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Faculté des sciences économiques, commerciales et des sciences de gestion _ Tizi Ouzou

Département des sciences financières et comptabilité


Master : Finance & Banques

Plan du cours

Chapitre I : Concepts généraux

1. Définition d’une fusion-acquisition

2. « Fusion-Acquisition », une simplification de langage

3. Formes juridiques des fusions-acquisitions

3.1. Acquisition par achat d'actions

3.2. Acquisition par échange d'actions

3.3. Les opérations de fusion & scissions

Chapitre II : Fusion-acquisition, Distinction

1. Les différents modes de croissance

1.1. Croissance interne ou organique

1.2. Croissance par alliance / partenariat

1.3. Croissance externe

2. Classification des fusions-acquisitions

2.1. Les fusions-acquisitions horizontales

2.2. Les fusions-acquisitions verticales

2.3. Les fusions-acquisitions concentriques

2.4. Les fusions-acquisitions conglomérales

3. Facteurs externes favorisant les fusions-acquisitions

1
3.1. La mondialisation et la libéralisation des échanges

3.2. L’influence des Etats

3.3. La conjoncture économique

3.4. Les difficultés d'une entreprise

4. Effets espérés des opérations de fusions-acquisitions

4.1. Les synergies opérationnelles

4.2. Un meilleur accès aux financements

4.3. Le renforcement du pouvoir sur le marché

4.4. Les innovations techniques

Chapitre III : Marché des Fusions-acquisitions

1. Un marché cyclique

1.1. De 1897 à 1904, fusions-acquisitions horizontales, création des premiers grands


groupes et des monopoles

1.2. De 1916 à 1929, fusions verticales, formation d’oligopoles

1.3. De 1965 à 1969, vague conglomérale

1.4. De 1981 à 1989, formation de "pure-players

1.5. De 1993 à 2001, le raz de marée

1.6. De 2004 à 2007, bulle du crédit, LBO et gros deals

1.7. Depuis 2008, marché opportuniste ?

2. Les plus grosses opérations de fusion-acquisition de l'histoire

3. Réussite et échec des fusions – acquisitions

Chapitre IV : Montage et mise en œuvre des opérations de fusion-acquisitions

1. La phase de préparation

2. La phase de négociation

2.1. Détermination du prix de la transaction

2.2. Les "Due Diligence"

3. La phase d’intégration

2
Chapitre V : Evaluation financière de la cible

1. Méthodes comptables patrimoniales

1.1. L’actif net comptable

1.2. L’actif net réévalué

2. Méthode des cours de bourse historique

3. Méthodes des comparables ou méthode des multiples

4. Méthodes d'analyse des flux de trésorerie

4.1. Méthode DCF (Discounted Cash Flow) ou FCFF (Free Cash-Flow for Firm)

4.2. Méthode des options réelles

Chapitre VI : Estimation du potentiel de création de la valeur

1. Estimation de la Valeur Actuelle Nette (VAN) de l'opération

2. Analyser l'impact de l'opération sur le nouvel ensemble

3. Due diligence comptable et financière

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Chapitre I : Concepts généraux

Chapitre I : Concepts généraux

1. Définition d’une fusion-acquisition :


Il est impossible de trouver une définition claire, partagée, normalisée du terme «
Fusion-acquisition ». Voici quelques définitions issues d’Internet ou de la Bibliographie /
Webliographie :
- Larousse
« Acquisition d'une ou plusieurs sociétés par une autre, aboutissant généralement à la
création d'une nouvelle entité. »

- Wikipédia
« L’expression fusion-acquisition (…) recouvre les différents aspects du rachat d'une
entreprise par une autre entreprise, dans les domaines de finance d'entreprise, de
stratégie d'entreprise et de gestion d'opérations financières. L'entreprise acquise peut
conserver son intégrité, ou bien être fusionnée à l'entreprise acquérante. Par extension,
la définition comporte également et de plus en plus les opérations de
désinvestissements (…)»

- [MEIER-SCHIER]
« Les fusions-acquisitions sont des opérations de regroupement ou de prises de
contrôle d’entreprises cibles, réalisées par l’intermédiaire d’un achat ou d’un échange
d’actions»

- [CEDDAHA]
« (Une transaction de Fusion – Acquisition est) … essentiellement la mise en commun
d’actifs ou d’intérêts économiques entre deux ou plusieurs entités. Le plus souvent
cette mise en commun passe par une opération de cession… »

- [JOHNSON]
« Une acquisition correspond au rachat d’une organisation par une autre organisation.
Une fusion est la décision mutuellement consentie par des organisations de partager
leurs possessions. »

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Chapitre I : Concepts généraux

2. « Fusion-Acquisition », une simplification de langage

Le terme « Fusion-Acquisition » regroupe en fait deux réalités qui, même si elles ont
des points communs, ont des impacts juridiques, fiscaux et comptables différents.

2.1. La fusion
Sous l'angle du droit des sociétés, une opération de fusion se caractérise par le fait que
l'intégralité du patrimoine d'une ou de plusieurs sociétés (la (les) société(s) «absorbée(s)»)
est transféré à une autre société (la société « absorbante ») moyennant l'attribution d'actions
ou de parts de la société absorbante aux actionnaires – et éventuellement d’une soulte1 - de la
ou des sociétés absorbées. Le transfert de patrimoine s’effectue par le biais d'une
dissolution sans liquidation : la/les société(s) absorbée(s) n’existe(nt) plus après une
fusion.
Les scissions sont des opérations de vente effectuées par des entreprises mais font partie
du domaine des fusions, les mécanismes juridiques, comptables et fiscaux étant très proches
de ceux des fusions.

