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Master Droit International des Affaires (DIA)




Lors des négociations commerciales, les modalités financières du contrat prennent une importance
primordiale. Elles concernent, entre autres, la monnaie de facturation, les délais de règlement, le mode de
paiement (la forme matérielle sous laquelle le paiement sera effectué), et les techniques de paiement ou
procédures de recouvrement. Certaines sont plus spécifiques au commerce international, telles que les
remises documentaires et les crédits documentaires.

Pour l'exportateur, obtenir de nouveaux marchés à l’étranger signifie chercher à se faire payer de ses
clients. « Vendre c’est bien, être payé c’est mieux », doit être le leitmotiv des exportateurs. Ces derniers
recherchent le mode et la technique de paiement adéquats, parmi de nombreuses possibilités plus ou
moins complexes et contraignantes, qui n’offrent pas les mêmes sécurités pour le créancier.
Il faut insister sur la nécessité de concilier les intérêts divergents des cocontractants. Les intérêts de
l’importateur et de l’exportateur sont pour partie contradictoires. Le premier souhaite recevoir sa
marchandise au meilleur prix et la payer le plus tard possible, de préférence après la livraison, tandis que
le second veut vendre en dégageant un bénéfice et n’expédier la marchandise qu’après règlement de
l’acheteur. 1
En raison de certains impératifs commerciaux (conquête d’un nouveau marché, accroissement de sa
part de marché sur un pays, distribution sélective), l’exportateur ne dispose pas souvent d’une position
de force suffisante, susceptible de lui permettre d’imposer ses conditions de paiement.

Un mauvais choix peut engendrer des conséquences financières et commerciales graves pour
l’entreprise exportatrice. Ainsi, une trop grande frilosité financière risque de faire perdre des marchés,
tandis qu’une attitude laxiste pourra provoquer une perte financière en cas de défaillance du débiteur.
Face à une concurrence commerciale accrue, l’exportateur se doit de bien connaître les différents outils
dont il dispose, afin d’adapter son choix selon le pays, voire selon le client.

Dans cette perspective, l’étude sera consacrée sur la remise documentaire et son mode opératoire
pour maîtriser le risque non-paiement.

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• Comment la remise documentaire peut-elle participer à la sécurisation des
transactions commerciales contre des éventuels risques, tout en
exploitant les nouvelles technologies ?

La problématique sera déclinée en deux questions :

• Quels sont le cadre juridique et le mode opératoire de la remise documentaire ?

• Quels sont les éventuels risques et les impacts de la digitalisation sur cet instrument de paiement ?

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LE CADRE
JURIDIQUE
ET LE
DEROULEMENT
DE LA REMISE
DOCUMENTAIRE

LES INSTRUMENTS DE PAIEMENT A L’INTERNATIONAL


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CHAPITRE 1 : LE CADRAGE JURIDIQUE DE LA REMISE DOCUMENTAIRE

• En raison de l’éloignement géographique entre acheteurs et vendeurs, la


confiance est souvent difficile à établir lors de la première transaction.
• La Chambre de Commerce Internationale a adopté en 1933 les Règles et
Usances Uniformes relatives aux crédits documentaires pour uniformiser
les pratiques et le sens des termes.

• Les RUE définissent l’essentiel des droits et des obligations des banques dans les opérations
d’encaissement.
• Lorsque l’ordre d’encaissement se réfère aux RUE, celles-ci deviennent un élément constitutif du contrat
passé entre le donneur d’ordre et la banque.
• Les banques remettantes sont responsables de la transmission des instructions de l’exportateur à la
banque chargée de l’encaissement selon les RUE. 6
CHAPITRE 1 : LE CADRAGE JURIDIQUE DE LA REMISE DOCUMENTAIRE

• Suite aux discussions de la Commission bancaire de la CCI en 2022, l'eURC


est en cours d'alignement avec la loi type de la CNUDCI sur les documents
transférables électroniques.

• L'eURC complète les Règles Uniformes pour les Collections afin de


permettre la présentation de documents électroniques seuls ou en
combinaison avec des documents papier.

• Il s’applique lorsque l’instruction d’encaissement le spécifie.

• Actuellement à la version 1.1, l'eURC est en cours d'alignement avec la loi


type de la CNUDCI sur les documents transférables électroniques.
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CHAPITRE 1 : LE CADRAGE JURIDIQUE DE LA REMISE DOCUMENTAIRE

La remise documentaire est une procédure de recouvrement dans laquelle


une banque a reçu mandat d’un exportateur (le vendeur) d’encaisser une
somme due par un acheteur contre remise des documents.

