., pp. 178-180, n° 179-182.
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On distingue aussi les actions mobilières des actions immobilières selon que le droit à
protéger, réel ou personnel, concerne un meuble ou un immeuble. Les actions mobilières sont
celles qui se rapportent à des biens meubles, alors que les actions immobilières sont relatives
à des immeubles.

Il existe d’autres variétés d’action en justice, notamment en droit pénal et en droit


administratif. En matière pénale, on différencie l’action publique et l’action civile. L’action
publique est une action exercée par le Ministère public devant une juridiction répressive ou
pénale et qui tend à l’application des peines ou des mesures de sûreté aux auteurs des
infractions.

L’action civile n’est pas à confondre avec l’action de nature civile. L’action privée
englobe l’action civile et l’action de nature civile. L’action de nature civile est celle qui est
exercée devant les tribunaux civils, mais en l’absence de toute infraction pénale. L’action
civile, par contre, est une action en réparation d’un dommage directement causé par une
infraction pénale et qui peut être exercé par tous ceux qui ont personnellement souffert du
dommage. Elle peut être exercée, au choix des victimes, soit en même temps que l’action
publique devant les juridictions répressives (pénales), soit séparément de l’action publique
devant les juridictions civiles. Elle doit être distinguée de la constitution de la partie civile qui
à la victime d’une infraction de mettre en mouvement l’action publique indépendamment de
son droit à réparation899.

En droit administratif, on rencontre notamment le recours en annulation qui est dirigé


contre un acte administratif irrégulier900.

Section 2. L’instance

L’instance comprend toute une série d’actes ou d’opérations accomplis selon certaines
formes soit par les parties, soit par leurs auxiliaires, soit par le juge lui-même901.

C’est au demandeur en justice qu’il appartient d’introduire l’instance. Il peut, selon


les cas, être :

899
F. TERRE, op. cit., p. 511-513.
900
Ibidem, p. 513.
901
F. TERRE, op. cit., p. 527.
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 la personne qui s’estime lésée dans son droit ou son représentant en matière
civile, commerciale, du travail, etc. ;
 le Ministère public ou la victime d’une infraction en matière pénale ;
 l’administré en matière administrative étant donné que l’Administration
bénéficie du privilège de l’exécution d’office et que, en principe, une
juridiction administrative ne peut être saisie que par voie de recours formé
contre une décision en vertu de la règle de la décision préalable902.

L’introduction de l’instance permet de créer un lien, d’une part, entre le demandeur et


le défendeur, et, d’autre part, entre les parties et la juridiction qui a été saisie903. Cette
introduction se réalise par un acte, qui est l’acte introductif d’instance. Selon les cas, il peut
s’agir d’une assignation, d’une requête, une plainte avec constitution de partie civile, etc.

Par la suite, le tribunal détermine la date d’audience. Celle-ci est une séance durant
laquelle une juridiction prend connaissance des prétentions des parties, instruit le procès,
entend les plaidoiries et rend son jugement. Le tribunal peut prendre des mesures
d’instruction (vérification des documents, visite des lieux, expertise, etc.), selon les cas, soit à
la demande des parties, soit d’office.

Lorsqu’elle s’estime déjà suffisamment éclairée, la juridiction prend l’affaire en


délibéré en vue d’en décider. Le délibéré est la phase secrète qui s’intercale entre la fin des
débats et le prononcé du jugement. Il est vidé si le tribunal a résolu le litige lui soumis904.

Le déroulement de l’instance varie en fonction de la procédure dans laquelle on se


trouve. En effet, il existe une diversité de procédures dont celles pénales – civiles et
administratives. Elles se caractérisent en fonction de leur plus ou moins grande fidélité à deux
principes directeurs, à savoir : le principe de contradiction et le principe dispositif.

Le déroulement du procès obéit aux principes suivants :


 Le principe du contradictoire : ce principe oblige à entendre toutes les parties en
conflit. Ce qui suppose qu’elles soient, selon le cas, présentes ou représentées. Le

902
J.-J. TAISNE, op. cit., p. 138.
903
Idem
904
A. HERAUD et A. MAURIN, op. cit., pp. 190 et s.
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caractère contradictoire oblige le juge à ne retenir que les arguments qui ont été
échangés entre les parties et sur lesquels chacune d’elles pouvait réagir.
 Le principe de la publicité : il s’applique aux audiences et aux jugements. En vertu de
ce principe, le public est admis aux audiences, sauf si, en raison de sa nature,
l’affaire est jugée à huit clos (au pénal) ou en chambre de conseil (au civil). Ainsi, la
Constitution de la RDC dispose que « Les audiences des cours et tribunaux sont
publiques, à moins que cette publicité ne soit jugée dangereuse pour l’ordre public ou
les bonnes mœurs. Dans ce cas, le tribunal ordonne le huis clos »905.
 Le principe de l’immutabilité du litige : il donne aux plaideurs le droit de limiter le
cadre du procès et favorise ainsi la contradiction. Ainsi, une partie qui aura engagé
l’instance sur un contenu ne pourra, en principe, ni le modifier ni se voir contraindre
par la partie adverse de le changer. Toutefois, les demandes incidentes seront
recevables si elles sont connexes à la demande initiale. L’immutabilité du litige
s’impose aussi au juge qui ne peut modifier ni la cause ni l’objet de la demande. Il ne
peut statuer infra ou ultra petita (en dessous ou en dessus du litige)906.
 Le principe de la neutralité du juge : il interdit au juge d’avoir de parti pris, de
favoriser une partie injustement au détriment de l’autre. Le juge doit rester objectif.
 Le principe de la gratuité de la justice : ce principe signifie seulement que les
magistrats ne sont pas payés par les plaideurs ; ils le sont par l’Etat.

Section 3. Les jugements

§ 1. La notion de jugement

Il importe de ne pas confondre les notions suivantes : un jugement, un arrêt et une


ordonnance. Un jugement est une décision de justice rendue par un tribunal, alors qu’un arrêt
est une décision de justice rendue par une Cour ou le Conseil d’Etat. Mais, selon un sens
large, le terme « jugement » désigne une décision de justice (jugement et arrêt).
Une ordonnance est une décision rendue sur requête par un juge unique, président de la
juridiction ou certains juges spécialisés907.

L’acte juridictionnel ou jugement présente les caractéristiques ci-après :

905
Art. 20 de la Constitution de la RDC précitée.
906
A. HERAUD et A. MAURIN, op. cit., pp. 186-187.
907
J.-J. TAISNE, op. cit., p. 142.
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 les juridictions rendent des décisions d’espèce : d’où, le principe de la relativité de la


chose jugée, car les juges ne peuvent se prononcer par voie des dispositions générales
et réglementaires sur les causes qui leurs sont soumises ;
 la décision juridictionnelle est rendue a posteriori, car l’intervention du juge suppose
une contestation déjà née et à laquelle il faut remédier ;
 les juridictions ne rendent des décisions que sur demande, car le juge n’agit pas de
son initiative personnelle ;
 les décisions des juridictions ont une valeur et une autorité particulière : l’autorité de
la chose jugée et la force exécutoire908.

§ 2. La classification des jugements

Les jugements sont classés suivant certains critères.

En prenant en considération l’effet qu’ils peuvent avoir sur le litige, on distingue les
jugements sur le fond et les jugements avant-dire droit. Le jugement sur le fond, qualifié
encore de jugement définitif, est celui qui tranche le litige, qui a été soumis au tribunal, alors
que le jugement avant-dire est une décision par laquelle le tribunal peut prendre une mesure
provisoire ou une mesure d’instruction avant de régler le conflit qui lui a été soumis909.