2.2. L’acquisition
L’acquisition est un concept très large. Une acquisition porte sur une activité
économique dont on veut transférer la propriété, totalement ou partiellement :
 Titres (actions, parts…),
 Actifs corporels (usines, terrains, machines…),
 Actifs incorporels (droits, marques…),
 Eléments de besoins de fonds de roulement (stocks, clients, fournisseurs…).

Une acquisition est donc le transfert de tout ou partie d’un actif, la société qui cède
l’actif continuant à subsister à l’issue de l’opération.

2.3. Définition proposée


La frontière est donc très floue entre une opération de « fusion » et une opération
d’«acquisition». Souvent ce qui est présenté dans les médias comme une fusion s’avère être

1 : Une soulte est un montant en espèce versé aux actionnaires de la société “absorbée”. Son montant ne peut
dépasser 10% du montant global de la transaction.

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Chapitre I : Concepts généraux

une acquisition ou réciproquement une acquisition devient une fusion après quelques mois,
d'où l'appellation simplifiée « fusion-acquisition ».
On peut au final établir une définition très générale, englobant l’ensemble des concepts.
« Une fusion-acquisition est un transfert d'activité entre deux sociétés distinctes par le
biais d’un transfert de propriété. »
Sont donc exclus les accords commerciaux ou industriels de toute nature.
Sont donc incluses les scissions.

3. Formes juridiques des fusions-acquisitions


On distingue trois formes de fusion-acquisitions :
 Les acquisitions par achats d’actions2,

 Les acquisitions par échanges d’actions,

 Les opérations de fusion.

Ces trois formes ont pour objectif la prise de contrôle de la société cible.
On exclut :
 l'achat à une société d'un élément de son actif sans intention de prendre le contrôle de
la société,

 le « swap d’actifs » qui consiste à échanger des actifs ente deux sociétés. Ce
mécanisme est par exemple pratiqué par les grands groupes pétroliers qui s’échangent
des stations-services pour optimiser la couverture de leur territoire.

3.1. Acquisition par achat d'actions


Une acquisition par achat d'actions consiste à acheter des actions ou des parts sociales
d’une société. On parle d’acquisition lorsque les titres achetés permettent d’exercer un
contrôle sur la société cible. Sinon on parle de prise de participation minoritaire.
D’un point de vue juridique, la prise de contrôle est effective dès que la société «
acheteuse » détient 50% des droits de vote. En fonction de l’organisation de l’actionnariat

2 : Le mot "action" recouvre aussi toute autre forme de titre de propriété de la société (parts sociales, obligations,
bons de souscriptions…).

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Chapitre I : Concepts généraux

des sociétés, réunir 50 % des droits de vote peut nécessiter d’acquérir un volume beaucoup
plus important d’actions.
On fait aussi la distinction entre le contrôle des assemblées ordinaires où le vote se fait à
la majorité simple mais où le pouvoir se « limite » au management de la société et le contrôle
des assemblées extraordinaires où le vote se fait à la majorité des deux tiers et où se décident
les restructurations et les changements de statuts.
Lorsque la société cible est cotée en bourse, les opérations d’acquisition doivent suivre
un formalisme très particulier. Il existe théoriquement trois possibilités d’acquérir une société
en bourse :
 Le ramassage en bourse qui consiste à acheter progressivement des actions sur le
marché boursier,

 L’achat d’un bloc de participations à un actionnaire de référence de la société cible en


« gré à gré », sans passer par le marché boursier,

 L’Offre Publique d’Acquisition (OPA).

Dans les 2 premiers cas la réglementation impose le déclenchement d’une OPA obligatoire
dès que le nouvel actionnaire franchit le seuil de 30% des droits de vote.

3.2. Acquisition par échange d'actions


Dans une acquisition par échange d'actions la société initiatrice effectue
préalablement une augmentation de capital par émission de nouvelles actions et propose
d’échanger ces nouvelles actions contre des actions de la société cible. Par cette méthode, la
société cible devient une filiale de la société mère (si la prise de contrôle est effective comme
décrit au paragraphe précédent) et les actionnaires de la société cible deviennent actionnaires
de la société initiatrice de l’opération. Par abus de langage, on appelle ce type d’acquisition «
fusion à l’anglaise ».
Le rapport d’échange entre l’action de la société cible et l’action de la société initiatrice
est appelé parité d’échange.

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Chapitre I : Concepts généraux

Cette parité d’échange permet aussi de connaître le nombre de nouvelles actions à créer :

Les acquisitions par échange d'actions présentent l’avantage de ne pas nécessiter de


cash mais l’inconvénient de diluer l’actionnariat initial de la société initiatrice et il y a donc
risque de perte de pouvoir par les actionnaires de la société initiatrice.
Si la société est cotée en bourse, il y a obligation de lancer dès le départ une Offre
Publique d’Echange (OPE). Il n’y a pas ici de notion de seuil minimum des droits de vote
comme cela existe pour les OPA.

3.3. Les opérations de fusion & scissions


Une opération de fusion consiste à mettre en commun le patrimoine d'au moins deux
sociétés.
Les opérations de fusion sont les plus contraignantes puisque qu’elles aboutissent :
 A la mise en commun des patrimoines des deux sociétés, ce qui impose :
o La réévaluation de l’actif et du passif de la société absorbée et la mise en
commun des méthodes et outils comptables,

o Le changement de contrat de travail pour les salariés de la société absorbée;

 A la dissolution d’une des deux sociétés (fusion-absorption) voire des deux sociétés
(fusion par création d’une société nouvelle), opération irréversible.

