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Partie 1
Le développement, enjeu de controverses théoriques
1. Délimitation historique
2. Délimitation théorique
1. Le poids de la colonisation
Partie 2
Une question économique et sociale globale
Partie 3
Vers une nouvelle économie du développement ?
5I L’ajustement structurel
Conclusion générale
Bibliographie
INTRODUCTION
Le dÉveloppement, enjeu de
controverses thÉoriques
Le développement fait partie des domaines d’étude en économie qui
font le moins l’unanimité entre les courants théoriques et ce pour
plusieurs raisons :
son existence même et sa légitimité comme champ d’étude
autonome, appelant des concepts et des outils théoriques
spécifiques, sont loin d’être admis par tous ;
la délimitation et les définitions des concepts eux-mêmes –
développement et sous-développement – débouchent directement
sur des controverses majeures ;
enfin, celles-ci recoupent un certain nombre de clivages théoriques
qui sont au centre de la pensée économique en général,
notamment ceux qui traversent l’économie internationale parmi
les chercheurs de différents pays.
Chapitre 1
1. Délimitation historique
C’est également dans cette dimension que l’économie du développement fait l’objet
d’une remise en cause dans les années 1980. Si celle-ci est, comme on le verra par la
suite, la traduction directe de la crise de la dette et des ruptures qui ont conduit aux
stratégies d’ajustement structurel, elle participe d’un mouvement global, théorique et
politique, d’une ampleur beaucoup plus grande. Ce mouvement comporte plusieurs
dimensions :
sur le plan théorique, la domination du courant néoclassique et du paradigme de
l’équilibre général walrasien sur tout le champ académique apparaît
particulièrement incompatible avec la pensée des structures, des éléments de
discontinuité, d’hétérogénéité, de domination et de conflit, ainsi qu’avec la prise
en compte d’une dynamique de long terme, commune à tous les courants de
l’économie du développement.
sur le plan historico-politique, la fin de la guerre froide, l’apparition de conflits
ouverts ou non entre pays du Tiers-monde (Asie du Sud-Est, Moyen-Orient,
Afrique du Nord), et l’échec ou l’institutionnalisation relatifs de certaines
expériences de révolution sociale, mettent à mal les espoirs issus de Bandoeng.
sur le plan économique, la diversification croissante des pays en développement,
l’apparition, au moins en apparence, de gagnants et de perdants, la constitution de
groupes aux intérêts distincts (pays pétroliers, pays exportateurs de produits
manufacturés, pays très endettés…) remet en question l’idée constitutive de
l’économie du développement d’une situation spécifique avec des problèmes
communs.
sur le plan idéologique, on assiste, en premier lieu dans les pays industrialisés, à des
campagnes d’opinion autour du thème de la fin des modèles et de l’anti-tiers-
mondisme.
Ce contexte général fait naître l’idée que l’économie du développement n’a pas de
raison d’être en tant que domaine d’étude spécifique, et que les catégories théoriques
convoquées pour penser l’économie de ces régions relèvent soit des modèles de
croissance, soit des schémas d’équilibre2. On assiste donc à cette époque à un effacement
de ce qui avait constitué la distinction fondatrice de l’économie du développement.
2. Délimitation théorique
Au début des années 1950, à l’heure où la croissance du PIB atteint dans les économies
industrialisées des rythmes sans précédent (5 % par an en moyenne) et où elle constitue
un objectif central des politiques économiques, la notion de développement s’élabore en
se démarquant de la notion de croissance (Texte 2).
Cette démarcation n’est que relative dans la mesure où la plupart des auteurs
considèrent la croissance d’un surplus économique comme un préalable indispensable au
développement ; mais ce préalable n’est pas suffisant : bien plus, une interrogation sur le
contenu et l’orientation de la croissance (aspects qualitatifs, structurels) aboutit à l’idée
qu’elle peut aggraver le sous-développement ; et surtout, celui-ci ne doit plus être
considéré comme un simple retard de croissance, mais comme une situation spécifique.
La question du choix des termes n’est ni anodine ni simplement technique. Elle pose
différents problèmes de fond qui renvoient à deux catégories de difficultés : en premier
lieu, au fait qu’une terminologie en elle-même recouvre une analyse théorique ; en second
lieu à la diversification croissante, sur le plan économique, des régions concernées. Est-il
encore légitime de les rassembler sous un terme unique ? Mais l’appréciation de la portée
de cette hétérogénéité renvoie elle-même à des différences d’analyse théorique…
Si on s’en tient aux termes les plus couramment employés, on s’aperçoit que leurs
considérants implicites sont nombreux.
Sous-développement et économies sous-développées véhiculent l’idée d’un retard
à combler pour ces pays, l’objectif à rattraper étant la situation des économies
industrialisées : celle-ci est considérée comme la norme à atteindre, le long d’un
processus linéaire et standardisé. Le terme est ainsi la traduction de la vision
rostowienne, mise en cause notamment par François Perroux, évacuant les
spécificités structurelles des sociétés.
Pays en voie de développement (PVD) ou pays en développement (PED) : c’est
la terminologie, jugée moins péjorative que la précédente, la plus fréquemment
utilisée aujourd’hui par les institutions internationales. Mais elle présente les
mêmes inconvénients que la précédente, tout en laissant de surcroît supposer que
la situation de tous ces pays s’améliore effectivement de façon continue sur le
long terme !
Néanmoins, le PNUD, « pour des raisons de commodité », emploie le terme « pays
développés » pour désigner les pays figurant dans la catégorie présentant un Indicateur de
développement humain (IDH) très élevé, et pour désigner tous les autres « pays en
développement »4.
Nord-Sud : employé pour la première fois dans les années 1970, cette terminologie
présente l’avantage de pointer un clivage persistant entre les économies
industrialisées et les autres ainsi qu’une unité entre ces dernières5, mais
l’inconvénient sérieux de renvoyer implicitement à une conception géographique,
voire naturaliste de la situation. Les économies du « Sud » étant majoritairement
situées sous le tropique du Cancer, leurs conditions naturelles (climat tropical ou
désertique, nature ingrate, catastrophes naturelles) les empêcheraient de se
développer. Explication invalidée depuis longtemps car des économies « riches »
se trouvent au sud (Australie, Nouvelle-Zélande), on trouve un climat tropical ou
subtropical en Floride et en Louisiane ainsi que des cyclones, du désert aux États-
Unis, des tremblements de terre en Californie ou au Japon comme l’année 2011
l’a malheureusement montré. On a pu constater, y compris dans l’actualité de ces
dernières années, que les conséquences humaines et économiques des
catastrophes naturelles dépendent dans une large mesure du niveau de
développement du pays, en particulier de ses infrastructures : le cas d’Haïti en est
une dramatique illustration. Enfin, on connaît depuis longtemps la responsabilité
de la mise valeur humaine dans la désertification et l’érosion des sols (cf.
chapitre 7).
Pays pauvres : le terme décrit la situation de la majorité de la population dans ces
pays mais passe sous silence l’existence d’inégalités parfois considérables et de
groupes sociaux extrêmement riches. Cette terminologie sous-entend aussi,
comme la précédente, que la situation de ces économies serait due à un manque
global de ressources (minières, agricoles…) sans mettre en cause l’éventualité
d’une mauvaise utilisation ou répartition de ces dernières. La richesse de leur
sous-sol a dans l’histoire fait le malheur de bien des pays (Bolivie, Zaïre…), alors
que le Japon et la Corée du Sud n’ont presque pas de ressources minières et très
peu de terres cultivables. Enfin, la notion de pauvreté en elle-même n’est pas
univoque et renvoie à plusieurs critères possibles (cf. chapitre 4).
Tiers-monde : ce terme, forgé par Alfred Sauvy en 1952, fait une analogie avec le
Tiers État6 (Texte 1). Il renvoie aux conditions politiques de l’apparition de ces
pays sur la scène internationale et à l’idée d’un objectif commun, le
développement, qualitativement différent de la simple croissance. Pour être
encore valable aujourd’hui, il suppose donc la persistance d’une certaine unité
des pays concernés, même si elle est moins apparente qu’il y a 50 ans. Adopter ce
terme, comme nous le ferons fréquemment dans cet ouvrage, revient donc à
affirmer explicitement que, en dépit de certaines apparences, cette unité existe
encore et est décisive.
Périphérie : ce terme a été forgé par les économistes structuralistes de la
Commission économique pour l’Amérique latine des Nations unies (CEPAL)
dans les années 1950. La Périphérie renvoie à un Centre et souligne le fait qu’on
a affaire à deux pôles de l’économie mondiale, dont les structures sont différentes
et dont l’une est dominée par l’autre sur le marché mondial.
À partir des années 1970, des éléments de différenciation de natures diverses, et dont la
portée économique et politique paraît plus grande que celle des différences nationales
traditionnelles (taille, démographie, conditions naturelles), sont devenus suffisamment
importants pour occulter, aux yeux de certains analystes, ce qui faisait la spécificité
globale du Tiers-monde. Au cours des années 1980, les courants « anti-tiers-mondistes »
se sont engouffrés dans la brèche : le « Tiers-monde » n’existait plus, l’enjeu du
développement était dépassé, il n’y avait plus que des situations spécifiques, aussi
diverses que les économies peuvent l’être entre elles.
Avec un peu de recul, il apparaît aujourd’hui, au niveau de l’analyse empirique, qu’il
est tout aussi erroné de nier l’existence, et souvent la croissance de ces différences, que
d’en exagérer la portée, et ce d’autant plus que certaines d’entre elles se sont avérées
temporaires.
Ainsi, le contre-choc pétrolier du milieu des années 1980 a relativisé la pertinence de la
distinction « pays exportateurs de pétrole ». Au-delà de l’aspect conjoncturel de cette
évolution, il est apparu avec le temps que les recettes pétrolières n’avaient en rien
contribué à sortir les sociétés du sous-développement, et avaient même souvent aggravé
leur situation en contribuant à mettre en place ce que certains économistes ont caractérisé
comme une économie rentière (Dutch Disease).
D’autres distinctions apparaissent comme plus pertinentes, mais elles sont aussi
soumises aux variations conjoncturelles :
pays exportateurs de capitaux versus pays endettés : très peu de pays n’ont pas
connu de crise de la dette extérieure à un moment donné. Quoi qu’il en soit, tous
les pays du Tiers-monde sans exception vont être confrontés plus ou moins tard à
une crise et à des politiques d’ajustement structurel. Il importe de noter que le
problème n’est pas la dette en elle-même, mais sa soutenabilité (cf. chapitre 5).
pays exportateurs de produits manufacturés versus pays essentiellement
exportateurs de matières premières : il s’agit probablement de la distinction la
plus pertinente et la plus porteuse de différenciations véritables entre pays du
Tiers-monde. La spécialisation dans l’exportation d’un petit nombre de produits
primaires non transformés constitue en effet une des séquelles de la colonisation,
et une caractéristique significative du sous-développement et de la dépendance
(cf. chapitre 2). À l’inverse, depuis deux ou trois décennies, la diversification de
leur appareil de production semble porteuse, pour les économies qui y
parviennent, de potentialités de développement sans précédent. Ce n’est pas un
hasard si cette distinction s’est souvent trouvée confondue avec la précédente, les
pays cantonnés dans les exportations de matières premières non transformées
ayant tendance à s’enfoncer durablement dans la pauvreté (en particulier en
Afrique subsaharienne). C’est ainsi qu’on a pu parler de « Nouveaux pays
industrialisés ».
Mais cette catégorie s’avère, elle aussi, relativement instable dans le temps : certains
pays qui ont pu accéder au rang de NPI dans les années 1970 se sont vus depuis
rétrograder sous les coups de la crise (Algérie et Argentine entre autres). Et surtout, cette
catégorisation renvoie à une interrogation théorique récurrente en économie du
développement : des économies ayant connu la colonisation et les déformations
caractéristiques du sous-développement, et qui aujourd’hui connaissent une croissance
significative de leur PIB et une industrialisation de leur appareil de production, sont-elles
susceptibles par cela même de rejoindre le « club » des pays développés ? La Corée du
Sud, le Mexique et le Chili appartiennent à l’OCDE. Cela fait-il pour autant totalement
disparaître les traits de dépendance, de désarticulation interne des économies qu’ils ont pu
connaître dans le passé ? Et, question à laquelle les crises que les deux premiers pays ont
connues au cours des années 1990 confèrent un éclairage particulier, ce processus de
croissance et d’industrialisation peut-il présenter un caractère durable et auto entretenu, et
ne pas être totalement tributaire des aléas des flux de capitaux internationaux ?
C’est à cette question que la catégorie la plus récemment apparue, celle d’« économie
émergente » ou de « pays émergent » semble apporter une réponse nouvelle. Par rapport à
la catégorie précédente, les émergents constituent un sous-ensemble spécifique : des pays
exportateurs de produits manufacturés, recevant par ailleurs des flux de capitaux et
d’investissements directs étrangers considérables, et auxquels à la fois la rapidité de leurs
taux de croissance, leur taille et leur poids démographique, confèrent une place
particulière dans l’évolution de l’économie mondiale. C’est ainsi qu’on sera amené à
accorder une attention particulière à l’évolution de la Chine, de l’Inde et du Brésil. 7
Au-delà des aspects descriptifs de l’évolution différenciée des principaux groupes, une
question demeure donc : ces éléments de différenciation sont-ils suffisamment pertinents
pour interdire de parler du Tiers-monde ? Cela revient à faire un choix de critères, toute la
question étant de savoir si les caractéristiques communes continuent à l’emporter sur les
différences.
Les indicateurs quantitatifs et monétaires, pendant longtemps les seuls utilisés par les
institutions économiques internationales, notamment le FMI et la Banque mondiale,
s’avèrent insuffisants pour rendre compte du sous-développement, pour toutes les raisons
développées plus haut.
Le plus utilisé par ces institutions est le classement des économies selon les PNB (ou
les PIB) par tête (Repère).
Il présente l’avantage de montrer les écarts de revenus entre les différentes économies
mondiales et leurs évolutions. Mais il ne dit rien de la situation réelle de sous-
développement dans des sociétés qui sont pourtant classées dans les « économies à
revenus à intermédiaires », pas plus que des différences relatives de progrès en termes de
développement humain entre les économies les plus pauvres. Il ne rend pas compte des
inégalités sociales fréquemment corrélées au sous-développement, et surestime la
dimension monétaire, alors que la partie non monétarisée de l’économie est souvent
d’autant plus importante que la pauvreté est plus grande ; la difficulté est donc de trouver
un ou plusieurs indicateurs qui rendent compte de toutes les spécificités du sous-
développement
Dans ce but, le PNUD a mis en place, depuis le début des années 1990, des indicateurs
composites de développement.
L’Indice de développement humain (IDH) a été présenté dans le cadre du Rapport sur le
développement humain (RDH) du PNUD de 1990, en s’inspirant de la conception du
développement humain élaborée par l’économiste Mahbub ul Haq, s’inspirant lui-même
des théories d’Amartya Sen (Texte 3). Le RDH de 2010 est l’occasion pour cette
institution de faire un bilan, 20 ans après, sur les apports méthodologiques et les
adaptations nécessaires de cet indicateur, comme sur les grandes tendances de l’évolution
du développement humain mesurables au cours de ces deux décennies.
L’IDH est une mesure globale du progrès dans trois dimensions : la santé, l’éducation et
le revenu. Celles-ci étaient évaluées en 1990 à partir de la moyenne arithmétique de la
somme des trois indicateurs : l’espérance de vie à la naissance, le niveau d’instruction
mesuré par un indicateur alliant pour deux tiers le taux d’alphabétisation des adultes et
pour un tiers le taux brut de scolarisation combiné, tous niveaux confondus, et enfin le
niveau de vie mesuré par le PIB par habitant (exprimé en PPA, ou parités de pouvoir
d’achat). Dans le RDH 2010, la durée moyenne de scolarisation remplace le taux
d’alphabétisation, désormais moins significatif compte tenu des progrès réalisés, et le taux
brut de scolarisation est reformulé en durée attendue de scolarisation – c’est-à-dire le
nombre escompté d’années de scolarisation pour un enfant, compte tenu des taux bruts de
scolarisation actuels. Le revenu national brut (RNB) par habitant remplace le PIB par
habitant : en effet, les transferts de revenus envoyés à l’étranger ou perçus de l’étranger,
l’aide au développement, etc. entraînent une différence, croissante en raison de la
mondialisation, entre le revenu de la population d’un pays et sa production nationale.
Enfin, la moyenne arithmétique est remplacée par la moyenne géométrique des indices
des trois dimensions, de façon à ce qu’une performance médiocre dans une dimension ne
soit pas compensée par une bonne performance dans une autre – même si chaque progrès
est considéré comme important.
Que ce soit dans les économies industrialisées ou dans les économies du Tiers-monde,
on a pu observer tous les ans depuis son élaboration un décalage fréquent entre le
classement selon le revenu par tête et le classement selon l’IDH. Le chiffre des différences
(négatif quand le pays est moins bien classé du point de vue de l’IDH, positif dans le cas
contraire, cf. Tableau 1) confirme un certain nombre d’observations empiriques et ouvre
des pistes de réflexion. Tout d’abord, ces décalages, même s’ils sont aujourd’hui moins
fréquents qu’il y a quelques années pour les pays développés, existent à tous les niveaux
de revenu, reflétant des différences de priorités accordées par les pouvoirs publics à la
santé ou à l’éducation, quelles que soient par ailleurs les possibilités matérielles de
parvenir à des résultats significatifs. Globalement, les décalages positifs semblent liés à un
certain degré d’implication de l’État dans les politiques sociales, qu’il s’agisse des pays
scandinaves, de la France ou de certaines anciennes économies planifiées. Par ailleurs,
pour les pays du Tiers-monde, un chiffre négatif important semble indiquer des
caractéristiques du « mal développement » ou de la « croissance sans développement »,
comme l’attestent les cas des monarchies pétrolières ou de plusieurs pays d’Afrique à
ressources minières importantes : rente monétaire ne se traduisant pas par un
développement auto-entretenu, inégalités prononcées et enrichissement d’une élite
économique, industrialisation d’« enclave ». Certaines économies à revenu intermédiaire
et à croissance rapide, comme la Thaïlande, présentent également ce décalage.