Ainsi, les jugements avant-dire droit comprennent les jugements provisoires et les
jugements relatifs à l’instruction. Les jugements provisoires sont des décisions par lesquelles
une juridiction ordonne, durant l’instance, une mesure urgente visant à sauvegarde un intérêt
qui peut être compromis par le procès. Tel est le cas d’une décision d’octroi d’une pension
alimentaire ou une décision imposant aux époux, qui sont en instance de divorce, à résider
séparément. Les jugements relatifs à l’instruction sont ceux qui, sans trancher le fond du
procès, l’achemine, néanmoins, vers la solution. Il en est ainsi d’une mesure ordonnant une
enquête ou une expertise ou une comparution personnelle910.

En tenant compte de recours qui peuvent être introduits, on différencie, d’une part, les
jugements en premier ressort et les jugements en dernier ressort et, d’autre part, les jugements
contradictoires et les jugements par défaut. Les jugements en premier ressort sont ceux qui

908
J. MIGABO KALERE, op. cit.
909
A. HERAUD et A. MAURIN, op. cit., pp. 215-216.
910
F. TERRE, op. cit., p. 524.
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sont susceptibles d’appel, alors que les jugements en dernier ressort ne sont pas susceptibles
d’appel, ils peuvent faire l’objet d’un recours en cassation911. Le jugement est contradictoire,
lorsque les parties ont comparu, soit par elles-mêmes, soit par leurs représentants912. Le
jugement par défaut est celui qui est rendu sur base de seuls éléments fournis par une partie
au procès, l’autre partie n’ayant pas comparu913.

Suivant que le jugement entérine ou non l’accord des parties en conflit, on établit une
différence entre les jugements « ordinaire » et les jugements convenus. Le jugement
« ordinaire » est celui qui tanche véritablement le litige entre les parties, alors que le
jugement convenu ou jugement d’expédient est celui qui entérine l’accord des parties en
conflit en lui conférant l’autorité de la chose jugée914.

Selon qu’une juridiction a été saisie pour trancher un litige ou non, on distingue les
décisions contentieuses et les décisions gracieuses. Une décision contentieuse tranche une
contestation entre deux ou plusieurs parties, alors qu’une décision gracieuse règle une
question de droit non litigieuse915.

§ 3. L’élaboration des jugements

Une décision de justice peut être rendue sur le siège, c’est-à-dire immédiatement ou
après délibéré916.

Un jugement comprend, en principe, trois catégories d’énonciations :


 Certaines énonciations permettent de vérifier la régularité formelle du
jugement. Ainsi, elles indiquent la juridiction qui a rendu la décision, le nom
des juges qui ont pris la décision, la date du jugement, le nom de l’officier du
Ministère public qui a assisté aux débats, le nom du greffier et, le cas échéant,
le nom des avocats ou de toute personne ayant représenté ou assisté les parties
en conflit.

911
J.-J. TAISNE, op. cit., p. 143.
912
A. HERAUD et A. MAURIN, op. cit., p. 215.
913
J.-J. TAISNE, op. cit., p. 143.
914
A. HERAUD et A. MAURIN, op. cit., p. 216.
915
Ibidem, p. 217.
916
J.-J. TAISNE, op. cit., p. 142.
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 D’autres éléments font mention des parties en conflit et de leurs prétentions.


Ainsi, le jugement indique le nom de chaque partie, son domicile ainsi que les
chefs de demande formulés par les parties et les moyens qui leur servent de
support et auxquels la juridiction doit répondre.
 Les autres mentions se rapportent aux motifs et au dispositif de la décision.
Les motifs sont des raisons qui justifient la décision. En général, ils sont
rédigés sous forme d’ « attendu que ». Le dispositif est la solution du litige917.
La Constitution de la RDC prévoit que « Tout jugement est écrit et motivé. Il
est prononcé en audience publique »918.

§ 4. Les effets des jugements

L’acte juridictionnel produit trois effets : le dessaisissement du juge, la force


exécutoire et l’autorité de la chose jugé.

En principe, à partir du moment où un jugement est rendu, le juge est dessaisi de la


contestation qu’il a tranchée. Toutefois, il appartient notamment au juge qui s’est prononcé
de rétracter sa décision en cas d’opposition, de l’interpréter, à moins qu’elle ne soit frappée
d’appel, ou de la rectifier, dans certaines conditions, en vue de réparer des erreurs et
omissions matérielles919.

L’autorité de la chose jugée est une présomption irréfragable de vérité qui assortit ce
qui a été jugé. Cette autorité ne peut être contestée que par l’exercice des voies de recours
prévues par la loi. Lorsque sont épuisées les voies de recours ou quand expirent les délais
pour les exercer, nul n’est admis à intenter une nouvelle action qui puisse remettre en cause
ce qui a été jugé, sinon les litiges n’auraient jamais de fin.

La force exécutoire entraîne la possibilité de faire exécuter la décision rendue au


besoin en recourant à la force publique. C’est ce qu’exprime, en toutes lettres, la formule
exécutoire qui figure en bas de la décision. Une décision de justice peut être revêtue de la
force exécutoire, car c’est une décision de l’autorité publique et si elle n’est pas exécutée
volontairement, il sera possible de recourir à la force publique. A cet effet, celui qui a gagné

917
F. TERRE, op. cit., p. 524-525.
918
Art. 21, al. 1 de la Constitution de la RDC précitée.
919
F. TERRE, op. cit., p. 518.
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le procès peut obtenir du greffe la délivrance d’une copie appelée grosse revêtue de la
formule exécutoire920.

Section 4. Les voies de recours

§ 1. La notion de voie de recours

Les voies de recours sont donc des moyens dont l’utilisation permet d’obtenir, selon
les cas, soit l’annulation, soit la réformation totale ou partielle, soit la rétractation de la
décision de justice qui a été attaquée. Il s’agit donc des garanties de bonne justice parce que
leur exercice entraîne un nouvel examen de l’affaire qui a donné lieu à la décision qui a été
contestée par au moins l’une des parties en conflit921. Les voies de recours sont des garanties
contre les risques d’erreur ou d’injustice922. A cet égard, la Constitution de la RDC prévoit
que « Le droit de former un recours contre un jugement est garanti à tous. Il est exercé dans
les conditions fixées par la loi »923.

Une voie de réformation est celle qui conduit à un nouvel examen de l’affaire par une
juridiction différente de celle qui avait rendu la décision qui est attaquée, et qui est, en
principe, une juridiction supérieure, alors qu’une voie de rétractation est celle qui vise à faire
réexaminer l’affaire par la même juridiction qui avait rendu la décision qui est contestée924.

§ 2. La classification des voies de recours

On établit une distinction entre les voies ordinaires de recours et les voies
extraordinaires de recours.

I. Les voies ordinaires de recours

En principe, celles-ci sont toujours ouvertes, sauf dispositions contraires. En général,


elles sont suspensives d’exécution. Il s’agit de l’appel et de l’opposition925.