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Chapitre II : Fusion-acquisition ; Distinction

Chapitre II : Fusion-acquisition, Distinction

La croissance est l’augmentation des dimensions d’une entreprise ou le changement de


ses caractéristiques (technologie, financement, RH, organisation). Pour beaucoup
d’entreprises, c’est une condition de survie pour ne pas disparaître (liquidation ou rachat) face
à la concurrence.

1. Les différents modes de croissance

1.1. Croissance interne ou organique


La croissance interne ou organique consiste pour une entreprise à accroitre son chiffre
d’affaire et /ou sa taille en s’appuyant sur ses ressources internes et en développant elle-même
de nouvelles compétences. Cette croissance est générée par l'augmentation des parts de
marché ou par son implantation sur de nouveaux marchés.
Ce type de croissance est donc la plupart du temps lent et continu.

1.2. Croissance par alliance / partenariat


Dans ce mode de croissance, des entreprises éventuellement concurrentes décident de
mettre en commun leurs compétences et leurs ressources pour mener à bien un projet
particulier. Chaque partenaire conserve son autonomie en dehors du périmètre de l’accord.
Une même entreprise peut nouer différents accords avec différents partenaires au même
moment.

1.3. Croissance externe


La croissance externe vise à augmenter rapidement le périmètre de l’entreprise par
l’acquisition d’une activité ou d'une société possédant les compétences et/ou les marchés
attendus.
C’est dans ce cas que l’on parle de fusions-acquisitions.
Une fusion-acquisition est donc le moyen pour une entreprise de réaliser une opération
de croissance externe.

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Chapitre II : Fusion-acquisition ; Distinction

2. Classification des fusions-acquisitions


Il existe de nombreuses classifications des opérations de fusions-acquisitions en
fonction de critères juridiques (niveau de prise de participation), de la taille de la transaction,
du type d’approche (hostile, inamicale, amicale)…
La classification la plus utilisée a été définie par la « Federal Trade Commission »3 aux Etats-
Unis. Cette classification distingue quatre grandes familles de fusions-acquisitions :

2.1. Les fusions-acquisitions horizontales


Elles consistent à racheter des concurrents dans le même secteur d'activité (on parle
aussi d'intégration horizontale). Le but est de gagner en taille, de jouer sur les
complémentarités mais aussi parfois uniquement d’éliminer un concurrent.

2.2. Les fusions-acquisitions verticales


Elles consistent à racheter des clients et/ou de fournisseurs (on parle alors d'intégration
verticale). Le but est ici d'éliminer des intermédiaires et ainsi de réduire les coûts.
Des exemples significatifs sont :
 Le rachat de Corsair (compagnie aérienne) par Nouvelles Frontières (agence de
voyage),

 Le rachat de la chaîne de télévision ABC (diffuseur de contenu) par Disney


(producteur de contenu),

 La prise de contrôle par Coca-Cola (producteur de contenu) de ses embouteilleurs


(producteurs de contenants).

Ce mode de fusion-acquisition était très populaire il y a une dizaine d’années,


notamment dans les médias. On parlait alors de « maîtrise de bout en bout de la chaine de la
valeur » mais les mégafusions Vivendi / Universal ou AOL / Time-Warner ont été des échecs.

3 : La Federal Trade Commission (FTC) est une agence américaine, indépendante du gouvernement des États-
Unis, dont la mission principale est l'application du droit de la consommation et le contrôle des pratiques
commerciales anticoncurrentielles. Elle a pour équivalent la Direction Générale « Concurrence» à la
Commission Européenne.

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Chapitre II : Fusion-acquisition ; Distinction

2.3. Les fusions-acquisitions concentriques


Elles concernent des regroupements d’entreprises dont les métiers sont proches et
complémentaires. Le but est d’augmenter la part de marché et le type d’offre.
Des exemples :
 Le rachat de Ferrari par Fiat (même métier mais pas même clientèle),

 Le rachat de AVIS (location de voitures) par D’Ieteren (concessions automobiles).

2.4. Les fusions-acquisitions conglomérales


Elles consistent à constituer des groupes d'entreprises sur la base de considérations
uniquement financières. De tels groupes d'entreprises sont appelés "conglomérats" (i.e.
agglomération d'activités pas forcément cohérentes d'un point de vue industriel).
L'une des principales raisons est la diversification : en se diversifiant dans des activités
différentes, une entreprise réduit le risque d'être lourdement impactée par une conjoncture
défavorable dans un domaine d’activités.
Des exemples significatifs sont :
 Nokia qui est passé du bois à la téléphonie sans fil,

 Vivendi (ex Générale des Eaux) qui est passé de l'eau aux médias et
télécommunications (avant de scinder les deux activités).

3. Facteurs externes favorisant les fusions-acquisitions

3.1. La mondialisation et la libéralisation des échanges


Un marché plus vaste pousse à la concentration pour avoir une surface financière et
géographique plus importante.
Pénétrer un nouveau marché est souvent plus facile en achetant un concurrent déjà
installé sur place plutôt que de créer à partir de rien.
Un exemple est le sidérurgiste indien Mittal qui rachète l’européen Arcelor.