La croissance semble avoir des difficultés particulières à se traduire en amélioration du
développement humain quand les inégalités économiques et sociales sont prononcées.
D’où l’intérêt de comparer également le classement des pays en termes d’IDH simple et
en termes d’IDHI. On observe ainsi des décalages significatifs pour certains pays à
revenus élevés, comme les États-Unis et la Corée du Sud, ou intermédiaires comme le
Brésil, mais aussi des pays miniers comme le Botswana. À cet égard, on peut regretter que
l’IDHI ne soit pas encore disponible pour la plupart des pays pétroliers du Moyen-Orient.
Plus encore que les comparaisons pour une année donnée, les grandes tendances du
développement humain au cours des vingt dernières années, pour 135 pays représentant
92 % de la population mondiale, analysées par le RDH 2010, montrent le décalage qui
peut exister entre croissance et développement. En général, tous les indicateurs du
développement humain, santé et éducation, se sont améliorés de 25 % au cours de cette
période dans toutes les régions en développement et dans quasiment tous les pays. Le
facteur principal d’amélioration de l’espérance de vie a été le recul de la mortalité
infantile, même si elle reste huit fois plus importante que dans les pays développés.
Les seules exceptions sont trois pays d’Afrique subsaharienne – la République
Démocratique du Congo, la Zambie et le Zimbabwe qui ont vu leur IDH diminuer depuis
1970 – et 6 pays du même continent qui ont vu leur espérance de vie reculer (à cause de la
pandémie de sida), de même que 3 États de l’ex-URSS dont la Fédération de Russie en
raison des conséquences sociales négatives de la transition.
Si cette amélioration est quasi générale, on constate cependant une grande v ariabilité
entre pays, à la fois en termes de niveau de développement humain et de trajectoire des
indicateurs (les taux de progression allant de moins de 20 % à plus de 65 %). Un des
principaux enseignements est qu’on n’observe aucune corrélation entre les pays dont le
développement humain s’est amélioré de manière particulièrement rapide, et ceux dont le
taux de croissance du PIB a été le plus élevé au cours de la même période. Parmi les
10 pays qui ont connu les améliorations les plus rapides, on trouve des pays pauvres qui
sont loin d’être au premier plan en matière de croissance, comme le Népal et le Laos, et
seule la Corée du Sud et l’Indonésie sont dans le peloton de tête à la fois pour les
indicateurs monétaires et non monétaires. À l’échelle mondiale, et entre les PED, les
écarts de revenus par tête sont bien plus importants que les écarts d’indicateurs de santé
ou d’éducation, même si ceux-ci restent considérables ; les premiers se sont aggravés
alors que les seconds se sont réduits, même si c’est de façon insuffisante. Bien plus, des
pays qui étaient dans une situation analogue, du point de vue des différents indicateurs de
développement, ont connu des trajectoires très différentes depuis vingt ans, ce qui tend à
prouver que les mécanismes endogènes et nationaux auraient plus d’impact sur les
performances en termes de développement humain que les facteurs exogènes liés à la
mondialisation. Au total, le PNUD attribue l’essentiel des différences de résultats aux
politiques économiques et à la qualité des institutions permettant l’accès aux services de
base de la population la plus pauvre (cf. chapitre 8).
Tableau 1 : Les classifications comparées en termes de RNB par habitant, d’IDH
et d’IDHI en 2008. Quelques exemples : 10
Différence Différence
Espérance Durée Durée RNB de de
Classement de vie à la moyenne de attendue de par hab classement classement
selon l’IDH naissance scolarisation scolarisation selon le entraînée par
(années) (en années) (en années) (PPA) RNB par le calcul de
hab. et l’IDH l’IDHI
IDH très
élevé1
1 Norvège 81,0 12,6 17,3 58 810 +2 0
4 États-Unis 79,6 12,4 15,7 47 094 +5 -9
5 Irlande 80,3 11,6 17,9 33 078 +20 -3
9 Suède 81,3 11,6 15,6 36 936 +8 4
12 Corée du
79,8 11,6 16,8 29 518 +16 -18
Sud
14 France 81,6 10,4 16,1 34 341 +9 -3
17 Islande 82,1 10,4 18,2 22 917 +20 +5
26 Royaume-
79,8 9,5 15,9 35 087 -6 +1
Uni
31 Slovaquie 75,1 11,6 14,9 21 658 +12 +3
IDH élevé
45 Chili 78,8 9,7 14,5 13 561 +11 -10
47 Koweit 77,9 6,1 12,5 55 719 -42
49 Montenegro 74,6 10,6 14,4 12 491 +16 +4
55 Arabie
73,3 7,8 13,5 24 726 -20
Saoudite
56 Mexique 76,7 8,7 13,4 13 971 -3 -8
62 Costa Rica 79,1 8,3 11,7 10 870 +7 -6
65 Fédération
67,2 8,8 14,1 15 258 -15 +7
de Russie
69 Ukraine 68,6 11,3 14,6 6 535 +20 +14
70 Iran 71,9 7,2 14,0 11 764 -3
72 Maurice 72,1 7,2 13,0 13 344 -13
73 Brésil 72,9 7,2 13,8 10 607 -3 -15
77 Équateur 75,4 7,6 13,3 7 931 +7 +3
83 Turquie 72,2 6,5 11,8 13 359 -26 +1
IDH moyen
84 Algérie 72,9 7,2 12,8 8 320 -6
88 République
72,8 6,9 11,9 8 273 -9 -7
dominicaine
89 Chine 73,5 7,5 11,4 7 258 -4 0
90 El Salvador 72,0 7,7 12,1 6 498 0 -14
91 Sri Lanka 74,4 8,2 12,0 4 886 +10 +11
92 Thaïlande 69,3 6,6 13,5* 8 001 -11 +5
95 Bolivie 66,3 9,2 13,7 4 357 +11 -17
98 Botswana 55,5 8,9 12,4 13 204 -38
101 Égypte 70,5 6,5 11,0 5 889 -8 -7
110 Afrique du
52,0 8,2 13,4 9 812 -37 -1
Sud
113 Vietnam 74,9 5,5 10,4 2 995 +7 -9
115 Nicaragua 73,8 5,7 10,8 2 567 +7 +6
116 Guatemala 70,8 4,1 10,6 4 694 -13 0
119 Inde 64,4 4,4 10,3 3 337 -6 0
IDH faible
133 Yémen 63,9 2,5 8,6 2 387 -9 -2
139 Togo 63,3 5,3 9,6 844 +22 +2
144 Sénégal 56,2 3,5 7,5 1 816 -7 0
148 Tanzanie 56,9 5,1 5,3 1 344 -1 +9
149 Côte
58,4 3,3 6,3 1 625 -10 +3
d’Ivoire
158 Sierra
34,3 2,9 7,2 809 +4 -1
Leone
163 Tchad 49,2 1,5* 6,0 1 067 -9 0
169 Zimbabwe 47,0 7,2 9,2 176 0 0
PNUD, Rapport sur le développement humain, 2010.
D’après PNUD,
http://www.beta.undp.org/content/dam/undp/library/MDG/french/report2010_
goal8.pdf
On voit sur ce graphique qu’en raison de la crise, le déclin du chômage s’est arrêté
voire a connu un retournement à partir de 2008, à l’exception de l’Asie de l’Est, où la
croissance est restée élevée, et de l’Afrique subsaharienne, où le secteur informel absorbe
la plus grande partie du sous-emploi.
Ces indicateurs représentent donc un progrès dans l’appréhension de la complexité et
de la spécificité du sous-développement. Cependant, le classement sur une échelle
continue avec les pays industrialisés peut occulter les différences qualitatives entre les
deux groupes de pays, qui tiennent notamment à leurs modalités d’insertion
internationale, passées et présentes.
1 - Une nouvelle vague d’indépendances surviendra au milieu des années 1970 avec la libération des colonies
portugaises en Afrique.
2 - Cf. en France, la Revue d’économie du développement, « Modèles d’équilibre général calculable pour le
développement », 3-4, 1998.
3 - Pierre Dockès et Bernard Rosier, L’Histoire ambiguë, PUF, 1988 p. 246.
4 - Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), Rapport sur le Développement Humain, 2010,
p. 32. Sur l’IDH, cf. Texte 3.
5 - Même si certains auteurs parlent aujourd’hui des Suds (cf. Salama).
6 - Et plus précisément référence au texte de l’Abbé Sieyès Qu’est-ce que le Tiers-État ?, publié en France en
janvier 1789 pendant la préparation des États-Généraux.
7 - Les institutions internationales parlent de BRIC pour désigner l’ensemble Brésil, Russie, Inde et Chine (et parfois
BRICS en incluant l’Afrique du Sud), mais comme on l’a vu, pour différentes raisons la Russie peut difficilement entrer
dans la même catégorie que les trois autres.
8 - À quelques rares exceptions près, comme les pays du Cône Sud de l’Amérique latine.
9 - La Guinée équatoriale, qui est à la fois un pavillon de complaisance et un pays producteur de pétrole. Toutefois,
elle est classée par les Nations unies parmi les Pays les moins avancés (PMA) et au 117e rang d’IDH par le PNUD en
2010.
10 - Les classements sont fondés sur les quartiles (25 % des pays) et introduisent les mentions « très élevé », « élevé »,
« moyen » et « faible » pour l’IDH.
Chapitre 2
1. Le poids de la colonisation
Un point commun essentiel entre presque tous les pays qui font
actuellement partie du Tiers-monde est d’avoir subi de la part des
puissances aujourd’hui industrialisées un processus de colonisation entre le
e e e
xvi siècle (pour l’Amérique latine) et le xviii et xix siècle (pour l’Asie et
l’Afrique). Seules de rares sociétés, comme la Thaïlande, ont échappé à
cette colonisation. Certains autres pays, qui n’ont pas subi de colonisation
directe, ont gardé un pouvoir politique indépendant et ont même exercé une
domination impériale sur les territoires voisins (Turquie, Chine…). En
revanche, ils ont connu l’implantation sur leur territoire de comptoirs
commerciaux ou de sociétés étrangères, parfois de force, et se sont par là
même trouvés insérés dans le système colonial mondial.
Ce fait colonial constitue une différence fondamentale entre les pays du
Tiers-monde et les plus « pauvres » des pays industrialisés dont certains ont
fait partie des premiers colonisateurs (Espagne, Portugal), ou les économies
qui ont connu des systèmes de planification centralisée et dont certaines
(telle la Bulgarie) sont aujourd’hui classées dans les pays à développement
humain faible ou moyen. Enfin, les pays d’Amérique latine, une fois
obtenue au xixe siècle l’indépendance politique par rapport à l’Espagne et
au Portugal, sont passés sous la domination indirecte de la Grande-
Bretagne, puis des États-Unis par le biais de la doctrine Monroe en 19201.
Dans la plupart de ces régions, le système capitaliste qui s’est constitué
présente des traits particuliers : les sociétés coloniales se sont construites en
articulation étroite avec les ruines des sociétés antérieures, sur la base du
travail forcé et de l’esclavage de la plus grande partie de la population.
Graphique 4
Source : CNUCED, Le développement économique en Afrique, 2001
Le modèle dualiste de A.W. Lewis (Texte 10), prolongé en 1964 par les
développements de Ranis et Fei, se classe dans cette catégorie : ses
hypothèses de base sont celles de l’équilibre néoclassique des marchés
(rémunération du travail à sa productivité marginale par exemple), mais
une hypothèse spécifique tente de rendre compte de la particularité des
économies « sous-développée » : le dualisme.
Texte 10 : CELSO FURTADO, Le dualisme : présentation
Le mécanisme de l’expansion de l’excédent a été très bien présenté par Arthur Lewis
qui a utilisé les éléments essentiels du modèle classique.
Supposons une économie précapitaliste, dont la population vive de l’agriculture et de
l’artisanat. Dans une société de ce type, toute la population travaille, même si la
contribution de certains individus est nulle pour l’ensemble de la collectivité. Si nous
observons l’ensemble de l’économie comme le ferait un entrepreneur capitaliste, nous
constatons que la productivité marginale du travail est très faible, pouvant être égale ou
inférieure à zéro. Il devient ainsi possible d’organiser un noyau capitaliste qui absorbe de
la main-d’œuvre sans réduire la production totale de l’économie préexistante. Le
capitaliste fixera un salaire un peu supérieur au niveau de subsistance de la population et
pourra compter sur une offre illimitée de main-d’œuvre. En partant d’une certaine
quantité de capital dont il dispose, il utilisera de la main-d’œuvre jusqu’à ce que le
produit marginal du travail devienne égal au taux de salaire. L’excédent qui lui reviendra
sera considérable et tendra à augmenter avec le progrès technique, les économies
d’échelle, les économies externes, etc. […] Ce modèle a été développé de façon
exhaustive par Ranis et Fei, qui ont identifié dans ce processus de transition trois phases.
La productivité marginale du travail ne serait égale à zéro dans le secteur précapitaliste
que pendant la première phase. Dans la seconde, le produit marginal du travail serait
positif, bien qu’inférieur au niveau moyen de subsistance. La dernière phase serait
caractérisée par l’intégration du marché du travail, produit marginal du travail et salaire
tendant à se rapprocher dans toutes les activités productives.
Les stratégies dans la plupart des pays au cours des années 1950 à 1980
présentent de nombreux points communs : elles sont le fait d’États qui
tentent de conforter l’indépendance politique par des politiques
d’industrialisation volontaristes, qui trouvent leur cohérence dans des
modèles théoriques. Cependant, les mesures mises en œuvre sur le terrain
ne sont pas toujours conformes aux orientations théoriques, et de nombreux
biais récurrents apparaissent.
L’articulation agriculture-industrie
Il est important de noter que, durant toute cette période, les différents
modèles et stratégies ont en commun de mettre en avant le rôle de l’État
comme acteur central de la stratégie d’industrialisation et de
développement. Cette affirmation est commune aussi bien aux modèles
considérés comme appartenant au courant dit « orthodoxe », apparenté aux
théories néoclassiques, qu’aux modèles dits « hétérodoxes ».
En théorie, il existe bien sûr des nuances importantes. Les modèles de
croissance équilibrée s’en remettent, en dernière instance, au marché pour
réguler l’économie, et confèrent avant tout à l’État le rôle d’une
coordination intersectorielle. En revanche, les modèles de croissance
déséquilibrée accordent à l’État un rôle beaucoup plus important, dans la
mesure où les secteurs stratégiques où l’investissement doit se concentrer
en premier lieu sont peu susceptibles d’attirer le secteur privé.
D’autre part, les modèles diffèrent aussi quant à la durée prévue de cette
intervention. Pour certains, elle est censée être provisoire et réservée aux
premiers stades du développement. Pour d’autres, elle doit être plus
prolongée voire constante : c’est le cas en particulier des modèles qui se
réclament plus ou moins explicitement d’objectifs socialistes (Algérie et
certains pays d’Afrique entre autres). Quant à la CEPAL, elle préconise
clairement l’industrialisation comme stratégie délibérée de sortie du sous-
développement, par opposition à un processus spontané. Elle doit être faite
au moyen d’une planification active de l’État, un protectionnisme
dynamique qui tendrait à diminuer au fur et à mesure que se renforcerait
l’appareil industriel.
Dans la pratique, la plupart des stratégies de développement mises en
œuvre suivent plutôt un schéma volontariste : l’État joue un rôle d’autant
plus actif et irremplaçable que dans de nombreux pays il n’existe pas de
classes sociales susceptibles de mettre en œuvre l’investissement nécessaire
et d’avoir une vision à long terme du développement.
De ce fait, l’État dans la plupart des pays se voit conférer plusieurs
rôles : promoteur d’une politique industrielle volontariste, dans certains cas
via une planification active, principal agent du financement de l’économie
par son contrôle du crédit, principal agent de commercialisation de la
production agricole, principal agent de la politique commerciale et du
contrôle des investissements étrangers ainsi que des flux de capitaux ; et
enfin dans la plupart des cas, producteur direct, dans la mesure où de
nombreux pays, même ceux qui disposent d’un secteur privé important et
diversifié, nationalisent certaines de leurs ressources stratégiques (produits
miniers, entreprises).
2.3 L’orientation vers le marché intérieur
Cela se vérifie, outre le cas de l’Algérie, dans les résultats des stratégies
de substitution d’importation en Amérique latine, qui se heurtent à un
ensemble d’obstacles se renforçant mutuellement.
Dans la pratique, une fois passée l’étape relativement « facile » de la
production de biens de consommation non durables, chacune des étapes
programmées de la substitution d’importation s’avère de plus en plus
difficile à mettre en place, en raison de l’accroissement des importations
d’équipements nécessaires en amont et de la quantité de devises requises
pour cela. Se pose donc à nouveau le problème du maintien de la capacité à
importer, donc du potentiel d’exportations. Des goulots d’étranglement
apparaissent dans l’industrie.