920
P. COURBE, op. cit., pp. 129-136.
921
G. COUCHEZ, Procédure civile, 14e éd., Paris, Dalloz, 2006, p. 421, n° 417.
922
J.-J. TAISNE, op. cit., p. 146.
923
Art. 21, al. 2 de la Constitution de la RDC précitée.
924
G. COUCHEZ, op. cit., p. 421, n° 417.
925
J.-J. TAISNE, op. cit., p. 146.
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A. L’appel

L’appel : il tend à faire réformer ou annuler, par la juridiction d’appel, une décision de
justice qui a été rendue par une juridiction du premier degré.

Ainsi, l’appel constitue d’abord une voie de réformation étant donné que, par cette
voie de recours, la partie, qui s’estime lésée par la décision rendue en première instance,
s’adresse à une juridiction supérieure en vue d’obtenir la modification de la décision
attaquée. La possibilité d’exercer l’appel passe pour une traduction du principe du double
degré de juridiction.

Dans certains cas, l’appel peut également passer pour une voie d’annulation d’un
jugement, si ce dernier est entaché d’une cause de nullité926.

B. L’opposition

C’est une voie de rétractation qui est ouverte à une partie contre laquelle un jugement
par défaut a été rendu. Dans ce cas, le défaillant demande à la même juridiction qui a rendu la
décision attaquée de statuer de nouveau sur la même affaire en fait et en droit927.
L’opposition ne peut être exercée que par la partie défaillante. Elle permet de rétablir le débat
contradictoire entre les parties en conflit928.

II. Les voies extraordinaires de recours

Ces voies de recours ne peuvent être formées que dans certains cas bien spécifiés par
929
la loi . En général, elles ne sont pas suspensives930. Il s’agit du pourvoi en cassation, de la
tierce opposition, de la requête civile, de la révision et de la prise à partie.

926
G. COUCHEZ, op. cit., p. 427, n° 419.
927
Ibidem, p. 451, n° 436.
928
J.-J. TAISNE, op. cit., p. 149.
929
G. COUCHEZ, op. cit., p. 455, n° 439.
930
J.-J. TAISNE, op. cit., p. 146.
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A. Le pourvoi en cassation

Il permet de soumettre à la juridiction la plus élevée de l’ordre judiciaire, la Cour de


cassation, des décisions de justice rendues en dernier ressort en vue d’obtenir leur cassation.
Cette juridiction n’examine que les moyens de droit soulevés par le pourvoi931.

B. La tierce opposition

Cette voie de recours tend à faire rétracter ou réformer une décision de justice au
profit du tiers qui l’attaque932. Etant donné qu’une décision de justice peut avoir des
répercussions à l’égard des tiers qui n’ont pas été partie au procès en leur causant un
préjudice, il importe, par cette voie de recours, de prévoir, au bénéfice de ces tiers, la
possibilité de faire modifier ou de faire disparaître la décision de justice, qui est mise en
cause933.

C. La révision

C’est une voie de recours, en matière pénale, qui tend à faire rétracter une décision de
justice passée en force de chose jugée pour qu’il soit statué à nouveau en fait et en droit. La
révision ne peut être demandée que pour une infraction punissable d’une servitude pénale
supérieure à deux mois, quelles que soient la juridiction qui ait statué et la peine qui ait été
prononcée934.

D. La requête civile

C’est une voie de recours par laquelle les parties ou leurs ayants cause sollicitent la
rétractation d’une décision passée en force de chose jugée et qu’ils considèrent comme ayant
été prise par erreur. Cette erreur est découverte après le prononcé du jugement qui est mis en
cause935.

931
G. COUCHEZ, op. cit., p. 463, n° 448.
932
Ibidem, p. 455, n° 440.
933
Ibidem, p. 456, n° 440.
934
Art. 67 de la loi organique n° 13/010 du 19 février 2013 relative à la procédure devant la Cour de cassation.
935
MATADI NENGA GAMANDA, op. cit., p. 490, n° 523 ; art. 85 du Code de procédure civile précité.
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E. La prise à partie

La prise à partie est une voie de recours qui peut être exercée lorsqu’il y a eu dol ou
concussion dans le chef d’un magistrat, soit en cours d’instruction, soit lors du prononcé de la
décision ou encore en cas de déni de justice936.

Le dol est un comportement malhonnête se traduisant par des manœuvres


frauduleuses, notamment la suppression d’une pièce décisive du dossier ou l’altération d’une
pièce937.

La concussion est le fait pour un fonctionnaire ou un agent public, dont un magistrat,


d’exiger, de recevoir ou de faire percevoir sciemment à titre de droits, taxes ou salaires, des
sommes non dues938.

Il y a déni de justice, lorsque les magistrats refusent de procéder aux devoirs de leur
charge ou négligent de juger les affaires en état d’être jugées939.

La prise à partie n’est une voie de recours extraordinaire que si la requête introduite
tend à l’annulation de la décision rendue par eux940.

Section 5. L’exécution des décisions judiciaires

§ 1. L’exécution des jugements civils

L’exécution d’une décision de justice se réalise à la demande de la partie la plus


diligente. Cette exécution peut être spontanée ou forcée941.

I. Les préalables de l’exécution forcée

La partie qui veut faire exécuter une décision de justice doit d’abord :

936
Art. 55 de la loi organique n° 13/010 du 19 février 2013 relative à la procédure devant la Cour de cassation.
937
MATADI NENGA GAMANDA, op. cit., p. 536, n° 604.
938
Art. 146 du Code pénal congolais.
939
Art. 58 de la loi organique n° 13/010 du 19 février 2013 relative à la procédure devant la Cour de cassation.
940
Ibidem, art. 59.
941
J.-J. TAISNE, op. cit., p. 152.
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 se faire délivrer par le greffe du tribunal qui a rendu la décision une expédition du
jugement revêtue de la formule exécutoire. En langage judiciaire, il s’agit de lever la
grosse ;
 signifier cette grosse à la partie contre laquelle l’exécution de la décision est
envisagée ;
 se faire délivrer un certificat de non-recours par le greffe, tel que le certificat de non-
appel, à l’expiration des délais prévus pour exercer ce recours (opposition ou appel, si
la partie qui a succombé n’a pas introduit un recours suspensif942.

II. Les moyens de contrainte

Ce sont les moyens par lesquels, on tend directement ou indirectement à obtenir le


respect des droits. On distingue donc les moyens directs de moyens indirects.

A. Les moyens directs

Ces moyens comprennent notamment :


 Le recours aux saisies : on distingue la saisie conservatoire, la saisie-arrêt et saisie-
exécution.
La saisie conservatoire est une saisie pratiquée par l’huissier sur requête d’un
créancier, avec ou sans titres, sans commandement préalable, mais avec la permission
du tribunal, sur les biens mobiliers de son débiteur943.
La saisie-arrêt est une saisie qui est pratiquée par un créancier sur des sommes
d’argent ou des biens mobiliers appartenant à son débiteur, mais qui se trouvent entre
les mains d’un tiers944.
La saisie-exécution est celle par laquelle un créancier, qui détient un titre exécutoire,
s’adresse à l’huissier en vue de faire saisir et vendre les biens de son débiteur pour se
faire payer sur le prix de leur vente945.
Au regard de ce qui précède, les saisies peuvent mobilières ou immobilières selon leur
objet. Une saisie est mobilière, lorsqu’elle a pour objet un bien meuble. Elle est
immobilière, quand elle porte sur un bien ou droit immobilier946.

