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Agencer

lesmultiplicités
avecDeleuze
Ouvrage
publiéaveclesoutiende LES COLLOQUES L
l'Université
Paris8 etdel'Université
ParisNanterre, CERISY
toutesdeuxmembres del'Université
ParisLumières.

NIVERSITÉ

PARSS Agencer
lesmultiplicités
avec
Deleuze

NI Université
e Paris Nanterre

®. Sousla directionde
ANNE QUERRIEN,ANNE SAUVAGNARGUES
ET ARNAUDVILLANI

www.editions-hermann.fr

ISBN:9782705695774
©2019,HermannÉditeurs,
6 rueLibrouste,75015Paris
Toute
reproduction
oureprésentarion
decet
ouvrage,
intégrale
oupartielle,
serait
illicite db
sansl'autorisation
del'éditeur
etconstituerait
unecontrefaçon.
Lescasstrictement Hhermmzrmmrs
limitésàl'usage
privéoudecitation
sontrégis
parlaloidu11mars1957. Depuis
1876
Introduction

C'estungrand
amour
pourDeleuze,
eruneforme
d'inconscience
(lesdeuxsont
liés dans
la foliecréatrice
que
décritl'/ondePlaton)qui
ont pu décidertroischercheurs,Anne Querrien,Anne Sauvagnargues
et Arnaud Villani, relativementindépendants
lesunsdesautres,à se
lancerdans l'aventured'un «colloqueDeleuze ».Si l'onyréfléchit
eneffet, lesobstacles
sontconsidérables. Si l'onpeutadmettre pour
plausible queDeleuzen'aitquetrèsrarement fréquenté lescolloques
pourla raisonqu'ilendonne,àsavoir se préserver untemps detravail
de recherche etd'écriture,il fautaussiajoutercequ'il n'acessé de
redire
: queles discussions,
certainstypesdediscussions
entout cas,ne
l'intéressaient
pas.Etencoremoins
les objections,
comme
il leditavec
Guattari
dansRhizome.
Pourtant,
quiécoute
sescours
grâce
àInternet
serendbiencomptequedesétudiants yintervenaient, etqu'il leur
répondait. Certains,comme le légendaire Georges Comtesse, présen-
taientsystématiquement des objections”. Il fautinsister
surlefaitque
ladiscussion avecDeleuze n'avaitriend'undébat démocratique destiné
à fabriquerdu consensus comme le proposent Habermas ou Rorty.
I s'agissaitplutôtd'unprélèvement auvolpour aller plusloin, d'où
la nécessitéqueles trajectoiresdesproposnesoientpasdirectement
opposées, quel'amitiélocalenesoitpascelledeprétendants àunobjet
commun,maiscommeun concertdefrôlements déterritorialisés.
Lesénoncés desunserdesautresseconjuguaient dansunemachine
K © ; d'écriturealimentéepardesproposetdespointsdevuemultiples,
Photographiedegroupelorsdu colloquede Cerisy Deleuze: virtuel,machines
qu'une
érudition formidable «mettaitenmusique ».Noussavons bien
€?lignesdefuite qui s'esttenudu 1°au 11août 2015
aussiqu'il nelisairpaslescommentaires critiques sursesouvrages,
© ArchivesPonrigny-Cerisy.
etqu'il lui arrivaitdedemander à sesexégètes desedétourner de
lui
etdecontinuerleur« propre»travail,sans« perdreleurtemps”».
ILestenfinévidentquela formecanonique d'uncolloque,malgré
l'organisation sansfailles,l'audienceinternationale etla mémorable

1.Sansdoutepourmieux
s'imprégner
desaparole,
puisqu'il
s'est
installé
comme
«schizoanalyste
».
2. En témoigneunelettre à ArnaudVillani datéededécembre1981,publiée
dansGillesDeleuze.
Leitres
esautres
textes,
éd.préparée
parDavidLapoujade,
Paris,
Éditionsde Minuit, coll. « Paradoxe»,2015,p. 79-80.Deleuzeécritnotamment
:
* Ne vous
laissez pasenchanter ni entèterparmoi.»
6 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECD'ELEUZE Introduction 7

tradition
desdécades
deCerisy
pouvait
constituer
unréel
obstacle
à JeCentre
d’études,
derecherches
etdeformation
insticutionnelles.
Elle
desbifurcations
inventives. a participé,
danslecadredesontravailprofessionnel,
àdenombreux
Aureste,siuncolloque
àCerisy
comporte
toujours
unedimen- colloques
deCerisy, notammentsurla mobilité
urbaine
et lesnouvelles
sionprospective,
voireunobjectif(parexemple,
l'idée que
les études visions
de
la ville,à l'èredesmétropoles.
Cette fréquentation
assidue
deleuziennes
enFrancesedéveloppent davantage),depuislepremier deCerisy,
le plaisirrenouvelédeséchanges
dans cecadrehistorique,
colloqueDeleuze,
organisé
parleCollègeinternational
dephilosophie luiontdonné envie d'yassister
unjouràuncolloque
Deleuze.
Arnaud
en 1997,etnotamment parFrançoise Proust,lesentiment prévaut Villani, professeur
dephilosophiependant
plusdequarante
ansen
queles rencontres
deleuziennessefontenordredispersé, animées classes
préparatoires
littéraires
(Lettres
supérieures,
puisPremière
par
des philosophesaimantéspar cettepensée,mais mal reliésentre supérieure),
aulycéeMasséna deNice,estconnu detouslesdeleu-
eux: lerhizomeDeleuze
a sesdiscontinuités.
LecoursdeDeleuze
à ziens
poursacorrespondance
avec Deleuze,
etsonlivre: Laguépe
et
Paris
8-Vincennes
puisSaint-Denis
rassemblait
déjà
uneaudience
hétéro- l'orchidée.
Uneprofonde
affection,
visible
dans
ces lettres,
enarésulté,
cite.Lesartistes,
chercheurs
ensciences
sociales,
militants
politiques, etlerêveégalement
d'uncolloque Deleuze àCerisy,qu'ilfréquentait
philosophes,
venaient
glaner
desconcepts
pour
leurs propres
inventions, plucôtpourdesrencontres liéesà lapoésieouàlaGrèce antique.
à mais
nulnecherchait
àrendre
habituel
l'aspect
étrange
etintempestif AnneSauvagnargues,quant elle, faitpartie
delanouvelle généra-
d'une«pensée à voixhaute»dontl'impact,pour
les présents,
étaic tiond'enseignants-chercheurs
mentionnée plushaut.Elleaanimé
formidable‘.
Deleuze construisait
avecClaireParnet,
entreautres,
son pendantunedizained'années,àl'ENSdelarued'Ulm,unséminaire
inscription
dans
l'histoiredelaphilosophie.
Dialogues,
Pourparlers, extra-universitaire
surlapensée deDeleuze, etelleestl’auteurde
L'Abécédaire,
sontd'excellentes
voiesd'accès
à unepensée
dontles plusieurs
livressurDeleuze enfrançais (sanscomptersestraductions
flamboyances
posent
encoredenombreuses
énigmes. D'autant
que enanglais)
: Deleuze,
del'animal àl'art,Deleuzeetl'art,L'empirisme
l'attelage
avec
unnon-philosophe,
desurcroit
militant
politique
connu, transcendantal,
Aumoment ducolloque, elledirigeait
ledépartement
FélixGuartari,
continuait
defaireobstacle
àl'intégration
deDeleuze dephilosophie
del'Université
ParisNanterre,etparticipaitauxactions
dans
l'enseignement
deladiscipline
philosophique. administratives
demiseenplace
delacommunauté
universitaire
Paris
Unenouvelle
génération
d'enseignants-chercheurs
enphilosophie Lumières.Elleestunedesraresphilosophes françaises
àparticiper
adepuis
peuprislerelais,
notamment
àl'Université
deParis-Ouest- fréquemment auxrencontres
internationales
autour
de cette pensée.
Nanterreetà l'UniversitéParis8-Vincennes
à Saint-Denis,dont Lessuitesd’unelongue maladiel’ontempêchée d’avoir
la forcede
«l'espace
Deleuze»,oùsesoutiennent
lesthèses,
incarneferme- retravailler
àl’écrit
lerexte
desaconférence,quiportait
surl'écologie
ment unevolonté
decontinuité.
Ensoutenant
leprésent
colloque
de desimages,c'est-à-dire
surunenouvelle manièredemettre l'arten
Cerisy,
l'UniversitéParisLumières,
communauté
formée
parcesdeux rapportaveclesindividuations
sociotechniques
entenant compte du
universités,
leCNRSettreize institutions
culturelles
delarégion
Île rôlecrucial
ducinéma. Lesurgencesinternationales
nousont incités
deFrance,
l'abienofficialisé.
Letrioconstitué
pour
la direction
de àpublier
les actesducolloque
sans cette
contribution
novatrice etàen
cecolloque
Deleuzereflète
cettediversité
dumonde deleuzien.
Anne assumerlaconfectionentière
sans attendre
lecompletrétablissement
Querrien,
dontonpeurentendre
surles enregistrements
quien ontété denotre collègue.
conservés
lesinterventions
fréquentes
auxcoursdeDeleuze,
est une C'estenlisantattentivement
Deleuze
qu'AnneSauvagnargues
a
non-philosophe,
unesociologue
intéressée
parlesproblèmes
urbains
et rencontré
leslivres
deFélixGuattari;
pouranalyser
cenouvel
auteur
parl'instirution-école,
maissurtoutformée
parletravailencommun qu'estD&G,elle ainvitéAnneQuerrien
àsonséminaire
del'ENS,et
avecFélixGuattari
danslesmouvements
politiques,
etauCERFI, c'est
commeélargissement
estivaldeceséminaire,
devenu«Deleuze-
Guattari
»,ques’est
d’abord
construit
leprojet
decolloque
deCerisy.
3.Cesentiment
quetoutcommentaire
delapensée
deleuzienne
commence
par
trahirun secret,par« vendrela mèche»,ArnaudVillani l'aexprimédansLa guêpe 4.Unecollection
desesarticles
vient
d'être
publiée
sous
Levitre
ArtMachines
aux
etl'orchidée. éditions
Bloomsbury
auRoyaume-Uni,
8 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVEC
D'ELEUZE Introduction 9

à Aumême
moment,
après
avoir
participé
danscelieumythique
aux avancé
la fondation
desrencontres
dePontigny
erCerisy,
etbattu
colloques
Kafka,
Marie-Claire
Bancquart
elJames
Sacré,
Arnaud
Villani enbrècheparlaviemoderne, permetmagnifiquement
desemettre
proposait
àÉdith
Heurgon,
directrice
duCentre
culturel
international en retrait.Ainsi l'hétérogénéité
desparticipants
serecomposaiten
deCerisy-la-Salle,
l'organisation
d'un
colloqueDeleuze.
AnneQuerrien nouvellesconstellations.Ce colloque
a manifestement
étél'occasion
a proposéunesériedejournéessurlesgrandsdomainesquetravaillaient d'un«élargissement
».À l'exception
notable
delarencontre
d'Athènes
: Deleuze
etsesélèves
l'ouverturedelaphilosophie
aumonde,
lecorps en2015,D&G,ce «personnage
»constituant
l'«entre»deDeleuze
et
sansorganes,
lasubjectivité,
lamusique, lapolitique,
la technique, Guarrari’,
bénéficiait
d'une
très
faible
reconnaissance
danslesrencontres
Letitre
choisi
deconcert
entre
lestroisdirecteurs
enestrésulté
:Deleure
: internationales
anglophones.
Undesbutsducolloque
furderendre
plus
virtuel,
machinesetlignes
defuite.Lesétudiants
enthèse
dephilosophie consistante,
àcôtédeDeleuze
etdeGuattari,
certe
troisièmeprésence.
auxuniversités
deNanterre etdeParis8 ontétéle principalpublic Unesériededisparités,
sciemmentmisesenplaceousimpleeffet
dececolloque,tenudanslapremière dizainedu moisd'août2015, du hasard,estd'abordvenueconjurer
le risqued'unecélébration
Laplupartdeschercheursetenseignants dephilosophie
connuspour convenue,
voired'un«rombeau
deGillesDeleuze”
»,etdonner
à la
leur
travailavec
etsurDeleuze
n'éraient
pasdisponibles.
Onaretrouvé réunion
untourplusexpérimental.
Erquidit«disparité
»ditaussi,
dans
une
caractéristique
duséminaire
Àl'ENS
: une
assistance
francophone, lesillage
deSimondon,« disparation
».Carl'hérérogénéité
dugroupe
venant
deroute
laplanète
(Japon,
Chine,
Corée,
Australie,
Brésil,
États- desintervenants
lui-même semblait
pouvoirdiviser
le groupeendeux
Unis,Canada,
Royaume-Uni,
Suède,
Autriche,
Suisse,
Portugal,
ltalie, sous-groupes,
qu'ilserait
tropfacile
decaractériser
pardesoppositions
: France).
Lacommunauté
desdeleuziens
grecsetinternationaux
avait dichotomiques
jeunesvsplusvieux,
admirateurs
deDeleuze
vsanciens
tenucolloque,
fin
avrildelamême
année,
àAthènes,
sous
ladirection amis,
deuxième
ou
troisième
génération
decommentateurs
vspremier
deConstantin
Boundas,
etsousletitreDeleuze
andGuattari:refrain cercledepionniers,aventurés
dans
l'étude decetteœuvredifficile
andfreedometenfrançaisLesritournelles
delaliberté. sanslesecours
d’unelittérature
secondaire,
«relève
»parfois
timide
Lesactes
présentésicireflètent
tour
à lafoisl'unité
etladiversité vsconférenciers
expérimentés.
Si,àcegenre
d'oppositions,
Deleuze
descommunications rassemblées
parcecolloque.On peutdirequ'il réservaitsesmotslesplusdurs: «groscommedesdentscreuses »,
s'agit
d'une
disparationausens deGilbertSimondon: chaque
vision « filetsquilaissentpasser
rouslespoissons
»,etc, rien4priorine
proposéedel'œuvre deDeleuze estdifférente,
prendappuisurun
pointparticulier,
mais l'ensemble,
aimantéparcette
œuvre,ypuisant
saforce,
donne
de l'œuvre
unevisionfidèle,bienqu'ellereste
nécessai- «Laféluredutemps »1et2.6"vidéo : Tarahumaras 2003, «Lafélure dutemps »,3et
4.7°vidéo: Tarahumaras 2003,«Lafêlureduremps »,5.Lesautres soiréesvidéo ont
rementincomplète.
Leprinciped’unehabitation
àdemeure,pendant euLesthèmes suivants
: lesproposdeFélixGuattari ecladanse butoàLaBorde, filmés
toute
la durée
deladécade,pour
la plupart
desintervenants
etpour
les parFrançoisPain;L'Épuisé deSamuel Beckettmisenscène parMarcoCandore: les
organisateurs,
afaitpartie
desdispositifs
quiontfavorisé
leséchanges, agencements créatifs
etlesassemblages collectifs
àBarcelone, réfléchis
parGabriela
grâce
auxpromenades
etauxrepasprisencommun,grâceaussiaux Berti,
TaniaMouraud, artisteinvitée,àanimé unesoirée surl'ensemble desonœuvre.
Enfin,roujoursensoirée, CarloBengio ainvité
àpenser ressemblances erdifférences
soirées
vidéo
danslegrenier
duchâteau”.
Leprincipe
deladécade, delapensée aveclaprise dedrogues.
6.«D&G »engage larecherchedansdemultiples directions,où«pointes de
5.L'unedessoirées
magiques
deladécade
aétéconsacrée
auvisionnage
d'extraits dérerritorialisations
»,expression crééepar
Le andempourdésigner laproduction
defilmstournésparRaymondeCarasco
avecsoncompagnon RégisHébraud. du mondecommemouvement, pourdéfricher denouveaux territoires.
Ledark
La soiréeétaitprésentée
parcedernier,Cesextraitsétaienttirésd'unelonguesaga
Deleuzesurlequelonessaie d'attirer
notreattention depuis lesÉtats-Unis netient
paslaroute.
deseptvidéos,sousle cirreFilms Tarahumaras,
évoquantunetentative derevenir
7.Cequ'aégalement réussi
àconjurerl'ouvragedumème titre, sousladirection
surlestraces
duvoyaged'Artaud,Nousavons vudetrèsbellesimages,notamment
deYannick Beaubatie(publié peudetemps aprèsledécès duphilosophe, auxéditions
dansCiguri98,surlesdansesdupeyorl.Nousnepouvons iciqueciter,pourceux
LesMillesources,
donc lesiègeestprochedelavillégiature
deGillesdans leLimousin)
quecelaintéresserair,
cestrèsbelles
vidéos
: 1"vidéo: Tarahumaras78;Turuguri:
parlarichesseetladiversité desinterventionsettémoignages (Tombeau deGilles
Tarahumaras
79;Los
Pintos.
2°vidéo
: Yumari
84;LosPascoleros
85.Yvidéo:Artaud
Deleuze,
2000).
etlesTarahumaras
87.4°vidéo:Ciguri98:Ciguri99.5°vidéo: Tarahumaras
2003,
10 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE Introduction 11

laissait
présager
delafaçondont,aufildesjours,secomporterair
le l'attitudedepensée,versle faire,l’agir,leproduire,leconstruire,
groupe«colloque
». Etcen'était
pasessentiellement
parce
quenous l'expérimenter
? La premièrepartiedelacommunication d'Anne
avionstousenviequeladécade
réussisse,
etqu'entantque
directeurs, Sauvagnarguesà repris ces interrogationsen posant la question
pourdesraisons
etpardespratiques
différentes,
nousfaisions
preuve d’unstyledeleuzien.
delaplusgrande
bienveillance
etd'une
écoutedisponible,
capable
de Plus
profonde
estladifficulté
«interne
»,venant
dudésir
d'appliquer
désamorcer
lesrares
situations
d’agressivité,
queladécade
a effective- aumondecomme il valesformulesdecesdeuxexpérimentateurs, de
ment
obtenu
pleine
réussite.
À l'expérience,
il estvitedevenu
évident ces«aventuriersdelapensée pratique».Et c'estungrandréconfort,
quecegroupe allaitnonseulement
«profiter»desdifférences,
maisen aupremiercoupd'œil,devoirseréunirdejeunesetmoinsjeunes
quelquesorte,s'ennourrireten«vivre».Cesjournées n'ontpasété intelligences,
lucidesetpénétrantes,
attachéesà«défendre
etillustrer
»
seulement
l’occasiond’unéchangedesavoirs,
ellesont« respiré
»elles
, cesdeuxauteurs,
loindesquerelles
quiontprésidé
àleurréceprion
ont
été et
resterontavanttout uneexpériencedevie. en France.Tous lesparticipants
decettedécade,
danslesdomaines
Nousvoudrions
insister,
àl'occasion
decerte
décade,
surdeux lesplusvariés(histoiredelaphilosophie,
art—etplusprécisément,
pointsconnexes
: lajoied'appartenir
àcequ'onpourraitnommer cinéma,
poésie,
peinture-architecture,
musique,
design,
danse,
psycha-
mouvementou courantdeleuzo-guattarien
(dont
il fauts'empresser nalyse,
anthropologie,
ingénierie,
politique),
ontvécu,
individuelle
dedirequ'ilesttoutlecontraire
d'unechapelleoud'uneécole), ment etcollectivement,
larugosité
(ausenspropre
:lenon-lisse)
que
etenmême remps cequel’onpourrait
nommerla difficulté
d'être pouvait comporter unenouvelle
définition
delapenséelorsqu'elle
fair
deleuzien.
On seconvaincra, enlisantlesconférences,
queles intégralement duthéoriqueunepraxis,
lorsqu'elle
prend ladimension
intervenants
nesesontpasexprimésd'abord
surDeleuze,Guattari, virtuelled'unréelqu'enrèglegénérale on«ralentit
»etépuise en
ou D&G, maisendeleuziens,
autrement
dit selonun ethos,un actuel,lorsqu’après
lesdécouvertes
deSchopenhauer etdeNietzsche,
comportement
global
oùpensée
etviesontintimement
liées.Ainsi elles'engage
dans lesvoies
deWhitehead,etsous
chaquereprésentation,
étaitcontourné
le risquedu commentaire
infini, ainsiétaitintro- voitgrouillerlefourmillementdes
forces,sans
selaisser
«éborgner»
duitel'exigence
d'une
production
propre
à chaque
intervenant,
en parlesformesdéterminées.
référence
àsonexpérience
singulière.
Lerisqued’hérérogénéité
était Il yadoncuneprofonde unité
dans cetensemble
deconférences.
conjuré
partiellement
parl'appel
auxdoctorants
deNanterre
etde Uneunité
dans
etparl'hétérogénéité,
unehérérogénèse
enacte.
Àce
Paris8 pourouvrirlesdiscussions
etapporterd’autresréférences. pointmême quela ventilation
decestextes risqueà lafoisd'appa-
Onpouvait alorsexpérimenter
pardifférence
cequec'estqu’«être raître
complexeet arbitraire.
Onnepouvait procédersimplementpar
deleuzien»(unefoispourtoutes,oncomprendra que
cetteexpres- domaines,enencourantlereprochejustifié
dejuxtaposition.
Onpouvait
sionne
fair qu'abréger
la réalité
complexedudeleuzo-guartarisme), certes
feuilleter
par«gestes
».Maisensant que deleuzien,
chacun
fait ici
etcomment la fréquentation
compréhensive decerteœuvre
à trois sensiblementlemême gestedetâtonnement expérimental.
Enpremière
têtes
(Deleuze, Guattari,
D&G) faitaborder lesproblèmes
diffé- approche,onaurait grosso
modo affaire
àtroisgrandes lignes
deforce :
remment, danslarecherchedugestedeleuzienquiviendraic
tracer «connecter lesmultiplicités
sensibles
»,«construire lesdiagrammes
unenouvelle
perspective.
Si MichelFoucaulta pudire: «Ce siècle desdevenirs »,«prendre soindeslignesdefuiteecexpérimenter ».
seradeleuzien
»,onpeutsedemander : «comment peut-onêtre Cedécoupage correspondauxdifférents
moments d'intensitéd’une
deleuzien
?»Comment s'abstenir
de«juger »?Comment cesser
d'être même démarche, décrivant
le travail
deleuzo-guattarien.
Certainsvont
inféodé
auxdichotomies,
si habiruelles
etmultiformes
qu'onneles insister
surles«multiplicités
»etsurlesmanières delesconnecter,
voirmémeplus*?Comment cesserd'interpréter,
etbasculer,
dans dansunplanplutôt horizontal
etdefaçon «rhizomatique »,alorsque
d’autress’acracheront
àcomprendre comment les lignesdeforcese
8.Unedesdifficultés
d'être
deleurien
vientdeceque,dansletexte
même
des conjuguent dans unemachine abstraite,
selon undiagramme suscep-
deuxauteurs,
il n'estpasrare,mêrnesicertetendance
estaussitôt
réprimée
etcorrigée, tibledeguider lareproductiond'autres
occurrences dumême objet,
d'apercevoir
Les
traces
d'unedérive
dichotomique.
12 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVEC
Deisuzs introduction 13

tableau,
piècemusicale
oulittéraire.
L'idéedeprendre
soin"deslignes être
aussi
grandement
remerciée
pour
l'aidefinancière
qu'a
apportée
à
defuiredansl'expérimentation
s'adresse
davantage
Àlapostérité
de l'organisation
ducolloque
làcommunaute
universitaire
ParisLumières
D&U: leurtravailàétélu commeuneinvitationà partir
À l'infini. quirassemblelesuniversités
deParis-Onest-Nanterre,
oùelleestprofes-
mentlointainalorsque
les lignes de fuitepeuventsuivredeschemins sure, etl'Université
Paris8-Vincennes
ÀSaintDenisoù ÉricAlliez
infiniment
petits,Àpréserver
du rouleau
compresseur
capitalistique. àpumobiliser
également
sesdx torants
Lapertinence
etlavitalité
AL+àsouvent
unemanière
pseudo-deleusienne
d'entourcher
leréel decesdoctorants,
invitésà sefaireLes
discurants
desconférences,
ont
commeabolition.Parvestêtesdechapitre,qui peuventsembler
à fair merveille.
première
vuetrèsproches,
nousentendons
marquer
les étapes
d'une
démarcheproprement deleuro-puattarienne, Noussommes
convenus
deprxéder
slonleschapitres
suivants
:
Nouscomprenons quelarevoupe
portetoujours
trace
d'unecoupure/ 1) faire vaner lesconceptsdeleuzo-guarranens
dansleur évolution;
Aux.L'hesitation,
l'embarrasd'unclassement
desinterventions
dans 2)critiquer
lapensée
representative
enconnectant
lesmultiplicités:
descases
estenfairunerichesse,
unechance,
etle«pointderebrous- 3) tracerdesdiagrammes:4) « prendresoin»deslignesde fuite;
sement
»,unejoie.Oui, unejoie,d'autantplusqu'enfeuilletant
les 5}expérimenter unemicropolirique.
résuméssuvvinetsde cestextes,on constateque, si chez Foucault Dansnotrepremier
«hapitre.
CintiaVieiradaSilvaanalyse
le
fonctionnait
bienuncouple
visible/dicible,
il faudrait,
danslecasde concept
dedésirenleconfrontant
àSpinoza.Fileremarque
quele
Deleuze
etGuattari,insister
suruntroisième
terme: visible/dicible/ refusdeleuzien
deconsxderer
kedesircomme
manquant,
estreprésenté,
epcrable.
Agencements machiniques
etagencements
collectifs
d'enon- chez
Spinoza.
parladistinct
nette entre
deux
termes,
cpidites
d'un
ciation
admettent
untiers,
qui—etc'estlaparticulière
lucidité
de côte,
le faitdeperséverer
danssonêtreàtravers
larelation
auxobjets
RodrigoGueronquedelemontrer
—pourraitsenommer» pointde partiels.
renvovant
àl'essence
même duconan.tandisquedaiderrum,
subiativation
»,prèvisement
exposéàl'expérimentation
perilleuse
des comme
l'indique
sonerymologe
(sortir
delafascination
desastres,
possibles
decequel'onvoiterdeceque
l'on dir,enconnectant
passé suderal.
denoteun regret.uneperte.unetristessedueau manque
etfucursouslemodedel'usôn. Ce qui implique,etbeaucoup
l'ont delatocalité,
brefcemanque méme queDeleuze entendsoustraire
senti.unprofilage
desconcepts
deleuzo-guattariens
danslaperspective audesir KuniishiUno retrace
avecbriol'evolution
du conceptde
deleurdevenir-acre.
Redétinition
quinedoitdoncpasêtrecomprise «corps
sans
organes
».àtravers
Artaud,
Proust,
Lal'erre,
l'œut
intense,
comme appartenant
au lexique.
mais commeunévénement
praxique, etlecerveau
lui-méme.
devouvrant
+uneconstellation
»autourdu
danslavisee
(ersans
doutemème la«voyance
+,DorkZabunyan
le CsO.Fredrika
Spindler.
dévlinant
lessituations
danslesquelles
se
rappelle)
d'une«micropolitique
+deleuzo-guattarienne. rencontre
chezDdleure etGuattani
leconcept d'amitié,
sedemande
Avantd'envenirà ladistribution
ducontenudecevolume,
il est cequepeutbienêtrel'amidéslorsquel'idéedeturalitéindivise,la
importantdeprocéderàdesremerciements.
Lechâteau
deCerisy- recherche
du consensustusionnel.
nepeuvent lecaracteriser.
I}sera
la-Salle.
cadresans
egal
decolloques
etdedévades,
prérant
àla
fois àla doncplutôtàrechercher
dansLirencontreelle-méme.
devenant ainsi
méditationetauxéchanges.
dans
les salles
deconférences,
pendantles unevenement d'ordremicrophysique.
une+humeur ».Ainsiserévèle
repas.
dansleparc.
le soirpendant
les soirées
àthèmeerlesmoments kesenssubiectivant
deLadesubjextivation.
DanielaVoss,appuyant
dedérente
autourd'uneguitare,doitévidemmentunegrandepart sontravail
surleBarondeDeleuze.
insiste
sur
le Fait
quelediagramme
desamagieauxefforts
d'ÉdithHeurgon,desafamille,
etdel'équipe +produit
».Il nesecontente
pasd'evider
etdedetruire
lareprésenta-
duCentre
culturel.
AnneSauvagnargues,
quiàinitiécecolloque,
doit tion.
il creedenouvelles
relations.
denouvelles
connexions agençantes,
unenouvelle optique.oùl'œilestcapable
de«roucher » (haprique).
PeterPàlPelbartremarque fortement
qu'iln'estjamais
intéressant
de
9.« Prendresoin+renvoieiciauxdéveloppementsrécents.
àl'initiative
des
féministes.
del'éthique
du«care»,formulee
parFélixGuattari
comme +ecmsophie».
critiquer
unconcept.
mais
qu'ilfautdécouvrir
pourlui denouvelles
conjuguant
lesoindel'envininnement,
desrelations
sociales
etdeLapensee(ét.Felix fonctions.Ainsiduconceptdesubiectivation,
quel'auteurdécline
Guartan,Le nouevologus.
Paris,Galilée.1979). selonAgamben, Simondon.
Deleuze
etGuartari,
pourterminer avecla
14 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECD'ELEUZE Introduction 15

question
lucide: «Àquoibonselibérer
dusujet
sic'est
pourretomber desimages
figées,
mais
desnœuds
deforces,
desimages-devenirs,
des
dansdessubjectivations
nondésubjectivantes?
+Pourterminersur chemins historico-politiques
guidant
versdenouvelles
voies.Plusieurs
cæchapitre,
dansunerechercheprometteuse,
MaëlGuesdon metsa illustrations
filmiques,
avec commentaire,
permettent
d'entrevoir
ceque
pratique
demusicologue
etladiniquepsychiatrique
auservice
d'une serait
uneethnologie
débarrassée
delacompulsion
dereprésentation.
réévaluation,
àLalumière
deD&G,duconcept
de«stéréorypie
». Abrahio
deOliveira
Santos
faitpart,
àpropos
méme
decepeuple
des
Nous
avons
ditplushaut
quecritiquer
unconcept
n'est
pasutile. saints,
desesconvictions
intimesetvécues,
etmontre
l'importance
du
Car il peur
étre, soitunedéfinitionsimple,soitun +motd'ordre» riteCandomblédansleBrésil
actuel,
nonpourajouter
une
religion
dissimulé,
soitunensembledeconnexions
dontl'entrelacement
n'apas à cellesqui existent
déjà,maispourétablirunesoliderêtedepont
encoreétécorrectementmisàjour.Onpourrait direqueleconcept, del'installation
desNoirssurleurterre,deleurrésistance
etdeleur
suffisammentanalysé,
et largementdéployé
chezDeleuze etGuartari, guérisonensuivantlechemin desAncêtres, guérison
àlaquelle
ses
joueLerôleheuristique
eteffectif
queLamétaphorejouechezNietzsche, proprestravauxparticipent
activement.
Jean-CletMartinreprend,
en
comme surconcept.Quest-cequeLaphilosophie
?enoffreunebelle partantdurécitapparemmentmineur,dansleMénon dePlaton,deLa
illustration
avec leconceptdecogito.
«Critiquer »unconcept,
une duplicationducarrécomme problème vécuparle«petitesclave
»,
meute d'élémentsconceptuels,
ausensoùlacrisis
estdiscernement
qui sontravailtoujours
approfondisurla«variétériemannienne
»,qu'il
sépare
lesfilsd'unentrelacs,
veutdiresortirdelapensée
représentative, précise
icicomme«geste»,nonseulementmathématique
maisengagé
decequeWhitehead
appelait
«representationnal
immediacy
»,pour dans
la vie,desorteques'ouvrelaperspective
decequ'ila nommé
l'opposer
àLa«causal
efficacy
».Autrement
dir,entrer
dans
la logique «plurivers».TatsuyoHigakidéclare
d'embléequ'ilestabsurde(et
del'événement,
vraverser
l'espace
quisépare
unthéâtre
d'uneusine.Et, c'est
bienuneconséquencedelasurévaluation
delareprésentationalité)
pour
alleraudétail,
+connecterlesmulriplicités
singulières
»,revient deséparerl’homme desatechnologie.
Remarquant quelesnomades
àLaisser
couler
lesAuxdetellesorte
qu'entre
lespoints
remarquables typiquessont,chezDeleuzeetGuartari,
lesmétallurgistes,
etquela
puisseseproduire,
soudainement,
etselonlemodelesimondonien de «science
mineure» traite
delafinesse
etdelasingularité
delamatière,
Laidisparation,
unerencontre
de+prise»,d'oùséchappeun+tiers», ilconnecte
l’idéedephylum machinique,
devieinorganiqueetdecorps
l'événementdenouveauté.
Quelques-uns
denosintervenants sesont sansorganes,
danslemétal,nommément
l'or, absolument
ductileet
lancésdanslaproblémarique
decesecond chapitre.
SilvioFerrazet permettantaussi
lesaccumulations
duCapital. Lemétalestuneviede
Gustavo
Rodriguës
Penha posent
laquestion
:+Qu'est-ce
que
travailler lamatière,
etlesmétallurgistes,
une«bande »secrète.
Lesandroïdes
directement
surdesforces
danslacomposition
musicale?
- Danscerte delamodernité prendraient,
in silico,
lerelais
decesconnexions.
visée,laritournelle
organise
Laconnexion
desdisparates,
lamusique Delaconnexion desmulriplicités,
traduisant
etinduisant une
devient+machine à moduler»,constituant
uncontinuumde
flux sortiedelareprésentation,
découle toutnaturellementletracédes
d'énergie
enrésonance
avec
uneboite
sonore.
JoséGil,entre
philosophie diagrammes.Depuisdespratiquesetdesdomaines fortdifférents,
etuneethnographie
dontil sedémarque,
voirl'homme
deDeleuze
et d’autres
intervenants
s’ysontexercés.
Il s’agit
parexemple,
enmusique,
Guattari
traverséparunealogique
ressemblant
parplusd'unpoint
à dePascaleCriton.Sonintervention
faitlepointsurlerapportdela
lasorcellerie.
Il relève
précisément
les occurrences
decedomainedans musique
er del’expérimentation.
C'estencompositricequ’elle
décrit
lecorpusdesdeuxauteurs.
Selonlui, laréférence
decette«logique sesdernières
recherches.
Toutd’abord unepiècepourinstrument
sorcière
»quiconnecte
lesmultiplicités
estàchercher
ducôtédecequi (violon) accordéen seizièmesde ton, détaillantce qui en résulteà
constitue
lacohérence
erl'originalité
totale
del'Éthique
deSpinoza.
Le lafoispourlacompositrice
et
l'interprète.
Ensuite,
uneétonnante
centre
decetteatmosphère
apparait
êtrelecorpssans
organes.
Barbara etricheincursion
danslamusiqueinaudible
ànosoreilles
d'enten-
Glowczewski,depuis
unelongue pratique
del'anthropologie,
analyse dants,maistrèsbienperçue
parceuxquisontprécisément
sourds et
lestotemsdes«peuples
dessaints»auBrésilerenconclutqu'ilne malentendants.
Ici,lamusique«s'écoute
»par
la vibration.
Elleest
saurait,
danscesrotems,
êtrequestion
d’idolätrie,
carcontrairement «l'inaudible
quinepeut ques'entendre
».Un
très intéressant
diagramme
àl'idéequelesévangélistes
veulent
imposer,
les totems
nesontpas estmontéparTatiana Roque.Partant
d'uneprésentation
durôlede
16 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE Introduction 17

l'axiomatique
enmathématiques,
l'auteur
explique
pourquoi
il est l’undans
l’autre, parierpour
le chaosmos
entantqu'il«prendsoin»
pertinent,
chezDeleuze
erGuattari,
depostuler
uneaxiomatique
du duchaos,esquiver,
dansletemps aïonique,
leprésent
pourconnecter
capitalisme.
Certeaxiomatique
n’apaspour
but d'énoncer
les loisde directement
passé
etfutur,
pliertoute
représentation
pour
enfaire un
l'économie,
maisdemettre
lesfluxdécodés
àdisposition
d'une
conver- acteetuneforce,voilàpourtant
des gestes
assimilables
àdes«actes
tibilitégénéralisée,
cequi«retourne
»lesruses,
pourtant
maîtresses
en derésistance
».C'estsurcetaxequeRaymond
Bellourchoisir
de
retournement,ducapitalisme,
et constitue
nonseulement
unactede réfléchir
enseréférant
à lacélèbre
conférence
deDeleuze
sur
l'acte de
résistance,
maisunterrain
delutte,
envuedeconnecter
différemment création.Bellourvoit unecontaminationà l’œuvreentrecequi touche
à lesflux.Rodrigo
Guérondéploie
untravail
riche,
quiaurait
puaussi l’art etcequitouche
à laphilosophie,
desorte
quelaphilosophie
bienprendre placedans
le chapitre
surl'«agencement
».Portéparla aussidevienne
art,
actederésistance,
et,selonlaformuledeMalraux
distinction
entreformedecontenuetformed'expression,
et cellequi et toute
l’œuvre de Proust,résistance
à lamort.C'està la mort égale-
endécoule
entre
agencement
machinique
etagencement
d'énonciation, mentqu’AnaGilconsacresonintervention.
Comment une
ligne de
l'auteur
érablir
diagrammatiquement
la relation
entreagencement viesedétourne-t-elle
delamort,quisemblen’être
riend'autre
que
collectifdénonciation, point de subjectivationet régimede signes. l'arrêtderoutebifurcation
et,enconséquence,
detoute
ligne defuire?
1!montrequecetterelationadmetau départl'intériorisationd'une Onsait également
que,dans
routefuite,
réside
unetangence (peut-on
derte.PourGregoryFlaxman,
la perspective
picturale
représente
une rappeler
quec'est
delatangence
queRiemanntirait l’idée
devariété
?)
architecture
delapeinture.
L'importanceducadre estprouvéepar constanteàlamort.Dansladifférenceentrelerienetle«presque
lefairquec'estl'absence
decadre quirendintolérable
latransgres- rien»seglisse
lepointdevuesiattentif
au«micro»deDeleuze
erde
siondugraffiti
et dusrreet
art.L'imagecadréedécouled'unnouvel Guartari.
NadiaVadori,
habitée
parlanotion
mise
enlumière
parle
agencementéconomique dupeintreetdelasurface,coordonnépar + poète
GarciaLorca: leduende,
innove.
Elleétonne
d’abord
endébutant
laperspective.
Permertant
àtoutepeintured'exister
dansunespace saconférence
parunevraie«performance»oùtouslesmotsseront
quelconque,elleaccompagne
lesdérerritorialisations
ducapitalisme, mobileseractifs,
induisant
unevraie
danse
surplace.
Ellechéorise
Gcorges
Amardécritsonmétierd'ingénieur
dehautniveaucomme ensuite
enexposant l’idée,
mise
enpratique
quotidiennement
dans
traversé
etirrigué
parl'exigence
deleuzienne
d'«inventer
denouveaux sesvidéosvisibles
surle«réseau
»,d'«uneminute
dedanse
parjour
»,
concepts
», exigencedontil faisait
lacondition
pour
faireparaître
un sans
volonté
d'esthétique,
maispour
diresimplement
qu’on
estvivant
ouvrage
dignedecenom.Oncomprend
enefleràquelpointlanotion et«ensemble
».Énergie
communicarive
puisque
Eugene
W.Holland
de«transports»,surlaquelle travaille
Amar,adûétretravaillée
et aupiano,etArnaudVillanidansunpoème,
tenteront
d'accompagner,
repensée
àlalumière delanotion dediagramme.Vincent
Beaubois unpeuplustard,unedanseimproviséedeVadori,
sanstémoinsni
rappelle
l'importance, danslasphèredudesign,
delaÆfochschule
für préparation,
création
«surlevif».Florent
Gabarron
Garciarenouvelle
Gestaltung
delavilled'Ulm,Il metenévidence
lanotion
de virtualité l'écoute
desénoncés
etprésente
uncasclinique,
undélire
surlesNoirs
à dansla«chose
enconception
»,cequi rapproche
cetterecherche
de etlesDjinns.Dudélirela tristesse
profonde,
onvoitprogressivement
celles
deDeleuze
etGuattari,
etinsiste
surl'importance,
dans
ledesign leliendelamaladieavecl'appareillage
institutionnel
infantilisant,

contemporain,
deladéfinition
du+signe»qu'àpartirdeHjelmslev apparaîttoutelacontradiction
entre
l'institution
et
le clinicien,
etles
etPeirce,D&G mettent
enplace. voiesexpérimentées
parlepsychanalyste
pour
fairesurgirlaconscience
Nousavons
réservé
unchapitre
spécial
auxidées
de«prendre
soin libératrice
dulienentre
tristesse,
délire,
erdesviolences
detype colonial,
deslignesdfuite
e »et«expérimenter
».Appliquerle«prendre
soin » ayantentraîné
lamortdelamèredu patient.
AnnitaCostaMalufe
(take
care)
auxlignesdefuite,
onaunpeudemal,
tant,lorsqu'on
se partdel'évidenceressentie
d’une
puissancepoétique
danslestextes
de
sentdeleuzien,
onperçoit
celacomme
naturel,
devoirencore
toutela Deleuze.Ellefaitcomprendre,
parBeckett,
commentLe«vieuxstyle
»
force
d'effraction
etderésistance
que
certeidéecontient.
Maisparier doitêtredépassé, etassocie
soneffortpourmalmener
et épuiserla
pour
la vitesse
infinie,
aussi
biencomme lenteur,
pour
l'alernance langue,
la «fairefuir»,àunetentative
plusgénérale,
consistant
à faire
constante
et l'imbrication,
la«suspension
»del'actuel
etduvirtuel surlesmots
l'effortemblématique de«dépasser
lareprésentation
».
18 AGENCER
LES MULTIPLICITÉS
AVECDeLeuze Introduction 19

AndrewGoffey,aprèsavoirsouligné
chezDeleuze
etchezGuattari représentation
qu'ilsinduisent
? Sic'est
toujours
d'unpointdesubjec-
l'importance
del'institution,
montrecommentle»transfert
»psycha- tivation
quenaitunsujet
dénonciation,
uneméthodologie
deLarupture
nalytique,
entantque+conceptpratique»,peutêtreapprofondi
ex estnécessaire,
qui puissefairepasser
delafonctionénonciative
à la
«modulé»parlatransversalité
guattarienne.
ArnaudVillanidécide fonction
existentielle.
Frédéric
Rambeau distend
laperversion
desa
quel'expression+vrai-fuyant
»pourrait
utilement
fairesentirlelien première
analyse
deleurienne.
magsstrale,
surSacher-Masoch.
Onsaute
entrelafuireetlavéracité,
s'opposant
dèslorsàtout+faux-fuyant ». del'impasse
ducorpssexuéà|émergenced'uneffetincorporel,
de
Maisapparaissentdeuxénigmes:pourquoilapoésie,
dontleconcept sortequesecombinentlamatéralité
dudiscoursetl'immatérialité
estfinement
sentietdéployéparDeleuze,n'apasdonnélieuà un du sens.Il enrésulte
quelaperversionbascule
delàviesexuelle
dans
grand ouvrage,comme pourlapeintureetlecinéma? Et pourquoi, Ja vieéthophysiolagique.La dissex
rationd'avectoutelogiquede
alors
quele +combat »er«l'athlétisme
dubébé »deleuzienscoïncident négation vadepairavecunedescriptiondeLànatureparbrfurcations
avecl'intuition
proto-grecque
dusymbolon, vraiemachine deguerre componctives.
Ce qui, dansl'associationde Làbeautéstupéfianteet du
contre ledichorome,Deleuzeméprise-t-il
lesPrésocratiques,
enles péril,généralise
laperversion,
annule
sonaspect
deruseméchante,
faisantpasser
pourdeshommes préhistoriques
sortantahurisdeleur etla retourneenprofondepmirivité,pleinedepossibles
politiques.
grotteenfumée ? Valentin
Schaepelynck
revisite
Ladisrincrion.
essentielle
chezDeleuze,
On devine quecetterecherche sivariéea toujours,deprèsou entre« lois- et+institutions
+.Parcequelle impliqueun corps,un
deloin,côtoyé uneexpérimentationmicropolitique.Nousavons étreensemble
defait,etunvecu,
l'institution,
«omme
chezCiuatrari,
cependantréservéàundernier
chapitre,
sousletitre«L'expérimentation continuedeporterunepotentulitéremlunionnaire,C'estcequi fait
micropolitique»,desconférences
oùl'engagement derypepolitique sasupériorité
surlaloserlecontratL'auteurrétléchit
dunesurune
étaitplusquesous-entendu. AnneQuerrienraconte sarencontre instirutionnahisation
non-etatique,
ou marquent laconnivence
etLa
avecleDeleuze deDifférence
etrépétition,
etcomment elle aéprouvé différence
d'avex
Les
thèses
de(lastres.
etil entaitl'experience
surla
concrètement
la pertinence
desacritiquedelareprésentation
dans
les psychothérapie institunonnelle Eugene W. Hollandterminera cette
impassesdumouvementétudiant
desannées
1968. Lareprésentation tentative,forcément réduutrue. deresumerenquelques lignesl'etlurt
légitime
larépression
d'énonciations
minoritaires.
Lacontestation
de patientd'unpenseur. Îl poursuit3 retleuon,objetd'unlivrerécent,
cettereprésentation,
enphilosophie
etenart,devraitconduireàde surla+citoyenneté nomade*+ercomplete sonanalyse entravaillant
nouvelles
formesd'expression
politique.
DorkZabunyan,dansun surdescitoyens nomades auseindesinstitutions existantes Et,àcet
texte
debelle
écriture,
analyse
l'immersion
dans
les images,
consentie cer. il s'appuie surl'idéealhusserienne J'+ appareils ideulogiques
etencouragée
parDeleuze,
envued'un« retournement
»,propreà d'État».constituant lesuxetparsnéerpellation
(selonlatormulerestée
un»artdecontrôle
»qu'ilappelle
desesvœux,
etoùil décèle,
plus célèbre du +he,vousla-bas'+1à Laquelle il ajouteun prxessusde
qu'une
vision,
une+voyance»,ouvrant
àunenouvelle
conception
de - sollicitationgrautiante + 5:l'autonieduGrandAutresymbolique
l'apprentissage.
C'estauximages égalementqueseconsacreMariqian s'estdeplacedetaçonininanente dansdesprocessus materielsetdes
Ahouansou. Sonimplication déterminéedanslesluttesraciales,
sa agencements inttuuwonnels. Lisubjenivité
numade engageedansdes
solideinformation
sur
les séries
télévisées
(notammentautourdturavail institutionsdeperndra de»3capauite,uneturmede«voyance »,detirer
deShonda
Rhimes)
etlacommunication
#nderground,
luipermettent parudesevenements sngulienquecomutuent leslignesdefuite.
dedéployer
despropositions
importantes
pourun retournement
du Anne Sauvagnargues.
»ot attahec.aux<ôtedesdexturants
de l’aris
pouvoir
télévisuel.Prochedecethème,VivianaLipumamontre Nanterre
etdePanis
8,àanimer
lesdiscussions
quitraditionnellement
fortement
que,pourunestratégie
médiatique
minoritaire,
il n'existe
pasdesubjectivation
indépendante d'unordreétablid'assujettisse-
16 Untheme, sutdutenpassant,
quirassemble
lesdeuxsensduradical+mem-
: ment.
Si lessociétés
d'information
etlessociétés
depouvoirrelèvent engrec,dontDiclcuse
tabeaucoupdeça nomed'unste. Lalosquidélimite
du mémediagramme, quellessontalorslespossibilités
de rompre MENTON, Ne DCentmom. vigne dumatnomade, quilasseletroupeau
avecla tyrannie
desschèmes sensori-moteurs,
et l'accentmissur
la divaguer
dansunepture.
20 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

suivent
les communications
àCerisy,
et surtout
à forcer
àlaprécision
desconcepts,commedanstoutesonœuvreécrite.
Hresteàredire
combien
cette
décade
s'estrapprochée
d'une
expéri-
mentation.
Non paslacélébration
deDeleuze
etdeGuattaricomme
ancêtres
emblématiques,
mais
aucontraire
comme laréalité,
parl'effet
de
leurpensée,
delatransmission,
deproche enproche, d'un«courant »,
d'uneatmosphère,
quecaractérise
trèsbienl'imagedeleuziennedela
propagation
d'uneflamme
lelongd'uncordonPickford,enattendant
quecela«explose
».Nousavons
baigné
dans
cette
ambiance
heureuse
etexcitante
des«événements
singuliers
»,des« rencontres
»etdes
«fuires
»quelapensée
deD&G libère,
etcontinuera
depropager. FAIRE VARIER LESCONCEPTS
QueCerisy,ecrousceuxqui le fontvivre,soientencoreremerciés
d'enavoirétél'élément
propagateur.
Cequenoussouhaitons
aussi
à
celivre,quienportelatrace.
Un seulou deuxdésirs?

CINTIAVIEIRADASILVA

Letitredecetexte, comme tousleslecteurs


deMilleplateaux l'ont
déjàcompris,faitréférence
au
titre dudeuxième plateau
«1914 —Unseul
ouplusieursloups?». Enunpetitnombre depages,
Deleuze etGuartari
achèventcequ'ilsavaientcommencé dans L'Anti-Œdipe,endéfinissant
lerôledudésirdansunagencement depures multiplicicés
substantives,
libérées
delamédiation dessynthèses d'uninconscient
encore attachéà
unkantismerésiduel.Il s'agissait
dedéfinirlessynthèsesparlesquelles
s'effectuait
laproduction désirante, ainsiquel'usagelégitimedeces
synthèses,
enpassant parladénonciation delapsychanalyse pourleur
usage
illégitime.D'unecertaine façon,«Unseul ouplusieursloups?»est
untextedetransition,parcequeDeleuze erGuartari
s'yatrachentencore
àcritiquer
laconstellationnotionnelleautour d'Œdipe. C'estaussiune
dernière
lamentation
surcequelathéoriefreudienne
auraitpuêtre,si
ellen'avait
pasétésipressée
d’accommoder leséclatsdesmulriplicités
misesenjeudanslesévénements
désirants
souslatutelledelafamille.
Comme disent
DeleuzeetGuattari
dans lapréface
de
l'éditionitalienne
deMilleplateaux,
larencontre
avec«l'homme auxloups»

constitue
notreadieuàlapsychanalyse,
eressaie
demontrercommentles
multiplicités
débordentladistinction
entrelaconscience
etl'inconscient,
delanatureetdel’histoire,
ducorpsetde
l'âme.

Cetadieu, rourefois,
n’a paslieusans undernier
éloge
d’une«décou-
vertecliniquetrèsimportante? » : ladistinction
entrenévrose
et

1.GillesDeleuze, Deux
régimesdefous.Textes
etentretiens
1975-1995,
«Préface
pourl'édition
italienne
deMilleplateaux
»,Paris,
Éditions
deMinuit,2003,
p.289.
2.GillesDeleuze
etFélixGuattari,
Milk plateaux,
« 1914—Un seulouplusieurs
loups?
»,Paris,
Éditions
deMinuit,1980,
p.39.
24 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE
Unseul
oudeux
désirs? 25

psychose
dupointdevuede
la constitution
oudelapréhension
d'objets.
asignifiants
etquiaussi
substirue
auxmultiplicité
lamorne
unité
d'unobjet
Freudvérifie,dansL inconscient,
quelepsychotique
serapporte
à des
multiplicités
entantquetelles,
nelesrenvoyant
pasà uneinstance déclaré
perdu“?
unifiantequelconque, tandisquelenévrotique donnelaformed'un
objetglobal,unifiéerperduenmêmetemps,auxmultiplicités qu'il Lesmultiplicités
succomberaient
souslepoids
duNom-du-père.
trouve.
Îl n'yauraitrienàcritiquer
danscettesimpledétectionddiffé.
e
Néanmoins,
cequim'intéresse
ici,c'est
moins
l'application
dela
rencesdestyledansdesconfigurationsaffectives
distinctes.
Lemouve-
critiqueàlapsychanalyse
eràlapostérité
deFreudensaversion
«tournant
linguistique
»,que
la caractérisation
del’objet
quiusurpe
mentsuivant, toutefois,rendLapsychanalyse décevante. Quandelle
laplacedesmultiplicités.
Qu'onmepermetted'insister
surcepoint,
promeurle style névrotique enmodèle, la psychanalyse risquedene
enévoquant
une autrepetitephrase
dutextedeDeleuze
etGuartari:
plusentendre toute
l'agitation desmeutes, desossuaires*, despeuples
«il s'agit
toujours
deretourner
à l'unité,
àl'identité
delapersonne
etdespaysages. Lesmultiplicités évoquées ou produites dansles
oudel'objetsupposé perdu’.
»Lamême opération
nousfaitvoirles
processusdésirants, parce qu'ellesrestent soumises àlaréitération
du
multiplicités
comme desfragments
oudébrisdel'Un,ernouspromer
récitmanque-Œdipe-castration, deviennent indifférentes. Silerêve ou unobjetintègre,
complet,
maisinatteignable.
On serre
donclenœud
kedélireconvoque desloups, dessouris, descafards oudespapillons, quiattache désiretmanque.
peuimporte, puisque lesanimaux, s'ils suscitent unephobie, seront Montitre parle dedeuxdésirs,
pasdeplusieurs.
Alors,onpeurse
toujourslereprésentant déplacé dupère. demander quel
est lerapport
entredeuxrypesdedésirs
etlaformule
Laprésentation faiteicipourraitdonner l'impression queDeleuze dutitreduplateau «Unseulouplusieursloups?+C. equim'afair
etGuartari adhèrent àladistinction srylistique indiquée parFreud établir
unerésonance entre
deuxrypesdedésirs
etcerexte
engagédans
comme critèrerypologique oudiagnostic. Lasuite delalecturedéfaic lecombat pourlesmultiplicités
entantquetelles,
estlapolarisation
certeéquivoque. Deleuze erGuartari soulignent l'importance des entre,
d'uncôté,desmultiplicicés
quisontd'uncôté,individuantes
multiplicités
dans lerécit queFreud faitducasde l'Hommeauxloups, danslamesure oùellesdéclenchent
desaffects
ersubissent
desprocessus
dansl'épisode ditpsychotique ainsiquedans celui quiestditnévro- d'individuarion,
et,del'autre,constituent
unobjerdouéd'identité,
tique,contre lespostulars assumés parFreudauparavant. Alorsque mais
perdu.
Dans
l'Éthique,
Spinoza
distingue
entre
deux
mots
quisont
lerécitdurêve merenscène cinq,
six ouseptloups, Freudlesréduit traduits
parleterme
«désir
»:cupiditas
etdesiderium.
Lepremier,
avec
àunseulloupetrenvoie celoupaupère,puisqu'il jugequ'ils'agit lesrésonances
divines
qu'ilentraine,
exprime
leconarus,
quiestundes
d’uncasdenévrose, avant méme quelerêveait lieu etsoitraconté. nomsdel'essence desmodes
finis.Lesecond
motdésigne l'affection
Untelmouvement estsivertigineux,si précipité, quelaréduction de deceluiquiviseunobjet
considéré
comme perdu,
raisonpourlaquelle
à lameute àunseulloupsepasse d’unparagraphe l'autre,On perd desiderium
aététraduitpar+désirfrustré*
+.Serair-ce
deuxavatars
lesmultiplicitéspourassigner audésir laquête d'unobjetdéjàperdu. d'unmême désir,oubiendesévénementsàtelpointdistincts
qu'il
Avant dereprendre leréve del'Homme auxloups, Deleuze etGuartari faudrait
défaire
l'éventuelle
approximation
entre
euxparlebiaisd'une
sedemandent : autretraduction
?Laquestion
persiste,
endépitdufaitqueletextede
l'Éthique
emploie
lemotcupiditas
dansladéfinition
dedesiderium.
N'assiste-t-on
pasàLanaissance
d’uneaventure
ultérieure,
celleduSignifiant, Ex,même avant derépondreà certe question,j'en propose
uneautre
:
l'instance
despotiqueinsidieuse
qui semetà laplacedesnomspropres est-illégitime
d'assimiler
ledésir,celqu'ilestconceptualisé
parDeleuze
etGuattari
àlacupidiras,
toutenréservant
aumotpsychanalytique

3.Deleuze
exGuattari
évoquent unépisodedanslequel
Jungraconte unrêve
à 4.Ibid, p.40.
FreudJungmentinait unermyriade
d'enerdecrânes.
Freudinsistair
surLaquestion 5.{bd
"QU euét »,provoquantL protesanondeJung,quirappelaitl'existence
de 6.AuPortugal, parJuaquim
deCarvalho,
Jusquim
Ferreira
Gomes
etAnténiw
Plusieurs
crânes
danslerêve.
Cf.GillesDeleuzeetFélixGuatrari,
op.cit,p.42. Simées,pourLamain d'édition
Kelogro
d'égua.
26 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE Unseul
oudeux
désirs? 27

uneapproximation
dedesiderium?
Lapremière
question
estdesavoir
sontsidifférents,
suivant
ladifférente
constirution
dumême
homme
etsi
œqu'onpeutgagner
avec
es approximations.
Au-delàdelajoiede souvent
opposés
lesunsauxautres,quel'homme, setrouvant
entraîné
par
fréquenter
letexte
deSpinoza,
cequi,aumoinspourmoi,constitue desmouvements
contraires,
nesaitquelpartiprendre.
unejustification
suffisante
detouteffortconceptuel,
onauraitaussiune
raison
deplus
desepersuader
que
le désir
sedéfinit
comme
produc- Or,si lesdéclencheurs
denosactions
peuvents'opposer
entre
eux,
tion,etquelemanque, lafrustration,
nesontpasdesmalédictions il faut
faireattentionetnepaslesassocier
àl'essence
demanière
trop
inhérentesàsanature,
maislesdétournements
d'unecertaine
manière étroite.Sideuxdérerminations
essentielles,
ausensfort,devaient
ètre
devivre lesaffects
etd'appartenir
àlaNature. présentes
àl'intérieur
d’unmême mode,l’unedevraitanéantir
l'autre,
À lafindelatroisième
partie
del'Éthique,
sesuccèdent
desdéfini- puisque
l'essence
estpure
positivité,
sansaucunmélangeavecunélément
tionsdesaffects
dansunelistequineseprétend
pasexhaustive,
mais négatif.
Lapreuve delapositivité
absoluedel'essencespinoziste
est
quifinitparétre
considérablement
longue,
étant
composée dequarante que,chezSpinoza,
la mortesttoujours produite
parquelque chose
éléments.Laliste
commence
avec
lesaffects
primordiaux,
pour,
ensuite, d'extérieur
aumode, bienquecelui-cipuisse
êtrelevecteurdeson
présenterlesaffects
composés
demélangesdestroispremiers
endes propre
anéantissement.DanslaquatrièmeProposition
delatroisième
quantités
variables.
Le désirest,précisément,
le premierdelaliste. partie
del'Éthique,
Spinoza
affirme
que
Spinoza
définitcedésirplusprimordial,
oucupiditas,
comme «l'essence
mêmedel'homme,en tantque
celle-ci estconçuecommedéterminée ladéfinition
d’une
chose
quelconque
affirme
sonessence
etnelaniepoint,
àfaire
quelque
chose
pouruneaffection
quelconque
enelle vérifiée
» oucequiest lemême,
établit
sonessence
etneladétruit
point.Lorsdonc
(Eth.,M,Définitions
desaffects
1). Cupiditas
est,donc,cequi nous quenousn'examinons
que
la chose
elle-même
sansaucunégardauxcauses
metenmouvement,
quinous
entraine
vers
l'action.
Ceterme
désigne externes,
nousnetrouverons
rienenellequipuisse
ladétruire.
également
+touslesefforts
delanature
humaine,
quenousexprimons
sous
lenomd'appétit,
devolonté,
dedésir
oud'impulsion
»,peuimporte Decerte
proposition,
onextrait
lasuivante,
quiaffirme
quedes
s'ilssontdouésdeconscience
ou pas.Danslaperspective
de
la libre choses
denature
contraire
nepeuventpasexister
danslemême sujet,
nécessité
spinoziste,
iln'y
a pasdedifférence
entre
uneaction
àpropos puisque,
sic'était
lecas,il pourrait
y avoirdansunsujetquelque
chose
delaquelle
onal'impression
del'entreprendre
pardécision
consciente, quiauraitlepouvoirdeledétruire.Comment concilier,
alors,ces
etuneautreparlaquelle
onsesentinclinéparuneforceirrésistible
et propositions
avec
l'affirmation
qu'ily adesimpulsions, desvolitions
dontonn'apasconscience. etdesefforts
contraires
dansunmême individu?Laseule issue
qui
Unpointdel'explication
deladéfinition,
toutefois,
peutsuscirer seprésenteenvelopperait
unelégère torsionducexte deSpinoza,
unedifficulté.
C'estquecertains
termesdeladéfinition,
telsque torsion
quinousconduiraitàconsidérer qu'ily adesimpulsionsqui
«essence
»et«déterminée
»,peuventdonner
l'impressiond'une expriment
notreessence
etd'autres
quisontproduites
ennouscomme
précision
del'action
dudésir,
sans
aucune
place
laissée
auxhésita- effetd'autres
modes,
c'est-à-dire,
descorps
extérieurs.
Decepoint
tions.L'effortpourpersévérer
dans
l'existenceou la forced'exister, devue,il y auraitunemodalité
dedésirquiexprimeraitdirectement
quidéfinissent
l'essence
desmodes
finis,s'exprime
defaçon
variable, l'essenced'unmode,etd'autres
quiexprimeraient
seulement l'essence
selonlesvariations
présentées
par
le corpsenquestion.
Danslesmots du modedefaçonindirecte, dansla mesureoù il seraitpossiblede
deSpinoza,
lesfigures
assumées
parledésir
(«efforts
»,«impulsions
», considérer qu'uneformedemouvement, quellequesoitsanature,
+appétits
»,«volitions
») : consisterait
dansundegrévariable
delaforced'exister
dumodeen
question.
Mais,danslecasd’uneimpulsion
endirection
dequelque
chose
decontraire
àl'essence
dumode,lacaused'untelmouvement
nepourrait
pasrésider
danscette
même essence,
maisserait
àplacer
7.Onutilise
icilatraduction
deGuérinot,
d'après
leCD-ROMLirel'Éthique dansunautremodeouindividu.
deSpinaza,
Vhorésies,
1998.
28 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE
Unseuloudeuxdésirs? 29