Or, les transformations de l’industrialisation de substitution
d’importations (ISI) ne sont pas parvenues à affecter le secteur exportateur.
Ce dernier demeure fortement spécialisé dans la production d’un petit
nombre de produits primaires, dont les élasticités-prix de la demande
demeurent faibles. La croissance des recettes d’exportation n’est donc en
rien garantie dans la proportion que nécessiterait la demande croissante
d’importations de biens de plus en plus complexes. On assiste ainsi à une
tendance à la reconstitution de déficits extérieurs récurrents.
La technologie incorporée par l’importation de biens d’équipement
impose aux unités de production des échelles et des compositions en capital
fixe disproportionnées par rapport à la taille des marchés nationaux.
L’appareil productif demeure hétérogène et présente peu d’intégration entre
les branches.
La conséquence en est une faible croissance de la productivité du travail,
renforcée par l’existence de capacités oisives dans l’industrie en raison de
ce surdimensionnement. Selon H.G. Romo5, « pour compenser ces
handicaps, les industries de substitution d’importations étaient soutenues
par des politiques économiques (obstacles à l’importation, taux de change
surévalué, etc.) qui affectaient négativement la compétitivité des
exportations de biens manufacturés et quelquefois des biens agricoles
vivriers destinés au marché national ». D’autre part, les FMN, acteurs
fondamentaux du processus d’industrialisation, favorisent les
comportements oligopolistiques, l’imposition des prix par les oligopoles
renforçant les tendances inflationnistes. En raison de la forte intensité en
capital des industries, celles-ci créent relativement peu d’emplois. Le sous-
emploi structurel perdure, passant de rural à urbain. Enfin, l’absence de
réforme agraire véritable et de mécanismes efficaces de redistribution des
revenus s’ajoutent à ces facteurs pour consacrer dans chaque pays
l’insuffisance d’un marché intérieur national susceptible d’entretenir la
croissance.
1 - Ragnar Nurke, Les problèmes de la formation du capital dans les pays sous-développés, Cujas
1968 (1953).
2 - Albert Hirschman, Strategy of Development, 1958.
3 - C. Oman et O. de Barros, « Trends in global FDI and Latin America », Inter-American
Dialogue meeting, Washington, 1991.
4 - Gérard de Bernis, « De l’existence de point de passage obligatoire pour une politique de
développement », Économies et sociétés, PUG, 1982.
5 - H.G. Romo, op. cit., p. 21.
Chapitre 4
C e qui précède tend à montrer que le contenu de la croissance (rapports sociaux, modèles technologiques,
organisation du travail) a souvent été occulté dans le passé par les décideurs (nationaux ou internationaux) du
développement, et l’est encore aujourd’hui. La dimension quantitative de la croissance est privilégiée. Or il
apparaît essentiel, pour un développement véritable, de déterminer quelles forces sociales portent cette
croissance et en bénéficient. En effet, dans bien des cas, une croissance, même forte, peut se traduire par une
aggravation des inégalités sociales, et exclure de ses bénéfices la majorité de la population.
Plusieurs dimensions de la société, interdépendantes, concentrent les principaux traits du sous-
développement : c’est le cas des inégalités de revenus, dont les relations avec la croissance et le développement
font aujourd’hui l’objet d’une réexploration théorique ; de la question agraire, où se rencontrent le problème
social explosif de la concentration foncière et celui de la dépendance alimentaire ; de la question du statut des
femmes et des inégalités de genre ; ces deux dernières questions surdéterminent les enjeux de la croissance de la
population et du régime démographique, qui ne peut en rien être considérée comme une question exclusivement
technique liée de façon unilatérale au sous-développement.
L’ampleur des inégalités sociales, de toutes natures et notamment les inégalités de revenus, est bien un trait
distinctif du sous-développement, et marque une frontière entre le Tiers-monde et les pays développés. Ce
constat est corroboré par de n ombreuses études empiriques comparatives. On peut citer en particulier un
rapport de la CNUCED1 qui en 1997 livrait une étude détaillée sur le sujet. On y trouve notamment une
typologie des sociétés selon ce critère :
– les sociétés, qu’on trouve surtout en Amérique latine et dans certains pays d’Afrique, qui présentent un écart
extrême entre les revenus les plus faibles et les plus élevés, et une classe moyenne très faible ou quasi
inexistante. Les 20 % plus riches de la population détiennent 60 % du revenu national, les 40 % plus pauvres
10 % seulement ;
– les sociétés un peu moins inégalitaires, qu’on trouve dans certains pays d’Asie : la part de la classe
moyenne y dépasse celles des 20 % plus riches. On peut relever dans cette catégorie des différences selon que le
quintile le plus riche reçoit plus ou moins de 50 % du revenu total (la Thaïlande est ainsi bien plus inégalitaire
que la Malaisie) ;
– entre les deux, on recense un grand nombre de sociétés de type intermédiaire (avec une répartition de type
40-40-20).
Le rapport constatait en revanche l’absence parmi les PED (à deux ou trois exceptions près, comme la Corée
du Sud, Taïwan…) de sociétés plus égalitaires, avec un revenu moyen de la classe moyenne équivalent au
revenu moyen national, et un écart moindre entre les extrêmes – ce qui est le cas de la plupart des pays
développés.
Bien que datée, cette typologie reste valable pour rendre compte de la spécificité de la plupart des PED sur le
plan des inégalités, que révèle la comparaison internationale des coefficients de Gini des inégalités de revenus :
aucun PED ne présente aujourd’hui de coefficient inférieur à 0,3 (niveau qui reste l’apanage des économies
industrialisées). De nombreux pays, notamment en Amérique latine, présentent des coefficients supérieurs à 0,5.
Cependant, l’interprétation de cet indicateur est limitée par la faible fréquence et souvent l’ancienneté (plus de
10 ans en général) de la plupart des mesures2, alors que les trajectoires des économies ces dernières années
(croissance rapide, crise) ont pu sensiblement modifier le panorama des inégalités dans un sens ou dans l’autre.
En effet, les importants bouleversements économiques et sociaux de la dernière décennie conduisent à
prendre en compte des évolutions probablement significatives sur le plan des inégalités, pour lesquelles des
mesures exhaustives manquent encore. Ainsi, si une caractéristique essentielle de la plupart des PED reste la
quasi-absence ou la faiblesse numérique et la vulnérabilité de la classe moyenne, on observe également que les
économies émergentes à croissance rapide ont vu l’apparition d’une classe moyenne et de nouveaux modes de
consommation.
La dynamique de l’évolution de ces inégalités est également importante pour appréhender à la fois les
spécificités du sous-développement et les contraintes qui pèsent sur une politique de développement.
Si au cours des périodes de crise, les plus pauvres sont touchés d’abord et plus gravement, comme l’ont
montré les exemples de l’Asie en 1997-1998, de l’Argentine en 2001-2002 et de la crise de 2007-2009 dans de
nombreux pays, la reprise de la croissance n’est pas pour autant forcément un processus plus équitable. Elle peut
se traduire au contraire par une persistance ou une aggravation des inégalités. Bien plus, on a pu observer à deux
reprises, particulièrement en Amérique latine, des processus de croissance durablement et intrinsèquement
fondés sur une reproduction des inégalités.
Ce fut le cas dans les années 1960 et 1970, où on a assisté dans plusieurs économies semi-industrialisées –
Argentine, Brésil, Mexique – à des « régimes d’accumulation excluants », selon les termes de Pierre Salama :
des firmes multinationales, produisant des biens de consommation durable et d’équipement, ont implanté des
réseaux de filiales dans ces pays. Dans le cadre des stratégies d’industrialisation de l’époque, les États ont mis
en place les conditions politiques (notamment des régimes militaires) permettant d’assurer une plus grande
rentabilité du capital : répression du mouvement syndical, baisse absolue ou relative des salaires. Des débouchés
internes ont été créés pour les biens de consommation durables, grâce à une concentration accrue des revenus et
la création de « nouvelles couches moyennes riches ». On constate ainsi au cours de cette période une hausse de
la part des 20 % les plus riches et une baisse de celle des 80 % les plus pauvres, mais aussi une forte croissance
du PIB et de la production industrielle.
Au cours des années 1980, qui sont dans un grand nombre de PED une période de récession ou de croissance
faible, on observe une tendance à l’augmentation des inégalités, même si les moyennes régionales peuvent
masquer d’importantes disparités nationales. Cette augmentation des inégalités se traduit dans l’ensemble par un
accroissement de la part du revenu national détenue par les plus riches, et une diminution de la classe moyenne.
Cela constitue, pour de nombreux pays, une rupture par rapport à la période précédente où l’on avait pu
constater un accroissement de la part détenue par la classe moyenne. Ce phénomène comporte des conséquences
économiques et sociopolitiques pour l’ensemble de la société, sur le long terme, très importantes.
Si l’ampleur du phénomène diffère selon les pays, il faut noter qu’il se produit qu’il y ait ou non croissance
(comme dans le cas des nouvelles économies industrialisées d’Asie), et présente un degré remarquable de
similitude entre pays très différents. Ce constat semble indiquer que, comme le note le rapport de la CNUCED
déjà cité, « le rapport entre croissance et inégalités s’est modifié au cours des années 1980, la croissance
accentue désormais davantage les inégalités », et qu’à dater de cette période l’influence des mécanismes
mondiaux et de la similitude dans les politiques économiques suivies (politiques de libéralisation, d’ajustement
structurel) est devenu très importante (ce que nous verrons dans les chapitres 5 et 6).
Le fonctionnement de nouveaux mécanismes se confirme quand, dans les années 1990, la reprise de la
croissance ne s’est pas traduite par une atténuation des inégalités, mais parfois par une nouvelle aggravation,
notamment en Amérique latine.
À l’inverse, différentes études, à commencer par celles des institutions internationales, n’ont pas manqué
d’établir une corrélation entre les expériences d’industrialisation réussie en Asie de l’Est et du Sud-Est et un
degré d’inégalités sociales au démarrage (inégalités de revenus, inégalités foncières) souvent beaucoup moins
poussé qu’en Amérique latine, même si l’aggravation ultérieure des inégalités dans ces pays a été souvent plus
accentuée qu’on ne le croit généralement. Si des indicateurs élevés et durables d’inégalité peuvent être
considérés comme une caractéristique du sous-développement, la question théorique du rôle des inégalités dans
le processus de démarrage de la croissance (take-off) a fait l’objet de nombreux débats. (Repère 6). Ces débats
ont été réactivés récemment par des préoccupations renouvelées autour de la répartition des revenus.
L’inquiétude qui apparaît ainsi est double :
la mondialisation, dans ses modalités actuelles, peut-elle mettre fin au dilemme entre croissance et justice
sociale (c’est notamment ce que sous-entendent les théories libérales), ou peut-on en attendre au
contraire, au vu des tendances actuelles qui se font jour, une aggravation de ces inégalités ?
celle-ci, au lieu d’être la rançon normale des premiers stades de la croissance, destinée ultérieurement à
s’estomper comme on le pensait traditionnellement, n’obéit-elle pas à de nouveaux mécanismes qui
risquent d’en faire un processus incontrôlable et, à terme, un obstacle à une croissance durable ?
La question théorique s’avère d’autant plus complexe que les résultats empiriques des nombreuses études
comparatives ne permettent pas de trancher avec certitude. On n’observe pas de relation claire entre la
croissance et les inégalités.
Si, dans l’ensemble, la comparaison des grandes catégories de pays en fonction de leurs niveaux de revenus
semble confirmer la courbe de Kuznets (Repère 6), mise en évidence également par Kaldor (les économies à
revenus intermédiaires, comme en Amérique latine, sont plus inégalitaires que les pays plus pauvres comme en
Afriquesubsaharienne, ou que les économies plus riches, comme en Asie de l’Est), dès qu’on entre davantage
dans le détail le constat se complique : on observe des différences significatives entre pays, indépendamment de
leur stade de développement économique (exemple : Thaïlande et Malaisie). On est donc amené à se demander
pourquoi et à rechercher d’autres facteurs de croissance que le niveau de revenu par tête. D’autre part, la relation
positive observée au cours des années 1990 entre retour de la croissance et aggravation des inégalités, comme
leur persistance spécifique en Amérique latine, amène aussi à s’interroger en ce sens.
C’est ainsi que les choix de politique économique, l’existence d’une politique industrielle volontariste,
organisant une remontée de filière dans l’industrie et stimulant des gains de productivité, comme dans certaines
économies d’Asie, semblent avoir une grande influence. D’autres facteurs, souvent complémentaires, entrent en
jeu, comme l’éducation. Enfin, on constate une corrélation étroite entre la répartition des richesses (actifs
financiers, terres), surtout dans la mesure où les revenus du patrimoine représentent une part beaucoup plus
importante du revenu total des individus dans les pays en développement que dans les pays industrialisés. Plus
souvent que par des entreprises, ils sont directement détenus par des ménages qui les utiliseront davantage de
façon rentière ou spéculative que pour des investissements productifs.
On assiste donc à une évolution de la conception de la relation entre inégalités et croissance à l’intérieur du
cadre néoclassique, via les théories de la croissance endogène et du capital humain. Si un arbitrage à court terme
peut subsister entre équité et efficience, ce n’est pas le cas dans le long terme. Le RDM de la Banque mondiale
de 2006, « Équité et développement »3, met en avant deux mécanismes principaux reliant négativement
inégalités et croissance :
les « défaillances du marché spécifiques dans les PED » qui sont responsables d’une « absence de retour
sur investissement » dans le capital physique ou l’éducation, ou d’un retour insuffisant, et ne génèrent
donc pas à destination des agents économiques des incitations à même de les conduire à des
comportements efficients ;
les inégalités de pouvoir importantes « qui favorisent des institutions et des arrangements qui tendent à les
faire perdurer » (comportements de rente).
Les inégalités ainsi engendrées ont tendance « à se reproduire à travers le temps et les générations », générant
pour certaines catégories de la population des « trappes à inégalités » (p. 1).
Redistribution et développement
On pensait auparavant que redistribuer les revenus serait préjudiciable à la croissance et au développement du fait de la baisse de
l’épargne et de l’investissement qui en résulterait. Ce point de vue signifie que, en matière de redistribution, on serait confronté au choix
classique entre plus de bien-être social aujourd’hui ou plus tard. Cependant, d’après les récents travaux théoriques, il y aurait davantage
complémentarité que substituabilité entre l’équité et la croissance (ou le développement économique). Mais cela est-il vrai, et dans quelle
mesure, pour tous les instruments de redistribution ou uniquement pour certains d’entre eux et dans des circonstances particulières ?
Le rôle de l’éducation
L’éducation peut être le canal par lequel une mauvaise distribution du revenu amoindrit les possibilités de croissance : les familles avec
des ressources limitées ne sont pas en position de mettre de côté de l’argent pour l’éducation, même si un tel effort peut être socialement
et économiquement profitable. Bien plus, les familles avec peu d’éducation et peu de possibilité d’éducation future pour leurs enfants
préféreront avoir plus d’enfants que ceux dans la situation inverse, renforçant ainsi le cercle vicieux de l’inégalité et de la pauvreté.
Un accès restreint aux marchés de capitaux est un autre canal qui perpétue une mauvaise distribution des revenus. Parce que l’accès au
crédit requiert d’être capable de fournir des garanties, ceux qui ont au départ un niveau plus élevé de richesse ont plus d’opportunité
d’investir dans le capital physique et humain. Ainsi, dans les sociétés où la richesse est très concentrée, de nombreux investissement qui
pourraient être profitables au niveau individuel et social ne peuvent pas être faits, empêchant ainsi la croissance. […]
L’écart des revenus mondiaux est patent : selon un rapport de l’Unicef paru en 20116, les 20 % les plus
pauvres dans le monde ont accès à 2 % du revenu mondial. Si les inégalités internationales sont plus importantes
que jamais, si l’on exclut la croissance du revenu moyen des grandes économies émergentes, les inégalités
sociales internes aux différentes économies nationales ne peuvent pas être exonérées de cette situation.
Cependant, il a fallu du temps pour que la relation entre ces deux phénomènes, pauvreté et ampleur des
inégalités sociales, soit clairement explicitée dans la plupart des réflexions sur le développement. En effet,
compte tenu des conceptions traditionnelles qui présidaient à la mise en relation entre croissance et inégalités de
revenus, on considérait couramment que la croissance, même si elle n’atténuait pas les inégalités, se traduirait
inévitablement par un processus de « ruissellement » (trickle down) du haut vers le bas de la pyramide sociale.
Des améliorations du revenu national, profitant donc à tous, même inégalement, devaient contribuer à faire
diminuer la pauvreté. Certes, cela peut se vérifier dans certains cas de croissance rapide, comme au Chili, en
Thaïlande et surtout plus récemment en Chine : une croissance inégalitaire mais très rapide au cours des vingt
dernières années s’y est accompagnée d’une diminution de la pauvreté en chiffres absolus. Mais c’est loin d’être
une loi générale (Texte 17). Les instruments théoriques pour expliquer les mécanismes de reproduction de la
pauvreté n’existaient pas en dehors des théories marxistes ou hétérodoxes en général, qui mettaient en avant les
phénomènes d’exploitation et de domination sociale.