942
Idem
943
MATADI NENGA GAMANDA, op. cit., p. 579, n° 656.
944
Ibidem, p. 561, n° 629.
945
Ibidem, p. 565, n° 637.
946
Ibidem, p. 580, n° 660.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 249 Université Catholique de Bukavu
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Le recours aux saisies ne peut pas se concevoir pour les droits et obligations dont
l’objet ne porte pas sur de l’argent.
 L’expulsion : il en est ainsi lorsque le propriétaire d’une maison sollicite le concours
de la force publique en vue de faire expulser un locataire qui se maintient indûment
dans sa maison. C’est une exécution sur une personne.
 La destruction d’une construction irrégulièrement érigée : tel est le cas du titulaire
d’une servitude non aedificandi (de ne pas construire) qui fait démolir une
construction érigée en violation de l’obligation de ne pas construire découlant de cette
servitude.
 La fermeture d’un fonds de commerce : si un fonds de commerce est ouvert en
violation d’une clause de non-rétablissement souscrite par le vendeur de ce fonds,
l’acquéreur du fonds de commerce, qui avait été cédé, peut obtenir la fermeture de ce
nouveau fonds de commerce947.

La Constitution de la RDC interdit de manière absolue l’emprisonnement pour dettes948.

B. Les moyens indirects

Ce sont des moyens d’intimidation qui peuvent inciter les sujets de droit au respect de
leurs obligations. Il en est ainsi de :
 le droit de rétention : c’est le droit en vertu duquel le détenteur d’une chose
appartenant à autrui est autorisé à la garder jusqu’au paiement de ce qui lui est dû par
le propriétaire de cette chose ;
 l’astreinte : elle consiste à faire condamner le débiteur au paiement d’une certaine
somme d’argent par jour tant qu’il ne s’exécutera pas949.

§ 2. L’exécution des jugements en matière pénale

En cas de condamnation, la décision prise par une juridiction pénale comporte


nécessairement une sanction pénale et éventuellement une sanction consistant dans la
réparation des dommages subis par la victime de l’infraction.

947
F. TERRE, op. cit., p. 498.
948
Art. 61, point 6 de la Constitution de la RDC précitée.
949
F. TERRE, op. cit., p. 499.
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Le législateur congolais prévoit à cet égard que « L’exécution est poursuivie par le
Ministère public en ce qui concerne la peine de mort, la peine de servitude pénale, les
dommages-intérêts prononcés d’office et la contrainte par corps; par la partie civile, en ce
qui concerne les condamnations prononcées à sa requête; par le greffier, en ce qui concerne
le recouvrement des amendes, des frais et du droit proportionnel »950.

Le Ministère public a donc le droit de requérir la force publique pour faire procéder à
l’arrestation des délinquants et les mettre en prison951. Pour obtenir l’exécution de sa
décision, la victime d’une infraction utilise les mesures d’exécution qui sont prévues en
matière civile.

§ 3. L’exécution des décisions des juridictions administratives

L’autorité de la chose jugée confère la force obligatoire aux décisions


juridictionnelles. Ainsi, l’Administration est tenue d’exécuter la décision juridictionnelle et
de ne rien faire qui soit en contradiction avec cette décision. L’inexécution d’une décision de
justice constitue une illégalité. Si l’Administration ne s’exécute pas ou si elle met du retard à
exécuter une décision de justice, cette inexécution ou ce retard constitue une faute sur base de
laquelle la responsabilité pécuniaire de l’Administration peut être engagée952, sauf si
l’intervention de l’Administration a pour effet de compromettre gravement l’ordre public953.

On ne peut appliquer les voies d’exécution du droit privé à l’encontre des personnes
morales de droit public sur des biens composant leur patrimoine et qui sont affectés à l’usage
du public ou au service public.

950
Art 109 du Code de procédure pénale précité.
951
Art 110 et suivants du Code de procédure pénale précité.
952
G. PEISER, Contentieux administratif, Paris, Dalloz, 1990, p. 205.
953
H. LE BERRE, Droit du contentieux administratif, Paris, Ellipses, 2002, p. 198.
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Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 256 Université Catholique de Bukavu
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année, numéro spécial, 5 février 2011.

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fonctionnement des entités territoriales décentralisées et leur rapport avec l’Etat et les
provinces, in Journal officiel de la RDC, Kinshasa, le 10 octobre 2008.

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cassation.

Loi organique n° 13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et


compétences des juridictions de l'ordre judiciaire.

Loi organique n° 13/026 du 15 octobre 2013 portant organisation et fonctionnement de la


Cour constitutionnelle.
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 257 Université Catholique de Bukavu
Par Jean-Petit MULUME ZIHALIRWA G1 Droit/2017-2018

TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION GENERALE ............................................................................................... 1


I. L’objet du cours ................................................................................................................. 1
II Les objectifs du cours ........................................................................................................ 2
III La méthodologie d’enseignement ................................................................................... 3
IV Le contrôle des connaissances ........................................................................................ 3
Première partie : LE DROIT OBJECTIF .................................................................................. 4
Chapitre I. QUELQUES NOTIONS DE DROIT .................................................................. 4
Section 1. La définition du droit ........................................................................................ 4
§ 1. Le droit entendu comme droit objectif ou positif ................................................... 4
§ 2. Le droit entendu comme droit subjectif ................................................................. 5
§ 3. Le droit entendu comme science ou discipline ...................................................... 6
§ 4. Le droit entendu comme droit naturel .................................................................... 7
Section 2. Les fonctions du droit ....................................................................................... 7
§ 1. La structuration de la société .................................................................................. 8
I. La structuration du pouvoir politique .................................................................... 8
II. La garantie de la cohésion sociale ........................................................................ 8
§ 2. La facilitation de la vie individuelle ....................................................................... 9
I. La création des sphères d’autonomie ..................................................................... 9
II. La prévention des comportements non souhaités et l’encouragement des
comportements souhaités ........................................................................................ 10
III. La coordination des comportements humains ................................................... 10
IV. La facilitation des arrangements privés ............................................................ 10
V. L’allocation des ressources ................................................................................ 11
VI. La redistribution des biens et services .............................................................. 11
VII. La résolution des conflits ................................................................................. 11
§ 3. La réalisation du développement économique et social ...................................... 11
Section 3. Les systèmes juridiques .................................................................................. 12
§ 1. La notion de système juridique ............................................................................ 12
§ 2. La diversité des droits et leur groupement en familles ......................................... 13
§ 3. Les principaux systèmes juridiques contemporains ............................................. 15
I. La famille Romano-germanique .......................................................................... 15
II. La famille du common law ................................................................................. 16
III. Les droits socialistes.......................................................................................... 18
IV. Les droits religieux ............................................................................................ 19
Section 4. Le rapport entre le droit et les autres ordres sociaux ...................................... 20
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§ 1. Le rapport entre le droit et les règles de morale ................................................... 20