Telpouvait
êtrelecasdudésir
frustré
oudesiderium,
terme
aététraduit enportugais
comme saudade".
Examinons ladéfinics France
publiésouslevitreSubjectivité
etvérité,
ontrouve
unebrève
pourtesterl'hypothèseci-dessus.
Avant
tout, laposition même Faà généalogie
dudésir, entantqu'entité
critiquée
parFoucault
ultérieu-
définition decetaffectnousindiquedéjàunedistance considérable rementdanssonHistoiredela sexualité. Danslaleçonmentionnée,
entreluiet lacupiditas,
puisqueledesideriumestletrente-deuxia, Foucault
faitl'analyse
d’unedesLettresdePlineleJeuneàsafemme, en
affectdelaliste,randisquecupiditas
estlepremier,et faitpartie
L montrantcomment cette
lettre contient
la cristallisation
d'unenotion-
cléconcernant
les rapportsentrelaproductiondesoietlaproduction
latriaded'affects
primordiauxdesquelstouslesautresendérivenr.
devéritéssur
le sujet: lanotiondedésir.
Or,lerermeemployé
par
Ledésir
ouregret
estunecupidité
ouunappétit
dejouirdequelque
choge Plineestprécisément
celuidedesiderium.
Foucaultexplique
:
erceute
cupidité
estentretenue
parlesouvenir
decette
chose
etréprimée
par
Reprenez
cettenotiondedesiderium
etvoyezquelssont
les éléments
que
lesouvenir
decequiéloignel'existence
decellequ'ondésire”.
Pliney fairintervenir
: l'absence,
lemanque,
la représentation
imaginaire,
lejeudelanuitetdujour, les allées
ecvenues,
la fermeture
delaporte,
L'explication
éclaircit
ceciqueledésir
frustré
ouregret
estuneespèce l'exclusion,
erc.Il ya à uncertain
nombre
d'éléments
fondamentaux
dece
de
tristesse.
Ainsi,il nepourrait
pasdériverdirectement
del'essence quivaconstituer,
danstoute
lalittérature,
dansroute
lapensée,
j'allais
dire
dumodequil'expérimente,
puisque
la tristesse
estunediminution
de danstoutel'expérience
européenne,
ledésir.DePlineàProust,delafemme
puissance
et,enrant
quetelle,
contrarie
latendance
dumode
àpersévérer dePlineàAlbertine,
vousavezuncertain
nombre d'éléments
[récurrents]
et
dansl'existence,
cequidéfinitsonessence.
Ledésir,donc,setournerair quiportent
précisément
cenomdedésir,
avec
lelienentre
ledesiderisom
et
seulement
vers
unobjetvucommeperdu,
oud'existence
douteuseen lesupplicium.
Ledésir
estunsupplice!!.
fonction
duhasard
desrencontres
avecd'autres
corps.
C'estdirequ'un
teldésirfrustréneseraitpasessentiel,
maiscirconstanciel
etproduit Alors,creusé parlemanque,le désir estattaché
ausupplice,
à la
pardescauses oudescontingences extérieures.
Desiderium serait
un souffrance defaçonindissoluble. Maiscedésir-là est,aumoinschez
termeadéquat pour
désigner lesfigures
assumées
parl'appétitdansdes Pline,audéburde l'èrechrétienne,etchez Spinoza,
nommé desiderium.
formationssociales
décerminées, dansdesmoments hisroriquement Foucault nenousmontre pass’ilyadesoccurrences dumotcupiditas
particuliers.
Laversion œdipienne dudésir,marquée parlemanque dansles lettres
dePline,caril nes'intéresse pasaufairdetrouver
des
etmenacée parlacastration,neseraitpascupiditas,
maisdesiderium, connotations positivesetaffirmatives dudésir.Lemotutilisépour
à historiquementconstituédemanière concomitanteà l'ascension
de désignercedésirliéàladouleuretla cristesse,
heureusementpournotre
lafamille
nucléaire.
Ladivergence entreDeleuzeetFoucault ence hypothèse, estnéanmoins désiderium : l'affect
deceluiquicontemple
quiconcerne ledésiretleplaisirestbienconnue.Deleuze essaye
de lessidera(lesétoiles,
les astres)
sans pouvoirles avoirentrelesmains
s'approcher
deFoucault enattribuantladiscordanceàunequestion niles serrerdanslesbras.Onavu,toutefois, queledésira unautre
simple
devocabulaire.
SelonDeleuze,
cequeFoucault
appelle
plaisir nomen latin,cupiditas,
qui évoqueuneimagepresque
contraire:
serait,
finalement,
laméme
chose
queledésirparlui-même". nonpascelled’unregard quinepeutjamais devenirtoucher,
mais
Ladistinction
proposée
icientre
cupiditas
etdesiderium
peut
aider celled'uneexactitude
inévitable
qui
fait quelaflèche
deCupido/Éros
àdévelopper
unpeupluslaréponse
deleuzienne.
Dans
la leçon
du atteinttoujourssonbut.
11mars
1981,
dans
l'ensemble
deCours
deFoucault
auCollège
de On pourrait sedemander :qu'est-ce
quichange
entre cupiditas
et
desiderium?Ou bien: y a-t-ilvraiment
unegrande
différenceentre
supposerquelemanque oulafrustration
sontinhérents
àl'essence
du
8.C'est
Tomaz
Tadeu
quiaproposé
cette
traduction
pourlamaison
d'édition désir,ou,plusencore,dechacun denous;oubiendesupposerque
nommée
Âuténtica.
9.Eth,
H,Définition
desaffects,
déf.
32. 11.MichelFoucault,
Subjectivité
etvérité.
Cours
auCollège
deFrance
(1980-1981),
fous,
Paris, 10.
Gilles
Ddeuze,
Deuxrégimes
de « Dési ir», Éditions
de Paris,EHESS/Gallimard/Seuil,
2014,p.219.
Minuit,
coll. «Paradoxe
»,led PS OR PRES PE
30 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

manque
et frustration,
enunmot,tristesse,
Sontdesmésaventures Il
quipeuvent,
dansdescirconstances
dérerminées,
advenir
audésir,
maisn'expriment passonessence? Pourceuxqui voientleurdésir
configurécommedesiderium, lerésultat
neserait-ilpaslemême,c'est.
à-dire,devivreundésirtriste,soitparessencequeparcontingence ? Leschemins
ducorps
sans
organes
Ladifférencepeurêtresubtile,maiselleestloin d’êtreinsignifiante.
Devant
unepropriété
essentielle,
il nereste
quelarésignation.
Si
lemanque
appartenait
intrinsèquementaudésir-cupiditas,
s'ilétait
KunnisH1Uno
voué
à visercequ'onnepeutjamaisobtenir,il nenousresteraitqu’à
nousconformeràuncertainniveauinexorable detristesse
dansnotre
existence.
Une telleattirudeseraitanti-spinozisteparexcellence,
puisque
lacompréhension
dela nécessité
desenchainements
causaux Tout
estbien
affaire
deperception.
delaNaturen’ariend'uneacceptationmélancolique,
maisimplique DavidLapoujade,
laplusgrandedesjoies,quiestl'amourpourquelquechosed'infini Deleuze,
lesmouvements
aberrants
(laNature)qui,parsoninfinirudemême,nesusciteplusl'ambition
égoïste
delapossession,
mais lesentiment
departage
et d'appartenance.
LaNaturen'estpasunobjetdedésirparmid'autres,
vuquechacun
de «Lecorpssans organes »,conceptimpossible,
paradoxal,oxymo-
nousenfairdéjàpartie
depuis
toujours.
Nousn'avons
pasavec
ellele rique,insoutenable,estavant toutunquestionnementsurl'être du
rapportquelenévrosé aavecl'objetdesondésir,danslamesure oùil corps.Ceconcept apparaît,notamment depuisL'Anti-Œdipe,inspiré
croità unetotalité,
qu'ilconsidère
perdue.Lanévroseparaîtêtreune destextesd'Antonin Artaud. Artaudlui-même donne
définitivement
sorte
deperversion
suicidaire,
danslaquelle ledésirvisesonpropre uneconsistanceconceptuelle àceterme danssescahiersdelapériode
anéantissement,
car
il cherche unobjetqui,bienqu'ilsoitperdu, oùil étaitinternédansunhôpital psychiatrique
sousl'Occupation.
produirait
lasatisfaction
dudésirs'ilétaitretrouvé,
desorte quecerte Sionvoulaitretracerl'itinéraireparlequel Artauddécouvre cette
satisfaction
feraitcesser
lemouvement désirant.
Decepointdevue, la idéeetcette réalité
ducorps sansorganes,l'expérimente
et l'élabore,
névroseconsisterait
àcroireàunetotalité
donnéed'avance,
à l'obtention il faudrait
remonter jusqu’à sonexpérienced'unecrise,exprimée à
d'unobjetquipourraitsatisfaire
intégralementledésir,objetunique, travers
l'écritureintenseetsingulière
desesœuvres
poétiques
erdes
intègre,
identique.
Ceseraitnepasaccepter lemouvement dedifféren- correspondances.
Deleuzes'est
référé
àlacrise
dujeune Artaudcomme
ciation
delaNatureetrefuserl'effort
nécessaire
pourlacomprendre expérienceraredela«pensée sansimage»d'abord dansDifférence
entantquetotalité
mouvante etdifférenciante.
L'issuedel'impasse etrépétition.
Cettecrises'accompagne delaprésence d'uncorps
névrotique,
d'après
cequ'onàdéveloppé jusqu'ici,
consisterait
àse inconnuparalysécomme unrocher opaque,unemétéoriterefroidie,
rapporter
àlatotalité,
noncomme à quelquechoseà désirer,
maisà uneespècedemomie, d'automate inopérable,
unemachine enpanne,
laconstruire
pardescombats ardus contre
cequinousrendtristes,et détraquée.Artaudparled'un+néantsansorganes »pourdécrire
àaffirmer
le caractère
partiel
etchangeant deséléments désirables
que cetteréalité
ducorpsquiserévèle comme une«cffroyablemaladie
noussommes susceptibles
derencontrer aucoursd'unevie. del'esprit
+.L'organismes'effond{r}e
àlafoisdanslecorpsetl'esprit,
maiscette
expérienceaccompagne ladécouverte
d'une étrange
vitalité
intense,
desforcesdelavieendchors ducorps organique.
Toutesles
expérimentations
dansle théâtre
d'Artaud,etmémelecinéma,seront
inspirées
ctmotivées
profondément
par
cettedécouverte
éprouvante
et
insoutenable
d'uncorpssansorganes.
Son«théâtre
delacruauté
»sera
également
expérimenté
comme
théâtre
ducorps
sans
organes.
Leroman
32 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECD'ELEUZE
Leschemins
ducorps
sans
organes 33

Héliogabale,
danslequel
l'auteur
décrit
etanalyse
l'anarchie
introduite
au
sein deRomeparunsystème païenvouéà unereligiondu Solcil, production
schizo-capitaliste,
inconsciente,
Etaprès
cetravail
àdeux
seraunedémonstrationquasi-philosophique
etanthropologique du mains,
deuxcerveaux,Deleuze
décrit
denouveau lecorps
sans
organes
corpssansorganes.
Etc'estdansladernière
époquedesoninternement deProust,
dansledernierchapitre
qu'ilaajouté
en1973
à lapremière
qu'Artaud
condense,
intensifie
etélabore
définitivement
cetteidée version
deProustetlessignes.
du corpssansorganesà traversl'écritureincessante,
ct tout autantla
pratique
extraordinaire
desdessins,
quiestd'uneimportance
égale. Envérité
lenarrateur
estunénorme
Corps
sans
organes
[…].Maisqu'est-ce
quec'est,uncorpssansorganes.
L'araignée
nonplusnevoitrien,neperçoit
Ilfaudra
remarquerque,pourArtaud,
cetteexpérience
ducorps
sans
rien,nesesouvient
derien.Seulement,
àunboutdesatoile,ellerecucille
la
organes
impliquait
toujoursladésorganisation
delalangue,
lamise
en
moindre
vibration
quisepropage
àsoncorpsenondeintensive,
etquilafait
question
duprimatdulangage,
d'uncertainlogocentrisme,
etcelava
bondir
àl'endroit
nécessaire.
Sans yeux,
sans
nez,sans
bouche,
elle répond
jusqu'au
démontage,
la désarticulation
delasyntaxeetdesphonèmes,
uniquement
aux signes,
est pénétréc
dumoindre
signequitraverse
soncorps
quienviennent
à fairebégayer
lalangue française,
eninventantune
comme
uneonde,
er lafaitsauter
sursaproie.
(PS,218)
autre
langue,unesortedeglossolalie,
lalangueducorps sansorganes
etpourlecorps
sansorganes,
arrivant
àdégager etcomposerdeslignes
Ici,lecorpssansorganes estplutôtréduicà ladimension
d'un
sensibles
sonores
pourcapterdesforcesvitales.
Cetterecherche
d'une
narrateur,
et,plusloin,aucorps
minuscule d'unearaignée,
minuscule
langue
inconnueformeraitunecommunauté virtuelle
sansfrontières
maiscomplexe.Cecorps sansorganes
signifieaussilaperception
sans
avec
desécrivains
comme
Joyce, Becker,Céline,Rimbaud,
Gherasim
organes(«sansyeux,sansnez,sansbouche »).Mêmesi une
toile
Luca. Maisil fautajouter
quelecorps
sansorganes
n'existe
jamais
d’araignée ressemble
à un organequi sertd'instrument
prédateurà
réellement
: lesorganes nesontperdus
querarement,
le corpssans
l'insecte,
l'ondeintensive
quidonne
le signedel'existence
d'unepetite
organes
seproduitsurtoutauniveaudel'imagedu corps,puisque
vieàdévorer
traversel'araignée
etsatoile.On ne
sait pluscomment
lecorps
est organisé
comme imageetselonuneimage. C'estpour
discerner
lesujer
et l’objer
et leurintermédiaire.
«Pasd'organes
»veut
celaqu'unschizophrène
peutsouvent
direqu'iln'aplusniestomac,
direaussi
«privédetoutusage volontaire
etorganiséde
ces facultés
»
ni poumons,ni sexe,ni cerveau...
sans rienen perdreen réalité.
(PS, 218). C'est comme
si Deleuze avait, à partir de l'expérience
Dèslors,ilfautsavoir
cequec'est
cette
image
ducorps
quiordonne
les
d'Artaud,
resserré la«toile»duconcept, jusqu’àunegrande philo-
organes,
les parties,
lesmatières
organiques
etinorganiques.
Dans
les
sophie critiqueducapitalisme etdel'inconscient,
Maiscen’estpas
poèmes
dejeunesse
d'Artaud,
uncorps
sans
organes
semble
parfois
se
fini.DansMill plateaux, denouveau, laportéeduconcept s'élargic
cristalliser,
passant
partous lesétats:minéral,
animal,végétal,
aérien,
sans limites,
entre dansunevariation extraordinaire.
Il fautrevoir
le
ondulatoire,
fluide,
dansunesouffrance
insupportable,
inqualifiable.
chapitre«Comment se faireuncorpssansorganes »: unvéritable
Bref,dansladécouverte
et l'expérience
parArtaudduCorpssans
manifeste pour
l'éthiqueoul'ontologie ducorps sans
organes, désor-
Organes,
il y aeudesdimensions
différentes
maistrèsproches,
de
maiscondensé enCsO.Cependant il estvisible
queleCsOaavant
sortequ'elles
seconnectent surunseuletmêmepland'immanence tourunmodèle biologique,
c'estunœuf.
oudeconsistance.Il avait
découvertuncorps
sans
organessur
le plan
trèsconcret
ducorpsvivant,etl'image
dececorps,à travers
pensée,
C'estpourquoinoustraicons
leCsO commel'œufpleinavantl'extension
langage
erthéâtre
(delaCruauté).
del'organisme
et l'organisation
desorganes,
avant
la formationdesstrates,
DeleuzeetGuattaridansZAnti-Œdipeet Mille plateaux,
sont
l'œuf
intensequisedéfinitpardesaxes
etdesvecteurs,
desgradients
ct
toujours
sensibles
àcesdimensions duCorps sansorganes
proposé
par
desseuils,
destendances
dynamiques avecmutation
d'énergie,
desmouve-
Artaud.MaisdansZAnti-Œdipe l'envergureducorpssansorganes mentscinématiques
avecdéplacement
degroupes, desmigrations,
toutcela
dépasse
largement
toutcequej'ai dégagé fidèlement
desexpériences
indépendamment
des formes
accessoires,
puisquelesorganes
n'apparaissent
singulières
exprimées
danslesœuvres d'Artaud.
LeCorpssansorganes etnefonctionnent
iciquecommedesintensités
pures.L'organechangeen
SSt
ouvert
surunegrande
échelle
cosmique
etplacé
ennoyau
dela franchissant
unseuil,
enchangeant
degradient.
(MP,190)
34 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDeLeuze Les
chemins
ducorps
sans
organes
35

: Puis,
nouveau
changement,
enun
éclairle CsOseredéfinit
selon
le uneonde
d'amplitude
variable
parcourt
kecorps
sans
organes
;elleytrace
des
principe
deSpinoza,
comme
substance,
attributs
etmodes.
«Lesattri- zones
etdesniveaux
suivant
lesvariations
desonamplitude.
Àlarencontre
buts,cesontlesrypes
oulesgenres
deCsO,substances,
puissances, del'onde
àtelniveau
etdeforces
extérieures.
unesensation
apparait.
(p.49)
intensités
Zérocomme
matrices
productives.
Lesmodes
sonttoutce
qui
se passe.
»(190)LeCsO esttraduitaussientermes
d'immanence Sensation
etFigure
sontdoncd'autres
nomsducorpssans
organes,
etdeconsistance
propres
audésir,
puisque
ledésir,
contrairement
au pour
lequel+l'organisme
toutentier
changedeexture
etdecouleur,
plaisir,+neserapporte
plusà aucuncritèreextérieur
où transcen- variations
allotropiques
régkesaudixième
deseconde
».Deleuze
cite
dant».Leprogramme
singulièrement
élaboré
d'unmasochisme,
le icitoujours
WilliamBurroughs quiluiavaitindiqué
unrepèrecrucial
sexe
tantrique
sans
éjaculation,
donnent
eux aussi
desexemples
pour duCsOdansMilleplateaux.
lapratique
duCsO.Également,
lesleçons
données
parCastaneda
et Toutleprocessus delachair,réaliséparlapeinturedeFrancis
lesTarahumaras
qu'Artaud
avaitrencontrés
auMexique,
etpuisla Bacon estloindela«chair«ausens phénoménalogique,bienqueLa
culture
beatnik
(W.Burroughs)
et l'expérience
deladrogue. Deleuze phénoménologie sesoitbeaucoupattachée àCézanne,dontl'artest
etGuartari
ontréussi
àfaireuneespècedemanuel philosophiquetrès déjàpourDeleuze fondésurunelogique delasensationantérieure
gaietsensible
duCorpssansorganes, quipeutdéchiffrer
l'immense àBacon. Lachaircomme +chiasme +dupercevant etduperçune
mouvement deladéterritorialisation
aventureuseducorpsparles suffit
pasàdéfinir
lecorpssansorganesdans Lapeinture.
«L'hypothèse
beatniks,
lesvoyages
spirituels
enOrient,
etc.
C'estunélogede
l'aventure phénoménologique invoqueseulement lecorpsvécu.
Maislecorps
etdel'expérimentation
duCsO,mais quidoitsefaire
avecbeaucoup vécuestencore
peudechose parrapportàunePuissance
plusprafonde
deprudenceetdevigilance.
«Pourquoi
tant dedangers? Pourquoi etpresque invivable.
»(p.47)Lachairphénoméenolagique4presque
dèslorstantdeprécautions
nécessaires?
»Ce n'estpaspour
dire: défaitlecorpsobjectivable
enexcluant
Ladivision
dususetetdel'objet,
pastrop,pasd'excès,
ilyalalimitequand
même...
Il s'agit
defaire adoptant l'intersubjectivité
absolue,
maisil neledetaitpasassez
pour
remarquerchaquefoisquelcorps
onàréalisé,
queltypeduCsOon arriver
àdécouvrir
l'iImperceprible
oubienmême l'invrvuble
endehors
s'estfait,cequel'onà réalisé
avecleCsO. Et cequiestinoubliable del'organisme.
Etcequiestremarquable
dans
lelivresurBacon,
c'est
: estqueMilleplateaux àainsiprésentéuneespèce decosmologiedu queleCsOestLàcomme
l'evanoutssement
ducorps+QuandBacon
CsO,notamment
dupointdevuede+laGéologie
delaMorale
»ou peintdessourires.
ils «ontLaplusetrange
tonction,
celled'assurer
des«Ritournelles
»cosmiquesselonlesquelles
c'estlemondeentier, l'évanouissement
du corps»tp.331Deleuze nevoulait-1l
pasdire
laterreentière
quiestunimmense CsO, toutcelaconjointà une plutôtl'évanouissement
desorganes?
Er l'evanouissement
ducorps
éthiquespinoziste. sera
assuré
plusfermement
parlamusique
selon
Deleuze.
Deleuzecontinue
àproduire
aprèsMilleplateauxuneautre
variation
surprenanteduCsO.C'estlecasdansFrancis Bacon. Logique
dela Elledébarrasse
Lescurpsdeleuranerue,
deLamatériahité
deleurprésence.
sensation.
W
se réfère
toujours
autexte d'Artaudpourparlerducorps Elledsincarelescorps! : l'anduqueLspanture
s'inscalle
enamont.Lioù
peintparBacon(chapitre
7 «L'hystérie«).C'estla»Figure»quiest kecorpss'exhappe.
massechappant. découvre
Lamarerulite
quiLecompose,
avanttout lecorpssansorganesdansla peinture,le corpsqui crie, lapurepresencedontdlestat.
# tord,écrasé,fonduen s'échappant
de toutesaformeet salimite
organiques.
LaFigure
estcontrelàforme,
contrelesorganes.
Elleest Enrevanche, Lapeinture
peutainsirévéler
unematérialité roujours
toujoursen voiede métamorphose,
en trainde sedissiper.Deleuze envoiedesedémateruhiser, cequicorrespond 2l'invivable
vitalitédu
introduit
le termede»forces +pourdécrireleC0) danslapeinture
: Corps
sans organes.Deleuzeadopte
leconceptde+haptique +,telleque
+peindre
les forces
»,saisir«l'action
sur
le corpsdeforces
invisibles kedéfinitAloisKiegl.Haptique
quipermet à«l'œildeprocéder comme
(FB,45).Cequi
se passe,
c'es qu’ letoucher+dansun bas-reliet égyptien.BaconestselonDeleuze
ungrandrestaurateur del'haptique.ans sapeinture, lalignesort
duprimatdel'espace optiquequirendaitpossiblelareprésentation
36 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVEC
DELEUZE Leschemins
ducorps
sans
organes37

dassique.
Lacouleur
nesuitplusleprincipe
duluminisme
et libère s'élargit
erseredistribue
enincluant
deplusenplusl'incorporel
et
lamodulation
etl'énergie
spatialisante
qui rendentpossible
decapter
l'imperceprible,
commesil'incorporelconstituait
uneautre facecruciale
lesforves
etdepercevoir
letemps.
Lalogique
deli sensation
estune ducorps sansorganes,
comme si l'ordredu«sens»étaitréintégré
dans
illustration
ervariation
parfaitement
fidèles
Àtous
les traitsduCsO l'ordredela«sensation».D'ailleurs,pourGuattariaussi,l'Univers
définisnoramment
dansAfillephareuux.
Maiscequiestremarquable, incorperel
estd'une
importance nonmoindrequelecorps sansorganes.
c'est
queDeleuze,
dans
celivresurBacon,
décrit
souvent
leCsOcomme Quelques pagesdansQu'est-ce queLaphilosophie
?sontconsacrées à
évanouissement,
échappéeducorpssur
la limitecomme déincarna- lacritique,nonpasdu«corps»,maisdela«chair»quicomptait
rion.
Bref,
lecorps
sans
organes
sefaitincorporel.
C'estun
aspect
qui beaucoup pourMerleau-Ponty. Deleuze
dit:
importe
deplusenplusdanslesdernières
œuvres
deDeleuze,
le corps
épuisé,
évaporé,
épuré,
oudissipé
estuneautre
figure
ducorps
sans C'est
lachair
quivasedégager
àlafoisducorps
vécu,
dumonde
perçu,
etde
organes.
L'autreaspext
quisemble
aussiimportant,
c'estqueletactile l'intentionnalité
del'unà l'autre
encore
tropliéeà l'expérience
{...].Chair
(haprique}danslevisible,
quiestunsigne ducorps Sinsorganes,s'ouvre dumonde etchairducorpscomme
corrélatsquis'échangent,
coïncidence
surunautre régimedeperception, àpeineperceptible ouimpercep- idéale,
C'estuncurieux
Carnisme
quiinspire
cedernier
avatar
delaphéno-
tible.Deleuzedir,dansDifférenceerrépétition.
encequiconcerne la ménologie,
etlaprécipite
danslemystère
del'incarnation
;c'est
unenotion
profondeur comme matricedel'étendue : «l'impercepribleetcequi pieuse
etsensuelle
àlafois.
nepeurêtrequeperçu. »C'estdansCinemu qu'iltenteraàfaireune
nouvelle problématisationdelaperception quidépasse largement Erlacritiquedelachair
parDeleuze continueainsi:«lachairn'est
l'image-perception.
Finalement,importe plusli perception dutemps quelethermomètre d'undevenir.Troptendre lachair.Ledeuxième
imperceptibledansl'/muge-temps.L'imperveptibleexl'incorporel
sont élément
(pourfairetenirlachair),c'est
moinsl'osoul'ossarure que
la
lesaspectslesplusremarquablesducorpssans organes chezDeleuze. maison,
l'armature.
» (p.168-169) Lapeinture
deBacon réussitàcréer
Orl'incorporelérait
déjàexactement
le propos centraldelaLogique cette
«armature »pourréaliserlasensation,
un purêtredelasensation,
dusens. L'incorporelestlesens,l'événement. lasurface,oul'efter enarrachant
le perceptauxperceptions.Lecorps,
ou leCsO, estainsi
(quasi-cause)enopposition aveclecorporel, lemélange decorps, désincarnédans
les dernierslivres
deDeleuzeetGuattari.
laprofondeur. lacause. SiAlice,danslelivredeLewisCarroll,est Etpuisc'estlecerveau
quisera sadernière
figure.
Mais,pourparler
unefigure rypiquedel'incorporel,
cequireprésente laprofondeur du ducerveau,il faut
l’arracher àtouteladoxaquicouvre l'image du
corps,c'estencoreAntonin Artaud,schizophrène enpersonne.Il est cerveau
pourlaquelle
lecerveau
n'estqu'«unorgane
deformation
et
doncunpeucompliqué dedireoùenestlecorpssans organes dans decommunicationde
l'opinion»,quine faitquesuivre
un«modèle
Lalogique dusens,leCsOétant toujours liéaunomd'Artaud, à ses étroitdelarecognirion
».Cequicompte, «ceserait
auplusprofond
expériencesterribles
ducorps. Dansce livre,àpropos del'expérience desfentessynaptiques,
dansleshiatus,
lesintervalles
etlesentre-temps
schizophrénique,Deleuze parleducorps-passoire, corpsmorcelé et d'un
cerveauinobjectivable
»(p.197).Pour
ce cerveau,
Deleuze
peut
corps-dissocié,«soitdanslafente, soitdansles parties morcelées dire: «l'homme absent,
maistoutentier
danslecerveau
»,comme
quis'emboitent ettournoient»(LS,107).Il faitremarquer aussi
les Cézannedit : «danslepaysage
».Cecerveau
sedéfinit
comme «un
opérationsd'Artaudsurlemot, à travers
lesquelles«toutmotarrêté, étatdesurvol sans
distance,
àrasdeterre,
auto-survol
»,«superjet
»
tracésedécompose
enmorceaux
bruyants,
alimentaires
erexcrémen- (selonleterme deWhitehead)
ercomme
tiels»,candis
quelemot,pourLewis Carroll,nefaitqu'exprimer
un
attributdeschoses etdescorps,l'attribut
étant
lui-même absolument uneformeconsistante
absolue quisesurvoleindépendamment deroute
incorporel.
C'estcomme sil'incorporeln'avait
rienàvoiravec
lecorps, dimension
supplémentaire,
quine faitdoncappel
àaucunetranscendance,
qui
pasplusqu'avec lecorps sans organes. reste
coprésente
àroutessesdérerminationssansproximité
ouéloignement,
lesparcourt
àvitesse
infinie.
Maisil fautdireque,tantquel'onsuitlaprogression desœuvres
deDeleuze aprèslacollaborationavecGuattari,lecorps
sans
organes
38 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE Leschemins
ducorps
sans
organes39

Cecerveau
estavant
tout
la faculté
decréer
desconcepts,
maisaussi
dans
la matière
grise
ducortex,
danslaropalogie
etlesmicro-fentes
celledelasensation
qui peutcontracter
etconserver
desvibrations
quirendent
possible
+4certain
sptem
+ducerveau.
C'estcomme
si le
comme unepassion
pure.Deleuze
tiredececerveau
l'imaged’une cerveau
étaitladernière
figure
du(40).Quantà l'imperceprible
qui
vieinorganique,
micro-collective.
«Toutorganismen'estpascérébré, nepeutpourtantqu'être
perçu,leplanducerveau
ainsiconçusemble
et routevie n'estpasorganique,mais il y a partout des forcesqui
ouvriruneautredimension.
constituent
desmicro-cerveaux,
ou unevieinorganique
deschoses.
» Si lemouvement,imperceptible
parnature,
peutétreperçuseule-
(p.200)Celamesemblecorrespondre
auderniertypedu corpssans ment
relativement,médiatisé
paruncertain
pland'organusanon,
1lexiste
organespourDeleuze.C'estdéjàdanscetteperspective
ducerveau enrevancheun autreplanducorpssansorganes où lemouvement
etde
la vieinorganique
qu'ilapufairevoisiner
lecinémaducorps
et estperçusansmédiation.
Debellespages
dansMill plateaux
(345)
celuiducerveau,
traités
successivementdans
le chapitre
8deL /mage- oùDeleuze citeKierkegaard
: «jeneregarde
qu'aux mouvements
»,
temps.Lecinéma
ducorps estceluidesattitudes
etpostures
decorps, prévoit
déjàla«perception
+del'Image-remps.
Alors+làperception
gestus.
Deleuze
rendhommage
àPhilippeGarrel.Il découvre
dansses setrouvera
confrontée
à saproprelimite: elleseraparmileschoses,
filmsl'écran
noir
et l'écran
blanc
quiont
la puissance
de«constituer
» dansl'ensemble
desonpropre
voisinage,
comme
laprésence
d'une
lecorpsersespostures,
C'estainsiquelecinémadonne
l'être ducorps heccéité
dansuneautre».Est-cequel'heccéité estunautrenomde
désincarné,
«évanoui
». Finalement, corpssansorganes?Est-cequelecorpssansorganes existe
seulement
aveclaperception decerteheccéité? Lecorpssansorganesetl'hec-
lecinéma
nenousmontrait
quedesondesetdescorpuscules
dansants
avec céitésemblent
correspondre à l'imperceptible
dansLi percepriondu
lesquels
il simulait
descorps
[...].Maissilecinéma
nenousdonne
pasla mouvement, etsi lenomdel'impercepuble danskemouvement est
présence
ducorps,etnepeurpasnousladonner,c'estpeut-être
aussiparce letemps,
c'estlecerveau
quiperçoit
l'imperceprible
dutemps.
Certe
qu'ilsepropose
unautre
objectif
:ilétend
surnous
une«nuitexpérimentale
» constellation
autourducorpssansorganes
estLapremiére
etladernière
ou unespace blanc,il opèreavecdes«grainsdansancs »etune« poussière puissance
pourlapensée
deGillesDeleuze.
lumineuse »,il affecte
levisibled'untroublefondamental,
etlemonded'un
suspens,quicontredisent touteperceptionnaturelle,
Cequ'ilproduitainsi,
c'estlagenèsed'un«corpsinconnu»quenousavons derrière
lavére,
comme
l'impensé
dans
lapensée,
naissance
duvisible
quisedérabe
encore
àlavue.
(/T,262)

Cecorpsinconnu
sans
organes
quenousavons
«derrière
larête»
ébauche
déjàlecinémaducerveau.
«Lecerveau
commande
aucorps
quin'enestqu'une excroissance,
maisaussilecorpscommande au
cerveau
quin'enestqu'une partie.
»Toutdesuireaprès lecinémadu
corps,Deleuzeparledelanoosphère del'incorporel
danslecinéma,
del'apparitionducinéma ducerveau quicorrespondà «ladécou-
verted'unespacecérébral
topulogique»(p.274)«Lecerveau devient
notreproblème ounotremaladie, notrepassion, plutôtquenotre
maitrise,
notresolution
oudécision. »C'estcomme si leCsO)quia
étéétiré,multiplié,
généralisé,
universalisé
àpartirducorpsetdela
chairmasochiste,
droguée,schizophrènejusqu’à
ladimension capita-
liste,évolutionniste,géologique,connectéeet doublée par machine
etrhizome,étaitmaintenant
désincarné,
réduit,amincietcristallisé
art
Le

III

Subjectivités
etlignes
dfuite
e :
surl’amitié
philosophique

FREDRIKASPINDLER

Lorsquenousnous posons laquestion


:«Quifurlesujet
decette
expérience?
»,
cettequestion
fairpeut-êtredéjàréponse
si,àceluimême quil'aconduite,
c'est
souscetteforme interrogative
qu'elle
s'est
affirmée
en
lui, ensubsticuant
au«Je»fermé etunique,
l'ouverture
d'un«Qui?»sans réponse.
Nonque
celasignifie
qu'illuiaitfalluseulement
sedemander : «Quelestcemoi
quejesuis?»,maisbienplusradicalement
seressaisir
sansrelâche,
non
pluscomme
«Je»,mais
comme
un«Qui?»,
l'êtreinconnu
ecglissant
d'un
«Qui? »indéfini!.

Qu'est-ce
qu'une amitiéphilosophique ?Laquestion peutparaître
tautologique—après tout
l'amitié,entendue comme véritable
condi-
tiondepossibilité delaphilosophie elle-même, estdéjàcontenue
dansladéfinition del’activitéphilosophique. L'amour, oul'amitié
delasagesse (philo-sophia),lasagessecomme objetdel'amour etde
l'amitié,
certes,mais aussicomme cequiengendre l'amitiéentre
ceux
quila désirent,
la recherchent —lesprétendants ausens classique,
voire
même archaïque, quifontpartie delacommunauté donnée parune
quête sansréserve etinconditionnelle,quête couronnée —onl'espère
dumoins —parlarévélation etlaréalisationdesvérités universelles.
Il serait
alorstentant deconsidérer que
l'amitiéphilosophique pose
peuoupasdeproblèmes. End’autrestermes, il seraittentant
devoir
laphilosophie comme l’activitémême delacommunauté, comme la
réunion autour del’irréfucable etducertain, dontlacaractéristique
principaleseraitlagénérosité absolue. L'amitié philosophique
serait
valablepour
tous,inclusive ausensabsolu, génératricederoutesbonnes

1.Maurice
Blanchor,
L'Amirié,
Paris,
Gallimard,
coll.«NRF »,1971,
p.328.
42 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVEC
D'ELEUZE Subjectivités
etlignes
defuite:surl'amitié
philosophique
43

choses
etcontraire
danssonêtre
àcequiestjaloux
etlimité
—cela,
hors-jeu,ou sontdu moinsaltérés
jusqu’àdevenirméconnaissables,
mêmesiseulunperitnombredeceuxquise sentent
appelés
parvien nedevons-nous
pas
également
redéfinir
laphilia
—l'amitié
etl'amour,
aubutfinal.Aucentre
del'amitié
setrouverait
alorslecommun,
ce étantdonnéquesonbonfondement
et sacorrecte
fondationsesont
quiappelle
etréunit,
peuimporte
durestesi|_ nn àson écroulés
dumême coup?Sil'objetdel'amitiénesauraitplusêtreun
origine
dans
l'attraction
descontraires
secomplétant
ns l'union,
ousi
coutetunabsolu,s’il nesaurait
plusêtreunbutinouune fin,s’il doit
elleprovient
de l'attraction
dumême.
Lerésultat
serait
uneconcordance
plucôrêtrecréé
etengendré àsespropresrisques,
alorsn'est-ce
pasdire
finale,
l'harmonie
et l'union.
Ainsi,nousverrions
l'amitiécomme
la
métaphysique
de
la nature
même,
etlacommunauté
commele telos
du aussidel'amitiéqu'elledevientsansfondation etsansfondement ?
Etlacommunauté àsontour,cellede
l’originecomme celledela fin,
tout—pourautantquenousacceptions
lesconditionspréalables
sur uneimpossibilité? Enclair,oùsetrouvera dèslorslaplate-forme à
lesquelles
repose
toutl'édifice
: que
le biensoituniversel,
quelevrai
partir duquel les bons amis pourront se rejoindre,où se trouverale
soitabsolu,
etquelacommunauté
transcende
les différences
respectives butqu'ilss'engagent
à trouverd’uncommunaccord,
où estle
lieu où
auprofitd’un«même »,d’une
unitéplusgrande,
plushaute.
l'amitié
puisse
sepratiquer
?Qu'est-ce
qu'une
amitié,
et quipeutêtre
Cependant, noussavons
quecesontprécisément
cesconditions unami,à partirdu momentoù lecommun—lebiencommunerle
préalables
quemetenquestion
Deleuze
lorsque,
faisant
suiteàNietzsche, vraicommun —nepeutplusêtreposé comme unegarantie
donnée
ildémasque
lesprésuppositions
pré-philosophiques
—celle
delabonne d'avance?Maispeut-êtrelaquestiondoit-elle
êtreposéeautrement
:
volonté,
duvraipur,etdupouvoir
insurmontable
del'universel
- si,avecDeleuze erenlabonnecompagnie deNierzsche,
noussommes
comme
autant
deconstructions
tautologiques.
Plutôt
quedeserapporter prêtsà définirlaphilosophie
d’uneautremanière,unemanière qui
àundonné,
et plutôt
quedereconnaître
(etsereconnaître
dans)
un comporte certes desdangers
pourla«belleâme»,maisouvreaussi,
vraidéjàpréétabli,
la réflexionphilosophique
seconstituedansla évidemment, denouvelles possibilités
depenser(interdisciplinaires,
rencontre
perpétuelle
avec l'inconnu,
cequi
doit êtrepensé,
et cequi, transversales,
artistiques,
post-humaines,
pour nementionnerqu’elles),
danssadifficultéà seformererseformuler,constitueuneviolence commentcomprendre
cetteamitiéqui, tantquenousgardonsle
effrayante,
déchirante,
«effondante
».Lapensée,
tellequeDeleuze
la terme
« philosophie
»,
est toujours
enquestion?
À partuneréflexion
définit
avec
Guartari,
etàpartir
deProust
etdeNietzsche,
seconstitue introductrice
dansQuest-cequelaphilosophie?,
il apparaîtrait
quela
parunerencontre
avecdesforces
chaoriques
etdéstabilisantes,
déchi- question
de
l'amitiéestrelativement
peuthématiséedansl’œuvrede
rantes.Aussi, atteindreà des conceptsclairement formulés, certe Deleuze,
qu'ils'agisse
desestextes
propresoudesesécrits
avecGuattari.
«victoire
»court
sans
cesse
lerisque
desedissiper,
des'évaporer
comme Pourtant,
laquestion
estqualifiée
de«centrale
»:
siellen'avaitjamais
existé.
Lapensée
estausenslittéralle sans-fond
etlesans-fondement,
et devraàchaque instant
se créer sonsol,seconsti- Laquestion
estimportante,
puisque
l'amicelqu’ilapparaît
danslaphilosophie
tuercomme uncrible rendu surlechaos,
les concepts
se rissercomme nedésigne
plusunpersonnage
extrinsèque,
unexempleouunecirconstance
autant denœuds oudecroisements, jonctions, rendant possible empirique,
maisuneprésence
intrinsèque
à lapensée,
uneconditionde
untissucontinu. Dèscepréalable, nousenregistrons desperteset possibilité
delapensée
même,
unecatégorie
vivante,
unvécu
transcendantal.
engrangeons
des profits: lapertedel'Un,de l’entieretdel'absolu,
certes,
le profitnécessaire
del'éphémère etdufragile d’undynamisme Ercela,quelquesoitl’amidontnousparlons, l'amidePlaton
vivantetchangeant.Lapensée devientainsiuneactivité«àlavieà peut-être,
maisencoreplusl'amidelasagesse,
duvrai,ouduconcept.
lamort»,toutcomme le vivant etlemortnesontquesespropres Laquestion del'amitié
rendpossible
laquestiondecequ’est laphilo-
constructions. sophieelle-même,possibleseulement
danscette
semi-obscurité«entre
Certe
redéfinition
estbouleversante,
puisque
lasagesse
—lasophia
- chienetloup».C’estlaquestionquinepeutseposer qu’«entre amis,
désirée
etrecherchée,
nesaurait
plusseconcevoir
comme unevoualié comme uneconfidence
ouune confiance,
oubienface
àl'ennemi comme
àacquérir;nicommeletonneauremplid’orsousl’unedespiles undéfi»«. Entrechien etloup»parceque,justement,
c’estl'heureoù
del'arc-en-ciel
duloges.
Maissitouscesbonsfondementssontmis l'onseméfiemême del'ami.Cardemême quelapensée philosophique
44 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVEC
DeLeuze
Subjectivités
etlignes
defuite:surl'amitié
philosophique
45

prendsonorigine
dansunerencontre
violente,
dansunenécessité
Alors,ilestbienquestion
dedéfinir
laquestion, erd'ensortirdans
exigeante
etirréductible
dontlacaractéristique
estde
jeter àbastoute
untriplemouvement oùchaquemomenttraverse lesdeuxautres —la
opinion
certaine
et toutfondement
ancré
auprofitdecequin'est
pas
création
deconcepts commeoutils
singuliers,
l'instaurationd'unplan
reconnaissable
ouplutôtnese laisse
pasreconnaître,
demême l'amitié
d'immanence àpartir duquel
leproblèmepuissesurgir
etêtreformulé,
philosophique
(letravailencommun,les effortsjoints,l'amitiéet
etl'invention
depersonnages
concepruels
qui hébergeront
et incor-
l'amour)
prend
sonorigine
dans
une
sortedeviolence,
bienloindecette poreront
laquestionafinqu'elle
puisse
êtremisenjeu. Il s'agit
bien
communauté paisible.
Pourtant,lanaturedecetteviolencenesaurait alors
d'uneactivité
fondamentalement autre
quecelledécritecomme
êtreexpliquée
simplement à partirdecequ'estl'amioul'amitié.Plutôr, unediscussion
visant
l'ordre,laclarté
etleconsensus.
À yregarder de
elleestsiintimement
liée àcequ'est
laphilosophie
—etparlàmême à plusprès,mémedansledialogue
ou ladiscussion
socratique
trans-
cequefontlesamislorsqu'ils
pratiquent
l'amitiéphilosophique
- que misepar
la tradition
grecque.
les supposés
amisdoivent
ètreplutôt
c'est
certe
même
activité
quidoitêtre
explorée
davantage. compris
comme rivaux
quecommedes forces
concourant
ensemble,
Ledéveloppement
decerte
questionparDeleuze
etGuattari
dans etleuramitié,commeuneamitiédu conceptplutôtqu'uneamitié
Qu'est-cequelaphilosophie?
serad'abordentrepris
sousformed'une entrebonnes
personnes.
Socrate,
le premier, adéfini
l'ami comme
critiqueintransigeante
decetteformed'entretien,
privilégiée
depuis amiduconcept,
ouduvraiexclusivement,
toutcomme il afaitdu
Platon par
la traditionphilosophique.
Cen'est jamais,selonDeleuze, vraicemonologue
impitoyable
quiélimine,l'unaprès
l'autre,tousles
dans ladiscussion
etencoremoins danslacommunication quelapensée rivaux,touslesprétendants”.
alieu—aupointquechaque philosophe, pourautant qu'il
le soit, Que lesamissetransforment enadversaires
et lesdiscussions,
s'enfuitencourant dèsquesera prononcée laphrase «onvadiscuter enchampde bataille,ou qu'il s'agissed'unéchangeinintéressant
unpeu? ».Ladiscussionestsansintéréc
pourl'activitéphilosophique, d'opinions—ni l'un ni l'autrenepouvantêtreproductifau sens
sansintérêtaupointquemême Socrate,quienestle maître incontesté, philosophique—celapeutcertessevoircommeuneviolence suffisante.
nesemble avoirpul’apprécier quecomme ruseoùmanipulation. Cependant,
il semblerait
quecen'estmême
pasiciqueleproblème
Ladiscussion estsansintérêt,
nonpasparce qu'ilserait
inintéressant sesitue,puisque.malgrétour.nonseulement
la philosophie
existe
deparler ensemble,loindelà, maisaucontraire, parce
quecequ'on bienenacte,
maisdeplus.
ellesemblebiencomporter
quelquechose
appellelapenséealieudansunearène toutà faitautre—«c'est surune qui
seraitcommeunacted'amitie.
Enefler,c'est
cequiaétéailleurs
autre table
qu'elle
jette sesdéschiffrés»—quecelleoùl'onéchange thématisé.
dansunacteappeléparCharlesStivale
« lapédagogie
desopinions,compare despointsdevue,desarguments, desaccords del'amitié”+lorsqueDeleuze,
avecClairelarner,dansla première
oudesdésaccords. Ainsi,ditDeleuze, partie
deDurloguss.
developpe
lescritères
del'entretien
(etnonpasla
discussion!
comme Làméthode
même delaphilosophie,
méthode
qui
lesdiscussions,lemoinsqu'onpuisse direestqu'elles
neferaient
jamais mériterait
bienuneréflexion
à partentière,
Donclaquestion
del'amitié
avancerletravail,puisquelesinterlocuteurs
neparlentjamaisdelamême resteinévitablement
liée àLaquestion decequefaitlaphilosophie,
chose.
Quequelqu'un aittelavis,
etpensececiplurôs
quecela,qu'est-ce
que sielleneconsiste
pasàdiscuterouàrépondre àdesquestions,mais
çapeutfaireà laphilosophie,antquelesproblèmesenjeunesontpasdits? plucèt,selon
les motsdeDeleuze,à sortirdesquestions,
àtrouverdes
Erquand ilssont
dits,ilnes'agit
plusde
discuter,
maisdecréerd'indiscutables issues.
Alors,demême, l'amitié
doitconsister
danslefaitdesortirde
quelque
chose,
et plusprevisément
decetteidentitéqui sous-tend
les
conceptspourLeproblème qu'ons'est
assigné.
opinions
etlesconvictions
deladiscussion.
Carsi,dans
laphilosophie,

2.GillesDeleuze,
Différence
etrépétition,
l'avis,
PUF, 1968,p.2.
$ Jbud.p.794.
3.CL GillesDeleuzeetClaireParner,Dialogues,
Paris,Flammarion,
1977, G Jbud. p.33.
première
partie. 7 Clare Suvale,
«TheFokds ofPust-Identiry
»,The
JourmaloftheMidweit
Modern
4.GillesDeleuve
etFélixGiuattari,
Qu'est-ce
queLaphilosaphie?,
Paris,
Éditions Language
Asoriañen.vol.36,n°4,Zhinking
l'en-Identry,
printemps2003,
p. 25-37.
deMinuit,
coll.+Critique
»,1991,
p.42.
46 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDeELEUzE Subjectivités
etlignes
defuite:surl'amitié
philosophique
47

il nes’agit
nid'opinions
nidevérités
absolues,
maisaucontraire, subjectivité,
déjàchezHume,etlafaçondont,
à travers
desprocessus
delacréationdeconcepts
etdutracé
deplans
d'immanenceàpartir complexes
d'anticipation
ethabitude,
d'association
etdegénéralisation,
d’unerencontre
avec
del'inconnu,
celaimplique
aussiquesaviolence lasubjectivité
s'estformée
comme uneillusion
aussiinévitable
que
déchirante
consiste
dans
lefaitdedésagréger
cette
identité
connue
qui nécessaire,
équilibre
précaireentrel'évitement
de
la folieetcettefolie
sous-tend
lesopinions,
prises
depositions
etbonnes volontés,ausein même.Maislebutn'étaitjamaisdedirequ’«enfait»,il n'existe pas
del'âmebonneet désintéressée
qui,depuisPlatonetAristote,définit unsujet« réel»ou donné,ni queleje pensant neconstitueni une
l'ami-philosophe.
Eneffet,
dit Deleuze
: essence,niunêtreauto-identique
etsubstantiel.
Cedémantèlement, en
unsens,a déjàétéeffectuéparHumelui-même. Plutôt,etdemanière
lorsque
lesproblèmes
atteignent
audegré deposirivité
quileur estpropre, bienplusintéressante,laquestionadresséeparDeleuze à travers
son
e lorsque
ladifférence
devient
l'objetd'uneaffirmation
correspondante, œuvre, concernelafaçondontcesujetdéjàillusoire(etpourtantbien
ilslibèrenc
unepuissance
d'agression
etdesélection
quidétruit
labelle
âme, réel),nonobstant
sesdémantèlements etdéconstructions,
restetoujours
enladestiruant
desonidentiré
même
etenbrisant
sabonnevolonté®, opératoire,conserve toujoursdeseffets,resteactif,demeureune
fonction—dans le langage,
danslapensée,
dans
le social,
lepolitique
Du coup,nousvoyonslaquestion
sedéplacer
bienau-delàdela etl’affectif.
End’autres termes,
il s'agissait
desavoir
comment cette
discussion
consistant
àsavoir
sil’amicié
sefondedans
l'affinité
oudans idéedu sujetinfiltrenotrepensée,
notreperception,
notresensation
lescontraires
quisecomplètent.Deleuzepropose
autre
chose quece denous-mêmes etdu monde.Commentcerteidéedu sujet(oules
dontils’agit
dans cequenousappelonsune«amitié
philosophique
». effets
decesujet)
agit-elle
dansnosviesquotidiennes,
notreidentité
Il nepropose
rienmoinsquedeperdrel'idée
quechacundenoussoir politique,
routes
nosstructures—familiales,
amicales,bureaucra-
un,unsujet,uneidentitéetuneunité.Précisémentparcequ'iln'est tiques?Et pourquoi
continue-t-elle
d'être,
peuimporte sondegré
paspossible
desesortird’unequestion
àl'aided'opinions,
peuimporte dedéconstruction,
lepluspuissantoutildupouvoir,
deladiscipline
qu'elles
soient
comprises
comme propres
àunsujet
outranscendan- etducontrôle,
s'ysoumettant
er lespratiquant
àlafois,demanière
tales,
lapenséedoirnécessairement
commencer
par ladissolution
de micro-etmacropolitique
?
cemoiqui seportegarantduconnu,parcefameux «cogitopourun L'enjeu
alorsdeladésubjectivation,
delaprétendue
dissolution
moi
dissous».Maisqu'est-ce quecelaveutdire?Qu'est-cequ'une quisemblerequise,
aussibienpourlaphilosophie
quepourl'amitié,
véritable
« dissolution
du moi»,un processus
dedésubjectivation paraît
impossible.
Eneffer,si leseffets
delasubjectivitésontsiinextri-
est-ilmême
possible,
ausensconcret?
Comment unmoidissous cablementemmélésavec chaque aspectdenotre vie,demanière aussi
peut-il
comprendre
uncogito?
Quel«Jepense
»,sicemêmemoiest nécessaire
qu’incontournable,
quevoudrait dire«lesdissoudre»,sinon
dissous,
quelgenredepenser
peut-ilseformulersansun moi
relatif
ungesterhétorique?Etcen'est pastout.Simême celaétaitpossible,
quilegarantisse
?Enquels
termes
est-ilméme
possible
deparler
d'un nes'ensuivrait-il
pasdeux grands dangers:d’uncôté,unsurgissement
moi
dissous?Comment
comprendre
sonmoded'exister
—est-ilmême
decechaosdontnotre« subjectiviré
» étaitcenséenousprotéger,
possible
delecorréler
avec
desconcepts
decommunauté,
d'amitié,
; enpremierlieu et ceciencore,
plusinsidieusement,une
reterritoria-
oumême
desolirude
?
lisation
dansdes formesencoreplusidentitaires,
réactives,
négatives
?
Quelesujer
soituneconstruction
—personnelle,
sociale,
historique
C'estcequi,pourNietzsche,constituelenihilisme,etpourDeleuze,
etpolitique
—celaestbienconnuparn'importequelfamilier
non
lesmicro-fascismesd’uneidentité
s'affirmant
encore plusdufaitde
seulementdelapenséedeleuzienne,
maisaussi
del'ensembledela
sa«perte».Maispeut-être est-ce
lelangagequinousjouedestours?
tradition
poststructuraliste,
aupointqueledireaujourd'hui
sonne
Peut-être
est-celagrammairequi,dansle spasme desarésistance
àla
comme untruisme.
Eneffet,
Deleuzeabiencommencé saphiloso-
pertedestructuresidentitaires,
utilise
leterme négatifde«désubjec-
phieeninterrogeant
la façondont
s'estbâtiecerte
construction
de
tivation
»,l'idéedelaperte,pourquelque chose qu'onpeutpenser
dansd'autrestermes? Nietzsche
peutvenirenaide.Carc'estluiqui,
8.Gülles
Deleure,
Différence
esrépétition,
op.cit.p. 2.
dansEcceHomo, compose uneautobiographiesingulière,
àpartir
d’une
48 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE Subjectivités
etlignes
defuite:surl'amitié
philesophique
49

prise
encompte
d'unmoidissous
enacte,
montrant
lanature
même Ainsil'ami,toutcomme moi-même—ouplutôtla constellation
a decettedissolution.
«Comment l'on devient
cequel'onest»(sous- produite danscerentre-deux
oùlarencontre
lieu —n'estplusniun
titred'Ecce
Homo)
n'est riend'autre
qu'uneinvestigation
desforces
et sujetniunAutre,mais, aucontraire,
cette
rencontreparlaquellele
desvoixquiontétéàl'œuvre,
ontopéré
afinqu'ilsoitpossible
àun nouveau,irreconnaissable,
estproduit,
unévénement, unesingularité
moment
donnéde
dire «Je ».MaisceJe resteuneunitéqui nepeut plutôtqu'une identité.
Lemoidissousnesauraitêtrecequiacessé
êtrecomprisequecomme pluralité,
multiplicitédontl'être nepeut d'être,maisaucontraire,cequiapparaît
dansundevenir presque
êtreconçu quecomme unperpétuel devenir sedifférenciant. infini:desassemblages
qui,parhabitude,
parruseouparconfort,
Ladécouverte, aussi
libératriceque,dans leZarathoustra,le riredu portentencoredesnomspropres.
Maisprécisément,
lenompropre
bergerarrachant
d'uncoupdedent la têreduserpent noirterrifiant, désigne
plusquesujet,individu,
personne.
Chezcertains,
c'estun
consisteprécisémentencequeladissolution n'estpasuneperte mais mouvement,
quelque
chose qui
se passe,
unévénement
perpétuellement
unemultiplication.Ladécouverte parNietzsche d'unjemultiple et enmouvement.
AinsiGuattari,qui pourDeleuze
était«toujoursle
toujoursautre,
estlamême quecellequifaitl'arrière-fonddeLamulti- même Félix,maisdontlenompropre
désignaitquelquechosequise
plicité
deleuzienne,oùl'individun'estpasune fin, maisunpointde passair,
ernonpasunsujet!».Chezd'autres, c'estautrechose
qui
départ versdenouvellessingularités.
Etici,il esteneffetpossible de doirétrevu,compris,
afind'approcher
l'êtreglissant
etindéfinide
parlerd'amitié,
decommunauté toutcomme desolitude,puisque leje ce«Qui»,pourparleravecBlanchot.
AinsiFoucault, pourDeleuze,
multiple,incommensurable, estconstirué
partoutcequiletraverse : pouvaitêtrerencontré
parlamultiplicité
singulière
leconsticuant
:
toutceetIOus ceuxquenousaimons, [OUTceet(OUs Ceux quenous
détestons,
constituent
unje jamaisfini. « Tout témoigne
de notre cetensemble
desons
martelés,
degestes
décisifs,
d'idées
toutenboissecet
être,nosamitiés
etnosinimitiés,
notreregard
etnosserrementsde feu,d'attention
extrème
etdeclovure
soudaine,
derireserdesourires
quel'on
main,notremémoire
etcequenousoublions,noslivres
etlestraits sent«dangereux »aumoment même où l'onenéprouve latendresse
—cet
denotreplume»ditNierzsche,
dansSchopenhauer
éducateur
($ 1},
et ensemble
comme
unique
combinaison
dontLenompropre
serait
Foucault
!/,
Deleuzeparle
dupenseur, amant erami,comme autantdepaysages
dudésert
oùlespopulations,lesfaunes et
les flores
croissent
sanscesse, Danscesbelles
pages
oùDeleuze
parle
desesamis,il estclairque
etquenouspassons notretemps àdistribuer,déplaceretregrouper, l'amiestroujours
déjàplusquelesujet,unevaste
combinaison
detoutes
dansdesgroupements etagencements variables,déterminant les cesintensités
peuplantlapersonne, etla façondontcetassemblage
cheminements denotre pensée”. L'expérimentation surnous-mêmes affecte
opère
danslemienpropre
:
esticiuneascèsedirigéecontre nous-mêmes, undémantèlement de
l'identité
etseseffets
:«Ledésert,l'expérimentation sursoi-même,est [QJu'est-ce
quec'estprécisément
unerenconre avecquelqu'un
qu'onaime?
notreseule
identité,
notrechance unique pour
touteslescombinaisons Est-ceunerencontreavecquelqu'un,
uuavecdesanimaux quiviennent
vous
quinoushabitent,»C'estuneexpérimentation visantàdénouer
les peupler,
ouavecdesKléesquivousenvahissent,
avec
desmouvementsquivous
nœuds del'identité
afind'ensortir,lacondition pourla conversation émeuvent,dessonsquivoustraversent?
Et comment séparer
ceschoses"?
decesser
d êtreunediscussion etdedevenir pensée, lacondition
sous
laquelle
l'amipeutcesser
d'êtreunmiroir,leMêmeou l'Autre,sujet Et,en référence
àl'amiGuartari,dansMilleplateaux, Deleuze
delapossession
etdelajalousiesuivantunelogiquedecapitalisme, propose quecequiconstitue
quelqu'unestunegéographie : «avec
des
etdevenir
ceparquidesmanières
nouvelles
etvastes
d'êtreaffecté lignesdures,
deslignes
souples,
deslignes
defuite,etc."*.»Lignesde
peuvent
s'ouvrir.
11.fbud,p. 23.
12.fbud.,
p. 17.
%,
GillesDeleuseetClaireParnet,Dialogue,
10. op.cit,p.18. 13.bud.
14./hid
48 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZS Subjectivités
etlignes
defuite:surl'amitié
philosophique
49

prise
encompte
d'unmoidissous
enacte,montrant
lanature
même Ainsil'ami,toutcomme moi-même —ouplutôtlaconstellation
decerredissolution.
«Comment
l'on devientcequel'onest»(sous- produite danscerentre-deux
oùlarencontre
alieu—n'estplusniun
titred'Æcre
Homo)n'estriend'autre
qu'une
investigationdesforces
et sujetniunAutre,mais, aucontraire,
cetterencontreparlaquellele
desvoixquiontétéàl'œuvre,ontopéréafinqu'ilsoitpossible
à un nouveau, irreconnaissable,
estproduit,
unévénement, une
singularité
momentdonnédedire«Je ».MaisceJe resteuneunitéqui nepeut plutôtqu'uneidentité.Lemoidissous nesaurait
être cequia cessé
êtrecomprisequecomme pluralité,
multiplicitédontl'êtrenepeut d'être,maisaucontraire,cequiapparaîtdansundevenir presque
êtreconçu quecomme unperpétuel devenir sedifférenciant. infini: desassemblagesqui,parhabitude,
parruseouparconfort,
Ladécouverte,
aussilibératrice
que,dansleZarathoustra, leriredu portent encore desnomspropres.Maisprécisément,
lenompropre
bergerarrachant
d'uncoupdedentlatêteduserpent noirterrifiant, désigne plusquesujet,individu,
personne.Chezcertains,c'estun
consiste
précisément
en cequela dissolution n'estpasuneperte mais mouvement, quelque
chose
quisepasse,
unévénement perpétuellement
unemultiplication.
Ladécouverte parNierzsche d'unjemultiple et enmouvement.
AinsiGuartari,qui pourDeleuze
était«roujoursle
toujoursautre,
estlamême quecelle
quifait l'arrière-fond
delamulti- même
Félix,mais
dont
le nompropre
désignair
quelque
chose
quise
plicité
deleuzienne,oùl'individu
n'estpasune fin, maisunpointde passait,
etnonpasun sujet!"».Chezd'autres,
c'estautrechosequi
départ versdenouvellessingularités.
Etici,il esteneffetpossiblede doitêtrevu,compris,afind'approcher
l'être glissant
et indéfini
de
parlerd'amitié,
decommunauté toutcomme desolitude,puisque
le je ce«Qui»,pour parleravecBlanchor.
AinsiFoucault, pourDeleuze,
multiple,incommensurable,estconstitué
partoutcequi le traverse: pouvaitêtrerencontré
parlamultiplicité
singulière
leconstituant
:
toutceettousceuxquenousaimons, toutceet(ousceuxquenous
détestons,
constituent
un je jamaisfini. « Tout témoignede notre cerensemble
desonsmartelés,
degestes
décisifs,
d'idées
ourenboissecet
être,nosamitiés
etnosinimitiés,
notreregard
etnosserrementsde feu,d'attention
extrême
etdeclèrure
soudaine,
deriresetdesourires
quel'on
main,notremémoireetcequenousoublions,nos
livresetlestraits sent«dangereux
»aumoment
même oùl'onenéprouve
lasendresse
—cet
denotreplume»dit Nietzsche,
dansSchopenhauer
éducateur
(S 1),et ensemble
commeunique
combinaison
dont
Lenompropre
serait
Foucault".
Deleuze parledupenseur, amant etami,comme autant depaysages
dudésertoùlespopulations,lesfaunes etlesAores
croissent sanscesse, Danscesbelles
pages
oùDeleuze
parle
desesamis,il estclairque
etquenouspassons notretemps àdistribuer,
déplacer etregrouper, l'amiesttoujours
déjàplusquelesujet,unevaste
combinaison
detoutes
dansdesgroupements etagencements variables,
déterminant les cesintensités
peuplant
lapersonne,
et lafaçondontcetassemblage
cheminements denotrepensée”, L'expérimentation surnous-mêmes affecte
opère
danslemienpropre
:
esticiuneascèse dirigéecontre nous-mémes, undémantèlement de
l'identité
etseseffets
:«Ledésert, l'expérimentation
sursoi-même, est [Qu'est-ce
quec'est
précisément
unerencontre
avecquelqu'un
qu'onaime
?
notreseule identité,
notrechance unique pourtoutes lescombinaisons Est-ceunerencontre
avecquelqu'un,
ouavecdesanimaux
quiviennent
vous
quinoushabitent". »C'estuneexpérimentation visantàdénouer les peupler,
ouavecdesidées
quivous
envahissent,
avec
desmouvements
quivous
nœuds del'identitéafind'ensortir,laconditionpourla conversation émeuvent,
dessonsquivoustraversent?
Etcommentséparer
ceschoses"?
decesser d'êtreunediscussionetdedevenir pensée,lacondition sous
laquellel'amipeutcesser d'être
unmiroir,leMêmeoul'Autre, sujet Et,en référence
à l'amiGuartari,
dansMilleplateaux, Deleuze
delapossession etdelajalousie suivantunelogique decapitalisme, proposequecequiconstituequelqu'un
estunegéographie :«avec
des
atdevenir ceparquidesmanières nouvellesetvastes d'êtreaffecté lignesdures,
deslignessouples,
deslignes
defuite,etc.*, »Lignes
de
peuvent s'ouvrir.
11./bid,p.23.
12.
Jbid.,
p.17.
op. 9.Gilles
Deleuze
etClaire
l'arnet,
Dialogues,
cit., p. 13./bid
10.
Jbid RTS 14,Jbid
50 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVEC
DELEUZE
Subjectivités
etlignes
de
fuite
: surl'amitié
philosophique
51

blocs
molaires,
desidentités
constitués
autour
duou-bien/ou-bien
comme toutlemonde!”.
Silasubjectivité
estnécessaire,
c'estence
(femme-homme,
enfant-adulte,
sans-papiers-citoyen,
etc.);lignesde
qu'elle
assureleminimumsuffisant
d'identité
afinderester
fonctionnel
segments
moléculaires,
glissant
entredesspectres
d affectivité
diffé.
etderépondre àunordre
existant,
normaliséetnormatif.
Ainsi,
rents,
desagencements
demarquagesidentitaires
quisemeuvent entre
descatégories
dépendant
ducontexte,
despréférences,
desaffects
qui
l'organisme,
ilfautengarder
assezpourqu'ilseréforme àchaqueaube ; etdes
transirent
: lesvariations
dansunerelation
d'amour,
lesrapports
de
petites
provisions
designifiance
etd'interprétation,
il fautengarder,même
force
d'une conversation,
laréalisation
soudaine
quequelque
chose
pour
les opposer
àleurpropresystème,quand lescirconstancesl'exigent,
estdéjàarrivé
(mais
quand?)sansquenousnousens0ÿOns
aperçu,
quandleschoses,
lespersonnes,
même lessituations vousy forcent
; etde
Orcelaveut
direàsontourquel'idée
même defaire
quelquechose petites
rations
desubjectivité,
il fautengarder suffisamment pourpouvoir
ensemble
prendunautre
sensquelasimple
addition
d'unautreàun répondre
àlaréalité
dominante”.
soi
: ils'agit
d’une
double
captureoùcequin'appartient
nià l'unni
àl'autre
devient
unévénement
ouune
vie, parlui-même
:
Cedouble mouvementestalorslaconditiondelapenséeautantque
; del'amour cetentre-deuxoùil nes’agit
plusd’«arriveraupointoù
pasquelque
chose
quiserait
dans l'un,ouquelque
chosequiserait
dansl'autre,
l'onne
dit plusje,maisaupointoùçan'aplusaucune importance de
même siçadevait
s'échanger,
semélanger,mais
quelquechosequiestentre
direoudenepasdireje.Nousnesommes plusnous-mêmes. Chacun
lesdeux,
hors
desdeux,
erquicouledans uneautre
direction
‘?.
connaîtra
lessiens.
Nousavonsétéaidés,
aspirés,
multipliés!°
».L'amitié
philosophique—peut-êtretouteamitié—estcomme la dissolurion
C'est
unerencontred'oùquelque
chosed'autre
émerge;
desnoces, d'uneidentitéauprofitdecequinousreste leplusinconnu : nous-
lecontraire
delaconjugalité,
impliquant
lamultiplicité
plutôtquela mêmes, entantquenous devenons.
Lorsquel'objetdel'amour oude
dualité
dumoiet del'ami.«NousavonsécritL'Anti-Œdipe
àdeux», l'amitié
n'estplusunUniversel,
etpeutseulement êtrepensédans sa
disentDeleuze
etGuartari danslatoutepremièrephrase
deMille singularité,
alors
naturellement
(quandbienmême ceserait
douloureux)
plateaux. c'est
aussilecaspourlesujet.
Pourtant,dansnotre viequotidienne,
lesdeuxtrouvent
inévitablement
leur manière
d'émerger
à nouveau,
Comme chacun
denous érair
plusieurs,
çafaisait
déjàbeaucoup
demonde, desereterritorialiser
—etc'est
pourquoi
l'amitié,
larencontre,
doivent
Id nous
avons
utilisé
toutcequinous
approchait,
Leplusproche
erleplus êtretoujours
répétées,
toujours
renouvelées.
Au-delà
desidéaux
etde
lointain.
Nous
avonsdistribué
d’habiles
pseudonymes,
pourrendre
mécon- l’alcruisme,
au-delà
delaquestion
desressemblances
ouaffinités,
oudes
naissable.
Pourquoiavons-nous
gardé
nosnoms?
Parhabitude,
uniquement différences
secomplétant,
s'esquissent
alorslescontours
mouvants
parhabitude.
Pournousrendre
méconnaissables
ànotrecour, d'uneautrephilia,commeunemanière
deperdreperpéruellement
laface,
dans
lesmots
deDeleuze
: «Perds
levisage.
Deviens
capable
Certemultiplicité
estlamanièred'ensortir—devenir impercep- d'aimer
sanssouvenir,
sansfantasme
etsansinterprétation,
sansfaire
tible,
même ànous-mêmes—porterdesmasques ausens nietzschéen, lepoint. »
laisser
desfausses
traces
erunefouledebifurcations,
afinseulement
de
faire
plusattention
àcequidevient.
Pourtant,cefaisant,
il importe
de
faire
ensortequecette
expérimentation
aitlieusurdescorps encore
reconnaissables,
dont
les noms propres,
même altérés,
interdisent
à
cette
expérimentation
d'être
fatale,
desortequ'on puisseencoreparler
17.Ibid.
15.
/bid.,
p.13. 18.
Jbid,p.199.
16.Gilles
Deleuze
etFélix
Guatari,
Milleplateaux,
Paris,
Éditions
deMinuit, 19./bid,,p.9.
coll.«Critique
»,1980,
p.9. 20.GillesDeleuze
etClaireParnet,
Dialogues,
op.cit..p.59.
IV