3.2. L’influence des Etats


Les privatisations effectuées par certains états « mettent sur le marché » de grands
groupes industriels, souvent dans l’objectif de leur permettre de se développer plus facilement

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Chapitre II : Fusion-acquisition ; Distinction

à l’international, les banquiers étant moins réticents à prêter de l'argent à une société qui n'est
plus contrôlée par un état.
Un exemple est l’opérateur téléphonique français France Telecom qui rachète Orange
UK ou Gaz de France qui prend le contrôle d’Electrabel.

3.3. La conjoncture économique


Les bulles financières favorisent assez naturellement les fusions-acquisitions :
 les sociétés initiatrices sont surévaluées (surtout dans le cas des OPE) ainsi que le
potentiel de la firme cible d'où des acquisitions à des prix exorbitants, comme lors de
la « bulle de l’Internet »,

 Elles facilitent l’endettement : les banques acceptent plus facilement de prêter.

3.4. Les difficultés d'une entreprise


La défaillance d'une entreprise est souvent une occasion d'acquisition à bas prix.
L’exemple type est le rapprochement BNP Paribas avec Fortis.

4. Effets espérés des opérations de fusions-acquisitions

4.1. Les synergies opérationnelles


La recherche de synergies est le motif le plus souvent invoqué lors des lancements
d’opérations de fusions-acquisitions :
1. Synergies de coûts liées aux volumes : diminution du coût unitaire de production,
notamment R&D, publicité, réseaux de distribution;

2. Synergies de coûts liées aux partages de ressources : supprimer les doublons, mieux
répartir les ressources ;

3. Synergies de croissance : possibilité d’accéder à de nouveaux marchés ou améliorer


son offre de produit ou étendre sa clientèle.

4.2. Un meilleur accès aux financements


La concentration donne plus de visibilité à la firme et permet un accès plus facile aux
financements.

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Chapitre II : Fusion-acquisition ; Distinction

4.3. Le renforcement du pouvoir sur le marché


L'objectif est d'obtenir un pouvoir de négociation accru sur les fournisseurs ou d’exclure
des concurrents.

4.4. Les innovations techniques


Souvent, de grands groupes s'offrent à grand prix des PME innovantes afin d'absorber leurs
technologies, leurs brevets, leur dynamisme.
C'est la politique actuelle de Microsoft, Google, IBM…

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Chapitre III : Marché des Fusions-acquisitions

Chapitre III : Marché des Fusions-acquisitions

1. Un marché cyclique
Le marché des fusions est cyclique mais ces cycles sont ni réguliers, ni prévisibles.
[CEDDAHA] distingue – comme la plupart des auteurs – 6 grandes vagues :

1.1. De 1897 à 1904, fusions-acquisitions horizontales, création des premiers


grands groupes et des monopoles
Cette première vague se déroule principalement aux Etats-Unis, dans le domaine de
l’industrie lourde et permet l’émergence de véritables empires encore existants : General
Electric, DuPont de Nemours, Standard Oil… Ces entreprises prennent des positions
dominantes sur un secteur d'activité et peuvent ainsi dicter leur position. On parle alors de
monopole.

1.2. De 1916 à 1929, fusions verticales, formation d’oligopoles


La mise en place des premières lois anti-trust4 aux Etats-Unis provoquent l'éclatement
des monopoles mais la formation d’oligopoles (peu d’entreprises contrôlant un marché très
important) dans le secteur de la chimie, des mines ou de l’alimentation. Cette vague concerne
aussi le Royaume-Uni.

1.3. De 1965 à 1969, vague conglomérale


Les lois anti-trust sont renforcées, ce qui incite les groupes à se diversifier.
Par exemple, la société d’électronique ITT finit par regrouper des activités aussi
diverses que électronique, banque, location de voiture et restauration.
C’est la première vague en Europe suite à la création du Marché Commun Européen à
partir de 1968. Le but pour les sociétés est d’obtenir une taille critique pour le marché
européen. Les états contribuent aussi à cette vague en provoquant la création de fleurons
industriels nationaux : Saint-Gobain / Pont à Mousson, Usinor/Sacilor, Péchiney / Ugine /
Kuhlmann.

4 : "Trust" est un terme américain qui désigne une entreprise ayant un monopole. Les lois anti-trust américaines
avaient pour but de combattre les pratiques non-concurrentielles de ces monopoles ou oligopoles. Ce sont les
éléments fondateurs du droit de la concurrence actuellement en application..

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Chapitre III : Marché des Fusions-acquisitions

En 1974, la première OPA hostile de l'histoire est lancée aux USA : International Nickel
Company sur son concurrent ESB.

1.4. De 1981 à 1989, formation de "pure-players"


Cette vague conduit au démantèlement des conglomérats au profit de la concentration
sur un seul métier (les "pure-players").
C’est aussi la première vague des méga-fusions aboutissant à la consolidation de
certains secteurs (pétrole au début des années 80, pharmacie à la fin des années 80).
Les OPA hostiles se multiplient, les moyens de financement se diversifient, le tout dans
un contexte de mondialisation croissante.

1.5. De 1993 à 2001, le raz de marée


C’est la période phare du marché, poussé par la mondialisation, les dérégulations de
toutes sortes (énergie, banque, télécommunication, transport aérien), les bouleversements
technologiques (informatique, télécommunications, Internet…) et les engouements sectoriels
(une première fusion-acquisition sur un secteur en déclenche plusieurs autres, dans une course
au gigantisme). Ce sont des opérations gigantesques, souvent par le biais d’OPE.