Le vendeur fait établir les documents de transport à l’ordre d’une banque.


Cette banque doit remettre les documents commerciaux et de transport à
l’acheteur, contre paiement ou acceptation d’effets de commerce. La remise
documentaire est soumise à des règles et usances uniformes .

Englobe à la fois :
Vise le traitement par les banques, selon les instructions
« documents financiers » vise des lettres de change, billets à
reçues, de documents, en vue :
ordre, chèques ou autres instruments analogues utilisés pour
• D’obtenir le paiement et/ou l’acceptation,
obtenir le paiement d’une somme d’argent ;
• De remettre les documents contre paiement et/ ou contre
« documents commerciaux » vise des factures, documents de
acceptation,
transport, titres de propriété. Ou autres documents analogues,
• De remettre les documents selon d’autres termes et
ou tout autre document quel qu’il soit qui n’est pas un
conditions.
document financier. 1
CHAPITRE 1 : LE CADRAGE JURIDIQUE DE LA REMISE DOCUMENTAIRE

C’est en effet le vendeur (l’exportateur) qui confie Il s’agit de la banque à laquelle l’exportateur a confié
l’opération à une banque (dans la plupart des cas, il l’opération (généralement, il s’agit de sa propre
s’agit de sa banque). banque). Il peut toutefois s’agit d’une banque située
dans le pays de l’acheteur ou même de la banque de
l’acheteur.

Il s’agit en effet de l’acheteur (l’importateur) qui reçoit Il s’agit de la banque chargée de l’encaissement contre
les documents de la banque présentatrice contre remise des documents à l’acheteur. Généralement c’est
paiement ou acceptation d’effets tirés sur lui. la banque correspondante de la banque du vendeur
dans le pays de l’acheteur.
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LE CADRE
JURIDIQUE
ET LE
DEROULEMENT
DE LA REMISE
DOCUMENTAIRE

LES INSTRUMENTS DE PAIEMENT A L’INTERNATIONAL


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CHAPITRE 2 : LE DÉROULEMENT DE LA REMISE DOCUMENTAIRE

La banque de l’acheteur (banque présentatrice) informe le tiré


La banque présentatrice informe l’acheteur de la
de l’arrivée des documents et ne lui remet que contre
réception des documents et ne lui remet que contre la
paiement immédiat.
mise en place d’un instrument de paiement aux
L’exportateur est payé et bénéficie de la fiabilité du virement.
échéances fixées dans le contrat de vente. Ce peut être
une lettre de change, que, souvent, le vendeur lui
demande d’avaliser.

La mise en place de l’instrument de paiement ne


garantit pas la solvabilité du débiteur à l’échéance. Elle
ne supprime pas le risqued’impayé.ne lettre de change,
que, souvent, le vendeur lui demande d’avaliser

Source : Arzumanyan, Lusine Aymard, Thomas Blesbois, Philippe, Exporter -


Pratique du commerce international Ed. 27, Foucher ,2022, page 318
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CHAPITRE 2 : LE DÉROULEMENT DE LA REMISE DOCUMENTAIRE

• L’exportateur communique ses instructions à la banque remettante via une "lettre d’instructions", incluant
les détails sur les documents requis, le montant de la remise, et les modalités d’encaissement et de
transfert.

• La banque remettante suit scrupuleusement ces instructions, car sa responsabilité peut être engagée en cas
de non-respect.

• L'"avis de sort" informe l’exportateur du paiement ou de l’acceptation de la remise documentaire, ou des


raisons du refus de l’acheteur.

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CHAPITRE 2 : LE DÉROULEMENT DE LA REMISE DOCUMENTAIRE

Schéma du déroulement de la remise documentaire.

• Étape 1: L’expédition de la marchandise vers le pays


de l’acheteur avec des documents d’expédition à
l’ordre de la banque présentatrice.
• Étape 2: Remise des documents à la banque
remettante en France.
• Étape 3: Transmission des documents et de la lettre
d’instruction à la banque présentatrice dans le pays
de l’acheteur.
• Étape 4: Remise des documents à l’acheteur contre
paiement ou acceptation.
• Étape 5 et 6: Transmission du paiement à
l’exportateur et notification par "l’avis de sort".
Source : CCI GROUNOUBLE, LA REMISE DOCUMENTAIRE MAI 2021 12
LA DIGITALISATION
ET LES RISQUES
RELATIFS A LA
REMISE
DOCUMENTAIRE

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LES INSTRUMENTS DE PAIEMENT A L’INTERNATIONAL
CHAPITRE 1 : eURC version 1.1