Diagrammes
: usages
multiples

DaniELA
Voss

Noussommes partoutconfrontésàdesdiagrammes : dansles


sciences techniques,lesmathématiques,
les statistiques,l'économie,
lamédecine, maisencore danslaviequotidienne. Undiagramme à
ordinairement pourfonctiond'illustrer
desrelations, sans
pourautant
lesreprésenter directement
: unplandemétro nefigure pasletracé
exact deslignes demétro, nilesespacements réelsentrechacune des
; stationsil abstraitlesdistances
etlestracés exacts etrépertorie
àleur
place lesarrêtserlescroisements
entreleslignes. Danscette fonction,
lediagramme auncaractèrerétrospectif
: il sertlasystématisation
et
l'illustration
derelationspréexistantes,
d'états defaircomplexes oude
démonstrations. Nousvoudrions distinguer decette conception,et
decerte utilisation
plutôttechnico-rationnelle,
uneautre conception
dudiagramme, quifutcaractérisée
parDeleuze etGuartari etsurtout
appliquée
parDeleuze
dansledomaine
del'art.Certes,
on peutdire
qu'undiagramme, même danssonacception
deleuzienne,
organise
unerelationnalité
—unagencement fonctionnel
derelationsetde
rapports
deforcenonqualifiés
—,maisl'essentiel
estquecesrelations
nepréexistent
pasaudiagramme,maissontproduites
parlui.Dans
certe
secondeacception,
lediagrammeestuneinterconnexion
opéra-
tionnelle,
ouunemachine opérationnelle
quiproduit
duréel.11est
projectif,
encequ'ilouvre unnouvelespace,moduledesmanières
depercevoir
etdesecomporter,
etpeut-être
même
enappelle
à une
nouvelle
terre,
unnouveau
peuple,
untemps
futur.
Leconcept
dediagramme
chez
Deleuze
atoute
unehistoire
propre.
Il émerge
dansdescontextes
trèsdifférents
etdoitsonexistence
à
différents
hasards.
Sonexemple
nousfaitparticulièrement
comprendre
quelesconcepts
philosophiques
chezDeleuze
(erchezDeleuzeet
Guattari)
nesontpasporteurs
d'une
définition
exacte
quirenverrait
à
unphénomène
biendélimité
delaréalité.
Ilssedéfinissent
bienplus
54 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVEC
DeLeuze
Diagrammes
:usages
multiples
55

. # "

tance
interne
etleurinteraction
avec
d'autres
concepts; comme
undiagramme
abstrait
etopérationnel
quitraverse,
saisit
et
parleurconsis
lesconcepts
doivent
preuves
faireleurs
commeréponse
àunproblème sediffuse
dans
tout
le champ
social
:
nousnenousdemandons
remilieu. Danscettemesure,
C'estlediagramme
d’unmécanismedepouvoir
ramené
àsaformeidéale
:
Re qu'un diagramme?»Enfait,ses
différents
emplois
vont
sonfonctionnement,
abstrait
detoutobstacle,
résistance
oufrottement,
peut
Re qu'ilestdifficile
detrouver
unsignifié,
unréférent
commun.
bienêtrereprésenté
comme
unpur
systèmearchitectural
etoptique
:c'sten
Nousallons
plurôtnousdemander
:«comment
fonctionne
cediagramme
faitunefigure
detechnologie
politique
qu'on
peut
etqu'on
doitdétacher
de
dans
cecas
précis?
»,et«àquoiessaie-t-il
d'apporter
uneréponse?
». toutusage spécifique.
1.LE DIAGRAMMEDANSL'ANALYSE
Danssaforme abstraite,
c'est-à-dire
détachéederoutemanifes-
sOCIO-POLITIQUED'INSPIRATIONFOUCALDIENNE
tationempirique,
le diagramme estune«purefonction»;c'estune
fonctiondisciplinaire
quis'impose
àunematière pure,cette
« pure
Ontrouvelapremièreoccurrence
duconceptdediagrammedans
matière»étantàcomprendre icicomme n'importe
quellemultipli-
l'article
deDeleuzesurFoucault
:«Écrivain
non: unnouveau
carto-
citéhumaineàcontrôler*.
Deleuzedéfinit
lediagrammecomme une
graphe »(publié
en1975 dans
la revueCritique,
repris
etmodifié
en machine abstraite
: «Carlamachineabstraite,
sedéfinissant
parune
1986
dans
l'ouvrage
Foucault).
Deleuze
reprend
iciuneformulation pure
fonction
et une
pure
matière,
ignore
toute
distinction
deformes
deFoucault quil'avaitutiliséeenpassant sans luiprêter d attention
comme desubstances’.
»Lediagramme demeure toutefois
invisible
iculière.
Foucaultemploie leconcept dediagramme dans Surveiller
tantqu'ilneproduitpasd'effets,quecesoitdansl'organisation
etpunir(1975), pourqualifier
lepanoptisme. Lepanoptisme est décrit
d'établissements
concrets
(prison,
atelier,
caserne,
école,hôpiral,
etc.),
comme unetechnologie politiquequiétablitunestructure spécifique danslaformequeprennentdifférentes
fonctions
(sanctions-punitions,
desurveillance,assurant
lefonctionnement automatique dupouvoir. éducation,thérapie,
production) oudanslesformations desavoir
ceprojetdeprisonconçuparJérémy
L'exemple enestlePanoptique, discursives
quilesaccompagnent (règlements
intérieurs,règlements
Bentham en1791, avecunetourdesurveillance centraleautourde disciplinaires,
codes
delois,discours
scientifiques,
erc.).
Lediagramme
laquelle
lescellulessontordonnées defaçon circulaireetàpartirde
agée jusqu'àl'intérieur
descellules. estimmanent
auchamp
social
etproduit,
entantquecause
immanente,
laquelle
onpeutavoirunevuedég l'ordre
concret
et lafonctionnalité
desinstitutions disciplinaires,
ainsi
Lesprisonnierssont
en permanence observables
duhaut delatour,mais quelescontraintes
erlesdéterminationsdesénoncés discursifs.
Avecle
lesurveillant
lui-même demeure cachéàleurs regards.Lesprisonniers concept dediagramme, Foucaultdonne uneréponse àlaquestion des
sont
ainsilivrésaurourment depouvoir êtreconstamment observés.
rapportsdeforceerdepouvoir au
sein d'une société: lediagramme
Ladisposition
architecturale
descellules correspond, d'aprèsFoucault,
disciplinaire
traverse
lasociétéentière; il forme desmatières visibles
àunedisposition visuelle,
«unrégime delumière! »,c'est-à-dire
àune (forme decontenu) etproduitdesfonctions etdesénoncés (forme
logiqueoptique précise
oùl'onestsoit«roralement vu,sans jamais d'expression).
Lepouvoir n'estpasorganisé demanière ponctuelle
voir»,soiroùl'«onvoittout,sans êtrejamaisvu?».Cettelogique du dansunlieu privilégié (comme l'Écatparexemple), ouentreles
panoptisme, quitrouvedans laprisonsonlieuprivilégié deréalisation, mainsd’une personne particulière
(comme leSouverain), maisil est
peutêtredégagée de
cet exemple concret etconsidérée comme un coextensif
àl’espace
social,immanent etanonyme. Il nepartpasnon
modèle généralisable
defonctionnement. Lepanoptisme fonctionne plusunilatéralementdel'infrastructureéconomique etneseréduit

1.Michel
Foucault,
Surveiller
etpunir,Paris,
Gallimard,
1975.
VoirGillesDeleuze, 3.Ibid,
p.239.
Foucault,
Paris,
Éditions
deMinuit,
1986,
p.40. 4,GillesDeleuze,
«UnÉcrivain,
non: unnouveau
cartographe
»,Critique,
2.Id, Surveiller
etpunir,op.cit, p.235: «LePanoptique estunemachine
à n°343,décembre
1975,
p.1216.
dissocier
lecouple voir-être
vu: dans
l'anneaupériphérique, unesttotalement
vu, $.Jbid.,
p.1218.
sans
jamaisvoir; danslacourcentrale,
onvoirtout,sans
tre jamais
vu.»
56 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECD'ELEUZE
Diagrammes
: usages
multiples 57

pasàunecausalité
économique. Lesrelations
depouvoiropèrent bien
Unemachine
abstraite
oudiagrammatique
nefonctionne
Pas
pour
représenter,
plutôtdefaçonimmanente comme unetechnologie
ouunestratégie
mêmequelque
chose
deréel,
mais
construit
unréel
àvenir,
unnouveau
type
politique,
quis'exprime
enmême tempsdanslevisible
etledicible,
deréalité.
Ellen'estdoncpashorsdel'histoire,
maistoujours
plurôt«avant
»
laforme decontenuerlaforme d'expression.
l'histoire,
àchaque
moment où elleconstitue
despoints
decréation
oude
D'aprèsDeleuze,
lemériterevient
àFoucault
d'avoir
lepremier fait
potentialité.
Toutfuit,toutcrée,
mais jamais
toutseul,
aucontraire,
avecune
ressortir
cette
conception
dupouvoiret sonfonctionnement
immanent,
machine
abstraite
quiopèrelescontinuums
d'intensité,
les conjonctions
de
Leconceptdediagrammedésigneainsi
précisément
œchamp immanent
dérerritorialisation,
lesextractions
d'expression
etdecontenu!*.
dupouvoir etdesesmécanismes quiprennent
effetàdeuxniveaux :
leniveau delamachine abstraite,
quitraverseentièrement
l'espace
Certainsaspects
duconcept
dediagramme
telquenousl'avions
socialetquiproduit
le réel,etleniveaudesnombreusesinstitutions
rencontré
chezFoucault
persistent
ici.Lesdiagrammesoulesmachines
(oumachines
concrètes)
etdesformations
desavoirdiscursives.
Selon
abstraites
jouentlerôledecauses
immanentes qui«consistent
enmatières
Deleuze,
chaque rype
desociété
asondiagramme,
la société
souveraine nonformées
etenfonctionsnon
formelles"».
\\s sont
installés
surleplan
pasmoinsquelasociété
disciplinaire
oulasociété
decontrôle®,
1l ya
d'immanenceoudeconsistance,sur
lequellesmatières
etlesfonctions
descontinuités
etdesrecoupementsd’undiagramme
àl'autre,mais
sont
flouesetinstablesIls produisentdeseffersquiseretrouvent
aussi
deschangementsradicaux,qui
jettentpêle-mèéle
desrégimes capturés
dansLes
strates,
quisestratifient
dans
lesagencements
concrets.
significatifs
déjà
existants
etdes
fonctions
dominantes
enlibérant
des Deleuze etGuartarisedémarquenttoutefois
deFoucault, en cequ'ils
points
decréation,
demutation
etderésistance.Il faut«penser
le
remplacentsamicropolitique
desrapportsdeforce etdepouvoir par
diagramme
animédepures
mutations”
».Sil'on suitDeleuze,
lalutte unemicropolitique dudésir.
Ilss'intéressent
auxfluxmoléculaires du
politique
doitêtremenée
parl'ouverture
desagencements
sociaux
sur
désirqui
traversent
les agencements,
sontbloqués ous'inscrivent
dans
cesmachines
abstraites
demutation,afindeprovoquer un«diagramme
deslignesdefuite.L'accent
estmisavanttoutsurlepotentiel créateur
révolutionnaire
». Deleuze vaau-delà decequeFoucault avaitfait
dudiagramme oudelamachine abstraite,
àtraverslequell'introduction
dansSurveiller
etpunir,encequ'ildécrit
lefonctionnement dupouvoir
duconcept dediagramme dans lechamp del’artestrendue possible
:
comme unprocessusàlafoisplusouvertetplusfragile.
Cequ’ilreprend
entoutcasdelamicro-analysedupouvoir deFoucault,c’estsonmode
Lediagrammeoulamachineabstraite
ontdeslignes
defuitequisontpremières,
d'action
continu etimmanent quiserépand dansl’espacesocialer
etquinesontpas,dansunagencement,desphénomènes derésistance
oude
s'exprime
danslesdifférentssegments séparés.«Lepouvoir apour
riposte,
maisdespointesdecréation
etdedéterritorilisation
‘2,
caractère
l'immanence desonchamp, sansunification transcendante,
lacontinuité
desaligne,sansunecentralisationglobale,
la contiguïté
Lesfonctions
diagrammatiques
agissent
enfournissant
desformes
desessegments sanstotalisation
distincte:espacesériel?.
» etdesfonctions
àunemultiplicité
quelconque,
tolérant
enmême
temps
écarts,
déviations,
etmutations.
Un exemple
auquel
se réfèrent
Il. LE DIAGRAMMEDANSL'ŒUVREDE KAFKA Deleuze
erGuattari
est l'écriture
deKafka,
ouplutôtKafka
entant
quemachine abstraite.
La«machineKafka»consiste
d’abord
enceci
Danslechapitre
«Surquelques
régimes
designes»etlaconclusion qu’elle
saisitunesémiotique
concrète
er hybride
(l'allemand
dePrague)
deMilleplateaux
(1980),
leconcept
de diagrammeapparaît
denouveau, —unallemand
desséché
erarraché
desaforme
haut-allemande
—etla
comme équivalent
duconcept
demachine
abstraite
: déterritorialise
encore
davantage
encequ'elleselaisse
emporter
par

6.Voiribid,p. 1222. 10.


Gilles
Deleuze
etFélix
Guattari,
Millplateaux.
Capitalisme
etschirophrénie
2,
7.lbid,
p.1223, Paris,
Éditions
deMinuit,
coll.«Critique
»,1980,
p.177.
8.Ibid,
p.1227. 11.
Jbid,p.637.
9.Ibid,
p.1210. 12.Jbid,p.175
sq.,note
36.
56 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECD'ELEUZE
Diagrammes
: usages
multiples 57

pasàunecausalité
économique. Lesrelations
depouvoiropèrent bien
Unemachine
abstraite
oudiagrammatique
nefonctionne
Pas
pour
représenter,
plutôtdefaçonimmanente comme unetechnologie
ouunestratégie
mêmequelque
chose
deréel,
mais
construit
unréel
àvenir,
unnouveau
type
politique,
quis'exprime
enmême tempsdanslevisible
etledicible,
deréalité.
Ellen'estdoncpashorsdel'histoire,
maistoujours
plurôt«avant
»
laforme decontenuerlaforme d'expression.
l'histoire,
àchaque
moment où elleconstitue
despoints
decréation
oude
D'aprèsDeleuze,
lemériterevient
àFoucault
d'avoir
lepremier fait
potentialité.
Toutfuit,toutcrée,
mais jamais
toutseul,
aucontraire,
avecune
ressortir
cette
conception
dupouvoiret sonfonctionnement
immanent,
machine
abstraite
quiopèrelescontinuums
d'intensité,
les conjonctions
de
Leconceptdediagrammedésigneainsi
précisément
œchamp immanent
dérerritorialisation,
lesextractions
d'expression
etdecontenu!*.
dupouvoir etdesesmécanismes quiprennent
effetàdeuxniveaux :
leniveau delamachine abstraite,
quitraverseentièrement
l'espace
Certainsaspects
duconcept
dediagramme
telquenousl'avions
socialetquiproduit
le réel,etleniveaudesnombreusesinstitutions
rencontré
chezFoucault
persistent
ici.Lesdiagrammesoulesmachines
(oumachines
concrètes)
etdesformations
desavoirdiscursives.
Selon
abstraites
jouentlerôledecauses
immanentes qui«consistent
enmatières
Deleuze,
chaque rype
desociété
asondiagramme,
la société
souveraine nonformées
etenfonctionsnon
formelles"».
\\s sont
installés
surleplan
pasmoinsquelasociété
disciplinaire
oulasociété
decontrôle®,
1l ya
d'immanenceoudeconsistance,sur
lequellesmatières
etlesfonctions
descontinuités
etdesrecoupementsd’undiagramme
àl'autre,mais
sont
flouesetinstablesIls produisentdeseffersquiseretrouvent
aussi
deschangementsradicaux,qui
jettentpêle-mèéle
desrégimes capturés
dansLes
strates,
quisestratifient
dans
lesagencements
concrets.
significatifs
déjà
existants
etdes
fonctions
dominantes
enlibérant
des Deleuze etGuartarisedémarquenttoutefois
deFoucault, en cequ'ils
points
decréation,
demutation
etderésistance.Il faut«penser
le
remplacentsamicropolitique
desrapportsdeforce etdepouvoir par
diagramme
animédepures
mutations”
».Sil'on suitDeleuze,
lalutte unemicropolitique dudésir.
Ilss'intéressent
auxfluxmoléculaires du
politique
doitêtremenée
parl'ouverture
desagencements
sociaux
sur
désirqui
traversent
les agencements,
sontbloqués ous'inscrivent
dans
cesmachines
abstraites
demutation,afindeprovoquer un«diagramme
deslignesdefuite.L'accent
estmisavanttoutsurlepotentiel créateur
révolutionnaire
». Deleuze vaau-delà decequeFoucault avaitfait
dudiagramme oudelamachine abstraite,
àtraverslequell'introduction
dansSurveiller
etpunir,encequ'ildécrit
lefonctionnement dupouvoir
duconcept dediagramme dans lechamp del’artestrendue possible
:
comme unprocessusàlafoisplusouvertetplusfragile.
Cequ’ilreprend
entoutcasdelamicro-analysedupouvoir deFoucault,c’estsonmode
Lediagrammeoulamachineabstraite
ontdeslignes
defuitequisontpremières,
d'action
continu etimmanent quiserépand dansl’espacesocialer
etquinesontpas,dansunagencement,desphénomènes derésistance
oude
s'exprime
danslesdifférentssegments séparés.«Lepouvoir apour
riposte,
maisdespointesdecréation
etdedéterritorilisation
‘2,
caractère
l'immanence desonchamp, sansunification transcendante,
lacontinuité
desaligne,sansunecentralisationglobale,
la contiguïté
Lesfonctions
diagrammatiques
agissent
enfournissant
desformes
desessegments sanstotalisation
distincte:espacesériel?.
» etdesfonctions
àunemultiplicité
quelconque,
tolérant
enmême
temps
écarts,
déviations,
etmutations.
Un exemple
auquel
se réfèrent
Il. LE DIAGRAMMEDANSL'ŒUVREDE KAFKA Deleuze
erGuattari
est l'écriture
deKafka,
ouplutôtKafka
entant
quemachine abstraite.
La«machineKafka»consiste
d’abord
enceci
Danslechapitre
«Surquelques
régimes
designes»etlaconclusion qu’elle
saisitunesémiotique
concrète
er hybride
(l'allemand
dePrague)
deMilleplateaux
(1980),
leconcept
de diagrammeapparaît
denouveau, —unallemand
desséché
erarraché
desaforme
haut-allemande
—etla
comme équivalent
duconcept
demachine
abstraite
: déterritorialise
encore
davantage
encequ'elleselaisse
emporter
par

6.Voiribid,p. 1222. 10.


Gilles
Deleuze
etFélix
Guattari,
Millplateaux.
Capitalisme
etschirophrénie
2,
7.lbid,
p.1223, Paris,
Éditions
deMinuit,
coll.«Critique
»,1980,
p.177.
8.Ibid,
p.1227. 11.
Jbid,p.637.
9.Ibid,
p.1210. 12.Jbid,p.175
sq.,note
36.
58 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECD'ELEUZE Diagrammes
: usages
multiples59

lesfluxdematières
sonores nonsémiotiquementformés,et sesdegrés quinesedéfinitpasseulement
comme uneaffaireindividuelle
mais
d'intensité!*,
detellefaçonquelessonsinarticulés
du cafardGregor collective
:lechant
deJoséphine
n'est
pasl'expression
laplusartistique
Samsaoule sifflement
deJoséphine,
lachanteusedupeuple
des d'unmaître
chanteur
—enréalité,
sonsifflement
n'estpasnotablement
souris,
deviennentaudibles
entantquecaractéristiques
expressives
et plussonore
niplusanimé
queceluidesautressouris;
c'est
lavoixd'un
matérielles
dulangage
*.Lamachine-Kafka
ouvre
lelangage
àtravers peuple,
uneénonciation
collective,
laproduction
collective
dudésir.
unedoubledéterritorialisation
versundevenir-animal,
quiconstitue Joséphine
n'est
qu'uneparmi
d'autres,
unesingularité
parmi
lamultirude.
unefuite
surplace,
unefuite
enintensité!*.
«Lediagramme
est[.….]
une Lalittérature
deKafka,c'estdu moinsainsiqueDeleuze etGuartari
expressivité-mouvement
quicomporte
toujoursunelangue
étrangère lacomprennent,estune
littératuremineure qui sedistingueparson
dans
lalangue,
descatégories
nonlinguistiques
danslelangage".
» aspectpolitique
etmême révolutionnaire.
«Lamachine littéraire
prend
ainsi
le relaisd'unemachinerévolutionnaire
àvenir,nonpasdutour
Nousnenoustrouvonsdoncpasdevant
unecorrespondance
structurale
entre pour
des raisons idéologiques,
mais parce
qu'elleseule
estdéterminée
deuxsortes
deformes,
formesdecontenu
etformes
d'expression,
maisdevant àremplir lesconditions
d’uneénonciationcollective
quimanquent
unemachine d'expression
capable
dedésorganiser
sespropres
formes,etde partout
ailleursdanscemilieu:Lalittérature
estl'affaire
dupeuple"®.
»
désorganiser
lesformesdecontenus,
pour
libérerdepurscontenus
quise Le diagramme
quel'écriture
deKafkametenmouvement
n'est
confondront
aveclesexpressions
dansunemême matière
intense!” pastellement
différent
duconcept dediagramme queDeleuzeàrepris
deFoucault: c'estunecause immanente,
quirépartit
etorganise
les
Certecitationprovient
deKzfka.Pourunelittérature mineure,paru relations
depouvoir etlesfluxdedésir
(auseindelafamille,
aubureau,
en1975. Leconcept dediagrammen'yestpasencore évoqué,
c'estdans dans
uncabinet
d'avocats,
dansunÉtat),
quimer
levisible
etledicible,
Milleplateaux
qu'ill'estpourlapremière foisenrapportavec Kafka. lesformes decontenu etd'expressionencontact,
etenmême temps
Sion
lit cesdeuxextraits ensemble, ons'aperçoit quelamachine provoquedesdéterritorialisations
etdesprocessus
dedevenir
intensifs.
d'expression
devient diagramme, une«expressiviré-mouvement ». 1llancedesmachines demutation oudesmachines révolutionnaires
Lediagramme devientpourLapremière foiseffectif
auniveau dulangage —passeulement desforcesderésistance,maiségalementdesforces
àtraversunedouble déterritorialisaion
: il sesertd'unlangage parlé créatrices
: «Butultime delalittérature,
dégagerdansledélirecerte
paruneminorité juive
dePrague exlibèresesintensitésquilepoussent création
d'unesanté,oucette inventiond'unpeuple,c'est-à-dire
une
auxlimitesdel'agrammatical.Enmême temps, lediagramme réussit possibilité
devie.Écrirepourcepeuple quimanque!” » Kafka crée
aussiquelquechose deneuf: lacréation d'unenouvelle grammaire, ainsiundiagramme, quireste,
entantquemachine abstraite,
invisible
d'unelangue étrangèreauseinmême delalangue maternelle.Au etnepeutêtresaisiquedans seseffers
linguistiques,
affectifs,
et,le cas
niveaududésir,il ouvreune
ligne defuiteparrapport auxrelations échéant,politiques.
répressives
quiessayentdebloquer ledésir: ainsiledevenir-cafard
deGregor Samsa. Lediagramme rendenoutrepossible undevenir II. LE DIAGRAMMEDANSL'ART
DE FRANCISBACON
une 13.Voiraussi
GillesDeleuze
erFélixGuartari, Pour littérature
Paris,
Édirions
deMinuit,
1975,
p.15:«Unepi mp
Ka estdonc
otie Tandisqueleconceptdediagrammen'apparaît
quesporadique-
pardescontenusetdesexpressionsformalisés
àdesdegrés diverscomme pardes ment dansMilleplateaux
etn'estnomméentantque
tel qu'une seule
matières
nonformées quiyentrent,
ensortent
etpassentpartouslesétats.
» foisenrapportavecKafka,
il devient
plusthématique
danslelivrede
14.FranzKafka,Josefine,
dieSangermoder
DasVolkderMause, 1924. Deleuzeàpropos delapeinture
deFrancis
Bacon.
Leconcept doit
sa
ET VoirGillesDeleuzeetFélixGuartari,
Kafka,op.cit.,p.65: «Ledevenir-

Qu'en
ic (Franche
dscou
d'en 08 8Comprendre
estun voyage
immobileetsur , qui i
18.
/bid,
p.32.
16./d, Milleplateaux,
op.cit,p.638. 19.Gilles
Deleuze,
«Lalirtérarure
erLavie»,inCririque
erClinique,
Paris,
Éditions
17.{4Kafka,op.cit.p.51. deMinuit,
1993,
p.15.
60 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECD'ELEUZE Diagrammes
: usages
multiples61

réapparition
àunhasard :danslaremarquableinterview
de1975 avec desdéterritorialisations,
quiproduisent
unezoned'indétermination,
DavidSylvester,
Bacon répondàunequestionàproposdesatechnique unespace lisse—unezonedeSaharaaumilieuduvisage.Deleuzey
picurake
enindiquant
les possibilités
d'undiagramme- danslaversion voitl'effetd'undiagramme: lesmarques
aléatoires,
lestraits
asigni-
anglaise
originale,
il parlede«asortofgraph».Deleuzeseréfère
àla fiants,
lapeintureprojetée,
lescoups
d'éponge
surdespartiesentières
traduction
française
decertediscussion,
danslaquelle
cetteexpression détruisent
lesdonnées
figuratives
- les«clichés»,dontLepeintrea la
estrenduepar« unesortedediagramme ».Le passage
concernéde têteremplieetquioccupent
déjàLatoileblanche. Aveccestechniques,
l'interview
deBacon
estLesuivant
: Bacon soustrait
Lapeinture
«2l'organisation optique quirégnait
déjà
surelle,etLarendait
d'avance figurative! ».[l libèreLapeinture
des
Trèssouvent
lesmarques
involonzaires
sontbeaucoup
plusprofondément dichés,delafiguration(durécic, del'illustration),
entolérantdans
suggestives
queLes
autres,
etc'est
àcemoment-là quevoussentez
quetoure unecertaine
limite Laprésence d'«unecatastrophe survenuesurla
espèce
dechosepeut
arriver.
- VousLesentez
aumoment même oùvousfaites toile ».Lediagramme détruit lareprésentation, maiscréeenmême
cesmarques
?- Non,lesmarquessontfanes
etonconsidèreLachosecomme temps denouvellesrelations
: parexemple ledevenir-animaldansles
onferait
d'unesorte
dediagramme.Exl'onvoiràl'intérieur
decediagramme peintures
deBacon
(voirPortrait
ofGeorge
Dyer
Crouching,
V966).
Lespossibilités
defaitsdetoutes
sortes
s'implanter.
C'estunequestion
difficile, Lacêteydevientune«rête chercheuse??
+,unesingularité
comportant
k l'exprime
mal.Maisvoyez, parexemple,
sivouspensezàunporrait,vous unemultiplicitédemanifestations
possibles.
L'œil,l'oreille,
lenez,
avezpeut-êvre
àuncertainmomentmisLabouche quelque
part,maisvous labouche portentencoredescaractéristiques
humaines, maisLachair
voyezsoudain
àcravers
cediagramme
queLabouche pourrait
aller
d'unbout vaplusloinetsuggèred'autres
formesanimales:tigre
etagneau, oiseau
àl'autre
duvisage.Etd'une
certaine
manière,vousaimeriez
pouvoirdans etinsecte.
Lechaos,oulacatastrophe
quiengendre Lediagramme, n'est
unportrait
faire
del'apparence
unSahara,
lefaire
siressemblant,
bienqu'il quetemporaire.Il enrésulte
despossibilités
defait,unnouvel ordre
semblecontenir
lesapparences
duSahara. ouunnouveau rythme, «LaFigure
»,
À premièrevue,lareprésentation
d'unecourbedans unsystème de 1jfaurdoncquelediagrammenerongepascoutLetableau,
qu'ilreste
limité
coordonnéescartésien
nesernblepastrèsutilepourcomprendre ceque dansl'espaceetdansletemps.
Qu'il reste
opératoire
ercontrôlé.
Queles
Bacon veut
dire.Peut-être a-1-il
pensé auxfonctionsparticulières
des moyens violentsnesedéchainent
pas,etquelacatastrophenécessairene
singularicés,
c'est-à-dire
despointsremarquables,
àpartir
desquelsletracé submerge
pascour.
Lediagramme
estunepossibilité
defait,iln'est
pasleFait
d'unecourbesemodifie (parexempleunmaximum, unminimum, un lui-même.
Touteslesdonnées
figuratives
nedoivent
pasdisparaitre;
etsurtout,
tournant,
exc.).
Surcespoints particuliers,
unecourbecontinuellement unenouvelle
figuration,
celle
deLaFigure,
doitsortir
dudiagramme,
etporter
croissante
peutsoudainement décroitre
ouinversement, unecourbe lasensation
auclairetauprécis.
Sortir
delacatastrophe
[|].
décroissante
peutsoudainement croître
denouveau —bref,ladirection
delacourbe change. Dansleséquations différentielles
complexes, Lediagramme
apparaît
d'aborddansLapeinture
deBaconcommeun
non-linéaires
(c'est-à-dire
lescourbesdont
les branches vontjusqu'à diagrammemanuel,
comme unefonction delamain,
carl'organisation
l'infini),
ilyades
points,
dessingularités,
qui
fontpreuve
d’instabi- optique
est partiellement
détruite
parlaprojection
depeinture
oules
lité;
le comportement
de lacourbe nepeutêtredécrit qu'entermes coupsd'éponges.
Lesformessurlatoilesontdéformées
et«unezone
deprobabilités.
Lesmarquagessurlatoile,aléatoires,
non-signifiants d'indiscernabilité
oud'indéterminabilité
objective
entredeuxformes,
dontparleBacon,fonctionnent
demanière similaire
àcessingularités
(nœuds, foyers,
cols,centres)
:cesontdesécarts entredesdonnées
figuratives;
ilsmarquent
desinstabilités
oudescatastrophes.
Cesont 21./bid,p.94,
22.fbid.
23.VoirGillesDeleuze
etFélixGuattari,
Milleplateaux,
ep.cit.,p.233.
20.Citédans
GilesDeleuze,
Francis
Baron. Lori TE 24.GillesDeleuze,
Francis
Bacon,op.c1t.,
p.95.
2002,
p.94,note
deLap.87. Lagique
deLasensation,
Paris,
Seuil, 25.Jbud,p. 102sg.
62 AGENCER
L8SMULTIPLICITÉS
AVECD'ELEUZE Diagrammes
: usages
multiples 63

dont l'une n'était déjàplus, et l’autre, pasencore »estinstaurée#, IV.CRÉER


POURUNPEUPLE
QUIMANQUE
Lediagramme necréepasseulement unenouvelle forme,maisde
nouvelles relations,undifférentiel parlequel la figure jaillitcomme Ainsiavons-noustenté
demontrer quelediagrammeestmobile
:
une
singularité universelle : undevenir-oiseau, undevenir-singe, un ilapparaît
pour
la première
foisdans
lecadre
del'analyse
micropolitique
devenir-tigre. Sil'onobserve leprocessus decréation dutableau, on dupouvoir deFoucault.
Danscecontexte,
ildécrit
lefonctionnement
peut
le décrire comme uneinjectioncontinue dudiagramme manuel immanentdesmécanismes
depouvoirdont
les effetss'expriment
dansl'ensemble visuel,comme uneirruptiondelapeinture intense enmême
temps
dans
le visible
etledicible,
laforme
decontenu
er
danslepurespace optique, c'est-à-dire lepurcodage symbolique du la formed'expression. D'aprèsDeleuzecependant, lediagramme
figuratif.Lestaches depeinture etleszones étaléeslibèrent, àtravers s'inscritégalement dans
les pointsderésistance
etleslignesdefuite
leursgrains etleurslinéaments, desforces intensives, quiagissent quiéchappent à l'organisation
età lalogique(optique) dominante.
immédiatement surlesystème nerveux etéchappent aupurespace «Lediagramme n'est
un
lieu quepour
les mutations
“.»Iljoueunrôle
optique. Lefaitpictural issudeceprocessus dedéterritorialisation stratégique
dansl'émergence
d'unfuturoud'unavenir". Leconcept
etdeconjonction desforces nepeutêtredécouvert parunevision dediagramme réapparaît
ensuite
enrapportavecl'art,
l'écriture
de
intérieure etspirituelle
maispar«unevision haptique del'œil?». Kafkaetlapeinture
deBacon.Danslesdeux
cas,
le diagramme survient
Lediagramme fait donceffet lorsqu'il brise l'organisation optique commeunemachine
d'expression,
commelemouvement
déterrito-
desformes et,sousl'influence dugeste manuel, libèredesfluxinten- rialisé
del'expression,
quiréalise
unnouveaurapport
aveclesfluxde
sifsdematières composant unnouveau blocd'affects etdepercepts : matière sonores,ouvisuelsethapriques.
Lediagramme,
pour ainsi
unefigureestune«sensation “accumulée”, “coagulée”# »,toujours dire,provoque d’abord ledésordre
etlechaos,
enjetant
pêle-mêle
unecomposition d’intensirés.Bacon décrit enconséquence lapeinture unrégime significatifdéjàexistant,
unordresémantico-syntaxique
comme unecapture deforces”, d’affectsoud'intensité :peindre lecri, etune
organisationoptique,pouren
tirer uneclartéetuneprécision
lasouffrance deLaviande, ledevenir-animal. L'agencement visueldu nouvelles. Cetteclartéercette précision
n'appartiennenttoutefois
tableau s'ouvre,
à travers lediagramme, àdesmouvements expressifs pasàunelogique dereprésentationavecsescatégories
d'identité,
de
etàunenouvelle composition desensations quiétablit«certe nouvelle ressemblance, d'analogieetd'opposition,
maisà une«logique dela
clarté* ».Peut-être lediagramme fait-ilégalement advenir unnouvel sensation ».Encesens, l’artdiagrammatique
agitd'unepartdansun
observateur —avec denouveaux organes, un«troisième œil,unœil moment dedestructionoudedéterritorialisation,
d'autrepartdans
un
haptique*! ». Il agitcomme unévénement affectif,danslamesure où moment decréation:dansunecomposition d'intensités
(d'affects
et
l'observateur seLaisse saisirparlesfluxintenses, parladéterritorialisa- depercepts), dansuneconstitutiondeprocessusdedevenir intensifs.
tionabsolue, parundevenir-animal dans l'intensité.Lestableaux de Il inclutégalement
le lecteuroul'observateur
dansl'expérimentation
Bacon euxaussi fonctionnent comme desmachines révolutionnaires, enregistre
intense
etanticipe
enmême
temps
unpeuple
quimanque,
dans lamesure oùilsenappellent àunpeuple éternellement mineur. encore
àvenir.
C’est
lavocation
politique
del'art,problème
auquel
la
pratique
diagrammatique
tente
dedonneruneréponse.

26.
Ibid,
p.148.
27.Jbid,,p.150.
28.{bid!,p.42
29.Jbid.,p.57: «Enant,
eten peinture
comme
enmusique,
il nes'agi 32.Gilles
Deleuze,
Foucault,
Paris,
Éditions
deMinuit,
1986,
p. 91.
reproduire
oud'inventer
desformes,
masdecapter
desus ESS 33.VoirNoëlleBatt,« L'expérience
diagrammatique
: unnouveaurégime
de
30.
Jbid,
p.151. pensée
»,Théorie,
littérature,
enseignement,
n°22,
Saint-Denis,
Presses
universitaires
31.fbid deVincennes,
2004,p.5-28,ici p.10.
V

Subjectivations
etdésubjectivations

PerTerPALPELBART

Unepensée
seprésente
quand«elle»veut,
etnonpas
«je»veux ;desorte
quec'est
falsifier
Laréalité
quededire:
lesujet
«je»estLacondition
du«prédicat »pente.
Quelque
chose
pense,mais
quecequelquechosesoit
Justement
l'antique
etfameux«je»,voilà,
pour nousexprimer avec
modération,
unesimple hypothèse.
Nierzsche

I. APRÈS LE SUJET, QUI VIENT?

Soit la questiondeJean-LucNancyà plusieurs penseurs,


dontBlanchot,Derrida,Lyotard,
Rancière,
Balibar,
Lacoue-Labarthe
:
«Aprèslesujet,quivient?» Vouspouvez imaginerladiversité
des
réponses,
d’untrès
longetlabyrinthique
effort
deDerridapourenmettre
àjourlesprésupposés,jusqu’à
labrièveté
delaréponse deDeleuze,
deuxpages àpeine,pluscourte
même quecelledeBlanchot.
Comme
siLaquestionnel'intéressait
pas,comme s’iln'avait
aucune respon-
sabilité
danscedéplacement quiaôtéausujetlaprimauté.
Jelecite:

unconcept
nemeurtpascomme
onveut,maisseulement
àmesure
quede
nouvelles
fonctions
dans
denouveaux
champs
lerendent
caduc.
C'est
aussi
pourquoi
il n'estjamais
trèsintéressant
decritiquer
unconcept
: il vautmieux
construire
lesnouvelles
fonctions
etdécouvrir
lesnouveaux
champs
qui
le
rendent
inutile
ouinadéquar!.

1.GillesDeleuze,
«Unconcept
philosophique
»,Cahiers
Confrontation,
n°20,
Paris,
Aubier,
1989,
p.89.
GG AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDeLsuze
Subjectivations
etdésubjectivations
67

N'est-cepascequ'ilauraitfait,lui-même,aulongdesonœuvre, Universelabstrait,
par-delàl'individuation.
Aucontraire,
c'estleJe,c'est
àl'égardduconcept desujet,aulieudelecritiquer?QuellesPRE lemoiquisontl'universelabstrait,
Îlsdoiventêtredépassés
paretdans
alorslesfoncrions
auparavant remplies parlesujet,etquiauraient l'individuation,
verslesfacteurs
individuantsquilesconsument, etqui
migréailleurs?
Deux,selonlui: universalisation
et individuation. constituent
lemonde AluentdeDionysos. L'indépassable,
c'estl'indivi-
Lesujet
comme garant
d'universalité,
sous
la forme duJe,etlesujet duationmême’,
comme suppôt
d'individuation,
sous
la formedumoi.Je universel
et
moiindividuel.
Or,c'esttoutunproblème depenser leurrapport, On necessera
d'assister
alorsauxaventuresduJe fêlé,du Moi
chaquephilosophe
ayantsonidéesurcette
distance.
C'estautourde dissous,
mêmeau-delàdeSurquatre formules.
Ce n'estpasici lelieu
cette
tension
quesedessine
cequ'onappelle
unephilosophiedusujer d'accompagner
ce parcours
deKantàSimondon.
Nousnous
bornerons
etsesmésaventures,queDeleuzeaideà rendrecaduques.
Parceque àcertepisteprésente
dansDifférence
et
répétition,répondant
d'avance
chezlui, lesujetquiconcentrait
cesfonctionsautourdesonunité, àlaquestion
deNancy: «L'individuation,
c'estellequirépond
à la
cède laplaceà unchamp transcendantal
sans sujet,auxsingularités questionQui‘? »
pré-individuelles,
auxindividuationsnonpersonnelles,auxheccéités.
Aulieu d'unsujetgrammatical, psychologique,épistémologique,
on IL.L'AFFECTDE
SOI PAR SOI,FOUCAULT
trouve unchamp oùlanotiondesujerdevient incidente,
désuète,
aboutissant
à lanotion d'agencement. Pour
le diredefaçon abrupte, Qu'enest-ildusujetdansMilleplateaux?I\ apparait
comme
nonplusfonction d'universalisation
maisdesingularisation,
nonplus nœudvirtuel
desubjectivation.
Sauferreur,
d'ailleurs,
c'est
lepremier
fonctiond’individuation
portant surlemoi,maisd'événement, tous ouvragedeDeleuzeoùcettenotiondesubjectivation
surgit,entant
deux indexéssurunagencement. Toutchange, onestdansunautre qu’unification
auseindu rhizome,
prise depouvoirenpleinemulti-
paysage,
desingularités,
d'événements,
d'agencements.PrenonsleHume. plicité.Subjectivarionéquivauticiàassujertissement, à l'intérieur
Lesujetn'estpasconstitutif,
il estconstitué.
Il n'est
pasdonné,il est d'unagencement déterminé.Bienplus,
lasubjectivation elle-même est
cequidépasse ledonné. C’estlaconstitutiondusujetquiintéresse, unestrate, demême quelasignifiance,
l'organisme,
l'interprétation.
plutôtquelaconstitution
del'objetqui,lui, suppose
déjàun sujet D'oùcette consigne inverse
:«Destratifier,
s'ouvrirsurunenouvelle
donné. D'oùlebesoindel'examinerentantquemouvement, pratique, fonction,diagrammatique. Désubjectiver
laconscience etlapassion”.
»
expérience,
succession,
différences.
Lesujetestceluiquicroit
et invente. Enfait,
il semble impossible
desedéprendre delasubjectivation dont
Il croitparce
qu'ilaffirme plusqu'ilnesait,ilétablit
desconnexions, noussommes victimes,
complices,ouagents, etdusujetquiluiest
c'estuneidéevivante. Etil inventedanslamesure oùil estsynthèse corrélé,sans intervenir
surl'agencement dontil dépend. Il fautdonc
dutemps —habitus,expectative,duration,brefcréation,production. toujours partirdel'agencement. C'estlaleçondeMilleplateaux,
Laconstitution dusujetnepeutêtredissociée d'uneaffectivité,
de déplacement décisifdontonn'apasencore tirétoutes lesimplications.
circonstances
dont
il constitue
la singularisation,
l’individuation?. Car,même aujourd'hui,quand oncesse dedireje,oncontinue dans
Voilàunsujet
quigarde
trace
desesfonctions
d'universalisation
et lemême régime desubjectivation.
«Lasignifiance etl'interprétation
d’individuation,
maisquiles déplace
versunchamppluslargeetplus ontlapeausidure,ellesforment aveclasubjectivation unmixtesi
molécularisé.
Deuxième exemple, Nierzsche
: collant, qu'ilestfacile
decroirequ'onestau-dehors tandis qu'onen
sécrète encoref.»
Lagrande
découverte
delaphilosophie
deNietzsche, souslenomdevolonté
depuissance
oudemondedionysiaque,cellequi marquesaruptureavec
Schopenhauer,
estcelle-ci
:sans
douteleJe etlemoidoivent
êtredépassés 3.Id,Différence
etrépétition,
Paris,
PUF,1968,
p.332.
dans
unabime
indifférencié,
maiscetabimen'est
pasunimpersonnel
niun 4.Jean-Luc
Nancy,
«Quivient
après
lesujet?
»,Cahiers
Confrontation,
n°20,1989.
5.GillesDeleuze
etFélixGuattari,
Milleplateaux,
Paris,
Éditions
deMinuit,
coll.
«Critique
»,1980,
p.168.
2.GillesDeleuze,
Empirisme
etsubjectivité,
Paris,PUF, 1953. 6.Ibid,p.172.
68 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVEC
DeLsuzs Subjectivations
etdésubjectivations
69

Voiciunexemple
vivant
danslebeaurécitdeDanielDefertsur toujours
surnous.
D'oùlesquestions
:«Quelssontlesnouveauxmodes
sonparcours
avecl'association
Aides,fondéequelques
moisaprèsla desubjectivation
sans
identitéplutôt
qu'identitaires
"°?»Etilajoute
:
mort
deFoucault.
À ladernière
page
desonlivreUneviepolitique,
quand
il décrit
lerapport
entre
lesidaerlamondialisation,
mêmeen Lesmutations
ducapitalisme
netrouvent-elles
pasun«vis-à-vis
»inattendu
dans
reconnaissant
l'importancedeladiffusionparInternerdespratiques lalente
émergence
d'unnouveau
Soicomme
foyer
derésistance
?Chaquefois
desassociations
pouravoiraccès
ausavoir
surlestraitements,
il fait qu'il y a mutationsociale,n'y2-t-ilpasun mouvement
dereconversion
mentiondela «construction
universelle,
surle modèleoccidental subjective,
avecsesambiguïtés,
maisaussi
sespotentiels‘?
ou plusexactement
américain,
d'unesubjectivation
homosexuelle,
d'une
identification
universelle
àunmodèle
psychologique
etpolitique
» Dansunelongue notedebasdepage, Deleuze
déploielasérie
quesonlivre,
demême
quesonparcours
oucelui
deFoucault,
n'ont d'événements
historiques
(Vietnam, Algérie,
nouveau
syndicalisme,
cessé
decombattre”.
Enrevanche,
il y auraittoutuntravail
àfaire psychiatrie
institutionnelle)
etcelle
descourants
depensée,
deLukacs
autour
desinventions
«socio-éthiques
»proposées parsonassociation àGuartari
etsamicropolitique dudésir,enpassant
parl’écolede
pionnière,
dontkebut,entant
quecontre-pouvoir,
n'était
passeulement Francfort,
lemarxismeitalien, lesiruationnisme,
pourmontrerle
derépondre
auxurgences
d'une
épidémie
qui
faisait
émerger
brutale- rapport
entrenouvelles
luttesernouvelle
subjectivité,
Foucault
leposant
mentunestigmatisation
ancienne,
maisenmêmetempsderemettre plucôr
en rapportauxmouvements
américains
etauxnouvelles
formes
encause
lesvaleurs
morales
soutenuesparœttemême
société.
Cen'est decommunauté? Riendetoutcelan'empêcheDeleuzedesoutenir
quedans sonFoucault
queDeleuze reprend lasubjectivation
enunsens l'idée
desubjectivation
comme variation
dupli,plidudehors,zone
positif.
Foucaultauraitmontré, dans sadernière
phase, laconstitution delenteur,
oùl'ondevient
«maître
desavitesse,
relativement
maître
d'unsujetquidécrochedescodes, opération désignée
comme «subjec- desesmoléculeserdesessingularités
? »,subjectivation
sanssujet,
tivation
»ouplissement.Onconnait l'interprétation
osée deDeleuze
: asignifiante,
dépendantd'unedésubjectivation.
«LesGrecs ont
plié Laforce, sans
qu'elle cessed’étre
force".»D'oùce
rapport
deLaforceavecsoi,l'affect
desoiparsoi.Même sicertesubjecti- III. AGAMBEN,LA DÉPRISE DE SOI
vitédérive
dupouvoir,
elle nedépend pasdelui.C'estvraiqu'àlong
terme,
lepouvoirtransforme
certesubjectivation
enassujertissement Cetentrelacement
entre
subjectivation
etdésubjectivation,
voyons-
pardesprocédures
diverses
: savoirs,
codifications,
herméneutiques. ledans
unautre
contexte
et avec
unauteur
différent.
Àlaquestion
de
Mais«ilyauratoujours
unrapportàsoiquirésiste
auxcodesetaux larevue
Vacarme
sur labiopolitique
etleprivilège
accordé
aupouvoir
pouvoirs
; c'est
mêmelerapport
àsoiquiestunedesorigines
deces danssonanalyse
de
l’étatd'exception,
audétrimentd'une
biopolitique
points
derésistance
».Etnous
voilà
aucœurde Lasubjectivité,
nonplus mineure,
Agamben répond:
comme
assujertissement,
maiscommerésistance
: «Laluttepourune
subjectivité
seprésente
alors
comme droitàladifférenceetdroitàla Je voislàunproblèmemajeur : Laquestion
dusujet,précisément,
quejene
variation,
àlamétamorphose”.
»Lasubjectivation
n'estplusaxéesur peuxconcevoirqu'entermesdeprocessusdesubjectivation
etdedésubjecti-
unsujet
universel,
JeouMoi,maissurLadifférence,
lamétamorphose. vation—ouplutôtcomme unécart ouunreste
entre cesprocessus.
Qui estle
Leproblème queDeleuze
soulève
ensuite,
c'est
desavoirpourquoi sujetdecerce
nouvellebiopolitique,
ouplutôtdecœre biopolitique
mineure
Foucault,
sisoucieux
depréserver
lacourtedurée,
a, dansle casdela dontvous
parlez
*?
subjectivité,
reculé
jusqu'aux
Grecs,commes’ilfallaitremonter
loin
pourtrouver
l'origine
desmodes
desubjectivation
intériorisée
quipésent
10./bid,,
p 123.
11./bid
> Defert,Uneviepolitique,
7.Daniel 6Paris,Seuil,2015,p.223-224. 12.Jbid
8.Gilles
Deleuze,
Foucault,
Paris,
Éditions
deMinuit,1986,
p.108. 13./bid,,
p.130.
9.fbid,,p 113. 14.«Unebiopolitique
mineure
»,Vacarme,
n°10,Paris,2000.
70 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE Subjectivations
etdésubjectivations
71

Etilexplique
:d'uncôté
lamachine
ératique
quibrouille
lesidentités serait
celuid'unenouvelle
biopolitique.
[…]C'estaufondcequej'aime
enproduisant
unedésubjectivation
généralisée,
del'autre
uneresubjecti- beaucoup chezSimondon: on peutpenser qu'ilpensel'individuation,
vationrecodifianc
lessujets
détruits.
Cesdeuxdirections
étaient
aucœur toujours,
comme coexistence
entreunprincipe
individuel
etpersonnel etun
del'analyse
ducapitalisme
depuisL'Anti-Œdipe
: déterrricorialisation principe
impersonnel,
non-individuel,
C'est-à-dire
qu'une
vieestfaite
dedeux
tousazimuts,
reterritorialisations
partout.
Cequelecapitalisme
défait,
la phases,personnelle
etimpersonnelle.
Ellessonttoujours
enrapport,
mêmesi
psychanalyse,
lesmédias,
lesreligions
ounationalismes
lereterritorialisent, ellessontnettement
séparées.
Je croisqu'onpourrait
appeler
l'impersonnel
Deleuze
etGuattarin'ontjamais
diabolisé
lesdéterritorialisations
du l'ordre
delapuissance
impersonnelle
avec
laquelle
toute
vieestenrapport.
capitalisme
oulesdésubjectivations
quiendérivent,
maisontpoursuivi Etonpourrait
appeler
désubjectivarion
cette
expérience
qu’onfaittousles
l'analyse
erlacritique
desaxiomatiques
quis'ymultiplient,
œdipiennes, joursdecôtoyer
unepuissance
impersonnelle,
quelque
chose
quienmême
signifiantes,
identitaires
etcompensatoires.
Comme s'ils seplaçaient temps
nous
dépasse
etnous
fairvivre",
surunautreplanoùdésubjectivation
etresubjectivation
entraient
dans
desrelations
moinsdichotomiques, parfois
même seconfondaient Ladésubjectivation
aundouble sens,
ouunedouble direction,
paradoxalement.
Pourleschizo,
parexemple.
la désubjecrivarion
etla «négative
»,quand
elle estlerésultat
desmécanismesdebiopouvoir,
resubijectivation
nesontpasunproblème, nesontpas7 problème. et«positive
»quand ellerépondauxcoercitionsidentitaires
comme
Cequil'intéresse
estautrechose,
leslignes
deperception,lesblocs ligne
de résistance
oud'échappée.Etilconclut,
insistant
surleparadoxe
d'intensité,
lesparcours
d'expérimentation.
À plusgrande
échelle,
la deladeuxième position: «lesujetn'estquelesujetdesapropre
question
estcelle
desagencements
collectifs
d'énonciation,
deslignesde désubjectivarion
!£.
»
fuite
créatrices,
dudevenir-minoritaire,
mais
également
celuidesremps
morts,del'épuisement,
del’anti-production,
ducorps-sans-organes. IV. MAJEUR,MINEUR
Riendecelanereconduit
ausujetniàsonryped'individuation,
mais
déclenched'autres
modalités
d'individuarion,
d'autres
processus
de Riendecelanemanque
d'intérêt,
maisest-ce
vraiment
nouveau
?
singularisarion,
enadjacence
desquelspeuvent seproduire
dessubjec- À lafindesannées
1960,
Deleuze
posait
ceproblème
àsafaçon,
sans
üvations
collectives,
quinedépendent pasdecequ'ellesfuient,
nine pathos.
Un devenir,
qu'est-ce
quec'est?Unedésubjectivation
arrache
Lereflètent.
Agambenenesttrèsprès
quand il seréfère
àFoucault. lesindividualités
àleuridentité
constituée,
desortequesebrouillent
contoursetfrontières
entre
lesdomaines.
Lesdevenirs
sontditsimper-
Danslesderniers
travaux
deFoucault, il yauneaporie[..…] crèsintéressante. sonnels,
puisqu'ils
défont
notrevisage
«humaintrophumain»,enfaveur
Ï yàd'unepantourletravailsurle«soucidesoi»|.…].Etenmême temps, l'autres
devenirs.
Ledéfiestdefaireface
àlaforme
subjective
dominante,
àpluseurs
reprises,
ilénonce
kethème apparemmentopposé :il fautsedéprendre l'homme-mâle-blanc-européen-rationnel,
majoritaire
puisque,
même
desoi.11ditplusieursfois:«Onestfinidanslaviesil'ons'interroge
sur statistiquement
minoritaire,
ilsert
demesure
universelle.
On
sait àquel
sonidendié:l'artdevivre,
c'est
détruire
l'identité,
détruirelapsychologie.
» pointcedevenir
minoritaire,
aucœurdelapensée
deleuzo-guattarienne,
s'oppose
àl'émancipation
illuministe
héritée
deKant,quienappelle
Doncil yabieniciuneaporie
: unsouci
desoiquidoitaboutir àl’hommeautonome,
osant
se soustraire
auxtutelles
etpenser
par
àunedéprise
desoi.Qu'est-ce
qu'une pratique
desoi,noncomme lui-même”.
Foucault
arepris
lerexte
deKant
sur l'Aufklärung,
enen
processus
desubjectivation,
mais
comme processus
setrouvant
dans faisant
letraitmajeur
denotremodernité,
nonpascompriseentant
unedéprise
desoi? quepériode
historique,
maisentantqu'attitude,
rapport
déterminé
à
l'acrualité,
unpeucequelesGrecs
entendaient
parethos.
C'est
l'ethos
de
I faudrait
setenir
enméme tempsdans
cedoublemouvement
dedésubiec-
Gvation
etdesubjectivation.
Évidemment,
c'est
unterrain
difficile.
li s'agit
15./bid
vraiment
d'identifier
cette
zone,
cenomansLandentre
processus
desubjec- 16.
Jbid.
tivation
erdedésubjectivation,
entreidentité
etnon-identité
|] ceterrain 17.Cf.Diogo
Sardinha,
L'Émanciparion
deKant
àDeleuze,
Paris,
Hermann,
2013.
72 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECD'ELEUZE Subjectivations
etdésubjectivations
73

lamodernité
qui,
outre
lecourage
de
penser
par
soi-même,
implique
un nepense
paslaquestion
entermes
deswjes
politique,
maisdefonctions
rapport
àsoi,untravail
sursoi,sursoncorps,
sespassions,
Sonexistence. quienont
pris Lerelais,
redessinant
subjectivation
etdésubjectivation
D'oùlepontextravagant
queFoucaultconstruit
entre
KantetBaudelaire, dansuncontextebiopolitique.
vers
ledéfidefaire
desoietdesavieuneœuvre
d'art.
Cequiintéresse
Foucault,
c'estl'entrecroisement
éthique
entrelaproblématisation
du V. ÉVÉNEMENT
présent erlaconstitution desoientantquesujet autonome,même si
certeéthique estuneesthétique del'existence. Or,aulieudedéduire Qu'enest-ilalorsdecequinousoccupe
depuis
ledébut?
Lesfigures
decequenous sommes cequ'ilnous estimpossibledepenser oufaire, deladésubjectivation
apparaissent
chez Deleuzecomme desprocédés
a avec Baudelaire,il s’agit
d'extrairedelacontingence quinousfaits,La micropolitiques
etagonistiques
: danslelivresurNietzsche,
parles
possibilité
deneplusniêtre nifairenipenser comme auparavant.
Îlest forces,
chezKafka,parlesdevenirs,
chezBartleby,
parlasoustraction,
difficile
denepastomber d'accord aveccerte conclusion.Quis'oppo- chezBeckett,
parl'épuisement.
Il estquestiond'échapper
aupoids
serair
àladéfense de
l'autonomie, à l'exigencedepenser parsoi-même, d’unpouvoir,d'unephilosophie,
d’unpaternalisme,
d’unappareil
de
deselibérer desturelles? Quicontesterait l'injonctiondefairedesa capture.
Fuir,
fairefuir,déserter,
s'ouvrir
àdessubjectivations
non
vieuneœuvre d'art, surtout
si onpousse versunedimension collec- assujerties.
On l'avu,Milleplateaux
commenceparuneéquivalence
tive?Quirefuserait latransgressionpratique decequenoussommes ? entresubjectivation
etassujertissement.
Or, d’autres
subjectivations
Etpourtant, lorsqu'onnousdemande d'êtreresponsables,
cequ'on nonassujetties
sontpossibles,
àconditionqu’elles
nereprennent
pas
à nous demande, c'est
l’assujettissementau«majeur ».Qu'onpense la lafigure
dusujet
etnes'appuient
passurlepointdesubjectivation
ou
Grèce d'aujourd'hui. L'exigencede«devenir majeur »necache-t-elle l'agencement
auquel
il était
lié.Quand Negridemande
àDeleuzequelle
pasl'exigencedesoumission àunmodèle dominant, hégémonique? N'y politique
peutprolonger
dansl'histoire
lasplendeur
del'événement
a-t-ilpaslàunidéal d'asservissementàunmodèle devieoud'économie etdelasubjectivité,
Deleuzerépondainsi:
supposée désirable ?«Il fautpayersa dette.»
À l'inverse,
le défileplusradical neconsisterait-il
pasàéchapper àla On peureneffetparler
deprocessus
desubjectivation
quandonconsi-
condition majeure quinous estimposée comme idéal,nature,
progrès dèrelesdiverses
manières
parlesquelles
lesindividus
ou lescollectivités
oudestin, etdontlamise enquestion peuttoujours paraître,
auxyeux seconstituentcommesujets[...] de celsprocessus
nevalentquedansla
des«majeurs »,comme irresponsable,voireinfantile?N'est-ce
pasce mesure
où,quandilssepassent,
ils échappent
autant
auxsavoirs
constitués
quiaétéreproché auxGrecs, deseconduire comme desenfants? Etun qu'auxpouvoirsdominants.
[..] 11n'ya là aucunrerourau«sujet»,c'est-
livreassez sophistiqué surDeleuze etKants'achève paruneétrange à-dire,
àuneinstance
douéededevoirs,
depouvoir
er desavoir.
Plurôt
que
accusation :«Oui,Deleuze estirresponsable. Comme Rousseau
voulait deparlerdeprocessus
desubjectivation,
onpourrait
parler
denouveaux
forcerleshommes àêtrelibres,forçonsDeleuze àêtreresponsable'#.
» types
d'événements
?.
Époustouflant!
C'estceterrorisme
majoritaire
queDeleuze
etGuartari
n'ontcessé
decombattre.Leschizo,
lenomade
sontdesfigures
fuyant C'estcomme
silesprocessus
desubjectivation
étaient
secondaires
lerationalisme
adulte
etresponsable.
Ledevenir-femme,
enfant,
noir, parrapportauxnouveaux
rypesd'événements
auxquels
ilslivrent
imperceptible,
sontdesfuites
devant
lemodèle
éclairé,
«trophumain», passage.
Sionélargit
laperspective,
le pointdedépart
estasubjectif,
wopanthropocentrique
eteurocentrique.
Même entermespolitiques, aveclasériedessujetslarvaires
résultant
decontemplations
furtives,
laréponse
deDeleuzeàNegri:«Comment conquérirlamajorité
?»: avec
lesmoimultiples
comme
autant
demodifications?,
avecleJe
«unproblème secondaire
faceauxcheminsdel’imperceptible
», affection
du moipassif,fêlé,dissemblance#!,
plidudehors,
avecle
pourrait
apparaître
comme
lecomble
del'irresponsabilité!
C'estqu'elle
19.Gilles
Deleuze,
Pourparlers,
Paris,
Éditions
deMinuit,
1990,
p.238.
18.GaspardKoenig,
Leyuns
sur
la philosophie
deGilles
Deleuze.
Unsystème
kantien, 20.{d.,Différence
etrépétition,
op.cit.,p.107
Paris,
Ellipses,
2013,
p.129. 21.Jbid,,p. 117.
74 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVEC
DBLEUZE Subjectivations
etdésubjectiations
75

