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PLAN DU COURS :
INTRODUCTION GENERALE
ORIENTATIONS BIBLIOGRAPHIQUES
INTRODUCTION GENERALE
Lorsqu’un conflit oppose deux Etats, chacun d’eux est confronté successivement à trois
alternatives : entre son maintien en l’état et la recherche d’un règlement qui y mette fin ;
si ce deuxième terme est retenu, entre la voie concertée et la voie unilatérale de
définition de ses termes ; enfin, s’il choisit cette dernière, entre les moyens comportant
l’emploi de la force et ceux qui en font l’économie.
Usant de cette liberté, les Etats utilisent plus volontiers les procédés politiques que les
procédés juridiques. Ainsi, ils accordent la priorité au règlement non juridictionnel
(diplomatiques), dont les résultats ont une portée peu contraignante, plutôt qu’aux
procédures arbitrales et juridictionnelles. Ils peuvent également combiner les divers
modes de règlement pacifique.
Cette partie s’intéresse aux modes diplomatiques de règlement des conflits (négociation,
bons offices, médiation, conciliation et enquêtes). Ces trois premières procédures sont
qualifiées d’informelles alors que les deux dernières constituent des techniques
formelles. Quelle que soient ces caractéristiques, ces différents modes se fondent sur les
mêmes principes directeurs (Indétermination du cadre légal de règlement, liberté des
parties et de l’organe de règlement).
Il faut d’emblée retenir que les modes diplomatiques de règlement des différends se
prêtent mal à une analyse juridique parce que leurs caractères en font des mécanismes
de transaction qui ne peuvent être appréciés qu’en termes politiques, c’est-à-dire de
stratégies d’utilisation des voies de droit.
Le système des voies diplomatiques reste ainsi radicalement coupé de celui des voies
juridictionnelles même dans le cas où l’échec des premières ouvre conventionnellement
l’accès aux secondes.
L’extrême liberté laissée aux Etats dans la mise au point conventionnelle des formules
de règlement diplomatique de leurs différends rend hasardeuse une énumération qui
prétendrait en épuiser les espèces et enfermer chacune d’elles dans une définition sûre.
Le recensement courant de ces voies diplomatiques fait apparaître par ordre croissant de
formalisation légale et d’éloignement du pur bilatéralisme : la négociation, les bons
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Les parties ont le loisir de dégager, ou laisser l’organe de règlement dégager, toute
solution qui paraît de nature à mettre fin au différend, sans avoir à la justifier par sa
conformité à une règle de droit. Cela signifie, en définitive, que ce mode ne comporte
pas de « bases de règlement » du tout, aucune règle ne venant nécessairement présider à
la détermination la solution d’espèce, qui doit être inspirée des mérites propres à la
cause mais aussi de valeurs qui lui sont par elles-mêmes étrangères. Par là, les modes
diplomatiques se prêtent aussi bien au règlement d’un différend justiciable quand l’une
des parties, sentant sa thèse légale faiblement étayée, refuse de la soumettre à l’épreuve
du règlement juridictionnel, qu’à celui des différends non justiciables qui, par
définition, ne sauraient relever de l’application d’une règle de droit existante. Dans un
cas comme dans l’autre, la partie qui souhaiterait voir le différend soumis à un
traitement juridictionnel propre aux solutions tranchées, et qui sait cette espérance
vaine, a le choix entre sa prolongation indéfinie et le recours à un mode permettant
d’obtenir une solution transactionnelle.
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Lorsqu’elle est le produit d’une négociation directe, le différend est résolu soit par la
conclusion d’un accord selon les techniques conventionnelles, soit par un procédé
informel entérinant l’entente des parties.
Mais, pour certaines d’entre elles, les plus importantes d’un point de vue politique, il y a
lieu de faire jouer un rôle plus direct et plus actif à leurs propres organes. Simples
cadres de négociation multilatérale ou instances de décision, la pratique de ces organes
a pu infléchir les modalités des procédures interétatiques non juridictionnelles : les Etats
en conflit n’ont pas la maîtrise discrétionnaire du déclenchement des procédures de
règlement et, à la limite, ils peuvent se trouver dans la situation inconfortable d’un Etat
qui ne peut récuser la solution préconisée par l’organisation qu’en violant ses
obligations de membre de celle-ci.
La technique la plus ancienne de ces procédés est la négociation. En règle générale, elle
ne met en présence que les Etats directement en litige. Les tiers peuvent cependant y
intervenir, en vue d’en faciliter l’aboutissement : une interférence, dans la mesure où
elle ne diminue pas juridiquement la liberté de décision des parties, ne modifie pas la
nature de cette modalité de règlement.
