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Lecture Linéaire 5, Postambule
Lecture Linéaire 5, Postambule
Situation de l’extrait :
Un postambule est un texte situé à la fin d’un texte principal. Le terme est formé sur la racine ambulare qui signifie «
aller, cheminer » et le préfixe « post- », signifiant « après ».
Le début du préambule essayait de convaincre les hommes du bien-fondé de la démarche d’Olympe de Gouges. Ce
postambule, qui utilise les mêmes procédés oratoires que le préambule, s’adresse au contraire aux femmes, qui ont,
elles aussi besoin d’être convaincues.
Les articles, repris de la Déclaration de 1789 dans laquelle Olympe de Gouges fait œuvre polémique en introduisant
ses propres analyses sur les droits à accorder aux femmes, sont précédés d’un « Préambule » où elle a violemment
interpellé ses adversaires : « Homme, es-tu capable d’être juste ? ». Dans le « Postambule », c’est aux femmes qu’elle
adresse un vibrant appel.
Mouvements du texte :
1. L’appel violent d’une prise de conscience, du début du texte à « quand cesserez-vous d’être aveugles ? » (l1-
8)
2. Le constat d’une inégalité marquée « Quels sont les avantages [...] entre vous et nous ? » (l8-13)
3. L’exhortation à la liberté, les femmes en action , de la ligne 13 « Tout » à la fin du texte
L’appel violent d’une prise de conscience, du début du texte à « quand cesserez-vous d’être
aveugles ? » (l1-8)
« Femme, réveille-toi ! » + Impératif à valeur d’ordre + Olympe de Gouges se positionne
“reconnais” tutoiement comme la voix de la raison et
cherche à provoquer une réaction
chez ses interlocutrices, c’est-à-dire
l’ensemble des femmes. Olympe de
Gouges ne peut qu’appeler les
femmes à reprendre la lutte. Le ton
de ce postambule est, en effet,
injonctif, déjà à travers
l’interpellation initiale de la
destinatrice, d’abord au singulier et
familièrement avec le tutoiement.
Le verbe “réveille” induit que la
femme a été endormie trop
longtemps par les carcans qui lui ont
été imposés. De même, elle s’est
elle-même endormie car ODG a
besoin de convaincre les femmes
elles-mêmes de sortir de leur
obscurantisme (réveil = Lumières/
sommeil = Noir).
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réagissent.
« L’homme esclave a multiplié ses Périphrase + Métaphore Dans les premiers temps de la
forces, a eu besoin de recourir aux Révolution, les femmes ont aidé à
tiennes pour briser ses fers » l.5-6 mettre en place ces principes –
liberté, égalité, fraternité mais dès
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l’instant où l’homme s’est emparé
du pouvoir, il a relégué la femme au
rang inférieur. Cela montre toute
l’hypocrisie de l’Homme car il n’a pu
être libre que grâce à l’intervention
féminine. Cela montre sa force ainsi
que la Liberté n’est atteignable que
par la complémentarité des sexes.
« Ô femmes ! femmes, quand Interjection lyrique + Question L’interjection traduit le ton lyrique
cesserez-vous d’être aveugles ? » l.6 rhétorique d’ODG qui se désole de cette
situation. L'interrogation finale est
marquée par la tonalité polémique.
Olympe de Gouges sous-entend en
effet que les femmes sont en partie
responsables de leur sort, et les
incite à plus de clairvoyance. Les
femmes sont « aveugles »
puisqu'elles laissent les hommes les
asservir et n'agissent pas pour
mettre fin à cette situation. Leur
passivité est implicitement
soulignée.
Stratégie argumentative
persuader car la question
rhétorique amène la lectrice
à faire un retour sur elle-
même afin qu’elle réagisse
face à cette situation
impossible. Elle les pique
également encore une fois
dans leur orgueil en les
traitant « d’aveugle ».
Le constat d’une inégalité marquée « Quels sont les avantages [...] entre vous et nous ? » (l8-
13)
« Quels sont les avantages que vous Question rhétorique Dans la réponse à cette question,
avez recueillis dans la Révolution ? » Olympe de Gouges fait le constat de
l.8 l'échec de la Révolution française en
ce qui concerne les droits des
femmes ; le changement de régime
leur a même fait perdre le peu
d'influence qu'elles avaient. Elles
poussent les femmes à voir
concrètement leur situation.
Question rhétorique
amenant un raisonnement
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par analogie où les femmes
peuvent comparer leur
acquis sociaux à ceux des
hommes. »
« mépris » l.6, « corruption » l.7, Champs lexicaux de la bassesse et Ce procédé fait pleinement ressortir
« détruit » l.8, « injustices » l.8 de l’oppression le fait que les femmes n’ont gagné,
par la révolution, qu’une égalité
trop théorique, qui ne s’inscrit pas
dans les faits.
« Un mépris plus marqué, un dédain Parallélisme/phrase nominale L'injustice des hommes s'impose
plus signalé » l.9-10 hyperbolique dès lors puisqu’ils refusent aux
femmes les droits qu’il a demandés
pour lui-même. La femme est
encore plus rabaissée qu’avant alors
qu’elle est allée combattre comme
eux.