«superjet
»comme
se/enjoyment.
Dèsledébut,
Deleuze
était
ailleurs, on
dirait quecette
sous-jacence
s'est
déplacée
del'objet
verslesujet,
deLa
unevien'étant quelesignedernierdeceplanasubjectif précoce. subjectité
àlasubjectivité,
depuisDescartes
aumoins.
Ceserait
lànotre
«L'individuation d'unevien'estpaslamême quel'individuation pointd'appui
métaphysique,
queNierzsche
n'aurait
faitqueréitérer
dusujetquilamène oulasupporte”. »C'estévident : la vieetle avec
savolonté
depuissance®*,
Maisnousnesommes
pasheideggériens.
sujetnesedéploient passurlemême plan.Deuxséries : vie,plande Alors,
cen'est
pasvers
l’Être
que
nous
nous
tournons,
mêmesicertains
consistance,affects,
événement,Aiôn,d'unepart;sujet,substance, essaient
denousfaireécouterla«clameur
del'Être».D'unautre
côté,
forme, personne, Chronos,
de
l'autre.
Sil'on veutà toutprixgarder ni Freudou Lacanne
suffiraientpourdéplacer
l'enjeu?’.
Pourledire
lestermesdesubjectivation
oudésubjectivation,
il fautmettre l'accent àlafaçon
hégélienne,
mêmedivisé,cequifaitd’unsujer
unsujet,
c'est
surlesdeuxrypes auxquels
onaaffaire,«négatif»et«positif»,avec qu'ilestcapable
dereenirensoisacontradiction,
structure
deréappro-
lesdeuxrypes desubjectivarions,
«assujerties
»et«non-assujerties ». priation
quipeut
passerparl'Autre,
pourévoquer
Kojève.
Deleuze
est
Sil'affinité
entre unedésubjectivation
négative
erunesubjectivation l'undesseuls
desagénération
quiéchappe
àcette
lignée
del'Être
ou
assujettie
estévidente
(déterritorialisation
capitalistique
et reterritoria- del'Autre,
à cetexercice
d'aura
dialectique
qui
n'estqu'une
ontologie
lisarions
ethniques oumédicales,
dutype:«jesuisunséropositif »), dusujet.Quandon refuse
cefondement,
onestdansl’effondé,
dans
moins évidentestlerapport
entreunedésubjectivationpositive etune l'effondrement,
danscequ'onaappelé
desmouvements aberrants,
subjectivation
non-assujettie,
telle
quele«JesuisÉgyprien,
Indien, Entout
cas,à lalumière
descoordonnées
fines
queDeleuzemobilise
Noir,Japonais»deNijinski,qui remonte
endeçàduJe erdu Moi: dèsledébutdesonœuvre,lebinôme
subjectivation-désubjectivarion
sebrouille
etdémultiplie.
SiLethèmedusujetpersiste,
c'est
comme
L'individuation
estmobile,
étrangementsouple,
fortuite,
jouissant
defranges unspectrequihantenosmanières,
vusaprégnance?’.
L'enjeu
du
etdemarges,
parcequelesintensités
quiLapromeuvent
enveloppent
d'autres déplacementqueDeleuze
exprime
n'est
pasanodin:
intensirés,
sont
enveloppéespard'autres
etcommuniquent
avectoutes.
L'individu
n'est
nullement
l'indivisible,
ilme
cessedesediviser
enchangeantdenature?. Siunconceptvaur«mieux »queleprécédent,
c'est
qu'ilfaitentendre
des
nouvelles
variations,
desrésonances
inconnues,
ilopèredescoupesinsolices,
Nousavons parcouru
unchemintropdélicat
pourensortirlesmains ilsuscice
desévénementsquilesurvolent?*,
vides.
J'aurais
enviedenerienajouter,
saufuneligneàlaDeligny,
avecsonrefusdescatégories
quidéfinissent
les-hommes-que-nous-
sommes,lui quiétait
àlarecherche
d'unehumanité autre,
asubjective, 24.ManinHeidegger,
Nierzsche,
trad.
fr.Pierre
Klossowski,
Paris,
Gallimard,
ou«surjective
»,pourbarbariser
lalangue.
Maisil faudrait
êtreDeligny 1971,t. Il, p.363: «L'êtreaucoursdesonhistoire
entantquemétaphysique
est
continäment
subjecrité.
Làoùlasubjectité
devient
subjectivité,
Làlesubyecrum
distingué
pour
le réussir,
Whitehead,
DavidKopenawa, oujusteDG.Alorsje
depuis
Descartes, lego,auneprimauté. »Thèsequesigneenpartie
DeLibera dans
reprends
dans
undernier
mouvement
cequinous
interroge.
À quoi sonArchéologiedusujet,Paris,Vrin,2010,enlacroisantavec
Foucault.
bonselibérer
dusujet,sic'estpourretrouver
dessubjectivations
autres 25.Il suffitderenvoyeràunarticle deMikkelBorch-Jacobsen
oùil montreque
quedésubjectivantes
?Lesévénements quiycorrespondent
déplacent même divisé,
clivédansuneégologie négative,
lesujetdudésir
assujetti
ausignifiant
Lelieuetlesfonctions
dusujet,
lesrenversent,
lesabolissent.
C'estLa garde
Laposition dusujer,
parauro-énonciation,représentation
desonmanque. Voir
forcedesévénementsden'appartenir
àpersonne,
puisquecequileur «Lesujetfreudien, dupolitique à l'éthique
»,in Confrontation,
op.cit.etLacan,
L maltre
absolu, Varis,
Flammarion, 2015.
appartient,
c'est
leurpuissance
dedésubjectivation.
Cequipeursembler 26.UavidLapoujade,
Deleuze,
lesmouvements
aberrants,
Paris,
Éditions
de
tautologique
oucirculaire.
À quoibonparcourir
cecircuit
sans
qu'on Minuit,2014.
arriveàunpointderepos?
Maislesujet,commesous-jacence,
consis- 27.Lespirouettes, réintroduisant
lesujet
endépitdesunéclipse,
n'ensontque
taitjustement
à offrirunpointd'appui
final.Sionsuivait
Heidegger, plusrisibles
: voirLacritique
denotreanthropocentrisme,
surtoutquandil secache
derrière
«l'absence,
Lafinitude,
lemanque-à-être
»attribués
àcetanimal
univers,
l'humain
+eninachèvement
grandiose
»,seul«pourqui
il euste
ununivers
»:Viveirs
22.GillesDeleuze
etFélixGuattari,
Milleplateaux,
op.cit.,p.320. deCastro,
Métaphysique
canmbales,
Vars,PUF,2009,
p.B-9.
23.Gâles
Deleuze,
Différence
etrépétition,
op.cit.,p331. 28.GillesDeleuze,
Unconcept
philosophique,
op.cit.
VI

Delaclinique
àlamusique
:
stéréotypies
psychiatriques
etritournelles
deleuzo-guattariennes

MAËL GUESDON

Lapremière occurrencedutermederitournelle
danslescextes
publiés
deGuattari s'inscrit
auseind’uncompte renduclinique
rédigé
en1956 etintitulé
«MonographiesurR.A.!».Laritournelle
ydésigne
les«réponsesstéréotypées?
»d’unpatientpsychotique
que
Guattari
suitenpsychothérapie.
Reprise
àLacan’,
cetteassociation
entreritournelle
etstéréorypie
place
immédiatement
l'usageduterme
danslaproblématique
psychiatrique
del'auromatisme
comportemental.
Jemepropose icideretracer
quelquesbalisesmarquant
les approches
historiques
delastéréotypie
ensoulevantlesquestions
sous-jacentes
que
révèlent
leursdivergences
définitionnelles.
Ils'agira
ensuite
d'examiner

1.Lecompte renduàétérepris envolume en1972 dansPsychanalyse


ettransversalité
(FélixGuattari, Pyhenabyse errransversalité,
Paris,
François Maspero,1972,p. 18-22).
2.Ibid,p.18.Cf.également ibid, p.20:«[R.A.]reprit saritournelle
:“c'est
les
électrochocs”, “c'esticiquejesuiscombé comme ça”,
“il faucmefaireuneradiodu
cerveau”, etc.»
3.L'origine lacanienneduterme estrelevée
parAnneSauvagnargues dans «Deleuze.
Del'animal àl’art»(Anne Sauvagnargues, «Deleuze. Del'animalàl’art»,inFrançois
Zourabichvili, AnneSauvagnargues etPaola Marrati,Laphilosophie
deGillesDeleuze,
Paris,PUF,2004, p.209).Dans leséminairesurLespsychoses
(1955-1956) queGuarcari
suivait aumoment même oùil rédigeait «Monographie surR.A. »,laricournelle
désigne laformule qui,dans
le délire psychotique,«serépète, […]seserine avecune
insistance stéréorypée»(Jacques Lacan, Leséminaire,
livreHI.Lesprychoses,
1955-1956,
Paris,Seuil,1998, p.42-43).Jenedétaillerai pas,danscet article,
cetusagelacanien
nilesdécalages delarepriseguattarienne, etmepermets derenvoyer,surcepoint,à
MaëlGuesdon, «Mème lesconstantes sontpourlavariation. Surtroisusagesdela
mélodie dansCapitalisme etschizophrénie »,inPascaleCritonetJean-Marc Chouvel
(dir.),GillesDeleuze.Lapensée-musique, Paris,
Cdme, 2015,p.41.
78 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDeELEuzE DeLaclinique
àlamusique
:stéréotypies
psychiatriques.79

commentlessolutions
thérapeutiques
proposées,
dans«Monographie lesmatériaux
reproduits: quelleestlavaleurexpressive
deparoles
surR À.»,reprennent
etdéplacent
lesenjeux cliniques
delarépétition oudegestes
dont
la répétition
semble
ignorer
toutcontexte
etroute
automatisée,
afinderelire,
àpartirdel'ensembledeceparcours,
la interaction
?
conceprualisation
deleuzo-guatrarienne
delaritournelle
autournant Auseindesapproches
classiques
delapsychiatrie,
deux conceptions
desannées1980,enmontrant comment lemontagespécifique
entre principales
s'opposent
sur cepoint.Danslepremier
rypededéfinitions
éthologie
etmusique
qu'ellepropose
repense,
demanière
radicalement (lesdéfinitionsrestreintes),
lastéréotypie
désigne
unemanifestation
nouvelle,
l'articulation
delarépétition
sensible
etdel'expression
déjà comportementale
dénuéedetoute
volonté
:pourqu'une
attitude
soit
problémarisée
dans
la clinique
desstéréorypies*. reconnue
comme stéréorypée”,il faut,eneffet,selonla formulede
Dromard,qu'elleserépète«d'unemanière arbitrairesansraisonet
1.AUTOMATISME,EXPRESSIONET SUBJECTIVITÉ sans
but®
».Danslesecond typededéfinition(lesdéfinitionsélargies),
lastéréotypiesedifférenciedessymptômes
spasmodiques
précisément
Depuislesanalyses
des«déliresstéréorypés
»chezFalret(1864)° parsonintentionnalité
sibienqu'elle
secaractérise,
d'après
Abély,
jusqu'aux
approches dumilieudesannées 1950,lesdéfinitions parson«substratum
idéo-affectif”
».Danslaséparation
entre
cesdeux
psychiatriques
delastéréorypie
frappent parleurgrandediversité. types
d’approches,
laquestion
n'estdoncpasseulement
desavoir
si
Certe
diversité
témoigned'importants
écartsaussi
bienthéoriques
que uncontenuintentionnel
aprésidéàl'acte
quiensembledésormais
pratiques,
dontlesdissensions
se cristallisent
surlaréponse
àapporter privé,maissi un tel contenuestencoreaujourd'huiéventuellement
àlaquestionclinique
soulevéeparlarépétition
automatisée
: ya-t-il présent
: lemotifquiseréitère
dit-ilquelque
chose
delapsychologie
unmotifintentionnel
àl'attitude
quisefixeetboucle
surelle-même? desonauteuretdesonrapport
àlasituation
danslaquelle
il s'inscrit
?
Derrière
cettequestion,
l'enjeu
estdedéterminercomments’articulent Enréalité,
derrière
l'alternative
entre
uneapproche
dans
laquelle
expression
etréirération
dansdescasd'auromatismes
pathologiques
qui lesstéréorypies
secaractérisent
parlefaitqu'elles
« neservent
pasà
semblent
vider
deleursens
etdissocier
deleurinscription
contextuelle l'interprétation
d’unétataffectif,
etn'ontpasdebutexistant dans
laréalitéobjective
!!»etuneconception quiaffirmeaucontraire
4.Érant
donné
l'étendue
decette
circulation,
ilnes'agira
pasicidedéployer,
en que«lesprérendues stéréorypies
dépourvues detoutcontenu idéo-
détail,
chacun
decesmoments,mais plutôtderestituer
leursdynamiques,ensoulignant affectif
sont,envérité,
lesmoins
caractéristiques!
»,ledésaccordse
lestransformations
delaproblématique qu'ilsponctuent ainsiquel'inventivité
de jouebiensurladimension expressive
delamanifestation
: inexistante
l'approche
deleuzo-guartarienne
quisedessine, dansceraxe,entre1956et1980. danslepremier typed'approches
eraucœur dusecond. Maiscette
5.Jean-Pierre
Falret,
Desmaladies mentales etdesasiles
d'aliénés.
Leçonscliniques
«tconsidérations
générales,
Paris,Baillières
etfils,1864,p. 170,194-195 et346.Sur
kespremières
érudesdeLastéréorypie psychiatrique,
cf.JeanMunch,Sréréompies er 7.«Lejouroùl'idée
délirante
ayantdisparu,
le malade
continuera
samanœuvre
symbolisme
desshicophrènes.
Strasbourg, Imprimerie Alsacienne, 1924,p.7; Xavier d'unefaçonautomatique,
cejour-làseulement
cette
manœuvre
sera
bienvraiment
Abély.Lesséréorypies,
Toulouse, Dirion,1916,p. 18:AntoinePorot,Manuel unestéréotypie.
»(Gabriel
Dromard,
Érude
clinique
surLastéréosypie
des
déments
alphabétique
depsychisme
cliniqueetthérapeutique[1952],Paris,
PUF,1975, p.615er précoces,
op.cit.,p.28.)
SergeRevel
ecChantalLacomme, Pry.Duionnaire prarique
etthématique.Poxchiatrie, 8.CitéeparXavier Abély,Lesstéréotypies,
op.cit,p.24(jesouligne).
Fee psychotherapie,
Paris,Ellipses.
2005,p.354. 9.Ibid.
Mappuie
enparticulier
icisurlesouvragessuivants
:Xavier ,Lesstéréotypies, 10,Lesconceptions
«restreintes
»desséréorypies
n'excluent
passystématiquement
epct Ale Cabo,»
Connibuion
à'énude
esmétonpies
sAbba Mann lescomportements
dont
lespremières
itérations
résulteraient
d'une
réaction
consciente
t.XII, 2'série,
Paris,Bureauxduprogrès
médical,
1901, P.476-505 ; PaulGuiraud, etintentionnelle
du quecettedi bleavoir
tutab disparu lors
+Analvse dusymprôme stéréorypie
»,L'Encéphale,
XXXI]'Année, vol.2,n°4,Paris, dudiagnostic,
alorsquedanslesdéfinitions
élargies,
c'estaucontraire
entantqu'elle
G. Doin,1936, p.229-270;PaulGuiraud,
Prrchistrie
clinique,Paris,LeFrançois, témoigne
d'une«idéefixedirectrice,
consciente
d'abord,
subconsciente
ensuite,
mais
1956;Antoine Porot,Manuelalphaberique
deprxhiatrieclinique
etthérapeutique, toujours
évocable
»quela réitération
seraidentifiée
comme
stéréorypée(XavierAbely,
+».ro Siéréorypres
etsymbolisme
desichizophrènes,
op.cit.; Gabriel Lesstéréorypies,
op.cir.,p. 145).
po
a nes. : q luesurlastéréorypie
Ldes
déments
précoces,Clermont, Imprimerie
imeri 11.JeanMunch,Sréréorypiesetsymbolisme
desschizophrènes,
op.cit, p.9.
12.
Xavier
Abély,
Les
stéréompies,
op.
cit.p.24.
80 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE Delaclinique
àlamusique
:stéréotypies
psychiatriques...
81

ligne
departage
serépercure
également
surlestacut
delarépétition émancipées
del'étataffectif
quileuradonnénaissance !*»,Guiraud
quiestconçue soitcomme lerésultat
d'uncomportement moteur, conteste
l'approche,
selonluitropgénérale,
d'Abély
: il reconnaît
que,
soitcomme lamanifestation d’unératpsychique
conditionnépar dans
quelques
casd’hébéphrénie,
lesstéréorypies
peuvent
ressembler
à
uneémotion *. | certains
riruelsquotidiens,
auxhabitudes
extrêmement
précises
dutype
Cetteproblématique clinique
abordedonclaquestiondusens
—les decellesque
l’on voitchezlespersonnes
meublant
leurvied'activités
stéréotypies
ont-ellesuneinscription
dansla«réalité
objective
*? »_ àheures
etàlieuxfixes,
mais,
làoùcesdernières
ontlacapacité,
encas
parlebiais
delasource, intentionnelle
oumécanique, dusymptôme, denécessité,
des'adapter
à lasituation,
la fixationimmuable empêche,
Maiscerraines analyses
psychiatriques
sepenchentplusspécifique. desoncôté,toutevariation.Ellesereproduitsansaucune modification,
ment
sur laquestion
deseffets,ententantdecomprendre
le rôleet quellesquesoientlesconditionsdanslesquelles elleprendplace'?.
lesusages
del'auromatisme
danslapsychose".C'estenparticulier En raréfiantlesinteractions
du malade avecsonenvironnement, la
lecasdePaulGuiraud
qui,après
avoirdéfini,
dansson«Analyse du fixationfonctionne
donccommeunfiltredont la tolérance
seminimise
symptômestéréorypie
»(1936),
la stéréorypie
comme une
« fixation aveclecemps
: «lavieréelle
danstoute
savariabilité
etsonimprévu
: immuable!*
»,souligne
sadimension
conjuratoire!”
la fixation
repousse estcristallisée
dansl’unoul’autredesthèmes
invariablement
fixés. »
systématiquement
l'imprévuententantdecirconscrire
desespaces, Parailleurs,
aucœur
desonanalyse
principalement
centrée
sur
les
destrajectoires,
desparolessanschangementquicoupent
leur auteur stéréorypies
langagières,
Guiraudmontre
comment
celles-cisoulèvent
dufluxagité
desévénementserdesaltérations
psychiques
ourelation- lestensions
d’unlangagetenant sursapropreréitération,
quiréduit
nelles.
Toutens'opposant auxdéfinitions
restreintes
—enparticulier progressivement
les possibilités
devariation
etd'échange,
etappauvrit
àcelles
deDromard erdeBostroem—erenaffirmant
que,dans
le cas ainsiprogressivement
lemonde
qu'ilexprime.
Enmettant
en reliefsurce
desstéréorypies
délirantes,
«lesformulesverbales
nesontnullement pointl’apparente
dimensionfonctionnelle
delarépétition,
Guiraud note,
dans uneformulequiexprimebienlatension spécifique
dusymptôme,
que«cequ'onappelle incohérence
chezlesschizophrènes
n’est
pasune
13.Danslepremier cas,larépétition n'estdoncpas«àcomprendre »(Jean
Munch, Siéréorypues
etsymbolisme desschizophrènes,
op.cit.,p.65)puisqu'elle
s'impose suitedemotsgroupés auhasardetvariant d'unmomentà l’autre»,
simplement comme +unemanifestation motricedeladissociation schizophrénique
» il s'agit
bienplutôtdes«mêmes formules [qui]reviennent
toujours,
(idem).Dansl'autre,
aucontraire,elledérivedirectement
d'uneréaction affective
àpardr l'agrammatisme habituelrésulte
d’une sorted’élision
deséléments
de
OR T e c répéurion d'actesprimitivement lasyntaxe,Les
liaisons
defragments
d'idées
par
fixationinvariable
n'ayant
le inteationnels,plus souvent complexes »et«nullement spasmodiques»(Xavier A
plusbesoinducimentgrammatical?'».Lafixationconsolide
desliens
à
Lesstéréotypies,
op.cit..145,
je souligne). +
14.JeanMunch, Siéréosypies
ersymbolisme desschirophrènes,
op.cit.p.9
15.Comme lerappelleNicolas Brémaud dans unartide de2009incitulé«Retour 18./bid,,jesouligne.
Cf. également PaulGuiraud, Psychiarrie
clinique,op.cit.
surlesstéréorypies
psychotiques »,Cahen insiste,
dès1901, surcecaractère
hautement p.113.
réactif
delaréitéracion pathologique quireprésente souvent «unmoyen dedéfense 19.«Leshabirués dupetitcaféchangent detablequand uncarreau cassélaisse
ne 1emaiade poursedébarrasser desespersécuteurs »(NicolasBrémaud , pénétrer
la pluieouuncourant d'airjusqu’à
eux,unschizophrène stéréorypé
selaisse
+ Retoursurlesstéréotypies psychotiques»,L'information psychiatrique,
10,vol.85,
tremperparl'oragedanssoncoinde la coursionnel'oblige pasàrentrer »(Paul
rs Libbey Eurotext, 2009,p.877-890). F Guiraud,«Analysedusymptôme stéréorypie
»,op.cit.,p.243).Veillant
àconserver
ionimmuable désignelarépétitiond'attirudes,
de oudeparoles laportéecliniquedusymprôme, Guiraudrefuse doncd'identifier lesacticudes
. d'unemanière uniforme, invariablequiattirel'artentiondedas »(Paul
stéréotypées
aux«habitudesuniformes »quirésultent
simplement, selonlui,«d'un
Guiraud, *Analyse dusymptôme stéréotypie»,op.cit. p.234).Elles'oppose à défaut
derénovation mentale»(ibid,p.251).
l'ixération
où«l'acteest répété immédiatement eràdenombreuses reprises
»(idem).
17.Cecaractère défensifestsouvent noté,chezDromard, Bostroem ouKläsi,
20.
/bid.,
p.243.
21.{bid.,
248,
je souligne.Nicolas
Brémaud reprend
laformule deGuiraud etva
De = desrépétitions Dre desschizophrènes contrelesidées
délirantes
jusqu'à
affirmer
que«làoùl'universnonbornéduschizophrène setrouveassailli
[.…]
autressurcepoint Paul Guiraud, «Analyse du tômestéréotypie» pardesmoments soudainsd'angoisse
indicible
nonrégulés,
lesstéréorypies
viendraient
Pc. p.233). Maislaquestion dinique porte alouprincip
letsens se l'intégration
comme unemanière delescimenter,
delessouder,jouant
ainsiunrôledeprotection,
Oul'exclusiondecesmouvements défensifsdanslesymptôme «stéréorypie
».
voire
deprévention
quantàunpossible ébranlement
—oueffondrement - delaposition
82 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDeeuze DeLaclinique
àlamusique
:stéréotypies
psychiatriques...
83

défaut
d’articulations,
desvoisinages
sans
dynamismeentre
leséléments aussiceluiduproposreproduit
à l'acte
desareproduction.
En
effet,
qu'elle
rapproche.
Elledonneconsistance
àdesenchaïînements
de s'ilyaiciexpression,
ellenepeut
êtredéfinie
commel'extériorisation
formules,
maiscette
consistance
elle-même
est unpiège,
imposant
des unilatérale
d'un«contenu”»puisque
lecontenu
discursif
neprime
liaisons
qui,dans
leur
fixité,àlafoisconsolident
etdéfont
l'expres- pas,
dans
legeste
même
delaréitération,
surleséléments
non-discursifs
sionduschizophrène.
Lastéréorypiefortifie
desassociations
toujours qui lui sontassociés
: lorsqu'unauteurou un locuteurrépète,
à de
plusétroites
entre
desidéesdontlenombre etlavariétédiminuent nombreuses
reprises
etenconservant
saformeexacte,
uneparole
ou
àmesurequ'augmenteledélire
: ellerenforceainsiparadoxalement untexte
fragmentaire
etagrammatical”,
laproblématique
sedéplace
l'incohérence
d'unmonde quisedéfinitmoins parl'aléatoire
deses del'enjeude
l’origine du «message
»—supposant
l'alternative
entre
connexionsmultiples
queparlafixitédesesrécurrences. Desorte unmécanisme videetuneintentionnalité
decontenu-— àceluidu
qu'ensoulignant
commentla fixationestprise,encequiconcerne la rapport
entre
leprocessus
dereproduction,
soninsistance,
etlaformule
subjectivation,
entre
deuxmouvements
contradictoires
(d'uncôtécréer, qu'ilreproduit.
par-delà
ladissociation,
uneimpression decohérence grâce aux«liaisons Sil'oncompare
entre
elles
leslettres,
«ondirait
vraiment
qu'elles
sont
defragments d'idéesparfixation»erdel’autre bloquer l'expression tirées
avecuneplanche
stéréotype
%».Enévoquant
ainsi
la signification
à enlimirantsonchamp la plusstricteinvariabilité),
Guiraud meten techniquedutermeissuduvocabulaired'imprimerie
oùlastéréotypie
évidence,enquelques lignes,routel'ambiguïtédelastéréorypie, àla désigneunetechnique
consistant
àmoulerlapage
composéesurlaquelle
foistentative
deprotection etisolement. on projettel'encred'impression,afin de libérerlescaractèrespour
Ilsouligne
enfincomment, au sein decertainesfixationslangagières pouvoircomposer
d'autres
pages
toutenconservant
Lapossibilité
de
quireprennent
trèsprécisément la dispositiondesmots danslapage, réimprimerlefeuillet
initial”,cette
observation
replace
Laquestion
de
lataille,
laforme deslettresoubienquireproduisent l'intonation, laréitération,
nonplusdans laproblématiquedesoninscription
ausein
l'élocution,
leshésitations,
lesvicesses
erlessilences,
plusriennepermet d'uneréalité
qualifiée
d’«objective?»,maisdanslatension
immanente
dedistinguerunequelconque hiérarchiestructurantl'hétérogénéité desonprocessus:de
l'impression àl'expression
stéréorypée,
oùsesirue
deséléments quicomposent l’automatisme, Guiraud citeuncasde lesensdeladuplication
?Oùseplace l'enjeu
expressif,
précisément
entre
stéréotypie
graphiqueanalyséparAntheaume etMignot?, unesériede lesformulesrépétées
etlemouvement qui
les répète?
letres,
rédigéesàplusieursmois d'intervalles
etparfaitement «super-
posables»: «lesmêmes phrases,
lesmêmes mots, lesmêmes signes II. LES RITOURNELLES CLINIQUES DE GUATTARI
sontinvariablementtoujours aumême endroit,àlamême place;
les
pagescommencent etfinissentchaquefois surlesmêmes termes.» Par
sa relation
synonymique
aux«réponses
stéréorypées
»deR.A.,
Cettestricte
similitude
questionne doncnonseulement lelienentreLa Guattari
situedoncsonusagedela«ritournelle
»danscerte
histoire
«dimension formelle»dutexte etsa«signification discursive»mais psychiatrique
quiarticule
àplusieurs
niveaux
lacomplexité
desrapports

subjective
»(NicolasBrémaud,«Retoursur lesstéréorypiespsychotiques»,op.cit., 24.Surlanotion
de«contenu
»,cf.entre
autres
Gabriel
Dromard,
Érude
clinique
P.884).Nicolas
Brémaud lui-mêmereconnait
quecedéveloppement dépasse l'insertion surLastéréotypie
desdéments
précoces.
p.27:Xavier
Abély,
Lesstéréorypies,
op.cit.,p.51
deGuiraud.Eneffer,pourcedernier,
lastéréorypie
dans lesphases
avancées dudélire etJeanMunch,Sréréosypies
etsymbolisme
desschizophrènes,
op.cir.,p.65-67.
—quisecaractérisentparuneautomatisation
croissante etunedéconrextualisation 25. Guiraudparled'ensembles
verbauxqui «dansl'expression
du délire[.…]
extrême- annihile
toutecapacité
d'adapration
etd'innovation. Bienloindeprévenir constituent
unemasse
complexe
avec
digressions
obligatoires,
répétitions,
cheminements
unéventueleffondrement
de«laposition
subjective
»,ellecaractérise
plutôtlemoment tortueux
indispensables
»(PaulGuiraud,
«Analysedusymptôme stéréorypie
»,
oùlaPS etlatransformation
subjective
s'avèrent impossibles. op.
ci,p.241).
22. Antheaume erRoger
Mignot,«Remarques surlastéréorypie ique», 26.Ibid.,p. 239etAndréAntheaume ecRogerMignot,« Remarques
surla
L'Encéphale,
V"Année, n°4,Paris,
G. Doin,1906, p. 333-358. sé stéréotypie
graphique»,op.cir.,p.343.
23.CF.ibid.p.343etPaulGuiraud, «Analyse dusymptôme stéréorypie», 27.Cf.surcepoint,
<horp://www.cnrtl.fr/definition/st%C3%A9r%C3%A9otype>.
op.cit,p.239. 28.JeanMunch,Sréréorypies
etsymbolisme
desschizophrènes,
op.cit.p. 9.
84 AunancRR
LesMULTIPLIGITÉS
AVRGD'RLAUrE DeLaclinique
Àlamusique
:stéréotypes
prychiutriques.….
85

entrerépétition
etexpresxlon
: nécessité
oùexcluslon
d'un«substrats R. À.lui-même.Veillantà nepasrabattre
d'emblée
leurInventivité
idéoaflectif
» ; dimension
conjuratoire
paradoxale
delaréliération aurdesschémas
interprétatils
généraux,
Guattari
refuse
entre
autres
qui,àlafois,protège
etenferme
: nivellement,
danslareproduction d'indexer,murlagrilledexconceprsanalytiques,
le conte du journal"
laplusrigoureuse,
dela«dimension
formelle
»etde«lasignification dontil affirmepourtantqu'ilconstitue,
entantquetel,pourR. A.
discunive
»dupropos.
Cesproblématiques
quipensent
ledéploiement unmoyendecomprendre si maladieerdetrouver
«lesvoies
quil'en
dusensetdu non-sens
danslafixation,traversent
toutelamonogra sortiront”
»: R.À. «esttoutentier
dans
son
texte{...],1 àacquis
phlede1956duntl'objectif
est,entreautres,
depermettre ÀR, À.de maintenantunesortedepersonnalité
symbolique,
àlaquelleil tient,
sortirdumécanisme
isolantdesa«ritournelle
»,c'est-à-dire
detenter etquichange
lesens
desamulacdie*"
+.
expérimentalement
derenverser
l'eflet
despirale
delastéréotypie.
En Si lesymboliquerenvoieividirectement
àlatripartition
lacanienne,
concertation
avecJean Oury,Guattariinvente,
danscetteperspective, cen'estpaspourfaire dujournal letémoinsymptomatique d'une
desdispositifs
desoinquis'appuient,
dansunegradationtrèsarticulée, désarticulation
structurelle,maisbienaucontraire poursouligner
le
sur
les cflets
decertaines
réirérations
sensibles
: d'abordà travers
des or de mutationque revêtLetexte,et lesbouleversements
réels
enregistrements
audioetvidéo
de R.A.queGuattari sollicite
comme u'ilinduit.Lejournaln'estdoncpasconsidéré comme unensemble
dessupportsthérapeutiques
confrontant
lemalade àsavoixetàson d'indicesàdécoderdel'extérieur
: ilestlucomme unesolutionprogres-
image,puisÀtravers
larecopiemanuscrite
duChdreuu deKafkadans slvement tracécparKR.A. De cellefaçonque,dès1956,selonune
sonintégralitéqueR.A.suivantleconseildeGuattari, poursuit IdéequeCruattari développeradansroutesonœuvre, làthérapieent
consciencieusement”,
etenfinparlatenued'unjournaldanslequel envisagée nonseulement entantquelieud'expérimentations, mais
R. A. consigne
lesévénementsde
la journéeetdesréflexions
sursa aussientant queprocessus decréation quilaisses'exprimer
l'inventi-
maladie
*. vitéexpressivedanssonpouvoirdemétamorphose subjective.
Ence
Delapassivité
delacaptation
mécanique
- dédoublement
de sens,« Monographie surR. A. »constitue unevéritable
expérimen-
l'imageducorpsetdelavoix—àl'écriture littéraire
etanalytique tation
cliniquedelavariabilité
expressive,
quimetenmouvement les
dujournalenpassant par
la copierigoureusedu(hdreuu, c'estdonc Axarionstroprigides,
grâceàdesdispositifs
thérapeutiques
sullicitant
à autourd'unélargissementprogressif
decertaines répétitions,
parun la foislesoclerassurant
de
la reprise
et,ensonsein,
làparticipation
usagecroissant
delavariation
auseind'agencements itératifs
relative deplusenplusactive etautonome deR.À.ainsiquedes&hanges
mentcontraints,queGuattariorganiselesdiflérents
moments dela avecdesinterlucureurs
dontlenombre augmenteprogressivement
*.
thérapie.
C'estenouvrantpeuàpeul'automatisme àdesélémentsqui Danscemouvement
quivades«réponses
stéréotypées
»auxréitéra-
lemodulent —images passées
desoi,captations sonoresdesséances, tionsconnectives
duChdreau etdujournal,
les différents
usagesde
texte
littéraire
soigneusementchoisipoursonrapport deproximité larépétition
s'articulent
surl'appropriation
desmatériauxsensibles,
avecR.A.reprisesscripturales
duvécu quotidien —quelapsychothé- penséscomme des«opérateurs» ayantdeseflets
réels
qu'ils'agit
rapie
tentedecontrer
l'isolementinduirparlesrengaines défensives
delapathologie.
Or cetusagespécifiquedelarépétitionsecombine,
31.Guatrari
refuse
formellement
d'«interpréser
»lejournal
deR.A.«quoique
dans+Monographie surR.A. »,avecl'attentionqueGuattari porte latentation
enaitétégrande
»(FélixGuarari,Phase ettransversalité,
op.cit.,
àladimension transformatrice
desmatériaux expressifsdéployés
par p. 19).
32.Ibid, p.22.Témoindesonintérêt
pourlejournal
deR,A.,Guattarien
29.CF.sur cepoint,AnneSauvagnargues,«Ritournelles
detemps »,Chimères, publiedelongsextraits
dansPynhenalyse
etrransvenalité,
àlasuite
delamotvographie
n°79(dirigéparPascale
Criton),Toulouse,Êrès,2013,p.SI etp.54-55. (cf.ibid,p.23-34).
30.l'ourunedesnptionplusdétaillée
decesdiflérentes
solutions
thérapeutiques. 33.Ibid,p.22.
34.R.À.accepte,dansladernière
séquencedelachérapie,
defaireliresonjournal
jemepermets derenvoyer
àMaëlGuedon,«D'unerépétition l'autre.
Laricournelle
auxmédecins etauxamis,et«d'endiscuter
aveceux»(idem).
dans“MonographiesurR A."»,in ibid,p. 143-155etMal Guesdon, «Mêmeles
35.GillesDeleuxeetFélixGuateari,
Milleplateuux.
Capitalisme
etschizophrénie
2,
constantes
sontpourLavariation.
Surtroisusages
delamélodie dansCapitalisme
et
op.cit,p.399.
schisophrénie
»,op.cit.,p.42-43.
86 AGBNCER
LESMULTIPLICITÉS
AVEC
DELEUZE Delaclinique
àlamusique
:stéréotypes
psychiatriques.
87

d'expérimenter,
etnoncomme
deséléments
desymbolisation
qu'il matière
passive
etquipermettrait
d'aborder
lesdéclinaisons
formelles
faudrait
interpréter. comme
lesincarnations
diversifiées
d'unnombre
limité
deprincipes
surplombants.
C'estpourquoiMilleplateaux insisteconstamment
ll. ÉTHOLOGIE,MUSIQUE
ET « OPÉRAS surladimensiontransitoire
desprocessus,
aupointdedéfinirtoute
MACHINIQUES
»DANSMILLEPLATEAUX constante
commeunevariable provisoirement
stabilisée”.Maiscette
conception
delaformecomme
devenir
s'opposeégalement
auxréifica-
Cesdeuxlignes
dontGuattari
expérimente
l'entremélement
dans tionsdeladurée
quireconduisent,
dans unelignée
bergsonienne,
une
l'approche
psychothérapeutique
de«MonographiesurR.A. »-à hiérarchie
abstraite
fondée
surlaspiritualisation
duremps,
soumettant
savoirl'ouverture
expressive
quidéborde
lesrégimes
designesétablis «l'intelligence
spatialisante
(pragmatique,
technicienne,
scientifique)
»
etlesusages
multiples
desrépétitions
saisis
surlemodeconcret des à«l'intuitiondeladurée(philosophique
ouartistique)“
».Plutôtque
effets
subjectivants
desredondances
sensibles
—setrouventprofondé- deconstituer
cerypede«clivage
ontologique“!
», latemporalisation
de
mentréarticulées
parleconcept
derirournelle,
telqu’ilsedéveloppe laformeamène DeleuzeetGuattari
àpenserlamultiplicité
irréductible
autournantdesannées1980.Letermesortalorsdu cadrestrictde desprises
deconsistance,
leur altération
auseind’une conceptionde
laclinique
danslequel
s'inscrit
sapremière
occurrence,
pourdécrire lapluralité
desespace-temps
vécus,oùlesdimensions temporelles
et
entreautrescomment
les animaux
etleshumainss'approprient,par spatiales
sontdécrites
dansleurentremélementconstitutif.
desmodulationsexpressives
decertainsmotifssensibles,
les« blocs Danscetteperspective,lamusique occupe uneplaceprivilé-
d'espace-cemps*
»quiconstituent
leursmilieux.Leonzième plateau giéepuisqu'elle
permet,
par sadimensionasignifiante
etparlafluidité
deMilleplateaux
associe
cette
description
desprocessus
deterriroriali- desonmatériau“, derendreparticulièrement
sensiblelecaractère
sation
avecuneapproche
historique
etdéfinitionnelle
desproductions processuel
d'uneforme quiprendconsistanceaufuretàmesure de
artistiques,
etspécifiquement
de lamusique.Qu'apporte cecouplage sondéploiement spatio-temporel,
toutenétant parailleurs
biensûr
danslaproblématique
quinousoccupe? déterminée,del’instrumentarium
àsesmodalités d'écoute,
parson
DansMilleplateaux,
lanotion
deforme
setrouve
priseentre inscription
socio-historique
quiempêchedepenserladiversité
desformes
deuxtensions”,
Il s’agit
cout
d’abord,
commel'aprécisémentmontré sonoresendehors deleurcontextedeproduction etderéception“.
AnneSauvagnargues
dans«Occuper
sanscompter
»,d'extraire
lesprises Dansledixième plateau
deMilleplateaux,cesdernièressontdonc
deconsistance
formelle
delacoupure
abstraite
entre
«unematière
sensibleetuneforme
intelligible*
»,coupurereconduiteinfineaussi
bien
39.GillesDeleuze
etFélixGuartari,
Milleplareaux,
op.cit.,p.392.
parl'impositionherméneutique d'uneforme transcendantequeparla 40.AnneSauvagnargues,
«Occuper sanscompter»,op.cif.,p.97.
convergencequ'implique unestructuration
homogène desmulriplicités 41.
/bid,p. 98.
formelles.Touteforme est,selon
DeleuzeetGuartari, immédiatement 42.Ladimensionasignifiante
delamusiqueestsoulignéeparGuattari
demanière
inscritedansdesprocessus historiques
quiendéterminent les poten- récurrente
àpartirdesannées 1970: on laretrouve explicitement
danscertaines
notes
desarchives
disponibles
àl'IMEC —«Musique / sensibilité
asignifiante
»(Félix
tialités
desortequ'iln'yapasdeplanhorsde l'histoire,aucuneforme Guartari,
«Carnetdenotes diversesetvariées
»,GTR 31.6,archives IMEC)—ainsi
essentielle,
aucune
structure
éternelle
quis'imposerait
activement
àune quedansplusieurs
ouvrages:cf.parexemple FélixGuattari,
L'inconscient
machinique.
Etsais
deschizoanalyse,
Fontenay-sous-Bois,
Recherches, 1979,p.315:FélixGuattari,
36.Ibid,p.384.
Lignes
defuise.
Pourunautre
monde
depossibles,
LaTour-d'Aigues,
Éditions
del'Aube,
37.L'approche
deMilleplateaux,
bienqu'elle
soitcritique
envers
lesconceptions 2011,
p.62;Félix
Guartari,
Lesannées
d'hiver
: 1980-1985
[1986],
Paris,LesPrairies
dassiques
deLaforme,necorrespond
enrienà unabandon
delaproblématique
Ordinaires,
2009,
p.290).
43.C'estentreautres
cequemontre,demanière détaillée,
lapartie
consacrée
aux
formelle,
maisplurôt
àuneredéfinition
duformalisme
passant
entre
autres
parla
«ricournelles
dutempsperdu »dansL'inconscienr
machiniquequirestitue
l'importance
biologie,
Lalinguistique,
l'esthétique,
lalittérature
(cf.parexemple,
ibid, p. 58-59.
- dessituations
d'écoute
lieux, contextes
sociaux,
instrumentariums—dansl'impact
68-73,120-121,137-138, 175-182et457-458).
delapetite
phrase
deVinteuil
surSwann
etsurlenarrateur
(cf.FélixGuartari,
38.AnneSauvagnargues,
«Occuper
sans
compter
»,inPascale
Criton
etJean-Marc L'inconscient
machinique.
Essais
deschiroanalyse,
op.cit,p.257-365).
Chouvel
(dir.),
Gilles
Deleuce.
Lapensée-musique,
op.cit.,p.95.
88 AGENCE LESMULTIPLICITÉS
AVACD'ELEUZE DeLaclinique
àlamusique
:stéréorpies
prchiatriques…
89

sollicitées
commelemodèle
parexcellence
dudevenir“,etDeleuze
et Au seindecerteperspective écologique,
le concept deritournelle
Guartari
insistent,
quelles
quesoient
l'époque
oulesœuvres,
sur
ce par affirmedonclacohérence endevenirdes«allures“»vitales:celles
quoila musique
marquesesmouvements,
sestransformations
etses del'enfantqui chantonne etdanseseuldanslenoirdesachambre,
effers
dedéplacements :chromatisme,rythmes,transpositions,
bruits, etqui s'inscritainsi,parlesmarquesréitérées
àlafoisrassuranteset
expérimentations. Mais,enmertant encontinuitécerte approche deplusenplusouvertes delamélodie etdesdéplacements, ausein
avecLesrerritorialisations
éthologiques,
le onzième plateaudécale,de d'unmomentde la nuittropinquiétant pour
lui“ ; celles
desparades
manière radicale,
Laquestionesthétiqueenl'extrayantégalement de nuprialesetdesincimidations declanschezlesanimaux,comme celles
laperspective
d'unenormativitéformelle—quelsseraientparexemple desrythmes
quimarquent
l'appartenance
àteloutelgroupe
social
%.
lescritères
d'évaluationd'uneforme,sonore ouvisuelle, intéres- Leconcept
décrit
lafonction
écologique
delamodulation
expressive
:
santeoubelle? —auprofitdelaproblématique écologique évoquée c'està travers
desagencements
itératifs
decouleurs,
desons,
de gestes,
précédemment : comment levivants'approprie-t-il
lesformes qui demouvements
oud'odeurs
quis'élaborent
enmodulant
lescompo-
l'envourent
etquicomposent sesmilieux pourenfairedesterritoires santesd'un milieu (lesimpulsionsinternescommelescirconstances
habitables?Or, parcertemiseenreliefdel'inventivitédesrégimes externes)
quelevivantcirconscrit
sesterritoires
toujours
provisoires
designes desmondes animaux, deleurcapacité d'improvisation er etchangeants”*'.
detransformation, deleursmoments d’indérermination, voirede Orcœtte consistance
dynamique,quinepeurse rabattre
suraucun
«pauses interrogatives
* »,
l'érudedessémiotiques vitales
récuse les pland'évolutionprédéterminé,
sedéploie surcequeDeleuze et
définitions
anthropocentrées del'expressionquicantonnent certe Guartari désignent
sousleterme
d’«opéra machinique* »comme
dernière
à l'extériorisation
rationnelle
d'unsujethumainindividuéet «l'auto-mouvement
desqualités
expressives”*
»,c'est-à-dire
lamanière
douédeparole.Ellepermer,
en insistant
sur lesrapports
inter-espèces dontles composantes
expressives,
sedétachantdeslogiques
fonction-
etsurleurs
interactions
complexes,
desouligner
La pluralité
desrégimes nellesdesmilieuxdontellessontissues,
tendent àseconnecter
sémiotiques(queGuartari
recense
déjà,depuislesannées1960,en demanière autonome,etcréentainsidestunnelsoudes«ponts
opposition
auxapproches
éternisantes
dusigne
linguistique*"}
etde
penser,
parailleurs,
lesprises
deconsistance
endevenirdesterritoires 48.«Une“allure” (plucôtqu'uneforme} »écriventDeleuze etGuartari, en
vitaux
surleszonesmouvantes deleursvoisinages. référenceà Canguilhem (GillesDeleuzeetFélixGuartari, Milleplateaux,op.cit,
à p-383).Leterme soulignela foisladimensionrythmiqueermomie, lacadence et
l'avancée,
c'est-à-dire
ladéterminationspatio-temporelle
desagencements sémiotiques.
44,«Chanteroucomposer,
peindre,
écriren'ontpeut-être
pasd'autrebut: FrançoiseArmengaud noteencesens:«Allure,c'estlittéralementmanière d'aller,
déchainer
ces
devenirs.
Sertour
Lemusique:
toutundevenir-ferme,
undevenir-enfant démarche. On leditleplusfréquemment ducheval - pas,trot,galop|...)- oudu
wraversent
Lamusique.
»(GillesDeleuze
etFélixGuarrari,
Milk plerreux,
op.cit. voilierdanssarelation
auvent(parexemple les“allures
portantes"),
maisc'est aussi
p.333-334,
je souligne.) Lerythme, lesmpo,lemouvement enmusique,c'estlaqualification
générale d'une
45.Lacapacité
de-«dissolution
delaforme»,involution
pensée
positivement manière debougeroudesetenir,d'agir,
brefdesecomporter.»(FrançoiseArmengaud,
comme
devenir
estunedes
caractéristiques
quidéfinir
Lamusique
dans
Milleplateaux
: «Georges Canguilhem : lecomportement comme “alluredelavie”=,in Horence
elle«n'acessé
defairesubiràsesformesetàsesmotilsdestransformations
temporelles, Burgat(dir.),PenserLecomportement
animal,Paris/Versailles,
Éditionsdela Maison
augmentationsoùdiminunons, retardements
ouprecipiranons»(1h, p.331). dessciences
del'homme/Quz,2010,p.153.)
46.FélixGuaruri,L'reromsoeermachinique.
Essaisdeschissanalyse,
ep.a. p.129. 49.GillesDdeuxze
etFélixGuarrari,
Milleplateaux,
ep.cit.,p.382-383.
47.Dès1%62, dansson»« Introductionà Lapsychothérapie
institutionnelle
», 50.C£ ibid, p. 386-416etp. 382-384etFélixGuartari,
L'onconsarent
machinique.
Guartans'oppose à l'hypothèse d'unestabilité
ontulogiquedessignesdebase, Exais
deschivoanalne,
op.
cut.
p.17-221.
. correspondance
biunivoque
entre
l'être
etlelangage
»(Félix
Guartari.
Prhamehse 51.Leterritoire
sedéfinit,dansMile plaraux,par«l'émergence
dematière
ettransrersahir,
op.est,p.4N).Au milieudesannées
1960,il affirme
Lanécessite
de d'expressions
»:«il yaterritoire
dèsqu'ilyaexpressivité
durythme»(Gilles
Deleuze
prendre
encompe
Lapluralité
desmatériaux
fondant
lescoupures
subjectivantes, etFélixGuartari,
Milleplasmaux,
op.cit.,p.386:cf.également,
surcepoint,
Anne
éventuellement
issues
«d'etiets
hnguistiques»,maispouvanttoutaussi
bien«s jouer Sauvagnargues.
«Deleure.
Del'animalàl'art»,op.cit.p.208-223).
surunram-tamous'écrire
avec
lespiedsausensoùl'unditdegensquisortent d'un 52.
Gilles
Dédeuse
etFélix
Guattari,
Afillplateaux,
op.
air.
p.412.
congrès
enchaquant
Laportequ'ils"vorent
avecLespieds”. »(abid.,
p. 132). 53.Hbid,
p.389-390.
90 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVEC
DeLEuzE Delaclinique
àlamusique
:stéréorypies
psychiatriques...
91

sémiotiques**
»,desconsistances
inédites
entre
desmilieux
auprime travers
lequel
estdécrite
l'autonomisation
desmatières
expressives
abordindépendants,
voireinconciliables.ExpressioncrééePar
qui fondentettransforment,
dansleursconnexionsimprévisibles,
Deleuze
etGuattari
àpartir
duconceptde«personnages
rythmiques
, leslogiques
mouvantesdesprocessus
vitaux «réuni[ssan}t
lesordres,
emprunté
à Messiaen
(chezqui
il désigne,
nondesrécurrences lesespèces
etlesqualités
hétérogènes“
».Autrement
dit, ellepermet
stabilisées,
maisdesimbrications
dynamiques
dedurées
variables), derendre
sensible
ladynamiquequi,danstoutagencementvital,
les«opérasmachiniques »agencent descomposés expressifs
sans échappe,
parlesredondances
superflues
descirculations
sémiotiques
par
mesurenilocalisation
figée
4priori: aulieud’une«succession
réglée et les associationsinédites
qu'elles
induisent£!,
auxfixations
struc-
formes-substances*
»,ilspassent
donc«à travers leséléments,
les
turelles.
Si bienqu'autournant
des années 1980,danssonassociation
ordres,lesformesetlessubstances
[.…]pourlibérerunematière
er spécifiqueentreéthologie
etmusique,la ricournelle
donneà penser,
capter
desforces
* ». contrelatendance desformalismes,herméneutiquesoustructuraux,
Ainsi,lamusique
tient,dansleonzième
plateau
deMilleplateaux,
àvouloir
ériger
sur
les variables
desconstantes
définitives,
l'invencivité
deuxfonctionsépistémologiques
déterminantes.
Toutd'abord,
que etLacohérence
endevenirdes«allures
»expressives.
cesoitdansl'attention
spécifique
portée
à l'intermezzo*’,
avecla Ainsi,resituée
dans
la lignequise tracedelapremière
occurrence
diagonale
boulezienne
quifaitpasser
une«secousse
sismique
»entre dela«ritournelle
»jusqu'à
sondéveloppement
le pluscommenté
dans
l'horizon
mélodique
etlaverticalité
harmonique*f,
oubienencore Mille
plateaux,
cette
problématique
apparaît
danstoute
sadimension
parl'évocation
derythmesturcsà 47temps
premiers
(rétifs
doncà d'activismesocialetpolitique. Del’opposition entreuncontenu
toutemétrique
isochrone)
‘?,
les exemples
d'œuvres
ou deconcepts
intentionnel
etunmécanisme videdivisant
les définitions
delastéréo-
musicaux apportent
systématiquement
unangleprivilégié
(bienque cypie
danslesapproches psychiatriques
classiques jusqu'à
l'écologie
nonexclusif)
pourretracer
lemouvementdevariabilité
croissante
au deleuzo-guattariennedesalluresdontlaconsistance, décrite
àpartir
seindelaréitération
expressive,
selon
ladynamique
àlaquelleGuattari d'unparadigme musical,repose précisémentsurledevenir expressif
seconfronte
danssaclinique
dès«Monographie
surR.A.».Mais,avec
descomposantes, enpassant parlesexpérimentations cliniquesde
les«opérasmachiniques»,lamusique
devient
également
le cadre à
Guattari
qui
s'appuient, dèslesannées1950, surlecaractèredisruptif
delarépétitionetsurlapuissance detransformation desmatériaux
54.LaformuleestdeGuarrari
: «lancer
despontssémiotiques entre
desunivers sensibles
eux-mêmes —il s'agit
derejouerl'articulation
complexede
parallèles
quinesemblaientdevoir
jamais
communiquer ensemble »(FélixGuatrari,
larépétition
etdel'expressivitévitale,
afindepenser la variation
non
L'inconscient
machinique.
Essasdechisoanalyse,
op.cit.,p.128).Cf.égalementGilles
DeleuzectFélixGuattari,
Mlleplateaux,
op.cit.p.397: «Il s'agir
moins d'évolution pluscomme l'élémentperturbateur d'uneforme établieoul'écart
quedepassage,deponts,detunnels.
» intervenant
comme différence
dansune
structure fonctionnelle,
mais
$5.
/bid,
p.414. comme leprincipe dynamique desprises
deconsistance endevenir
dont
56.Jbid. les«constante{s]oscillatoire{s]‘?
»dériventuniquement desrapports
57.Jbid.,
p.365,
405et419. demouvements hétérogènes, danslamultiplicitédesespacesetdes
58./bid.,p.362.
59,bid.,p.385.Lerythme queDeleuze etGuartariévoquentdanscerte
citation tempsqueconstruit ethabitelevivant.
(appelé
Zincir)estimplicitementreprisd'un
articled'Ahmet Adnan Saygunconsacréà
»Laannique turque»dans L Hussovre
deLamusique dirigée
en1960 parRoland-Manucl
queDeleuze etCiuatiariconnaissaientbien(Ahmet AdnanSaygun, +Lamusique
turque»,
in Roland-Manuel (dir.),Histosre
deLamusique 1.Desorigines
àJean-Sébastien
Bach,Varis,Gallimard,1960, p.573.617). 1 s'agit
d'unedesformes combinatuires
(darbeyn)
lespluscomplexesrelevées parAhmet Adnan Saygunpuisqu'elle
associe
cin
formulesryhmiques difiérentes
- «Agir(Gifie)Diüyek « Fahue«Genber » Devr-i 60.GillesDeleuzeerFélixGiuatrari,
Milleplateaux,
op.cis.,p.412,
61.Redéfini profondément la notion,
Deleuze
etG i parlent,
dans
Kebir1Berefchan «sur «Quärate-sepe terapsrythmiquesHétérochrones
»(kid,
P.GUU),
Alumet
Adian
Saygun
précise
que,d'une
manière
générale,
«Lerythme
durbeyn Milleplateaux,
de«redundances diagrammatiques
»quinesontpas«desnœuds
d'arborescence,
imals
desreprises
etdesélancements
dans
unrhizome »(ibid,p.168).
M€
POIpasvoir une
figure
fixe»(ibid.,p.599).
62,/bid.,p.394,
Il

CRITIQUER LA REPRÉSENTATION
VII

Musique etmodulation
:
versunepoétique
duvent

SizvioFERRAZ
ETGUSTAvO
RODRIGUES
PENHA

Voici [un]croquisbienvague
demadernière
toile.Unerangée
decyprès
verts
contreuncielrose
avec
uncroissant
citron
pâle.
Avant-plan
deterrain
vagueetdusable
erquelques
chardons.
Deux amoureux,
l’homme bleupâle
àchapeaujaune,
lafemme auncorsage
roseetunejupenoire’.

Descriptionsimpled’unagencement deplusieurs
composantes:
descouleursetdeschosesmises ensemblequimodulent
et fontnaître
d'autres
composantes,lepaysage-cyprès
etlecyprès-paysage,
lacouleur-
choseetleschoses-couleurs.
Il yaaussi destraits
decrayons,puisde
pinceau
et ainsiuneprolifération deconnexions.Despersonnages,
plongés
dans ledessin
—cyprès, amoureux,
traitsdecrayons,
lune—où
figures
etmotifentrentenrelationdirecte
demodulation.C'estcomme
siunpersonnage ressentait
l’autre,
imposant desdistanceserdes
proximités,
prenantunevélocité
deconnexion,
unpeucomme
nous
lepropose
PaulKlee:

[...] lajuxtaposition
defortscontrastes
engendre
uneexpression
pleinedeforce.
L'introduction
d'unmoyen
deliaison
entre
cescontrastes
leséloigne
l'unde
l'autre
eraffaiblit
l'expression.
Dessauts
degrande
envergure
résultent
d'une
forceplusimportante quedessautsdemoyenne envergure.Descontrastes
secondaires
affaiblissent
laforcedel'expression,
même s'ilssontjuxtaposés
sansliaison.L'introduction
d'uneliaisonentraîne
unaffaiblissement
par
enrichissementetbaisse
detension?

1.VanGogh,Lettres
à Théo
du21octobre
1888,
Arles,
<htrp://www.vangoghletters.
org/vg/lerters/let709/lerter.huml>.
2. PaulKlce,La Pensée
créatrice,
Paris,Dessain
etTolra,1970,p. 319.
96 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECD'ELEUZE
Musique
etmodulation
: vers
une
poétique
duvent 97

Chez
VanGoghouKlee,
il s'agit
desimples
réunions
dechoses, Qu'est-ce
quec'est,
uneforce
enmusique?Unensemble
dehauteurs
d'agencements
surunetoile.C’estcettemême façondemettre
des chantées
quisuivent
une
règlesimple
: depuis
unehauteur
privilégiée,
imagesenchocparlasimpleréunionquenouspouvons apercevoir
lechants'échappe
pour
y revenir
etfermerlecycle.C'estunpremier
danslamusique.
Au derniermouvement de la9°Symphoniede
Mahler(mesures101-110),en uneseulemesure,un pianissimoest exemple
deforce,
engendrée
parl'idée
abstraite
decycle.
Maisilya
aussid'autres
forces,parexemple
lacourbure
qu'unsonrépété
gagne
brusquement
interrompu
paruncrescendo quivajusqu'aufortissimo.
enétantmodulé
parlemouvement
d'ouverture
etdefermeture
de
Et puislesilence à l’aigu,etl'émergence d’unemélodie pluslente, lagorge
etdesformes
delabouche.
Latendance
de laligne,
c'est
grave,auxcordes enfortissimo. On sortd'unterritoiredepaysanne
simplementdesuivretoujours
sonexpansion,
verticale
ouhorizontale,
quisetaitpour laisserentendre unemélodie dramatique.Voicides maislesforcesextérieures
contraignent
cetteexpansion
:
périodesdistinctesqueselientàdesformes devieetquis'intermo-
dulent;lesens detoutcepassage vientsimplement de
la distanceentre
rt
-— unmoment etl'autre.Il nefauty voiraucunesignificationnécessaire, Pr
maisil yasans douteunsens clair,uneclairedirection
verslegrave,
etl'annonciation decoupures.