1.6. De 2004 à 2007, bulle du crédit, LBO et gros deals


Le Leveraged Buy-Out (LBO), est un terme anglais qui signifie « acquisition avec effet
de levier. Un ou plusieurs investisseurs acquièrent une entreprise (la cible) via une société
mère (appelé également holding de reprise) créée pour l’occasion. La holding s’endette autant
que la capacité d'autofinancement de la société cible le permet, et est capitalisée, par les
acquéreurs, uniquement à hauteur du solde du prix d’acquisition (effet de levier). La dette
d'acquisition, bancaire ou non, est remboursée par les revenus de la société mère, constitués
essentiellement des dividendes et des commissions de gestion versés par la cible et profite au
maximum des déductions fiscales existantes.
Les fonds d’investissement deviennent des acteurs essentiels mais les contraintes
réglementaires, boursières, comptables et financières rendent les transactions plus longues et
plus coûteuses.

1.7. Depuis 2008, marché opportuniste ?


Depuis la crise financière et les incertitudes sur l’avenir, les crédits sont en baisse. Il y a
donc moins d’opérations de LBO.

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Chapitre III : Marché des Fusions-acquisitions

La priorité revient à la croissance organique, les fusions-acquisitions restantes sont


principalement le fait d’investisseurs industriels pour consolidation stratégique des marchés
émergents (Brésil, Asie).

2. Les plus grosses opérations de fusion-acquisition de l'histoire

Les plus grosses opérations de fusion-acquisition de l'histoire sont (en montants) :

Vodafone/Mannesmann (télécoms) 203 milliards de dollars en 1999/2000


AOL/Time Warner (médias) 182 milliards en 2000/2001
BHP Billiton/Rio Tinto (mines) 147 milliards en 2008
AT&T/Bell South (télécoms) 89 milliards en 2006
Pfizer/Warner-Lambert (pharmacie) 89 milliards en 1999/2000
Exxon/Mobil (pétrole) 85 milliards en 1998/1999
Glaxo Wellcome/SmithKline Beecham 79 milliards en 2000
Travelers/Citicorp (finance) 73 milliards en 1998

Le marché est dominé par les USA qui représentent la moitié du marché des fusions-
acquisitions de sociétés cotées.

3. REUSSITE ET ECHEC DES FUSIONS – ACQUISITIONS


Une étude Mercer Management Consulting5 de 2003 sur les fusions-acquisitions d'un
montant supérieur à 500 millions d'Euros et réalisées dans les années 80 et 90 compare la
performance des sociétés ayant fait l'objet d'une fusion-acquisition avec la moyenne de leur
secteur (mesurée sur la base de ratios financiers tels que l'EBITDA).

L'avantage de cette étude est qu'elle étudie des fusions-acquisitions entre 5 et 20 ans après
l'opération, laissant le recul nécessaire pour estimer les résultats.
Comme le montre les deux graphiques ci-dessous :
 Seulement 37 % des entreprises ayant fait l'objet d'une fusion-acquisition réalisée dans
les années 80 ont surperformé par rapport à la moyenne de leur secteur;

 Ce chiffre monte à 52% pour les opérations réalisées dans les années 90.

5 :http://www.institutentreprise.fr/fileadmin/Docs_PDF/travaux_reflexions/Notes_de_Institut/fusions_acquisitio
ns.pdf

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Chapitre III : Marché des Fusions-acquisitions

Une étude plus récente du Boston Consulting Group (BCG) confirme ces chiffres 6 :
entre 1992 et 2006, 58,3 % des acquisitions se sont traduites par une perte de valeur pour les
actionnaires de l’acquéreur, avec un déficit net de 1,2 % sur l’ensemble des transactions.
Le constat est simple : moins de 50 % des fusions-acquisitions peuvent être
considérées comme des succès. Ce taux est confirmé par d'autres études, quels que soient les
indicateurs utilisés : boursiers, financiers, opérationnels, respect des plans stratégiques qui les
justifient…
Ce résultat reste tout de même à prendre avec prudence, aucune des études sélectionnées
ne répondant (et ne pouvant répondre) à la question : la situation n’aurait-elle pas été pire si la
fusion-acquisition n’avait pas eu lieu ?
Le seul gagnant incontestable semble être l'actionnaire de la société "achetée" puisque
l'action est toujours surévaluée par rapport à sa valeur réelle de l'instant.

6 : http://www.informatica.com/INFA_Resources/brief_ma_avis_expert1_fr.pdf

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Chapitre IV : Montage et mise en œuvre des opérations de fusion-acquisitions

Chapitre IV : Montage et mise en œuvre des opérations


de fusion-acquisitions

La décision de lancer une opération de fusion-acquisition est une opération stratégique


qui engage l'entreprise sur le long terme.
On divise classiquement les opérations de fusions-acquisitions en 3 phases :
 La phase de préparation,

 La phase de négociation,

 La phase d'intégration.

1. La phase de préparation
Au cours de cette phase, l'entreprise doit tout d'abord faire le choix d'une croissance
externe par le biais d'une fusion-acquisition au détriment d'une autre forme de croissance
(croissance organique ou alliance / partenariat). Cette décision s'appuie sur une analyse de la
société en elle-même et de ses concurrents et donc cibles potentielles.
L'entreprise doit ensuite sélectionner une cible en fonction de sa compatibilité avec les
objectifs stratégiques de la fusion-acquisition et en évaluer la valeur.

