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ICTERES: MECANISMES

et SEMIOLOGIE
Dr Gnagna Diouf
Hépatogastroentérologue
gnagnad@gmail.com
Objectifs :

• Définir un ictère
• Décrire un gros foie de cholestase
• Décrire une grosse vésicule biliaire
• Expliquer le test de Koller
• Décliner la loi de Courvoisier et Terrier
• Citer 5 causes d’ictère cholestatique extra-hépatiques
• Citer 5 causes d’ictères cholestatiques intra-hépatiques
• Citer 5 causes d’ictère hémolytiques
PLAN

I Définition
II Mécanismes
III Examen du patient ictérique
III-1 Examen clinique
III-2 Examens paracliniques
IV Diagnostic différentiel
V Etiologies
V-1 Ictères cholestatiques
V-1-1 Cholestases extra-hépatiques
V-1-2 Cholestases intra-hépatiques
V-2 Ictères cytolytiques
V-3 Ictères hémolytiques
V-4 Ictères à bilirubine libre, non hémolytiques
I) Définition
• L’ictère est une coloration jaune des téguments et des muqueuses par
élévation de la concentration plasmatique de bilirubine.

• La bilirubinémie normale est inférieure à 10 mg/L (17 umol/l)

• Il peut être frustre (sub-ictère bilirubine entre 30 et 50 ug/l)) ou franc


(bilirubinémie > 50 ug/L).
II)Mécanismes:
• Bilirubine formée à partir de l’hémoglobine libérée lors de l’hémolyse

• la bilirubine indirecte est libérée dans le sang par les macrophages qui détruisent les
hématies et elle n’est pas soluble dans l’eau (elle ne peut donc pas franchir la barrière
glomérulaire normale et ne peut pas être éliminée par le rein).

• bilirubine indirecte est transportée par l’albumine dans le sang jusqu’au foie où elle
subit une glucuro-conjugaison donnant la bilirubine conjuguée ou directe, soluble
dans l’eau et empruntant les voies biliaires avec les acides biliaires

• la bilirubine conjuguée est éliminée dans les selles (responsable de la couleur marron
normale des selles).
A l’état pathologique,
• un obstacle sur les voies biliaires ou une anomalie de l’excrétion de la bile
(obstacle intra ou extra-hépatique) est responsable d’un ictère dit cholestatique
(ictère par obstacle).

• Une augmentation prédominante de la bilirubinémie non conjuguée peut


provenir d’une destruction augmentée de l’hémoglobine (hémolyse
pathologique) ou d’une captation ou d’une conjugaison insuffisante de la
bilirubine par l’hépatocyte.

• Une augmentation prédominante de la bilirubine conjuguée provient d’un


défaut de sécrétion canaliculaire de la bilirubine conjuguée par l’hépatocyte.
• Ictère cholestatique (anomalie sécrétion et ou excrétion de la bile)

• ictère hémolytique (hyperhémolyse) ; ictère cytolytique (anomalies


de la captation et de la conjugaison de la bilirubine)

• ictère mixte.
III) Examen du patient ictérique:
• III-1) Examen clinique:
Examen à la lumière du jour révèle une coloration jaune des muqueuses
et téguments.

• Interrogatoire:
• les antécédents familiaux d’hépatite virale, de lithiase biliaire,
• précise la zone de résidence et/ou une notion de voyage récent en zone
d’endémie,
• les prises médicamenteuses,
• les antécédents transfusionnels.
• Préciser le mode de vie (professions exposées, alcoolisme, toxicomanie,
sexualité…)

• ainsi que le mode d’installation de l’ictère (progressif, fluctuant), ictère nu


ou accompagné d’altération de l’état général, de fièvre, de douleurs

• l’aspect des urines et des selles

• l’existence d’une phase pré-ictérique avec des troubles digestifs, d’un


prurit, des céphalées, des arthralgies…
• Examen physique:

• précise l’intensité de l’ictère (sub ictère ou ictère


franc)

• la taille, consistance et sensibilité du foie et de la vésicule biliaire (grosse vésicule si masse


pyriforme de l’hypochondre droit mobile avec la respiration, indolore et fuyante).