I. LA MODULATION ENTRE MILIEUX SONORES

Penserl'artcomme unagencement deblocs d'images,unagence-


ment decodes oùlavieilleforme n’est quelerythme d'émergence des j
images.Penser parconséquent endehors desparadigmes classiques
del'unitéformelle etstructurale,del'unitémorale ousymbolique. Il existe
unetoutautremanière depenserlaforce:nonpasdes
L'artiste-agenceurn’estplusattaché au«chemin defer»desrègles forces quifaçonnent
uneligne,maisuneforce quiréunitleschoses.
d'unité,
desschèmes structuraux,
il bricoledespiècesensemble: ilcrée Qu'est-ce doncque«travaillerdirectement
sur lesforces»?Dansle
desjuxtapositions,desintercalations,desentrelacements. Il travaille plandecomposition musicale,nousavonsroutunmonde d'images,
de
sesagencements decodes parpetitespériodicités,enleurdonnant un sons, defaçonsd'imaginerlessons,
desformes etprofils,
derelations
minimum depermanence. Laforme resteencore présente,
lastructure entredesinstruments divers,quideviennentdeshabitudes etdes
demeure, maisinstable ettoujours enmouvement : mise-en-forme, certitudesprovisoires.
Chacun decesmilieux
estuneforce libre—un
mise-en-structure.Laforme, présente, n’apluslapriorité etserend régime desonorités.
Onadoncunecarte quasi-stable
deforces.Cesont
compte dececi : lesartistesn'ontenfaitjamaistravaillé selondes lescontrepointsentre
lesmilieuxsonoresquiprovoquent
la naissance
formes préalables,etc'estauxx‘siècle quelacompréhension dela demodulations entrecodes,ainsiquelanaissanced'autrescodes
et
mise-en-forme desforces prendsonimportance. Mêmeaumoment rythmes,
d’autresimages.
leplusradicaldustructuralismemusical, les formes,
les structures,
les DansMille plateaux,DeleuzeetGuattaridonnent
à cejeude
algorithmessontcontemporains desforces qu'ilsentraînent. Comme modulations
lenomdeRythme.
Poureux,unrythme,
c'est
lerésultat
nouslepropose PaulKlee: lesformes nesontque les limitesdu ducouplage
dedeux
blocs
deforces.
Lesblocs
sont
exprimés
par
leurs
contrepointmodulant entreforcesdecroissance etforcesderésistance périodicités,
etlescodessontl'indicedelaprésenced'unmilieu,
(lapesanteur,
le vent). Lescodes,
et doncles milieux,
sontouvertsàunjeuinfinidemodula-
tionsqui peuventsesoutenirpourune
fraction detempsnotable
aupointde nousdonneruneimpression deconsistance.
Un chant
3.Àcepropos
voiraussi
GillesDeleuze
etFélixGuartari,
Mileplateaux,
Paris, d'oiseau,
c’estcequi,pourunornithologue,
déclenche
desséries
de
Éditions
deMinuit,
coll.«Critique
»,1980,
p.55et68. lieux,
terrains,
écosystèmes,
ropographies,
humidités
del'air,
horaires
98 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE Musique
etmodulation
: vers
unepoétique
duvent 99

spécifiques,
saisondel'année
etc.Pourunmusicien,
il s'agit
d'une 11.LA RITOURNELLEET L'AUTONOMISATION
séquence
detrilles
etvolets
autant
qu'une
figuration
mélodico-rythmique, DU TERRITOIRE
autant
qu'unindiced'activité
(«modedejeux-oiseaux
»).Pourune
écoute
quotidienne,
c'est ledéclenchement
d'une séried’habitudes, Lechemin
quenousavons
prisnous
amène
versunconcept,
celui
denomspropresetdessouvenirs.
dela Ritournelle.En décrivant
la Ritournelle,
Deleuze
etGuattari
Onpeutdoncdire que,quelque soit leson,
il alaforcedemettre disentquetoutcommence aveclemilieu,ecquelaperception
d’un
enconnexiondesdisparates.
Il peutconnecter unlieu géographique
milieu
s'effectue
par
la présence
d'unétat
dechangement
cyclique,
avecunemusique, une
religion,unchant deguérison. Unchantpour uneoscillation
quiproduit
uncodedemilieu.
Uncodeestdoncla
l'éloge
desâmespeutseconnecteràunefaçon devivre, une
vie rapide présence
d’unevariation
périodique
oupseudo-périodique
d'unsignal
àunevielente: touteunechaine infiniedeconnexions. Imaginons quelconque,
lesmouvements desvagues,
unebranched'arbrequi
maintenant
le champ deforcesquis'ouvrequand lesfragments
desons bouge,
unpendule.
Lescodes
sont
desfonctions
périodiques
dutype
:
enrencontrentd’autres: unchantd'oiseaux
ouunchantdeguérison fx) =fx +p).Celasignifiequ'ilexiste
unefonction
dex depériode
p,
vientà la rencontre
d'unsondeflûte,depianoetc.Cesrencontres erque«chaquemilieuestcodifié,
erdéfinit
uncode parlarépétition
s'ouvrent
surd'autres
histoires,
d'autres
géographies,
desodeurs
—le périodique“
».Lesmilieuxsontdesensembles
decodes,
cequ'onpeut
boisdesinstruments
—l’histoire
del'harmonie,
les spectres,
lesdiverses
exprimer
par: M =(C,, .…
C,)’, oùM estunmilieuetC,lescodes.
tendances compositionnelles,etc.Onpeutdire qu’onestàdeuxpas Cesensembles
sonttoujours
entransformation,
ils bougent
et naissent
duchaos. Il fautdoncbienuncrible, unehabitude.Etla seulefaçon demouvementssimples,
derapprochementsetd'éloignements
de
deproduire cecrible,c'est
l'expérimentation
concrète,empirique,et codes.
Onpeut
dire quelesmilieux
sontcomme desimages,
onpeut
l'expérimentationabstraite
desprojections
numériques. Ainsidesuite.
mêmedirequelesmilieuxsontdesimages
ausensoùils
Fairedes«répétitions ».Répéterlechamp deforces eràchaque
foisselaisser attirer
pardesfragmentsdecechamp deforces, pardes
sontdeschoses
quinecessent
pasdevarierlesunesenfonction
desautres,
configurations provisoires,
pardesimagestransitoires.
Onpeutdonc lesunesparrapportauxautres,
surcoutes
leurs
faces
etdanstoutesleurs
penser quechaque musique estunchamp deforces etqu'écouter
parties.
Eneffet,uneimageétant
donnée,
vouspouvez
ladiviser,
siloinque
unemusique, c'estsemettre auniveau desforces,deslieux,des
vousalliez,
vousladivisez
enparties,
vous
pouvez
laretourner.
Combienelle
mondes, etpoursuivre cesmodulations.
Lamusique estunemachine
adefaces?n!Elleanfaces‘.
demodulation entredesmilieux sonoreset,commele ditCage:
«laisser
lessons êtrecequ'ils
sont.»C'est
ainsiquelamusique chinoise
Ilsuffit
demertreunmilieuàcôtéd’unautre
pourqu'ilscommencent
d'unecérémonie
bouddhiste
peut
traverserun«©vosomnes
»d'une
àsemettre enmodulation etfassent
naîtredesrythmes.Il fautdonc
cérémonie catholique.
Et,pourlamême raison,
unemusique peut
remarquerqu'unsimple codepeutêtreunmilieuetquelerythme, ce
êtretraverséeparlacouleurd'un
tissu, leslumièresd'unerue,des
quinaîtdelamodulationdesmilieux,
s'autonomise
etsemetlui-même
sonoritésdevoix,undegré detempérature,lapluieoulesoleil.Les
àfaireentrer
enmodulation soitd'autres
rythmes,
soit desmilieux.
forcesseconnectent
librement,
ellesneconnaissentpasleslimites
de
Nouspouvons direquelesrythmes,commeles milieux,forment des
laforme. Lesforces
semettentenconnexion parmodulation,chaque
imageserquec'estd'après
laréunion desimagesenintermodulation
forceavec safréquenceetsonamplitude,danslemouvement dese
moduler infiniment.
4.Jbid.,p.384.
5.Cetteformuleaétépubliée etexplicitée
dans
l'article« Laformule dela
Ritournelle
»,publié
dansPascale
CritonetJean-Marc
Chouvel (dir.),Gilles
Deleuze.
Lapensée-musique,
Paris,Cdme,2015.
6.GillesDeleuze,
Coursdu02/11/1983 surImage-mouvement, Image-temps
(LePlan),
hutp:/{www.webdeleuze.com/php/texte.php
?cle-698&
groupes
[mages
M
ouvement+
{mages
Temps&langues1>.
100 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVEC
DeLeuze Musique
etmodulation
: vers
unepoétique
duvent 101

queDeleuze
, -
nouspropose
:
l'idée
dterritoire:
u uneimage
Men derace
composée deterritoire,
l'effondrement
dutemps
(une
poieris/répétition
d’une
r d'autres
images.
Onditalorsque le territoire
à posantes invention)®.
us quisontdesmilieuxM etdesrythmes R: CT =(RI … Onvadoncduchaos
auterritoire
etpuisàladéterritorialisation.
Rn,M1 … Mn).Et,individuellement, oumême engroupes,
les Et c'està causedecetroisième
aspect,
laporteouvertedeladéterri-
composantes
territoriales
entrent
parfois
aussi
enmodulation
(-): torialisation,
quenouspouvonsdiredela ritournelle
qu'elleestune
petite
usine
à machiner
des différences,
la«répétition
dudifférent”
».
Ta[CM222
M(=Rieee
Re)
=(RM«ee
Ru
Mo) Opérerlarépétition
dudifférentest,donc,enquelque
sorte,«imiter
l'invention
»,sionreprend laformule de
la répétition
desLoisdel'imi-
Onobserve
qu'un
territoire
peut
êtreconstitué
paruneouplusieurs tation
deGabriel Tarde:imiterl'invention enfalsifianc
l'invention,
en
images.
On a doncun effetfractal,desimagesqui composent
des imitantlesforcesnon-formées del'invention,
voilàlepointtoujours
images,quicomposent desplans,
le planétantégalement
définipar naissantd'unenouvelle invention °. On vadoncd'uneritournelle
desimages. Il fautdirequelesterritoires
sontenintermodulation àuneautre, d’un
territoireàunautre. Pourdessinerunterritoire,
parvoisinage, inclusion,
incrustation
ouencore entrelacement.
Un onfaitleparcours
decequenous
avons
décrit
comme
avers
f etla
territoire
esttoujours unensemble deterritoires,
actuels
ouvirtuels. ritournelle
s'ouvresur
y; ceciveut
dire qu'onpasse
delarecherche
de
Uneritournelle
estun mouvement
qui consiste
à mettreensemble l'axe
àl'inscription
surl'axe,
erpuisversl'autonomisation
descompo-
plusieurs
composantes.
Il naîtdesfragments
deforces
réunies,
(1)dans santes.
Maisonpeut y allerd’unterritoire
vers
d'autres
territoires,
du
unpremiermoment librement connectées;
(2)puisacquérant
un territoireversle chaos,ou encorevoirenaîtreun nouveau
territoire
système
pours’accrocher
lesunesauxautres
d’après
uneforme stable quiest l’autonomisation
d’unecomposante
d’un
territoirededépart.
oumétastable
; (3)enmême
temps
qued'autres
connexions
demicro- Lesterritoiressonttoujoursencontrepoint.
Et lescheminements
fragmentss'autonomisent
en libérantdesfragments
pourdesconnexions delaritournelle
peuventdoncprendred’autres
parcours: &—> et
avecd’autres ensembles defragments, horsdusystème.Unesimple B— y leslignes
droites;
B— BerB—a lescourt-circuitdel’esthé-
composante peutmoduler toutunterritoire
etunterritoirepeut tiqueouladansedelamorale;y —>yd’unepoiesis
àunepoiasis, on
moduler unautre territoire. tournedanslenoir;y— &d'unepoiesis
àlarecherche
d'une nouvelle
Enbref, leterritoire
estlelieudesmodulations,
etsesfrontières
sont fondation
;y —>$ lacapture
d'unepoiesis
parunterritoire
fortdéjà
untoutautre lieuoùsepassent aussi
desmodulations.Maiscesont constitué.
Etvoici
la lignedutempsavecsesséquences,
sesnoyaux,
desmodulations devélocités différentes.
Leseuilduterritoire
estla sestrousnoirs!!
:
placemême desmodulations decomposantesautonomesdu
territoire.
L'entre-deuxterritoires
estdoncenmodulation permanente.Laritour-
nelleestainsiunemachine desynthèsedutemps entroisétapes:on
8.Cf.Gilles
Deleuze
Différenceetrépétition,
Paris,
PUF,1968,p.91-95.
sortduchaos, etpuisquelechaos aune
vitesseinfinie
oùtouteforme 9./bid.
: ébauchée
sedissipe”,
onsortduchaosdèsqu'ily aquelques
forces
qui 10.Gabriel
Tarde,
Lesloisdel'imitarion,
1890,1895[24éd.],
p.20disponible
pratiquent
unepremière
sélection,
mêmeminime,decomposantes enlignedanslecadredelacollection
« Lesclassiques
dessciences
sociales
»:
quidéfinissent
depetites
permanences.
C’estdoncàpartirdecette <huip://www.uqac.uquebec.ca/z0ne30/Classiques_des_sciences_sociales/index.huml>.
coupure
ques'obtient
lafondation
dutempsdelaritournelle
: (1)la 11.Danslamusique dux siècle,depuis
les années
1960,plusieurs exempl
dedevenirsmusicauxapparemment
«ivres»s'approchent
d’unemise-en-forme
telle
recherche
d’unaxe,lafondation
dutemps(uneprised’unehabitude/ quecelledelafigure
deLaricournelle
quenousdonnons
ici.Cedevenir-ivre
dutemps
uneéthique)
;(2)lefondementdutemps avec
l'inscription
de
l'axeà s'approche
bea decequeLigeti
àproposé
dans
Apparition
etArmosphéres
ettraité
lamémoire
(uneesthétique)
; (3)l'autonomisation
descomposantes danssonarticle« États,
événements,
transformations
»présenté
etrécritplusieurs
foisÀpartir
de1960,
et récemment
republié
dans
lelivre
L'Atelier
ducompositeur,
Genève,
Éditions
Contrechamps,
2007.
Ilsetrouve
aussi
comme une
tonique
entre
des
7.Cf.GillesDeleuze
erFélixGuattari,
Quest-ce
quelaphilosophie
?,Paris,
Éditions compositeurs
comme
Scelsi,
Cage,Berio,
etplusrécemment
Sciarrino,
Ferneyhough,
de
Minuit,
coll.
«Critique
»,1991,
p.111, ArthurKampelaet RobertoVictorio.
102 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZS
Musique
etmodulation
: vers
une
poétique
duvent 103

ondéfinitlechaos
moinsparsondésordre
queparlavitesse
infinieavec
laquelle
sedissipe
coute
forme
quis'yébauche.
unevitesse
infinie
denaissance
et
d'évanouissemen
r's,
JE

Lt Confronter
le chaos,
c'est
donner
unedurée
provisoire,
réduire
la
vélocité
denaissance
desformes,
les laisser
durer:«Nousdemandons
seulement
unpeud'ordre
pournous
protéger
duchaos.
»Leschoses,
lespensées,
lesmusiques,
lesrelations
etconnexions,
sont
toujoursen
grain
desortir
duchaos,
et l’art,
c'est
lafaçon
dontnous
nous
proté-
geons,
soitduchaos,
soit dudurcissement
desmodes
deprotection.
Onpense
donclaricournelle
comme
unemachine
àplusieurs
vélocirés,
de ralentissements
qui vont de la terre,avecencoredeschangements
Àchaque
point,
àchaque
moment
de laritournelle,
on2l'auto- brusques,
despermanences
provisoires,
verslecosmos
et
le chaos
ralenti,
nomisation
descomposantes
territoriales,
l’autonomisation
descodes, enpassant
parlenatal,
oùlaforme
se croit
permanente.
L'art
c'est
le
desmilieux,desrythmes
etpuisl'autonomisation
desterritoires. mode
defaireritournelle
entrainderapporter
duchaos
Cesontdescycles
superposés,
Uneimage
quinous envoie
versl'idée
despropagations
deproche
enproche.
Et c'estselonceprincipe desvariétés
quineconstiruent
plusunereproduction
dusensible
dansl'organe,
d'autonomisation
qu'unagencement
rythmique
dutyperituel'?mer mais
dressent
unêtredusensible,
unêtredeLasensation,
surunplande
enjeud'autres
traditions
musicales.
C'esttoutunpeuple
inusité
qui composition
anorganique
capable
deredonner
l'infini.
habiteunemusique,
descorpsimaginaires
qui semettent
à danser.
Leséléments
delamusique nesontpasprisonniers
desrelations
qui Un champprovisoire
qui bouge,respire,
sedilateetsecontracte.
concernent
lapartition
etlesonseuls.
Leséléments
delamusiquese Leterritoire
semanifeste
ainsicomme unsimple
code,il manifeste
mettent
enrapport
avecd’autres
territoires,
descorps,desterrains, despériodicités,
il semanifeste
selon
desvélocités
diversesdansun
demodes devie,lescouleurs,
la lumière
dujour,etc.Laterre,
lenatal jeudemiseenmodulationdesterritoires.
etlecosmos,comme nous
proposent
DeleuzeerGuattari.Lesrégimes
sonoresserapportentautant
à laterre,
qu'auxchosesexistant
sur
terre 111.
UN FLUX D'ÉNERGIETRAVERSE
LES CORPS
etauxêtresvivants.Ontrouve encore
d’autres
rapportsavecunlieu
natal,
unpays, unpeuple,unvillage,
uneépoque.Etfinalement,
il y Danssoncoursdu 27 avril1982surL’Image-Mouvement,
enad'autresquifontleurs connexionsavec
deslieuxnonpeuplés, GillesDeleuzeparleduvidecomme «souffle
vital».Sonpointde
aveclecosmos. départ,
cesont
les SixCanons deluPeinture
Classique
Chinoise,
d'après
Lererrivoire
estdonccechamp
provisoire
deconnexions,
pendant lespeintres
chinoisHsiehHo(DynastieTang,entrelesannées
618et
unedurationqui
le rendnotable.
Sortirduchaos
pour
arriveràune 907)etHuangPin-Hung (1864-1955)
5.Dansunpremier moment,
terre
etpuisaucosmos.Et
c'estpourcelaqueDeleuze
emploiel’idée lepeintre
doitrefléter,
oumieux, exprimer
lesouffle
vital.
Qu'est-ce
dechaoscommele conçoitIlyaPrigogine
: quelesoufflevital?Deleuze
retient
dusouffle
viralquec'est
cequi

| 12.Ufautdirequedesagencements
duryperituelpeuventapparaître
mème là 13.
Gilles
Deleuze
exFélix
Guarrari,
Qu'es-ce
queLa
philosophie
?,ep.
cit.,
p.111-112.
oùilsnesontpasspécialement
remarqués.
Nouspensons iciàLaforcederituelqui 14.
/bid,,
p.190.
s'échappe
deLamainducompositeur,
aupremier
moment deParniels
deGérard Grisey, 15.LenomdeHsichHoapparaît
enOccident
sous
d'autres
notations,
comme
ouencore
àlaforce
rythmique
quitraverse
lescrois
commentaires
de«bourreaux
des ZieHeouXieHo(cf.François
Cheng,
Souffle-esprir.
Textes
théoriques
chinous
surl'art
solides»duMarteau
sans
Maitre
deBoulez. pictural,
Paris,
Seuil,
2006).
104 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVEC
DELEUZE Musique
etmodulation
: vers
une
poétique
duvent 105

mettoutesleschoses
ensemble
: «Lavitalité
rythmique
oule rythme Et on peutdonc imaginerquetouscescodesintermodulent.
Un
spirituel.
»Lerythme,c'est
cequiunifieleschoses
del'intérieur
: la son,unemusiquepeuventmoduleravecuncorpsetsarespiration.
respiration
del'univers
—lejeuconstant
desystoles
etdiastoles
—où Etcejeudemodulation trace
unelignejuste,
unelignequin'estpas
touteschosessontroujoursenexpansion
etcontraction.
C'estdonc del'ordre
delasignification,
une
ligne quin'apasdequalitéoude
danslesouffle
vital,danslagrande
respiration,
lagrande
systole
et quantité,
unelignequin'est pasmesurable,
seulement
présente.
Une
diastole,
quetoures leschoses
ettouslesêtresapparaissent.
Lesouffle musiqueestdoncunemachineàmoduler,etcettemachine
semet
vicalestainsilefondd'oùroutesleschosesémergent,
semanifestent enjeud’autres
machines
telles
queleschants
d'oiseaux,
lesmusiques
ouapparaissent. rituelles,
leschantsdomestiques,
etc.Un corpsestmoduléquandil
LepremiercanondéfiniparHsieh Horattache «lafusion
durythme entend unemusique, modulé
parlessons,maisaussipardesconnexions
etdel'esprit
aveclesmouvements deschoses vivantes».Danscette inusitées.
Etquand
uncorps
écoute
unemusique,
tantôt
ifrencontre
son
fusion«rienn'est
plusquecequ'ilest»: levent,c'estleventetil se foyer,ertoutest enaccord,tantôtcefoyersedéfair,
erlecorpscherche
manifesteparlesouffle,
lapluie,c'est
lapluieetellesemanifeste
parle ailleursun terrainstable;ceva-et-vient
périodiquenousamène d'un
pleuvoir.
Quelqu'un quiregardelapluievoitdonc«lapluiequipleut», coinàunautre,
etvoiciapparaître
laforce
deladifférence,
quin'est
etpourlevent, c'est
le«ventquisouffle »erquerespire lerythmede pasdansunecertaine
musique,
maispartoutdanslamusique,
quand
l'univers
: unmouvement devague, d'expansion etcontraction,
de on seplongeauniveaudeslignesjustes.
va-et-vient.
Lamusiqueaussi,
ellerespireetneditrien d'autre
queson Écouter c’est doncfairelarépétition desforces demodulation
existence,
quesonmouvement
de respiration
etdemiseenalternance aussibien que faire répéterlamodulation elle-même, commele vent
desobjers
qu'ellefaitapparaître.
Etvoilàpourquoi
onpeut
dire que
la sefaitrépéter enmettant samarque surLes vêtements placéssurun
musiquen'est
riend'autre
quelemouvement périodique.
Unartdes fil.Ledifférent serépètelàoùil n'estpas,oùil neselaissepasvoir:
mouvements
ondulatoires
danslejeudelamodulation
delaritournelle leventqui se répète danslesvêtements, lerissuquiserépètedansun
oùdesforces nonsonoressontrendues sonores. mouvement, undessin quin'existaitpasàl'avance. Est-ce
qu'ilexiste
Levent,onlevoitsans levoir,onlevoitseulementunefoisqu'il doncunepoétique musicale chezDeleuze? Nousnousrisquons à
: metquelque chose enmouvement. Leventestvuparlesformes que répondre oui, il sedégage uneouplusieurs poétiques,musicalités,
prennentleschosesquandil passe.
Onpeutdoncdirequeleventest delaphilosophie deDeleuze. Etnouspensons iciàunepoétique dela
uneforcedemise-en-forme. Unelignedevérements prendlaplace composition oùleséléments, les événements sonoresetmusicaux, ce
d'uneforcedesoutenance, centripète,
pendant queleventsur les qu'onpeur appeler unrégime defigures,
textures,gestes,
kinésis
sonores,
vêtements
prend lafonction
deforcecentrifuge
etlesvêtementsgagnent sontpris dansunfluxd'événements, un fluxd'images. Cefluxc'estce
doncdesprofilsdifférents,
gagnent unmouvement qu'ilsn'ontpas qu'onpeutappeler unemise-en-forme, composée parl'émergencedes
àl'avance.
C'estque,comme nousLedirDeleuze d'après
HsichHo : images d'après lechocentre lesobjets.
Etdans cettenouvellepoétique
musicale, lesrelationsnesontpasseulement celles
deladérivation,
du
leschoses
nesemontrent
quedans
leur«disparaïtre
».Exactement
comme développement, dessubordinationsetcoordinations,maisaussicelles
lacollinenesemonuequelorsque
lesoircombe!é, desconnexions libresdelajuxtaposition, superpositionetentrelace-
ment.Desconnexions quinesontsoumises à unordreintellectuel
| Levent,
comme unerespiration,
suit laloidescycles.
I estpério- abstrait ouconcret, maisàdesconnexions simples.
dique,commeuncodeestpériodique.Lesonestpériodique er,en Il y abonnombre d'écrituresmusicalesduvent.DansTimeand
même temps
quesapériodicité,
ilmanifesteuncodesouterrain.
Lesêtres Motions Study11,parexemple, lecompositeur BrianFerneyhough
vivants
partagent
aussi
despériodicités,
parexemple leur
respiration. demande à l'interprètedepenser auxgestes desdoigts etdesmains
à comme l'agitation duvent dansunetoiled'araignée. Celaneveutpas
16.GillesDeleuze,
Cinéma. {mage-mouvement
à 21).20avril1982(cours15-1).mage. j
. nov. 1981-juin1982(cours1 direqu'onvay avoiruneécoute duventlui-même, maisque
le vent
passe aussiparlesdoigts. CequeLeventnouslaisse voirdanslescorps
1% AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECD'ELEUZS

expout-êrre
coure
unemultiplicité
deforces
etdeplans
problématiques VIII
quiconstruisent
desvaleurs
denature plurielle,
aurantqu'ilenpeur
s'exprimer
pourtelleoucelle
ligneexpressive.
DeVivaldiàSaariaho,
lesimagesvirruelles
duventetsesactualisationssonores-musicales
sont
toujoursprésentes.Lejeuentrele«Zeffirersi
dolci»etlevent Sorcellerieet machinisme
Boreaqui«simuove alimproviso
alsuoacino»,chezVivaldi;laforce
du«V'entd'Ouest»erdePuck,chezDebussy; laforce
duventpar le
barrementd'ailes
d'unpapillon,comme kefairSrockhausen
audoigré JoséGiz
deDieschmertertinge
Spielen.
C'estunjeuqu'onpeutdire inaugural,
lieudenaissance
denouvelles
relations
entrelessons,entreceux-ciet
lesmusiciensetleurs
instruments.
Leventestdoncl'image d'unfluxénergétique
quitraverseet C'estdansL'Anti-
Œdipe
qu'apparait
pourlapremière
foisl'idée
de
lieLes
corpsenlesplaçant dansdesrésonances
spécifiques,
etleur sorcellerie
associée
aufonctionnement
précis
d'une
machine.
Il s'agis-
donnant harmonicitéetexistencesonore.
Lesouffle
viralcraverse
les sait,pourDeleuzeetGuattari,demontrer
comment
laproduction
corpsetlesfaitsonner.
Il n'est
plusquestion
dereprésenter
le vent,ou dedésirsemble
sedétacherdesmachines
désirantes
pourémaner
saprésence
comme
stimulus
auditif
oucode
figédans
uncatalogue, tourentière
ducorpssansorganes.
Leprocessus
sedéroule
dansle
maisdepenserquelamusiqueestlamanifestation
ducontinuum passage
dela synthèse
connective
àlasynthèse
disjoncrive
dudésir,
d'unAuxd'énergie,
semettant
enrésonancedansuneboîtesonore, plusprécisément
lorsquelamachine paranoïaquequiavaitengendré
dansdescorps,
desinstruments
musicaux,
deshaut-parleurs.
Opérateur lecorpsimproductif estremplacée
parlamachine miraculante
qui
compositionnel
quinouspermet
d'imaginer
Laliaison
entre
lessons
par construit
uncorps sansorganesproducteur
exclusif
apparent
desflux
L seule
force
dufluxd'énergie
quigagneuncorps, parsarésonance etdesorganes.Avantd'analyser
le processus
désirant,
lesauteurs
ont
dansunautrecorpsphysique. recours
àlaproduction sociale
—qu'ilsferont
coïncider
avexlaproduc-
tiondedésir.Encommentant certains
textes
deMarx,ils dégagent
lespremierstraitsd’unelogiquedla
e sorcelleriequiprendra une
importancedécisivedansMilleplateaux.
Puisquec'est
certelogique
quinousintéresseici,nousaccorderonsuneattention
particulière
à
cespagesdeL'Anti-Œdipe.
Comment,surle plandela production sociale,lecapital
devient-il
l'élément
productif
unique
?Ens'appropriant
larichesse
oule«surproduit
»quirésulte
dutravail
desforces
productives.
Reprenant
le livre111du Capital,DeleuzeetGuattariaffirment
que
le capital

serabat
surtoutelaproduction,
constitu{ant]
unesurface
oùsedistri-
buent
les forceset lesagentsdeproduction,
si bienqu'ils'approprie
le
surproduitets’attribue
l'ensemble
etlesparties
duprocès quisemblent
maintenant émanerdelui commed'unequasi-cause. Forcesetagents
deviennent
sapuissance
sousuneformemiraculeuse,
ils semblent
miraculés
parlui.Bref,lesocius
comme
corps
plein{oubienlecapital]
forme
une
108 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE
Sorcellerie
etmachinisme109

surface
oùroutelaproduction
s'enregistre
etsemble
émaner
de à surf,
d'enregistrement
!. raisse.
Enserabattant
sur
lesmachines,
le corps
sans
organes
divise
etcasse
lesréseaux
connectifs
quiles reliaient
grâce,
d'abord,
à l’action
Lerabartement
ducapital
surletravail
décrit
unformidable
Process répulsive
delamachine
paranoïaque,
ensuite
enabsorbant
leurénergie
deconstruction
d'uneréalité
nouvelle,
uneréalité«délirée»ou. ensor. etensel'attribuant.Séparées,dispersées,
lesmachines-organes sont
celée
».Ellen'estpasfausse,
puisque
sonmouvement
propreà distribuées
selondesdisjonctionssurla surfacemiraculée ducorps
effets
réels,
enparticulier,
lacréation
de
la plus-value
relative,Mais
el sansorganes qui
les homogénéise : aucuneneprimesuruneautreà
n'estpasvraie,puisqu'elle
s'attribue
uneproductionquirevientau l'égard
delacirculationdel'énergie quiémane presqu'exclusivement
forces
detravail.
Étantlaseule
réalité
productive,
lecapitalmiraculé
& ducorpssansorganes. «Presqu’exclusivement» : l'absorptionetla
donnecomme leréelmême,image devenuecorpsdontlemouvement transformation
del'énergienesontjamais totales.
Quelque chose reste
sembledécouler
de
sa réalité
: étantconstitutive,
l'illusionsechange dudésirréel,recouvert
successivementpar lecorpssans organesanti-
enréalité,
sansqu'ons'enaperçoive.C'est«lemouvement objectif productifenconflit,déjà«apparent” »,aveclesmachines désirantes.
apparent»quidéfinitle« mondeperversensorcelé» du capitalisme Restenoncodéquipoussait lamachine paranoïaque
à sedétraquer et
La société«construitsonpropredélire»,c'est-à-direseconstruit àrejeter
lesorganesdésirants,
etquiempêche maintenantla machine
elle-mêmeselonsondélire.
Uneobscuritéfondamentaleenveloppe d'enregistrement
d'inscrire
et decoder laquantité
absolue del'énergie
l'opération
derabattement
: l'énergie
productive
se transfère
du
travail encirculation.
Énergie
résiduelle,
absorbée
etconsommée
par«quelque
aucapital
etdesmachinesdésirantes
aucorpssansorganesimproductif chose{…]del'ordredusujet*».Icicommence
latroisième
synthèse
du
envoilant
le processus.
En inscrivant
sursasurfacelaproduction désir,
synthèse conjonctive
deconsommation. Lesujetquis'encharge
dutravailerdesorganes-machines,
le corpssansorganes enfaitses - leCélibataire,«sansidentitéfixe,errant surlecorpssansorganes,
«dérivés
»,présentant
leurénergie
comme venant
de sasurface
même. toujoursàcôtédesmachines désirantes»—annonce le«sorcier »de
Milleplateaux : comme
lui, situéenbordure delasociété,il agiten
Cependant,
l'enregistrement
er lafétichisation
n'expliquent
pasl'effer
obéissantàunecausalité magique. Onadoncdesdevenirs dusujetet
deréalité
quicaractérise
l'ensorcellement.
Encore
faut-il
qu'ildure
destransformationsdelaréalité,lespremiers provoquant les dernières.
dansletemps
: seule
larépétition
duvoilementoudu«mouvement
Comment l'intensité
del’affect
fait-ellejaillirleRéeldel’hallucination
ne »rendront
la «mystification
»imperceptible
—grâce
etdudélire?
Productionincessante
deréalitéauniveaumêmede l'enchante-

nl pe
C'estbienleRéelquisurgitdetoutes cesopérations, nonune
constructionsubjective
quiprolongerait encore laréalitéensorcelée.
Carlesujetschizoconstruit
enfaitunpland'immanence oùil n'yaplus
L 7 lerabattement
duCorps
sans
organes
surlesmachines
faitnaître unextérieur qui
s'opposeàl'intérieur,plusd'esprit contrelamatière,
= prier 1eildevient
aussilacondition
mêmedeladestruc- plusdesujetdistinctdel'objet,plusdedualisme. L'immanence se
je l'ensorcellement
etdusurgissement
duRéel.C'estaussi
une soldeparlacréationd'une
sorted'enveloppe quifait fusionner
tous les
Lalogiss EL +désenvoûre
».Voilàuneffetparticulier
de termes
opposés.
[l n'yaplusdesujetouderégionsubjective
autonome.
de : sorcellerie
deleuzienne
:il afalluque
la totalité
dela L'Anti-Œdipemarquebiencetraitdel'affect
intensif
: ilyestquestion
soitensorcelée
pourqu'unenouvelle
réalitéréelle,
désensorcelée, d’«intensités
enveloppantes
»,de«distances indécomposables toujours
enveloppées
dansdesintensités
qui
sedivisentles unes
dans lesautres
en
ge, —_—_————
changeant
deforme” ».Lapositiond’unmilieu enveloppant bouleverse
1.GillesDeleuze
etFélixG à l'espace
etLerempsordinaires
delaréalité ensorcelée: l'espace
cesse
uatrari,
L'Anti-Œdipe,
Paris,
Éditions
deMinust.
1972,p. 16(désormais
AO),
2.SelonM :
lacirculation
…:es re md facteurs contribue
àcerre
mystificarion,
depurs 3.AO,p. 15.
là Pia’, création
deplus-value
relativeetd'argent,
jusqu'à 4.AO,
p. 22-23.
+, ft
deursde marchandises,Bref,, 1l'ubi inuitéd
opérations
capitalistes leurpouvoir e
assurent SR et la continuit es 5.Ibid.
110 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE Sorcellerie
etmachinisme111

d'êtreobjectifetlerempschronologique.
Plusd'extensions,
rienque
des«distances
indécomposables
»dans
lespatiwm
topologique;
plu capable
debriserl'effetdecapture
desmachines
capitalistes
—non
pasdeseffets
decroyance,
maisdeseffets
événementiels
propres
au
dedimensions temporellesextérieures
lesunesauxautres,maisun fonctionnement decesmachines.
Production
magiqued'uneffet
infiniactuel
oùcoexistent
touteslesdimensions
dutemps.Lecaractère réel.Icisesituelagrande
opération
(magique)
deroutelalogique
enveloppant desintensités
nedérermine aucunenfermement.Voil deleuzienne
desmultiplicités
: laconstruction
du CsO. On saitque
qui distinguelecorpssansorganesmiraculédu corpssansorganes lestroissynthèses nesesuccèdent pasdansl'ordrechronologique,
schizo
: héritier
ducorpsparanoïaque,
lepremiersetientau-dessus mais quetout se faitenmême temps. Encesens, ondiraqueleCsO
desmachines,assurant
même, parfois,
unesortedetranscendance «étaitdéjàlà»,danslasynthèse connective, maisaussi qu'ilnes'est
immanente (c'estlecasdu nazisme); ledeuxièmenesoumetni ne inement
constitué quegrâce àlatroisième synthèse deconsommation
totalise
jamaisl'ensembledesmachines,maissesiruetoujoursàcôté. quiproduit le«corps glorieux ».C'estl'action magique duschizo qui
Dansle premier cas,lefonctionnementmachiniqueenferme,dansle réussitunemultiple transformation extraordinaire : lorsqu'ilélimine
second,
il continue
sans
cesse,
explorant
denouveauxterritoires. lesorganes, il démembre soncorps, le divise, l’éparpille etprojette
Voiciunautre
aspect
delaproduction
duRéelparl'intensification horsd'eux-mêmes corps etorganes. «Îl sefairuncorps sans organes»,
dusentir,
comparable
àunetechnique
dedésenvoürement
:enrompant maisaussiunCsOautonome, existanthorsdelui,mais oùils'intègre.
l'absorprion
desmachines
désirantes
(oulesforces
detravail)
parlecorps Voilàquiempêche dedirequeleCsOn'est qu'une métaphore ducorps
sansorganes
(ouleCapital),
l'expérience
schizobriseetdéfaic
lasurface propre.CequeDeleuze erGuattari ontdécrit dans certeopération de
miraculée
ducorps sans
organesetruinel'ascendance
despotiquedece sorcellerie,
c'estlacapacité ducorpsintense etincensifié desortirde
à dernier.
Cetteascendance
setraduisait
parlasubordination
desforces
à lui-même, deprojeter «l'extérieur »l'hallucination etledélire erde
uneFigureouInstance
transcendante
(Dieu,leCapital).
Enépousant lesposer comme réels.Enopérant ainsimagiquement, entissant le
laforceetl'intensité
duflux(depeur,d'angoisse),
il casse
laprimauté CsOcomme unplan—projection delasurface etdesorganes délirés
paranoïaque
delaFiguretranscendante,il devient
lui-même fluxet desoncorps- il fabrique «lechamp d'immanence dudésir»,alors
puissance
—lemoi
se désincègre,
l’ordredesubordination de
la force même qu'ilendevient unélément : ilconstruit leplanqui le construit.
àl'image
serenverse,
la forcedevientunemultiplicité quicirculeet C'estl'unedesopérations majeures deLalogique deLAnri-Œdipe et
traverse
lesobjets
hétérogènes
surlecorpssansorganes, épousantla deMilleplateaux. Cecorps quiagitsurlui-même n'estpasun«micro-
dynamiquedumouvementréel.Ledésenvoütement n'est pasuneffet cosme »,image miniature du«macrocosme ».
Il devient lui-même en
psychologique
qui«éveillerait
»lesujetplongé dansl'illusion,
mais il cessantd'être lui-même. C'estplutôtuntransducteur etuntransfor-
change
parcequ'ildevient
lesforces
mêmes
d’unréel
libéré.
Sapsycho- mateur, corps paradoxal intensif:ilestmatière eténergie, particuleet
logic.
c'est
leréel
dudevenir.Processus
identique
àcelui quianime
le relation.
Il estpuissance d'Univers, capable desedissoudre, deperdre
sorcier
lorsqu'il
jetteunsort,parexemple
:devenantlui-mêmeune sonunitépouraffirmer lecosmos quivientl'affecter. Insistonssur
force
cosmique, ilépouselaforce,
latravaille
etladirigevers
uneautre lanature magique duprocédé quiaboutit àlaconstruction duCsO.
forcequ'ilveurcapterervaincre.1]agirsursoncorps,surles forces On distinguera deuxopérations magiques : lapremière, lepassage
quesoncorpsabrite etqu'illibère.
Iutiliselesmachinespropresàla ducorpsà l'esprit etdel'espritàlamatière quimène auRéel,ne
suitaucunecausalité
efficiente.
VoulueparleCélibataire
schizo(ou
sorcellerie.
Il s'implique
lui-même danssonexpérimentation
magique.
AE sentirsous-tend
les« rechniques
dedésen-
«sorcier»),cette
«expérimentation »où«pratique »n'obéit pasà
desrèglesrationnelles.
Ellesuscitedesdevenirs,
ledevenir-esprit
du
la 9 t» contre «sorcelleriecapitaliste
»,dont parlent
Philippe
corpsetledevenir-matière
del'esprit.
Ladeuxièmeopération
magique
£_. rer Stengers,
notamment
celles
deoser et utilise
laconragion
:deuxinstances,deuxréalités
hétérogènesentrent
Ms . agittoujours
deproduire
l'intensité
delapuissance
ensymbiose parcontamination.
À remarquerquec'est
leur
différence
même, leurhétérogénéité
quiexige lacontagion.Celle-cicomble
6.Cf. PhilippePi ge : l'intervalle
quisépare
lecorpsdel'esprit.
LaDé 2Ÿ. ignarre
etIsabelle
Srengers,
Lasorcellerie
capitaliste,
Paris.
112 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE
Sorcellerie
etmachinisme 113

Envérité,
c'estle Réeldudésirquicomblel'intervalle
quel'absence
decause
rationnelle
laisse
vide.
CeRéeln'est
niDieunil'esprit
ni1, I. LA MULTIPLICATION DESDIMENSIONS
matière,
maisla«cause
immanente
»detoutcequi
est,àlafaçon
de|; DANSLE DEVENIRIMPERCEPTIBLE
substance
spinoziste.
On diradoncque,dansL'Anti-Œdipe,
le Passage
de
la réalité
miraculée
auRéelrésulte
del'action
dela«substance
, LeRéel,c'estdesmultiplicités.
Lathéoriedesmultiplicités
de
elle-même
(le Réel),opérantà travers
lecorpsdu«sorcier»-célibataire Milleplateaux,
montrequ'elles
nedésignent
pasdesunités,
maisdes
sur
la réalitéensorcelée.
C'estbienunelogiquenouvellequeDeleuze dimensionsou«desdirections
mouvantes"°».Retenons
deux aspects
etGuartari
cherchentàdégager
dansMilleplateaux.
Cequisoulève delamultiplicité.
1)Elleimpliquedesdevenirs sur
le pland'immanence. Queson
immédiatement
le problème
desesrapports
aveclaraison
—problème
tissumême consiste
endimensions, quecelles-ci
varientenl'obligeant
quenousn'aborderonspasici, maisquel'évocation
insistante,
dans
àchanger denature,voilàqui
fait desonmouvement undevenir des
L'Anti-Œdipe
exdansMilleplateaux,
del'Éthique
deSpinoza,appelle
à
devenirs,
sortedefractalisation
dumouvement dudevenir. Voilàqui
examen.
Disons
seulement
qu'elle
nous
intéresse
directement,
puisque définit
l’immanence,
soncaractèreenveloppant
et infini.Lamulriplicité
Deleuze,
dans lechapitre
xvitdeCritiqueetClinique,
intituléSpinoza nécessairement
l'immanence;
etLes
trois«Éthiques
»,aborde laquestionmêmequenousvenons 2)Elleopèreenchangeant
denature
etseconnectant
avecd'autres
d'évoquer
: leremplissement
del'intervalle
laissé
videdanslesdémons- dimensions.
Les«changements
denature
»découlent
desvariations
crations
du
livre V del'Éthique’
—problème
identique
àcelui
de
la dedimensions
ou variations
d'intensités.
Celaéquivaut
aupassage
contagion
danslepassage
d'unhétérogène
àl'autre,
danslalogique deseuils
ougradients
d'intensité
surleCsO,soit auxdivers degrés
dusorcier.
C'estaussi
cequefairSpinoza.
Rappelons lespages
extra- du«Je sens»schizo.
AinsileRéel«désensorcelé
»surgit: onagit
ordinaires
deDeleuze évoquant
les «pures
figuresdelumièreproduites intensivement
surlecorpseroncréeduréelsurleCsO,quidevient
parle«Lumineux subsrantiel
»àl'œuvredanslelivreV, auxquelles lui-mêmeréel.
Ondéfair lesimages
opposées desdualismes
deroute
sesoumetrent
les figures
géométriques*.
Ainsi, nature
enlestraversant, eny insistant
defaçonàenépouser
Lesforces.
On arrivealors«à la formulemagique quenouscherchonsrous:
laméchode
géométrique
duLivreV[...] vaprocéder
parintervalles
etpar Pluralisme=Monisme, enpassant partouslesdualismesquisont
bonds,
hiatus
etcontractions,
àlamanière d'unchienquicherche,
plurt l'ennemitoutàfaitnécessaire,
lemeuble quenousnecessons pas
qued'unhomme raisonnable
quiexpose. Peut-être
dépasse-t-elle
toute dedéplacer! ».
démonstration,
pourautant
qu'elle
opèredansl'indécidable*. Lamachine abstraite
connectedesdimensionsetdesintensités
différentes,
faisant
communiquer
les plateaux
ouchampsd'iminanence.
Lesorcier
aussi
opèredansl'indécidable,
avecdesêtres
delumière. Cemouvement «horizontal
»s'accompagnedetransformationsdu
À une
vitesseabsolue. plandeconsistance,
qui
le rendentdeplusenplusenveloppant
- visant
Autrement
dit, Deleuze
repère,
dans
lalogique
sorcière,
uneratio- sansdoutelepassagedetoutes
lesimmanencesrelatives
à l'immanence
nalité
différente,
plusproche
sans
doute
decelle
dulivre
V del'Éthique absolue.
Ainsi,parexemple,
il yauneespèce deviséequitraversela
deSpinoza. chaînedesdevenirs:

Siledevenir-femme
estlepremier
quantum,
ousegment moléculaire,
etpuls
lesdevenirs
animaux
quis'enchalnent
aveclui,versquoisepréciplrent-ils

10.Gilles
Deleuze,
Mille
plarraux,
Paris,
Éditions
deMinuit,
1981,
p.31(désormais
7.G
8. illes
Deleuze,
/bid,,
p. Critique
183. erClinique,
Paris,
Éditions
deMinuit,
1993,
p.172 MP).
9,bi, p. 185.
11.
MP,p.31.
114 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE
Sorcellerie
etmachinisme115

tous
?Sans
doure,
versundevenir-imperceptible.
L'imperceptible
eslafin
immanenre
dudevenir,
saformule
cosmique
!!, vivantes,
parcequecontenant
de plusenplusdedimensions.
Lecarré
contient
en lui,virtuellement,
plié erenveloppé,
conrracté,
l'ensemble
Il nes'agit
pasdetéléologie,
pasd'assignation
d’une
finalitéUnifian desdimensions
supérieures,
jusqu'àl'infini.Cescarrés,
ousphères,
ne
tous
lesdevenirs,
mais deladirection
d'unmouvement
quicherche
[. sontplusdesdessinsgéométriques,
ils ressemblent
àdes«dessinsde
plusgrand
nombre
deconnexions,
quireprend
donctouslesdevenir, sorciers!*
»: ilssontvivants,
ils sesituenteux-mêmes dansunespace
parcequec'est,pourainsi
dire, savocationinterne: voilàPourquoi
le àndimensions —unespacedecontagion. Ainsichaque
devenirsuscite
devenir-imperceptible
vient«àlafinderouslesdevenirs moléculaires
, unautredevenir ettousseprécipitent
dans ledevenir-imperceptible.
Lesmachines
abstraites
sechargent
d'opérer
les agencements
de Lepassage d'unemultiplicité
àl'autredemeurelogiquement
inexpli-
intensités,
endécodant
les strates,
traçant,
du mêmecoup,
le mouve. cable: oui, il y a genèse
et mêmegenèse
degenèse,
maiscomment,
ment
de«précipication
»desdevenirs
versl'imperceptibilité.
Commens précisément, cecontinuum engendre-t-il
desfigures hétérogènes
?Ou,au
cemouvement s'engendre-t-il?Il estinscritdansla natureMême contraire, comment leshétérogènes seconnectent-ils? Comment la
desdevenirs,
carundevenirsetransforme dansun autregrâce àune contagion opère-t-elle? Pariour destrous dans
le continu, et oujours
opération
extraordinaire,
queMilleplateaux qualifiede«derniermot l'action
dusorcier lesenjambe, refaisant leissu.Les«enjambe »et,
delasorcellerie?
»,etquidécritlafaçondontunemultiplicité retienr enmême temps les«remplit »: lepassage d'hétérogène àhétérogène
lesdimensions
delamultiplicité dontelledécoule.
C'estcequi
en estassuréparl'imperceptible atteint,
l'imperceptible perçu qu'onveut
faitunemudriplicité
plare: l'aplatissement
rendpossible
larétention atteindre -—l’ulrime devenir présent danstoutdevenir desmultipli-
desdimensions.
Deleuze
donnecommeexemple,
àpartird'unroman cités,
quiconserve touslesautres devenirs surleplandeconsistance.
deLovecraft,
les sections
opéréesdansdesfigures géométriques
qui Letrajetdeplusenplusabstrait desdevenirs neforme pasuneévolu-
tionmaisuneinvolution, terme quidésigne l’abstractionprogressive
engendrent
d’autres
figures
dansd'autres
dimensions :parexemple,
le
desmultiplicités «enenfilade!5 »;maiscette enfilade ousuiten'en
carré,
àdeuxdimensions,
résulte
del'intersection,
parunplan,d'un
estpasune, car toute multiplicitéendevenir reprend toutes
lesautres
cubeàcrois
dimensions
et ainsidesuite,
àl'infini.L'action
decouper
etseprécipite dansledevenir-imperceptible.
uneforme
dans
unespace
àndimensions
faitnaître
uneautre
figure Deleuze sesertdesparoles deD.Juan, le sorcierdeCasrañeda,pour
àn-1dimensions quicontient,
virtuellement,
lafigure
et l'espace décrire
l'élément dernier (l'imperceptible-perçu)
qui
relieleshétérogènes:
dontelledérive,
sibienquel'ultimeFigureAbstraite
recueille
une «tourcequejepeuxtedire,c'est quenoussommes fluides,
desêtres
infinité
d'autres
dimensions
qu'onpeutreprésenter
étalées
surunplan. lumineux faitsdefibres. »Deleuze commente : «Unefibrevad'un
Larétention
virtuelle
detouteslesdimensions spatiales
précédentes homme à unanimal, d'unhomme oud'unanimal àdesmolécules,
: vient
delanaturedelacoupe elleéquivaut àlagenèse
d'une
figure demolécules àdesparticules, jusqu'à l'imperceptible, Toutefibreest
àpartir
de lacoupe-genèsed'une
figurecorrespondanteantérieure. fibred'Univers #.»Comment ateint-on ceseuilabsolu quilaisse
voir
Pours'enrendrecompre,
il suffitdefairelechemininverse
dela l'imperceptible ?Enéliminant touteforme, toute concrétionmolaire,
à coupe
: ducarré
onretourne
aucube,
ducercle
onretourne
la sphère tourorgane «detrop»dansLecorps, enintensifiant lemouvement
déployée
—etàl'espace
àtrois
dimensions
présupposé
dans
le carré
et jusqu’à enextraire l'infini.On arrive ainsià ladéterricorialisacion
lecercle.
Chaque
figureincarne
lagenèse
d'unegenèse.
Or,la genèse ouàl’immanence absolue. «Laperception setrouvera confrontéeà
dunegenèse
représente
undegré
deplus
dans
l'échelle
del'abstraction. saproprelimite; elleseraparmi les choses, dansl'ensemble deson
maisd'uneabstraction
quirecueille
etconserve
lesdimensions
qui voisinage, comme la présence d'uneheccéiré dansuneautre!?. »
précèdent,
quelque
chosecommeuneabstraction
ou unecontraction
dans
unesérie
defigures
deplusenplusabstraites
etdeplusenplus
14,
MP,p.308.
15,MP, p.305.
12.
MP,p.342. 16./bid.
13.
MP,p.307. 17.MP,p.345.
116 AGENCER
LRSMULTIPLICITÉS
AVECDeLeuze Sorcellerie
etmachinisme \17

à lignes
abstraites,
desêtres
lumineux,
4
desmachinesmagiques. Ce sontaussidesmachinesdeCESSE
a Le ie machineabstraite".
»Quiper àcissentle planqu'ellessupposentdéjà.Nous avonssoulign
ainsi
l'imperceptible,
endevenantsoi-mêmeimperceptible?
L'arris. de étroitsentreimmanence,sorcellerie
etmachinisme,
maisnous
Jefou,l'enfant,
lespinoziste,
lesorcier.
On remarquera
que
la mém mn analysél'immanence,
sesopérationsetsesmouvements.
Ici,
7 logique
émane
desdevenirs
desmulriplicités
sur tousles«plat
au. sa i faudrait unregard
moléculaireetdepluslongueportée,
qui
C'est
la logique
delavie,ycompris
deLa«puissante
vieinorganique
. D épouserl'Orient du Tao etdu Zen,et fasseaveceuxpeut-être
cequeDeleuze à faitaveclasorcellerie
primitive
: enisolercertains
IL.PENSERC'ESTTOUJOURSSUIVRE
agencementsetmouvements pourformersespropresconcepts.Mille
UNE
LIGNE DESORCIÈRE
plateaux
n'estpasseulement ungrandlivredephilosophie,
c'estaussi
leplusbeautraitédesorcellerie
denotretemps.Prendre aumotsa
Noussommes partis
delamachineparanoïaqueetdelamachine logiquesorcière
avecsesmachines immanentistes,voilàsansdoute
miraculante
dans
L'Anti-Œdipe,
ernous
voiciarrivés
àlamachine
abstrane unetâche
philosophique
nécessaire.
dudevenir-imperceptible
deMilleplateaux.
Partoutnousavonstrouvé
des
mouvements
etdesprocessus
bizarres
quin'obéissaient
pasauxnormes
logiques.
Etqui,pourtant,
avaient
leurconsistance
propre.
Deleux
etGuartariinsistent
surlecaractère
«alogique»decesmouvements
:

«ün'yàpasd'ordre
logique
préformé
desdevenirs
etdesmultiplicités*
«C'est
ainsi
quenousopérons,
noussorciers,
nonpassuivant
unordre logique
mais
suivant
descomparibilités
oudesconsistances
alogiques
? »;«lesraisons
machiniques
sonttouteautrechose
quedesraisons
oupossibilités
logiques:
:

Cesraisons
machiniques
président
àcequ'on
pourrait
appeler
une
logique sorcière.
Cen'estcertes
paslalogique delasorcellerie
primi-
tivetelleque
l'ethnologieLarestitue,
maisdont,pourtant,Deleuzeet
Guartari retiennentbiendesaspects.
Il faudrait
toutuneétude pour
dégagerles traitsessentiels
decettelogiquedeleuzo-guartarienne,
siruéeàlafoisdanslevoisinage decelledessorciers
traditionnels
et
dans levoisinagedelaraison
spinoziste.Peut-être
n'est-elle
elle-même
qu'une
grandiose
Machine
abstraite
quiopère
lepassage
entre
les
multiplicités
sorcières
etcelles,
philosophiques,
du livreV del'Éthique
—afindelesprécipiter
ensemble
danslagrande
raison
magique
de
Milleplateaux®?.
Car,comme
onl'avu,
les machines
abstraites
sont

18.MP, p. 343.
19.MP, p.37.
20.MP, p. 3%.
decommentateursaimaient suffisamment
Spinoza
pourinvoquerunVentquandils
21.MP, p.350.
parlaient
delui.Et,eneffet,
il n'yàd'autre
comparaison
quelevenr.Maiss'agit-ildu
22.Cevoisinage
entre
la grandventcalmedontparke Ddlbosentantquephilosophe?
Ou bienduvent-rafale,
évoqué
parDdeuze,
danslechap.
sorcellerie
etlelivre
6deSpinoza. V del'Éthique
Philosophie este: xplicitement
prarique «Beaucuj duventdesorcière,
dontparle…
» (Paris,
Éditions
deMinuit,1981,
p.175).
IX

Entretotémisme
aborigène etUmbanda
brésilienne
:empreintes,
lignes
defuite
etcristallisation
deshétérogénéités

BARBARA
GLOWCZEWSKI

Peuavantcerte
intervention,
j'airêvé
quejedisais
àDeleuze «lavie
n'estpasuntoboggan.».Orj'avais prévu
deleciterà propos
d’un
jeuavecungant:

Dansunesituation
deSurLesquaisoùlafemme auncomportement ambiva-
lent,
eroùl'homme sesent
timideetcoupable,celui-ci
ramasse
legantqu'elle
2laissé
comber,legardeerenjoue,yglisseenfinsamain. C'estcomme un
signe
générique
ouembryonnairepourl'image-action,qu'on
pourraitappeler
Empreinte(objet
émotionnel)
et quifonctionne déjàcomme un«symbole »
dansledomaineducomportement. Ilréuniràlafoisd'unemanièreétrange,
l'inconscient
del'acteur,
laculpabilité
personnelle
del'auteur,
l'hystérie
de
l'image,tellelamainbrûlée
parexemple,l'empreinte
quinecesse
desurgir
dans lesfilmsdeDmyrryck.Dans sadéfinition
la plusgénérale,
l'empreinte
estlelienintérieur,
mais visible,
deLasiruation
imprégnante
etdel'action
explosive.

» Siauniveau
«symbolique
et «sémiologique
», lecinéaste
apeut-
êtrevoulu
suggérer
parlegeste
del'acteur
ledésir
depénétrer
l'actrice
enlaissant
sonempreinte
danslegantquideviendrait
métonymie
de
la
femme, j'yvoisplutôt
le devenir
desonretournement
: enmettant
sa
main dansunganthabitéparlamain
dcerte
e femme,
c'est
sonempreinte
àellequel’usurpateurdugantpeutchercher
àimpressionner
sursa
propremain.Dansunganttoutjusteretiréparuneautrepersonne,

1.GillesDeleuze,
L'mage-mouvement.
Cinéma
I, Paris,Éditions
deMinuit,
1983,
p.219.
120 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE
Entre
totémisme
aborigène
etUmbanda
brésilienne
121

» vouspourriez
sentirlachaleur
qui«imprègnel'intérieur.Alorsj
LecristalaaussiinspiréLévi-Strauss
quiycompare
le mythe
:
peut-on
y trouver
d'autres
tracesdeviedesonporteur?Quidir Fes
«Vis-à-vis
dlea langue,
d'une
part,de laparole,
de l'autre,
saposition
ditdevenir,
devenir-femme...
Si monrêvedisait: «lavien’estPasun
toboggan
»,c'est
quelegant
glisse
vitevers
autre
chose.
Au-delà
dujen eraireneffet
analogue
àcelle
ducristal
:objet
intermédiaire
entre
un
statistique
demolécules
etlastructure
moléculaire
elle-mêmef.
»
lavie,quin'estpasl'image quel'oncroyait
étrecelledel'homme qui Pourbeaucoup
depeuples
dontlemythe
fonde
leurs
cosmovisions,
fantasme oufétichise.
Deleuze définitainsisousletermed'. image- l'image
ducristal
frappe
parsonaspect
minéralogique
debrillance
er
action»(force
ouacte) l'«indice
»dePeirce,comme «signequi
renvoie
réfraction,
detransparence
multicolore,
deboitenoireentrelavieet
àsonobjetparun
lien defait,soitune
situation nondonnée,inférée
lamort,l’animé
etl'inanimé.
Dansledésert
australien,
les ancêtres
équivoque
etrerournable
+,unaspect
del'empreinte?.
L'image-action
del'«empreinte
»m'évoqueleschamanes
australiens
dontl'initiation
des
chamanes,
selon
unmythe
quej'aireconstitué
ducentre
àlacôte
ouest
del'Australie,
Deux-Hommes
quisetransformaient
entornade
danscertaines
régions
aétédécritecommeleretournement
ducorps, ont « joué avecdespierresde couleur
» (lesquartz)pourse« jouer»
visuellement
exprimé
paruneforce
pénétrant
l'anuspourtirer
sapeau deshumainsen multipliantlessystèmes
deparentéavecdesrègles
interne
audehors?
: lechamane
«change
depeau»en«seretournant demariages
qui distinguentunetrentainedegroupes
delangues
comme
ungant
»,image
d'une
certaine
définition
duchangement
de différentes.
Depuis,leschamanes initiés
détiennent
uneréserve
de
pointdevueopéré
dansleprocessus
de
l'analyseselonlatopologie quartzdanslecorpsqui«cristallise
Ȉlafoisleurpouvoir
devision
» deLacan.Cetéchange
entrelededansetledehors,
la peauinterne
et (diagnostic
permettant
devoiren«transparence
à cravers
lapeaudu
lapeauexterne,
estuneopérationmagique,topologique
comme la corps
pourtrouver
l’image
«indice
»delamaladie)
etlepouvoir
de
bouteille
deKleinquioffreungoulot
inversé*.
À noter
queLévi-Strauss guérison
enagissant
surla tracedu malparlevomissement
d’unde
dans
Lapotière
jalouse
utilise
aussi
labouteille
deKleincomme
opéra- cesquartz oud’uncaillotdesang quicaptelemalenluipourl'éjecter
teurd'unparcours
mythique.
L'opération
magique
duretournement àl'extérieur’.
ViveirosdeCastrocommente dans
l’article«Laforêrde
«actualise
»et«réalise
» un virtuel(«dessous
»,£anunjuenwarlpiri) cristal»destémoignageschamaniques deDaviKopenawa, Yanomami
encréant
unnouvelactuel
(«dessus
»,kankarlu)
delasurfaceà«fleur d'Amazonie brésilienne,recueillis
parl'anthropologue BruceAlbert
depeau»maiscelle-ci
doitpermettreunerevirtualisation,
l'émer- ausujet desxapiripe quidésignent
à lafois«urupé, l'image,
principe
gence
d'une
nouvelle
puissance
d'agir.
Dans
lecasduchamane,
c'est vital,intériorité
vraieouessence desanimaux etd'autres êtres
dela
lapossibilité
deguérirlesautres.
PourDeleuze,
lavirtualisation
est forêt»,«lesimages immortellesdeLapremière humanité archaïque,
comme unecristallisation
: composée deYanomami avecdesnoms animaux
quisesont transformés
enanimaux duprésent »erenfinleschamanes,
«devenir unchamane »
) cequ'onvoitdanslecristal
estlecemps
enpersonne,
le jaillissement
du étant
synonyme de«devenir unesprit »(xapiri-pru
; leschamanes—en
temps.
Lasubjectivité
n'estjamais
lanôtre,c'estLetemps,
c'est-à-dire
l'ameou aspirant unepoudre hallucinatoire
—captent pourtousleshumains
l'esprit,
Levirtuel.
L'actuel
esttoujours
objectif,
mais
levirtuel
estsubjectif”. «desaffects nonhumains multiples»car,selonKopenawa, «cesont
lesmots
duxapiripé
quiaugmentent
nos
pensées*
».Lechamane,
selon
ViveirosdeCastro,estcommeunphilosophe
socratique,
pourlequel
2.Ibid.p.292,
traduit
ainsiLes
deuxautres
concepts
dePeirce
:«imagementale
»
(relations
abstraites)
pour«symbole»,signe
quirenvoie
àsonobjetenvertu
d'une
loiet«image-affection
»(qualité
oupuissance)
pour«icône
»,signequirenvoic
à 6.Claude
Lévi-Strauss,
Anthropologie
structurale,
Paris,
Plon,1955,
Il.
sonobjetpardescaractères
internes. 7.Barbara
Glowczewski,
«Lecorpsentre
deux-vents
{nord-ouest
australien)
»,
3.BarbaraGlowczewski,
Du Kéveà LaLoichezlesAborigènes.Mythes,
rites inM.Godelier
etM.Panoff
(dir.),
Laproduction
ducorps,
Amsterdam,
Archives
organisation
sociale
enAustralie,
Paris,PUF, 1991. contemporaines,
1998, p.203-227.
4.Isabelle
Morin,Laphobie,Levivant,
leféminin,Toulouse,
Presses
universi- 8.Eduardo
Viveiros deCastro, «TheCrystal
Forest
: Notes
ontheOntology
of
Amazonian
spirits
»,/nnerAsia,vol.9,2007,
p. 13-33,
citeD.KopenawaetB.Albert,
taires
duMirail,2009,
p.446:citant
Lacan
(séminaires
11er1964-1965,
leçondu
6 janvier1965,inédit}. publiés
auBrésil
etdans
lecatalogue
Yanomami
(Fondation
Cartier,
1993).
Voir
aussi
leurlivreLaChuse
duciel,Paris,Plon,coll.«Terrehumaine
»,2010.
5.Gilles
Deleuze,
L'Image-semps.
Cinéma
2,Paris,
Éditions
deMinuit,
1985,
p.111.
122 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDeLsuze Entretotémisme
aborigène
etUmbanda
brésilienne...123

l'ontologie
desesprits
amazoniens
secaractérise
parl'«imagerie
inten. La«vision
»estfaite
decedédoublement,
decerte
coalescence.
C'est
sive
deréflexion
lumineuse
enétincelles
»et«ladivisibilité
indéf,. dans
lescristaux
d'inconscient
que
se voient
les trajectoires
delalibido.
demultiplication
desesprits
»,danslaforéttraversée
d'unréseau
de Deleuze
souligne
ailleurs
que«Félix
avait
raison
dedéfinir
lecristal
chemins
delumières,
comme une
toile d'araignée,
avec
des«miroirs, detemps
commeétantparexcellence
uneritournelle!!
»,cequ'ils
gigantesques
quiservent
desupports
volants
auxesprits.
À l'instar définissaient
sous
leurdouble
plume
enitaliques
comme
«sou
ensemble
d'autres
peuples
amérindiens,
c'estlapropriété
de«briller»enmur. de matière
d'expression
quitrace
unterritoire"?
».PourGuattari
pliant
la lumière
pour
agir quiintéresselesYanomami,unrégimede
métamorphose,
demultiplicité
qualitative,
uncontinuumhétérogène
. l'étudedesricournelles
mériteuneattention
particulière,
caril semble
en
«xapiripéestlenomdela synthèse
disjonctivequi connécte-sépare effetque
leur entréedanslesagencements animaux ethumains déjouent
l'actuel
etlevirtuel,
lediscret
etlecontinu”.» systématiquementlesoppositions
rigidesentrel'acquis
etl'inné,entreun
Lasynchèsedisjonctive
à l'œuvre
dansl'imageactionestpour déterminisme
biologique
rigoureux
etuneliberté
d'invention”.
Deleuzeundesaspects ducristal
auquel
il seréfère
dansCritique
er
Clinique
enmentionnant undemeslivres: Enanthropologie,
sortirdecerteopposition
estprimordial,
comme
ledit Guartari
:
Un voyageréelmanqueparlui-mêmedela forcedeseréfléchirdansl'imagina-
tion;etlevoyage
imaginaire
n'apaslui-même
laforce,comme
dit Proust,
de cequicompte danscescristallisations
decomportement
semble
étremoins
sevérifier
dans
leréel.
C'est
pourquoi
l'imaginaire
etleréeldoivent
être
plutôx denatureintrinsèque
àchacune
de leurs composantes
hormonales,
percep-
comme
deuxparties
juxtaposables
ousuperposables
d'unemême
trajectoire, tives,
écologiques,
sociales,
quelesdispositifs
spatiaux
etrythmiques
qu'elles
deuxfaces
quinecessentdes'échanger,
miroirmobile.
AinsilesAborigènes engendrent
et àpartirdesquels
desstratégies
diagrammatiques,
desractiques
d'Australie
joignent
desitinéraires
nomades
etdesvoyages
enrêvequicomposent destrarification
permettent
decréer deséchangeurs,
delancerdesponts
ensemble
«unentremaillagedeparœurs»,«dansuneimmense découpe
de sémiotiquesentredesunivers
parallèles
quinesemblaient
jamaisdevoir
l'espace
etdutempsqu'ilfaulire comme
unecarte!». communiquer ensemble".