Mais surtout les mécanismes reliant cette pauvreté avec les inégalités ont mis du temps à être identifiés. En
1990, la Banque mondiale affirmait que « la pauvreté n’est pas l’inégalité ». La pauvreté est alors conçue dans
l’absolu, indépendamment de l’existence des catégories sociales riches. On peut noter que ce raisonnement
repose uniquement sur les notions d’efficience des marchés et de rétribution des facteurs de production à leur
productivité marginale, dans le cadre d’une conception qui assimile développement et croissance. Le RDM de
2006 de la Banque mondiale explicite la conception de l’équité dominante dans les institutions internationales :
il s’agit de l’égalité des chances et de l’égalité d’accès (aux services, aux marchés, à l’espace public). L’égalité
de résultats est exclue des objectifs d’ensemble, sauf pour assurer des filets de sécurité épargnant les
« dépravations extrêmes » à ceux/celles qui y seraient exposés pour diverses raisons, notamment le manque de
chance.
Or, comme on l’a vu, l’étude de l’accentuation récente des inégalités montre que le phénomène marquant,
dans de nombreux pays, est surtout la diminution ou la disparition des classes moyennes et l’augmentation de la
part du revenu détenue par les plus riches. La seule analyse de la pauvreté ne peut donc suffire.
Dans les sociétés du Tiers-monde, les campagnes concentrent souvent les principales caractéristiques du sous-
développement. Plus de la moitié de la population et les trois-quart des pauvres vivent en zone rurale, et la très
grande majorité tire sa subsistance de l’agriculture. L’importance de la question agraire et agricole est centrale
pour le développement7. Les mécanismes reliant révolution agricole et décollage industriel en Europe à la fin du
e
xviiisiècle sont riches d’enseignements, comme le montre Paul Bairoch. Néanmoins, de nombreuses politiques
de développement n’ont pas accordé, et n’accordent toujours pas, suffisamment d’attention à cet aspect.
Dans de nombreuses régions, la concentration foncière est un problème crucial, ainsi que le nombre de
paysans sans terre. On compte aujourd’hui dans les PED 1,3 milliard de petits paysans et de paysans sans terres.
Sur ce plan, le point commun entre à peu près toutes les régions a été l’aggravation de cette concentration à la
suite de la mise en œuvre des plans d’ajustement structurel et d’une intégration accrue des pays à l’économie
mondiale (cf. chapitre 5).
Cette concentration foncière peut revêtir plusieurs aspects selon les régions du monde et les modèles sociaux :
les chercheurs en agronomie Marcel Mazoyer et Laurence Roudart8 distinguent ainsi les régions où le
minifundisme, c’est-à-dire l’extrême division des terres en des lots trop petits pour la survie d’une famille,
trouve en grande partie son origine dans l’insuffisance des terres cultivables et la pression démographique. C’est
le cas dans les deltas asiatiques, au Rwanda, au Burundi, en Haïti, au Salvador. Manquant de ressources et de
moyens matériels pour augmenter la productivité, les agriculteurs cherchent à pallier cette carence par
l’intensification du travail et des cultures, mais ces procédés trouvent leurs limites à partir d’un certain point. Il
en résulte un sous-emploi croissant de la main-d’œuvre, la baisse du revenu par actif et l’appauvrissement de la
population rurale.
Cependant, dans la grande majorité des cas, le manque de terre est avant tout le résultat d’une répartition
inégale. Celle-ci peut présenter plusieurs physionomies. Le cas de figure le plus caractéristique est celui qui
associe le minifundisme au latifundisme, c’est-à-dire à l’accaparement des meilleures terres par de très grandes
exploitations : Afrique australe, Philippines… La situation la plus extrême est celle de l’Amérique latine, où
l’économie primaire agro-exportatrice, héritée de la colonisation, a laissé de très grands domaines agricoles de
plusieurs milliers, voire de plusieurs dizaines de milliers d’hectares. Leur caractéristique est que l’oligarchie
foncière qui les détient, souvent absentéiste, les sous-exploite ou ne les exploite que de façon extensive. La
paysannerie pauvre a été repoussée sur des terres toujours plus marginales et difficiles à cultiver, dans un accès
précaire à des parcelles trop petites (différentes formes de métayages ou de fermages) ou totalement dépourvus
de terre. Les latifundias emploient de façon saisonnière des paysans sans terre qui vont chercher du travail de
région en région au rythme des saisons agricoles, mais aussi des membres des familles paysannes minifundistes,
qui ne peuvent vivre de la seule exploitation de leur lopin. Les propriétaires terriens sont souvent les seuls
employeurs des campagnes. « Pour le latifundiste, cette structure foncière présente le double intérêt d’éviter la
concurrence d’une véritable économie paysanne et de disposer à sa guise d’une main-d’œuvre nombreuse, au
plus bas prix possible. »9 . Si des réformes agraires, même incomplètes, ont dans certains cas fait reculer le
poids de cette oligarchie rentière, cela n’a pas toujours été pour favoriser une répartition plus égalitaire : de
grandes exploitations plus intensives en capital ou des élevages modernes de bétail pour l’exportation sont venus
remplacer les latifundias. On assiste parfois, comme au Mexique ces deux dernières décennies, à un processus
de concentration nouvelle des terres, là où elle avait reculé auparavant. Enfin, dans certains pays, comme le
Brésil ou l’Argentine, elle est restée intacte voire s’est aggravée : la taille moyenne des exploitations a augmenté
et leur nombre a diminué.
« Mais il n’est pas nécessaire que la plus grande partie de la terre soit concentrée dans quelques grands
domaines pour qu’une fraction importante de la paysannerie soit confinée sur des minifundias, ou totalement
privée de terre. Dans les régions d’agriculture hydraulique en particulier, la superficie aménagée cultivable est
souvent à peine suffisante pour doter toutes les familles paysannes d’une exploitation à la mesure de leurs
moyens et de leurs besoins. Dans de telles conditions, il suffit d’une répartition tant soit peu inégale de la terre
pour réduire une partie de la paysannerie à l’état de minifundiste : dans beaucoup de vallées et de deltas rizicoles
d’Asie, où on trouve le plus grand nombre de paysans sans terre dans le monde, dans la vallée du Nil, etc., il
suffit que des paysans “riches” (des paysans qui ne sont bien souvent qu’un peu moins pauvres que les autres)
détiennent plus de la moitié des terres pour que la majorité de la paysannerie soit peu ou prou dépourvue de
terre. »10.
Face à cette situation, la question de la réforme agraire constitue un problème social explosif et récurrent, qui
a été est encore l’enjeu de nombreuses luttes sociales. Si de nombreux spécialistes, agronomes, organisations de
terrain, etc. s’accordent pour dire qu’un accès plus égalitaire des paysans pauvres à la terre serait un facteur
important de développement (autosuffisance alimentaire, emploi, élévation du pouvoir d’achat et de la demande
solvable, amélioration des conditions de vie, stabilité sociale, fonctionnement démocratique, meilleure
préservation des écosystèmes etc.), les résistances à ce type de réforme sont nombreuses, comme on le voit dans
le cas du Brésil (Texte 18 et Repère 7).
Ailleurs, des tentatives plus ou moins poussées ont eu lieu, avant tout dans un but de modernisation
économique (prévenir une situation révolutionnaire, améliorer la productivité agricole). Ce fut le cas des
réformes agraires mises en œuvre en Amérique latine dans les années 1960 sous l’égide de l’Alliance pour le
Progrès, impulsée par les États-Unis pour contrer l’influence de la révolution cubaine sur le continent. Ce fut
aussi le cas des réformes agraires effectuées, toujours sous l’influence des États-Unis, en Corée du Sud et à
Taïwan après la Seconde Guerre mondiale, dans le contexte de la guerre froide.
Cette catégorie de réformes agraires se caractérise souvent par un encouragement à la petite propriété
paysanne et se fait alors exclusivement dans le cadre de mécanismes de marché. Mais on relève le cas,
notamment en Amérique latine, de processus ayant pris place dans le cadre d’évolutions politiques de type
populiste et de fortes mobilisations sociales, en articulation avec d’autres mesures transformatrices telles que les
nationalisations de mines (comme en Bolivie dans les années 1950) ou la mise en place de coopératives
agricoles (comme au Pérou dans les années 1970), etc. La réforme agraire mexicaine est un exemple encore plus
particulier puisqu’elle a eu lieu à partir du début du 20e siècle dans le sillage d’une révolution, s’est poursuivie
ensuite à différentes époques avec des avancées et des ralentissements, mettant en place aussi bien des formes de
propriété communautaire (l’ejido) que des formes de propriété privée paysanne.
L’autre catégorie de réformes agraires trouve place dans le cadre de processus de type socialiste ou
socialisant : Algérie, Cuba, Vietnam, Nicaragua, mais aussi le Chili sous l’Unité populaire, les États indiens du
Bengale occidental et du Kerala. Si en général ces processus ont tenté d’intégrer la réforme des campagnes dans
un processus de planification centralisée et de promouvoir des unités de production étatiques, des rectifications
ont pu survenir, permettant le développement d’autres formes de propriété coopérative voire paysanne privée.
Ces éléments de typologie appellent trois remarques :
Si la diversité des expériences de réformes agraires est grande, en fonction des spécificités historiques et
politiques des pays concernées, en fonction des choix effectués dans les modalités du processus
(expropriation de toutes les grandes propriétés ou seulement au-delà d’un certain seuil, dans les cas
d’abandon cultural, indemnisation des propriétaires ou non, etc.), rien de tout cela ne résout la question
de l’organisation ultérieure de la production. Dans bien des cas, les grandes propriétés publiques se sont
avérées peu efficaces et incapables de répondre à la revendication des paysans sans terre. Les pressions
sociales en faveur d’une redistribution des terres ont donc toujours été fortes.
Quels que soient les choix effectués en termes de structures, la réforme agraire à elle seule est loin de
résoudre tous les problèmes : elle ne peut avoir les effets bénéfiques escomptés qu’avec une politique
d’accompagnement, en termes des crédits, d’infrastructures, de formation et de commercialisation
adéquate.
Si ces différents processus de réformes agraires ont été plus ou moins poussés (un grand nombre est resté
très incomplet sur le terrain et leur application très conflictuelle), l’histoire enseigne également qu’ils
sont réversibles : dans bien des cas (le Nicaragua, le Chili, le Mexique), on a assisté à une
reprivatisation et une concentration accrue des terres.
Par ailleurs, souligne Krishna Ghimire, chercheur à l’Institut de recherche pour le développement social
(Unrisd), « les grandes organisations internationales se sont rangées à la doctrine de la “réforme agraire assistée
par le marché”. Elle présuppose que la loi de l’offre et de la demande pourrait s’appliquer de façon équitable.
Mais comment un travailleur agricole égyptien pourrait-il acquérir un feddan de terre (0,42 ha) qui lui coûterait
les revenus d’une vie entière ? ». Cependant, malgré ce bilan négatif et son autocritique partielle (cf. Repère 8),
l’approche d’ensemble de la Banque mondiale par rapport à l’agriculture a peu évolué. Le Rapport sur le
développement dans le monde de 2008, « L’agriculture au service du développement », qui attribue à la
modernisation de ce secteur une importance nouvelle dans le développement et la réduction de la pauvreté,
préconise des politiques reposant sur un postulat inchangé : la nécessité, pour permettre une augmentation de la
productivité agricole et la diversification des économies rurales, d’assurer un meilleur fonctionnement des
marchés fonciers et une consolidation des droits de propriété. Celle-ci serait la condition pour que les
agriculteurs puissent envisager l’avenir sur le long terme, investir, se faire consentir un prêt, etc. Mais elle ne
résout en rien la question de l’inégalité structurelle dans les campagnes.
La Banque mondiale classe les pays en trois catégories selon la part de la croissance du PIB due à
l’agriculture au cours des quinze dernières années. Elle distingue ainsi :
Les « pays agricoles », où le secteur est la principale source de croissance, générant en moyenne 32 % de
la croissance du PIB, où la majorité des pauvres (70 %) vivent en zone rurale, et où on trouve la plupart
des pays d’Afrique subsaharienne.
Les « pays en transformation », où l’agriculture a cessé d’être la principale source de croissance (elle y
contribue pour seulement 7 % en moyenne), mais où la pauvreté touche les zones rurales de façon
disproportionnées. On y trouve entre autres la Chine, l’Inde, l’Indonésie et le Maroc.
Les « pays urbanisés », où la contribution de l’agriculture à la croissance est encore moindre (5 % en
moyenne) et où la pauvreté est principalement urbaine. Les zones rurales y concentrent encore
néanmoins 45 % des pauvres et les activités agro-industrielles et agroalimentaires représentent jusqu’à
un tiers du PIB. Ce groupe comprend la plupart des économies d’Amérique latine.
Les dernières décennies ont vu dans les campagnes du Tiers-monde des transformations parfois considérables,
et des processus de modernisation inégalement diffusés, à la fois socialement et géographiquement. L’exemple
le plus significatif est à cet égard la Révolution verte, implantée surtout en Asie du Sud mais aussi dans
certaines régions d’Amérique latine, particulièrement au Mexique, et dont les résultats sont contrastés (Texte
19). Surtout, on peut noter que ce processus nécessite pour réussir un certain nombre de conditions en terme de
structures sociales, d’infrastructures, de fonctionnement des marchés, d’encadrement de l’État, mais aussi de
conditions écologiques, qui ne sont pas réunies partout et notamment pas en Afrique. Le mode d’intensification
de l’agriculture qui a accompagné la Révolution verte n’est pas généralisable. L’Afrique subsaharienne est pour
le moment largement laissée pour compte de la modernisation agricole. La diffusion de méthodes culturales
adaptées est possible, des recherches et des succès localisés (par exemple des programmes de reboisement) le
prouvent, mais elle nécessite de toutes autres conditions : aide publique des pays riches orientée vers un effort
de recherche conséquent en ce sens et une formation de la population, progrès des indicateurs de santé, etc. mais
ces conditions semblent difficiles à réunir dans le contexte de l’ajustement structurel et des coupures budgétaires
qui l’accompagnent. De plus, phénomène nouveau, on assiste à des opérations massives d’achats de terres dans
les PED et surtout en Afrique à des fins spéculatives, de la part de firmes multinationales ou des gouvernements
de certains pays émergents, processus qui tend à marginaliser l’agriculture paysanne.
Quant à l’Amérique latine, si elle a connu à la faveur des processus de libéralisation de ces deux dernières
décennies une extension de l’agriculture capitaliste intensive en technologie (soja, cultures fruitières ou
maraîchères, et plus récemment agrocarburants…), souvent intégrée à la filière agroalimentaire ou agro-
industrielle et orientée vers les marchés mondiaux, cette évolution n’a en rien atténué le dualisme qui y
caractérise le secteur agraire. En effet les barrières à l’entrée de ces marchés sont importantes, et marginalisent
de nombreux paysans. Le même diagnostic peut être fait dans certaines régions d’Afrique ; ainsi, au Kenya, des
petits agriculteurs ont pu dans un premier temps améliorer leur revenu en produisant des fruits et légumes frais
et des fleurs coupées à destination des marchés européens. Mais avec l’augmentation du volume de ces
exportations, ils ont cédé la place à de grandes exploitations. Avant la phase d’expansion de cette activité, au
début de la décennie 1990, 70 % des fruits et légumes exportés provenaient de petites exploitations, à la fin de la
décennie ce n’était plus le cas que pour 18 %. Le reste provenait, pour 40 % de grandes exploitations détenues
ou louées directement par les importateurs des pays industrialisés, et pour 42 % de grandes entreprises
commerciales (FAO, op. cit.)
Michel Bessières, Rolf Künnemann et Krishna Ghimire, Courrier de l’Unesco, no 54, janvier 2001.
À propos de la réforme agraire, Alexandratos (Agriculture mondiale – Horizon 2010, FAO, 1995) souligne que dans les régions de
l’Inde où la terre est principalement répartie entre petits exploitants, la Révolution verte a eu un effet positif sur la pauvreté, « surtout dans
la mesure où il existait un cadre porteur, l’État et les autorités locales offrant aux petits agriculteurs des possibilités de crédits et
d’approvisionnement en intrants modernes, et ayant consenti un fort investissement dans l’infrastructure ». En revanche, dans les régions
où la terre était détenue par de grands exploitants, la Révolution verte a eu tendance à renforcer le processus de concentration des terres et
donc d’exclusion et de paupérisation des petits paysans.
En dépit des avancées, une grande partie de l’agriculture se caractérise donc toujours par une faible
productivité, due avant tout au caractère rudimentaire des techniques et au manque d’équipement. La quasi-
totalité des paysans pauvres n’a pas de tracteur, et les trois-quarts ne disposent même pas de la traction animale.
Ainsi, dans les « pays agricoles », l’agriculture génère 65 % de l’emploi mais seulement 29 % du PIB. On
retrouve les cercles vicieux de la pauvreté : l’extrême faiblesse de leur revenu, souvent à la limite de la survie,
les empêche de se procurer les intrants qui leur permettraient d’améliorer leurs rendements.
Enfin, la faiblesse de cette productivité doit être considérée non seulement dans l’absolu mais surtout par
rapport à celles des agriculteurs du Nord dans un contexte de libéralisation des échanges agricoles. Mais comme
le note l’agronome M. Mazoyer, cette faible productivité devient dramatique à partir du moment où cette
agriculture est mise en concurrence directe avec les celles des pays industrialisés, dont la production est
1 000 fois plus élevée aujourd’hui (cf. chapitre 6). Les conséquences en sont d’autant plus destructrices que
l’écart ne cesse d’augmenter. Une agriculture qui pouvait il y a quelques dizaines d’année permettre à une
famille de survivre ne le permet plus aujourd’hui. « Dans les années 1950, un agriculteur africain produisait
10 quintaux de grain. Il en gardait 8 pour nourrir sa famille. Il lui en restait 2 à vendre, à 200 francs français le
quintal (au cours d’aujourd’hui). Il disposait ainsi de 400 francs de revenu monétaire pour faire face à ses
dépenses de base. Aujourd’hui, avec le cours du quintal à moins de 100 francs, il doit en vendre 4 pour obtenir
la même somme et procéder à ses achats vitaux. Il ne parvient plus à nourrir sa famille et encore moins qu’avant
à dégager des moyens pour accroître sa production. Ses chances de vivre de sa terre, ou plutôt d’en survivre,
diminuent jour après jour. »11
Ce sous-développement structurel de l’agriculture explique en grande partie la persistance des problèmes
alimentaires dans le Tiers-monde.