I. La notion de morale ............................................................................................. 20
II. Le rapprochement entre les règles morales et règles de droit ............................. 21
III. Les différences entre les règles de droit et les règles morales........................... 21
A. Du point de vue de la finalité des règles......................................................... 22
B. Du point de vue des sources de ces règles ...................................................... 22
C. Du point de vue du contenu de ces règles ...................................................... 22
D. Du point de vue des sanctions ........................................................................ 23
§ 2. Le rapport entre les règles de droit et les règles religieuses ................................. 23
I. La définition des règles religieuses ..................................................................... 23
II. Le rapport entre les règles du droit et les règles religieuses quant à leur domaine
................................................................................................................................. 24
A. Le rapprochement entre les règles de droit et les règles religieuses............... 24
B. La séparation du droit et de la religion ........................................................... 24
III. Le rapport entre les règles religieuses et les règles de droit quant aux sanctions
................................................................................................................................. 25
§ 3. Le rapport entre les règles du droit et les autres règles de conduite .................... 25
I. La notion d’autres règles de conduite .................................................................. 25
II. Le rapprochement entre les règles de droit et ces autres règles de conduite ...... 25
II. Les différences entre les règles de droit et les autres règles de conduite ........... 26
Section 5. Le fondement du droit .................................................................................... 26
§ 1. Les doctrines idéalistes......................................................................................... 26
I. La conception antique du droit naturel ................................................................ 26
II. La conception chrétienne du droit naturel .......................................................... 28
III. L’école du droit naturel ..................................................................................... 28
IV. La conception individualiste du droit naturel. .................................................. 29
§ 2. Les doctrines positivistes ..................................................................................... 29
I. Le positivisme juridique ...................................................................................... 30
II. Le positivisme scientifique ................................................................................. 30
§ 3. Les critiques des doctrines idéalistes et positivistes ............................................. 31
I. Les critiques à l’égard des doctrines idéalistes .................................................... 31
II. Les critiques à l’égard des doctrines positivistes ................................................ 32
§ 4. Les critères de la validité d’une règle de droit ..................................................... 32
Section VI. Les sciences auxiliaires du droit .................................................................. 34
§ 1. L’économie........................................................................................................... 34
§ 2. La sociologie ........................................................................................................ 35
§ 3. L’histoire .............................................................................................................. 36
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§ 4. Le droit comparé .................................................................................................. 37


§ 5. L’ethnologie et l’anthropologie juridique ............................................................ 38
§ 6. La philosophie du droit ........................................................................................ 39
§ 7. L’informatique juridique ...................................................................................... 39
§ 8. Les sciences biologiques ...................................................................................... 39
§ 9. Les autres disciplines auxiliaires du droit ............................................................ 40
Chapitre II. L’ELEMENT DE BASE DU SYSTEME JURIDIQUE: LA REGLE DE
DROIT ................................................................................................................................. 41
Section 1. La notion de règle de droit ............................................................................. 41
Section 2. Les caractères de la règle de droit .................................................................. 42
§ 1. La règle de droit : une règle de conduite .............................................................. 42
§ 2. La règle de droit : une règle sociétaire ................................................................. 43
§ 3. La règle de droit : une règle obligatoire ............................................................... 45
§ 4. La règle de droit : une règle générale et abstraite................................................. 46
I. La règle de droit : une règle générale ................................................................... 46
II. La règle de droit : une règle abstraite ................................................................. 47
III. L’appréciation critique du caractère général et abstrait de la règle de droit ..... 47
§ 5. La règle de droit : une règle sanctionnée par la contrainte publique .................... 49
I. La sanction : un caractère essentiel de la règle de droit ....................................... 49
II. La sanction : un monopole de l’Etat ................................................................... 51
III. La diversité des sanctions .................................................................................. 52
A. Les sanctions pénales ..................................................................................... 52
B. La réparation ................................................................................................... 53
C. L’annulation.................................................................................................... 54
IV. La contrainte étatique ........................................................................................ 54
V. La sanction dans les rapports entre Etats souverains ......................................... 55
VI. Les règles de droit dépourvues de sanction....................................................... 56
A. Les règles dépourvues de sanction en droit international public .................... 56
B. Les règles dépourvues de sanction en droit interne ........................................ 57
Section 3. Les types de règles de droit ............................................................................ 58
§ 1. Du point de vue de la portée des règles de droit .................................................. 58
I. Les règles générales ............................................................................................. 58
II. Les règles individuelles ...................................................................................... 59
§ 2. Du point de vue de l’objet des règles ................................................................... 60
I. Les règles primaires ............................................................................................. 60
II. Les règles secondaires ........................................................................................ 61
§ 3. Du point de vue du caractère obligatoire des règles ............................................. 61
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 260 Université Catholique de Bukavu
Par Jean-Petit MULUME ZIHALIRWA G1 Droit/2017-2018

I. La règle de droit formulée comme commandement ............................................ 61


II. La règle de droit formulée comme recommandation .......................................... 62
§ 4. Du point de vue du comportement qui doit avoir lieu.......................................... 63
§ 5. Du point de vue de l’origine des règles ................................................................ 64
I. Les règles de droit interne .................................................................................... 64
II. Les règles de droit international ......................................................................... 64
§ 6. Du point de vue de la forme des règles ................................................................ 64
Section 4. La structure et les destinataires de la règle de droit ....................................... 64
§ 1. La structure de la règle de droit ............................................................................ 64
§ 2. Les destinataires de la règle de droit .................................................................... 66
Chapitre III. LES SOURCES DU DROIT OBJECTIF ....................................................... 67
Section 1. Les sources formelles obligatoires ................................................................. 67
§ 1. La classification des sources formelles obligatoires ............................................ 68
I. Les sources supra-législatives .............................................................................. 68
A. La Constitution ............................................................................................... 68
1. La notion de Constitution ............................................................................ 68
2. Le contenu de la Constitution...................................................................... 69
3. Le bloc de constitutionnalité ....................................................................... 69
5. Le contrôle de la constitutionnalité des lois ................................................ 70
B. Les traités et accords internationaux .............................................................. 71
1. La notion de traités et accords internationaux ............................................. 71
2. Les espèces de traités internationaux .......................................................... 72
3. L’élaboration des traités internationaux ...................................................... 73
4. La conformité à la Constitution des traités internationaux ......................... 75
5. La conformité des lois aux traités et accords internationaux ..................... 76
II. La loi ................................................................................................................... 77
A. La notion de loi............................................................................................... 77
B. Les différentes sortes de lois au sens strict ..................................................... 78
1. Les lois constitutionnelles ........................................................................... 78
2. Les lois organiques ...................................................................................... 78
3. Les lois ordinaires ....................................................................................... 79
4. Les lois référendaires .................................................................................. 80
C. Le domaine de la loi ....................................................................................... 80
1. Le principe ................................................................................................... 80
2. Les matières intégralement législatives ....................................................... 80
3. Les matières législatives pour les principes fondamentaux ........................ 81
D. L’élaboration de la loi au sens strict ............................................................... 81
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 261 Université Catholique de Bukavu
Par Jean-Petit MULUME ZIHALIRWA G1 Droit/2017-2018