Àlalimite,
l'imaginaire
estuneimage
virtuelle
quis’accole
àl'objet J'aiditailleurs
quepourlesAborigènes
l'empreinte
entantque«trace
réel,
etinversement,
pourconstituer
uncrista/
d'inconscient.
I]nesuffit
pas del'absence,
est laseulepreuvedevérité
qu'uneactionaeulieu!».
quel'objetréel,
lepaysage
réelévoquedesimagessemblables,
voisines; Parcequesiquelqu'un appuie surdusableetlaisse
uneempreinte
ilfautqu'ildégage
sapropre
imagevirtuelle,
enmême tempsquecelle- demainoudepied, c’estlatrace
decetteaction-là.
Lesensdecerte
ci,comme paysageimaginaire,
s'engage
dansleréel,suivant
uncircuit
où chacundesdeuxtermespoursuit
l’autre, s'échange
avecl'autre. 11.GillesDeleuze,
L'/mage-temps,
op.cit.,p. 122.
12.Gilles
Deleuze
erFélix
Guartari,
Mileplateaux,
Paris,
Éditions
deMinuit,
1980,
p.397.
9.Eduardo
Viveiros
deCastro,
op.cit.,p. 17-18
er20;
lors desdiscussions
à 13.FélixGuartari,
L'inconscient
machinique,
Paris,
Recherches,
1997,p.127.
Cerisy,
uneexpérience
similaire
desmiroirsfurrapportée
pourlesTarahumaras.
par 14.GillesDeleuze,
L'Image-mouvement,
op.cit.,p.127-128.
DanslesCartographies
RégisHébraud,compagnondelacinéaste
R.Carasco,
<htrp://raymonde.carasco. shizoanalytiques
deGuattari,lesdiagrammessontplutôt
ducôtédesPhylums
online.fr/araudedestarahumaras.htm>. machiniques
(actuels
erpossibles).
Maisilyades diagrammes
quijouent
avecroutes
10.Note
deDeleuze,
Cririque
etClinique,
op.cit.,p.83:cf.Barbara
Glowczewki lespolarités
destroisautres
foncteurs
: lesUnivers
incorporels
(possible
etvirtuel),
DuRéve
à LaLoichez
lesAborigènes,
op.cit.,chap.1.Celivrede1991
lui aétésuggéré telles
lesrivournelles
dontlaportéetransformatrice
(subjectivement
déterrivorialisante)
parGuartariqui l'avaitsousla formede mathèsed'Érar(Paris 1, 1988);bienque s'agence particulièrement
aveclesTerritoires
existentiels
(réeletviruel)quieux
j'aiesuivisescoursàVincennespour unemaîtrisedecinéma,optionphilosophie en s’articulent
avec
Les
Flux(réel
etactuel).
1977-1978,je n'enai pasdiscutéaveclui, maispendantdesannéesavecGuattan. 15.« Leparadigme
desAborigènes
d'Australie
: fantasmes
anthropologiques,
dontrésultent
deuxséminaires
transcrits
: «Espaces
derêves
(1983er 1985).
Le créarivités
artistiques
etrésistances
politiques
»,inLarevanche
des
genres,
catalogue,
Waripiri
»,Chimères,
n°1,1987. G.Le Rouxet L. Strivay(dir.), Liège,Aïnu, 2007,p. 85-107,p. 87.
Entretotémisme
aborigène
etUmbanda
brésilienne...
125
124 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

action,
c'est autrechose.Si maintenant,
vousmettezdeuxpiedsl'an
devant
l'autre,il y adeschances
quel'onpuisse
diredansquelsens
vous
avancez,maislesAborigènesvontajouter
sila tracedated'uneheure,
ouplus,voired'unmoisenfonction dusolet de
la pression
(intensiré
dumouvement, poidsdel'agent,
sonâge,sonsexe,
etc.).Évidemmens
lestactiques
peuvent changer
les traces
d'unhumain enfuite.|]Peut
simulerunemarche
arrière pourbrouillerlespistes,
defausses
lignes
de
fuite.
11 reste
quechaque
trace
laissée
estlaseule
preuve
qu'une
action
aeulieu.Le « territoireexistentiel
»,c'estça.Guattariétaitfasciné
du fairquetoutl'agencementcollectifd'énonciationdesWarlpiri
(etd’autres
Aborigènes enAustralie)
soitconstruit
surceprincipe
delatracequifaitparcours,etdesentrecroisements
rhizomiques
qui
mettent
en lienleréel,l'actuel,
levirtuel
etlepossible,
toujours
dans
desmouvements autoréférentsdemétamorphose.
LaritournelleseretrouvechezlesWarlpiri—ainsiqued'autres
groupes
du désertetcertains
dela forêtetdu littoralnord—dans
le
faitquechaque
individu,
avantmême
denaître,
estpensé
comme Lajamanu—40ansaveclesWarlpiri,Film(60)
unevirtualité
d’unverschantéquelquepartdansla terre,atrendant deB. Glowczewski,
2018.Extraitdu ritueldeguérison
Warlpirifilmé
des’actualiser.
Ce versdechant/verset
(kurruwalpa)s'actualise
dans en1979parl’auteur:
<hups://vimeo.com/289440509>.
un bébéà venir,apparuen rêveà quelqu'un de son entourage,mère,
pèreouautre,pourqu'onsachedequellieuexactement
il vient,
er à Voiciunautre exemple de
relationentreactuel etvirtuel.
Onpeint sur
queldevenir
totémique
il appartient,
Kangourou,
Igname
ouautre. leventre
d’unefemme warlpiri,
en1979, desimages-forces, Kuruwarri,
À lamort,
certe virrualitéactualisée
dansla personnererourne
dans termequidésigne aussibienlesêtresancestraux rorémiques, que
laterreerattend des’incarner
ànouveau. Celaneveutpasdireque l'image
entraind’être cartographiée.Lesfemmes dessinentautourde
lesgensseréincarnent. C’estseulementunaspect delapersonne,
qui sonnombril le
lieu, lespoints d'eau (cercles)
surlacerre dutotem, un
résulte
aussidetoute unesériedeparcours,deréseaux d’autres
devenirs serpent.Doncc’està lafoisunecarte, unancêtre Serpent, quin'est
totémiques etd'alliances,d’autres
choses quecertepersonne àfaires passerpent maisl'ancêtre desserpents etdeshumains ayantpour
aucours desavieetd’unesprit(pérlirrpa), quiluiestemporté dans devenirtotémique leSerpent. Lespetits demi-cerclesreprésentent
lecosmos. Cetexemple delanaissance comme quelque chosequiest toujoursdespersonnages assis.
Leslignesdroires ouméandreuses sont
virtuellement
là etquis'actualiseenchaque personne pourensuite
se desparcours. Cessignes sontpolysémiques, toutcomme les lignes
revirtualiser,
illustre
à safaçoncequeDeleuze appellele«processus desparcours aborigènes sontdesrhizomes, à l'image designames qui
de
cristallisation ».Enl'occurrence,
c'estleretouràlaterredel'image- poussentrhizomatiquement dansla terre. Icionaunecorde faite
actiond'unnom-lieu quiestlenomde la personne, dubébé quin'est avecdescheveux etenduited'ocre.Ersans toucher vraiment
la peinture
pasné,sonnomsecret, magique,ayant unepuissanceensoi.Engénéral censéeapporterl'image-force àl'intérieur
ducorps, pour
allerchercher
lenomne circulepas,parce quesionleconnaît, sionlechante, on la maladiede la femmecouchée,deuxfemmesbalancent
lacorde
peutséduire lapersonne, etonpeutaussi lui fairedumal.Donc« au-dessus
desonmal,pour
le retirer;
l’uned'elles
danse
ensuite
avec
nomestunversdechantcondensé, lié à un lieuparticulier.
Etla lacorde
etemmènelemalauloin.C’estundouble processus
:d'abord
cristallisation
consiste,
àlamortd’unepersonne,
à cequecenom-lieu
retourne
dans
lemême
lieu etattende
des'actualiser
dansunenouvelle , 16.Barbara
Glowczewski,
«Guareari
et l'anthropologie
»,Multitudes,
u°34,
personne,
ensemanifestant
enrêve,maisennaissant
dansunenfant. L'effrr
Guatrari,
2008.
126 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDeLeuzs Entretotémisme
aborigène
etUmbanda
brésilienne...127

actualisation
dudevenirtorémique
parlapeinturesurlecorps,un& derepérage.
Maislatâche
aplus
d'ampleur,
elle
semble
traverser
legarçon,
devenirstotémiques
delafemmeparceque,parailleurs,elle n'es comme siendépendait
l'existence
dumonde,decerendroit
traversé
qu'il
juste
Serpent,
elleestaussi
d'autres
animaux
etvégétaux.
Ellepey familiarise.
Cegeste
danssadurée,laspatialisation
decette
ligne
quesa
dire,parexemple
: «LesGallesd'insecte
sontmonRêveUukurpa) marche
etlacordetracent
derrière
lui’?
jesuisGalle
d'Insecte,
jepartage
monRêve
avec
telgroupe.
»Chaque
foisquedespersonnes
sontpeintes,il y a actualisation
deKururwarr; Changeonsd'univers.Invitée
auBrésilen2013, j'aieulachance
lesimages-forces.
Unecertaine
concentration seremarque chezl'enfanc d'assister
pendantcinqmoistouteslessemaines, àdesséances
peint
et l'adulte
quichanteenétant peint.Il n’yapasvraiment
transe d'Umbanda.J'ai appréhendécerte
formedcultedetranse
e dematrice
maisunétatunpeusecond. Autrefois,
letabac pituriservait
à couper africaine
àpartirdemesterrains australiens
#.[|fautrappeler
que,
lafaimetàgarderéveillé,
maisil n'yavait
pasd'hallucinogènes comme danstoute
l’histoire del'anthropologie
depuisledébut jusqu'aux
danslecontexte
amérindien.
C'estdoncle rituellui-mêmequimer théories
récentesavec
denouvellescatégories
ontologiques,
onoppose
lesWarlpiridansunétatqu'hommes
erfemmes,
faisantdesrituels toujoursle rorémisme
auxreligions,
cultes,ourituelsditsdetranse
maisenréférence
auxmêmes
ancêtres
rotémiques
etauxmêmes oude
sacrifice!?.Or,dèslapremière
séance
d'Umband,
j'ai euun
lieuxdont
ils sontlesgardiens,
décrivent
ainsi :parlerituel,
ils entrent immense sentiment defamiliarité
àl'égard
decequiétaitentraindese
dansl'espace-tempsdurêvedecesparcours,quandilsontété faits
au r. Familiariténonpasdanslamanière dontcessoirées
Umbanda
moment de l'émergence desévénementsquiont façonnéle paysage sedéroulaient
et cequi amenait latransedesmediums incorporés
par
toujoursendevenir. diversesdivinitésetesprits,maisfamiliarité
dufaitquecespratiques
Doncl’acrualisation
c’est
lapeinture
(quiestditeentreràtravers
la actualisaient
quelquechose
dtrès
e similaire
àcequej'aipuvoirdans
peau),
et lavirtualisation
c’estlaguérison: entirantlamaladie
parLi descentaines
derituels
aborigènes
auxquels
j'aiassisté
enAustralie.
corde,ladanseetlechant—lefilm estmuetmaistoutçaestaccom- Pourrésumer,
ce traitde
singularité«commun
»estlareconnaissance
pagnédechants—le malestsortidel'intérieurdela malade ets'est d’unemultiplicité
habitantlapersonne entrain
d'entrer
entranse
dans
disséminé
àtravers
lacorde.J'aicommenté l'effet
decristallisation
de l'Umbanda, multiplicité
hétérogène quiestaussi
activée
enAustralie,
certe
corde,enproposantunparallèle
entrecerituelaustralienetune parlapeintureouladanse desfemmes oudeshommes, quandilsse
autre
corde,
tiréeelleenFrance dansunfilmdeDeligny : disent
en«devenir »(postfixe-jarri)detelouvelesprit
totémique.
Cen'estpasjusteuntotem parpersonne,maisuneconstellationde
Sichérapieil yadans ce«healing ricual
»,c'est
sans doute
la gravité detelles possibilités
quivontsemanifester dansunrituel,lamultiplicité
de
affaires,
quiàcemoment-là donne consistance
àl'agencement, letransforme chaquepersonne.Enretrouvantcestraitsde
singularitéd'une
société
enterritoireexistentiel
oùlesujecdisparaît
comme articulationdedevenirs àuneautre —malgré leurcomplètedifférence—j,echercheàrendre
multiples.Lacordeapourpotentiel d'emporter lamaladie nonpasparce
présent
lecaractère
commun dutravaileràsortir
ainsidudébat
entre
universalistes
etrelativistes.
qu'on
y croitmaisparce qu'une série
degestesetd'actions lafontagirdans
sondevenir : lefrottementdelacorde surlapeinture quinourrit lamalade
physiquement etspirituellement,
etsadanseimprimée ausolconfirment
sonnomsacré, makarra,«matrice »deroutes lesimages-forces Auruwari.
oùsegénèrent touslesJukurrpa(Dreamings). Unjeunegarçon tireune 17./d,,Totemic
becomings.
Micropolities
ofthe
dreaming
(Devires
Totemicos),
anglo!
SaoPaulo,
n-1 publishings,
2015,
p.15-16.
Encart
wraduit
dansUnebévue,
cordeà travers lesbroussailles
desCévennes.Sonami est rombé dansuñ n°33,2015,
p. 123-124
(B.Glowczewski,
«Lignes
d'erre
etcartes
desprésences
ro. Il veur
l'en sortir.Scène dufilmLemoindre geste,
fictionconçue par proches
»,àpropos
deCartes
etlignes
d'erre.
Traces
duréseau
deFernand
Deligny.
Fernand Deligny, partantdel'idéequedeuxenfants quis'échappent d'une 1969-1979,
Paris,L'Arachnéen,
2013,p. 114-132).
Deleuze
citelesAborigènes
institution
psychiatrique
vont,
au grédutournage,sedéployer
ausenspropre (cf.note10)dans
«Cequelesenfants
disent
»,quicommente
ces
Cartes
deDeligny.
18./d.,Révesencolère,
Paris,Plon,coll.«TerreHumaine
»,2004.
«1figurédanslepaysage[.…].Lesimages
d'Yvestirant
la cordedégagent
une 19.Voirl'introduction
deToremic Becomings,
op.cit.
sortedeconcentration,commeun arpenteurqui s’appliquerait
à unprojet
128 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECDeLeuze Entre
totémisme
aborigène
etUmbanda
brésilienne...
129

deculre,
il n'yapasdereflet
dans
le miroir.
Dans
le geste
dumiroir,
cequi
brille c'estl'Orixaelle-mêmequienvoie
vers
les autres,
ceque
j'appelle
l'empreinte: l'Orixas'imprime
dans
sesmediums.C'estl'Orixa
qui faitempreinte,
territoire existentie]
pour
les autres,cen'estpas
un miroir.Ce n'estpasunereprésentation. Maisellebrillecomme
uncristal.
Quand,au Brésil,
desévangélistes
fontdesgraffitis
dans
les
rues
desvillesenformedeslogansquireprochentauxgensdescultes
dematrice
africaine
d'«adorer»desimages,
ilsnecomprennentpas ce
PertormanceCosmuouleurMlimecpar Donunique Masson, Genève,2015
<haps://vimeo.com/173509321#t-NaNs.%2049>. quiestenjeudanstoutescesimages
véhiculées
chezlePovodeSantos
(peupledesSaints),
parcequ'ilsraisonnent
entermes d’adoration
de
cequ'un
certainchristianisme
fondamentaliste
suppose des«païens
»:
Danscesimages que
j'ai rournées
à laTendaspiritaV6Cirina
qu'ils
adorent
desreprésentations.
Or,cenesontpaslesimagesquisont
deFlorianopolis
en2013(àgauche) er2015(àdroite),
les gens
som
adorées.
Lesgensutilisentleterme«image»commeunvoileactivant
habités—ilsdisentincorporés
—pardifférentes
entités,divinités
de
lamanifestation
d'autrechose.Il en vademêmedansle rorémisme
matriceafricaine,
lesOrixas, maisaussidesesprits demorts,telsles australien
: lestotemsnesontpasdes«images »quireprésententou
Beïjada
quidésignent«lespetitsenfants,lesesprits
desenfants
quison symbolisent,maisdesimages-devenirs
quiprennentdifférentes
formes
morts®».Icic'estunesoirée Caboclo, espritsd'Indiensmorts,
vous actives,
agissantes
selonleurssupports,
objets,
humains, nonhumains
voyezdescoiffes
enplumes, maisil setrouve quedeuxpersonnes qui
ettraits
dupaysage. C'estundéfipourlesanthropologuesouhisto-
étaient
incorporéesenCaboclo toutàl'heure sontdevenuesBcijada, riens
desreligions d'expliquer
cequidanslescultes
agit(actualise)
er
esprits-enfants
(suçant
leur pouce, parlant,sautillant
et seroulantpar «cristallise
»(virtualise)
deshétérogénéités
dansdesrites,despersonnes,
terre
comme desbébés) : d'abordunefemme envert,puiscejeune desobjets,
deslieux,despierres,
etc.,quinepeuventse réduire
àde
homme mariéàlajeunefemme enceinte penchéeàlafenêtre
àdroite. simples
«représentations
»danslamesure oùl'enjeudla
e «présence
»
dontlaprésenceaenquelque sortefaitquesemanifestent cesdeux n'est
pasl’imagecomme supportmaisseslignes
defuiteendevenir.
esprits
nonprévus pour
la soirée.Lemaître duculte,AbilioNoéSilvcira Deleuze
etGuattarisontici source
d'inspiration
pour«imaginerune
daSilva,
incorporélui-même ensonesprit, unIndiend'Uruguay,leur anthropologie
quiéchappe àlareprésentation?!
»,cequejetentede
demande «pourquoi vousêteslàaujourd'hui?» (lesBeijada ont fabriquer
dansmesécritsdepuis mespremiers pasenAustralie.
leurpropresoiréeoùlesParticipants
«deviennent»etsecomportent
commedes esprits enfants).
Tout le monderit, Abilio faitarréter
les
tambours
etl'assemblée
accueille
avec unejoiecontagieuse
lebabillage
desdeuxesprits-enfants
venuscristalliser
unnouvelévénement.
Revenons au miroir : certainsdesumbandistesqui tournaient
tenaientlapaumedela maindevanteux. Ils étaientincorporés
en
Oxum,l'Orixaquiaunmiroirdanssesobjets,
saufque
les personnes
incorporéesnesemblentpas«sevoir »dansle miroir, le regardtravers
main
comme
silesOxum
nesevoyaient
pas.
D'après
certains
maitres
——————-
20.FiguréspardeuxSaintschrétiens,
DamienetCosme,frèresmartyrsguériseurs ——-
venus
d'Arabie.
Lesesclaves
Priaient
surdesautels
deSaintspourcacher
lesOrisas 21.MarcioGoldman, «Reading
Bastide:deutero-learning
theAfricanReligions
: pag imerdit
:leChristpourOxala,
StSébastien
pourOxossi,
SteBabar inBrazil»,Études
rurales,
n°196,Mhultiplicités
anthropologique
auBrésil:
Varia,2015,
P. 9-24,
X

Agencement-Candomblé
etlignes
defuitebrésiliennes

ABRAHÂODEOLIVEIRASANTOS

LeCandomblé,cultedel’ancestralité
dematrice
africaine,
aété
crééparlesAfricains
esclavagisés
etleursdescendants,
quiontdû
résister
et inventerdesmodesde penser
et devivredistinctsdes
valeurs
coloniales.
Lapratiqueducultealongtempsétéconsidérée
comme uncrimepar
l’Étatbrésilien.Entre1890
er1940lapolice
deRio de
Janeiro a envahi
ses lieuxde
vie, lesserreiros,
a confisqué
leursobjetsrituelserappréhendé leursadeptes.
Après lareconnais-
sance d’unstatut
religieuxauxactivités du«peuple desaint»,ce
cultesubitaujourd'huidesattaquesviolentes
decertains évangélistes
alliésauxinstitutionsdel’Étatouaupouvoir destrafiquants de
drogue desfavelas.
Lorsque
les Africains ontétéamenés danslacolonie, auBrésil,
leurconditiond’esclavagisés
parlapolitique
économique européenne
signifiait
unterrible bouleversementsocial
etuncauchemar quiallait
durerpendantdes siècles.Destructionde
leur base sociale,desliens
familiaux,mélange desethnies etdeslangues,nouvelle économie
delagrande plantation,centresurbains,nouveaurythme detravail,
travail-châtiment.
Rienn'était censééchapperàunevigilance sévère.
Toutefois,desexperts desforces mystérieuses,
lesfilserlesfillesde
Nzila-Exu,s'employèrent directement àconstruire leurmachine
deguerre,leCandomblé,
et d'autresvariations
culturelles.
Dans
le
Candomblé, Nzilaestlenomd'unancêtredetradition
Bantu,
etExu
detradition
Nagô.Nzilaestlelieuetleempsdelarencontre,
lemaitre
delacroisée
deschemins,l'«encantamento
»(enchantement)
présent
entout,lepremier,
leseigneur
dunouveau
futur,
l'opérateur
dela
132 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVRC
Deauze Agencement-Candomblé
etlignes
defuitebrésiliennes
133

différenciarion!,
Nzila
estl'action
desforces
imprévisibles,
àProp d'accumulation
desrichesses
danstoute
l'Europe’.
L'utilisation
du
desquelles
jevoisdesrésonances
danscequeDeleuze
nomme ligne
de
«destination
inconnue,
non
prévisible,
nonpréexistante?
»,lignes
de terme
diaspora
pOurdésigner
ladispersiondespeuples
africains
vers
fuitesecrètes,
imperceptibles,
capables
d'altérer
lasegmentariré
dure lemonde
est récente.
D'après
Dufoix',elleapparaît
danslesannées
1950, par exemple avec Bastide,C estseulementdanslesannées
Ladureté
delavieétait
insupportable,
mais,même
ainsi,
il4. 1960quelemouvement
noirenFrance
etauxUSA
va sel'appro-
nécessaire
deretrouver
le sensdelalutte
et dela
liberté, d'organiser
b
rier.L'historien
desÉtats
UnisEdmundo
Gordon’,
situe
le fait
résistance
etdepréserver
lesvaleurs.
Etlaligne
dfuiteinvoquée
e ss,
deladispersiondesAfricainsau-delà
deladimension économique,
lenomdeNzilaestplusqu'unoutildepensée,
c'estégalement
une Ladispersion
delacultureerdesmodes devieafricains
danslemonde
façon
deconstruire
ladisposition
delalutteautravers
duProcessus etlasouffrance
desNoirsfaitdeladiaspora
un
fait racial
erpsycholo-
rituelduCandomblé,la danse,lecorps,lesgestes,
leschants,
la nourri. ique:ladiaspora
estunmouvementculturel,PaulGilroy®ladéfinit
ture,lafêteerlacommunauté. À chaqueinstant, nousdevonstenir comme uneperspective
contre-moderne,
c'est-à-dire
l'intervention
compre, dans
les pratiques
religieuses
du Candomblé, delaprimauté
quiremet enquestion
lesmodesdevieeuro-descendants.
L'identité
du gestuel,
commel'a biennotéla psychologue françaisevivanr
au
noiredoitporterenelle-mêmela transversalité
diasporique.
Entant
Brésil,
MuniqueAugras*. quetermerécent,ladiaspora estlemotquidésigne à laperfection
SelonRogerBastide“,
c'estavanttoutparlebiaisdesmains
des un faithistorique,
la « déterritorialisation
»desNoirs,qui,jusqu’à
artisans,
desfemmes etdeshommes libresque
la religionafricaine
est
aujourd'hui,
esttoujours
gravée
àvifsurleurs
corps.
Ladéterritoria-
créée.Danslesrues,
la rencontre
descompatriotes a rendupossible}; lisation,pourlesNoirs,plusqu'unephilosophie,
estunvécu,celui
formation desgroupes decapoeiraetdechant.LesNoirsconcentrés deladiaspora
noire.C'estlenomdelaplusimportante
migration
dans
les villesontplusdeliberté,cequi a permisunesolidaritéplus transocéanique
de
l'histoire, seloncequ'affirment
les calculsdu
profondedelacommunauté ancestrale.Avecledéveloppement de professeur
MarcioGoldman : «lepointquej'aimeraissouligner
ici,
vieurbaine,
lesNoirss'agglomèrent
et restructurent leCandomblé estque
les 4 millionsdepersonnes quipeuventêtrearrivées
àceque
Ilsseréafricanisent,
avecdenouvelles références
pourceterritoire nousappelons aujourd’huileBrésil,trouvèrent
sur placedesmillions
existentiel,
leurAfriquevirtuelle,
prenant le contre-pieddecequis d'indigènes,
victimes d’ungénocide semblable
àladiasporaafricaine,
passait
jusqu'alors.
Etàpartirdelà,lesNoirsetlepeuple desterreiros desprocessus qui,
il n’estjamais inutiledelerappeler,servirent
à
sontentrésenluttepour
la constructiond’undestinquileur
estpropre, entretenir
laconstitutiondecemonde moderne”.
»
necoïncidant
en rienavec cequelemonde moderneleura offert. LeCandomblé, prisparlesréverbérations
desconceptsdelignes
À uncertainmoment, larésistancenoireestlavirtualité
laissée defuite,déterritorialisation,
reterritorialisation,
nous aideàpercevoir
parNzila,uneagitation diasporique,lavolontéd’unautre monde. lesprocessuscontinus etpermanents deréinventionduculte afro-
LaDiaspora,ladispersiondespeuplesafricains
versl'Asie,l'Europe
et brésilien.
«Lemonde neseconstituequ'àlacondition
d'êtrehabité
par
lesAmériques,àpartirduxW'sièclecoïncide aveclefairéconomique
5.CarlosMoore,À Africaqueincomoda:sobre
aproblemanzaçäo
dolegado
afriano
1.Abrahäo
deOliveiro
Santos,
«Collective
management
of dreams
:elements
o! nocotidiano
brasileiro,
BeloHorizonte, Nandyala,
2010. |
apsychologyofdifference
»,Mnemosine,vol.6,n° 2,RiodeJaneiro,
2010, p.59-76. 6.StéphaneDufoix,Ladispersion: unehistoire
desusages
dumot
diaspora,
Paris,
<hups://www.rescarchgate.net/profile/Abrahao_Santos>. Éditions
Amsterdam,
2011. g
2.GillesDeleuzeetClaireParnet,
Dialogues,Paris,Flammarion,
coll. «Champ 7.EdmundT. GordonetMarkAnderson,«TheAfrican
Diaspora
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Essais
»,2008(traductionbrésilienne
de1998,p. 146). Ethnography
ofDiasporic
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Journal
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vol.112,
3.Monique Augras,Oduplo eametamorfose :a identidade
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daculrura nas. n°445,
1999,
p.282-296. .
Petrépolis,
Vozes,2008. 8.Paul
Gilroy,
The
Black
Atlantic
:Moderniry
and Double
Conscioumess,
London,
4.RogerBastide,
Lesreligions
Africaines
auBrésil: vers
unesociologre
de Verso
Hall,
Stuart,
1993.
interpénétrations
decivilisations,
Paris,
PUF,1995(version
brésilienne
de
l'éditeur 9.Marcio
Goldman,
Conférence
pourl'avancement
auposte
deprofesseur
Pioneira,
1985). titulaire,
2015,UERJ-MN.
134 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDLEUZE Agencement-Candomblé
etlignes
de
fuite
brésiliennes
135

unpointd'ombilic
dedéconstruction,
dedétotalisation
»,ditGuattari KeroAngola,del'Umbanda
etdelaJurema,
duBrésiltoutentier,
sesont
; Leslignes
defuiresontcomme
des lignes
derésistance
la capaciré
de unis lorsduséminaire,
afindedébattre
despolitiques
publiques
etdu
résister
doits'alimenter
delacapacité
decréer,d'inventer
uneréalité combat
contre
leracisme.
d'offrir
despossibilités.
Dans leprocessus
historique,
en brisant
lesracines
etenopérant
denouvelles
connexions,
comme
le disent
Deleuze
«, Nous-mêmes,
nousdécouvrons
leCandomblé,
lavariété
decultes
quenous
Guattari!!,
enseréférant
aux lignes
defuite,ruptures
deliens
familiaux avons,
endécouvrantleBrésiletsarichesse
enmatière
deformesdeparvenir
d'économie
etdereligion,
leCandomblé
a poursuivi
jusqu'aujourd'hu ausacré[…]. Nousdécouvronscequenosaïeux
ontrecréé,
danslavariation
unprocessusintense
dedéveloppement
‘?,
en faisant rhizome
avec|, deformes
delaspiritualité,
enprovenance desIndiens
etdesNoirs,dans
terre
desIndiens,
le christianisme
populaire,
enserépandantetenJes l'Umbanda,
danslaJurema,danslesvariations
duCandomblé,
s'estexclamé
faisant
se répandre,
enfaisant
rhizome
danslaville,envariant
rhi2o. MakotaValdina.
matiquement
avec
l'Umbanda,
la Jurema
Sacrée,
lescultes
tziganes,
laCapoeira,
leJongo,leMaracatu etlaSamba. LeCandomblé
à éçé, Nousretrouvons
l'importance
detoutcela.Il seraitintéressant
pourlesNoirs,l’unedesformes
lesplusefficaces
pour
s'installer
sur pour
le Brésildedévelopper
lacompréhension
desprocessus
sociaux
lesterres
brésiliennes
etétendre
leursramifications
derésistance
etde etdesubjectivation,
nonpasàpartir
del'économie,
mais
àpartir
des
modes
desubjectivation
nonassujettie. croyances
etrituels,
comme lesuggère
lesociologue
Akiwowo!*,
du
Enjuin2015,une
jeune fillenomméeKailane
sortait
d’unefête culteauxforcessacrées
dela natureetdespratiques
desoinsvis-à-vis
deCandomblé,
lorsqu'elle
futvictime
d’uneviolente
lapidation
de
là despersonnes,
suivant
ladirection
delaspiritualité
duCandomblé.
En
partd’unchrétien
évangéliste.
Unefoisdeplus,l’unedesfréquentes tantquepsychologue
etinitié partata* Luazemi,
Roberto
Braga,
au
manifestations
deracismeet d'intolérancereligieuse.
Etl’État
brésilien TerreiroLumyjacaré
Junçara,j'ai entrepris
certe
démarche.
Lesdébats
reste
sansréaction. De1890 à 1940, oneurlapersécution policière!”; étaient
accompagnésdelouanges
enverslesNkisi,Voduns,
Orixäs,
après1950, lescatholiquesetleursMissions. Mais,nilepassé,ni le Caboclos
etlesentités
del'Umbanda,
ainsiquededanses
etdechants.
ressentimentneconstituent notreproblème leplusimportant, mais Etquefaitcepeuple
ensemble,
au-delà
dedébattre,
danser
etchanter
?
plutôt
ettoujours, lasouffranceetladomination quipersistent.
Ense À nouveau,voyez
cequenousditMakota Valdina
:
promenant dans lesruesdelavilledeRiodeJaneiro, il estcourantde
voirdesmurs peintsauxcouleursdel'intolérance
religieuse,
de
la partde Noussommes icientraindenousrecréer,conformémentàlaréalité
chrétiens
évangélistes
vis-à-vis
d’uncultequin'estpasdirigévers
l'Unité. d'aujourd'hui.
Nousdevons nousguérir,
dans Lesens
defaire
ceque
fait
L'anthropologue brésilien
MarcioGoldman !*rappellequelecombat leserreiro,
danslesens
duNkisi,del'Orixä,duCaboclo,
de l'Encantado;
culturel
etpolitiquemené parl'Occident,contreceuxquimaintiennent nousdevonsnousguérir,danslesensdenousaccueillir
lesunslesautres.
uncontact non-intermédiéavec lesacré,nes'estjamais
ralenti. La maladiequeLeracismenousimposeestLapiredesmaladies
[…].Ledéséqui-
Le14mai2015 j'ai participé
auX°Séminaire national
desreligions libreestsynonyme
demaladie,
pournous,Afro-Brésiliens.
Lapiremaladie
afro-brésiliennes
etdelasanté. Deschefs religieux
desCandomblés Jeje. estleracisme.
C’est
pourcelaquelepeuple
desreligions
dematrice
africaine,
lorsdeceSéminaire,
pratique
envers
lui-mêmeunprocessus
deguérison.
10.Félix
Guarcari,
Chaosmose,
SäoPaulo,Editora
34,1992,
p.102.
11.Gilles
Deleuze
etFélix
Guartari.
Milleplateaux,
SäoPaulo,
Edirora
34,1995. Larencontre
aveccette
richessedefaçons
deparvenir
ausacré
vol.1,p.24. estcequeMakotaValdinanomme«auto-guérison
».Cequenous
12.
fbid,,
p.20. faisonsestunepolitiquepubliquedesanté;un traitement collectifde
13.Consulter« Acervodaperseguiçäo »,<hrtp://oglobo.globo.com/rioi
apreendidas-nos-anos-20-pecas-de-terreiros-de-candomble-vao-para-acervo-de
reportage
du04/10/2014. ” 15.AkinsolaA. Akiwowo,« Contributionsto thesociology
ofknowledge
from
14. Marcio
Goldman, «A construçäo
ritual
da :apossessio
noCandomble
». anafricanoralpoetry»,/nternacional
sociology,
vol.1,n°4,1986, p.343-358.
Religiäo
eSociedade,
aoûx
1985,
p.22-54. _ 16.Lemême
que«père
»dans
unelangue
Bantu.
136 AGENCER LES MULTIPLICITÉS AVEC DELEUZE
Agencement-Candomblé
etlignesdefuitebrésiliennes137

qui«capturelespuissances
d'agir, d'imaginer,
d'exister
etdelutter »
comme nous en avertit Isabelle Srengers'*,Commentles afro-
descendantsvont-ils cherchercettepuissanced'énergievitale?Parmi
différentes
manières,jevoudraisrappeler
ladanse
orgiastique
avecle
Nkisi,autraversdelaquellel'enchantement
ancestral
semanifeste
au
filsdesaint.Unedesfaçons
estla dansedetranse
et d'incorporation
du danseur parle Nkisi. Uneautre façonest l'initiation. Si c'est
Kavungo, la danse apporte le pouvoir de guérison, le distribueet
l'enseigne.Ce que Kavungoa apprisdansla forétestenseignéà ses
fils,afin qu'ils prennent soin dela communautétoutentière.Si c'est
Nzila,c'estpourétablirquetoutpeutrecommencer différemment,
comme s'il s'agissait
d’unjeu d'enfant”.D'autres
Nkisienseignent
d'autreschoses,parl'initiation, et l'incorporation
rituelle parlaquelle
Dieuprend
possessiondu corpsd'unadepte.C'estcela,lapensée
venant del'Afrique, conservée au Brésil, développée et pratiquée
pardesdomestiques,
desartisans,desemployes
decommerce
etde
petitscommerçants,des
travailleurs del'industrieet del'agriculture
Ce queKavungo à apprisdanslaforêtestenseigné
à sesfils Cette pensée« pragmatique »,malgréde nombreux livres publiés
afinqu'ilsprennent
soindeli communauté tourentière par des maîtres de culte, est rarement reconnue par les prole sscurs
(photo
: AbrahäodeOliveiraSantos). d'universitéset leschercheursbrésiliens.Er ainsisedéveloppentles
dévotions
les plus variéesenverstout ce qui constituela condition
nous-mêmes,car,pourlepeupleduterreiro,
lecollectifetlamultipl pour
l'existence,lesancètres.
sontlesconditionsdevitalitéetdeproductiondel'axé, dungu L'activiste
LüciaXavier,fondatrice
du groupe
defemmes
noires
l'équilibre
etdelasanté. Criola,considère
que
Tout ce qui vient avantl'homme estancestralde l'hoi ,
les expériences différentes ont été nicroneusces par Apport AU Fat SITE l'arce que
Makota Valdina!” de Kavungodir que Kavungoest l'énergie
nonseulement, nous avons créé des espacesd'accu il, mais nous nous sommes
terre,
l'énergie
quinourrirlesherbes
etquialimente
les femme
également cnracinés, nous avons constitué une tradition, Fous nous SOINS
hommes;Kavungo est la terre.Kavungo est l'«encantamento
constituées en LANT Que proupe Qui à lutté er qui park pour lui-méme, qui
soinsenverssoi-même, enverslesgens,enverslacommunaut
parle de notre condition humaine, qui parl de notre perspective Nous
leguérisseur
derouteslesmaladies ducorps etdel'esprit. I faut!
les cultes de matrice africaine, nous avons emprunte &ethéritage delutte
Kavungo,danserpourKavungo, recevoir l'énergiequ'esthas renéral
de POSLANCE EL de Construction pour toute La po uiAtON FPONTE
:+ Unjour,assisface
à l'offrande,
j'ai entendumonNkisi dire 1
méme
les personnesqui nesontpasde£errerro,
Pourqu ellespuissenttrouver
mondea besoinde Kavungo.»C'est ainsique noustrouvon
l'inspirationdansla lutte contrele racismeet seseftets,Les TT huonsnous
forces
et l'allégresse
pourguérirdesmaladies
lesplusditticil
maladiequ'estleracisme.
AvecKavungo er aveclesNkisi nou
sentonsplusfortspournousprotégerdela stratégie
du capiti 18.IsabelleStengers,«Lagaucheàbesoindemaniere VILRE
Entretienréalisépar PierreChaïllan, lundi 15juillet
www.humanite
fr>
17, RENAFRO - Rede Nacional de Religiôesde Matrizes African
», 19. « La multiplicité se définit par le dehors disentDeleuzeet
e Ministério da Saûde, © Cuidar no terreire,2013, <hup://www.vourt correspond très bien avec la figure-conceptuxÎle d'Exu
watch?v=0MDGTHQk9A0>
138 AGBNCERLESMULTIPLICITÉS
AVECDeLeuze
Agencement-Candomblé
etlignes
de
fuite
brésiliennes
139

ont
rendusauronomes,
nousontplacés
danscemondesousuneautre
forme donné laforced'exister
ici,auBrésil,
l'énergie
deNzila,leseigneurde
Cet enracinement
a aidé à construire cetteegbé,cettecommunauté,LS Lafertilité,
lecommencement deroutcequi
existe.Encesens,il s'agit
façoncollective
devivre,cettemanière
collective
d'agir.CelaneveurPasdire derecherches faices
parunpeuple enquêtedesespropres traditions,
quenous
avons
vaincu
œtte
forme
demaintien
desrapports,
dedomination, duBrésil
àl'Afrique,
pourconstruire
unereligion
active
et vivifiante.
d'assujettissement. Pourtoutescesraisons,€tpOurbeaucoup d'autres,
leCandomblé est
unereligiondiasporique,une
religion àcontre-conduite,
prisdansun
Lesfemmes
d’axé,
lepeuple
deserreire,
lepeuple
noir,ontdénoncé rocessus
continudesingularisation.
d'innombrables
formesderacisme
quotidienauBrésil,ycompris
là Ilexiste une contre-conduite
trèsparticulièrequia attirémonatten-
formedel'intolérancereligieuse.
Il s'agitd'uneluttedenosancêtres, tion.Malgré
lefaitquesonmodefamilial
aitétédétruit,
le Noirarecréé
à laluttecontreleracisme
etcontrerouteslesformesd’assujettissemenr. leCandomblé l’imaged’une
sociétédefamilles
etdecontre-État.
De
Cequiestaffirmé
parceux
quisedésignent
comme
peuple
deserreiro, famille,c'estextrêmement
évident,parlesdénominations
demèreet
peuple
de
saint,peuple
d'axé,
dans
lesdifférentes
pratiques
religieuses depère
etdefilsde
saint,dans
sonorganisation.
MaisRoger
Bastide
dematrice
africaine,
estquelalutte,larésistance
noirecontinue.
Ici a perçuun profondmanquedeliaisonorganique
entreleserreiros.
«lepeuple
quimanque
»s’actualise
etnefinitpasdesefaire
etdese Chaqueserreiroestautonome
et ne reconnaîtaucuneautoritéau-dessus
ire. delamèredesaint.Lesserreiros
sontdes «îlesafricaines
aumilieud'un
Noussavons etnousvoulons diredelafaçonlaplusclaire ceque océan
decivilisation
occidentale??
»,c'est-à-dire
dedévastation
coloniale,
déclareJurema Werneck,femme noire,médecin etactiviste
del'Arti- suiteaux stratégiesde destructiondu capitalisme.Des voisinset des
culation d'Organisationsdefemmes noiresbrésiliennes,
lorsdela membres d'autres
Candomblés visitent
lererreiro,
àl'occasiondefêtes,
Ir Rencontre desFemmes d'Axé: «Leshommes blancscontrôlent
les sontsalués,loués,
acclamés,
maiscelan'empêche paslesjalousies
et
richesses.
»Etnoussommes d'accordaveccequeditIsabelleStengers
: lesrivalités
entre
eux.Jusqu'à
aujourd’hui,
unemaisondeCandomblé
«laredistributiondesrichesses
produites? »faitpartie
dla
e luttepour nes’unitpasà uneautrecontreunetroisième maison,
ou ungroupe
laréappropriation dumonde. Cequiestaffirmé danslesdifférentes mécontent; l’exclusiond’un ennemi,d’unadversaire,
nesurvient
pratiques religieuses
dematrice africaine
estquelaluttecontinue, pas.Lesnouveaux terreiros
deviennent
entièrementindépendants
de
cette
résistance
noire
pourunevieavec
deladignité,
desdroits
etdes lacellule-mère,
etil peurmêmearriver
qu'ilsdeviennent
rivaux.Bien
politiquespubliques. qu'un
prêtre puissedevenir
uneréférence,
ilexistedesstratégies
pour
Etjeveuxdonctracerleslignes
narratives
decepeuple erdireque éviterlaformationd’uneunité,desortequel'éthique
oulapolitique
lesreligionsbrésiliennes
dematrice africaine
nesontpasdes cultes africaine
pratiquéedanslesmaisons
deculteduCandomblé,
sacosmo-
fondés surquelquechose
quiseserait
figéàpartir
dl'Afrique.
e Carmen politique,
évitelaproduction
del'exclusion.
Malgrélavolonté
d'unité
Opipari décrit
lafaçondont
la populationdeterreiro
réalise
sespropres danslespetits
discours
depèresdesainr*”,
l'opération
desoustraction
de
recherches,agencementsdiscursifs,
etseréapproprie destravaux des l'unité
estcequiprévautdanslecontexte
rhizomatique
duCandomblé,
anthropologues, danslapratiquede«fabrique delatradition” ». Particulièrement
enfonctiondel'opérateur
Exu-Nzila,
celui
dudehors,
Il s'agit
dereligions
quiaccompagnentles besoinsdupeuple quiles qui,à toutmoment,semontreprésent.
Touslesjoursetpour
toutes
pratique,
les nécessités
delutte,d’auto-guérison,
dejustice.Ce sont lesobligations
rituelles,cepointà partirduquel
toursedérotalise
et
desreligions
encore
encoursdeformation, nonpasparce qu'elles sereconfigure,
estrappeléetalimenté.Enprofitant
del'expression
setrouventdansunétatinitial,maisparce
qu'elles
continuent
à st deRogerBastide,
er enallantun peuau-delà
decelle-ci,
jediraisque
rénover
aveclemêmeespritapportéparl'«encantamento
»quileur à lesmaisons
deCandomblé
sontdes«îlesnoires
desubjectivation
»,
ms

20.
IsabelleStengers,
op.cit. 22.
Roger
Bastide,
LeCandomblé
deBahia
(rite
Nagé),
Paris,
Plon,
1958
(édition
v 21.ere spi LeCandomblé
: image
enmouvemenr,
So Paulo/Pars. brésilienne
deCompanhia
dasLetras,
2001).
23.Carmen
Opipari,
op.cit.
140 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE Agencement-Candomblé
etlignes
defuitebrésiliennes
141

enparfaire
résonance
aveccequeGuattari
appelle
un«processus
à monde a besoin,
à uncertain moment desavie,dedemander àNzila
singularisation
»,oudeproduction
demodesdevienonassujeur,
qu'ilvousouvre desvoies, qu'ilvousoffreunnouveaudépart.Quine
Latradition
duCandomblé nousagence,
nousentreméle,
nous
plauc demande pasdel'aideàNkosi, le forgeron,
le maître
dutravail
arduet
d'uneautrefaçonfaceau monde. :
descheminsdifficiles,l'OgumdansleculteKero?Quin’a pasbesoin
Nous
devons
observer,
parlebiais
decequej'aiprésenté
duX°Séminaire delagénérosité deseauxde la fertilité
deNdandalunda oud'Oxum ?
dupeupledeserreiros,
etautravers
despratiques
desoinque
les Pères
de SansNdandalunda, il n'existe pasdeviehumaine; nousdevons
saintréalisent,
quelapenséedéveloppée
dansleCandomblé investit
qu, prendre soindel’eau, car
l'eau maltraitée,négligée,
vanousdétruire.
despratiquesindividuelles
deconsultation,
maisaussi
dansdesPratiques
«L'intrusiondeGaïa» estuneréalité ayantunimpact sur
l'Europe
deproduction ducollectif,
comme danslesfêtes
etdansleséminais. d'aujourd'hui,
er estabsolument
présente
danslestraditions
envers
Envérité,
l'individuestemplid’affects
erdemémoiresrécentes
etançes, lesancêtres
africains.
TouslesfilsdesOrixäs
laconnaissent
et la
trales.
L'initiation,
dansleCandomblé, estunprocessus
immédiatde craignent.
Le Candomblén’estpasseulementune
religion, maisune
production
desoi,imprégné par
le collectif.Et celaapparaît
àPartir
du »
A façondeprendresoindespersonnes
etdela nature,deprendresoin
momentoù l'individuestconstituéparlecroisement dediversNkii del'humainetdecequin’estpashumain. Prendre
soinestl'expres-
Kavungo,Ndandalunda, Lemba,Nzila,parexemple. C'estunprocess; sionfondamentale
desNkisi,desOrixäs,
desVoduns,
desencantados
dereconstitution
d’unemémoire
d'appartenance,
d'unemémoire
qui etdesentités
del’'Umbanda. C'estcequenousapprenons dansle
active
lamultiplicité
erl'idée
demacumba
enelle-même:l'existence
est Candomblé,
c'est l'élément
principaldu
rite del'initiation,
parlequel
effet
d’unagencement,
dansuneconception
trèsparticulière
durappor jesuispassé.
Et delasorte,lesrituels
deCandomblé etd'Umbanda
espace-temps’*.
Danslapensée
du peupledessaints,
l'individues nousenseignent
à affronter
les adversités
duquotidien,
noussoulagent
multiplicité
etvariations,
à l'imagedechaqueNkisi, dechaque Orixà, duressentiment,
nousapportentde lajoie,nousenseignent
àprendre
lesquels
sontégalement, eneux-mêmes,desmultiplicités
etdesvariations. soindelavie.Lalure,la joieetlesancêtres
sonttoujours
ensemble.
Cerappel,
certe
récupération
del'ancestralité
estextrêmement
impor- Laluttedupeuple dererreiroetdelapopulation noireestcréatrice
tante,
auBrésil,
pourl'accomplissement
decerte
puissance
derésistance. d'espoir,
defuturetdejoie.
Montata Luazemi?*déclare
«leserreiro
sertàça,
à laprière,
à apporter LeCandomblé, avecsacosmopolitique,lavisionselonlaquelle
la
duréconfort
spirituel
auxgens,unmotdoux,unmotgentil ».Depuis
des vieettoute
l'existencesedéroulentdanslalutte,nousaaidésàvaincre
siècles,
les serreiros
pratiquent
despolitiques
publiques
desoins
aux leracisme,lecolonialisme
quisoumet encoreleBrésileràconserver
personnes.
Il s’agit
demachines
esthétiques
impliquant
danses,
gestes, l'accès
à notrepuissancedelutte, d'existence,d'action.
C'estune
musique
etnourriture
etdeprocessus
d’oralité
machinique,
mertant
en machine deguerredisséminéedanstout
le Brésil.
Dans certecondition
production
uncertain
typedesensibilités
etdesubjectivicés
hétérogène historique,
lesserreires
sontprésents
dans
la production
delignes
de
etconnectées
avec
desluttes
minoritaires.
LesNkisi,Orixäs,
Voduns. fuite
quiaffectent
leBrésil
tour
entier.Vous
connaissez
lafonction
de
Cabodlos,
Encantados
etlesentités
del'Umbanda
sontappelées
pour capture
denospuissances
danslesformes
d'assujertissement
capita-
lessoins.Qui n’apasbesoinde demanderde
l’aide à la justice
de listes.
LesNoirsauBrésil
sesontdébattus
avec
certe
fonction
depuis
Nzazi?
Nousdevons
prendre
soindelajustice,
carsans
justice,
nou lecolonialisme
de1500etcelanousimprègne
encore
aujourd'hui.
sombrons
dansuneatmosphère
dedestruction
etd'abandon.
Toutle LeCandombléseplacealorscommeuneforcefondamentale
danssa
propre
recréation
etdanscelledumonde,
premièrement
pourlesNoirs
Brésiliens,
maiségalement
pourunample
spectre
delapopulation
24.AlexisKagame,
«Aperception
empirique
dutempsetconception
deV'histoi
dans
lapenséebantoue
»,inPaulRicœureral, Lescultures
etLetemps,
Paris,
Pass
Unesco,
1975. 26.
IsabelleStengers.
«Cosmopolitiques
: civiliser
lespratiques
modernes
»,
25.Voirl'entrevue
aveclepère
desaint
Roberto Braga
dans«Culture
africa
?
inUne
autre
science
est
possible,
Paris,
LaDécouverte,
2013
(conférence
de2012,
cr : rêve,
résistance
etsingularisation
»,d'Abrahäo deOliveira
Santos,
Ch" P.113-144).
n° 86,
2015.
142 AGENCES
LESMULTIPLICITÉS
AVECD'ELEUZE

brésilienne.
Guartari”prévoyait
lacroissance
deLaparcellenonnojye XI
delapopulation
brésilienne
quiiraitenquêtedescultesdematrice
africaine.
Lesculrures
afro-indigènes,
enchangeantdenature,
sedisss.
minentsurlecerriroire,
parmi
ceuxquivontauxferreiros
etceuxquise
réjouissent,
grâce
àlaCapocira,
auMaracaru,auJongoetàlaSambs Ensembles
etmultiplicités
ouceuxquiexpriment
simplementleurancestralité
indigène
et africaine
deforcejoyeuse
devie,quiconfigure
unecertaine«brésilianité
».
JEAN-CLETMARTIN

Il yachezDeleuze
despoints
singuliers,
despoints
remarquables.
Etonnesaurait
lesrepérer
selon
descoordonnées
régulières.
Cesont
ur ainsidire despointsqui échappent
à tournombre
rationnel.
Cesobjets quetraque la philosophiedeDeleuze,il fautlesentendre
ausensdecequin’estpasclairement déterminé selonuneidéalité
numérique, quelque chosedeplusgéométrique,de
plus topologique
quelesnombres. On pourraiteneffetadmettre,
demanière commune
etenpremière approximation,qu'ilnousest
loisiblededénombrer
leséléments comme toutcequiestélémentaire
—disons atomique ou
«molaire »,pourparler avecDeleuze etGuartari.
Mais,pourautant,
certainspointséchappent aucalculsimple,comme c'estlecasdes
monades deLeibniz, dumoinsdel'anglequienforme lasingularité
centrale.Etcelle-cientre
dansununivers,dansunecourbure d'univers
quin'estpasunensemble quelconque.Lesnombres donnent peut-
êtretropfacilement
le sentimentdenepasdépendre decescourbures.
Ilspeuvent
le plussouvent
s'enabstraire,
former
desensembles,
comme
pourunjeudecartes.
Il y adespoussières
numériques,
deséléments
sans
doute
très
discrets
qu'on
peut
arranger
parfamilles.
Cesensembles
sontgénéralement
envisagés
comme unpurdivers.
Une diversitéqui
reste
Àl’origine
trèsarithmétique
danssondécompte: 1,2,3,4,des
nombres
quelconques,
valables
pourdespoiresautantquedeschaus-
sures,
Vousme
direz àjustetitrequelesmathématiques
sontloinde
seréduireà cegenredepartitionsqui viennent
remplirN, Z, Q,R,
etc.Il n’yaévidemment
pas quedesensembles
discrets,
etmême
ces