Elles renferment la négociation comme mode règlement des différends et les bons
offices et la médiation.
font les statuts des O.I. ne constitue qu’une sorte de codification particulièrement
solennelle de cette obligation coutumière.
Cette obligation s’impose d’abord en soi dès que deux sujets du droit international sont
en litige, parce qu’elle constitue le minimum de ce qui est attendu d’eux pour régler
pacifiquement tout différend. A ce titre, la négociation directe entre Etats en conflit
constitue la technique de droit commun : elle trouve à s’appliquer en toutes
circonstances même sans texte.
Très souvent, la négociation n’est qu’un des éléments d’un engagement plus vaste ; elle
intervient alors soit en tant que préalable nécessaire à une procédure complexe (en
amont d’un autre procédé de règlement, par exemple l’arbitrage, soit en vue de faciliter
l’achèvement de la procédure) en aval d’un autre mode, tel que le règlement
juridictionnel. Il est de jurisprudence constante qu’ « avant qu’un différend fasse l’objet
d’un recours en justice, il importe que son objet ait été nettement défini au moyen de
pourparlers diplomatiques » (CPJI, 30 août 1924, Mavrommatis, série A, n° 2, p. 12 ;
CIJ, 26 novembre 1957, Droit de passage en territoire indien – exceptions préliminaires,
Rec. 1957, p. 148-149).
Sur un autre plan, l’obligation de négocier n’est jamais purement formelle, mais sa
portée est susceptible de degrés.
Au niveau minimal, celui d’une obligation « non conditionnée », elle « n’est pas
seulement d’entamer des négociations, mais encore de les poursuivre autant que
possible en vue d’arriver à des accords » (CPJI, 15 octobre 1931, affaire du Trafic
ferroviaire entre la Lituanie et la Pologne, Série A/B, n° 42, p. 116). En cas d’échec, un
tiers est en mesure de vérifier que les parties ont fait preuve de bonne foi nécessaire
pour qu’aucune d’entre elles ne puisse être accusée d’avoir manqué à son obligation.
que : « les parties ont l’obligation de se comporter de telle manière que la négociation
ait un sens, ce qui n’est pas le cas lorsque l’une d’entre elles insiste sur sa propre
position sans envisager aucune modification (il y avait ici tout à la fois une critique de
l’attitude antérieure de certains Etats et une directive pour la négociation) ; les parties
sont tenues d’agir de telle sorte que, dans le cas d’espèce et compte tenu de toutes les
circonstances, des principes équitables soient appliqués … » (CIJ, 20 février 1969,
Plateau continental de la mer du Nord, Rec. 1969, p. 47).
Toutefois, les conservations directes ont d’autant moins de chance d’aboutir que le litige
qui oppose les Etats est aigu ou d’origine récente. Il est courant de faire appel à des
Etats tiers par rapport au litige (ou d’accepter leur intervention) pour débloquer une
situation, éviter une escalade ou donner une meilleure opposabilité internationale à la
solution négociée. Ainsi, la négociation peut se conduire en présence et avec
l’assistance d’un ou plusieurs Etats-tiers. On parle dans ce cas de négociation en
congrès ou en conférence. La formule de la conférence présente des avantages et des
inconvénients. Elle va dans le sens de l’institutionnalisation des procédures de
règlement, surtout si elle bénéficie d’une certaine continuité juridique, ce qui reste
exceptionnel ( la co-présidence anglo-soviétique des conférences de Genève de 1954 et
de 1962 sur l’Indochine et le Laos devait permettre de les « réactiver » en cas de besoin,
mais l’expérience n’est pas très convaincante ; la Conférence sur la sécurité et la
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D’origine coutumière, ces deux techniques ont été codifiées par les conventions de La
Haye du 29 juillet 1899 et du 18 octobre 1907.
On appelle « bons offices » toute interposition d’un tiers dans des relations
interétatiques suffisamment conflictuelles pour rendre impossible entre les parties un
contact direct du fait d’obstacles politiques, parfois doublés de difficultés légales
(rupture des relations diplomatiques, qui peut amener un Etat tiers à accepter de
« représenter » l’un des protagonistes auprès de l’autre, notamment en temps de guerre,
et d’agir comme « puissance protectrice » des intérêts de celui-ci et de ses nationaux).
L’Etat tiers utilise son influence morale ou politique pour établir le contact (ou le
rétablir s’il a été rompu) entre les parties et faciliter l’organisation matérielle de la
négociation. En principe, il ne prend pas une part directe aux conversations, qui restent
l’œuvre exclusive des parties au différend. Sa tâche est terminée dès que les adversaires
acceptent de se rencontrer et entament la négociation. En 1946, les USA ont exercé
leurs bons offices dans le litige frontalier entre la France, agissant pour le compte du
Cambodge alors sous protectorat, et la Thaïlande. Ces bons offices ont contribué à la
signature des accords mettant fin à la guerre d’Indochine (Paris, 1973) ou il en est de
même des bons offices de la France après l’intervention de la Russie en Géorgie
(Ossétie du Sud) en 2008.