« qu’auriez-vous à redouter ? » l.9, Questions rhétoriques Cette lutte n’est pas présentée
« Craignez-vous… » l.15 comme facile, et Olympe de Gouges
envisage qu’elle puisse effrayer les
femmes, en prévoyant leurs
objections. En cela, elle est toujours
dans la persuasion car elle s’adapte
à son auditoire en se mettant à sa
place. Cela montre clairement
qu’elle connaît parfaitement les
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rouages de ce conditionnement
féminin.
« le bon mot du Législateur des Périphrase Aux yeux des hommes la femme
noces de Cana » l.15 n’est que faiblesse, par « nature »
d’abord : « femmes, qu’y a-t-il de
commun entre vous et nous ? »,
voilà la question qui fonde son
infériorité. Les « décrets de la
nature » seraient donc la loi
absolue, justifiant que « la force leur
[ait] ravi » toute forme de pouvoir
social.
Stratégie argumentative
convaincre (en se projetant
de manière certaine, elle
convainc les femmes de lui
faire confiance et de se
révolter, elles ne peuvent
que réussir).
« faiblesse » l.13, « vaines Champ lexical de l’impuissance Dans ces lignes, les femmes sont
prétentions de supériorité » l.15, (hommes) ≠ force (femmes) désignées comme des combattantes
« serviles adorateurs rampant » l.16 face aux ennemis que sont les
≠ « la force » l.14, hommes. On observe deux champs
« courageusement » l.14, lexicaux qui s'opposent celui de
« étendards » l.15, « énergie » l.16, l'impuissance chez les hommes, et
« trésors » l.17, « barrières » l.18 la force inverse chez les femmes. Ce
lexique de la guerre rappelle la
tonalité épique, propre à exalter les
prouesses de héros.
« opposez courageusement » l.14 Impératif d’ordre + adverbe de L'auteure insiste aussi sur le courage
manière et la force de ses concitoyennes et
les assure qu'elles sont capables,
grâce à leur obstination, de faire
entendre raison aux hommes.
L’objectif est de leur faire prendre
confiance et croire en elle afin
qu’elle se constitue en tant
qu’armée des droits de la Femme.
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« vaines prétentions de femmes à défendre leurs droits en
supériorité » l.15 faisant appel à la raison, en les
invitant à argumenter avec rigueur
sur la nécessité de l'égalité des
sexes et en montrant le caractère
objectivement injuste ou méprisant
de l'attitude des hommes.
« étendards de la philosophie » l.15 Allégorie Pour mener cette guerre, une arme
s’impose en cette fin de « siècle des
Lumières », : la raison, principe qui a
guidé toute la réflexion des
philosophes de cette époque. Ainsi
le signe de ralliement de ces
femmes-soldats sera bien « les
étendards de la philosophie ». La
raison doit donc à la fois guider la
lutte, et soutenir la réflexion pour
que les femmes sortent de leur
passivité, de leur acceptation
résignée.
« vous n’avez qu’à le vouloir » l.19 Négation restrictive Elle est certaine de la victoire des
femmes si ces dernières font preuve
de courage et de raison. Cette
même certitude est répétée au
moyen d’une négation restrictive,
qui semble rendre la lutte plus facile
: « Quelles que soient les barrières
que l’on vous oppose, vous n’avez
qu’à la vouloir ».
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Conclusion :
Olympe de Gouges cherche à provoquer une véritable prise de conscience, un électrochoc qui forcerait les femmes à
s’engager dans une réflexion sur leur position, leur statut et leur condition.
Cet extrait développe un triple blâme :
● D’abord, il vise les pouvoirs de l’Ancien Régime, notamment la religion, qui se sont employés à maintenir les
femmes dans la soumission.
● Puis, les révolutionnaires sont accusés d’avoir trahi les idéaux mêmes pour lesquels ils se sont battus.
● Enfin, les femmes elles-mêmes n’échappent pas à la critique, coupables de s’être laissé enfermer dans leur
image d’infériorité, d’en avoir joué sous l’ancien régime, et d’avoir peur aujourd’hui de revendiquer des
droits pourtant légitimes.
Ce texte offre aussi un parfait exemple de l’art d’argumenter. Il associe en effet le fait de convaincre et celui de
persuader. D’un côté, Olympe de Gouges construit un raisonnement solide, faisant appel à la « raison », terme-clé
de ce siècle des Lumières. Parallèlement, elle élabore un texte injonctif, fortement modalisé par tous les procédés
d’écriture propre à inciter les femmes à ne plus accepter le sort que les hommes continuent à vouloir leur réserver.
Rappelons que les choix politiques de cette femme, engagée, l’ont conduite à mourir sur la guillotine…
On peut mettre ce texte en relation avec le traité de Choderlos de Laclos s’intitulant De l’éducation des femmes où il
compare la condition féminine à de l’esclavage. Il exhorte les femmes à procéder à leur propre révolution car sans
leur investissement personnel, les hommes décideront toujours de leur sort à leurs dépens. Tout comme ODG, il
lance un appel criant aux femmes afin qu’elles réagissent et se sortent de leur condition inacceptable.