1.PourLespointsremarquables
chezLeibniz,
cf.Différence
etrépétition,
Paris,
PUF,
1968,
p.67.
_2.Il s'agic
despoints-plis
(cf.LePh.Leibniz
etlebaroque.
Paris,
Éditions
de
27.FélixGuartari,
«Delaproduction
desubjectivité
»,Chimères,
n°4,1986. Minuit,1988,
p.24),
p.1-19.
144 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE Ensembles
etmultiplicité 145

derniersnesontjamaispurement quelconques.
On peurSUPposer e àdesdimensions
topologiques
entrant
dans
desmultiplicités.
sr resviennent
tordre lesensembles
endehors
detoutcompte.
d'autres
données que
les cartes
àjouer,à regrouper
defaçon
étanche
Il yaeneffet
descartes
plussingulières,
plusgéographiques.
OnPenser, eeo âme
disons«d’uncôtéou del’autre
»,maisil sepourraitquecesoit
côté,
comme pourune bande deMoebius.
ici auxespaces
qu'Eschermeten tableauen tordanttouslesrepère,
Cesontlàdesgroupes
detransformation
complexes.
L'ensembje
dé leD medirezquecette
distinction
entre
arithmétique
et géométrie
quelconque,
legroupe,quantàlui,estunetransformation,
undevenir, neforme
pasvraiment
undualisme.
Ellen'apas
unréel
sens
histo-
unemétamorphose
dynamique. quesachant
quel'histoiredunombre
estsoumise
aussi
àlamanière
Dansl'histoiredesmathématiques,
il y a entourcasdesruptures denombrer
l'espace.
Il n'empêche,
il yaun
style,desformes
dela
quimeparaissent
presque
métaphysiques
dans
lafaçon
dedéborde. mathématique
quinesontpasdesrégularités
quelconques,
mais
plutôt
ensemble
quidominait
lesopérations
ducalcul,celuiduseuldécompte, desperturbations
infimesou dérangeantes.
Etcesdernières
requièrent
delaquantification’.
Ensemblen'estdoncpasmultiplicité.
1]
es unétonnement,UNEstupeur parfois
délirante
:desfauxraccords,
des
possible
d’ailleurs
quelesensembles
dépendentdéjàdecondition images
routàfaitfictives,
fictionnantes.
Onle voirdéjà
dansleMénon
moinsgénérales,
qu'onnepeutpasnombrer,unpeucomme pour dePlaton.
Danscedialogue, onn'estplusdanslasplendeur
habituelle
lesnombrespremiersqui sontapprochésparuneétrange spiraleer delaphilosophieplatonicienne.
On bricole.On expérimente
loinde
sesuiventselonlesbrasd’unegalaxieétabliepar Ulam.Lasuitedes
l'idée.On discuteavecun petitesclave,unenfantsansaucuneinstruc-
nombrespremiers,
au lieud'êtrequelconque,
estplutôtredevable d'un tioneton semetà tracerun carrédans le sable,danslaboue,surun
espace,
unespacesous-jacent
quienformele vortex.On diraitd'ailleurs, solqui n'estpaslesoldécrorté,
intelligible,du Sophiste
ouencoredu
souscerapport,
qu'iln'yad'ensembles
quepartracés
delignes
qui Parménide’.
Philosophie
deremise,
philosophie
dehangar
avec
rien
disséminent
etqui,ce faisant,
redistribuent
lesnombres
olues éléments quedesobstacles,
despoints
remarquables.
Etdanscetespace
très
dudivers.Cesderniersnesontdoncpasseulement comptés dans
des peuidéalisé,
Socrate
vasoumettre
unproblème
tout
à faitinutileà
boîtesneutres,
indifférentes,
sansdifférences.On comprendra par-li unjeuneserviteursansaucuneculture,loindesproductions dont
il a
queladistinction «ensembles/multiplicités
»s'estompe fortementet l'habitude.
Ici, on sortdelaCité idéale,horsde
la civilitéathénienne,
quenousnerevendiquons aucun dualisme. C'estqu'ily a,avant même comme pourretourner danslacaverne.Plaron,danscetespace étrange,
lesnombres quelconques,avantles éléments oulespoints, unespace vaposerunproblème apparemment simple,celuideladuplication
qui,comme lediraitDeleuze naîtparlemilieu,unpeucomme un ducarré dontlecôtémesuredeuxunités.
geste,unmouvement entredeuxpoints. Siles ensembles ontl'air trop C'esttrèsclassique
pournouscettehistoire,elleesttoutàfait
statiques,
onverra que
leurs débordements sont
bien plusdynamiques mineure. Le Ménonestundialogue qui,comparé àlaRépublique,
etsouvent plusgéométriques. D'uncôté,onpeutformer des classes, estjugéencore troppédagogique
parlesgrands philosophes, parles
desensembles, parexemple,lesnombres comme catégories del'onto- idéalistes
lesplusconvaincus.
Maisjenesaispasbiensi nousen
logiefixées
enarrangements uniformes,ordonnées àlaloidumême, comprenons vraiment
les enjeux.
Aumoment deposerceproblème,
formées derangements sansaucuncaractère remarquable, 10poires, onnesait pasdutoutsonintérêt.
Il fauts'yaventurer
4priori,attendre
10chaussures n’affectant
paslenombre. D'unautre côté, onpeur avoir qu'il sedéploieavecuneinsistancerare,qui n'estpasdonnéedans
affaire
àdessingularités*,
Ellestémoignentd'uneouverture quirenvoie l'énoncé.
Il yadans
ceproblème
élémentaire,
cebricolage
degarage,
davantage
auxconditions,auxsites,gradients,niveauxperturbants. unepartdérangeante.
À quoibonunetelle
duplication
?Quelle
finalité?
Qu'est-ce
qui
estconcerné
parun
tel problème
apparemment
futile?
Lasensibilité
requise
n'estpascelled’unesclave,
mais
d’unêtre
curieux,
3.Certedifficulté
rencontrée
parlenombre,
et lanécessité
depasser
surunautie
imaginatif,aiguillé parla difficulré de penser.La duplicationde l'aire
ensemble
sonttraitées
parDifférence
etrépétition,
op.cit.,p.208.
4.L'idée
desingularité
quipasse
parlemilieu
estabordéeparDeleuze
dès
Dafferenie du carrépassed’abordpar uneapprocheimaginative
avantd'être
etrépétition
aurour
de laDifférent/ciation
(p.285relativement
àl'Idée).Logique
ds
sens
consacredureste
la série15àl'idéedesingularité,
5:Platon,
LeMénon,
80d-86d.
146 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE
Ensembles
etmultiplicité
147
numérique.
Il fautfaireungeste,
tracer
ungesteentre
lesPoints uneairede9, cequiestencorebientrop.Uneaffaired'épuisement?.
trouver
unnombre qui
finalementn’est
pasdutoutdonné,
un«Æù
Nousavonsépuisétouslesnombres entiers
possibles.
Où peut-on
qui
n'estpasvisible
dans
le carré
telqu'ilestdessiné
surleso].
1, :
rrouveralorslenombrequi convient,quelleestsonimage!?Cette
pour cela même, imaginer un nombre qui manque, une inconUt,
image
doitenréalitéenpasser
parladiagonale
comme
nouvelle
quinesedécompte passurlesdoigtsdelamain,quinene
dimensionintermédiaire,unedimensionquiva servir
decôtépour
paslesentiers
naturels.
Et comment faire naître
desnombres
. ne
unnouveau carréetqui révèleuntypedenombres curieux,
àsavoir
genresanspasser
par
la fiction,par
le déliredelamétaphysique
à
métaphysique
«spéciale
»? nn «racine
dedeux»,nombre
irrationnel,
Et
l'histoire
decegenre
de
nombreestétrangement
liéeà lagéométrie,
comme
onpeut
le voir
Enconsidérant
moncarré,
il esttrèsfacile
derelever
quatre
segmen
. » ts encore
pourunautreirrationnel
qu'onappelle
Pi,S'ilyaune
espèce
visibles.
Surleplanempirique,cessegments, cescôtés
seCroisen
deconstitution
génétique
dunombre quipasseparlagéométrie,
selonquatre
points,
quatresommets,a, b,c, d.Maislespoints
ai4
ily a,mesemble-t-il,dansl'histoiredesmathématiques,
d’étran
quiennomment
les angles,
sontsusceptibles
d'undénombremen, bricolages,
d'étranges sensibilités
—ou,comme dit GillesChäteler,
bienplusrichequele réelempirique.On peutseplacer plutôt
su, desgestes,
desenjeuxmobiles
quejevoudrais
reprendre
unpeu
unplanlogique,sansobserverce carréréeldont
je viens
dedécrire
ur clarifiercettemétaphysique
pluriellequim'intéresse
depuis
lespointes.
Et,surlemurde la caverne,jepeuxenfaireunCompte quelques
annéesdéjà,enm’arrétant
ainsiàdesobjets
quidébordent
b exhaustif
et écrire
routeslesvariantes
possiblesentre
ac d.Je peu,
l’oncologie
sansêtresuréminents?.
Cesontdesobjets
paradoxaux
pratiquer
quatregestes
aumoins: (AB),(BC),(CD),(DA).Mais je quienappellentà unemétaphysique despetites
choses,
deschoses
peuxcontinuerà ventilerlesrelationsnonvisibles,
parexemple
entre imalesou minimales,inconsommables.
(AC) ou (BD)... Et à quoi correspondent ces nouveauxsegments J'évoquais à l'instant
la diagonale
chezPlatoncomme gested’un
donnésparlalogique?Il fautrevenirun instantà notredessin
surle nombre.Voiciune ligne unpeufollequisortducompte.Unnombre
mur.On verrasansvoirqu'ilfaut,pour
ainsi dire,rajouter
d'autres quidéborde toutautant ce quejecomptepourUN,quecequejevois
lignes
àlasegmentation
ducarré,audénombrement desessegments, concrètementdansl'unitéducarré,toujours
composé dequatre
lignes.
deslignestransversales,
diagonalest.
Si on en resteaucôtévisible, Cerre
cinquièmeligne,
certediagonale
dunombre donnée
généralement
àl'image naturelle
ducarré,onnepeutrésoudre leproblèmeposé enpointillé,
meparaîtdécisive
etpourainsi
direplacée
endehors
dela
parSocrate. On en
reste àquatre droitesquinedonnent guèreli saisie
purement
numérique
d'unensemble.
Elleestconçue
comme
geste
solution.En effet,lescôtésdu carréqueje voissontévalués
en delapensée,
pensée sansrecours
àl'angulation
decequise présente
nombres entiers.
Lecôtédontjeparsmesure unelongueurdedeux defaçonimmédiate, dansl'expérience
donnée.
Detelles
méditations
unités.Etenm’appuyant là-dessus,
riennepermet dedoubler
l'aire sont
fréquentesetenappellent àuneautreexpérimentation
quecelle
ducarré
initial. de
l'observation,
expérimentationd’unchampradical
ennouveauté".
Le carrédontnoussommespartiscomporteuncôtéquimesure Onle voit
bien àl’époque deDescartes.
Songénie
n'est
paspurement
2unités.Sasuperficie
compte donc4 unités .…2 x2=4...Ledouble arithmétique.
Il estlemathématicien
quiintroduir
vraiment
la géométrie
decertesurface
mesure 8unités.
Question : suffit-il
alors
dedoubler
la danslenombre.Il estcelui
quiespace
ledomaine
numérique,
luiimpose
longueurdu
côté initialetdepasserainside2à4? I] fautimaginer
en
effetunnombre quisoit forcément
supérieur à2.Maisnéanmoins,
ce 7.Cetépuisement
doitsepoursuivre
au-delàderoute
limite,
différent
deLafatigue
nombre doitêtreinférieurà4qui,multiplié parlui-même,donnerait empirique.
Surl’idée
d'épuisement,
onliralelivre
surBeckett,
L'Épuité,
inQuad,
16,résultat
bientropgrand.
Entre
2 et4,restebienunautre
nombre. Paris,
Éditions
deMinuit,
1992.
8.Surl'image
enmathématiques,
cf.Qu'est-ce
quelaphilosophie?
Paris,
Éditions
uncôtéquimesure 3unités,
Mais3multipliéparlui-même
produit deMinuit,1991,p. 119,note
6.
9.GillesChâtelet,
Lesenjeux
dumobile,
Paris,
Seuil,1993.
6.Surl'importance
delacransversalité,
cf.Félix
Guartari,
Pyhanabyse
etrransversaliit 10.C'estlàl'idée
d'empirisme
rranscendantal
quivraverse
toutleprocessus
de
ainsiquelelivredeGilles
Deleuze
surFoucault,
chap.
1«Unnouvel
archivisté
» Différence
etrépétition.
148 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE Ensembles
etmulriplicités149

unnouveau
planpourengendrerlesnombres
commesi lesnombres L'ensemble,
il faucleconstruireavantd'enpratiquer
undécompte.
dépendaient
dequelque chose
deplusprofond,quelquechose
que e construction estprécisémentune multiplicité,unecartogra-
Riemann
vad'ailleurs
repenser
àpartirdeDescartes. ner i peut
composer
desdimensions,
longitude
erlatitude.
Obtenir
Descartes,
à vraidire, introduit en mathématiques
descoordonnées GE uneformule
qui
tient delapuissance
decomposition,
qu'onnomme
«coordonnées
cartésiennes
».Et,parlemontage
de a urs,de tenseurs.
Au lieu d'exprimer
cesdimensionsparune
cescoordonnées
sedéveloppe
uneanalyse
trèsnouvelle,trèsboule. derie onlesqualifierad'abordcommecoordonnées(unelignesera
versante,
l'analyse
algébrique
qui,elle,procède
parfonctions,
par
ce définie
paruneseule
coordonnée,
unplanenrequiert
deux,
unvolume
qu'onnommedes variables,
encoreplusabstraites
queles nombres,
suppose
unecorner LÉ A et2 Ds “he
désignées
pardeslettrescommey ou x. Il estquestiond’unchiffre
à jetsdont lescoordon seraient
infinies). On
notera cet
plusqued'unnombre.
Noussommes
lescomposés
d’unchiffre
qui — eue traitercesdimensions
parfonction,
qu'onpourra
faire.
nousfairentrerdansunecertainecombinaison.
L'individun'estpas 2e cesrapports
pardesfonctions,
desvariables,
celles
queDescartes
un ensemble,maisun chiffrepluspuissantquele nombre,lequel nommerayoux,aulieudelesexprimer
d'abordpardesnombres,
yetx
n'est
quesamesure
ousonexpression‘!,C’estuneautre
liaison
Opérée étant
susceptibles
derecevoir
desdéterminations
erès
différentes,
entrant
dansunemultiplicité,
unarrangement, unagencement quidépend dansdesproblèmes
qui nesontpasencoreceuxdesnombres.
11faut
d’unplandecompositionoud'uneméthode conceptuelle
originale supposer
y et: d'abord
= leurssg ar apparaître
des
de plusqued'unensemble. Voicidoncqu'unemultiplicitén’est
pas , des ients qui ppentunesuite nombres.
seulement
composéed'élémentsoudeparties. Laquestion
n’est
pas re bec qu'unevariable,celadéfinitdavantage
unvecteur
pourDeleuzed'envisager
le multipleà la manièred'AlainBadiou.
etunedimensionau lieu d’unensembledepartiesoud'éléments.
dontle montageestaussid'unegrandeélégance mathématique
Voilàpourquoi
dansQuest-cequelaphilosophie?
Deleuze
s'efforce
Cequi,chezBadiou, importe,c'estlemultiple.Comment penserle demontrerà Badiouqu'unemultiplicité
n'estpasnumérique,
ni
multiple,selonquelsopérateurs? Et,avecCantor,il vadistinguer, composéed’unmultiple,maisqu’elle
estunevariation,
unefaçon
àl'intérieur
d’unensemble,
les éléments deleursrapports(ouparties) d'associer
desespaces
dontDescartes
créeunenouvelle
dramatisation.
sachantquecesdernierssontplusnombreux, engageant, lelongde MaisDescartes
évidemmentn’estpasRiemann. Descartes
raisonne
cedébordement, uneligned'erre surnuméraire.Maisil y aquelque pardimensions,
sanstoutefoisserendrecomptequ'onpourradiviser
chosedeplustopologiquedanslalignedefuitequim'intéresse, plus encore davantage
lesdimensions,les effeuiller
entreelles,
découvrant
procheévidemment deDeleuze souscerapport. peut-êtreparlàdesdimensions fractionnaires,
composées demille
Riemann meparaît
eneffetmieux appropriéqueCantor pourlamise plateaux,
pourainsidire.Il serait
possible
eneffetd'imaginer,
comme
enœuvre d'uneexpériencesoustraiteàl'ontologie,
auxensembles de lefaitRiemann,desespaces àndimensionsetdesupposer parailleurs
l'ontologie,
auxcatégories.
Riemann sesouviendradelamanière dont quecesdimensions
nesoient
pas entières,
qu'ilexiste
desdimensions
Descartes,pourrendre compte del'espace, renouvellesonapproche fractionnaires,
desespaces
excédentaires
auxnombres,
surnuméraires,
del'étendue, àsavoir
parlacréation dedimensions. L'espacecarté- placés
entrelaSn la largeur
L lane :ho se
sienestdirectionnel
etdimensionnel!?.11possède vecteursetrepères. qu'onnommerfractales
etqueDeleuze
analyse illeplateaux"*.
Cen'estpasuneapproche faitepardénombrements pourcompter Leconceptde Variation,cedéliredesgestes
géométriques,
veutdire
élémentsetparties.
Peuimporte finalement denombrer unensemble. qu'onpeutsuperposerdesdimensions autrement
pliées,
etselondes
méthodes
quines'arrêtent
pasaunombre,
qu’on
peut
les diviser
de
11.Cechiffre
estparexemple
évoqué
dans
Dialogues,
Paris,
Flammarion,
1977.
p.12. manière
quinesoitpasarithmétique,
renouant
ainsi
avec
uneforme
12.Surlamanière
dontDeleuze
etGuartari
sedistinguent
desensembles
œuvre
parBadiou,
cf.Qu'est-ce
queLaphilosophie,
op.cit.,p-143. d'algèbre
spéciale
qui
travailleavec
deslieux(topoi)
erdeschiffres
plutôt
13.Laréférence
deDeleuzeà Riemann
estuneconstance
desonœuvre
des me

l'ouvrage
sur
LeBergronisme,
Paris,
PUF,1968
oùilest
question
d’un
probabilisme | 14.Au sujetdesdimensions
intermédiaires,
on peurlireMilleplateaux,
Paris,
supérieur,
d'unchiffrage
quinedoitrienaunombre,
p.22. ions
deMinuir,
1980,
p.608.
150 4 CERLES
MULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE Ensembles
etmultiplicités
151

que
des
nombres
!*.
D'où
l'importance
quepouvait
avoir
par
exemple
li. rmesdepuissance.
en te
Lesvariérés
àndimensions nesontpasdes
d'angle
chez
Proclus,
bienavant
Riemann,
ouencore
chez
Leibniz,
«,ne blesdiscrets.
Leurhétérogénéité n’arienàvoiravecdesgenres
quesonouverture
embryonne toutunsitenonsansqualifier
unPoinr gs Cesont,comme ditRiemann danssaDissertation,
desvariétés
Un
point pourainsidirevivant,
topologique
quine seconfond
niavec
di er. Etles éléments quilescomposent ne seplientpasdela
élément,
niavec
unnombre,
mais
avec
| intensité
de angle
selon
lequel
; ai manière danscesdifférents
ne puissance
abordés.Fo
de peut
seprolonger.
C'est
certe
ropologie
que
j'aivoulu
suivre
dans
ei, même, l'individuationl'espaceneserapas même
surDeleuze
nomméVariations".
Unevariation
possède
desdegrés,
des ” RS entreuncôneetlepapier plat,ouceluiqueje
puissances
dont
les divisions
vontlonger
desvecteurs,
desdimensions. 70 aaccordéon, lamétrique restelamême. Onestdanslamême
sans
selaisser
découperparensembles
ousous-ensembles
biendélimine PS métrique,
onreste
dans
desfigures
qu'on
peut
superposer
sans
Aussisommes-noustrèsloindel'ensemblisme,
danslaPhilosophie lesdéformer.
PourRiemann,
lecônepeutseranger
dans
la variété
des
française,
laquelle
estinauguréedavantage
parlarupture
cartésienne
que
àcourbure
nulle.
Sijetrace
untriangle
surune
feuilledepapier
jeviens
dedécrire,
mais
queseulBergson
retrouvera
pardesmoyens plane
etquej'enfabrique
uncône
en leroulant
sur lui-même,
lasomme
dissemblables'!”.
Bergson,
queDeleuzeassocie
à Riemann,en réprenanr des
trois
angles
dutriangle
reste
lamême.
Lacourbure
deces
différents
cetteanalyse
dessitesoudessopoi.
Commesi lagéométrie
devait
nous
espacesquesont
le plan,lecône,
l'accordéon
appartiennent
aumême
reconduire
àdesévénementsqui nedépendentpasdesnombres,
nide jeu,à lamème métrique.Cesontdesespaces
àcourburenulleetpar
cϾ
quelesdoigts
vontcompter
comme
unités,
nidel'espace
empirique
telqu'ilestvécu
paruneconscience
phénoménale.
CequeRiemann conséquent
euclidiens.
Ilsrelèvent
dumême chiffre,
àpartir
duquelles
nombres
pourronts'enchainer.
Il n'envapasdemême
d'unballonen
vamontrer,
c'estqu'ily auneespèce
demétaphysique
del'espace,
une
plastique,
d'abord
plat,que
je vaisgonfler.
Letriangle
surlamembrane
méta-géométrie
àlaquelle
lesnombres,
aveclamétrique
qu'ils
expriment,
plateseraeuclidien.Par exemplelasommede3 anglesseraégaleà
vontsesoumettre.
[l yapourRiemann
nonpasdesensembles,
maisdes
180degrés. Enrevanche,unefoisqu'ilestgonflé,
j'obriensunemétrique
variétés,
unjeudevariétés.
Cejeusedéclinedefaçon remarquable,
qui
change toutdans
notreexpérience
del'espace.
Il s’agit
d'une
expérience nouvelle.Mesdroitessemodifient engéodésiques etlasomme des
queRiemann va«trouer»demanière qu'onpourra qualifier
denon- anglesserasupérieure
à 180°.
Nousentrons ainsidansunedéformation
cuclidienne.
Cenesont
paspourluidesensemblesstatiques
quiimportent. topologiquequimodifietoutelagéométrie.Comment calculerdans
une
Il neraisonne
pascomme leferaCantor.Cequil'intéresse,
cesont
des telletorsion?
Lavariétédutriangleentre envariation,
dansungroupe
variétésdynamiques,
desvariétés
sidifférentes
dansleurmultiplicité detransformationquin'estpashomogène. Nousvoicidoncconfrontés
qu'ellesforment
desmétriquesqu'onnepeutsoumettre àunétalon àunvéritable objetmétaphysiquequiconteste laplatitude
duplan.Il
commun, desmétriques
aussihétérogènes
quedesjeuxdepuissances. devientcarrémentimpossiblederéduire toutes
lesvariétés
d'espace
àla
despuissances
incommensurables,
mêmesiellessontcontinues”. planéité.
Lenombre quien résulte
n'estplusquelquechosequi
segroupe
Cette
manière
nouvelle
denombrer
l'espace
quecrée
Riemann
me parensembles,maisparvariétésquivontaffecterlamesure,
la métrique,
Paraîtpouvoirserapprocher
deSchellingqui raisonnait
également Quelleestladifférence
alorsentrevariété
erensemble,
entremulti-
Plicités
etgenres?
S'agit-il
encore
d’une
ontologie
générique
?Onpeut
considérer,
mesemble-t-il,
que dans
une
variété,
lesdimensions
changent,
15.Voirlesbelles
pages
deDeleuze surladramatisation
comme
ensemble
dé lesvariablesexprimentdesjeuxdecoordonnées,
descoordonnées
coordonnées,
notamment
p. 136deL'Îledéserte
etautres
textes,
16.Variations.
Laphilosophie
deGillesDeleuze,
Paris,Payot,1993. qui nesontplusseulementcartésiennes,
maisqui dépendent
dela
17.__ des«ensembles
etmulriplicités
»estabordé
dans
LeBergsonirne. Courbure
del'espace.
Lesvariétés
deRiemann
serangent
par degré
op.cit.p. 24. decourbure,
entre
-1, Oet+1,Surune
sphère,
lecomportement
du
18.La référence
à Riemann
apparaît
pourlapremière
foisà lapage
31du
Uiangle,
samétrique neseront paslesmêmesquesurunplandont la
nisme,
op.cit.,voirégalement
P. 306-307deDifférence
etrépétition,
op.cu.
19.ToutsejouedanslesHypothèses
quiservent
defondement
à lagéomemc Courbure
estnulle,ouencoresurunepseudo-sphère dontlacourbure
à Bernhard
Riemann,
Œuvres
mathématiques,
Paris,
Albert
Blanchard,
1968,
p.280-2)" estnégative.
Del'une l'autre decesvariétés,
sidifférentes
dansleur
métrique,
il y àPourtant unecontinuité,
cellede
l'intensité,ceque
152 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECDeLeuze

Riemann
appelle
le tenseur.
Ils'agitd’uneplasticité,
d'undrum XII
trèsintéressant
quidéploiedesdegrésdetensionetàchaque d Eu
géométrie particulière,
uneinfinitédegéométriesentre-] ie : *
l'intensité
qui s'imposeetquivaentrainer
laPhilosophie deDé
dansunesynthèseasymétrique
dusensible*®. uk Delamétallurgie
aucyborg
:
Cequ'onpeut dire àceniveau
detorsion
desconcepts,
c'esou
estdifficile
detraduire
unevariété
dansuneautre.
Lesfigures
: i le problèmede la technologie
dessine
surleballonn'obéissent
pasà la mêmegéométrie
bis chezDeleuzeet Guattari
ledégonfle,même légèrement.Lesourireserasse,lecoindes
li.
s'affaisse.
Lesrègles
derépartitionnesontpluslesmêmes. Les
ak}
seront
affectés,
bouleversés
par
l'intensité
de l'espace, sapuissance
ss, TarsuyA H1iGAKI
degré,
et entrent
enfindans
l'ordredecequej'appelleplurivers::.
|js,
possiblequeHegelnesoithistoriquement
pas trèsloindecetype
problématique.
Cequ'ilappelle
unconceptnese totalise
pas
deLa
même
manière
enfonctionde
l'endroit oùon seplace,enfonction
duph Lechème delatechnologie chezDeleuze
erGuattarimesemble
intellectuel
surlequelonsetrouve, selonlequel
onpense.
Jedis
cel, crucial
pourlibérerles virtualités
philosophiques
querecèleleur
parceque,dans saLogique,ladoctrine
semetàbifurquer
surplusieus nsée.
Il yaàceladeuxraisons. Lapremièreconcerne
directement
niveaux: l'être,
l'essence
etleconcept. Cesontcomme trois
variétes laformation deleurpensée,tantencequicoucheà latechnologie
hétérogènes.Dans«ladoctrine del'être»,onalesmêmes éléments qu'aux
sciences.Deleuzedécritsesœuvrescommeunesorte
decollage
queHegels'amuse àfairevarier.
Il enépuiselegroupedetranstor- detextes
philosophiques,
parmilesquelsceuxdeGilbertSimondon
mation.Dansladoctrine del'essence,onvadécouvrir
unerépétinios apparaissentparticulièrement
indispensables.
Danssapremière
desobjetsdéjàabordés,
maisselonunsystème
derelations
quinet période,Deleuzedécrirsaphilosophie delagenèse
enconsidérant
paslemême, n’estpasdemême degré nidemême puissance.
Erpuis l'individuation
selonunmodèle qu’ilemprunteàSimondon.
Mais,
enpassant
sur leplanduconcept, toutsetrouvera autrement vente dansleslivres
deDeleuze etGuattari,lethèmedu«phylummachi-
parfois
déformé dansuneformedevariété dontje suisactuellement nique» devientplus important,et la pensée de Simondon surla
entraindedégager lacohérence, C'estunsystème enquelquesort technologie,
plusprésente'. DansMilleplateaux, DeleuzeetGuattari
«acentré»,maisquifair complètementexploser lalogiqued'Aristt. reconsidèrentlestextes
surlatechnique d'AndréLeroi-Gourhan et
comme Riemann avaitfait exploserle plan euclidien,lageomeine rs ouLeroi-Gourhan soutient queledéveloppement de
euclidienne.
Ungeste quinousengage versunepensée desmultiple bipède
Bence constitueunrésultat dudéveloppement delamarche
cités
queDeleuze vabiensûrcomplexifier, pousser plusloindans
L »etnonl'inverse.Il situeainsilestatutdelatechnologie
dans
division,
de façon plusdisséminante,
proche deMandelbror. Et< Sontinuitédel'évolutiondelavie2.Demême Bergson affirme
làunautre jeudedimensions encore, proprement contempor" quelemécanisme etlatechnologie a, i
ppartiennentà unepoussée
a
mondechaotique
traversé
dechaoïdes
inédits,quandladramatisatiofi pente
quitte
lascène
del'infini.
1.On à commencé
à *
sLe
co 2remarquer
l'importance
destextes
deGilbert
Simondon
nm Dune re latechnologie
après
lapublication
desescours,
20.C'estlàlevitreduchap.v deDifférence errépétition,
op.«11. Kebnique,
Paris,
PUF,2014 objets
techniques,
Paris,
Aubier,
rééd.
2012,
etSur
La
21.Jean-ClerMartin,Pluriver.EssaisurLafin dumonde, PUF,
Paris, 2010
Ÿ©dd 2.Leroi.-Gourhanà développé,non seulementdansson chef-d'œuvreLe Geste
22.Je rappelle
queDeleuze erGuattari seréfèrent
positivement +. sr 4 LaparoleMais
se Qu'est-ce
quelaphilosophie?,
op.cit.,p. 16surlesfigures
etmoment P 6abs ueet aussi
éologiqg sidans
iq d'autres
: ,
travaux,sesÀidéestrèsoriginales
PR , j
sur l'évolution
fonctions,
etp.138,
voir
laréférence
autexte
fondamental
deHegel,
Qui
154 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE De la métallurgieau Cyborg. 155

del'élanvitalpropreauxhommes”,
Toutse passe
comme
s; , jstes,
parce
qu’ilsnes’attachent
jamaisàlaterre
comme
lefait
pointefinalede
l'élan delavie,propreà l'hommeenapparence, DansMilleplateaux,
lesnomades lesplustypiquessontles
trahissant
lecourant
de lavie,poussait
paradoxalement
l'élan4 rh méallurgistes:
quicherchent
la mine,forgent
lesminéraux,lesraffinent,
vieelle-même“.
Maiscommentméditerune
telle réévaluation
del enfontdesobjetsd'arterquelquefois desarmes.Cenesontpasles
pensée
duxx‘siècle
à propos
delatechnologie
? ns,vivantsurunespace striéetcultivant
la terre.
Aucontraire,
lesmérallurgistes
habitent
littéralementsnderground,
souslaterre,
en
I. HEIDEGGER
ET DELEUZE creusant
des trousetyapparaissant àdesplaces
inattendues.
Etpuis,
SURLA TECHNOLOGIE cequel'agriculture
présuppose,c'estlatechnologie
del'administration
del'espace
etdu temps.Ellecherche
à éviterl’inattendu
ou
l'accident.
Jepense
quelexx siècle
avus'étendre
uneinfluence
exagérée Lesmétallurgistes
achèvent
leur tâche
autrement.
LesGold
diggers
ne
«
deHeidegger
surlaquestion
delatechnologie.
Heidegger
oppose
1; ventsavoir
oùlamined’or se trouve
et recourent
à l'intuitionen
Nature(Physis)
aunomshumain etdemandesimplement
le retour
à acte’
».Deplus,leursrechniques
ousavoirs
sontquasiment
dissimulé
laNature.Habermas semble
défendreuneopinionsimilaire
quant
à sous
unvoilesecret,
alorsque
l'agriculture
estsoumise
àl’espacepublic
labio-science
etsesrésultats.
Latechno-phobie
s'étend
àtouségards.
delanation.Forger
les mineraisdelamine,
les raffiner,
les échanger,
Lelangage,
Lanation
et laloisontconsidérés
généralement
comme
des iln'est
paspossible
deLefairesans
entrerenrelation
avec
desnations
artefactshumains n'existant
pasdanslanature.Sil'on
situe l'existence iculières;toutefois,lesmétallurgistes
formenttoujoursun groupe,
humaine auboutducourant de l'évolution,
n'est-ilpasunpeuabsurde unebandeà partconservant
poursoiunsavoirspécial.
deséparer, sansautreformedeprocès, latechnologiede
l'homme?
À l'inverse,
certeélectiondenosfacultés netrahit-elle
paslefaitque II. PHYLUM MACHINIQUE
l'homme, dérobantlefeuàProméthée, serait
unanimal tropprivilégié?
Certes,
il n’yaaucun sensàcélébrerlatechnologieaveuglément, mais Milleplateaux estuneœuvre centrale,
oùDeleuze etGuattari ont
deuxquestions, aumoins, s'imposent.Premièrement,y a-t-ilconti- certes
développé biendesidéescruciales
poureux.Maisparmi celles-ci,
nuitéoudiscontinuité entrenatureettechnologie?Deuxièmement, celle
de«phylummachinique »mesemble frappante.Ladiscussion
leurséparationva-t-elledesoi? autour decetteidéeestprofondément liée auxthèmes delafiliation
Heidegger parledespaysans comme typiquement appropriésàla chezLévi-Strauss etauconcept d'évolution
deBergson, surtoutdans
nature. Mais,sil'onexaminel'histoiredelatechnologie,c'est
l'agri- le10°plateau : «Devenir-intense,
devenir-animal,
devenir-impercep-
culturequiapparaît
commelapremière
etplusviolenteexploitation tible…». Ilsontreprislesconceptslévistraussiens
etbergsoniens, en
delanature.
Enoutre,
dupointdevuedeleuzo-guattarien,
lespaysans lesmodifiantensystème dudevenir.
Deleuze etGuattarineprennent
coopèrent
toujoursavecl'espritdesnationserlessoutiennent,
gardent pasl'évolution comme linéaireetsimple.Ilssoulignent lethème de
lesolettravaillent
pourlaterritorialisation.
Lepaysan
de
la Forét-Noire «l'alliance
»,trèsimportant dansL'Anti-Œdipe,
parlequel
ils remplacent
n'est
jamaiscontre laNation.CequeDeleuze etGuattari
proposent, une«filiation»impliquant undevenir beaucoup tropdirect‘:
àl'opposé dupaysan, c'estlemétallurgiste,
quitraverse
ledésert.
Deleuze
etGuartari
célèbrent
lesmétallurgistes
commeles meilleurs ——-

| 5.Ilest trèsintéressant
denoterqueLemême terme
est utiliséparlephilosophe
Paponais
KitarôNishidadanssadernièrepériode,
lorsqu'ildiscute
dupoiéris-devenir.
3.Dans
ledernier
chapitre
desDeux
sources
deLamorale
etdeLareligion,
Bergson Cefairn'indiquepasunesimilarité
entrelapenséedeDeleuzeetlapenséeasiatique.
aprésenté
certe
pensée
unpeuparadoxale.
Ellerésulte
pourtant
del'ambiguïté
dela Sil'onestimetoutefoisquela philosophiedeNishidaemprunte
à lamêmesouche
de
place
accordée
àl'intelligence,
quiestàlafoislaforme
laplusextréme
deLavieetce Pensée
que
celle
deDeleuze,
c'est-à-dire
àlaphilosophie
deBergson,
celle
dudifférentiel,
quipossède
essentiellement
deséléments
d'anti-durée,
%C.,
toutcelaindiquecertainement
unesorted'accord
entre
Deleuze
etNishida.
4.Deleuze
déclare
lui-même
qu'iltente
dematérialiser
lespirituel
bergsonien
:
cf.Gilles
Deleuze,
Pourparlers,
Paris,
PUF,1990,
p.69. 6.CF.
ledeuxième
chapitre
deL'Anri-Œdipe.
Sur
lanature
rhizomique
del'alliance,
Paropposition
àLafiliarion,voirLaMétaphysique
cannibale
deViveiros
deCastro.
156 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECD'ELEUZE Delamétallurgie
aucyhorg..…
157

S l'évolution
comporte
devéritables
devenirs,
c'est
dans
kevaste
domaine
à
4 quimetenjeudesévres
d'échelles
etderègnes
couràfai dufférenn, 111.
LA SCIENCE MAJEURE ET LA SCIENCEMINEURE
SelonDeleuze
etGuattari,
lascience
majeure
possède
lafaculté
de
mesurer
l'espace
etletemps,
suivant
lemodèle
forme-matière,
afinde
Etdanslecontexte
oùilsévaluent
Lenéo-évolutionnisme,
ilsdécrivenr dérerminer
l'espace
strié.Au contraire,
lascience
mineure
constitue
leschoses
ainsi: lesavoir
quisuitlalogique
delamatière,
qui
traitelafinesse
etla
singularité
delamatière.
Certes,
touteslessciences
possèdent
cesdeux
C'estenparteparrapportà cs phénomènes
où l'évolutionnevapasd'ur côtés.
On pourrait
donnercomme castypiques
desciences
majeures
moinsdifférencié
àunplusdifférencié,
etcesse
d'êtreuncévolution
filiarive lagéométrie,
la physiqueet la mathématique.
Pourtant,Deleuze
er
hétérogène
pourdevenir
plutôtcommunicative
oucontagieuse, Guattari
cicentEdmundHusserl, quiestconsidéré ordinairement
comme
le défenseurleplusdéterminédelascience
majeure.Deleuze
] L'alliance,oulephylummachinique hétérogène,est lerhizome etGuartari
soulignent
destermesutilisés
dans/deen
:
lui-même. Elleestaussi
Ladescription concrètedelasynthèse disjoncrive.
Ici,Deleuze etGuattari tententdeconcrétiser cesidées enlesadaptant Husserl
parle
d'uneproto-géométrie
quis'adresserait
àdesessences
morpho-
àlabiologie ouàl'anthropologie. Deleuze, danslepremier chapitre
de logiques
wgues,c'est-à-dire
vagabondes
ou nomades,
ces essences
sedistin-
Différenceetrépétition,
s'essaieàrenverserlaclassificationdesêtreschez gueraientdeschoses
sensibles,
maiségalement desessences
idéales,
royales
Aristote,constituée parlegenre, l'espèce etLadifférence spécifique. ouimpériales”.
Deleuze introduit aucontraire avecforce uneontologie del'Univocité, Il noussemblequeHusserlà faitfaireàlapensée
unpasdécisif
lorsqu'il
a
une
classification desêtres sansaucune hiérarchie. Unerecherche sur découvertunerégion
d'essences
matérielles
etvagues,
c'est-à-dire
vagabondes,
lephylum machinique constitueuneautrerecherche de
cette classif. anexactesetpourtantrigoureuses,enlesdistinguant
desessencesfixes,
cation (nonclassifiante)del'être univoque endiverses régions. Dans
le métriqueetformelle,
contexte delanégation deLafiliationlinaireethiérarchique, Deleuxe
etGuattari prêtent attention augroupe, à labande et àlapopulation. Etcette
science
quidiscute
dusingulier
setrouve
directement
liée
Cesderniers sontplusimportants quele genre etl'espèce quandon àlathéorie
delatechnologie
chezSimondon.
observe lescomportements desanimaux oudeshommes. Onpeut
facilementles trouver chezlesanimaux, lesfemmes etlesenfants. Certaines
distinctions
proposées
parSimondon peuvent
ètre rapprochées
de
Danscestextes, il nes'agitpasencore directement detechnologie. celles
deHusserl.CarSimondon dénoncel'insuffisance
technologique
du
maiscesdiscussions sontbiendéveloppées dansles plateaux surhi modèle matière-forme
entantqu'ilsuppose
uneforme fixeerunematière
nomadologie etlamachine deguerre,où,enliant l'intensif àl'extensif. considérée
comme homogène'!.
à Deleuze erGuartari associent
la science majeure l'État, tandisque
Lascience
mineures'associe
aunomade.De là,la métallurgie
devient Lepointdécisif,
pourpenser
le devenir
technologique,
c'est-à-dire
centrale.
Le phylummachinique
envientà prendreun rapportétroit lacréationd'uneformede la matière,tientenceciqueSimondon
avec
lamérallurgie,
parcequ'ilentretient
unerelation
secrète
avec
li Proposeunetoutautrevisionde la matérialité.
Danslaproduction
matérialité
dumétal
lui-même. technologiquede quelquechose,« unematérialité
qui possède
un
Momos
»serait
laplus
indispensable.
Cesontlesartisans
quicherchent
ce
nomos
du matériel.
Autrementdit,celaneconcerne
paslepaysan,
qui
me

7.GillesDeleuze
etFélixGuartari,
MillePlateaux,
Paris,ÉditionsdeMinuit 9./bid,
p.454.
1980,p.291. 10./bid,,p.507.
8./bid,
p.292. 11.did,p.508.
158 AGSNCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDBLBUZE Delamétallurgie
aucyborg.…
159

estletravailleur
delanation.
Lesartisans
suivent
seulement
Je, quitraverse
deux
arts,
àfairevaloir
au-delà
desformes
séparées
undévelop-
lequelestcomprisdansla matière,
delamêmefaçonquel'oneet pementcontinu de la forme, au-delàdesmatièresvariablesune variation
leboissuivantsongrain. continue de la matière !?.

Lephylummachinique,c'est
lamatérialité
naturelle,
naturelle
ouans
cs C'estainsi
que lemétal
faitressortir
unevie,nonpasorganique
etlesdeux
à lafois,lamatière
enmouvement,enflux,envariation
: k maismétallique,
enfouiesouslavieordinaire
:
On définira
doncl'artisan
commeceluiquiestdéterminé
àsuivre
feBud
lamatière,
unphylum machinique.
C'estl'itinérans,
l'ambulant,
Suivre
jell Bref,cequemétaletmétallurgie
fontvenir
aujour,c'est
uneviepropre
à
dematière,
c'est
itinérer,
c'est
ambuler.
C'estl'intuition
enacte!?. Lamarière,
unétardeLamatière
encantqueelle,unvitalisme
matériel".

«L'intuition
enacte»,quiconstituelepropre
del'artisan,
sr Toutechosen'estpasfaitedemétal,maisentantquelamatière
ainsilemot-clé
de
la technologie
de
l'artisan. estconstruite
par lephylummachinique,
toutpossède
deséléments
de
méral.
Etc’est
lamétallurgie
quipeutfaire
apparaître
laviedumétal,
IV.LAMÉTALLURGIE
ETLEPHYLUM
MACHINIQUE et,encesens,représente
typiquement
lascience
mineure
et«lascience
“yague”oulaphénoménologie
delamatière!”
».Ellefairdécouvrir
la
Or,sileplustypique
desartisans
estlemétallurgiste,
comment
|: vieinorganique.
«Lemétal
n'est
niunechoseniunorganisme, maisun
phylummachinique
commefluxdematièreseconnecte-t-il
avec|) sans
organes
».Lemétal
commecorpssansorganes,
c'estlavitalité
métallurgie?
Ladiscussion
doitporter
à lafoissurlamatière
comme delamatérialité'*.
C’estparl'intuitionenactequelesmérallurgistes
métal,
et surlemoded'existence
nomadiquedumétallurgisre. mettent
au jourcerte
vie«enfoncée
»quelesornements,
lesœuvres
d'art(Gothiques
du Nord),lesarmes,
lesmonnaies
erlesmusiques
Pourquoilephylum
machinique,
lefluxdelamatière serait-il
essentiellemen: manifestent
!?.Cesobjets
techniques
font
ressortir
lefluxdelamatière.
métallique
oumétallurgique?
[.…]Il estplusfacilederépondre
à cesquestions CertevisiondeDeleuze
etGuartariestclairement
liéeàLadiscussion
Cartoursepasse
comme silemétal
etlamétallurgie
imposaient
etélevaient deladernière période
deDeleuze. DansFoucault,Deleuzeparle
dla
e
àlaconscience
quelquechosequin'est
quecachéouenfoui
danslesautrx vieinsilico,
etévaluelaviedel’artificeoucelle
delasimulation
dans
matières
etl'opération
?. l'ordinateur.
Lemétal estlecorps
sans organes
transformable,
dont
la
fluidité
rendpossiblelecapital.
Lecorps sans
organes,c’est
lemétal.
Lemétal constitue
lematériel spécial
parlequelonproduit
des Notrecorps,notrevie,notreexistence,
sonttoujours
unpeumétal-
outilsoudesornementstrèsfins.Maisdeplus,lemétal,
reprodui liques,
ercesontlesmétallurgistes
quilefontapparaître.
Ilssupposent
parla«forme-lingot»,peutfaire
déborder
l'énergie
delamatérix laviemétallique,
encherchant
partout
le métal.
Maisd'oùviennent
lité.Il estaussi
pleinement
signifiant
quetoutes
lesmonnaies
soient lesfacultés
spéciales
deleurexistence?
Cettequestion
concerneleur
fabriquéesà partirdu métal,lequelserévèle« inséparable
decette mode d'existence
nomadique,
dutype de«labande
».
formetrèsparticulière,quineseconfondni avecunstockniavecune
marchandise ».Le métalproduitlavaleurmonétaire. Et,enméme 15.Milleplateaux,
op.cit.,p.511.
temps,il estl'originedelamusique'*.Ce n'estpasàcausedesbruit: 16.
Hbid,,
p.512.
17.{bid
desforges,maisàcause delatendance
18.
Bien
que lecorps
sans
organes
soit
l'undes termes
lesplus
imporcanes
deLa
philosophie
deDeleuze
etGuatrari,
uneautre
nuance esticiapportée
àcemor.
Danscecontexte,
le
12.Jbid,,p.509. corps
signifie
nonseulement
lamatérialité,
mais aussi
l'équipement
oulàcorporation.
19.DeleuzeetGuattari
estiment
fortl'artdesGothiquesduNord,dans Mille
13.
/bid,
p.510-511.
Plateaux,
comme unmétier
delascience
mineure. C£.le14'desPlareaux.
Il représente
14.Encequiconcerne
lamusique,
ondoitenmême
temps
sesouvenir
duhéà uneunitédeLatechnique
desnomades, etl'artnongréco-romain.
laritournelle
commerythme
pour
laterritorialisation
et,àlafois,
ladéverricorialisti"
160 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE
DeLa
métallurgie
aucyborg.…
161
V. LA PUISSANCE
DE LA BANDE
réellement lecapitalisme
lui-même. Mais,pourDeleuzeetGuattari,
encitant «lenéo-primitivisme»deMacLuhan, cettesorte
degroupe
Lesartisans
sontceuxqui ambulent,
ceuxquivagabonde,
fairapparaîtreparfois
certainscaractères
desbandes archaïques,
même
Maiscevagabondage
prenduneforme
très particulière,
il form:
s'ilsdésignent
uneligneautre quelabandedesmétallurgistes.
Etpuis,
groupe
spécial,
labande.
Cepoint
estcrucial
pour
penser
quisony
k onpeutcomparer labande avec descollectivités
animales
etvégétales.
technologistes. Certes,laviedumétal sedistinguedeleursvies.
Pourtant,
toutes
les
vies,Y compriscellede l'homme,suiventlephylummachinique.
L'itinérant
premier
etprimaire,
c'est
l'artisan.
Maisl'artisan,
cen'est
je Onpeut
lecomprendre
àlalumière
delacitation
suivante
:
chasseur,
l'agriculreur
ni l'éleveur
[.…]C'estceluiquisuitlamatière.f,
comme
productivité
pure,doncsousformeminérale,
etnonvégéay,
“ Dans
undevenir-animal,
on
a toujours
affaire
àunemeute,
à unebande,
àune
animale.
C'estn'estpasl'hommedela terre,ni du sol,maisl'homme d ulation,
à unpeuplement,
brefàunemultiplicité.
|} Nous
disions
que
sous-sol
[.….].
Commel'amontré GordonChilde,lemérallurgiste estpe couranimalestd'abordunebande,
unemeute”,
artisan
spécialisé
etforme
àcerégard
uncorps(sociétés
secrètes,
guild..
compagnonnages)
*. Enfin,
il faut
soulignerquelegroupeconstitue
lesujet
de«l'intuition
enacte».La bandesuittoujours«lenomos delamatière ».On peut
Certes,lesartisansentretiennent
desrelationsdiverses
avec
ke rrouver
ici, à nouveau,
la distinction
entrel'artisan
etletravailleur.
chasseurs
oulesagriculteurs,
etaussi,
àtraversceux-ci,
desrelation, Lepaysan contribue
à laproductivité
delanationenfaisant
les «stries
»
« aveclesnations.
Pourtant
ils suivent
fondamentalement
la matière. delaterre.Legroupedela technologie,quidépend del'intuition
fluxdusous-sol.
Ilsnesontpasdesadministrateurs
delaterre o enacte»,doitvivreenaffirmant
le hasard.
Il semeutenprenant des
dusol,occupésparlesnations.
Ilssont
littéralement
underground formesvariables,sansaxeni centre.LesGolddiggers ouSeagangs
«Laquestionducontrôle
desmines met
toujoursencausedes peuple constituent
desbandes
rypiques?*.
Ellespossèdent
unsavoir
secret
nomades, toutemineestunelignedefuite... »Ce groupeneconstitue surlepaysage
delamontagne
oudesmers,
parl'intuition
erparle
ni lanationni lenomade
idéal, maisla bandesecrète, breflabande hasard,
nonpar
l'administration
del'espace
erdutemps
striés.Certes,
oulegroupe.
C’estcequePierre
Clastres
ditdelasociété
sans
l'État labande entretient
desrelations
avec
desnations.
Il n'yapas
d'espace
Deleuze
erGuartari,
décrivant
lesmineurs
deBogota,
disent
que: lisse
sansespace
strié.Maislabande
représente
toujours
uneforce
qui
résiste
àl’espace
strié.
pour comprendre cesmécanismes,
il fautrenoncer
àlavision
évolurionniste
qu
faitdelabande oudelameuteuneformesocialerudimentaire
et moins
bic VI. DU MÉTALAU CYBORG
organisée[..]. Lesmeutes,
lesbandessontdesgroupesdutype rhizome
pur
oppositionaurype arborescent
quiseconcentre
surdesorganesdepouvoir Sila théoriedelatechnologie
deDeleuzeerGuartari
suitlenomos
delamatière, quelle technologie
serévèle
selon
euxlaplusappropriée
Uncorps
sansorganes, c'est
lemétal.Etlatechnologie
qui
entraite auxxr siècle ? Il convient
alorsderevenir
àlavie«insilico»que
estlamétallurgie.
Surlesgroupes desmétallurgistes
décrits
com Deleuze décritdansFoucault.Deleuze
etGuattari
ne selivraient
pasà
desbandes,
il fautalorsindiquertroispoints.D'abord,
ondoitdie desrecherches anthropologiques
àproposdessciences
comme Bruno
quecettesortedebandesecachepartout.Elle peutêtrel'organisi Latour, maisilsontbeaucoup influencé
lathéorie
del’acteur-réseau,
tioncommerciale
(l'entreprise
mondiale),
et legroupe
religieux
o
politique(gauche
ou droite).Lesentreprises
mondiales
supportent 22.Ibid,p.292-293.
23.Deleuze
etGuattari
ontfrôlé
Lethème
deLa
mer
comme
rhizome,
enconsidérant
20.
Mille
plateaux,
op.
cit.,
p.512-513. quelamerconstitue
elle-mêmeundésert,
quelesSeagangs
sonteux-mêmes
lesbands,
21./bid,p. 443. etquelamerestlerégimepleindesthèmesdecette
recherche.
162 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECDeLeuza

à etcontribué
la destruction
deladichotomie
nature/culture
(cf. Philippe
Descola)
ousujet/objet
(affordance,
réalisme
spéculatif),
CequeDeleue
et Guattari ont présentécomme une sciencemineure, impliqueun
changementdeladichortomie
nature/culture
et leurtressage
avec|,
technologie.
Dansunetelle perspective,
la biologiemoléculaire

lascience
ducerveauserévéleraient
lesplusproches
delaligne
dela III
métallurgie,
bienquecesoiticilanationquiprocurebeaucoup
de
financements
àlarecherche.
Pourtant,
ellescherchent
justement
lavie
danslamatière,
laviedanslasimulation
del'ordinateur, Cen'est
pas
làune
vie organique,
maisinorganique.
Etles biologistes
apparaissent
cominedesbandes danslemondemoderne,
parcequ'ilyadessavoirs TRACER DES DIAGRAMMES
secrets,
qu'ilseformecommedesbandesdansle laboratoire,
etque
leurméthode derecherche passeprécisément,comme dans le«asdu
métallurgiste,parl'intuitionen
acte.Nesont-ils pascomme les(ol
diggersmodernes ?
Dansuneautre direction,
le cyborgtourne
la vieversl'intelligence
artificielle.
Ensedéveloppant dansledomaine delalocomotion, L
rubotique
est entrain
de délivrerl'évolution
de lamatérialitéclle-mérne.
L'humanoïde-androïde esttypiquedece1ype trèsnouveau.Iln'estpas
l'inorganisation
desorganes, maistientdanslaproduction delàvic
del'inorganique,
l'affectetlemouvement d'unCorpssans Organes.
Quant à cesdécouvertes (biologiques,cérébrales,
robotiques),la
nation sedonnera laloipourles réguler,Pourtant,unetellevie du
matériel
sepasse
d'elleetexiste
à l'ératd'exception
(GivrgioAgamben)
? Celaproduira-t-il
unenouvelle
bio-techno-politique
11apparait
entout
casurgentdereconsidérer
etréévaluer
les puissances
delatechnologie
deleuzo-guattarienne
danslaperspective
dessciences
d'aujourd'hui,
descendantes
delamétallurgie.
XIII

CircleProcess
: subjectivation
et processualité
musicale

PASCALE
CRITON

Qu'est
cequiinciteunmusicien—etpluslargement unartiste
—à
côtoyer
lapensée
deDeleuze etGuartari?
Musiqueetphilosophiesont
deux
domaines
fortdifférents.
Deleuze
etGuartarinousinvitent
à lamise
enœuvre
deprocessus
créatifsquimodifient
lesrelations,
leshiérarchies,
lescatégories.
Leurfaçonpropredetravailler
valorise
lessignes
etse
tourneversl'expérimentation
artistique.
Laquestion
dessignesintensifs
etcelle
desaffects,
enparticulier,
avivel'incidence
decequinous touche,
appelle
àdesformes d'agir,
àdesélaborations
expressives.
Lapenséede
DeleuzeetGuartariattirenotre
attentionverscequiaiguillonne
l'enten-
dement,donne voix etforceàcesindices(chocs)
intensif
quibousculent
l'intelligence
etlamettent enmouvement. Il ne
s'agirait
pasalorspour
unmusicien dedevenir philosophe,
nid'appliquerdesconceptsphilo-
sophiques
à lamusique,
mais,comme
le suggère
Deleuze,
deprendre
encompte
l'ébranlement
provoqué
parlessignes «quinousparlent
»et
«nous
forcentàpenser!
».Encore
faut-ilqu'ily aitrencontre,
qu'une
attention
soiraccordée,
qu'unerésonance
fasse
l'objec
d'unecapture,
qu'unmouvement prenne
consistance.
C'estauniveau
dessignes,
souslelogos,
quedesproblématiques
etdestâchescommunes
entrent
€nrésonance
en
art etenphilosophie.
Sansdoutecerapprochement
se
fait-il
obscurément,
entermesdeviresses
etdecaprures.
] ai eu l'occasion,dans les années1970-1980,de suivreles
“séminairesdumardi»àl'UniversitédeVincennes
puisàSaint-Denis,
ns

1.GillesDeleuze,
Prousr
erlessignes,
Paris,PUF, 1964,
p.118-120.
2. GillesDeleuze,« Qu'est-cequ'un actedecréation?»,conférence
àla FEMIS
{9
Dies Lapoujade
(6d.),Desxrégimes
defous.Textes
erentretiens,
1975-1995,
ions
deMinuit,
2003,
p.293.

dl.
166 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDeLeuze CircleProcess
: subjectivation
etprocessualité
musicale167

etdeparticiper
auxquestions
queDeleuze
seposait
autour
du
rôle dy irl'information
vibratoire
dediverses
façons.
Lescaractéristiques
chromatismeenmusique”,C'étaituneformidablecoïncidence
car je Ron s'expriment
selon
d'infimes
différences
intensives
ettemporelles
m'intéressais
justement
auchromatisme etauxmicro-intervalles,
objer erlamicro-variation
dusonsuscite
unintérêt
accru
pour
l'expérience
demesrecherchesmusicales
etmusicologiques.
DeleuzeS'interrogeair del'écoute
subjective.
La recherche
detechniques
dejeudestinées
à
surladé-hiérarchisation
desfonctions
opérée
parlechromatisme
« desinstruments
accordésdefaçonmicrotonale
parexemple,
estun
cherchait
àanalyser
commentlamolécularisation
du matériau
sonore champd'individuationpassionnant.
C'estunformidable
terrainpour
à pouvait
entraîner
destransitivités
nouvelles,
redistribuant
de«proche mertre
l'épreuve
unpeude«corps
sans
organes
»,disons
unepart
enproche»lesrelations deformeetd'expression,
nondansuneoptique dedegré
zéro,
et expérimenterdespossibilités
dechoix,desprocessus
structuraliste,
maisà lamanièred’unmouvement decontamination. desubjectivation
: quelsrapports
auxsignes,pourquelle
expérience
Cesrapprochements trouvaientleurrésonancedanslesnotionsde d'écoute?
Quelsrapports
entre
le geste,
le corps,
lapsyché?
machinedeguerre etdemachine abstraite,
développées dansMilk
plateauxoùd'uneautrefaçondansleFoucault. Pourmoncompr, 1.UNE EXPÉRIENCE SUBJECTIVANTE
jedécouvrais
unélargissement
considérable
del'enjeu
d'unchromatisme
généralisé,
éclairé
ànouveaux fraisparunepenséedesindividuations Comment,
parexemple,
allerversuneexpérience
subjectivante,
différentielles
erdesmultiplicités.
Lacréation
d’espace-temps,
désignée uneexpérience
quisoituneaventure
d'écriture
dontonsedonne
le
comme tâchecommune enartetenphilosophie“,
prenait corps
avec tempsdeconstruire
lesmodalités,
unerecherche
danslaquelle
chacun
l’idéedeconsistance
etdesubjectivation.
Concernant la musique, s'invente
etquiconstitue,
sipossible,
uneexpérience
quinesereferme
DeleuzeetGuartari
se référaient
volontiers
auxruptures conceptuelles passurelle-même,
ni pour
celui quijoue,nipourceuxquiécoutent
?
post-années
1950,celles
d'unemusique expérimentale
quinesedéfinit Cesontà chaquefoisdesaventures quisejouentauniveau dela
pasparl'entretien
d'unetradition,
maisaucontraire parsacapacité conception,
de
la recherche,
delarelation,maisaussi
de l'idéequel'on
d'invention
etparcequ'ellemetenconnexion”. Decepointdevue, sefaitdelaperformance
etdelaréception
publique.
Celaveur
donc
laphilosophie
deDeleuze etGuartarisesituedeplain-pied avec
les direconcevoir
ensemble uneidée,uneforme,unerechnique,
etne
individuations
paradoxales
et«sansidentité »qu’ilsattribuent
à la serait-ce
quecela: déplacer
lesrapports
habituels
entrecompositeur
musique,
et
avecl'élaboration
derapports
directs
oumatériaux-forces'. etinterprète
pourlaisser
laconsistance
d'unespace-temps
singulier
. Certeposition
confortait
monintérér
pourlesexpérimentations prendre
forme.
Souscetangle,
laphilosophie
deDeleuze
etGuattari
micro-intervalliques
etpourlejeudespetites
différences.
Je m'intéresse peurêtreentendue
commeunartdelapragmatique,
quifavorise
les
eneffet,
depuis lesannées1980,àlavariabilité
dusonetàsaréalité rapports
directsentreforceseraffects,entresignesetexpression.
complexe,enparticulierauxaspectsmicrologiques
quiinterrogent Cesdernières
années,
l'élaboration
detechniques
instrumentales
notre
perception ernotrecerveau.
Jem'intéresse
auxcomportements adaptées
auxaccords
microtonauxm'aamenéeàaccorder
unintérêt
acoustiques
etj'aime
travaillerauniveau
des«conditions
deproduc- grandissant
augeste.Legestemusicalconcentre
unsavoir-faire
inépui-
von»duson,auniveau desinstrumentsàproprementparler,
dontje sable,
il existe
uneinfinité
depetites
variations
dans
lesmanières
dejouer,
modifiel'accord,
ouencorededispositifs
d'écoutequi permettent
de lesinventions
dela lutherie
etladiversité
desvaleurs
culturelles.
Laposition
subjecrivante
esttrèssensible
erlegeste
peurêtreplusou
3. Pascale
Criton, «L'inviration»,in À BernoldetR. Pinhas(dir.),Deleuze
épi
moins
réglé,
effectué
defaçon
métrique
ousouple,
voire
irrigué
d'une
Approches
etportraits,
Paris,Hermann,
2005,p. 55-68.
À Partd autonomie. la différencedesécritures
contemporainestrès
M mA monintérêts'est portésurdes
scriptsgestuelsinten-
$ an Cricon.: Qu'est-ce
qu'unactedecréation?»,op.cit, p.2%.
à Gilles
Deleuze
17om: : mr PE sonore»,in P.CritonetJ.-M. Chouvel
(dir} ,déplaçantl'attention
quel'interprète
accorde
l'exécutiond'une
6.Gilles
Due “ ;Paris,
Cdmc(disuribution
Symeétrie),
2015,
P $i-ot De surundiagramme, c'est-à-dire
unjeudevariablesàagencer
conférence
àlACAN ( pot iner D. desforces
non-audibles
parroms
gear È “ement dansladurée.L'idéeestdefavoriser uneinterprétation
entretiens,
1975-1995,
op.
cit,p.1sue (éd.),
Deuxrégimes
de
fous
ve,deconstruireunematrice quilaisse
placeà l'imagination
du
168 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE CircleProcess
:subjectivation
etprocessualité
musicale169

musicien. À cepropos,
je voudraisprésenter
ici CürcleProcess
(2) de privilégierlesrelationsqui permettent
à unétatau à
srratifiées,
2012),un travailmenéen étroitecollaborationavecSilviaTaro; pyénement
sonoredeprendre
consistance,
d'accorder
de
la valeur
violonisteetco-auteur
decertepièce”.CircleProcess
estconçuePour ” ui peutparaîtrede l'ordredu détail—autantd'attentions
qui
unviolon
accordé
enseizièmes
deron,c'est-à-dire
qu'ilyàseize
per, port accès
àdenouvelles
individuations
etdenouvelles
subjecti-
intervalles
àl'intérieur
d'unton,entreunDoetunRéparexemple vations.
J'avais
déjàtravaillé
avecunviolon
accordéen1/16°
deton
Cetaccordmicrotonalestobtenu
endécalant
progressivement
quatre exj'avais
mesurélesdifficultés
decetaccord
(enparticulier
liéesàla
cordesidentiques.
Lascordarura
quienrésulte
modifie
radicalemens ruche érroite
erlisse
del'instrument),
mais
aussi
larichesse
potentielle
lejeuinstrumental
—souvenons-nous
queleviolonn'estpaséquipe desonexploration®.
De soncôté,Silviaa unegrande
expérience
de
comme
laguitare
defrettes
permettant
decontrôler
la justesse
(latouche l'improvisation
etsespropresrecherches
surlesonetsur
le gestelui
du violonest
lisse). Le faitde modifierl'accordbrouillelesrepères entd'analyser
et d'intégrer
desdifférences
pourelles-mêmes,
habituels
etcréeunesituation
derupture
: ilestimpossible
dejouer
un sansmodèlederéférence
absolu.
airconnu,ni aucunepiècedu répertoire
surcetinstrument.
Pourfair. Nousavonscommencé pardesimplesdessins.
J'aipropaséàSilvia
sonnerceviolonmodifié,il seranécessaire
d'inventerunetechnique unensemble decourbeslégèrement différentes.
J'avaisentêteunjeu
instrumentalenouvelle. d'inflexionsintonativesfluides—etcescourbesvalaient pourune
Pourquoi créerunetellesituation
?Toutd'abord poursonintérét suggestiondevariation.
sonore:Laproximitédesquatre cordesengendredenouvelles
relations Dèsledépart, uncertain nombrede préalables orientent
l'expéri-
acoustiques
etdonneaccès àl’activité
complexed’unmilieusonore menution d'unetellesituationderupture :
trèsdense.
Celui-cioffrelapossibilité
dejouersurdetrèspetires
diffe- - Lesonestconsidéré commeunévénement vibratoirequine
rences,
nonseulement d'intervalles
maisaussidenatureexpressive
: préexiste
pasdans l'absolu: c'estunensemble dedéterminations
cesvariables
infimespermettent unetransitivité
finedusonaubruit. àconstruireauniveau desesconditionsdeproduction.
l'accès
àdescomportements acoustiquesspécifiques,
desmatières — L'instrument
est considéré sousunangle topologique,comme un
prochesdelavoixouencore desvariablesd'ajustement
entrehauteur ensemble desurfaces s'offrant
augeste,uneimbrication decavités
ettimbre.Notretravails'estd'embléeplacéauniveaudecequel'on etdedensitésquidéterminent lacirculation
etlarésonance duson.
nesaitpas,decequ'onnemaîtriseplus,
à la frontière
duspontané
et — Lematériau estpensé entermes devariables,
ils'agitd'explorer
et
del'analyse,
decequifairàlafoissegment
identifiable
etsens,
tout
en defairevaloirlescomportements acoustiques
decemilieu transitif
participant
àune«idée»entraindeseconstruire.
Nousnoussommes en1/16de ton, entresonetbruit,hauteuret timbre, sonsrésiduels
attachées
àsensibiliser
lesfrontières
decequin'est
peut-être
pasencuie etbattements.
: de la musiquemais peut le devenir, nous intéressantauxconditions — Legeste privilégieuneélaboration sensorimorrice la recherche
d'émergence
aussi
biendel'idéesonore
ermusicale,
qu'aux
façons
de gestuelle
faitappelàunemémoire kinesthésiqueets'apparente
au
sentir
etdetravailler
ensemble. travail
chorégraphique.
11.EXPÉRIMENTERL'INSTRUMENT ZÉRO Comment
stabiliser
desrepères
erdonner
consistance
àdenouvelles
manières
dejouer?
Noussommes
parties
d'une
exploration
pragma-
Commentélaborerunenouvelletechniquesansréférenceau tique
delamain,analysant
lespositions,
relevant
lesjeux
decontiguité
repères
harmoniques
habituels
?[l estnécessaire
dedéfaire
leshabitude possibles
(glissements
de procheenproche,sinuosités),
recherchant
l'économie
dugeste
toutenprivilégiant
l'intérêt
expressif.
Îl s'agissait
7. CircleProcess(2012) a étéinterprétépar Silvia Tarozzi à la cathédrale
de
decréer
deschemins,
derepérer
dessituations
remarquables.
Cetravail
Coutances
le6 août2015,danslecadredececolloque.
Il existe
un enrepistteniie"t
: CDSilviaTarozzi,
Virgin
Violin,
1Dischi
Angelica,
Bologne
(IT),disponible
<* 8.Pascale
Criton,Lepassage
desheures,
pourviolon,violoncelle,
accordéon
et
lignesurReRMegacorp,
IDAU28(2014). "oix.
Paris,
Jobert,
1998.

ne
Cirele
Process
:subjectivetion
etprocessualité
musicale171
170 ÂAGENCER
LESMuunieuicrrés
AVEC
DsLeuzs

pérage,
d'analyse,
desélection,
de fixation,estbeaucou
res qu'onimagine.Caril nesuffitpasdeprojeter
uneidée,
ds
faut-il
saisir
comment«s'orienter
»pourdéfinir,associer,
articuler
chaînessémiotiques. . |
L'exploration
s'estfaiteencroisantl'analyse
et}improvisation
guidée,
les figures,
dynamismes ettransitions
explorés
enimprovis,
4
14)
LL
tionétantrépertoriés
etétudiéspourleursqualitésPropres.
Silwi,,
développé deschemins souples,
transitifs,
deslignesfluides
quiù
donné consistanceàcerteidéepremièred'inflexion.
Peuàpeu, nos.
avons délimité
despossibles,stabilisé
desmanières dejouer,see.
des«chiro-morphèmes »quiontultérieurement donnématière,
desstyles
dejeu,à lafoistechniquesetexpressifs.
Nousavons éraby,
ainsiunedouzaine de
stylesdejeu.Chaque s#ykcorrespondàunét HGUATIMË

(ethos)
toutàlafoissonore,
dynamique,
psychique.
Desesquisses
=
peuàpeudonné corpsà desraccordements
de
styleset
l'idéed'une
forme
circulaire,
gérantàlafoislacontinuité
erlerecommencemen
possible
du cycle,s'estprécisée(cf. figureci-contre).Nousnou,
sommesorientées
versl'élaboration
d’undiagramme,actualisable
4.
façon
àlafoisprécise
etsouple, fixantl'enchaïinement
dessryles
et|,
forme
générale
delapièce.