La médiation, quant elle, ne se borne pas à cette fonction neutre et comporte une
intervention active du tiers, qui vise à proposer aux parties des « termes de règlement »
(c’est-à-dire une solution au fond) acceptables en fonction des thèses qu’elles ont
développées en sa présence. Elle se distingue des bons offices par des degrés plus que
par nature, et le vocabulaire de la pratique diplomatique est d’autant plus flottant que le
tiers intervient souvent tour à tour à l’un et l’autre titre. Du reste, elle obéit au même
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Ces deux techniques peuvent être individuels ou collectifs, selon qu’ils sont mis en
œuvre par un Etat (ou une organisation internationale) ou par un groupe d’Etats. Ils se
sont imposés dans la pratique parce qu’ils sont très respectueux des souverainetés des
Etats en conflit. L’offre de bons offices ou de médiation peut être refusée par l’un ou
l’autre des Etats en litige. Les Etats en litige sont aussi libres de refuser la base de
négociation ou de solution de fond présentée par le médiateur.
1. La conciliation
Quant à l’autonomie de l’organe par rapport aux paries, elle résulte de cette organisation
même. D’une part les commissions, qui adoptent le plus souvent leurs propositions à la
majorité, sont habituellement composées d’un nombre impair de membres (5 plus
rarement 3), dont un seul est nommé par chacune des parties et peut être vu comme son
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représentant ; le ou les autres, dont le président de l’organe, sont nommés d’un commun
accord et sont neutres à première vue par rapport aux positions des parties. D’autre part
la commission n’a généralement pas pour mission de mener avec les parties une
négociation continue mais, une fois les thèses pesées, de proposer globalement les
termes d’un règlement qui lui paraît pouvoir obtenir leur accord.
La conciliation est une technique relativement récente (début du XXe siècle) dont le
succès doit se mesurer au nombre de ses applications effectives, qui est très faible, du
moins pour les affaires rendues publiques, plus qu’à celui des traités qui s’y réfèrent
(près de 200 entre 1925 et 1940, mais guère depuis). Il faut dire que cette technique
serait un moyen hypocrite pour les Etats d’échapper à des procédures plus
contraignantes. Pour finir, on peut considérer que la consécration du procédé de la
conciliation a été apportée par la convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités.
Son article 66 en fait la procédure de droit commun en ce qui concerne les litiges
relatifs à la nullité, à l’extinction ou à la suspension de l’application des traités.
2. L’enquête internationale
En tant que moyen interétatique de règlement non juridictionnel, l’enquête consiste dans
une recherche portant sur des faits présentés comme à l’origine d’un litige, en vue de
constater leur matérialité, leur nature, les circonstances qui les accompagnent, et dans la
fourniture d’un rapport. Cette tâche est le plus souvent confiée à un organe collégial, dit
commission d’enquête. Comme les modes précédents, l’enquête est une procédure
facultative, à la fois dans son déclenchement et dans sa portée.
Une commission d’enquête est constituée en vertu d’un accord spécial entre les parties
en litige, qui précisera la mission qui lui est confiée : il indique les faits à examiner, les
modalités de composition et le délai de constitution, l’étendue des pouvoirs de la
commission.
Ces caractéristiques font que l’enquête ne se suffit pas à elle-même comme moyen de
règlement. Elle est complémentaire des procédés de la négociation ou du règlement
juridictionnel ou arbitral.
Dans cette section s’agit d’examiner d’abord les fondements de l’implication des
organisations internationales en matière de règlement des conflits avant d’analyser le
règlement des différends à travers les Organisations internationales (O.I.) universelles à
compétences, puis celles régionales à compétence politique, enfin les Organisations
internationales à compétence technique.
A. Considérations générales
Lorsqu’ils ont institué les premières O.I. politiques, les Etats leur ont assigné comme
finalité principale le maintien de la paix, en particulier par l’apaisement et la prévention
des tensions internationales. Par leur existence même, les O.I. devaient constituer des
moyens de règlement pacifique des différends. La tendance la plus naturelle a consisté à
transposer dans leur cadre les modes de règlement déjà acceptés et mis en œuvre dans
les rapports interétatiques. Cependant, les particularités du fonctionnement des O.I.