• ICC Uniform Rules for Collections for Electronic Presentation (eURC) Version 1.1
Réduction
Augmentation en valeur 84% des coûts des échanges pour
14% des flux d’ici 2026 les entreprise
délai des opération de 15 jour a 2
jours

eURC, publiées en avril 2023, par ICC (chambre de commerce international),ont été
conçues pour être compatibles avec les lois types de la CNUDCI, notamment celles
sur le commerce électronique, les signatures électroniques et les documents
transférables électroniques. Des règles qui servent désormais de cadre général
pour les transactions commerciales numériques, assurant ainsi une normalisation,
une cohérence et une conformité au niveau mondial, une compréhension
collective des termes et des définitions, tout en encourageant et en soutenant
l’utilisation des enregistrements/documents/données électroniques

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Source : https://iccwbo.uk/products/g7-creating-moderndigital-trade-ecosystem
CHAPITRE 1 : eURC version 1.1

1. Facture commerciale

2. Connaissement maritime (négociable)

3. Liste de colisage

4. Certificat d’origine

5. Certificat d’inspection

6. Certificat d’assurance

7. Certificat phytosanitaire

8. Documents commerciaux légalisés

9. Effet de commerce (négociable


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Source : ICC France Défis Et Opportunités De La Digitalisation Du Commerce International, Livre Blanc 2022
CHAPITRE 1 : eURC version 1.1

Source : ICC France Défis Et Opportunités De La Digitalisation Du Commerce International, Livre Blanc 2022
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LA DIGITALISATION
ET LES RISQUES
RELATIFS A LA
REMISE
DOCUMENTAIRE

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LES INSTRUMENTS DE PAIEMENT A L’INTERNATIONAL
S W
• L’acheteur ne peut pas retirer la marchandise en douane sans • Banques non engagées : aucune garantie bancaire de paiement
avoir préalablement réglé à sa banque le montant de la ni d’assurance sur la bonne gestion du procédé par la banque
facture due au fournisseur étranger. présentatrice.
• La procédure est plus souple que le crédit documentaire, • Moins sécuriser que le crédit documentaire.
moins formaliste, moins rigoureuse sur le plan des • Délivrance des documents à l’acheteur sans paiement ou sans
documents et des dates. acceptation de traite si l’opération est mal montée
• Le coût bancaire est minime

O T
• Recourir à l'assurance Coface pour le risque politique . • Si le client ne se manifeste pas, la marchandise est immobilisée,
• Digitalisation peut alléger la lourdeur administratif et réduira il faudra la vendre sur place à bas prix ou la rapatrier et donc
les délai. payer à nouveau des frais de transport.
• peut stipuler dans son contrat que le paiement de la traite • L’acheteur peut invoquer de nombreux motifs pour ne pas payer.
devra être garanti par l’aval d’une banque établie dans le pays • Cette pratique favorise la renégociation à la baisse des prix par
étranger considéré l’acheteur (risque de marchandage)
• Le vendeur supporte le risque de non-transfert en cas de
manque de devises dans le pays de l’acheteur 18
CHAPITRE 2 : les risques relatifs à la remise documentaire

Critère
Engagement ferme des banques 0 5
Délai 3 3
Cout de l'opération 5 1
Simplicité de la procédure 4 1
Sécurité 1 4

Modèle de maturité
0:Inexistant
1: Initial
2: Reproductible
3: Défini
4: Maîtrisé
5: Optimisé 19
• La remise documentaire est une méthode bancaire • Il est crucial pour l'exportateur de comprendre que
courante pour le paiement, permettant à l'acheteur l'acheteur peut ne pas lever les documents, et que les
d'obtenir les documents nécessaires à la réception de la banques ne sont pas responsables du paiement, mais
marchandise. seulement de la transmission des documents.

• La transformation numérique a apporté des changements • Ainsi, une fois les documents remis à la banque,
importants à la remise documentaire, introduisant de l'exportateur est assuré d'être payé, que l'importateur lève
nouvelles réglementations telles que l'eURC, développée ou non les documents. En comparaison, dans le crédit
par la Chambre de Commerce Internationale (ICC). documentaire, la banque s'engage à payer dès que les

• Considérée comme l'ancêtre du crédit documentaire, la documents sont jugés crédibles.

remise documentaire a intégré les banques en tant • La remise documentaire est considérée comme moins
qu'acteurs dans la transaction, agissant uniquement en tant sécurisée que le crédit documentaire, et une remise
qu'intermédiaires dans la transmission des documents documentaire contre acceptation doit être accompagnée
moyennant une commission. d'une traite avalisée pour éviter tout problème de
paiement. 20
POUR VOTRE ATTENTION

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