En 2011, plus de 940 millions de personnes dans le monde sont sous-alimentées, selon les chiffres de la FAO.
Certes, ce chiffre représente une diminution, du moins en valeur relative, depuis les années 1970 ; mais ce recul
est dû essentiellement à l’amélioration de la situation en Chine et en Inde. En Afrique subsaharienne, en Asie du
Sud et au Moyen-Orient, la population souffrant de malnutrition a augmenté. La majorité vit dans les régions
rurales.
Ce phénomène n’est pas lié à une insuffisance de la production mondiale. Il est souvent le produit de la
dépendance alimentaire des économies. Les importations nettes de produits alimentaires en provenance des pays
industrialisés ont augmenté de 13 % dans les pays en développement au cours de 40 dernières années. La
libéralisation des échanges agricoles tend, on l’a vu, à aggraver ce phénomène.
Mais il arrive également que dans une économie autosuffisante à l’échelle nationale sur le plan alimentaire,
des situations de malnutrition ou de sous-nutrition, voire de famines, surviennent et perdurent pour des raisons
structurelles : dysfonctionnement dans le stockage et l’acheminement des denrées, et surtout, comme le note
Amartya Sen, privations de certaines catégories de la population des droits d’accès aux moyens de production
ou à la nourriture12.
Au total, peu de pays ont réussi à sortir leurs campagnes du sous-développement autrement que de façon
circonscrite régionalement et sans augmenter du même coup les inégalités.
Parmi les rares exemples de réussites, la Corée du Sud et Taïwan se caractérisent par le fait que le pouvoir
économique et politique de l’oligarchie foncière y a été totalement éliminé, et que la rente foncière, obstacle
majeur au développement partout ailleurs, y a été cassée. On peut citer des réussites régionales ou sectorielles,
comme l’extension de l’élevage laitier en Inde, qui a contribué à améliorer la ration alimentaire d’une partie de
la population, comme le revenu de nombreux paysans pauvres. Mais là encore, il faut noter que ce type de
progrès, fondé sur une extension à l’échelle du territoire national d’un réseau de coopératives laitières, n’a pu
voir le jour que grâce à un programme volontariste du gouvernement.
Dans tous les pays du Tiers-monde, les indicateurs du sous-développement (analphabétisme, problèmes de
santé) et de la pauvreté en général, ainsi que les inégalités de revenus et de patrimoine sont plus prononcés dans
les campagnes. Plus de 80 % des pauvres dans de nombreux pays d’Afrique subsaharienne et d’Asie, et plus de
la moitié en Amérique latine vivent à la campagne.
Certes, la pauvreté rurale a diminué plus rapidement que la pauvreté urbaine, au cours des dernières années, et
davantage en raison d’une amélioration des conditions de vie rurale que de migrations vers les villes. Mais cette
amélioration ne concerne en réalité que l’Asie de l’Est et Pacifique : elle n’est pas observée ailleurs et on
constate dans bien des cas une aggravation de la situation.
Les modèles « développementistes », on l’a vu dans le chapitre 2, ont été sévèrement accusés d’avoir
défavorisé l’agriculture, et notamment les paysans pauvres. Dans les années 1970 déjà, des analyses
convergentes du Bureau International du travail et d’organisations non gouvernementales comme la fondation
Dag Hammarskjöld13 mettent l’accent sur la nécessaire priorité à accorder à la relation entre réduction de la
pauvreté rurale, réduction des inégalités et promotion de l’emploi. C’est l’objet de rapports et programmes14 qui
convergent en partie avec la thématique des « besoins essentiels » (basics needs) mise en avant par la Banque
mondiale à cette époque, et s’inscrivent dans la perspective d’un « nouvel ordre économique international »
(NOEI). Ces réflexions mettent l’accent sur les conséquences négatives de la priorité accordée dans les
stratégies de développement à la croissance quantitative et à l’industrie. Cependant, les programmes préconisés
pour y remédier envisagent encore une intervention importante de l’État.
Ce ne sera plus le cas au cours de la décennie suivante avec la doctrine de l’ajustement structurel : les
modèles de développement sont accusés d’entretenir un « biais urbain » et un biais en faveur de l’industrie et de
la population urbaine, favorisant par les termes intérieurs de l’échange, les taux de change surévalués, les tarifs
protectionnistes et les subventions, à la fois les consommateurs des villes et les activités industrielles, au
détriment des campagnes et des agriculteurs, notamment les plus pauvres. Des politiques de libéralisation sont
donc préconisées pour remédier à cela. Néanmoins elles auront en général pour conséquence d’aggraver la
situation des paysans les plus pauvres, notamment par l’ouverture commerciale qui les empêche d’accéder à des
prix stables et rémunérateurs.
2.4 Des modalités spécifiques de l’urbanisation dans le tiers-monde, dues à cette situation
Cette pauvreté rurale explique en partie les conditions de l’urbanisation du Tiers-monde, et les migrations
continuelles en direction des villes. Ce phénomène remonte à plusieurs décennies et explique une partie de la
dépendance alimentaire des économies les plus pauvres.
« Ainsi, en République du Congo, en 30 ans, la moitié de la population active du pays est passée de la
campagne à la ville ; le nombre de bouches à nourrir par actif agricole a donc doublé, passant de 4 pour 1 à la fin
des années 1950 à 8 pour 1 dans les années 1980. Comme la productivité des cultures manuelles de forêt et de
savane n’a pas augmenté d’un iota durant la même période, la dépendance alimentaire du pays dépasse
aujourd’hui la moitié de ses besoins »15.
Si dans tous les PED, la population rurale reste plus nombreuse que dans les pays industrialisés, la répartition
spatiale de la population connaît des changements rapides. Si les tendances actuelles se poursuivent, la
population urbaine totale dans le Tiers-monde égalera la population rurale aux alentours de 2017.
Même si les différences restent considérables entre un continent très urbanisé comme l’Amérique latine et un
continent encore essentiellement rural comme l’Afrique, dans toutes les régions l’urbanisation présente des traits
distinctifs : importance du sous-emploi urbain, qui se traduit par la croissance continue du secteur informel et
non structuré ; carence des infrastructures et importance des formes d’habitat précaire (bidonvilles, qui
rassemblent plus de 40 % de la population urbaine) ; enfin, en Asie et en Amérique latine, disproportion entre
des métropoles congestionnées et un territoire essentiellement rural, avec l’absence d’un maillage
d’agglomérations intermédiaires.
La question du statut des femmes dans la société et de leur place dans le développement a longtemps été le
point aveugle de toute la réflexion théorique sur le développement. Cependant on observe, surtout dans les pays
anglo-saxons, en Asie, en Amérique latine, une évolution depuis deux décennies. Ces recherches ont permis de
mettre en avant un plusieurs constats.
En premier lieu, les indicateurs de développement (taux d’alphabétisation, de scolarisation, taux de chômage,
etc.) pour les femmes sont presque toujours inférieurs à ceux des hommes. Les membres de sexe féminin des
ménages ruraux reçoivent souvent une alimentation inférieure à celle des garçons et des hommes, tant dans
l’absolu qu’en fonction des besoins nutritionnels. Même l’espérance de vie à la naissance, qui est normalement
supérieure pour les femmes (de 6 à 8 ans dans les pays industrialisés) peut également être inférieure dans
certains pays d’Asie ou d’Afrique. Le phénomène des « femmes manquantes » est notamment caractéristique de
certains pays d’Asie (Texte 20). Ces inégalités vont souvent de pair avec des discriminations non seulement
économiques et sociales mais également institutionnelles, juridiques et politiques.
Source : Dasgupta et alii16, 2003, cité in Banque mondiale, « Equity and Development », Rapport sur
le développement du monde, 2006, p. 51.
Dans le cadre de l’actualisation des indicateurs du développement humain, le PNUD a présenté dans son
RDH de 2010 l’Indicateur d’Inégalité de Genre (IIG)17 (Graphique 6, Repère 9 et Tableau 2).
Tableau 2
Pays classés IIG Taux Taux Nombre Population Taux Taux Suivi
selon l’IDH mortalité fécon‐ sièges scolarisée d’activité – util. prénatal
maternelle dité ado‐Parlement secondaire – % contra‐ personn
lescentes % ceptif qualifié
(%)
Différence
entre le
2003-
Niveau classement 1990- Femmes
2008, Femmes Hommes Femmes Homm
d’IIG selon l’IIG 2008 (%)
pour mille
et selon
l’IDH
IDH très
élevé
1 Norvège 0,234 4 7 8,6 36,1 99,3 99,1 77,3 82,6
4 États-Unis 0,400 33 11 35,9 17,0 95,3 94,5 68,7 80,6
5 Irlande 0,344 24 1 15,9 15,5 82,3 81,5 62,8 80,7
9 Suède 0,212 +6 35 7,7 47,0 87,9 87,1 77,1 81,8
12 Corée du
0,310 8 14 5,5 13,7 79,4 91,7 54,5 75,6
Sud
14 France 0,260 3 8 6,9 19,6 79,6 84,6 65,8 74,9
17 Islande 0,279 4 4 15,1 33,3 66,3 57,7 81,7 89,9
26 Royaume‐
0,355 6 8 24,1 19,6 68,8 67,8 69,2 82,2
-Uni
31 Slovaquie 0,352 0 6 20,7 19,3 80,8 87,1 61,3 76,5
IDH élevé
45 Chili 0,505 8 16 59,6 12,7 67,3 69,8 48,1 78,9
47 Koweït 0,451 4 4 13,2 3,1 52,2 43,9 45,6 84,5
49 Monté‐
- - 14 14,7 11,1 97,2 98,8 - -
négro
Différence
entre le
2003-
Niveau classement 1990- Femmes
2008, Femmes Hommes Femmes Homm
d’IIG selon l’IIG 2008 (%)
pour mille
et selon
l’IDH
55 Arabie
0,760 73 18 26,1 0,0 50,3 57,9 21,8 81,8
Saoudite
62 Costa
0,501 9 30 67,0 36,8 54,4 52,8 48,8 84,2
Rica
56 Mexique 0,576 8 60 64,8 22,1 57,7 63,6 46,3 84,6
69 Ukraine 0,463 + 25 18 28,3 8,2 91,5 96,1 62,3 72,6
70 Iran 0,674 28 140 18,3 2,8 39,0 57,2 32,5 73,1
72 Maurice 0,466 26 15 39,3 17,1 45,2 52,9 46,3 80,3
73 Brésil 0,631 7 110 75,6 9,4 48,8 46,3 64,0 85,2
77 Équateur 0,645 9 210 82,8 25,0 44,2 45,8 48,1 79,0
83 Turquie 0,621 +4 44 38,8 9,1 27,1 46,8 26,9 74,6
84 Algérie 0,594 6 180 7,3 6,5 36,3 49,3 38,2 83,1
IDH moyen
88
République 0,646 +1 150 108,7 17,1 49,7 41,8 54,6 83,6
dominicaine
89 Chine 0,405 51 45 9,7 21,3 54,8 70,4 74,5 84,8
90 El
0,653 1 170 82,7 16,7 41,9 48,2 50,7 81,2
Salvador
91 Sri Lanka 0,599 9 58 29,8 5,8 56,0 57,6 38,5 80,3
92 Thaïlande 0,586 + 23 110 37,3 12,7 26,6 33,7 70,7 85,0
Différence
entre le
2003-
Niveau classement 1990- Femmes
2008, Femmes Hommes Femmes Homm
d’IIG selon l’IIG 2008 (%)
pour mille
et selon
l’IDH
95 Bolivie 0,672 1 290 78,2 14,7 55,1 67,9 64,1 82,9
98 Botswana 0,663 7 380 52,1 11,1 73,6 77,5 75,1 81,8
101 Égypte 0,714 7 130 39,0 3,7 43,4 61,1 24,4 76,4
110 Afrique
0,635 + 28 400 59,2 33,9 66,3 68,0 51,0 67,0
du Sud
113 Vietnam 0,530 55 150 16,6 25,8 24,7 28,0 74,2 80,6
115
0,674 18 170 112,7 18,5 30,8 44,7 48,6 81,9
Nicaragua
116
0,715 +9 290 107,2 12,0 16,0 21,2 50,0 89,9
Guatemala
119 Inde 0,748 3 450 68,1 9,2 26,6 50,4 35,7 84,5
IDH faible
133 Yémen 0,853 5 430 68,1 0,7 7,6 24,4 20,1 74,3
139 Togo 0,731 24 510 64,8 11,1 15,3 45,1 64,6 86,4
144 Sénégal 0,727 31 980 14,4 29,9 10,9 19,4 65,3 89,9
148 Tanzanie - - 950 130,4 30,4 - - 88,8 91,1
149 Côte
0,765 + 19 810 129,9 8,9 13,6 25,2 51,3 82,4
d’Ivoire
158 Sierra
0,756 33 2 100 126,0 13,2 9,5 20,4 67,1 68,1
Leone
Source : PNUD, Rapport mondial sur le développement dans le monde, 2010.
En second lieu, dans de nombreux pays du Tiers-monde la charge de travail des femmes est supérieure à
celles des hommes. Dans la plupart des pays, ce sont les femmes qui ont la responsabilité des systèmes
alimentaires et de l’agriculture, ainsi que de la majorité des opérations après-récolte (entreposage, manutention
et commercialisation).
Leur charge comprend à la fois travail productif et reproductif. Compte tenu de la place de l’économie de
subsistance dans beaucoup des sociétés, et du poids de tâches telles que la collecte du bois ou de l’eau (plusieurs
heures par jour), la frontière entre les deux n’est pas toujours clairement établie.
Mais dans les deux cas, une grande partie de ce travail est rendue invisible et largement sous-estimée, ce qui a
deux conséquences : d’une part les femmes ne bénéficient nulle part d’accès aux ressources et aux revenus de
l’activité économique proportionnels à leur participation ; elles travaillent en moyenne, en heures d’activités, un
tiers de plus que les hommes pour un montant estimé à un dixième du revenu de ces derniers. D’autre part, de
nombreux projets de développement mis en œuvre, notamment dans l’agriculture, n’ont tenu aucun compte de
leur place et de leur rôle, que ce soit dans l’orientation des investissements, les choix technologiques, les plans
de financement, les politiques de formation, etc. Il en est résulté un biais systématique, aboutissant soit à l’échec
global de ces projets, qui n’étaient pas adaptés à la réalité sociale, soit à une dégradation de la situation des
femmes suite à leur mise œuvre.
L’étude de projets de riziculture irriguée dans la vallée du fleuve Sénégal, où les femmes ne se sont pas vues
allouer une parcelle de terre irriguée au même titre que les hommes, et n’ont pas eu accès aux mêmes techniques
d’irrigation (pompes hydrauliques), en fournit un exemple. N’ayant pas été considérées comme productrices à
part entière dès le départ du projet, elles sont devenues une réserve de main-d’œuvre salariée pour ces zones
irriguées. « La nature du travail reste la même (tâches minutieuses, longues, répétitives). Seule la quantité de
travail a changé, devenant de plus en plus lourde et de moins en moins rentable pour elles »18.
Aujourd’hui, les institutions internationales tentent de remédier à cette lacune par la mise en place, dans
plusieurs pays, d’enquêtes budget-temps, qui comptabilisent, en plus du temps passé aux activités productives
rémunérées, le temps passé aux occupations productives non rémunérées (agriculture de subsistance) et aux
activités domestiques. Cela permet de mettre en lumière le volume total de travail assumé par les femmes. Mais
une véritable prise en compte de la dimension de genre dans les stratégies de développement se heurte à des
résistances sociales considérables.
De nombreuses femmes rurales n’ont pas accès à la terre ou n’y ont accès que par l’intermédiaire des hommes
de leur famille. Les effets de cette discrimination sont cumulatifs : elles n’ont pas accès au crédit, à la formation
technique, aux intrants agricoles et sont les oubliées des politiques de développement rural. Il s’agit là
probablement du principal facteur d’inégalité dans l’accès à la terre dans les régions d’Afrique subsaharienne où
la propriété est communautaire.