(permanence des organes, processus de décision majoritaires) ont infléchi la portée des
procédures interétatiques : le principe du consentement préalable des parties en litige,
garantie fondamentale des souverainetés étatiques. Le frein que ce principe pouvait
constituer pour la mise en place des organes préconstitués a été remplacé par une
manipulation des procédures internes des organisations pour créer, si nécessaire des
organes ad hoc.
C’est la nature des procédures classiques qui a été modifiée lorsqu’il a été reconnu à
certaines organisations, en particulier à l’O.N.U., des pouvoirs de décision en vue du
maintien de la paix. Certes, il n’a pas toujours été possible de mettre en œuvre les
dispositions les plus énergiques et contraintes du Chapitre VII de la Charte. En
revanche, la pratique des Nations-Unies s’est orientée vers un retour, par des pressions
pacifiques, des Etats perturbateurs de l’ordre international. A cette fin, tous les moyens
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et toutes les compétences prévus aux Chapitres V, VI et VII (autres que l’emploi de la
coercition armée) ont été employés, faisant de l’ensemble de ces dispositions un tout
indissociable.
Aujourd’hui, l’intervention des O.I. a une portée que l’on imaginait difficilement au
début du XXe siècle. Plusieurs facteurs expliquent ce constat, d’abord les facilités
qu’offre leur cadre à des négociations permanentes (pour prévenir les conflits d’intérêts
et pour les apaiser) et enfin en raison de l’avantage que leur procurent tantôt leur
relative neutralité dans les compétitions entre Etats, tantôt leur position d’arbitre.
Il en est autrement en ce qui concerne, les O.I. à compétence techniques qui jouent un
rôle plus important dans le règlement pacifique des différends. Ici, c’est
l’interdépendance des intérêts des Etats membres qui est la principale justification du
développement des procédures de règlement internes à ces organisations ; leur intérêt à
long terme, la réciprocité généralisée des avantages mutuels les incitent à privilégier des
techniques multilatérales (O.M.C., O.I.M., O.A.C.I.).
Pour rappel, l’O.NU. ne constitue pas la seule O.I. universelles à compétences générales
que les Etats ont créé. La SdN fut la première. Mais, ici, nous avons opté d’aborder
uniquement les mécanismes de règlement des différends mis sur pied dans le cadre de
l’O.N.U. ; autrement dit, ceux institués à l’entre-deux-guerres ne seront pas revisités du
fait de la faillite de la SdN à prévenir la deuxième guerre mondiale.
En revanche, c’est le seul souci de l’efficacité qui explique que des compétences
particulières, ignorées du Pacte de la SdN, aient été conférées par la Charte de San
Francisco au Secrétaire général des Nations-Unies, organe individuel et indépendant des
Gouvernements. De manière générale, le blocage fréquent des organes délibérants a
accentué la portée de cette attribution de compétences.
Au point de vue matériel, la même question se pose en 1945 qu’en 1919 : tous les
conflits sont-ils susceptibles d’être portés devant les organes internationaux en vue de
leur règlement pacifique ? Dans l’ensemble, la Charte confirme les solutions du Pacte
de la SdN. En principe, sont de la compétence de l’O.N.U. seulement les différends
graves, c’est-à-dire ceux « dont la prolongation est susceptible de menacer le maintien
de la paix et de la sécurité internationale » (art. 33 de la Charte). Cette condition n’est
pas entendue strictement. S’il est sage de ne pas encombrer l’ordre du jour des organes
principaux de conflits mineurs, sans incidence directe sur les Etats tiers, il serait tout
aussi inopportun de limiter les occasions qui s’offrent à l’Organisation d’exercer sa
mission d’apaisement des différends internationaux ou de saisir le prétexte d’incidents
mineurs pour appeler les Etats au respect de certains principes fondamentaux (voir, par
exemple, l’examen par le Conseil de sécurité de l’affaire Eichmann entre l’Argentine et
Israël en 1961). Une autre condition de recevabilité est le caractère international du
différend, ce qui signifie qu’il ne doit pas porter sur une question qui relève de la
« compétence exclusive » de chaque Etat. Enfin, le différend susceptible d’être porté
devant l’O.N.U. n’oppose pas nécessairement des Etats membres.
1. Le Conseil de sécurité
Bien que ce texte cible le maintien de la paix et non le règlement des différends, on peut
considérer, on considérer, au vu de la pratique, que ces deux missions sont trop
interdépendantes pour ne pas autoriser une interprétation large du champ d’application
de l’article 24.
- tout Etat membre, partie ou non à un différend, impliqué ou non dans une
situation.
- Un Etat non membre, mais dans des conditions strictes : il doit s’agir un
différend, l’Etat doit être partie à ce différend et il doit accepter préalablement
les obligations de règlement pacifique.