1. L’initiative de la loi ..................................................................................... 82


2. L’examen des dispositions par les Chambres ............................................. 82
a. Le travail en commission......................................................................... 82
b. Le débat en séance publique................................................................... 83
3. L’adoption du texte par les Chambres ......................................................... 83
4. L’intervention du Président de la République ............................................. 84
a. La sanction.............................................................................................. 84
b. La promulgation ...................................................................................... 84
c. La signature ............................................................................................. 85
5. La publication de loi .................................................................................... 85
E. La présentation formelle de la loi ................................................................... 86
F. La codification ................................................................................................ 87
III. Les règlements administratifs............................................................................ 88
A. La notion de règlements administratifs .......................................................... 88
B. Les sortes de règlements administratifs .......................................................... 89
1. Les règlements autonomes .......................................................................... 89
a. La notion de règlement autonome ........................................................... 89
b. Le domaine du règlement autonome ....................................................... 89
b. Le contrôle du règlement autonome ........................................................ 89
2. Les règlements d’application....................................................................... 90
a. La notion de règlement d’application ...................................................... 90
b. Le domaine des règlements d’application et leurs formes ...................... 90
c. Le contrôle de la légalité des règlements d’application .......................... 91
d. Le contrôle de constitutionnalité ............................................................. 92
e. Le contrôle de conventionalité ................................................................ 92
3. Le règlement exceptionnel .......................................................................... 92
C. Le régime juridique des actes administratifs unilatéraux ............................... 93
1. L’élaboration de l’acte administratif unilatéral ........................................... 93
a. La compétence de l’auteur de l’acte administratif unilatéral .................. 93
b. La forme et la procédure de la naissance de l’acte administratif unilatéral
..................................................................................................................... 95
- La procédure de l’acte administratif ..................................................... 96
c. Les délais de prise de décision ................................................................ 98
d. La publicité de l’acte administratif unilatéral.......................................... 98
e. Le but poursuivi par l’auteur de l’acte administratif unilatéral ............... 99
2. L’exécution de l’acte administratif unilatéral ............................................. 99
a. L’exécution normale de l’acte administratif unilatéral............................ 99
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 262 Université Catholique de Bukavu
Par Jean-Petit MULUME ZIHALIRWA G1 Droit/2017-2018

b. L’exécution forcée de l’acte administratif unilatéral ............................ 100


3. La disparition de l’acte administratif unilatéral ........................................ 100
a. Les modes de disparition par la volonté de l’Administration................ 100
- L’abrogation ........................................................................................ 100
- L’annulation ........................................................................................ 101
- Le retrait .............................................................................................. 101
b. La disparition des actes administratifs par l’annulation par le juge ...... 101
c. La disparition de l’acte administratif par la survenance de certains
évènements ................................................................................................ 101
- La caducité .......................................................................................... 101
- La désuétude ....................................................................................... 102
VI. La convention collective de travail ................................................................. 102
A. La notion de convention collective de travail .............................................. 102
B. La nature juridique de la convention collective de travail ............................ 103
C. Les effets juridiques de la convention collective de travail .......................... 104
V. La coutume ....................................................................................................... 105
A. La notion de coutume ................................................................................... 105
B. Le rôle et la force obligatoire de la coutume ................................................ 106
1. La coutume secundum legem .................................................................... 106
2. La coutume praeter legem......................................................................... 107
3. La coutume contra legem .......................................................................... 107
C. La place de la coutume en droit .................................................................... 108
1. La coutume en droit international public .................................................. 108
2. La coutume en droit interne ...................................................................... 108
VI. Les principes généraux du droit ...................................................................... 109
A. La notion de principes généraux du droit ..................................................... 109
B. La consécration et le champ d’application des principes généraux du droit 111
C. Quelques exemples de principes généraux du droit ..................................... 113
§ 2. L’application de la loi au sens large ................................................................... 113
I. Les conditions d’application de la loi ................................................................ 113
A. La promulgation de la loi ............................................................................. 114
B. La publication de la loi ................................................................................. 114
C. L’abrogation et la caducité de la loi ............................................................. 117
1. L’abrogation de la loi ................................................................................ 117
a. La notion d’abrogation .......................................................................... 117
b. Les modes d’abrogation de la loi .......................................................... 118
- L’abrogation par l’autorité compétente............................................... 118
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 263 Université Catholique de Bukavu
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- L’abrogation par désuétude................................................................. 118


c. Les effets de l’abrogation ...................................................................... 119
2. La caducité ................................................................................................ 119
II. L’interprétation de la loi ................................................................................... 120
A. La notion d’interprétation de la loi ............................................................... 120
B. Les doctrines relatives à l’interprétation de la loi......................................... 120
1. L’école de l’exégèse .................................................................................. 120
2. L’école historique ou évolutive ................................................................. 121
3. L’école scientifique ................................................................................... 122
C. Les méthodes d’interprétation ...................................................................... 122
1. La méthode linguistique ............................................................................ 122
2. La méthode systématique .......................................................................... 122
3. La méthode historique ............................................................................... 123
4. La méthode téléologique ........................................................................... 123
5. La méthode sociologique .......................................................................... 123
D. Les sources d’interprétation ......................................................................... 124
1. L’interprétation authentique ...................................................................... 124
2. L’interprétation judiciaire ......................................................................... 124
3. L’interprétation administrative ................................................................. 124
4. L’interprétation doctrinale ......................................................................... 125
E. Quelques principes d’interprétation de la loi ................................................ 125
1. Les principes d’interprétation déduits du postulat de rationalité du
législateur ...................................................................................................... 125
2. Les principes d’interprétation d’origine doctrinale ou jurisprudentielle ... 126
F. Le juge et le problème de lacunes ................................................................. 127
III. L’application de la loi dans le temps et dans l’espace .................................... 128
A. L’application de la loi dans le temps ............................................................ 128
1. La position du problème ............................................................................ 128
2. Les solutions possibles aux conflits des lois dans le temps ...................... 128
a. La non rétroactivité de la loi nouvelle ................................................... 128
b. La rétroactivité de la loi nouvelle .......................................................... 130
c. L’application immédiate de la loi nouvelle ........................................... 131
B. L’application de la loi dans l’espace ............................................................ 131
1. La position du problème ............................................................................ 131
2. Les principes de solutions retenus en droit congolais ............................... 132
a. En droit privé ......................................................................................... 132
- Le critère de territorialité de la loi ...................................................... 132
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- Le critère de personnalité de la loi ...................................................... 133


- Le critère de l’autonomie de la volonté .............................................. 133
b. En droit pénal ........................................................................................ 133
- Le critère de territorialité de la loi pénale ........................................... 133
- Le critère de personnalité de la loi pénale........................................... 134
- Le système de l’universalité de la loi pénale ...................................... 134
§ 3. La sauvegarde de la cohérence au sein de la loi au sens large ........................... 134
I. Le principe hiérarchique .................................................................................... 135
II. Les moyens préventifs destinés à sauvegarder la cohérence interne ................ 135
III. Les moyens curatifs destinés à rétablir la cohérence interne de la loi ............ 137
Section 2. Les autres sources du droit objectif .............................................................. 138
§ 1. La jurisprudence ................................................................................................. 138
I. La notion de jurisprudence ................................................................................. 138
II. Le rôle de la jurisprudence ............................................................................... 138
III. L’autorité de la jurisprudence.......................................................................... 140
IV. Interdiction de légiférer, prohibition des arrêts de règlement et admission des
arrêts de principe ................................................................................................... 141
V. La publication des décisions de justice ............................................................ 142
§ 2. La doctrine......................................................................................................... 142
I. La notion de doctrine ......................................................................................... 142
II. Le rôle de la doctrine ........................................................................................ 143
§ 3. La pratique......................................................................................................... 143
§ 4. L’équité .............................................................................................................. 144
Section 3. Les sources matérielles du droit ................................................................... 145
§ 1. La notion de sources matérielles du droit ........................................................... 145
§ 2. Les facteurs du droit ........................................................................................... 145
I. Le droit naturel ................................................................................................... 145
II. Les règles religieuses ........................................................................................ 145
III. Les règles morales ........................................................................................... 146
IV. Les facteurs économiques ............................................................................... 146
V. Les facteurs politiques ...................................................................................... 146
VI. La tradition ...................................................................................................... 146
VII. Le sentiment de l’opinion publique ............................................................... 147
Section 1. Le classement des concepts et des catégories .............................................. 148
§ 1. Les concepts ....................................................................................................... 148
§ 2. Les catégories ..................................................................................................... 150
§ 3. La qualification .................................................................................................. 151
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 265 Université Catholique de Bukavu
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Section 2. L’assemblement organique des règles de droit ............................................ 152