De plus, les effets spécifiques des Politiques d’ajustement structurel (PAS) sur la situation des femmes n’ont
pendant longtemps pas été pris en compte et le sont aujourd’hui de façon très insuffisante. C’est l’Unicef, en
1986, qui fut la première à dénoncer à l’échelle internationale l’inégalité des conséquences des PAS sur les
femmes. « L’augmentation des cultures d’exportation exigée par les PAS et soutenue par des mesures incitatives
a entraîné des changements, notamment dans la demande de main-d’œuvre et l’accès à la terre. Cette priorité
renforcée accordée aux cultures d’exportation, amorcée avec le colonialisme, se répercute sur la distribution des
revenus définie par la division du travail entre les sexes. Par ailleurs, elle pénalise les femmes dans la mesure où
leur temps de travail se trouve très alourdi par leurs obligations sur les champs du mari ; elles n’ont que très
difficilement, à la différence des hommes, accès au crédit qui leur permettrait, entre autres, d’acheter les intrants
nécessaires à leurs propres cultures : elles ont un accès différencié aux salaires tirés des emplois agricoles. De
plus, leurs obligations symétriques dans la production comme dans la reproduction (cultiver, transformer,
préparer la nourriture, chercher l’eau et les combustibles, élever les enfants, s’occuper des malades et des
personnes âgées) les obligent à travailler nettement plus que les hommes (tous les budgets-temps en
témoignent). Leurs revenus sont nettement plus faibles que ceux des hommes. Il se crée donc à l’intérieur du
ménage une compétition préjudiciable entre culture d’exportation et cultures de subsistance que renforce la
différenciation entre les genres. »
Dans ces conditions, peut-on dire que les femmes sont les premières victimes de la mondialisation libérale
dans les pays du Tiers-monde ? Les choses ne sont pas si simples : ces effets sont multiples et parfois
contradictoires (Texte 21). On observe presque partout depuis vingt ans une augmentation du taux d’activité des
femmes. Souvent, comme au Brésil, cette progression dans l’activité productive a été due à une insertion accrue
à la fois dans le secteur formel et dans le secteur informel. Partout cette augmentation de l’activité se fait sous le
signe d’une très forte inégalité : salaires très inférieurs, conditions de travail extrêmement dures et insalubres,
flexibilité et précarité, surchômage.
Cependant dans certains pays où l’activité économique des femmes était traditionnellement assez faible,
comme en Afrique du Nord, un taux de chômage en augmentation est aujourd’hui la traduction d’une
discrimination persistante, mais aussi d’une sortie croissante de l’inactivité. Dans l’ensemble, on observe une
assez large correspondance entre les flux d’investissement directs étrangers, surtout dans l’industrie
d’exportation, et l’augmentation du taux d’activité des femmes. Les nouvelles activités industrielles et parfois
tertiaires liées aux IDE emploient une main-d’œuvre féminine importante. Cette évolution présente souvent pour
elles un double visage : facteur d’exploitation accrue, particulièrement dans les zones franches et les
maquiladoras, elle peut déterminer également une évolution de leur statut, notamment dans la famille,
particulièrement quand elles deviennent seules soutien financier de la famille, les salariés masculins ayant subi
le contrecoup de la faillite des industries de substitution d’importation. Cela ne passe pas cependant par une
modification de la distribution traditionnelle des tâches domestiques : au contraire, les PAS (coupures de
subvention, renchérissement ou disparition de services publics) se traduisent par un report sur le travail familial
d’un grand nombre de tâches. Parfois s’y ajoutent des tâches dites « communautaires » visant à pallier ces
services publics défaillants : distribution de lait aux enfants, garderies, revendication d’accès à l’eau ou à
l’électricité pour un quartier… Comme le reconnaît un document de travail de la CEPAL (février 2000), les
politiques qui aboutissent à un enchérissement des services publics (au moment où les revenus ont tendance à
stagner ou à diminuer), et à une restriction de l’offre de services en direction de la petite enfance et des
personnes âgées, comptent sur la capacité des femmes d’utiliser au maximum leur énergie et leur temps pour le
bien-être familial. Parfois, surtout pour les plus pauvres, cela interfère avec leur capacité à être présentes sur le
marché du travail, donc de sortir de la pauvreté. Et ce même si « une multitude d’initiatives locales animées par
des femmes mêlent actions économiques et solidarités en vue d’un accès plus juste aux droits économiques,
sociaux et politiques de base. Les femmes créent des services collectifs de restauration : c’est le cas par exemple
des comedores populares (cantines populaires) en Amérique latine. Elles se regroupent pour épargner et accéder
au crédit (exemple des self-help groups indiens). Elles animent des mutuelles de santé (exemple du Sénégal).
Elles se mobilisent pour produire, transformer et vendre : coopératives de beurre de karité au Burkina Faso,
d’huile d’argan au Maroc, de commerce équitable en Bolivie, groupements d’intérêt économique féminins au
Sénégal. Dans la plupart des métropoles, elles s’organisent pour prendre en charge les questions
d’assainissement et de récupération des déchets. Les femmes se mobilisent aussi pour défendre l’accès à des
emplois décents et à la protection sociale »19. Le caractère éminemment contradictoire de ces initiatives
(palliatif ou esquisse de nouvelles pistes de développement) résulte du fait que les femmes sont touchées
également davantage que les hommes par la dégradation des services de santé et d’éducation, à plusieurs titres :
par les conséquences spécifiques sur leur santé (grossesses, accouchements, PMI, etc.)
de par leur position subordonnée dans la famille : parfois en cas de renchérissement des services et donc
de choix à effectuer, les filles seront retirées de l’école plus tôt que les garçons.
Héléna Hirata et Hélène Le Doaré, « Les paradoxes de la mondialisation », Cahiers du Gedisst, no 21,
1998.
La Banque mondiale, dans sa nouvelle approche, présente la mondialisation comme une chance de réussite
individuelle pour les femmes, approche qui néglige les fondements sociaux de leur oppression et de la
discrimination qu’elles subissent, et les instrumentalise dans un rôle de reproductrices et éducatrices (cf.
chapitre 8)
Le rythme rapide de la croissance démographique dans les sociétés du Tiers-monde, les densités élevées de
population dans certaines régions, ont été et sont encore parfois présentés comme un obstacle majeur au
développement et une hypothèque sur le futur. Deux mécanismes sont en général mis en avant : le déséquilibre
entre les besoins et les ressources alimentaires, et, plus récemment, la soutenabilité écologique, locale ou
globale, de l’activité humaine.
Cependant, il apparaît que les régions les plus pauvres, celles où un quelconque « décollage » s’avère le plus
difficile, ne sont pas systématiquement les plus peuplées. Il apparaît aussi que, compte tenu de la complexité des
mécanismes à l’œuvre, les prévisions des démographes sont fragiles et fréquemment rectifiées.
Il est communément admis que la transition démographique a présenté des caractéristiques particulières dans
les sociétés du Tiers-monde. Par transition démographique, on entend le « passage par étapes d’un régime
démographique traditionnel, caractérisé par des taux de natalité et de mortalité élevés, à un régime
démographique moderne présentant les caractéristiques inverses (faible natalité, faible mortalité). » En Europe,
cette transition s’est effectuée sur plus d’un siècle, entre la Révolution industrielle et le début du xxe siècle.
Dans les pays du Tiers-monde, les rythmes et les modalités de ce processus sont différents. Dans un premier
temps, la diminution du taux de mortalité, notamment infantile et juvénile, intervient davantage comme le
résultat des transferts de technologie médicale et sanitaire (vaccinations, antibiotiques) que comme un produit
endogène du développement économique. La baisse du taux de fécondité, elle, ne dépend pas en premier lieu de
facteurs techniques, mais de transformations économiques et socioculturelles profondes et de long terme. On
observe donc un décalage entre les deux évolutions, qui fait que certains ont pu parler d’« explosion
démographique », compte tenu de l’accroissement naturel de la population induit par la différence entre les deux
taux.
Cependant, le démographe Jacques Vallin conteste l’idée d’un retard dans la baisse du taux de fécondité :
celle-ci est au contraire également plus rapide que dans les pays industrialisés.
Ainsi, la plupart des pays en développement sont aujourd’hui entrés dans le processus de transition
démographique. L’évolution des comportements de fécondité ces dernières années dans la plupart des régions a
ainsi contraint les Nations unies, sur le moyen terme, à réviser leurs projections à la baisse, (même si les chiffres
annoncés en 2010 sont un peu supérieurs à ceux annoncés il y a deux ans). Ainsi, la population mondiale devrait
atteindre 9,3 milliards en 2050 et se stabiliser à 10,1 milliards en 2100. Si les pays en développement
représentent toujours plus de 95 % de la croissance démographique mondiale, c’est également à eux qu’est due
cette révision. Dans l’ensemble des pays en développement, les taux de natalité ont baissé de moitié depuis
1969, année de création du Fonds des Nations unies pour les activités de population (FNUAP), soit près de six
enfants par femmes à moins de trois aujourd’hui. L’indice synthétique de fécondité (ISF) était à une valeur
proche de 5 enfants par femmes vers 1950, la prévision de 1980 pour 2000 était de 3,2, or il est descendu à
2,6 en 2001. On a donc assisté à un freinage très brutal en 30 ans. Au lieu de 74 pays à très forte fécondité (plus
de 5,5 enfants) au début de cette même période, on n’en compte plus que 35 en 2005.
L’écart entre les projections de population s’explique presque entièrement par la diminution des estimations
pour l’Asie, en raison de la baisse de la fécondité, et l’Afrique en raison de la hausse de la mortalité due à
l’épidémie de sida : l’espérance de vie a connu une diminution dans plusieurs pays (même si en raison d’une
fécondité toujours relativement élevée, le taux d’accroissement naturel reste positif).
Un regard rétrospectif sur les prévisions des démographes montre donc leur grande fragilité et leur extrême
sensibilité aux hypothèses de comportements démographiques (Tableau 4).
Tableau 3 : Fécondité et évolution de la population dans le monde
Taux de Taux de
croissance fécondité
Principales Population annuel
(nombre
régions du (en moyen de la moyen
monde milliers) population d’enfants
(en %) par femme)
1950- 1970- 2005- 1950- 1970- 2005-
1 950 1 975 2 010
1955 1975 2010 1955 1975 2010
Monde 2 532 229 4 076 419 6 895 889 1,82 1,96 1,16 4,95 4,45 2,52
Pays
811 187 1 046 264 1 235 900 1,21 0,78 0,41 2,81 2,16 1,66
développés
Pays en
dévelop‐ 1 721 042 3 030 155 5 659 989 2,09 2,38 1,33 6,07 5,37 2,67
pement
Afrique 229 895 420 318 1 022 234 2,11 2,65 2,30 6,60 6,67 4,64
Amérique
latine et 167 368 323 074 590 082 2,72 2,41 1,15 5,86 4,47 2,30
Caraïbes
Océanie 12 675 21 489 36 593 2,22 1,94 1,75 3,81 3,30 2,49
Asie 1 403 389 2 393 056 4 164 252 1,98 2,28 1,08 5,82 5,00 2,28
Amérique
171 615 242 360 344 529 1,71 0,94 0,91 3,33 2,05 2,03
du Nord
Europe 547 287 676 123 738 199 1,00 0,61 0,20 2,65 2,17 1,53
Source : Population Division of the Department of Economic and Social Affairs of the United Nations
Secretariat (2010), World Population Prospects : The 2009 Revision, Highlights, New York, United-Nations.
Tableau 4
Taux de
fécondité
prévu
Principales Population
(nombre
régions du prévue en
moyen
monde 2 050 (milliers)
d’enfants
par femme)
2010-2015
Bas Moyen Haut Constant Bas Moyen Haut Constant
Monde 8 112 191 9 306 128 10 614 318 10 942 544 2,20 2,45 2,70 2,60
Pays 1 157 559 1 311 731 1 478 833 1 251 913 1,46 1,71 1,96 1,65
développés
Pays en
6 954 632 7 994 397 9 135 985 9 690 631 2,32 2,57 2,82 2,75
développement
Afrique 1 931 855 2 191 599 2 469 755 2 996 915 4,11 4,37 4,62 4,69
Amérique
latine et 645 870 750 956 868 827 862 516 1,92 2,16 2,41 2,31
Caraïbes
Océanie 48 817 55 233 62 111 59 824 2,20 2,45 2,70 2,51
Asie 4 457 562 5 142 220 5 898 284 5 907 867 1,34 1,59 1,84 1,51
Amérique
395 958 446 862 501 324 444 115 1,42 1,91 2,41 2,98
du Nord
Europe 632 130 719 257 814 017 671 658 1,33 1,83 2,33 1,45
Source : idem.
Amérique
Pays Pays en Amérique
Période Monde Afrique latine Océanie Asie Europe
développés développement du Nord
Caraïbes
1950-
47,7 65,9 42,3 38,2 51,3 60,5 42,9 68,7 65,6
1955
1970-
58,5 71,2 55,2 46,6 60,9 66,6 57,0 71,5 70,8
1975
2000-
67,9 76,9 65,9 55,2 55,2 76,6 69,0 78,2 75,4
2010
Source : idem.
La question des relations entre démographie et développement est traditionnellement envisagée sous la forme
d’un dilemme : la population est-elle une chance ou un obstacle pour le développement ? Pris sous cet angle, le
débat est balisé par les arguments des « pessimistes » et des « optimistes ».
Malthus, dans son Essai sur le principe de population, s’oppose en 1798 à l’optimisme des mercantilistes
pour qui « il n’est de richesse et de forces que d’hommes ». Son raisonnement repose sur l’hypothèse des
rendements décroissant des terres, et sur ce qu’il appelle la « loi de population » : la population croît
naturellement en progression géométrique, alors que les ressources alimentaires ne peuvent croître qu’en
progression arithmétique. Dès lors, la pression exercée sur les ressources devient rapidement insupportable. On
atteint alors le seuil de « population limite ». La croissance démographique, si elle n’est pas volontairement
limitée par les mariages tardifs et l’abstinence, compromet la croissance du revenu sur le long terme ; il se
produit une régulation naturelle de la population : famines, guerres, épidémies, résultent en effet de cette
surpopulation et éliminent d’emblée les plus faibles. Au nom du libéralisme, Malthus s’oppose à la « loi sur les
pauvres » en vertu de laquelle depuis 1562 les paroisses en Grande-Bretagne doivent fournir des secours aux
« indigents ». Il pense en effet que si on améliore les conditions de vie des plus pauvres, leur taux de fécondité
augmentera.
Cette analyse a fait ultérieurement l’objet de plusieurs catégories de critiques : la généralisation de
l’hypothèse des rendements décroissants des terres suppose l’absence de progrès technique et de gains de
productivité dans l’agriculture. Or Malthus, qui écrit alors que la révolution agricole en Grande-Bretagne est
déjà bien amorcée, en ignore totalement la portée. La question des modalités d’appropriation des sols et des
moyens de production n’est pas évoquée, comme l’analysera Marx pour qui la surpopulation n’est en rien une
loi universelle et naturelle, mais un processus social organisé par le capitalisme pour alimenter l’armée de
réserve industrielle. Enfin, une des prémisses du raisonnement malthusien, selon laquel aider les pauvres
reviendrait à stimuler leur fécondité, s’avérera démenti par les faits : on observe depuis deux siècles, presque
universellement, que l’augmentation du revenu par tête se traduit par une diminution de la fécondité.
Dans les années 1970, Ester Boserup22, a prolongé la critique des hypothèses malthusienne en montrant
qu’on ne pouvait pas confronter les densités de population avec des disponibilités alimentaires théoriques en
fonction des surfaces cultivables in abstracto, mais que la capacité d’une terre à nourrir la population
s’établissait dans le contexte historiquement déterminé des systèmes agraires des différentes sociétés. La
pression démographique entraîne une réorganisation de la collecte et de la production de vivres. L’effectif de
population impose à tout moment un choix du mode de production. Il ne s’agit donc pas de deux variables
indépendantes, mais de deux systèmes en interaction permanente.
C’est ainsi que le plafond des subsistances n’est pas une grandeur absolue fixée une fois pour toutes, mais
connaît une redéfinition permanente dans l’histoire (Texte 23). Comme le montre l’exemple des plaines
agricoles en Asie de l’Est et du Sud-Est, le temps de travail augmente avec les densités humaines, ce qui permet
une augmentation du rendement par hectare de surface cultivée. À l’opposé, de nombreuses régions, en
Amérique latine et surtout en Afrique, subissent les conséquences de ce que Boserup nomme la « trappe de
faible densité » : une agriculture extensive, à productivité très faible, ce qui ne l’empêche pas d’avoir
éventuellement une grande destructivité écologique qui ne doit rien à l’effectif de la population. Ce
raisonnement renvoie donc à la fois à la flexibilité des techniques (par opposition à la naturalisation des
phénomènes qu’on trouve dans le raisonnement malthusien) et à la question de l’organisation sociale de
l’agriculture, qui sera à même de permettre ou non l’implantation de ces techniques.
Cette organisation sociale dépend elle-même d’un ensemble de facteurs : institutions, systèmes de
financement de la production, et, comme le montre le démographe Hervé Le Bras à travers l’exemple du
Mexique, répartition de la propriété foncière et modalités d’insertion internationale de l’agriculture d’un pays
(Texte 25).
L’ajustement structurel
Club de Paris :
Enceinte informelle de réunions qui réunit les principaux États créanciers. Sa
présidence et son secrétariat sont assurés par le Trésor français. Il élabore des
modalités générales de consolidation des dettes publiques et privées garanties d’un
pays donné, au cas par cas, modalités qui sont ensuite recommandées aux
gouvernements en vue d’accords bilatéraux.
Club de Londres :
Comités consultatifs (Bank Advisory Committees) agissant pour le compte de
banques commerciales, donc des créanciers privés. Il est constitué de représentants
d’une douzaine de banques et habituellement dirigé par le plus grand créditeur.
Service de la dette :
Remboursement des intérêts et amortissement du capital emprunté. Le ratio du
service de la dette est le rapport de ce montant aux recettes d’exportations d’un pays :
c’est le chiffre qui représente le mieux le poids de la dette extérieure pour une
économie.