Une fois saisi, le Conseil de sécurité reste libre d’accepter ou de refuser l’examen du
différend ou de la situation. Un premier débat aura lieu sur l’inscription de la question à
l’ordre du jour, ce qui implique seulement que le Conseil accepte d’ouvrir une
discussion. L’ouverture de la discussion ne préjuge ni la recevabilité de l’initiative, ni a
fortiori une solution au fond. Pourtant les Etats n’hésitent pas à argumenter contre
l’inscription d’une affaire à l’ordre du jour. C’est que ce premier pas peut avoir un
certain retentissement politique. Désormais, l’affaire sera soustraite au secret des
négociations diplomatiques et fera l’objet de débats publics. Toutefois, surtout depuis le
début des années 1990, il est d’usage courant que ceux-ci soient préparés par des
concertations poussées entre les cinq membres permanents.
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Une fois cette étape franchie, le Conseil peut faire appel à l’ensemble des moyens non
juridictionnels de règlement pacifique des différends offerts par le droit international
général. En principe, il procède par voie de recommandations, mais il semble désormais
acquis qu’il est en droit d’imposer aux parties le recours à un mode de règlement par
une décision : dans l’avis consultatif du 21 juin 1971, la CIJ a considéré que le libellé de
l’article 25 de la Charte n’interdisait pas de reconnaître valeur décisoire à des
résolutions du Conseil de sécurité qui ne s’inscrivaient pas dans le cadre du chapitre VII
de la Charte (affaire de la Namibie, Rec., p.53).
Quand il examine une affaire, le Conseil est d’abord en droit d’ouvrir et de faire
procéder sous son autorité à une enquête.
Lorsqu’il est saisi en vertu des articles 37 et 38, le Conseil peut recommander les termes
d’un règlement. Ce faisant, il exerce la fonction de médiateur ou de conciliateur. En
règle générale, il n’agit pas par lui-même, car sa structure ne s’y prête pas, mais par
l’intermédiaire d’une commission intergouvernementale ou de personnalités dont il
avalise les résultats.
2. L’Assemblée générale
Comme organe plénier, l’Assemblée est davantage un forum, une tribune politique,
qu’une instance de règlement. On aurait pu craindre qu’elle ne présente pas la neutralité
nécessaire à l’exercice d’une fonction de règlement pacifique. Mais le reproche pourrait
être adressé à tous les organes politiques et n’est pas pertinent lorsqu’il s’agit d’éviter
qu’un différend ne devienne une menace pour la paix. Son intervention a été jugée utile
parce qu’elle garantit une égalité entre Etats que n’assure pas la procédure de vote au
Conseil de sécurité, et parce qu’elle peut prendre position à la majorité.
L’article 10 de la Charte lui attribue une compétence tout à fait générale : « l’Assemblée
générale peut discuter toutes questions ou affaires rentrant dans le cadre de la présente
Charte ou se rapportant aux pouvoirs et fonctions de l’un quelconque des organes
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prévus par la présente Charte... » et « formuler sur ces questions ou affaires des
recommandations aux membres de l’Organisation des Nations Unies, au Conseil de
sécurité, ou aux membres de l’Organisation et au Conseil de sécurité ».
général peut déclencher l’intervention du Conseil dans les cas où aucun Etat ne prend
l’initiative de le saisir. L’article 99 a pour but de remédier à cette carence.
Le Secrétaire général exerce parfois ses fonctions diplomatiques non pas de son propre
chef, mais sur la base d’un mandat qui lui est confié par l’Assemblée ou le Conseil de
sécurité, hypothèse prévue par l’article 98 de la Charte.
Le système de règlement des différends propre à chaque organisation est plus ou moins
complet. Sa structure n’est pas, pour l’essentiel, très différente de celle que connaît
l’ONU : les Etats membres sont invités à recourir aux procédés classiques de règlement
pacifique ; les organes de l’organisation sont, de leur côté, habilités à mettre directement
en action les mêmes procédés.
Il s’agit par exemple l’Organisation des Etats américains (O.E.A.) ou l’Union africaine
(U.A.) ou encore l’Organisation sur la sécurité et la coopération en Europe (O.S.C.E.).