• On apprécie la couleur des urines (brunâtre ou non et mousseuses ou non) l’aspect des
selles (décolorées ou non) par l’interrogatoire et un toucher rectal.

• L’examen physique doit être complet avec recherche de signes d’hypertension portale,
d’hépatopathie chronique et/ou d’éthylisme, d’hémolyse chronique…).
• III-2 Examens paracliniques:

• Hyper bilirubinémie totale, préciser bilirubine directe et indirecte.


Transaminases, phosphatases alcalines, gamma glutamyl transpeptydase, taux
de prothrombine, hémogramme…

• Echographie abdominale : recherche taille du foie, anomalies des voies


biliaires intra et/ou extra hépatiques, lésions associées du tronc porte ou
autres…

• Tomodensitométrie, Imagerie par résonnance magnétique…


• Le diagnostic positif de l’ictère est fait par l’inspection des
muqueuses et téguments et il est confirmé par la biologie avec
l’élévation du taux de bilirubine dont on précisera la prédominance
(conjuguée ou non).
IV) Diagnostic différentiel

• Exceptionnelle surcharge en carotène qui se traduit surtout au niveau


de la paume des mains par une coloration orangée.
V) Etiologies:
• Les arguments du diagnostic étiologique sont trouvés dans
l’anamnèse, l’examen physique, les explorations biologiques et
morphologiques.

• Il faudrait savoir discerner les ictères à bilirubine conjuguée


(cholestatiques), à bilirubine non conjuguée (libre) et à bilirubine
mixte.

• Dans les ictères cholestatiques, différentier la cholestase extra-


hépatique de la cholestase intra-hépatique.
• V-1 Ictères cholestatiques:
V-1-1 Cholestase extra-hépatique:
V-1-1-1 La lithiase de la voie principale
Elle atteint la femme entre 40 et 60 ans souvent obèse. Elle évolue en 3 phases (triade de Charcot
ou de Villard) :

- douleurs hypochondre droit de type colique hépatique (inhibition respiration et irradiation en


bretelle)

- fièvre (39 – 40 °) avec frissons précédent de quelques heures l’ictère ;

- ictère de type rétentionnel (prurit, bradycardie, urines foncées et mousseuses, selles décolorées
(blanc mastic parfois graisseuses).
• L’examen clinique révèle un gros foie de cholestase (hépatomégalie à
surface lisse, régulière, bord inférieur mousse, consistance ferme sans
être dure, non ou très peu sensible) sans grosse vésicule.

• Biologie : cholestase ictérique (bilirubine conjuguée élevée,


phosphatases alcalines et gamma glutamyl transférases élevées), taux
de prothrombine bas mais se normalisant à l’injection parentérale de
vitamines K (test de Koller positif).
• L’ASP peut montrer un calcul radio-opaque

• l’échographie visualise la dilatation des vois biliaires intra et extra hépatiques et


parfois l’obstacle.

• Le scanner et l’IRM ont une sensibilité moindre que l’échographie.

• L’échoendoscopie est aussi performante mais elle est plus lourde à réaliser.

• La CPRE (cholangio-pancréatographie rétrograde endoscopique) était utile à visée


diagnostique mais actuellement elle est surtout réalisée si une action thérapeutique
est envisagée.
• V-1-1-2 Le cancer de la tête du pancréas:
• Il survient généralement chez un homme entre 50 et 60 ans.

• Il y a un ictère rétentionnel d’installation progressive sans rémission ; il


n’y a pas de douleur ni de fièvre. L’état général est très rapidement
altéré.

• L’examen clinique révèle un gros foie cholestatique avec une grosse


vésicule : la loi de Courvoisier et Terrier dit qu’un ictère rétentionnel
associé à une grosse vésicule est un cancer du pancréas.
• Biologie : syndrome de cholestase avec ictère.

• Echographie : augmentation de la taille de la tête du pancréas et


dilatation des voies biliaires extra et intra-hépatiques avec un gros
foie homogène et une grosse vésicule biliaire.