Rééchelonnement :
Rééchelonnement des créances des banques commerciales. Un rééchelonnement
consiste à repousser dans le futur les échéances d’un prêt. Les périodes vont jusqu’à
20 ans (Mexique) et les taux d’intérêt varient autour de 2 points de pourcentage au-
dessus du LIBOR, auxquels s’ajoutent 1,25 à 1,50 % de commissions.
Restructuration du service de la dette :
C’est l’ensemble du rééchelonnement et du refinancement.
Illiquidité :
Le débiteur connaît une difficulté de trésorerie passagère mais pourra payer dans le
futur, pourvu qu’on lui en laisse le temps. La réaction classique est le
rééchelonnement et la limitation des prêts nouveaux, tandis que les débiteurs sont
contraints à des politiques d’ajustement destinées à réduire leur déséquilibre de
balance des paiements.
Insolvabilité :
Le remboursement n’est possible ni aujourd’hui ni dans le futur : le prêteur cesse
ses prêts et cherche à faire jouer les garanties, si elles existent.
Stock Service
Dates (milliards (milliards Dont
de $) de $)
Part Part
publique privée
1980 516 80 50 30
1990 870 140 119 21
1995 1 860 206 154 52
2000 2 122 345 201 144
2005 2 489 438 253 185
2009 3 545 536 173 363
Stock Service
Amérique
29,7 34,7
latine
Afrique
9,9 6,4
subsaharienne
Moyen- 7,7 8,7
Orient et
Afrique du
Nord
Asie du Sud 11,6 6,4
Asie de
20,1 19,7
l’Est
PECOT et
20,9 24,3
Asie centrale
Total 100,0 100
Aide publique au +
développement (APD) 120 Md $
Rapatriement des profits 244 Md
des firmes multinationales $
+
Envoi des migrants
243 Md $
Service de la dette 173 Md
extérieure publique $
Dette
Réserves de
extérieure
Pays change
publique
(décembre 2010)
(décembre 2009)
Chine 2 622 93,1
Inde 284,1 76,5
Brésil 290,9 87,3
Pérou 44,1 20,7
Algérie 150,1 2,8
Source : CADTM, idem.
Économie‐
Causes Symptômes Effets
d’endettement
Excès de
Masse Endettement
la demande Inflation
monétaire public
sur l’offre
Salaires
élevés
Déficit
Forte budgétaire
consommation
publique
Faible Déficit
épargne (S) ressources internes
Prix Faible prix Déficit
administrés producteur alimentaire
créant des agricole
distorsions
sur les
marchés
Prix
Déficit des
subventionnés
entreprises
des entreprises
publiques
publiques
Surévaluation
Déficit Endettement
de taux de
commercial extérieur
change
Taux Surcapitalisation
Endettement
d’intérêt réel des entreprises
des entreprises
négatif Faible épargne
Au cours des dernières années, les échanges entre PED ont connu une
augmentation significative. Cette évolution est due aux processus de
régionalisation, à la libéralisation d’ensemble des politiques
commerciales, et surtout à la croissance des économies émergentes et
d’un certain nombre d’autres PED, plus rapide que celle des pays
industrialisés.
Pour les échanges Sud-Sud (régionalisation, croissance des émergents
plus rapide que celle de pays industrialisés), si cette évolution peut
représenter une atténuation de leur dépendance commerciale par rapport
aux débouchés des pays industrialisés, il faut prendre garde à une illusion
statistique. Comme le note la CNUCED, « Une part substantielle de
l’augmentation statistique du commerce Sud-Sud dans le secteur des
biens manufacturés est due aux doubles comptes liés à la division
régionale du travail en Asie de l’Est pour des produits éventuellement
destinés à l’exportation en direction des pays industrialisés. Elle est aussi
due aux doubles comptes liés au rôle de Hong Kong et Singapour comme
plate-forme d’exportation. Le rôle important des échanges triangulaires
dans l’augmentation mesurée du commerce Sud-Sud dans le secteur
manufacturier implique que le gonflement de ce commerce n’a pas réduit
la dépendance des PED par rapport à la demande intérieure des pays
industrialisés. […] D’un autre côté, la reprise économique en Amérique
latine a amélioré les perspectives du commerce Sud-Sud d’une façon qui
ne doit rien au commerce triangulaire. La croissance du commerce Sud-
Sud dans les produits primaires apparaît plus modeste dans les
statistiques commerciales. Cependant, elle a engagé un plus grand
nombre de pays que le secteur manufacturier, ce qui a permis à l’Afrique,
aussi bien qu’à l’Amérique latine de récupérer des parts de marché
perdues dans les années 1980. »10
Cinq ans après la déclaration de Doha, l’ONG Oxfam constate dans un rapport11
une dégradation de l’accès aux médicaments d’une part importante de la population
des pays pauvres, et met en cause l’absence de volonté politique des pays riches de
faciliter cet accès.
Flux
d’IDE
entrants
1970 1980 1990 1995 2000 2005 2009
en %
du total
mondial
PED 28,9 13,8 16,9 33,8 18,3 33,5 42,9
Chine 0,0 0,1 1,7 11,0 2,9 7,3 8,5
PED
exportateurs 9,1 13,9 11,9 24,6 14,1 20,2 23,2
de manuf.
PMA 1,2 1,0 0,3 0,5 0,3 1,5 2,5
Source : CNUCED
En 1983 est créée par l’assemblée générale des Nations Unies une
Commission mondiale pour l’environnement et le développement
(CMED, chargée d’un « inventaire prospectif des problèmes
d’environnement et de développement considérés de concert, en vue de
permettre une prise de conscience de tous les acteurs et une meilleure
coopération internationale. »). Cette commission, présidée par Gro
Harlem Brundtland, Premier Ministre de Norvège, publie en 1987 son
rapport : « Notre avenir à tous ». Communément désigné depuis comme
rapport Brundtland, il propose le concept de sustainable development6,
traduit par développement soutenable ou durable. Il s’agit d’« un
développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la
capacité des générations futures de répondre aux leurs ». Cette définition
articule donc trois dimensions, conférant d’emblée au développement
durable un caractère multidimensionnel :
une dimension économique qui vise l’optimisation des variables de
la croissance économique (investissement, échanges,
compétitivité) en évitant de transmettre une charge
d’endettement aux générations futures. Le rapport recommande
la poursuite de la croissance économique, qui devrait changer de
« qualité » sans toutefois rompre avec l’économie de marché.
Dans les pays industrialisés riches, la croissance économique
doit, elle aussi, se poursuivre pour soutenir celle des pays en
développement, mais la qualité de la croissance doit changer,
pour intégrer les « piliers » social et environnemental du
développement. En ce qui concerne les pays pauvres, la priorité
est de mettre fin au sous-développement en satisfaisant les
besoins de base. Pour cela, il faut une croissance économique
vigoureuse qui permette une augmentation du revenu moyen.
une dimension sociale – équité intragénérationnelle – qui vise la
lutte contre l’exclusion et la pauvreté, la satisfaction des besoins
essentiels, en transmettant le capital humain et le capital social
aux générations futures. Le rapport recommande aussi une
croissance socialement plus équitable, plus égalitaire pour les
individus et prenant en compte l’intérêt commun.
une dimension environnementale – équité intergénérationnelle –
qui vise à préserver les ressources naturelles pour les générations
futures. L’accent est mis sur la lutte contre la pollution et sur la
préservation des ressources non renouvelables. Il recense enfin
les problèmes écologiques majeurs sur plusieurs plans
(population, sécurité alimentaire, disparition d’espèces et perte
de ressources génétiques, énergie, pollution, industrie et
établissements humains), proposant de nouvelles modalités de
coopération internationale pour tenter de les résoudre. La prise
en compte de l’environnement doit se faire à travers une
réorientation technologique et des mesures de protection. Le
progrès technique doit servir à résoudre les deux interfaces avec
l’environnement : l’utilisation des ressources et la production de
déchets. Par mesure de précaution, il faut aussi protéger les
écosystèmes et conserver la biodiversité. Le rapport reconnaît
l’existence de limites ultimes à la consommation matérielle,
telles que le changement climatique, mais ne se prononce pas sur
leurs implications.
L’articulation entre ces trois dimensions est supposée parvenir à la
mise en place d’un cercle vertueux. Ainsi, dans les pays en
développement, la hausse du revenu ralentira la croissance
démographique, éliminera la pauvreté et l’injustice, et constituera par-là
même une arme efficace contre les dégradations majeures de
l’environnement, dont les pauvres sont les principales victimes. « Le
développement durable n’est pas un état d’équilibre mais plutôt un
processus de changement dans lequel l’exploitation des ressources, le
choix des investissements, l’orientation du développement technique
ainsi que le changement institutionnel sont déterminés en fonction des
besoins tant actuels qu’à venir. »
Une coordination entre les politiques publiques et les comportements
des acteurs privés est jugée nécessaire au bon fonctionnement des
marchés, mais l’accent est mis surtout sur la coopération internationale et
la « bonne gouvernance » mondiale. Le renforcement des règles et des
institutions capables de les faire respecter est ainsi renvoyé à l’échelle
internationale et des questions cruciales demeurent en suspens : comment
se fera la convergence des pays qui ont dépassé le stade de la satisfaction
des « besoins de base » vers le niveau de vie des pays riches ? Comment
faire adopter par les pays et les entreprises des sentiers de croissance
basés sur des technologies et des modes de croissance répondant aux
critères de durabilité ? Pour la CMED7, le développement durable ne
pourra être atteint que par une « volonté politique ».
Cela passe par plusieurs réformes institutionnelles et juridiques :
participation plus grande du public, des ONG, des industriels… aux
prises de décision ; renforcement des agences internationales (PNUE,
Banque mondiale entre autres) ; coopération élargie au niveau
international, etc.
Le rapport Brundtland, par le degré de généralité très grand de la
définition qu’il donne, laisse donc ouvertes plusieurs options mais
n’aborde pas les questions concrètes, et éventuellement conflictuelles, de
mise en œuvre des objectifs affirmés.
Le Sommet de la Terre
Part de
Part de
la
la surface
Effectifs population
des terres
Caractéristiques (en sur des
émergées
millions) terres
concernées
fragiles
(en %)
(en %)
Aridité 518 40 35
Uniquement 350
Aridité, 36
déclivité
Aridité, sol
107
pauvre
Aridité
déclivité, sol 25
pauvre, forêt.
Déclivité 216 17 7
Uniquement 149
Déclivité, sol
26
pauvre
Déclivité, forêt 41
Sol pauvre 430 33 22
Uniquement 386
Sol pauvre,
44
forêt
Forêts
130 10 7
uniquement
Total 1 294 100 73
En retour, les populations les plus pauvres sont fréquemment les plus
touchées par les catastrophes ou les dégâts environnementaux, et les
aspects écologiques et sociaux sont souvent étroitement imbriqués dans
les situations d’extrême pauvreté. Ils le sont en termes d’exposition aux
catastrophes naturelles (habitats précaires sur les collines instables
surplombant les villes, terrains inondables), ou industrielles (proximité
d’usines dangereuses comme celle de Bhopal) ; ils le sont également dans
les conséquences : absence de structures de soin, d’infrastructures
sanitaires, d’accès à l’eau potable ; ils le sont enfin en tant que
travailleurs : absence totale de normes d’hygiène et sécurité dans de
nombreuses entreprises du Tiers-monde, conditions de travail parfois
dangereuses. Ainsi une enquête a montré l’existence au Nicaragua de
plusieurs milliers de victimes du Nemagon, un insecticide fertilisant
utilisé dans les plantations bananières, filiales de multinationales nord-
américaines, interdit en 1977 aux États-Unis, et qui a provoqué chez les
ouvriers et les ouvrières cancers, maladies de la peau, fausses couches à
répétition, malformations congénitales, stérilité. Les sols et la nappe
phréatique sont contaminés pour deux siècles.
Plus généralement, on l’a vu, la mise en place d’une agriculture
paysanne vivrière et de systèmes fonciers moins inégalitaires est à la fois
plus juste socialement, plus efficace économiquement et moins
destructrice sur le plan écologique que l’agriculture capitaliste
d’exportation dans la plupart des cas – même si cet équilibre n’est pas
garanti d’avance et nécessite des politiques publiques de formation, de
mise en place d’infrastructures et, encore une fois, des transferts de
technologies.
1 - A. Amsden, Asia’s next giant. South Korea and late industrialisation, Oxford University
Press, Oxford 1989, et M. Lanzarotti, La Corée du Sud, une sortie du sous-développement, IEDES.
2 - p. 223.
3 - « Renouveau structuraliste : contexte, intérêt et limites », Mondes en Développement,
113/114.
4 - H. Ben Hammouda, op. cit.
5 - H. Ben Hammouda, op. cit.
6 - Cf. B. Prévost, « Nouvelle économie institutionnelle et réformes de seconde génération »,
Économies et Sociétés, série F, no 44, 4/2008, p. 713-736.
7 - J. R. Commons, “Institutional Economics”, The American Economic Review, Vol. XXI, no 4,
1931, p. 648-657, traduit dans Cahiers d’Économie politique, no 40-41, (2001, p. 287-301.
8 - T. Veblen, Why is Economics not an Evolutionary Science ? 1899.
9 - R. Coase, The nature of the Firm, 1937.
10 - O. Williamson “The new institutional economics : Taking stock, looking ahead”, Journal of
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11 - D. North, “Economic Performance Through Time”, The American economic review, June
1994.
12 - Cf. notamment Development as Freedom, 1999, New York, Anchor Book et Ethique et
Economie, 2001, Paris PUF.
13 - J. Rawls, Théorie de la justice, 1997, Paris, Le Seuil, La justice comme équité, 2003, Paris,
Le Seuil.
14 - B. Prévost, Sen, La Démocratie et le marché : portée et limites d’une critique.
15 - E. Assidon, « FMI-Banque mondiale : la fin du consensus théorique », L’Économie
politique, no 5, 2000.
16 - P. Salama, note du rapport CAE « Développement », 2000, pp. 10-11.
17 - On trouve différentes références. Voir entre autres : « Actes du séminaire sur le secteur
informel et politique économique en Afrique subsaharienne ». François Roubaud a également
effectué une étude sur le secteur informel au Mexique. La economía informal en Mexico : de la
esfera domestica a la dinámica macroeconómica, 1994.
18 - I. Guérin, J. Palier, B. Prévost, Femmes et microfinance – Espoirs et désillusions de
l’expérience indienne, Archives contemporaines, 2009.
19 - G. Rist, Le Développement, histoire d’une croyance occidentale, Presses de Sciences
Politique, Paris, novembre 2001.
20 - Qui a convergé depuis avec certains des courants de la « décroissance », apparus
ultérieurement dans les années 1990 à partir de préoccupations plus spécifiquement écologiques
(cf. chapitre. 7)
21 - Les citations présentées ici sont extraites d’un article de Serge Latouche dans le Monde
diplomatique (juin 2001) : « En finir, une fois pour toutes, avec le développement », qui condense
ce qu’il développe notamment dans « Faut-il refuser le développement ? », et dans
« L’Occidentalisation du monde ».
22 - Catherine Quiminal, « Les associations de femmes africaines en France : nouvelles formes
de solidarité et d’individualisation », Cahiers du GEDISST, no 21.
23 - Albin Michel, Paris, 1998.