S’agissant de l’O.E.A., les Etats latino-américains n’ont pas trouvé jusqu’ici une
solution de principe stable en matière de règlement des différends. Ils sont en particulier
divisés sur la priorité à reconnaître à des procédures internationalisées susceptibles de
déroger à un strict consensualisme. Les trois grandes étapes normatives postérieures au
second conflit mondial traduisent cette hésitation et le malaise face à l’inefficacité de
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trop nombreux instruments de prévention des différends. Le premier système était fondé
sur la concurrence de la Charte de l’O.E.A. et du Traité interaméricain d’assistance
mutuelle (Pacte de Bogota de 1948). Le Conseil de l’O.E.A. était assisté d’une
Commission interaméricaine de la paix, autorisée à présenter ses bons offices et à
désigner des commissions d’enquête. Un nouveau système a été établi par le Protocole
de Buenos-Aires du 27 février 1967. Les deux organes essentiels sont le Conseil
permanent de l’O.E.A. et son organe subsidiaire, la Commission interaméricaine de
règlement pacifique des différends. Soucieux de redonner à l’O.E.A. un certain
dynamisme politique et juridique, ses membres ont amendé le système précédent par le
protocole de Carthagène (1985). Ce dernier consacre le droit pour une partie à un
différend de saisir unilatéralement le Conseil permanent (art. 84) et, supprimant la
Commission interaméricaine pour retrouver l’esprit du mécanisme de 1948, autorise le
Conseil à créer des commissions ad hoc, avec l’accord des parties.
Enfin, s’agissant de l’O.S.C.E., bien qu’elle ne soit pas une organisation internationale
au sens habituel, elle joue un rôle croissant dans le règlement des différends en Europe.
Deux mécanismes formels de « conciliation obligatoire » y ont été mis sur pieds après
l’écroulement du communisme en Europe de l’Est. Institué en 1991, le « mécanisme de
la Valette » repose sur un « Organisme », à la nature juridique incertaine. Le mécanisme
connaît tant de limitations et d’exceptions que, malgré les perfectionnements de détail
qui lui ont été apportés par le Conseil de la C.S.C.E. réuni à Stockholm le 15 décembre
1192, il semble en pratique à peu près inutilisable. C’est pourquoi la Convention de
conciliation et d’arbitrage au sein de la C.S.C.E., conclue le même jour, a institué un
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système de règlement des différends plus classique même si elle est demeurée lettre
morte jusqu’à présent.
Le règlement juridictionnel s’opère sur la base du droit applicable entre les parties. Sous
ce registre, il est moins une technique de règlement des différends que de réalisation du
droit. Le recours au règlement juridictionnel n’est donc concevable que lorsque le
différend est tenu par les parties pour justiciable, c’est-à-dire pour propre à être tranché
par application des règles de droit pertinentes. Mais, même en cas de réponse
affirmative, un Etat n’y recourt que si sa position juridique paraît supérieure à celle de
son adversaire ou si, dans l’hypothèse contraire, il accorde plus de prix au règlement du
différend qui les oppose qu’à la poursuite de son intérêt. De même, il ne s’engage à
l’avance à recourir au règlement juridictionnel que si, statistiquement, il croit avoir plus
souvent une position juridique gagnante et attend donc plus de profits que de pertes
dans la création d’un lieu juridictionnel entre lui et ses adversaires potentiels.
D’abord, l’acte des parties qui attribue à l’organe de règlement le pouvoir juridictionnel
ne l’obligent pas nécessairement à motiver sa décision. Nombre de sentences surtout
anciennes, se présentent principalement comme un dispositif revêtu d’autorité légale, et
leur lecture ne permet pas de discerner le cheminement qui y a mené les arbitres.
Ensuite le tribunal fait quelque fois entrer dans son raisonnement des considérations
qu’on rattacherait difficilement à une règle de droit identifiable (inconstance des règles
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applicables, injustice dans l’application rigoureuse des règles, division des membres du
tribunal qui les poussent à opérer un regroupement syncrétique entre argumentations
partiellement incompatibles, décisions sans base juridique). De telles pratiques peuvent
contribuer heureusement à la solution des différends entre Etats, mais aux dépens d’une
prévisibilité minimum des solutions juridictionnelles. Il est sans doute préférable que les
Etats qui souhaitent voir leurs litiges réglés par une solution transactionnelle s’engagent
à l’avance à tenir pour obligatoire la décision d’un organe clairement présenté comme
chargé d’un règlement diplomatique.
Enfin et surtout, les parties en litige peuvent, si le statut du tribunal ne s’y oppose pas,
l’inviter à mettre les bases légales à l’écart ou au moins à ne pas leur accorder une
considération exclusive. Ainsi le statut de la C.I.J., après avoir énoncé en termes
purement juridictionnels le contenu de sa mission : « régler conformément au droit
international les différends qui lui sont soumis » et présenté à l’appui le célèbre
catalogue des éléments de droits mis à sa disposition (Article 38, paragraphe 1) ajoute
aussitôt que la cour a la faculté, « si les parties en sont d’accord, de statuer ex aequo et
bono » (Art. 38 paragr. 2). Encore faut-il s’entendre sur cette ouverture, et distinguer
deux façons qu’ont les tribunaux de faire à l’équité sa place. Tantôt, mais c’est
infiniment rare, les parties les invitent dans les termes soit à écarter les bases légales en
tant que de besoin ou à n’en tenir compte dans la limite de la justice. Tantôt la teneur
même de la règle de droit implique la prise en considération de l’équité.