2. La phase de négociation
Lors de cette phase, l'acheteur doit choisir sa stratégie (opération amicale ou hostile). Il
doit aussi concevoir le montage financier adéquat.

2.1. Détermination du prix de la transaction


La fixation du prix est essentielle à la réussite d’une fusion-acquisition.
Pour le Vendeur, le Prix Minimum correspond à la valeur maximale qu’il peut espérer
en conservant l’actif (valeur « stand-alone »). Si la société est cotée sur un marché boursier,
c’est au minimum la valeur boursière.
Pour l’Acheteur, le Prix Maximum correspond à la valeur espérée s’il prend le contrôle
de l’actif. L’objectif de son acquisition est de créer de la valeur (améliorer la rentabilité
économique) par une amélioration de la performance et /ou la mise en place de synergies
industrielles.

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Chapitre IV : Montage et mise en œuvre des opérations de fusion-acquisitions

La fourchette de négociation se trouve donc entre le Prix Minimum espéré par le


Vendeur et le Prix Maximum souhaité par l’Acheteur.
La prime de contrôle représente le prix supplémentaire par rapport à la valeur du
marché d'une société qu'un investisseur paie pour détenir le contrôle du capital de cette
société.

2.2. Les "Due Diligence"


La « Due Diligence7 » est le diagnostic approfondi effectué par l’acheteur et ses conseils
pour apprécier les risques et opportunités de la fusion-acquisition.
On distingue 3 types de Due Diligence :
 Les Due Diligence stratégiques ou opérationnelles,
 Les Due Diligence comptables et financières,
 Les Due Diligence techniques (organisationnelle, juridique, fiscale, sociale,
environnementales…).

La finalisation de la transaction est effective dès l'accord de toutes les parties


concernées, y compris les autorités nationales des marchés financiers et les autorités de la
concurrence pour les grandes opérations boursières.

3. La phase d’intégration
La phase d'intégration consiste à réaliser au niveau juridique, financier, comptable et
opérationnel l'intégration de l'acquisition, le but étant bien évidemment de concrétiser le plus
rapidement possible le potentiel de création de valeur du nouvel ensemble.

7 : Le terme "Due diligence" est un terme anglais qui signifie littéralement "diligence raisonnable" ou "devoir
élémentaire de précaution". Il est synonyme d'audit préalable.

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Chapitre V : Evaluation financière de la cible

Chapitre V : Evaluation financière de la cible


Plusieurs méthodes d'évaluation de la valeur "stand-alone" de la cible existent. Chaque
méthode a ses avantages et ses inconvénients et beaucoup d'entre elles reposent sur des
critères d'appréciation qui ne sont pas totalement objectifs et dépendent donc d'un "pari sur
l'avenir" de l'évaluateur.
Il est conseillé d'utiliser plusieurs méthodes pour arriver à une évaluation financière de
la cible aussi "raisonnable" que possible.
Le préalable est le calcul de ratios financiers de la cible. Les ratios les plus classiques
mettent en valeur le niveau du bénéfice par rapport au passif de l'entreprise (ROI, Return on
Investment) ou les dettes par rapport au capital (qui permettent d’analyser les ressources à
long terme). Ce calcul permet de positionner une entreprise par rapport aux concurrents de
son secteur. Les actifs sont pris en compte à leur valeur dans le bilan.
Le calcul des ratios financiers ne permet pas en soit de donner une valeur de la société
dans l’hypothèse de dissolution mais permet, par la présence de ratios « hors norme » du
secteur, de donner des indications pour des recherches plus profondes.

1. Méthodes comptables patrimoniales


Ces méthodes se basent sur l’analyse du bilan de la société étudiée.

1.1. L’actif net comptable


L'actif net comptable permet de donner une évaluation d'une entreprise à partir de son bilan
comptable. C'est une évaluation purement statique, en principe minimale, puisqu'elle ne prend
en compte que le passé et non les anticipations de résultats à venir. Elle présuppose
néanmoins la poursuite de l'activité dans la mesure où les actifs sont évalués à leur valeur
dans le bilan et non à un prix de liquidation.
Actif net comptable = Capital social
+ Réserves
+ Report à nouveaux
+ Résultat de l'année
+ Subventions
+ Provisions réglementées

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Chapitre V : Evaluation financière de la cible

- Actifs fictifs (frais d’établissement, frais de R&D, primes de


remboursement)
- Ecarts de conversions
Cette méthode peut être utilisée dans une opération de fusion ou d’acquisition par
échange d’actions, si la situation des deux sociétés est très proche.
Cette méthode est très mal adaptée au cas des holdings qui détiennent des participations
dont la valeur comptable à l’actif est très éloignée de la valeur de marché.

1.2. L’actif net réévalué


Cette méthode vise à pallier les défauts de la méthode de l'actif net comptable. La
méthode consiste à réévaluer tous les postes de l’actif et du passif en fonction de leur valeur
de remplacement, d’usage, de revente.
La réévaluation des actifs peut faire apparaître des plus-values ou moins-values sur des
éléments existants de l’actif mais aussi identifier de nouveaux actifs immatériels (brevets,
marque, clientèle…).
La réévaluation du passif consiste à réintégrer les risques non-provisionnés, les impôts
différés et les impôts latents sur plus-values.
Cette méthode est utilisée pour calculer la parité d’échange dans les opérations de
fusions-acquisition par échange d’actions. Elle est particulièrement adaptée pour les
opérations d’acquisition d'éléments d’actifs (usines, bâtiments…).
A noter que l’actualisation de la différence entre cet actif net réévalué multiplié par le
taux sans risque (des obligations d’état par exemple) moins le bénéfice dégagé par cet actif est
un moyen de calculer le goodwill.