§ 1. Les institutions juridiques .................................................................................. 152
I. La notion d’institution juridique ........................................................................ 152
II. L’utilité des institutions juridiques ................................................................... 153
III. Les caractéristiques des institutions juridiques ............................................... 154
IV. La distinction entre les institutions-mécanismes et les institutions-organismes
............................................................................................................................... 155
A. Les institutions-organismes .......................................................................... 155
B. Les institutions-mécanismes ......................................................................... 155
§ 2. Les branches du droit ......................................................................................... 155
I. Le contenu de la distinction ............................................................................... 156
A. Les disciplines rattachées au droit public ..................................................... 156
1. Le droit constitutionnel ............................................................................. 156
2. Le droit administratif ................................................................................. 157
3. Le droit fiscal ............................................................................................ 157
4. Le droit des finances publiques ................................................................. 158
5. Le droit pénal et la procédure pénale ........................................................ 158
a. Le droit pénal ......................................................................................... 158
b. La procédure pénale .............................................................................. 159
6. Le droit de la sécurité sociale .................................................................... 159
7. Le droit public de l’économie ................................................................... 160
8. Le droit international public ...................................................................... 160
B. Les disciplines rattachées au droit privé ....................................................... 160
1. Le droit civil .............................................................................................. 160
2. Le droit commercial .................................................................................. 161
3. Le droit du travail ...................................................................................... 162
C. Les disciplines mixtes ................................................................................... 162
1. Le droit judiciaire privé ............................................................................. 162
2. Le droit international privé ........................................................................ 163
II. La valeur de la distinction entre le droit public et le droit privé....................... 163
A. Le fondement de la distinction ..................................................................... 163
B. Les critiques de la distinction entre droit public et droit privé ..................... 164
C. La persistance de la distinction entre le droit public et le droit privé ........... 165
1. La distinction de deux ordres de juridiction .............................................. 165
2. La distinction des règles applicables ......................................................... 165
Deuxième partie : LES DROITS SUBJECTIFS ................................................................... 166
Chapitre I. LES SUJETS DE DROIT ............................................................................... 166
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 266 Université Catholique de Bukavu
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Section 1. La notion de sujet de droit ............................................................................ 166


Section 2. Les personnes physiques .............................................................................. 167
§ 1. La durée de la personnalité juridique d’une personne physique ........................ 167
I. Le commencement de la personnalité ................................................................ 167
II. La fin de la personnalité ................................................................................... 167
III. Le doute quant à l’existence de la personnalité ............................................... 167
A. L’absence...................................................................................................... 168
B. La disparition ................................................................................................ 168
§ 2. L’étendue de la personnalité .............................................................................. 169
I. La notion de capacité juridique .......................................................................... 169
II. Les sortes de capacité juridique ........................................................................ 169
III. Régimes d’incapacité ...................................................................................... 169
A. Le régime de représentation ......................................................................... 170
B. Le régime d’assistance.................................................................................. 170
C. Le régime d’autorisation ............................................................................... 170
§ 3. L’identification des personnes physiques .......................................................... 171
I. L’état des personnes ........................................................................................... 171
A. La notion d’état des personnes ..................................................................... 171
B. Les caractères de l’état des personnes .......................................................... 172
II. Le nom .............................................................................................................. 172
A. La définition du nom .................................................................................... 172
B. Les éléments constitutifs du nom ................................................................. 173
C. La nature juridique du nom .......................................................................... 173
D. Les caractères du nom .................................................................................. 173
E. La protection juridique du nom .................................................................... 174
III. Le sexe............................................................................................................. 174
IV. Le domicile et la résidence .............................................................................. 174
V. La nationalité .................................................................................................... 176
Section 3. Les personnes morales ................................................................................. 177
§ 1. La notion de personne morale ............................................................................ 177
§ 2. La classification des personnes morales ............................................................. 177
I. Les personnes morales de droit public ............................................................... 177
II. Les personnes morales de droit privé ............................................................... 178
A. Les groupements de personnes ..................................................................... 178
1. Les sociétés ............................................................................................... 179
2. Les associations sans but lucratif .............................................................. 179
3. Les syndicats ............................................................................................. 179
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 267 Université Catholique de Bukavu
Par Jean-Petit MULUME ZIHALIRWA G1 Droit/2017-2018

B. Les groupements de biens............................................................................. 180


1. Les fondations ........................................................................................... 180
2. Les sociétés unipersonnelles ..................................................................... 180
III. Les personnes morales de caractère mixte ...................................................... 180
§ 3. La condition juridique des personnes morales ................................................... 181
I. L’identification de la personne morale .............................................................. 181
II. L’organisation de la personne morale .............................................................. 182
III. Le patrimoine de la personne morale .............................................................. 182
IV. La capacité de la personne morale .................................................................. 182
V. La responsabilité de la personne morale .......................................................... 183
Chapitre II. LA CLASSIFICATION ET LE REGIME DES DROITS SUBJECTIFS ..... 184
Section 1. Les droits patrimoniaux ................................................................................ 184
§ 1. La notion de patrimoine ..................................................................................... 184
§ 2. L’actif du patrimoine .......................................................................................... 186
I. Les droits réels ................................................................................................... 187
A. La notion de droit réel .................................................................................. 187
B. Les catégories de droits réels ........................................................................ 187
1. Les droits réels principaux ........................................................................ 187
2. Les droits réels accessoires........................................................................ 189
C. Les effets de droits réels ............................................................................... 190
II. Les droits de créance ....................................................................................... 190
III. Les droits intellectuels ..................................................................................... 191
§ 3. Les caractères des droits patrimoniaux .............................................................. 192
Section 2. Les droits extrapatrimoniaux ........................................................................ 193
§ 1. La notion de droits extrapatrimoniaux ............................................................... 193
§ 2. Les sortes de droits extrapatrimoniaux............................................................... 193
§ 2. Les caractères des droits extrapatrimoniaux ...................................................... 194
§ 3. Les sanctions de la violation des droits extrapatrimoniaux................................ 194
I. Les sanctions pénales ......................................................................................... 194
II. Les sanctions civiles ......................................................................................... 195
Section 3. Les limites de la distinction entre droits patrimoniaux et droits
extrapatrimoniaux.......................................................................................................... 196
Chapitre III. LES SOURCES DES DROITS SUBJECTIFS ............................................ 198
Section 1. Les actes juridiques ...................................................................................... 198
§ 1. La notion d’actes juridiques ............................................................................... 198
§ 2. La classification des actes juridiques ................................................................. 198
I. L’acte juridique unilatéral et l’acte juridique bilatéral ...................................... 199
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II. L’acte juridique à titre gratuit et l’acte juridique à titre onéreux ...................... 199
III. L’acte juridique commutatif et l’acte juridique aléatoire ................................ 200
IV. L’acte juridique entre vifs et l’acte juridique à cause de mort ........................ 200
V. L’acte juridique public et l’acte juridique privé ............................................... 201
VI. Les actes conservatoires, d’administration et de disposition .......................... 201
VII. L’acte juridique solennel et l’acte juridique consensuel ................................ 202
VIII. L’acte juridique instantané et l’acte juridique successif............................... 202
IX. L’acte juridique principal et l’acte juridique accessoire ................................. 203
X. L’acte juridique patrimonial et l’acte juridique extrapatrimonial .................... 203
§ 3. La formation des actes juridiques....................................................................... 203
I. Les conditions de validité des actes juridiques .................................................. 203
A. Les conditions de fond ................................................................................. 204
1. La volonté .................................................................................................. 204
2. La capacité ................................................................................................. 206
3. L’objet ....................................................................................................... 206
4. La cause ..................................................................................................... 207
B. Les conditions de forme ............................................................................... 207
II. La sanction de la violation des conditions de validité des actes juridiques ...... 208
A. La notion de nullité....................................................................................... 208
B. Les sortes de nullité ...................................................................................... 208
§ 4. Les effets des actes juridiques ............................................................................ 209
I. Les effets des actes unilatéraux .......................................................................... 209
II. Les effets des contrats ....................................................................................... 210
A. Les effets des contrats de droit privé ............................................................ 210
1. Les effets internes de l’acte juridique........................................................ 210
2. Les effets externes de l’acte juridique ....................................................... 211
B. Les effets des contrats administratifs............................................................ 211
III. Les effets des actes collectifs .......................................................................... 212
Section 2. Les faits juridiques ....................................................................................... 212
§ 1. La notion de faits juridiques ............................................................................... 212
§ 2. La classification des faits juridiques .................................................................. 212
I. Les faits juridiques involontaires ....................................................................... 213
A. Les événements de la vie des personnes physiques...................................... 213
B. Les événements naturels ............................................................................... 213
C. L’écoulement du temps ................................................................................ 214
II. Les faits juridiques volontaires ......................................................................... 214
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Chapitre IV. LES MODES DE CREATION, LA TRANSMISSION, LES MODALITES,