Un acte n’est juridictionnel que s’il est revêtu de l’autorité de chose jugée ou arbitrée,
c’est-à-dire si sa teneur a force de vérité légale entre les parties. Deux précisions
s’imposent à ce sujet.
D’abord il est possible qu’un organe chargé de fonctions juridictionnelles se voit prié,
parce que son statut le prévoit ou du moins ne l’interdit pas, de donner un avis de droit
(C.I.J. en vertu des articles 96 de la charte et 65 de son statut). L’avis consultatif auquel
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elle aboutit n’a pas moins de puissance de conviction et de poids politique que les arrêts
qu’elle rend dans le cadre du contentieux interétatique.
Ensuite la force légale de l’énoncé juridictionnel est une vertu intrinsèque de la sentence
qu’elle tire de sa nature même et non d’actes juridiques extérieurs (cf. Effets de
jugements du TANU accordant indemnité, C.I.J., avis consultatif du 13 juillet 1954,
Rec., 1954, 47 : « L’Assemblée générale des (Nations-Unies) n’a pas le droit (...) de
refuser d’exécuter un jugement du TANU (...) car « un jugement rendu par un pareil
corps judiciaire est chose jugée et a force obligatoire entre les parties au différend ».
La sentence est opposable aux parties parce que, seules ou avec d’autres, elles ont
donné au tribunal le pouvoir de statuer en tant que tel par l’acte même qui l’a institué, et
cette opposabilité ne dépend d’aucun acte supplémentaire. La sentence n’est donc pas
soumise à une ratification ou à une autre forme d’acceptation par les parties, elle
s’impose par elle-même en tant qu’acte qui lui donne pouvoir de connaître du litige.
Elle ne peut être remise en cause que par une contestation de sa validité, c’est-à-dire par
une assertion de nullité pour défaut de conformité avec l’un ou l’autre.
Ce chapitre aborde le règlement des conflits par des juridictions non permanentes
(Règlement arbitral), d’une part, le règlement par une juridiction permanente (CIJ par
exemple), d’autre part.
Plus respectueux de la souveraineté des Etats que le règlement juridictionnel (par une
juridiction permanente), l’arbitrage l’a précédé dans l’histoire des R.I.
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Dans les cités grecques antiques, il était déjà utilisé pour résoudre certains conflits de
nature religieuse. Il a également traversé le Moyen Age marqué par les différends entre
le Saint Empire et les royautés princières.
Les problèmes multiples et complexes nés de l’indépendance américaine ont poussé les
Etats-unis (treize colonies indépendantes avant 1794) et le Royaume-Uni à conclure un
traité (Traité Jay) pour soumettre leurs contestations à l’arbitrage de commissions
mixtes auxquelles fut accordée compétence pour adopter des décisions obligatoires
(arbitrage diplomatique). Celui-ci consistait à s’appuyer soit sur un homme politique, le
plus souvent un chef d’Etat, donc un pair et non un juge professionnel, soit sur un
organe diplomatique mixte. La décision arbitrale, ainsi, rendue était une transaction, un
compromis plus ou moins équilibré entre les prétentions opposées, non un jugement en
droit.
En vérité, l’arbitrage au sens strict, est une création postérieure à la guerre de Sécession
(1861-1865), à l’occasion de l’affaire de l’Alabama jugée en 1872. Après cette affaire,
on assiste un processus de perfectionnement de cette technique. La première étape
importance est constituée par la Conférence de La Haye de 1899 qui a aboutit à
l’adoption d’une convention pour le règlement pacifique des conflits internationaux
(Titre IV consacré à l’arbitrage). D’autres progrès ont été enregistrés lors de la seconde
Conférence de la Paix (La Haye, 1907), l’adoption par l’Assemblée de la SdN le 26
septembre 1928 de l’Acte général d’arbitrage, révisé en 1949 par l’Assemblée générale
de l’ONU. Cependant, les progrès notoires ont eu lieu au plan régional (Convention
européenne de 1957 et Cour de conciliation et d’arbitrage au sein de l’OSCE).
B- Le recours à l’arbitrage
La souveraineté implique le droit de refuser d’être attrait devant un tiers ; elle implique
autant le droit de faire exception à ce refus par un engagement conventionnel. Sous ce
rapport, l’arbitrage peut être facultatif comme il peut être obligatoire.