2. Méthode des cours de bourse historique


Cette méthode est réservée aux groupes cotés en bourse et elle est systématiquement
employée même si elle ne donne que des résultats très indicatifs. Le cours de bourse de
l’action cible est estimé en moyenne sur plusieurs périodes, classiquement 5 jours, 1 mois, 3
mois, 6 mois, 1 an.
Ce n’est pas en soi une méthode permettant d’évaluer la valeur de la société mais cela
fournit aux actionnaires de la cible une mesure de la surcote proposée par l’acheteur.

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Chapitre V : Evaluation financière de la cible

3. Méthodes des comparables ou méthode des multiples


On choisit un ou plusieurs indicateurs d’activité de l’entreprise évaluée : chiffre
d’affaire, résultat net, EBITDA…
On sélectionne un échantillon de fusions-acquisitions ou d’entreprises « comparables »
(même secteur d’activité, même position dans le cycle de vie, tailles comparables, grands
équilibres du bilan proches…), entreprises dont on connaît la valeur suite à une précédente
opération de fusion-acquisition.
On calcule alors le ratio Prix d’Acquisition / Indicateur de référence pour les entreprises
de l’échantillon et on établit la valeur moyenne, le minimum, le maximum, l’écart type.
Ces données statistiques sont ensuite appliquées à l’indicateur de référence.

Exemple :

Fusions- Prix d’acquisition


CA de la cible Ratio Prix / CA
Acquisitions passées de la cible
A acquiert B Prix B : 100 MEur CA B : 80 MEur 1,25
C acquiert D Prix D : 210 MEur CA D : 140 MEur 1,5
Ratio moyen 1,375

Si la cible étudiée a un CA de 120 MEur alors sa valeur estimée sera :


1,375 x 120 = 165 MEUR

4. Méthodes d'analyse des flux de trésorerie


Ces méthodes sont mathématiquement beaucoup plus complexes : la valeur d'une
entreprise est évaluée par projection sur le futur de ses flux de trésorerie : le flux de trésorerie
est considéré comme un flux financier qui est actualisé à un taux qui dépend du risque de
l‘opération.

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Chapitre V : Evaluation financière de la cible

4.1. Méthode DCF (Discounted Cash Flow) ou FCFF (Free Cash-Flow for Firm)
Cette méthode se base sur le constat qu’un investisseur n’achète un actif que pour les
recettes auxquelles il donne droit, celles-ci subissant une décote en fonction de leur risque et
de leur durée. Les recettes que génère un actif sont les flux de trésorerie qui sont considérés
comme des actifs financiers.8
Le FCFF se calcule avec la formule suivante :

La valeur intrinsèque d’un actif financier est la somme actualisée des revenus
monétaires qu’il génèrera en prenant en compte les actualisations financières.
Quand le bénéficiaire d’un flux est un créancier, le taux d’actualisation dépendra du coût de la
dette (taux d’intérêts). Quand le bénéficiaire d’un flux est un actionnaire, le taux
d’actualisation dépendra de la rentabilité exigée par cet actionnaire.
La méthode DCF se déroule en 4 étapes :
1. Elaboration d’un Plan d’affaire sur les 3-4 années à venir (ou plus) en déclinant 3
hypothèses (Pessimiste / Optimiste / Médiane) ;

2. Calcul des flux de trésorerie sur la base du plan d’affaire;

3. Actualisation des flux par le coût moyen pondéré du capital (si le bénéficiaire du flux
est un créancier) et du risque (si le bénéficiaire du flux est un actionnaire);

4. Calcul de la valeur de l’entreprise.

Ce dernier calcul est effectué tout d'abord en additionnant les flux actualisés sur 2 périodes :
 la période du plan d’affaire;

 les années suivantes, les flux de trésorerie sont anticipés sur la base d’hypothèses de
croissance et d’investissements.

8 : Les anglo-saxons disent “A firm is like a bond !”, ce qui signifie qu’une entreprise peut être considérée
comme une obligation qui rapporte un intérêt annuel.

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Chapitre V : Evaluation financière de la cible

La valeur finale de la société est alors calculée en actualisant les sommes des flux de ces
deux périodes en prenant l’hypothèse d’un taux de croissance moyen à horizon infini
(inférieur au taux de croissance de l’économie) selon la règle dite de Gordon-Shapiro.

4.2. Méthode des options réelles


La méthode DCF ne prend en compte aucun effet du management : l’entreprise est
considérée comme une obligation qui ne "vit" pas.
La méthode des options réelles vise à intégrer un facteur correctif à la méthode DCF.
Les « options réelles » permettent d’expliquer et de valoriser des projets de création de valeur,
ce qui permet de prendre en compte :
 Les opportunités de croissances futures,

 La capacité du management à optimiser le fonctionnement de l’entreprise.

Cette méthode est très complexe et fonctionne sur l’analogie avec les options
financières. Une option financière est un contrat entre un acheteur et un vendeur. L'acheteur
de l'option obtient le droit, et non pas l'obligation, d'acheter ou de vendre un actif à un prix
fixé à l'avance, pendant un temps donné ou à une date fixée. De son côté, le vendeur s'engage
à respecter les termes du contrat si l'acheteur décide d'exercer son option. Si l'option n'est pas
exercée, le vendeur a gagné un montant égal au prix de l'option. L’estimation de la valeur est
donc très complexe et dépend de nombreux facteurs : taux d’intérêt, risques, situation du
marché boursier…
Une option réelle est construite par analogie et consiste à imaginer des contrats
(croissance future, nouveau marché, gains de productivité), de les valoriser en tant qu’option
financière.