LE CONTROLE DE MISE EN ŒUVRE ET L’EXTINCTION DES DROITS
SUBJECTIFS .................................................................................................................... 216
Section 1. Les modes de création des droits subjectifs ................................................. 216
Section 2. La transmission des droits subjectifs ............................................................ 216
Section 3. Les modalités des droits subjectifs ............................................................... 217
§ 1. Le terme.............................................................................................................. 217
I. La définition du terme ........................................................................................ 217
II. Les sortes de terme ........................................................................................... 218
§ 2. La condition........................................................................................................ 218
I. La définition de la condition .............................................................................. 218
II. Les sortes de condition ..................................................................................... 218
Section 4. Le contrôle de la mise en œuvre des droits subjectifs .................................. 219
Section 5. L’extinction des droits subjectifs ................................................................. 220
Troisième partie : LA REALISATION DES DROITS EN JUSTICE .................................. 222
Chapitre I. L’ORGANISATION JUDICIAIRE ................................................................ 222
Section 1. Les juridictions ............................................................................................. 222
§ 1. Les juridictions étatiques .................................................................................... 222
I. L’ordre constitutionnel ....................................................................................... 223
II. L’ordre judiciaire .............................................................................................. 223
III. L’ordre administratif ....................................................................................... 225
§ 2. Les juridictions internationales .......................................................................... 225
I. La Cour international de Justice ........................................................................ 225
II. Les tribunaux pénaux ad hoc ............................................................................ 226
III. La Cour pénale internationale ......................................................................... 226
IV. Les juridictions de droit communautaire ........................................................ 226
Section 2. Le personnel judiciaire ................................................................................. 227
§ 1. Les magistrats ..................................................................................................... 227
§ 2. Les auxiliaires de la justice ................................................................................ 228
I. Les auxiliaires du juge ....................................................................................... 228
A. Les greffiers .................................................................................................. 228
B. Les personnels de police judiciaire .............................................................. 228
C. Les huissiers ................................................................................................. 228
D. Les experts .................................................................................................... 229
II. Les auxiliaires des justiciables : les avocats et défenseurs judiciaires ............. 229
Section 3. Les modes non juridictionnels de règlement des litiges ............................... 229
Chapitre II. LA PREUVE EN DROIT .............................................................................. 231
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 270 Université Catholique de Bukavu
Par Jean-Petit MULUME ZIHALIRWA G1 Droit/2017-2018

Section 1. La nécessité de prouver en droit ................................................................... 231


Section 2. L’objet de la preuve ...................................................................................... 231
Section 3. La charge de la preuve.................................................................................. 232
Section 4. Les moyens de preuve .................................................................................. 232
§ 1. Les modes de preuve .......................................................................................... 232
I. Les preuves directes ........................................................................................... 232
A. La preuve littérale ou preuve par écrit .......................................................... 232
B. L’aveu ........................................................................................................... 233
C. Le témoignage .............................................................................................. 233
D. Le serment .................................................................................................... 233
II. Les preuves indirectes ou présomptions ........................................................... 233
§ 2. L’admissibilité des preuves ................................................................................ 234
I. Le système de preuve légale .............................................................................. 234
II. Le système de preuve libre ............................................................................... 234
Chapitre III. LE PROCES ................................................................................................ 236
Section 1. L’action en justice ........................................................................................ 236
§ 1. La définition de l’action en justice ..................................................................... 236
§ 2. Les conditions de l’action en justice .................................................................. 236
I. L’intérêt .............................................................................................................. 236
II. La qualité .......................................................................................................... 237
III. La capacité ....................................................................................................... 237
§ 3. La classification des actions en justice ............................................................... 237
Section 2. L’instance ..................................................................................................... 238
Section 3. Les jugements ............................................................................................... 240
§ 1. La notion de jugement ........................................................................................ 240
§ 2. La classification des jugements .......................................................................... 241
§ 3. L’élaboration des jugements .............................................................................. 242
§ 4. Les effets des jugements .................................................................................... 243
Section 4. Les voies de recours ..................................................................................... 244
§ 1. La notion de voie de recours .............................................................................. 244
§ 2. La classification des voies de recours ................................................................ 244
I. Les voies ordinaires de recours .......................................................................... 244
A. L’appel .......................................................................................................... 245
B. L’opposition.................................................................................................. 245
II. Les voies extraordinaires de recours................................................................. 245
A. Le pourvoi en cassation ................................................................................ 246
B. La tierce opposition ...................................................................................... 246
Cours d’introduction générale à l’étude du Droit 271 Université Catholique de Bukavu
Par Jean-Petit MULUME ZIHALIRWA G1 Droit/2017-2018

C. La révision .................................................................................................... 246


D. La requête civile ........................................................................................... 246
E. La prise à partie ............................................................................................. 247
Section 5. L’exécution des décisions judiciaires ........................................................... 247
§ 1. L’exécution des jugements civils ....................................................................... 247
I. Les préalables de l’exécution forcée .................................................................. 247
II. Les moyens de contrainte ................................................................................. 248
A. Les moyens directs ....................................................................................... 248
B. Les moyens indirects .................................................................................... 249
§ 2. L’exécution des jugements en matière pénale .................................................... 249
§ 3. L’exécution des décisions des juridictions administratives ............................... 250
BIBLIOGRAPHIE ................................................................................................................ 251
I. Ouvrages ........................................................................................................................ 251
II. Dictionnaires, syllabus et notes de cours ..................................................................... 254
III. Instruments juridiques ................................................................................................. 254
TABLE DES MATIERES .................................................................................................... 257

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