• Scanner, IRM et écho endoscopie avec ponction biopsie échoguidée


pour cytologie et histologie.
• V-1-1-3 Autres causes de cholestase extra-hépatique:

• Cancer des voies biliaires extra hépatiques (cholangiocarcinome), cancer du hile du foie,

• pancréatite chronique

• ampulome de Vater (tableau de cancer de la tête du pancréas avec méléna ou rarement d’angiocholite)

• cholangite sclérosante primitive

• adénopathies compressives d’origine infectieuse (tuberculose…) ou néoplasique

• agénésie des voies biliaires chez le nourrisson …


• V-1-2 Cholestases intra-hépatiques:
• V-1-2-1 Hépatite virale dans sa forme cholestatique:
Les signes cliniques se déroulent en 2 phases :

• la phase pré-ictérique : (quelques jours à 2 semaines) : il y a un syndrome


pseudo grippal (fièvre, asthénie, myalgies, arthralgies), des signes digestifs
(nausées, vomissements) et la triade de Caroli (céphalées, arthralgies,
urticaire).

• La phase ictérique : (2 à 6 semaines) : l’ictère apparaît avec une intensité


variable, il y a une chute de la fièvre, les urines sont foncées et rares, les
selles incomplètement décolorées.
• L’évolution se fait vers la guérison avec un « déjaunissement » et une polyurie (on
parle de débâcle urinaire).
La convalescence est longue avec une asthénie prolongée.

• Biologie : hypertransaminasémie supérieure à 20 fois la normale,


hyper bilirubinémie à prédominance conjuguée ou rarement mixte,
taux de prothrombine abaissé ou normal,
positivité de la sérologie du virus responsable (hépatite B, C, A ou E).
• V-2-1-2-2 autres causes de cholestase intra-hépatique:

• Les hépatites médicamenteuses, les hépatites toxiques, les hépatites auto-immunes


(cholangite sclérosante, cirrhose biliaire primitive, overlaps syndrome),
• certains cancers du foie (cholangiocarcinomes et métastases hépatiques),
• cholestase récurrente bénigne,
• hépatite alcoolique aigue,
• cirrhose,
• granulomatose,
• hémopathies malignes,
• amylose, maladie de Dubbin Johnson (anomalie congénitale de l’excrétion de la bilirubine
conjuguée) …
• V-2 Ictères cytolytiques:

• Généralement il y a un tableau d’hépatite aigue avec:


• une importante augmentation des transaminases,
• un ictère modéré
• avec une absence de dilatation des voies biliaires à l’échographie et à la TDM.

• Les causes sont : les hépatites virales, les hépatites médicamenteuses, les
hépatites auto-immunes, la cirrhose, les insuffisances hépatiques aigues…
• V-3 Ictères hémolytiques:
Dans le cadre d’une anémie hémolytique aigue ou chronique.

V-3-1 l’hémolyse aigue:


• souvent mal tolérée avec pâleur muqueuse, ictère, douleurs abdominales ou
lombaires, urines rouges Porto (hémoglobinurie), fièvre et hypotension artérielle
avec risque d’insuffisance rénale aigue et de collapsus avec choc cardio-
vasculaire.

• Biologie : anémie normochrome normocytaire régénérative,


hyperbilirubinémie non conjuguée, baisse de l’haptoglobine,
• V-3-2 L’hémolyse chronique:

• Elle associe une pâleur muqueuse, un ictère ou un sub-ictère et une


splénomégalie avec des urines claires ou orange.

• Biologie: anémie normochrome normocytaire régénérative,


hyperbilirubinémie non conjuguée, baisse de l’haptoglobine,
augmentation des LDH.
• Les causes de l’hémolyse aigue et parfois de l’hémolyse chronique sont :

la drépanocytose,
le déficit en glucose 6 phospho-déshydrogénase,
la microsphérocytose,
le paludisme,
les septicémies,
les envenimations,
certains médicaments,
les accidents transfusionnels…
• V-4 Ictères à bilirubine libre, non hémolytiques:

-La maladie de Gilbert : transmission autosomique dominante d’un déficit


de l’activité de l’UDP glucuronyltransférase.

-Maladie de Criggler-Najar : récessive, autosomique avec déficit total en


glucuronyltransférase.

-Ictères du nouveau-né avec immaturité du système de captation et de


conjugaison de la bilirubine.

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