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Chapitre VI : Estimation du potentiel de création de la valeur

Chapitre VI : Estimation du potentiel de création de la


valeur

L'estimation du potentiel de création de valeur est une étape très importante puisqu'elle
va permettre de définir la surcote maximum que la société est prête à payer pour acquérir la
société cible.
Les méthodes d'estimation du potentiel de création de la valeur sont assez proches de
celles utilisées pour l'évaluation d'un projet d'investissement traditionnel.

1. Estimation de la Valeur Actuelle Nette (VAN) de l'opération


La valeur actuelle nette d'un investissement se calcule par la formule suivante :

Si la VAN est positive, on parle de création de valeur; si elle est négative, on parle de
destruction de valeur.
Dans le cas d'une fusion-acquisition

La valeur initiale de la cible est calculée par les méthodes définies au paragraphe précédent.

Il existe plusieurs types de synergies. Pour chacune d'entre elles, il faut bien identifier :
 Le gain mesuré sur les flux de trésorerie (FCFF) lié à leur mise en œuvre,
 Les coûts de mise en œuvre.

Une synergie dont on ne peut pas précisément évaluer l'impact sur le FCFF ne doit donc
pas entrer en compte. Parmi les synergies "classiquement" prises en compte à cette étape, on
retrouve :

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Chapitre VI : Estimation du potentiel de création de la valeur

 L'augmentation (espérée) du chiffre d'affaire,


 La rationalisation de l'organisation (suppression des doublons de fonctions, disparation
de certaines unités de production…),
 Les impacts fiscaux.

Les coûts estimés du rapprochement regroupent :


 Les coûts directs liés au rapprochement (frais juridique, fiscaux, de conseil…),
 Les coûts liés à la mise en œuvre des synergies (indemnités de licenciements le cas
échéant, réaménagement d'unités de production…),
 Les coûts indirects liés à la dégradation du climat social (inquiétudes du personnel
générant pertes de productivité, de qualité).

2. Analyser l'impact de l'opération sur le nouvel ensemble


Après évaluation de la Valeur Actuelle Nette de l'opération, il faut projeter le résultat
sur le nouveau groupe ainsi constitué et mener une évaluation financière de la société après
fusion-acquisition. En effet, une fusion-acquisition peut certes créer de la valeur mais la
société reprend aussi les actifs et les dettes de la société cible et, le cas échant, doit s'endetter
pour réaliser l'opération.
Il est donc important de modéliser complètement l'impact financier et comptable de
l'opération. Un des pièges "classiques" concerne les dettes. La société initiatrice peut avoir
obtenu par le passé des emprunts liés au respect d'un endettement maximum. La fusion-
acquisition peut avoir pour effet de dépasser ces ratios et donc nécessiter le remboursement
anticipé d'une dette et ainsi remettre en cause l'équilibre de la transaction voire de la société.
Une des approches couramment pratiquées est d'évaluer la valeur d'une action de la
société initiatrice avant et après l'opération. Ainsi l'opération est évaluée dans sa globalité, y
compris le nouvel équilibre des pouvoirs entre actionnaires à l'issue de la fusion-acquisition.

3. Due diligence comptable et financière


La Due Diligence comptable et financière permet au futur acquéreur de prendre
connaissance de la comptabilité de la société cible et de s'assurer qu'elle respecte bien les
principes de base : comptes annuels sincères, réguliers et donnant une image fidèle du

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Chapitre VI : Estimation du potentiel de création de la valeur

patrimoine, de la situation financière et du résultat de l'entreprise. Si la société est un groupe,


l'audit devra bien comprendre les mécanismes de consolidation des filiales.

L'audit se concentre tout d'abord sur les postes clés utilisés pour l'évaluation financière
de la cible : capitaux propres, résultat d'exploitation et résultat net, dotations aux
amortissements et aux provisions…
D'autres points sensibles doivent aussi être particulièrement étudiés pour ne pas
dégrader la rentabilité de la société cible (et donc de l'ensemble post-acquisition) :
 Les actifs immobiliers : l'audit doit prendre connaissance de l'ensemble des
immeubles détenus ou loués par la société, de leur état, de leur conformité vis-à-vis
des différentes réglementations (exemple : ne pas découvrir après acquisition que le
siège social doit être désamianté) et les contrats/baux en vigueur (exemple : ne pas
découvrir que le bail d'un immeuble arrive à expiration et qu'il convient de trouver
rapidement une nouvelle domiciliation);

 Les actifs incorporels : l'audit doit vérifier qu'ils sont bien valorisables. Par exemple,
un brevet ou une marque doivent avoir été déposés pour être considérés comme
valorisable;

 Les comptes clients : l'acheteur doit s'assurer que les créances clients sont
recouvrables dans des délais raisonnables et ne pas nécessiter des besoins de
financement à court terme;

 Les comptes de stocks : en cas de dépréciation du stock, l'acheteur devra passer des
provisions;

 Les provisions pour risques et charges : l'acheteur doit prendre connaissance de tous
les procès, litiges en cours ou à venir avec des concurrents, fournisseurs, clients ou
salariés et s'assurer que les provisions nécessaires et suffisantes ont bien été passées.

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