Il est facultatif s’il est le fruit d’un compromis exprimé par voie de traité. Dans ce cas
de figure, les parties fixent librement le contenu du compromis (les règles des
conventions multilatérales sur le règlement pacifique des différends n’ont qu’un
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caractère supplétif. La volonté des Etats s’impose à l’organe arbitral qu’ils mettent en
place.
L’engagement d’arbitrage peut être contraignant suivant la CIJ dans son avis consultatif
du 26 avril 1988. Toutefois, même s’il est, il reste souvent nécessaire de conclure un
compromis pour préciser la procédure et l’objet de la demande.
C’est à travers un accord que les parties en conflit constituent l’organe chargé du
règlement. Le caractère occasionnel de cet organe demeure le principe, en dépit de
certaines tentatives d’institutionnalisation. On peut distinguer :
- L’arbitrage par commission mixte (Traité Jay) revêt une forme paritaire et ne
comprend que des membres désignés par les parmi leurs ressortissants. Intervient en cas
de désaccord un surarbitre pour les départager. Ce surarbitre est ressortissant d’un Etat
tiers. Il peut jouer un rôle plus actif si les parties le désirent ainsi. Des fois, tous les
membres « nationaux » ne sont pas des ressortissants des parties au différend.
œuvre de la sentence repose, donc, sur la bonne foi des Etats. Les voies de recours
contre une sentence arbitrale se heurtent à des obstacles tenant à la non-permanence de
l’organe arbitral. Enfin, il existe deux causes de nullité d’une sentence : la nullité du
compromis arbitral et l’excès de pouvoir de l’arbitre.
En ce qui concerne, cette première fonction, elle est déterminée par le Chapitre II de son
Statut. Elle ne peut être saisie que par les Etats. Cependant, le consentement des Etats
parties en litige est nécessaire. L’expression de ce consentement doit être claire. Elle est
généralement saisie par voie de compromis, document où s’exprime le consentement
des parties. Celui-ci doit définir l’objet du différend et les questions posées aux juges.
D’un autre côté, la juridiction de la Cour est « obligatoire » quand les parties en ont
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décidé ainsi dans une convention ou la faveur d’une rencontre de deux consentements
unilatéraux.
L’arrêt de la Cour est adopté à la majorité des juges présents ; en cas de partage égal des
voix, celle du Président est prépondérante. Il est obligatoire et définitif et jouit de
l’autorité relative de la chose jugée : il n’oblige que les parties au litige et pour le seul
cas tranché (art. 59 du Statut). Enfin, il y a une possibilité d’une exécution forcée de
l’arrêt. Compte tenu des compétences et responsabilités du Conseil de sécurité, les voix
exécutoires pourraient aller jusqu’à des mesures de contrainte obligatoire pour
l’ensemble des membres de l’ONU. Théoriquement efficace, le système de l’article 94
de la Charte est resté purement théorique jusqu’ici (à l’exception de l’affaire du Détroit
de Corfou).
Comme sa devancière (art. 14 du Pacte de la SdN), la CIJ est investie d’une fonction
consultative dont elle s’acquitte en adoptant des avis consultatifs. Les bases et
conditions d’exercice de cette fonction sont établies par l’article 96 de la Charte des
Nations Unies et par le Chapitre IV du Statut de la Cour. A l’inverse de la fonction
contentieuse, la procédure consultative n’est pas ouverte aux Etats ; seules les
organisations internationales y ont accès.
L’avis consultatif n’est pas un acte juridictionnel, il ne possède pas la force obligatoire
de l’arrêt. Il s’analyse non comme une décision, mais comme une opinion de la Cour,
destinée à éclairer l’organe qui la consulte.
-La Cour de Justice des Communautés européennes (CJCE) a une compétence très large
définie par l’article 164 du Traité instituant la CE. Cette cour « assure le respect du droit
dans l’interprétation et l’application du traité ». A la différence des autres juridictions,
la CJCE connaît d’un contentieux diversifié : (1) un contentieux de l’interprétation des
traités et des actes communautaires mais aussi aux conventions internationales
auxquelles les Communautés européennes sont parties ; (2) un contentieux de
l’annulation et de l’ « appréciation de validité » des actes communautaires ; (3) un
contentieux de la responsabilité extra-contractuelle ; (4) un contentieux de la répression.
- Tribunal administratif des Nations Unies (TANU). Le TANU a été établi en vertu
d’une résolution du 24 novembre 1949 par l’Assemblée générale de l’ONU. Cette
résolution s’appuie sur les articles 101 et 22 de la Charte des Nations Unies. La
compétence de ce tribunal s’étend aux requêtes dirigées par les fonctionnaires et agents
de l’ONU contre les décisions du SG les concernant.