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Index
Abramo : 118
accès au marché : 173, 174, 179
Afrique : 13, 21, 24, 25, 32, 39, 44, 45, 46, 47, 48, 55, 57, 76, 77,
88, 90, 96, 98, 102, 103, 104, 106, 107, 109, 111, 114, 116, 119,
121, 125, 126, 128, 130, 139, 143, 146, 147, 151, 154, 162, 164,
166, 167, 168, 169, 174, 175, 176, 177, 207, 211, 222, 236, 240,
241
Afrique du Sud : 24, 175
Agarwal : 209, 222
Agenda 21 : 201
Aggeri : 203
agraire : 85, 99, 100, 101, 102, 103, 104, 105, 129, 130
agriculture : 23, 47, 55, 67, 73, 74, 75, 76, 80, 82, 83, 84, 99, 104,
105, 106, 107, 115, 119, 124, 128, 129, 173, 174, 177, 218, 226
aide : 130, 137, 158, 159
ajustement structurel : 90, 97, 104, 107, 116, 117, 118, 144, 148,
150, 151, 153, 154, 156, 157, 159, 160, 161, 162, 178, 184, 224,
226
Aknin : 222
Alexandratos : 105
Algérie : 7, 12, 21, 24, 31, 77, 79, 83, 85, 101, 113, 224
alphabétisation : 108, 127
Amazonie : 46, 99
Amérique latine : 12, 24, 32, 39, 42, 44, 45, 46, 48, 53, 57, 70, 78,
79, 81, 82, 85, 88, 89, 90, 96, 98, 101, 103, 104, 107, 108, 111, 118,
119, 120, 128, 130, 136, 139, 140, 147, 149, 157, 161, 164, 167,
179, 181, 186, 187, 188, 217, 222, 234, 236, 237
Amin : 43, 47, 56, 58, 59
Amsden : 241
ancrage : 153, 154, 155
ancrages monétaires : 241
anti-tiers-mondistes : 20
APD : 137
Arabie Saoudite : 31, 111
Argentine : 21, 46, 49, 89, 98, 139, 154, 162, 173, 181, 189, 190,
224
Asie : 13, 24, 39, 42, 43, 46, 47, 70, 88, 89, 90, 91, 96, 99, 103,
104, 106, 107, 108, 109, 118, 119, 120, 121, 128, 130, 153, 155,
158, 166, 181, 183, 185, 186, 187, 222, 227, 236
Assidon : 231
asymétries : 51
Athukorala, Bleaney : 171
Attané : 128, 222
attractivité : 190, 211, 212
autosubsistance : 105
autosuffisance alimentaire : 104
avantages comparatifs : 47, 49, 50, 51, 145
Bagchi : 43
Bairoch : 42, 44, 54, 55, 97
Balassa : 50, 224
Balogh : 53
Bandoeng : 12, 13
Bangladesh : 127, 128
Banque mondiale : 24, 33, 50, 94, 96, 102, 103, 107, 119, 128, 130,
137, 140, 143, 144, 145, 156, 157, 158, 161, 201, 202, 205, 211,
216, 217, 219, 221, 224, 226, 234, 236, 241
barrières : 78, 104, 173, 174, 177, 178, 179
Barros : 82, 162
Ben Hammouda : 224, 225, 241
Bernis : 83
Bertola : 93
besoins essentiels : 33, 107, 200, 215
Bessières : 105
Bettelheim : 60
Bhagwati : 50
biais urbain : 107
bien commun : 210
biodiversité : 200, 206, 210, 218, 219, 220
Bolivie : 20, 24, 46, 78, 101
Boserup : 128, 197
Botswana : 24
Bourguignon : 93
brèche de productivité : 171
brèche technologique : 188
Brésil : 24, 29, 31, 46, 49, 81, 82, 89, 96, 98, 99, 100, 102, 113,
116, 118, 136, 139, 154, 162, 167, 170, 173, 175, 176, 181, 211
Bruno : 71
Bruntland : 199, 205
budget-temps : 115
Burundi : 47, 98
Cambodge : 24, 44
Cameroun : 234
Cancun : 173, 174
Cap Vert : 24
capital humain : 91, 92, 156
capital naturel : 204, 205, 206
Caraïbes : 12, 161, 177, 185
Centre-Périphérie : 53
CEPAL : 20, 53, 57, 59, 77, 78, 117
cercle vicieux : 71, 73, 74, 93, 126, 150
Chavagneux : 159
Chenery : 70, 71, 74, 130
Chesnais : 182, 183, 185, 186
Chili : 31, 49, 95, 101, 102, 112, 118, 149, 170, 181, 241
Chine : 24, 31, 39, 45, 95, 106, 114, 120, 162, 164, 166, 182, 207,
215, 216, 222
choc monétariste : 136
chômage déguisé : 69
ciblage : 157
club de Londres : 138
club de Rome : 196, 197
CNUCED : 55, 88, 90, 167, 168, 169, 170, 180, 181, 182, 194, 198,
229
Coase : 205
Colombie : 46, 149
colonialisme : 116
colonisation : 39, 42, 43, 44, 45, 47, 48, 49, 98
communautaire. : 116
concentration foncière : 85, 97
conditionnalité : 158
Congo : 108
consensus de Washington : 82, 145, 156, 222, 224, 227, 231
convergence : 162, 164
Corée du Sud : 20, 22, 24, 31, 88, 101, 106, 112, 139, 162, 179,
182, 224, 240, 241
Costa Rica : 24, 31, 210
Côte d’Ivoire : 24, 32, 47
courbe en U inversé : 92
crise : 136, 139, 146, 154, 155, 157, 158, 160
Croissance : 14, 92
croissance endogène : 91, 156, 157, 225
croissance zéro : 16, 197
Cuba : 101
culture d'exportation : 116
cultures de subsistance : 116
currency board : 191
de Soto : 234, 235
décennie perdue : 188
décollage : 16, 17, 97, 119, 164
décomposition des processus de production : 183
décroissance : 164, 197, 215, 222
déficit alimentaire : 125
déforestation : 100, 206, 210, 211, 217, 221
délocalisations : 183
Démographie : 119
dépendance : 39, 56, 57, 58, 59, 162, 179, 186, 237, 240, 241
dépendance alimentaire : 85, 106, 108
déséquilibrée : 74, 79
désertification : 20, 201, 208
désindustrialisation : 153
Destremau : 94
détérioration des termes de l’échange : 54, 171
dette : 130, 136, 137, 138, 139, 140, 141, 143, 144, 145, 146, 147,
148, 149, 150, 151, 152
dette écologique : 209
dévaluations : 152
développement autocentré : 49
Développement du sous-développement : 59
développement humain : 111, 127, 130
développement participatif : 159
discriminations : 109
distribution des revenus : 92, 93, 96
division cognitive : 183
division internationale du travail : 166
Dockès : 17
Doha : 173, 174, 175, 176, 177
dollarisation : 149
dotations en facteurs de production : 49
double déficit : 70, 130
Drevet-Fabbous : 130
droit au développement : 209, 215
droits à polluer : 206, 207
droits de propriété intellectuelle : 175
dualisme : 53, 67, 68, 73, 104, 152
Dumas : 67
Dumont : 44, 48, 125, 238
dumping environnemental : 211
dumping social : 211
Dutch Disease : 21
échange inégal : 56, 59
échange international : 167
écodéveloppement : 197, 198, 199, 202
économie casino : 188
économie de réserve : 45, 47
économie de subsistance : 94, 115
économie de traite : 44, 67
économie primaire agro-exportatrice : 98
économie primaire d’exportation : 45
éducation : 22, 29, 33, 144, 147, 151, 155, 156, 157, 159, 160, 227,
228, 237, 239
effet de serre : 199, 207, 210, 211
effet externe : 93
effets d’entraînement : 74, 75, 80, 83, 84
effets d'éviction : 147, 156
Égypte : 12, 24, 32
Emmanuel : 56, 57, 60
empowerment : 161, 236
endettement extérieur : 130, 150
Équateur : 46, 78
équilibrée : 74, 75, 77
erreur de composition : 152
esclavage : 43, 45
espérance de vie : 109, 120, 121, 123, 127
étapes de la croissance : 16
État : 13, 29, 59, 60, 103, 150, 152, 157, 191, 198, 206, 211, 219,
221, 222, 225, 232, 238
États-Unis : 19, 29, 30, 42, 60, 112, 173, 174, 176, 207
Europe : 16, 17, 18, 24, 43, 44, 68, 97, 111, 118, 120, 125, 164,
173, 174, 183, 185, 186, 207
excédent de main d’œuvre : 69
exode rural : 234
explosion démographique : 120, 125
externalités : 204, 206, 207, 236
extravertie : 42, 48, 49, 84
fécondité : 71, 120, 121, 124, 126, 127, 128, 197
Fei : 67, 68
Feldmann : 80
femmes : 85, 108, 109, 111, 115, 116, 117, 118, 119, 121, 126, 127,
128, 129, 130
filets de sécurité : 153, 157
financement : 69, 70, 77, 79, 80, 104, 115, 129, 130, 139, 157, 159,
187, 189, 229, 236
financière : 23, 67, 145, 152, 158, 162, 186, 187, 188, 189, 209
firmes multinationales : 162, 178, 179, 182, 187
firmes réseaux : 183
flexibilité : 183, 188
flux commerciaux : 165
flux d'IDE : 179, 180
flux internationaux : 137
FMI : 24, 33, 100, 140, 141, 143, 144, 146, 147, 150, 158, 161,
189, 226, 241
FMN : 79, 82, 85, 212
Folbre : 118
Fontaine : 146, 150, 162, 226
fordisme périphérique : 241
forêt : 217
Founou-Tchnigoua : 47
France : 29, 31, 99, 112, 120, 137, 198
Froger : 222
Furtado : 60, 68, 69
Gabon : 24
Galeano : 46
Genève : 173, 174
genre : 85, 115, 118
Geronimi : 212
Gerschenkron : 17
Ghimire : 102, 105
gouvernance : 37, 158, 159, 199, 201, 221
Grameen Bank : 236, 237
Groupe de Cairns : 173
Groupe des 22 : 174
Guatemala : 32, 114, 160
Guillen Romo : 79, 85
Haberler : 60
Haïti : 24, 98
Harribey : 205
Harris : 68
Hartwick : 204
Hecksher-Ohlin-Samuelson : 49
Henni : 222
Hirata : 119
Hirschman : 75
Hong Kong : 25, 166, 182, 224
HOS : 49, 51, 52, 56
Hotelling : 204
Hugon : 146, 148, 153
Husson : 162, 191, 222
hyperinflation : 149
IDE : 82, 117, 137, 154, 155, 179, 183, 184, 212
Inde : 12, 32, 42, 43, 44, 48, 49, 57, 80, 81, 82, 105, 106, 107, 114,
164, 170, 175, 176, 177, 182, 184, 215, 226, 237
Inde Brésil : 207
indépendance : 7, 12
Indicateur de développement humain : 25
indicateurs : 23, 24, 25, 30, 33
indicateurs de la pauvreté : 130
Indonésie : 42, 44, 96, 162, 166, 182, 211, 218
industrialisation : 73
industries industrialisantes : 79, 83
inégalités : 7, 20, 24, 25, 29, 81, 85, 89, 90, 91, 92, 95, 96, 106,
107, 109, 111, 127, 130, 164, 215, 216, 222, 233
inégalités sociales : 95
intégration régionale : 78
investissement directs étrangers : 117
investissements directs étrangers : 137, 153, 154
Irak : 24
Iran : 24, 31, 113
ISDH : 111
Jamaïque : 184
Japon : 19, 20, 97, 176, 185, 207
Johannesburg : 207
Kaldor : 90, 92
Kenya : 44, 47, 104
Kerala : 101
Koweït : 25
Krueger : 50, 52, 224
Künnemann : 105
Kuznets : 16, 90, 92, 215
Kyoto : 206, 207, 210, 211
Lanzarotti : 226, 241
latifundia : 48, 98
latifundisme : 98
Latouche : 222, 238, 240, 241
Le Doaré : 119
Lebras : 125, 129, 222
Lénine : 58
Leroy-Beaulieu : 124
Lewis : 5, 52, 67, 73
L'Hériteau : 146, 147
libéralisation : 147, 148, 153, 154, 155, 157, 158, 227
libéralisation commerciale : 166, 179
libéralisation des échanges : 106
libre-échange : 43, 178
Lipietz : 241
Little, Scitovsky et Scott : 60
Lula : 100
Luxemburg : 58
Madagascar : 24, 47, 162, 218, 219, 234
Mahalanobis : 80
Malaisie : 24, 88, 91, 97, 118, 166, 182
Mali : 218
Malthus : 124, 125, 196, 197
malthusien : 124, 128, 226
Mandel : 60
maquiladoras : 117, 184
maquildoras : 184
Maroc : 24
Maurice : 24, 31, 198
Mazoyer : 97, 105, 130
Meadows : 196, 197
Méral : 222
Metzler : 158
Mexique : 22, 31, 46, 59, 81, 82, 89, 98, 102, 103, 113, 118, 120,
129, 138, 139, 149, 154, 155, 162, 167, 181, 184, 186, 189, 198,
211, 224, 234, 241
micro-crédit : 233, 236, 237
mimétisme technologique : 83
minifundias : 99
minifundisme : 98
modèle social : 85, 222, 241
modèles de croissance : 60, 66, 67, 74, 75, 77, 79
modèles de développement. : 60, 66, 67
modèles traditionnels de croissance : 155
mondialisation : 162, 165, 179, 182, 183, 186, 187
mondialisation libérale : 116
monétariste : 145
monopole commercial : 42, 44
Monterrey : 159
moratoire : 139, 148
mortalité : 120, 121, 126, 127
Mouhoud : 184, 194
Moyen-Orient : 13, 24, 164
Mulot : 161
Myrdal : 47, 53, 71, 130
Namibie : 24
Narain : 222
néoclassique : 13, 17, 18
néo-colonialisme : 49
néo-malthusiens : 125
néostructuralisme : 225, 232
néo-structuralisme : 161
néo-structuralistes : 225
Nicaragua : 24, 32, 101, 102, 103, 114, 218
Nigeria : 47, 162
Nord-Sud : 19
normes : 147, 158, 160, 167, 170, 174, 175, 186, 207, 209, 212,
218
Norvège : 27, 30
Nouveaux pays industrialisés : 21
nouvel ordre économique mondial : 168
nouvelles économies industrialisées : 158
NPI : 21, 170
Nurske : 69, 71, 74
Objectif de Développement du Millénaire : 215
Objectifs du Millénaire : 22, 33, 215
Oman : 71, 82, 162
OMC : 167, 172, 173, 174, 176, 177, 185, 211, 213, 232
ONG : 137, 194, 201, 207, 236
ORD : 175, 211
PAC : 174
Papouasie-Nouvelle-Guinée : 210
paradoxe de composition : 53, 178
Partant : 170, 238
participatif : 228
participation : 75, 78, 84, 111, 115, 160, 161, 165, 170, 201, 203,
220, 228
participative : 228
PAS : 116, 146, 147, 151
Passet : 214
pauvreté : 93, 94, 95, 96, 97, 105, 107, 108, 126, 127, 144, 156,
157, 158, 160, 161
paysanneries : 130
pénurie d’épargne : 69, 70, 71
Périphérie : 20
Pérou : 101, 170
Perroux : 16, 19, 23, 60, 66, 75, 214, 241
pessimisme des exportations : 52, 53
petite propriété paysanne : 101
pétrodollars : 130
Philippines : 24, 98, 103, 166, 182, 184
Pigou : 205
planification : 77, 79, 80, 83, 101
plantation : 42, 43, 44, 45, 46, 48, 56, 67
PMA : 177, 179
PNUD : 25, 26, 32, 114, 118, 127, 130
polarisation : 185, 186
pôles de croissance : 75
pollueur : 205
Population : 124, 128
populistes : 101
Prebisch : 54, 60, 170, 171
pression démographique : 98, 129, 130
privatisation : 147, 148, 153, 188, 191
produits primaires : 44, 50, 53, 54, 171, 181
promotion des exportations : 50, 51, 147, 224
propriété intellectuelle : 176, 213
protection tarifaires : 50
protectionnisme : 52, 178
Qatar : 25
question agraire : 85, 97
Quiminal : 241
rapports sociaux : 85
redistribution : 92, 130, 152, 157
Rééchelonnement : 138
réformes agraires : 98, 101, 102
régime démographique : 85, 119
régimes d’accumulation : 187, 189
régimes d’accumulation excluants : 89
régionalisation : 162, 184, 185
relativisme culturel : 240
rendements décroissant des terres : 124
rente : 69, 79, 152
rente foncière : 106
République dominicaine : 31, 113
Révolution industrielle : 209
Révolution verte : 103, 104, 105
Rio : 46, 201, 207
Rist : 238
Rosenstein-Rodan : 5, 74
Rosier : 17, 80, 84
Rostow : 16, 17, 69, 70
Roubaud : 234, 241
Roudart : 98, 130
ruissellement : 95
Russie : 29, 162, 227
Rwanda : 47, 98
Salama : 60, 89, 97, 130, 149, 189, 241
Sarkhar : 170, 171, 172
Sauvy : 13, 20, 23
Schembri : 212, 222
Seattle : 173
secteur informel : 108, 111, 116, 233, 234
sélectivité : 158
self-reliance : 75
semi-industrialisées : 89
Sen : 106, 161, 236
Sénégal : 24, 32, 44, 114, 115
sida : 36
Sierra Leone : 27, 32
Singapour : 25, 166, 182, 224
Singer : 54, 170, 171, 172
société civile : 159, 228, 233
sous-développement : 14, 17, 18, 21, 22, 23, 24, 25, 33
soutenabilité : 119, 125
soutenabilité faible : 203
soutenabilité forte : 206
spécialisation internationale : 49, 52
spécialisation primaire : 48
Sri Lanka : 32, 42, 43, 114, 226
stabilisation : 139, 144, 146, 148, 149, 150, 157
Stiglitz : 210, 211, 222, 226, 229, 232, 241
STIGLITZ : 210, 227
Stockholm : 198, 199, 222
stratégies de développement : 60, 73, 74, 75, 77, 81, 82
structuralisme : 53
substitution d’importation : 49, 70, 78, 85, 117
substitution des exportations : 187
substitution des importations : 224
subventions agricoles : 174
Suède : 31, 112, 120
Summers : 211
Sunkel : 60
Swaziland : 24, 47
systèmes agraires : 128
Taïwan : 25, 88, 101, 106, 164, 166, 179, 182, 224
take-off : 17, 69, 90
Tanzanie : 32, 44, 75, 76, 114
taux de fécondité : 120, 124, 130
taux effectifs de protection : 50
taxe : 205
Taylor : 225
Thaïlande : 24, 32, 39, 88, 91, 95, 113, 154, 155, 166, 170, 182
théorie néoclassique : 155, 156
Tiers-monde : 6, 7, 13, 17, 20, 21, 22, 23, 24, 28, 39, 44, 49, 51, 54,
57, 60, 68, 85, 97, 103, 106, 107, 108, 115, 116, 119, 120, 130, 136,
137, 138, 139, 143, 144, 146, 152, 155, 156, 165, 166, 167, 172,
173, 174, 177, 179, 198, 199, 208, 211, 214, 216, 234, 237
Todaro : 68
Toussaint : 144
transfert de technologie : 218
transfert domestique : 150
transferts de technologie : 175, 186
transition démographique : 119, 120, 121, 126
trappe : 71, 73
Tubiana : 159
Tunisie : 12, 24
Turquie : 24, 31, 39, 113, 162, 182
Ukraine : 31, 113
urbanisation : 108, 127
Uruguay round : 172, 173, 177, 194
Vallin : 120, 121
Venezuela : 139
Vietnam : 12, 24, 32, 44, 101
Viner : 60, 71
Wignaraja : 71
Williamson : 145
Yémen : 24
Zambie : 151
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