III. CIRCLEPROCESS,
UN PROCESSUS
DE TRANSFORMATIONCONTINUE

Cirele
Process
estcomposé
d'unesuitededouze
états.
Chaque
étar
estconstitué
d'unensemble
devariables
spécifiques
etd'unezone
de
transition
(transformation).
Il estpossible
decommencer àpartir
de
Criton
Pascale
Tarozzi,
Silvia
Circle
(Esquisse
Process
3).
et
n'importequelpointsurlecadran circulaire
quisertdepartition
erde
s'arrêter
àtoutpointdésiré.
Lecyclepeut êtreréalisé
defaçoncontractée
ou
dilatée,cependant
les douze étapesdoiventrester
proportionnelles
Chaque sy estprécisément établi,
caractérisé
parunerégion,des
modes dejeuetdesrypes deprogression.Cetensemble devariabks v
estconsignédansune«carte synoptique»accompagnée d'exemples ee
vidéo.
Cejeudevariables constitueunfoyervirtueldont
les relations
Vital
s4uT
: sontà construire
les stylessontavanttourdesmanières dejouer
maisaussi
desmanièresdesentir(régimesdevitesses,
ralentissements
accélérations)
investies
d’uneidéeà la foissonoreerémotionnelle
(tension,
rupture,
construction,
déconstruction),
Lecycledesdou
états
établit
uneconduiteà lafoismatérielle
etdirectionnelle
qui
indique
Lamanièreetlesens
dumouvement.

|
CircleProcess
: subjectivation
etprocessualité
musicale 173
172 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

IV. UNE
INTERPRÉTATION CRÉATIVE ux:comment
fairetenirunespace
intensif?
Leprocessus
detrans-
dufi
formation
«tient»parce
qu'ilrepose
suruninvestissement
imaginaire
Laperformance consiste
àtransformer
les états sonores
enexploran, apulsionnel
: legeste
û esthabitéparundéclenchement
: ; derelations
|
lesinfimesarticulations
expressives
quelemilieuultrachromatique
«, psychiques,
physiques,
mentalesqui déterminentdestensions
etdes
seizièmesdeconrendpossible,dubruissement auparlando,debarre. détentes,
desurgences
oùdesdéviations.
Cetteliberté
dugeste,
rappelle
ments ténusaufoisonnementd'harmoniques.Ils'agitderechercher
|. Silvia,
«reposesuruntravailsursonpropre
geste,surleson,surson
gestequi
rendsensible lepassage
progressif
d'unétatà unautre,enke, envie,sursonCOPS..-Parcequeceprocessus
d'interprétation
créative
enchaînantavecle maximumde transitivité.
La prioritéestaccordé estenrelation
avecuntempsouvert.
Il s'agit
d'untemps
performatif
à l'expression
dynamique,à la «prisedeconsistance»descomporte. quireposesurl'écoute
etdemande
unegestuellemusicale
vraiment
ments
acoustiques
etdesfigures
dans
la durée.
Deuxpôles
dejeux
se intégrée
corporellement
».À ladifférence
d'une
interprétation
déter-
» dégagent:d'unepartlaprogression
continue(transformation
évolurive minée au«noteànoteet assujettie
àdescontraintes
métriques
rigides,
pardifférences
contiguës)etd'autrepartladifférencecontrastante, l'interprétation
créative
émerge
avecunagencementsubjectivant.
oubascule
(employée
pardeuxfoispourlancerunfoyergénérarif) BienquelatramemusicaledeCircleProcess
s'inscrive
dansune
Lesdeuxpôlessontcependant
présents
à desdegrésdivers,comme, conception
nonidiomatique,
éloignée
derouteréférence
traditionnelle,
chezDeleuze, lesdeuxtendances du«lisse»etdu«strié». certe
pragmatique
du gesterappelle
certaines
musiques
detradition
Silacontrainte formelle estdonnée parl'enchaînement dessyle, oralequi prennentconsistance
pardesjeuxdemainélaborés
etdes
celui-cisedéroule auseind’untemps flottant
: latemporalité dugesteer raccordementssouplesdeleurspositions.Commelemontrent avec
ladurée delatransition sontprises encharge par
l'interprète. Letemps. beaucoup depertinenceElieetJeanDuring, certe
disposition
serait
un
habituellement réglédans
l'interprétation delamusique écrire,estici traitcaractéristique
desmusiques nomades
'!:àladifférencedel'exposé
valorisé pourporter souplement l'idée sonore : il estajustableetnon réglé etdémonstratif
desmusiques sédentaires,danslesmusiques
métrique. C'estletemps impliqué dans
le jeudesvariables, avec
leur nomades, unemultitude defigures,
traitsetmoments agençablesest
degrés d'incertitude. Legeste estavanttoutproductif, il n'estpas auservice d'unjeudetransformation continue, d'uneconsistance
sourisàunrésultat escompté, maiss'élabore avec l'expression.
Lebut temporellenonpulséeetsansdegrésobligés.Pour
sa part,
Silviadécrit
n'estpasderéaliser ungeste à unecertaine vitesse, nidel'entretemr ainsisaposition,
entreformeetinvention :
pendant unedurée exacte. Lesmodes dejeusontprécisément éabhs
etlecadran indiqueleschangements des#yles mais,pourreprendre Certetransformation continue
exige
unéquilibre
entre
l'abandon
er l'intério-
lestermes de
Silvia,l'enjeusesitueauniveau ducomment :«commen: risauion
deladirectionnalité
dumouvementprévuedansl'enchainement.
Tu
effectuer certetransition,comment travaillerlesvariables pourpasset sais
doncquecu«doisaller»,rudoisrejoindreuncertainpoint—tunepeux
d’unpoint à unautre”? »L'enjeu estceluidelaconsistance temporelk paschoisird'allerailleurs!
Maiscombien
de1emps tuprends pourlefaire,
dudéveloppement delatransformation etdelafaçondelamener. parquels
biais
exacts,
comment
tumalaxes
lessons,
lesgestes,
comment
tu
deluidonner formedansletemps. bouges
tonbras,quelle
texture
tufaisapparaître
précisément,
plusoumoins
Certe élasticité,
certeconnexion ouverte auniveau «micro »,permet harmonique
oubruitée—il yatellement
deparamètres!
Onsaitqu'onàdu
précisément deconstruire l'expression,decreuser legesteetsanéce PPS pourlefaire,cependant
il nefautpass'attarder,
nirester
plaqué,car
sité,detisser un«agencement machinique »capable defavoriserdes il s'agitd’unprocessus
de transformation
continue,Ceuelibertédepouvoir
couplages inattendus, comme lemetenévidence Guatrari àpropos de gérerletempspermetdefairedeschoixcontinuellement,unpeucomme dans
cequ'ilnomme des«constellations d'intensitésexpressives "». Sous
k l'improvisation
—bienqu'ilnes'agisse
pasd'improvisation
ouverte.
Onpeut
temps flottant, latensionduraccordement, les affects, lapragmatique
ee

il. ElieDuringetJeanDuring,«Del'espace
lisseautemps
croué:àpropos
des
9.SilviaTarozzi,
entretien
10.FélixGuarrari,
avecPascale
Chaormose,
Paris,
Cricon,Paris,1"mai2017.
Galilée,
1992,
p.58-60.
msd#63
nomades
»,
in P.Criton
etJ..M.
Chouvel
(dir.),
Gilles
Deleuze,
lapensée-
"tique,
Paris,
Cdmc(distribution
Symétrie),
2015,
p.216-218.
174 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECDereuze Circle
Process
:subjectivation
etprocessualité
musicale
175

choisir
d'aller
pluslentement,
parce
qu'onsentquelamusique
s'ypate
a rarinecesse
demettreenvaleurlafaçondont«dessegments
coutmarche
bienetquela transformation
peutêtreétirée..Exlene Guattauespeuvent
devenir
autonomesetsemettre
àtravailler
àleur
suivant,
onabesoin d'aller«rès
vite.Puisonpasse...
CaronneBou*: gi mpte,
etsecréer
denouveaux
champs
deréférences!5
».1]ne
décider
denepaspasser,niderestersurdesbartementsstables,
ceRespu ES defairedu nouveauà toutprix,maisdelaisser
émerger
des
l'enjeu.
Cequisubsiste
del'aspect
improvisacif
c'est
wne
grandeliberté
dugrg s'agit
Fedirects
entredesforcesnouvelles
quiseprésentent
à nous
c'est
lasouplesse
depouvoir êtredansl'instantprésent,
toutenétans
f de,
mérejeumobileetintensif
dumonde présent
—dontnouspercevons
àlaforme quinousestdonnée. Etça,c'estuncadeaupourlesinterprète, rclsitnt lessignes,
maisquenousexpérimentons
eninventant
la
etenmêmerempsun partage
trèsriche.CeréquilibreestSuperintéressan façondelesexprimer. . -
exjenel'aijamais
crouvé
dansd'autres
musiques...
Je m'amuse
beaucoup
; La questionde l'élaborationsubjectiveestessentielle
dansces
jouercerte
pièce?!
mises
enœuvre.
Il s'agit
dedéplacer
leshabitudes,
deconstituer
de
nouveauxpossibleset de nouvellescontraintes,
et laquestiond'un
V. SUBJECTIVATIONS auto-référencement
est déterminante :dequellefaçonlessignes
misen
jeumetouchent-ils
?Quelespace
de
la représentation
etdelasensation
Sansdoute
les systèmes de signesmusicauxprennent-ils
toute
metcent-ils
enmouvement? L'élaboration
subjective
vadepairavecde
leurportéeavecla possibilitédeconstituerde nouveaux
champsde
nouvelles
intégrations
sensorielles,
cognitives
etsensori-motrices
qui
références
partageables.
Unedesconditionsdel'émergence
d'unSystème déjouent
l'ordredesperceptions et lahiérarchie
dessens.J'aiainsieu
designe
serait,pourlamusique,defairetenirunepratique
suffisam. l'occasiondemener uneexpérience subjectivante
avecdejeunes sourds
ment
investiepourqu'unprincipe
désirant
motivesarépétition,
qu'un
grâceàunensemble de dispositifs
sonotactiles
conçuspouruneréception
accrochage
pulsionneletsensori-moteur
soit suffisantpourqu'unjeu ysiquedesvibrationssonores". Cesdispositifs
seprésententsousla
deréciprocité
semette enplaceetsedéveloppedans
le cemps.Lorsque forme deTables etdeStations d'écoute
quipermettentd'entendre et
nousnoussommes aventurées,Deborah Walkeretmoi-même, dans
decommuniquer à traverslesmatériaux.
À ladifférencedel'écoute
l'élaboration
deChaoscaccia,unepiècepourvioloncelle accordé
lui habituelle,conduite parl'airetacheminéeparlesystème auditif,
ces
aussienseizièmes
deton”,nousavions privilégié
unprincipedifférent dispositifs
donnentaccèsàl'informationsonoreparlecontact.
Onpeut
etmême opposé àceluideCircleProcess,
reposant
cettefoisnonplus alorspercevoirlessonsaveclecorps'?.
surlatransition
fine parcontiguïté,maissurlaruptureetlesaut(shfe Monhypothèse étaitqu'unstimulus vibratoire
suffisantpouvait
process).
I]s'agissait
depasserleplusrapidementpossible
d'unétatàun permettre d'accéderauplaisird’unjeuderypemusical, individuel
ou
autre,
plutôt
àlafaçond’unmouvement deskateboard.
Nous avions collectif.
L'écouteparle toucher stimule
denouvellesreprésentations
alors
mesuré
commentl'articulation
decomposantes
hétérogènes
est
en sonoresetspatialesquimettent enquestion nosstandardsperceptifs
prise
directe
avecLetempsetcombien leraccordement estunecontrac: quantaux signaux sonores,habituellement
considérés
comme transmis
tionqualitative.
Conçueaufil d'unelecture
collectivedeChaosmose.
ns nousavionschoisicomme exerguedeChaoscaccia ceprincipeénonce —————

parGuattari
: «Cequiestimportant
surtout,c’estlalancéerythmique 15.Jbid,,p.27.
mutante
d’une
temporalisation
capable
defairetenirensemble
les 16.Pascale
Criton,
«Écoutes
sonotactiles
: propositions
pour
une
créativité
composantes
hétérogènes
d’unnouvel
édifice
existentiel"*,
»Eneflet. vibrasonore
»,in
J. Dautrey
etP. Beaucé
(dir.),Design
etpensée
ducare.
Pourun
design
desmicroluttes
etdessingularités,
Écolenationale
dedesign
deNancy,2019.
17.Pascale
Cricon,
«Listening
otherwise.
Playing
withvibrations
»,Proceedings
12.SilviaTarozzi,entretien
avecPascale
Cricon,Paris,1“mai2017.
IMC2014,
Athens,
2014,
p.1805-1809,
<htep://speech.di.uoa.gr/ICMC-SM
13.
Pascale
Criton
erDeborah
Walker,
«Chaoscaccia
:une
idée
diagrammatique 2014/images/
VOL.
2/1817.pdfs.
Chimères,
n°78,p.75-88;
l'enregistrement
deChaoscacria
estdisponible
enComp: Les
oreilles
àfleur
depeau,
vidéo
(13°),
réalisateurs
:Manon
Pietrzak,
Maxime
Disc: Pascale
Criton—Infra,Porlatch
P317,2017. A.Lucien
Richardson,
École
normale
supérieure
Louis
Lumière,
Labex
Arts
€tMédiations
Humaines,
2015,<http://www.labex-arts-h2h.fr/les-oreilles-a-fleur-
14.FélixGuartari,
Chaormose,
op.cit,p.37. de-peau.hrml>,
176 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECD'ELEUZE CircleProcess
: subjectivation
etprocessualité
musicale177

par
l'air. Noussavonsquelamusiquemetenjeubiend'autres
choses
queleson,commeparexemple
l'attention
temporelle
et gestuelle
Àcœrce
fin,ildeétait
mettant nécessaire
s'approprier de
les proposer uneélaboration
dispositifsPour
en sensorielle
jouercomme
avec
lavariation
dynamique,
l'articulation,
larépétition
etlaVariation Uninstrument,
seulou à plusieurs.Celle-cia priscorpsgrâceà leur
ou encorelesrelationspolyphoniqueset rythmiquesqui donner
inventivité
etleurparticipation
auprocessus
expressif.
Progressivement,
corpsauxéchanges àplusieursvoix.Sil'on gardeentête,Par
ailleurs lesacquisitions
$eSONT
élaborées
parlejeu,collectivement,
avecdes
quelesonestavanttoutunphénomène vibratoire,
il mesemblair échanges de rôlesconstants,afin quetouteslessituations puissent
légitime
desupposer quecertaines
desactions
propresàlamusique, êtreréciproquement éprouvéesparchacun.L'accentà étémissur
etleplaisirqu’elles
engendrent,
gardent
leursensdansunjeubass l'associativité
et les relaissensoriels,de l'actionà laréception,
du
surlesubstratvibratoiredu son.D'ailleurs,nousn’ignorons
pasces coucher
àlavue.L'autonomie
progressive
des
signesàétéobtenue
sensations,
etcomme nousenfaisons
l'expériencequotidienne,
de àdifférents
niveaux
decodage
:«nommer
»avec
lalangue
des
nombreusesvibrationsnousrenseignent
surcequisepasse autour signes,
«représenter
»grâceà despictogrammes, « noter»grâce
à des
denous,signalent
les événements
ambiants,bruitsdemachines,
pas, signes
denotationconvenus,«jouer»enrespectant desconventions
claquements
deportes. Lesignaldecesévénements dynamiques
e: gestuelles.
Un vocabulaireet un lexiquevibrasonores
ontainsiété
spatiaux
influeconsidérablement
surnotrecomportement,
enfonction progressivement
constitués.Ceséléments distinctsnousontpermis
deleurintensité,
deleurduréeetdeleurforme : chaqueévénement ensuire
d’improviser,
deréaliser
despartitions
«vibrasonores
»etde
vibratoire
a unprofilparticulier
selonlafaçondont
il serépète,
croitou présenter,
à unpublicsourderentendant,
les illustrations
vibrasonores
décroit,
estrégulier
ouchaotique.
Àpartir
decesréflexions,
je projetais créées
endirectdetroisfilmsd'animation.
lapossibilité
d'élaborer
Lareconnaissance
d’«empreintes
»vibratoires Cesdifférentesélaborationssubjectives,
qu'ellessoientlefair
comme basedesignaux perceptibles
etmémorisablesparlessourds. d'interprètes
exercées
oudepratiques
expérimentales
collectives,
onten
Au coursdelavisitedetroisadolescentes sourdes de
l’Institut commun dejouersurundéplacement
desrepères.
Cesexpériences
font
national
dejeunessourdsaulaboratoire
Lutherie
AcoustiqueMusique!!, appel
auxsensations
intimes,
à l'intégration
sensorielle
etmultimodale,
venuestesterlespremiersprototypesdedispositifs
sonotactiles
que àlaconstitution
d’uneécoutequin’estplusseulement
auditive
mais
nousavionsréalisés,
il estvitedevenuévident quelatransmission investie
d'unimaginaireeschésique
complexe.Cespratiques
d'auto-
vibratoire
pouvaitêtreuneapproche pertinente
pourelles,d'autant nomisationdessignes
reposentsurla(recompositiondesystèmes
que
les dispositifs
étaientéquipés
d’interfaces
(écrans
tactiles,
gamepud) d'énonciation
qui échappentà lastandardisation
dessignes. Les
permettant
à chacuneunepriseen mainrapide,avecnotamment
là fonctions
subjectivantes
rebondissent
entrelesigne
etl’affect,
l'éla-
possibilité
desedéplacer
dans
les fréquences
afinderechercher
leseuil boration
sensorielle,
motrice
etpsychiquedevient
unprincipedejoie
desapropresensibilité
: «Aveccesinstruments,
nousferonsdela qui,à ladifférenced'unestratification
préétablie,
donneaccès
à un
musiquesourde,
pourlessourds,
parlessourds!
»avaitdéclaré
l'une devenir-autre
etàladécouverte
d'une
transitivité
possible.
d'elles
avec
enthousiasme.
Nouspouvions
pressentir
là lespotentialités
d'unemusique
de«culture
sourde
». Par
la suite,
l'approche
pragma-
tiquequenousavons
développéeaprisappuisurcerte
mobilisation
active
dessourds
etleurdésirdejoueravec
les signesvibratoires”.

18.
Les
dispositifs
sonotactiles
Écourer
autrement
ontété
conçus
encollaboratio®
avec
Hugues
Genevois,
équipe
Lucherie
Acoustique
Musique
(LAM,
Imttut
Jean-le-Rond-d'Alemberr,
UPCM, CNRS, Paris).
19.VoirPascale
Criton,
ElsaFalcucci,
Hugues
Genevois,
Gabriela
Patino-Lakates
Frédéric
Brossier,
«Histoires
sensibles.
Uneexpérience
decréation
Vibrasonore
àl'Instite'
National
de
Jeunes
Sourds
»,Journal
de
Saint
Jacques,
n°43,
Paris,
INJS,
2014.P.
#
XIV

Enquoi
le capitalisme
est-il
uneaxiomatique
?

TATIANAROQUE

Deleuze
etGuattari
estiment
quelecapitalisme
procède
àlafaçon
d’uneaxiomatique,
c’est-à-direquelesévénements
s'yenchaînent
selonlesaxiomes ducapital.Qu'est-ce
qu'ongagne encompréhen-
sionàdirequelecapitalisme opère
defaçon axiomarique?Deleuze
et
Guatraris'efforcentdecomprendre lecapitalismecomme n'étant
ni
unedoctrineniune idéologie,etveulent
donc sortir
d’uneépistémé
qui
leconçoitcomme systématiqueouunifié,Leschangements dephase
ducapitalisme,
les passages d’unmodèle d’accumulationàunautre,
sontdesmoments oùseproduisentdesconflitsintenses.
Denouveaux
axiomes effectuent
La réinscriprion
dephénomènes déviants
dansles
limites
ducapitalisme,quipeuventêtreainsirepoussées.
Cemécanisme
devientplusclairlorsdusurgissement
dunéolibéralisme.Lefonction-
nement décritparFoucault dansLaNaissance delabiopolitique
peur
êtreinterprétécomme l'introductiond’unenouvelle axiomatique
:
laconcurrence et
l'entreprise modèlenttoutes lesrelations
sociales,
mêmecellesde l’État.Cela fut uneréponse
à labataille
politique
quiportait
surlesaxiomes
duwelfure,
réponse
auxmouvements
de
contestation
duxixsiècle.
Dans
l’axiomatique,
laquestion
dupouvoir
etdesformes
degouvernance
estprésente,
etconsiste
enunemanière
spécifique
d'agencer
les fluxdedésir.
Comprendre
lestechnologies
du
Pouvoirtoutenpréservant
la primauté
dudésirestlecraitsingulier
de
l'approche
deDeleuze
etGuattari.
Quels
traits
communs
entre
leur
analyse
ducapitalismeetlaméthode axiomatique
enmathématiques?
Rapprocher
politiqueetaxiomatiquepermet
d'expliquer
unfonction-
Nementensepassant de touteinstance
dedécision.
L'axiomatique
metenplace
desmodes d’intuition
qui
luisontpropres
:ellepermet
d'ajouter
etderetirer
autantd’axiomes
qu'ilestnécessaire,
elle
propose
180 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDeLeuzE EnquoiLecapitalisme
est-il
uneaxiomatique
? 181

une
remiseenordre,
maisseheurte
aussi
à cequiluiécha
lespropositionsindécidablesou lesensembles
Ppe,
nondé
Comme
C'esx
que
lapression
des
flux
dessine
encreux
lecapialisme,
mais
ilfaut
pour
nombrabj,. le réalisersouteuneintégraledesflux décodés,
touteuneconjugaison
généralisée
Ce sont
ces traitsqui intéressent
DeleuzeetGuatrari.
quidéborde
exrenverse
lesappareils
précédents.
Exeneffet,
quand
ils'agir
1.FORMALISATION/IMMANENCE
: pourMarx dedéfinirlecapitalisme,
ilcommence parinvoquerl'avènement
d'uneseule
subjectivité
globale
etnonqualifiée,
quicapitalise
touslesprocessus
LAQUESTIONDE
L'UNITÉDEL'ENSEMBLE de subjectivation.

Lecaractère
axiomatique
ducapitalisme
intervient
lorsqu'il
s:
è Ë É : agr Lesauteurs
montrent
ensuite,
en citant
l'/ntroduction
générale
àLa
dedécriredesrapportssociaux« axiomatisés
par
le Capital
»,los rique
del'économie
politique,
quecettenouvelle
subjectivité
sociale
que
les rapports
sociaux
étaient
déterminés
parcodage
ousurcodap, . KAstituedanslamesure oùil y aunfluxdetravail,d’unepart,
dans
les empires
archaïques.
Dansl'empire
archaïque,
lempe quin'est
Pasdéterminéparl'esclavage
ouleservage;
et, d'autre
part,
étaità unniveaudifférentdescommunes debases : il était
Jemais oùlarichesse
devient
capital pur,enn'étant
plusdéterminéecomme
desgrands travaux,lepropriétaire
éminent du
solet lecréateur dek foncière
oumarchande. Cesdeuxdevenirs font
intervenir biende
monnaie. Danscecas, l'unité formelle n'étaitpasaumême niveau
quele formalisé,
elle étaità unniveau supérieur, L'avènement d,
capitalismea unenature contingente'
et s'explique parlarencontr. c'estleurconjugaisonabstraite
enunefoisquiconstituera
lecapitalisme,
deprocessus historiqueshétérogènes,réinterprétés parnosauteur, fournissant
l'unàl'autre
unsujet-universel
etunobjet-quelconque.
Lecapita-
entermes dedécodages desflux(Auxdetravailetfluxdecapital, lismeseformequandleAuxderichesse nonqualifié
rencontre
leAuxde
fluxd'échanges).
CequeMarxdécritcomme autant dedissolutions travail
nonqualifié,
etseconjugue
avec
lui”.
de
l'organisation desmétiers, delastructure féodale, desformesde
propriétécommunale, del'exploitation
par
l'esclavage etc.Autantde Lerecours à l'axiomatique
répond à l'abstraction
desrelations
décodages corrélatifs
del'apparition
d'un«homme privé »,comme sociales,
quialieulorsquelessociétés
connaissentladécodification
des
support d’une
force detravail àlaquelleil peutserapporter comme codesreligieux,
sociaux,
politiques,
etc.Il s'agit
d'unvideproduir
par
possesseur,usagerouvendeur desonusage à unautre. Guillaume l'équivalent
général nécessaire
àladynamique del'argent.
Comment
Sibertin-Blanc?
amontré quecelasuppose touteunesérie deprocès rendrecomptealors desfluxquinecorrespondent plusàaucun
dedésocialisationdurapport aucorpsetdesvaleurs d'usagedeses territoire
existentiel?
Comment assurer laconjonction,
la gestion
ou
forcesetdesesparties.DansL'Anri-Œdipe estévoquéle décodage du l'exploitation
deslux ainsi
libérés?
corps par
privatisation
desorganes,cequirendmatéricllement possible
uncorpsproductif”. Ledécodage desfluxnesuffitpasàcristalliser I. L'AXIOMATIQUECOMME SORTIE
unmodedeproduction ouunrapport deproduction capitaliste” DE LA CRISE
DE L'INTUITION
Onarriveainsiàlaformulation deMilleplateaux :
L'emploi
del’axiomatique
sert
àsouligner
l'immanence
des
lois
capitalistes.
Lecapitalisme
n'aurait
pasdeprésupposé
extérieur
;
son
rapport
deproduction
estsonpropre
présupposé.
L'axiomatique
1.Basé
sur
lelivre
deMaurice
Dobb,
Érudes
sur
Le
développement
ducapualisns s'est
affirmée
effectivement
dansl’histoire
desmathématiques
entant
Paris,
Maspero,1969. quesoumission
desprocédés,
desgestes
ede l'intuition
mathématique
2.Guillaume
Sibertin-Blanc,
Politique
etÉtatchez
Deleuze
etGuatrar.
Essai
te
Lematérialisme
historico-machinique,
Paris,
PUF,2013,p.153. ——_—————

3.GillesDeleuze
etFélixGuarrari,
L'Anti-Œdipe,
Paris,Éditions
deMina 5:Gilles
Deleuze
etFélix
Guartari,
Millplateaux,
Paris,
Éditions
deMinuit,
1980,
1972,
p.166-170,p.249-250,
p,295. P-564-566.
Surl'indépendance
historique
desdeux
séries
etleurrencontre,
ilscitent
4.Jbid.,p.264. Étienne
Balibar,
inLire
Le
Capisal,
Paris,
Maspero,
1.
Il, p.286-289.
182 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECD'ELeUzE Enquoilecapitalisme
est-il
uneaxiomatique?
183

àdesprésupposés
vides,
desloisimmanentes
vidées
detout int, droite et plan, ne Sont pasrenvoyéesà l'intuition
intuitif. L'axiomatisation
estdistinctede la formalISation,
Conteny

notion
comme
elles
sontdéterminées
parunedescription
deleurs
relations
possibles
quiservirait
àcaractériserlesempires
archaïques.
L’aXiOmatiqueest
immanente parcequ'elleintervient
aumême niveau quece qu' Qécre
sur»,#ENÈTEPs©as Suussdhes
Unegéométrie devient
tout
jèmed'objets
entre lesquels
onpeutfaireapparaître
desrelations
axiomatise.
Celaest
clair dansl'entreprise
deHilbert,
quihaéu elle ant desaxiomes.
À quoiserapporterait
dans
laréalité
sensible
un
axiomatique
immanente
à partirdelaquelle
desdomaines
spécif,
se nombre
négatif
ousa racine
carrée?
L entrée
enmathématique
de tels
desmathématiques
puissent
êtrevuscomme modèles.
I] s'agit
F3 nombres
s’estfaiteparla construction
dediagrammes
(parexemple
proposition
complètement
différente
delaformalisation
logique
une douGauss)quiprenaient
cesnombrescomme des
segments
opèrepartranscendance.
La crisemathématique
qui.ouveee: _ orientés,
OÙdesvecteurs,nepossédant
passeulement
unegrandeur,
à peutêtredécrite
commeunecrisede
la définition
etdurôledel'intui. maisaussi
uneorientation”.
Lediagramme
est la foisexpression
et
tion. Desproblèmesrencontrés
àl’intérieur
desthéoriesintuitives, contenu,
il esquisseun réelà venir.GillesChâtelet,
ens'inspirant
comme cela sepassait
aveclagéométrie
non-euclidienne,
appelaient deCavaillès,
ditqu'ils’agitd’un«geste
».L'intuition
abstraite,
qui
l'utilisation
deprocédés
auxquels
dontonne
savaitpas
donner
raison détermine
lesgestes,ne fondepasdesnouvelles
entités
àvoir,mais
danslesensible.
Cesontdesprocédés
abstraits
quiacquièrent
peuàpeu denouvelles
visibilités
; nonpasdenouveaux
espaces
oùsemouvoir,
unprimat surleschamps
mathématiques
plusanciens,
etréorganisent maisdesnouvelles
mobilités.L'axiomatique
estimmanente,
comme
l'intuition
mathématique. Cavaillès
l’abienmontré,
parce
qu’elle
doitposséder
lemathématicien
quiseraalorsentrainé,en tantquepratiquant desmathématiques,
par
Il nes’agitpasd’undomaine
artificiel,juxtaposé
provisoirement
parla l'intériorisation
qu’il estcapabledefairedel'axiomatique
°.
technique
auxmathématiques
réelles,
fondées
surl'intuition.
Cesontensuite
les Dansle fonctionnement du capitalisme,lesaxiomes
deviennent
résultats
obtenus
grâceauxnouveaux instruments
quiamènent
à transformer immédiatement productifs,ont un sensopératoire
danslapratique,
toutlesystèmemathématique[...].Lesmathématiques
réelles
initiales
ne etneseprésentent pascomme des principes àappliquer.
Est-ce
que
sontplusqu'uncasparticulier
siruéauseindesmathématiques
nouvelles, cestransformations dansla manière defonderetd'écrire
lesmathé-
expliqué
parelles’. matiques,quionteulieutoutaulongduxix‘siècleerpendantune
bonnepartieduxx‘,ont
des rapports
réels
avec
lestransformations
du
Unpremier exemple vientdeLagéométrie.
Lesaxiomescaractérisent capitalisme
?Est-ce
quecetournantenmathématiquesadescorrélats
lesnotionssansqu'ilsoitnécessaire
derenvoyeràl'intuition
sensible. danslatransformation
desrapports
deproductionàlamême époque"?
On peutse passer
ducontenu intuitifdes notions,
lesens
étant donné Dansles deuxcasducapitalismeetdesmathématiques,il yaune
parl'axiomatisation
elle-même. À ladifférence
decelled'Euclide,
l'axio- libération
(ouunedécodification)del'expérience
(del'intuition,
matique deHilbertnefournitpasseulement unebase déductive,
elle
définitlesnotions
premières delagéométrie.Lesnotions primitives, 8.David
Hilbert,
Lesfondements
delagéométrie,
trad.
Paul
Rossier,
Paris,
Dunod,
1971
(original
enallemand
de1899),
p.11.
9. Pour une
explication
l'algébrique
:point
mobile,plusdétaillée
rrait, voirm
pointillé,
Aèche»,on
article
«Le
àparaîtrediagramme
dans
Francklibéré
de
Jedrzejewski
6. RobertBlanché,L'axiomatique,
Paris,PUF, 1955.DansMilleplateaux
&Jean-Cler
Martin,
Deleuze,
philosophe
desmulriplicites.
Deleuze
etGuatrari
listent
lesaspects
quilesintéressent
dansl'axiomatique
<
mathématiques
: l'indépendance
respective
desaxiomes,
la question
delasaruraion L 10. En traduisant dansl'abstrait
unacteintuitifdesmathématiquesnaïves,
dusystème,
l'hétérogénéité
desmodèles
deréalisation
etleurisomorphie
parappt En instaureaussilapossibilité
d’unenouvelle
expérience,
d'une
expansion
àl'axiomarique,
La question
despropositions
indécidables
auxquelles
seheure intuition,
uneintuitionabstraite.
Maisenmême temps,cen'estpasñimporté
l'axiomatique,
et finalement
la puissance
desensemblesnondénombrablesqu Quelle
intuition,
il fautqu'ellesuivedesaxiomesexistants
oùl'incroduction
des
Nouveauxaxiomes.
débordent
l'axiomatique.
Cesaspects
«fondentlaconfrontation
delapolitique
2%
uneaxiomatique»(p.569). F 11:L'axiomatique
pourCavaillès
implique
aussi
untravail
surlessignes
(comime
7.JeanCavaillès,
Méthode
axiomatique
etformalisme,
in Œuvres
compleiéi
# Cassou-Nogues
montre
dans
Del'expérience
mathématique.
Paris.
Vin,
2001).
philesophrie
dessciences
deJeanCavaillès,
Paris,Hermann,
1994,
p.46. #spect
peutêtre
exploré
enrapport
avec
laphase
sémiotique
ducapitalisme.
184 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDeLeUuze En quoilecapitalisme
est-iluneaxiomatique
? 185

dusens,
dudésir)
etcette
expérience
décodée
sera
soumise
àcon: Le td'abstraction
amplifiante
des
mathématiques,
liéau
gaisonparlemoyen d'uneaxiomatique. Fe “mentdesvirrualités
mobiles (denature
physico-mathématiques)
En fait,l'axiomatique!?dictecequ'estl'entendement enlaissan échappeà toutsystèmequi voudrait« boucler
unegrammaire des
cette
opération non-explicitée.
Il sevérifie,
par
la suite,
unenatural. çes
5».Undiagramme estalorsinvoquécomme
dispositifquipeut
tiondesrègles del'entendement. Quelque chose desemblable
seone sir cegesteauvol,lemettre
aurepos pourdéposer
uneopération,
par
danslecapitalisme, quiapparaîtàlafincomme présupposénaturel
L memple,maisenesquissantenmême temps
unautregeste.
Lemode
divin. Cavaillèsvoitl'axiomatiquecomme unemanière dedéfinir
erde d'exissence
dudiagramme
esttelquesagenèse
faitpartie
deson
être.
délimiter
cequ'est
l'expérience
enmathématiques.Lesmathématiques On
le voitdansl'exemple
desnombres
complexes.
Lediagramme
sontuneexpansion
del'expérience,
de sorteque
l'expérience
ordinaire n'illusrre
ni nesecontentedetraduireuncontenu
déjàdisponible.
Il est
negarde
aucune
spécificité
vis-à-vis
del'expérience
donnée
pardes hpossibilité
même del'expérience
enmathématiques,
même s'ils'agit
procédésmathématiques.Il nes'agit
pasd'uneexpérience
quelconque. d'une
expérience
abstraite.
Deleuze
etGuattari
notent
quel'axiomatique
elleestlecorrélatd'uneaxiomatique. Lesthéories
formalistes
es estuneremise
enordrequi«empêche
les fluxsémiotiques
décodés,
axiomatiques
nepeuvent jamais prétendredominer
4priorilesmathe- mathématiques
etphysiques,
defuirderoutesparts
»erles«grands
mariques
effectives.
L'extension
del'expérience
provient
d'expériences, axiomaticiens
sontdeshommesd'État[…]quicolmacent
leslignes
de
etdegestes
intérieurs
auxexpériences,
exigés
parunproblème
et qui fuite
sifréquentes
enmathématiques
».Onpeutdireainsi
qu'ilnes'agit
sedéveloppentdansdenouveaux signes
etdenouvellesrègles,
oude pasdemétaphore,
«cesont
les caractères
réelsdel'axiomatique
quifont
nouveauxaxiomes.Fonderlesmathématiques,c'estrendrepossible direquelecapitalismeetlapolitique
actuelle
sontlittéralement
une
desgestes,
retracer
lagenèsedel'espace
desgestes.
Comprendre c'esr axiomatique
* ».
Il y adesdécodagesdanslesdeuxcas,desmathéma-
«attraper
legeste,pourpouvoircontinuer»,continuer àfaire
des tiques
(auxx‘)etdesrapportssociaux
(àdestournants
spécifiques
du
mathématiques.PourGillesChâteler,
lesmathématiques sontune capitalisme).
Lesfluxainsilibérés
sontrepris
dansunfonctionnement
technique
desurgissement
de Lavirrualité
: quiréinsère
lanouveauté
dansLechamp
d'origine,
enétendant
d’un
même
coup
leslimices
ducapitalisme
oudes
mathématiques.
Desaxiomes
Lachose n'est
rienetn'existe
qu'entantquejelaprovoque,quejel'exaspére. nouveauxpeuventêtreajoutés
ouenlevés
autant
qu'ilfaut,
dumoment
quejeLarends exubérante.
Ungrandmathématicien engénéral nes'arrête quel'opération
garantit
unmodedefonctionnement quipuisse
sedire
pasaux«objets»il, saitlesprovoquer, lesmanipuler,
les faire
exploser encorecapitaliste
(danslecasdel'axiomatique
capitaliste)
oumathé-
Il nefaitqueçad'ailleurs!
(C'estdéjàbeaucoup!)
Il nefaurpascroire
qu'en matique(danslecasdel’axiomatique
mathématique).
mathématiques «ontrouvedeschoses»,qu'on«écablir
desvérités
»,cenes
pasvrai.Onfaitsurgir desvirrualités.
Erc'estpourquoi
la physiquemathe- III. LA SOCIAL-DÉMOCRATIE
marique estpossible
!*, ET L'AXIOMATIQUE NÉOLIBÉRALE

L'État-providence
fut unenouvelle
axiomatique
étendant
les
limites
ducapital
àtravers
laconjugaison
desnouveaux
fluxdécodés
12.JeanCavaillès,
Méthode
axiomarique
etformalisme,
op.cit.p.VO0.
13.L'axiomatique
constituelecapitalcommeprésupposé
naturel
oudiv
pendant
lesmouvements
ouvriers
duxix*etduxx siècles.
Dansun
C'est
Rodrigo
Guéron
quiadétaché
certe
caractérisation,
reprise
deMarx
parDekuis Cours
surFoucault'?,
Deleuze
reprendlathèse
deF.Ewaldendisant
etGuarrari,
ducapital
comme «uncorpspleindérerminé
comme sucius
».qu quelepassage
du droitcivil audroitsociala eulieuauxtx*àpropos
apparait
commeun« présupposé natureloudivin»(L'Anti-Œdipe,
op.15. L
Et ensuite
: «Lecapitaldevientainsiunétrebienmystérieux,
carsoutelestue ne

productives
semblent
naïrre
dans
sonsein
et luiappartenir
»(p.17).
Gueron
ubx®*< 15.
Hd,Les
enjeux
dumobile,
Paris,
Seuil,
1993,
p.32.
laliaison
decetaspect
àl'improduction
danslelivreAsrelaçoes
deDeleuze
e(usa 16.
Gilles
Deleuze
etFélix
Guactari,
Mille
plateaux,
op.
cit.p.576-577.
comMarx,àparaître. : 17.
Deleuze
surFoucault,
LePouvoir.
Coursdu8avril
1986,
disponible
sur
14.
Gilles
Chäteler,
«L'enchantement
duvirtuel
»,Chiméres,
n°2,1987,
P.0+S- hp univ-paris8.fr/dcleuzelarticle.php3/id_arcicle-478>.
186 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECD'ELEUZE EnquoiLecapitalisme
est-il
uneaxiomatique
? 187

: dedeuxpointsprécisl'accidentdetravailetledéveloppement
ki Comment
comprendre
l'opération
dupouvoir
àPartir
delaquestion
assurances.À partir
delà,cesera
lavie,beaucoup
plusqueledr: dudésir>Cela impliquede caractériser
lepouvoiroulesformes
de
civil,quivadevenir
l'enjeudesluttes
politiques,
quiseformuleron
: vernementà partird'uneopérativité
quiaideàvoircomment
le
travers
l'affirmationdenouveaux
droitssociaux: ledroitàlavie: L :alismefaitPRE . Le VE ee vsdésir
échappent
de
corps,
à lasanté,
aubonheur,
àlasatisfaction
desbesoins!®.
Lesna d'oùlecrait schizophrénique
société.
MaisDeleuze
et
depouvoirsenouerontdésormais autourdelasubjectivité
: delaÀ A fontintervenir
ledésird'unemanière
particulière,
parce
du travailleur,
de l'ouvrierblanc,mâle,âgéde35ansEnviron, sujet ueledésirn'estpasliberté,le désirn'estpasdirectement
lié àun
quideviendra
lepivotd’unehiérarchisation
sociale
dontdépendent mouvement d'émancipation?".
Ledésirpeurdésirer
cequilebloque,
lesrapports
depouvoiraveclesnon-blancs,
lesfemmes,
lesjeunes,
les etcelaparcequ’ilrésulted'uneproductionsociale,
demême que
vieux.
L'État-providence
s'affirme
àcemoment-là
comme
unecombi- l'inconscient.
D'où l'accentmissurlesrelations
sociales
comme
dispo-
naisoncomplexe
de techniques
d’individualisation
etdeprocédures siifsdeproduction
desubjectivité
etdedésir.
Lecapitalisme
estun
totalisatrices.
Lapolitiquesocialeconstitueralasociété
àtraversun mode defonctionnement
quidonnelieuàunecertaine
société,
àdes
processus
denormalisation‘?,uneforme depouvoir dontlreôleest
de particuliersdreelations sociales,etparlasuiteàdesmanières
garantir,
d'amélioreretdeconforter
les viesdetousetchacun. L'Étar. d'agencerle désirqui conviennentplusqued'autres. Lecapitalisme
providenceopèreunajustement dupouvoir politique
àunpouvoir negouverne pasle désir: il le conjugueet l’axiomatise,
Il rendles
pastoral
exercésurlaviedesindividusetétablir,
decettemanière,un fluxdedésirconvertibles, ou traductibles,
exactement comme dans
typespécifique
derationalité,
qui fouille
la subjectivité
Japlusintime, lemécanisme quifait fonctionnerlamonnaie. Lecapitalismeinstaure
endevenant
le mode
selon
lequell'Étatdisciplinaire
saisit
lasubjectivité desrelationsqui rendentplusintéressant pourledésird'allerdans
danslesrapports
depouvoir.
PourFoucault, il n'était
évidemmentpas unedirection
plutôtquedansuneautre, maisil fautpourcelaune
question
d'unpouvoircentralisé,
ni dedoctrine—ni derépression,
ni instauration
del’«intéressant
».Lanotiond'axiomatiquepermet de
d'idéologie.
Lepouvoir estdansuneformedenormalisation.
Ilopère répondre
àl’abstraction
desrelations
sociales
quia eulieuÀpartir de
parlamiseenplace detechniquesorientées
verslasubjectivité. laplus
grande
décodification
detoutes
:l'argent.
Certaines
sociétés
ont
L'appareil
théorique
foucaldien
changedefaçon importante
lorsque résolulesproblèmessociauxposésparcettedécodification
àtravers
ledésirestprispourpointdedépart,
comme chezDeleuzeetGuartari. l'établissement
decodesreligieux,
decodessociaux
oupolitiques
n'ayant
Rappelons cequeditDeleuze surlepouvoir
: pasdirectementuneportéeéconomique. Cescodesontétédéfaits,
pourdes raisons
historiques
etpolitiques,
quiontunenaturecontin-
Ceneserait
paslesdispositifs
depouvoir quiagenceraient,
niquiseraient gente.
Maisla dissolutionde telscodesa donnélieuàdenouveaux
consticuants,
maislesagencements
dedésir
quiessaimeraient
desformations
de fluxdedésir,dedifférentes
natures.Lecapitalisme
procède
àchaque
pouvoirsuivant
unedeleursdimensions.
Cequimepermettrait
de
répondre foisdefaçonàconjuguerles flux.Et celasansrecours
àuneforme
àLaquestion,
nécessaire
pourmoi,pasnécessaire
pourMichel
:comnvent
le quelconque
desur-gouvernement,sansinstance
supérieure
dedécision’.
pouvoir
peut-il
étredésiré
? Lesaxiomes
nesontpasdespropositions
théoriques,
nidesformules
idéologiques,
qui indiquentcequidoitêtrecruousuivi,mais
ils
indiquent
cequidoit êtrefai, Ils sontdes«énoncés opératoires
qui
18.François
Ewald,
L'État-providence,
Paris,
Grasset,
1986,
p.191. constituent
la formesémiologique du Capital,etquientrent
comme
19.Lanormeenquestion
n'arienàvoiraveccequ'unepersonne
peut
où1H!
nes
faire,maisaveccequ'elledoit êtrepoursefaireaccepter
pleinement
dansleréférentiel
dominant.
Lanorme
exige
uneexistence
dontladisparité
seprésente
comme
abertanié 21.Cela
est
expliqué
par
Anne
Sa dans
une
communication
enregistrée
à source
d'hostilités.
Leconcept
estemprunté
àGeorges
Canguilhem.
LeNormal
et# 2 Vidéo
:«Lelacano-marxisme
Den deGuattari
»,auColloque
Mai68
pathologique,
Paris,PUF,2005. 2 farantaine,
ENS,
2008,
disponible
sur
<www.canal-u.tv/video/ecole_normale.
20,«Désir
etPlaisir
»,letire
deDeleuze
àMichel
Foucaule,
datant
de1977.
lu “éPerieure_de_|yon/
26_le_lacano_marxisme_de_deleuze_et_de_guattari.4631>.
d'abord
dansLemagazine
littéraire,
n°325,1994. 22.
Gilles
Deleuze
etFélix
Guartari,
Mileplateaux,
op.
cit,p.576
188 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE En quoilecapitalisme
est-iluneaxiomatique?189

parties
composantes
danslesagencements
deproduction,
de Circu.
jealisme
actuel,
ensoulignant
qu'une
nouvelle
axiomatique
sedessine
lationetdeconsommation?». La social-démocratie
estmarqué
parunetendanceàajouterdesaxiomes
et lenéolibéralisme
àé a our
delaquestion
yction de
radicalela dette.
C'estimplique
del'axiomatiqueluiqui
a lemieuxexpliqué
quetous
les que
rapports
soustraire.
Depuis
lapremièreguerre
mondiale
etlarévolution
; S hr uxsontrenvoyés
àuneaxiomatique minimale
:«il fautpayer
la
desaxiomes
furentinventés
concernant
la classeouvrière,
j'ee Der Il affirmequel’axiomatique
àtrait aurapport entresouverai-
l’organisation
syndicale,
lesinstitutions
sociales
etlerôledel'État net et gouverneme ntalité.Dans
la crisedeladette,
ditLazzarato
:
Ensuite,aprèsladeuxième
guerre,
il y a euadjonctiondesnouveaux
: axiomes
pour
les vieux,
pour
les jeunes,
pour
les femmes,
ainsi
quele sise ément
crouver
desréponses
àcesquestions
les énonciaeurs
sont
planMarshalletdesformesd'aidesetdeprêts.Tour celaconfigure
la lesinscirutions
financières
etbancaires,
lesinstitutions
politiques
transnatio-
façonsociale-démocrate
demaîtriserleslux désirants
nouveaux
par nalesquiincorporent
les Étatscomme undeleurs éléments:ilsdéfinissenc
uneaxiomatisation
définissant
l’État social. desprincipes(rembourser lescréditeurs,
augmenter lesimpôts, couper
L'axiomatique
implique
deuxaspects, inséparables
l'undel'autre
. dans lesdépensesdeWelfare,assainir
lescomptes del'État,euc.)
d'oùl'on
l'aspect
macropolitique,
quiatraitauxappareils d'Étar,
et Quifournit déduitnécessairement
les politiqueséconomiques
erlagouvernementalité;
lesdifférentsmodèlesde réalisationde l'axiomatique;et l'aspect ilsconstituent
autantdefluxsémiotiques
quientrent
dans laproduction
au
; micropolitique,
quieffectue lacapitalisation
desformations
sociales même vicre
quelesfluxmatériels
ils changent
parcequel'axiomatique
est,
en
D'uncôté,
lecapitalisme
fait lagestion
desaxiomesàtravers
lesappareils réalité,
unepolitique
quiseconfronte
etsadapte
auxchangements
desituations?
.
d'État,enseservant
demoyenstrèsviolentss’illefaut,notamment
àdesmoments deprélèvement d'axiomes,comme lenôtre,
1]faur Lenéolibéralisme seconstruitàpartird'unnombre trèsrestreint
alors
réfléchir
surlerapport
entre lesappareils
d'État
et lesformations 'axiomes.Lazzarato
enénumère quelques-uns
:lesmarchés sont capables
sociales.
Danslaphase néolibérale,
cette
questiondeviendrad'autant des'autoréguler,lesréductions d'impôtspourles riches etpour les
plusclaire
quel’axiomatique
semble deplusenplusindépendantedes entreprises
sontproductives,lechômage estvolontaire,
la privatisation
formesd’État
spécifiques,
qu'ilssoient
sociaux-démocrates,
totalitaires estbénéfiquepour
tous,etc.Cesénoncés établis,
ilfaut
s'adapter,il faut
ousocialistes. faire
ave,il fautseconformer àcequ'ilsénoncenr. Cequ'on conçoit
Milleplateaux estécriten1980,momentd’une reconfiguration comme loisdel'économie, cesontenfaitdesaxiomes politiques.
capitaliste
importante.Lecapitalisme
n’ajamais
ététerritorial,
maisà Etc'est
làunecaractéristique importante del'axiomatique : elleest
cemomentil estclairquedesorganisations
mondiales,
dites
«œcumé- discrète.
Nonpasqu'elle aitbesoin desecacher, mais ellefonctionne
niques
»,gagnent unenouvelleconsistance
etdéveloppentunordre ensetransformant enprésupposé implicite.
Lazzarato observe que
économique
quipeut
sepasser
desÉtat
®.Parler
d'axiomatique,
c'est personne n’ajamaisdémontré quelaréduction desimpôts fasse
mettre
l'accentsurunfonctionnement
quise réalise
dans
desdomaines prospérer
l'économie, et pourtant
il s'agit
d'une «vérité»,d'unénoncé
très
divers,
quisontsesmodèles
deréalisation
:lesÉtats.
Cesmodèles quiimplique immédiatement unfonctionnement :réduirelesdépenses
exprimés
pardifférents
États,capitalistes
ousocialistes,
sontisomorphe sociales,
lessalaires,
quisemettent àfonctionnercomme desvariables
àl'axiomatique
qu'ils
effectuent#,
L'analyse
dutournant
néolibéral d'ajustement. Danslacrisedeladette, continue-t-il,lemodèle de
rendplusclairelafaçondontl’axiomatique
opèreenmême
temps
dans réalisation
del'axiomatique fonctionneavec unnombre encore plus
lesdeux
niveaux
des
formations
sociales
etdel'action
del'État.
Mauriziv réduit
d'axiomes: rembourser
les créditeurs,
réduiredrastiquement
les
Lazzarato
propose
unethéorie
originale
surlanature
sémiotique
du salaires
etLes
servicessociaux,
privatiser
l'État-providence.
L'axiomatique
fxPrimemieux
qued’autresdispositifs
lefonctionnement
ducapita-
etlesmodalités
desagouvernementalité,notamment
à l'heure
23.{bid,
p. 577.
24.Ibid. actuelle,
Ercelaaussiparceque,comme leditLazzarato,
elle nous
25.
Ibid,p.567. ne

26.Ibid,
p.568. 27.Maurizio
Lazzarato,
Gouverner
parladerte,
Paris,
LesPrairies
ordinaires,
2014.
En quoiLecapitalisme
est-iluneaxiomatique?
191
190 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECDeceuze

permet
decontourner
undouble
piège
: d'une
part,
elleévite
l'écuej
4 IV. CAPITALISM NO EXIT,
laréductionàunpouvoirpersonnalisé,
exercéparuncomitéd'afbir, THERE IS NO ALTERNATIVE!
et,d'autrepart,
la gouvernementalité
n'estpasnonplusréductib},
:
unpouvoirimpersonneletautomatique: : Remettretouteexpérience
nouvelle,
touteexpansion
dudésir,
dans
lefonctionnement
capitaliste,
enétendant
seslimites
àchaque
fois,
Lecapitalismevoudraitnousfairecroirequesonfonctionnement estassimil:b}, autantqu'ilfauc—voilà
l'efficiencedel’axiomatique.
Axiomatique
veut
àceluid'unautomate, qu'iln'existepasd'alternatives
précisément
parceque direimmanence deslois,maisaussipuissance
d'unification
àtravers
un
lemarché, laBourse,l'économie deladertesontrégispardesautomatisme, systèmedesignesdisponibles pourunecombinatoire.
Il s’agit
doncd'une
(etleursfecdbackscybernétiquesaurorégulateurs),que
les formes depouver. unificarion
quin'est
pasextérieure,
quinerevient
pasàune
formalisation
nementalitéfonctionnentdelamêmemanière, desortequ'ilneresterait
aux wranscendante.
Lafonction
del'axiomatique
estderendre
vrai
qu'il
n'y
populationsqu'às'adapter,
réduices aurôlede
variabled'ajustement. Lescour apasdesortie.
Cettesensation terrible
quenousexpérimentons
tous
delaBourse montentet descendent, etc'està lapopulation
derépondre àce, d'être
«sanssortie»,qu'iln’yapasd’alternative.
LeTINA,ThereIs
signaux
enadaptant,en temps réel,sescomportements àcesvariationscomm NoAlternative,
voicicequele fonctionnement axiomatique
garantit
et
lethermostat
réagit
àcelles
derempérature.
Lecapital
rêve
quelamachine rendvraienmême temps. Maisrevenons àl'aspect
micropolitique
de
sociale
fonctionne
àl'identique
d’unautomatisme
répétitif,
autorégule
er l'axiomatisation,
celuiqui
agitsurlesprocessusdesubjectivation.
Dece
dépolitisanc.
En réalité,
lorsque
desmécanismes
automatiques
fonctionnent. point
devue,
l’axiomatisation
estunefaçon
deconcevoir
l'expérience
c'est
toujours
àlasuite
d’une
victoire
politique
surlescomportements”. sanslesujet,
uneexpérienceabstraite
etl'axiomatique
a servijustement
àcaractériser
cetteSubjectivité
globaleetnonqualifiée
quicapitalise
Ni décisionnisme
subjectiviste
conspirateur,
niprocessus
automa- tous lesprocessus
desubjectivation.
Ledécodageestuneabstraction,
tique
sanssujet.
Lapolitique
capitaliste
procède
parsimplifications
: desfluxdedésirfuientpartouslescôtés,
maisdèsqu'ils
échappent,
ils
sontcapitalisés.
Ilsnesontpasrécupérés,ouappropriés,
comme onle
L'économie
deladette
seconstruit
pratiquement
autour
d'unnombre
rédun dirparfois,
cequirenverrait
à l’idéefaussed'unméchantcapitaliste
qui
d'axiomes
ettoutelacomplexité
estsubordonnée,
mobilisée
etfinaliséc
en s'approprie
toutcequenousfaisons debien.L'axiomatique
faitqueles
vuedeleurréalisation.
Elleutilise
cette
simplification
extrême,
pas
tellement fluxdécodéssontmisàdisposition
d’uneconversion,
d’uneconvertibilité,
pourcontrôler,
àtravers
sesaxiomes
restreintlesflux«déments
»ducapit d'une
traductibilité
oud’une
équivalence
générale
qui
estlacondition
de
argent,
véritables
causes
delacrise,
mais
pourdéfaire
etmaitriser
lesflux
du possibilité
delamonétisation.
Etceladans
touslesrapports
sociaux,
pas
welfare,
investis
erappropriés
parlesfemmes,
lestravailleurs,
leschômeurs seulement
ceux
quisontplusnettement
capitalistes,
comme les
rapports
lespauvres,
les jeunes
etc.
??, d'achat,
lesfinances
etc.On
vit sansarrêtaucroisement
desterritoires,
des
flux
codés
etdesprocessus
dedécodage.
Oncréeunechose,un
discours
L'axiomatique
caractérise
untypedefonctionnement
qui implique nouveau,
desénoncés,
une
certaine
esthétique;
etpuis
c'est
tout
desuite
naturalisation,
simplification,
actionintrinsèque
etparaméträfs transformé
ent-shirt
etvendu—etcela
dla
e manièrelaplussubtile
immanent
capablederemplacer
touteintuition,
ouplutôt,
capabk | Due n'ya là nulleconspiration,
comme
l'idée d'appropriarion,
defonder
desintuitions
nouvelles
enaccord avecl'axiomatique
di loisD ARR feraitcroire.C'estunecombinatoire
quisuit des
capital. ouvellemé ducapitalisme,
etquiproduit
lepe UneFer
mobilise nvocation
àl action
politique,
un
sloganissud'un
: nesttoutdesuiteconverti,
devient
traductible
entermes
de
us ps dans lesmesures
d'évaluation. :
unformulai
sspes
devient
unpapier
propre
àsefaire
comprabiliser
sur
28.Ibid, p. 134. à mpli pourmonuniversité,
quirenvoie
Àsontouraux
29.
Ibid,
p.124. ismes
d'évaluation
delarecherche,
àdes
indices,
àdes
nombres,

F
Enquoilecapitalisme
est-il
une axiomatique?
193
192 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

comme
les facteurs
d'impact,
oudes«grilles
»,quiinterviennenesi
ésir
à surunplandeconnexions
j'axiomatique pourqu'ils
ducapital, nesoient
c'est-à-dire
pour pas
nec
qu'ils onjugués
soient
pas
comme lemontreBarbara
Cassin *, Lacomptabilitéestlité,LÉPs
cetexemple,
maisellepeutêtreplussubtile,il suffitderappeler, vertis
nicapitalisés
?À partir
des fluxdécodésdelangage,
detravail,
conChess,nepaschercher unecompatibiliténi unecomptabilité,
networking
qui
s'opèredanstoutcolloque.
Etlepireestqu'ilnesuff,
pasdedire«jenesuispasàvendre».Ceténoncémême est venduÉ de; undiagramme, uneconvergence de
luttes etdedifférents
flux
désir? Pouravancer, ona besoind'institutions
pensées
àlafois
cher,onlesaitbienparcertaines
expériences
artistiques
radicales,
erÀ
même tempshautement marchandes. Cesenjeuxsont
difficiles
; ke entermes
stratégiques
et existentiels.
Il nesuffitpasdeprogrammes,
caril yaunesubrilitéconsidérabledanstout
ce processus,Onnemi comme ceuxquedéfinissent
lesmouvementspolitiques
traditionnels.
pasbienquelmotexplique lemieux l'agencementducapitalismeav, C'est
pour
fairecontrepoint
qu'onparle
dediagramme. L'axiomatique
nous: interpellation,
sollicitation,
capture,
récupération,normal, barre
lesfluxenlesrendant convertibles.
C'estpourcelaqu'ilfaut
tion,technologie
depouvoir ?L'axiomatiqueestunenouvelle ré desmouvements instituants
detypenouveau, qui
arriventàprendre
Il s'agit
d’uneabstraction
dedeuxième degré
parce qu’elle
fonctionne {a
création
d'axiomes
comme
terraindelutte
pourconnecter
les flux
comme une
relationdesrelations : unemanière spécifique
demers. autrement.
en rapportdesprocessus
qui sont
déjà relationnels,
unemanière
de
conjuguer
les fluxdécodésensortequ'ilssoientmisàdisposition
par
desloisimmanentes
vides,
c'est-à-dire
vidées
desens
etd'intuitions
La monétisation
desrapportssociauxestle corrélardeceprocessus
C'estlafaçon
même deconjuguer
les fluxpardesprésupposés
vides
Voilàceque
le capitalisme
ad’inavouable,
Comme le ditDeleuxe
onperddutemps ens’inquiétant
desderniersscandales
decorruption.
maisil suffisait
demontrertoutcequ'il a enmêmetemps delégale:
d’inavouable,comme les mécanismesdeprixquisontàl'origine
del,
définition
même de
l'argent.«Toutestrationnel
dans
le capitalisme
sauflecapital
oulecapitalisme*!.
»Pourcetteraison,laproposition
foucaldienne
quelenéolibéralisme
serait
unerationalité
sembleinsui.
fisante,
puisqu'elle
nerendpascompte deladimension irrationnelk
siprenante
ducapitalisme,
etencoreplusnettedanssaphaseactuelk
Denouvelles
questions
surgissent,
quirelèvent
plutôtd’un«comment
faire?»quedutraditionnel«quoifaire?»delagauche.Comment
brancher
le désirensortequ’ilnesoirpasinterrompu
dansuncorp:
social,qu'il produise
desénonciations
collectives
qui n'amènent
pa
àl'axiomatisation
?Comment
brancher
lesdésirs
surunmême
plan
debascule,
surunplanrévolutionnaire*??
Diagrammatiser
desflux
éc

30.Barbara
Cassin,
incroduction
aulivre
Derrière
Les
grilles
:sortons
dutout-évalwais"
Paris,Milleecunenuits,2014, .
one RSI
31.Gilles
Deleuze
ecFélix
Guartari,
«Surlecapitalisme
etledésir
»[19731.in

déserte
etautres
textes,
Paris,ÉditionsdeMinuit,2002,p.365-380. 33.
Voir
l'article
quej'aiécrit
avec
Maurizio
Lazzarato,
«Ruptures
subjectives
et
32.Félix
Guartari,
«LeCapialisme
Mondial
Intégré
etlarévolurion
molécule du tspolitiques: juin 2013auBrésiletquestions
decontinuité»,àparaître
LeLiensocial,
n°181,1992,
p. 1-9. larevue
RueDescartes.
XV

Énoncés
des organisations
depouvoir/idéologies
:
unedifférence
entre
laphilosophie
deDeleuzeetGuattari
etlapensée
deMarx

RopriGo GUÉRON

Quatredifférences
distinguentDeleuzeetGuattari
deMarxet
surtout
dumarxisme.Troisdecesdifférences
sonrexposées
parDeleuze
dansuncoursdu 28mai1973donnéàl'Université deVincennes.
Laquatrième
différence
estformulée parDeleuzedansPourparlers.
Lapremière
différence
avraità lamanière
dontlemarxismepose
les
problèmes
politiquesentermesde«besoin»,làoùDeleuze
etGuattari
préfèrent
les poserentermes
de«désir».D'après
cesderniers,
poser
lesquestions
politiques
entermes
debesoin
conduirait
àconstituer
desstructures verticales
de pouvoir,sousla formede«tribunaux
du
besoin» : desinstancesqui établiraient,
àpartird’unjugement
moral,
leprogramme politiqueénonçantcequi seraitou non«nécessaire »
auxhommes.La deuxièmedifférences'exprime danslacritiquedes
deuxauteursà l'encontredu rapport traditionnel établiparMarx
entreinfrastructureetidéologie(icipenséecomme«superstructure »).
Cequelemarxisme
nomme
«idéologie
»correspond
pourDeleuze
et
Guattari
àdes«énoncésd'organisations
depouvoir
»,quiappartiennent
1réctément
à lastructure
productive
ducapitalisme.
Latroisième
rencetientau mouvement
de récapitulation
quemetenœuvre le
Marxisme,mouvementqui accordeà lamémoire uneplacecentrale,
Sous
[aformedecequ'onnomme
habituellement
le«développement
; forcesproductives
».Enfin laquatrième
différence
s'exprime
dans
Afrmation
deDeleuze selon
laquelle
unesociété
sedéfinit
bien
plus
Parses
lignes
defuitequeparsescontradictions.
196 AGENCERLESMULTIPLICITÉSAVECD'ELEUzE

Nousavons
choisidenousconcentrer
surladeuxième
4
différences,
àsavoir,
cellequiconsisteàremplacer
ceque
le ma20 es paslaconscience
deshommes quidétermine
leurexistence,
c'est
au
ire ieurexistence
sociale
quidétermine
leurconscience?.
nomme «idéologie
»parles «énoncés desorganisations
deRo *
Lanouvelle méthode d'identification
desproblèmespolitiques
s "analyse
marxienne
ducapitalisme,
leconcept
d'«idéologie
»ne
Deleuzeet Guattariapparaîtemblématiquement
danslàné : Dans
Vusslenent laproduction
desavoir
parla«classe
Le »,
dont
ils posent,
dansL'Anti-Œdipe,
leproblème
dufascisme,
En<.
aie parlabourgeoisie,
maisbienaussilaproduction
artistique
le fascisme
et le nazismesonthabituellementidentifiés
comme 1
; culturelle
engénéral,
ainsiquecequel’onpourrait
provisoirement
« idéologies
»,desillusionsdont les« masses
» auraientétéie
È r icilaproductionou le«contrôle»d'informations
etderécits,
danslespays
d'Europe
oùcesderniers
sesontimposés,
C'est
pou
lemarxisme
tendengénéral
àsedemander
cequiafaitquelesDu assurés
principalementpar ce queMarx désigne
sousletermede
«presse».Il y a ainsiuneautonomie relative
delasuperstrucrure,
ontététrompées par
le fascisme;
cette
interrogation
s'étend
alors
aux
etdoncdel'idéologie, parrapport
àlabase
économique,
à l’infrastruc-
décisions
politiques
qui,auregard
de
la penséemajoritaire
degauche tureproprement dite.Or, pourDeleuze
etGuattari,
cequ’onappelle
sont
pensées
comme
autant
de«méprises
»etd’«erreurs
»commises
pa les«moyens decommunication »sontenréalité
desagentsdécisifs
lespeuples
;ceuxquisontdans
la position
d'«opprimés
» prendraienr
deproduction d’énoncés depouvoir.
desdécisions
favorables
àleurspropres
Oppresseurs,
auxgouvernements
autoritaires,
etc.Cettequestion
donneunéchocontemporain à[a
1.AGENCEMENTSET PRODUCTIOND'ÉNONCÉS
réflexion
deSpinoza
dansle Traitéthéologico-politique",
telle
qu'elle
estici reformulée
parDeleuzeetGuattari: « Pourquoi
les hommes Leconceptd’«agencement», créé en1975 parDeleuze
etGuattari à
combattent-ils
pour
leur servitude
comme s’il s'agissait
deleursalur?
. l'occasion
de
leurlivre surKafka,er devenu crucial
dansMilleplateaux,
PourDeleuze etGuattariil nefautpassedemander pourquoi
et vientenquelquesorteremplacer leconcept de«machinedésirante»si
commentle fascisme et/oulenazisme auraient maintenulesmasses important
dansL'Anti-Œdipe. Le«désir»continue cependant d'être
dansl'erreur
etdansl'illusion,maiscequilesàfait«désirer »cela. icicentral,
puisque l'agencement secaractérise
avanttoutcomme un
Cettequestion,
c’estlepsychanalysteWilhelmReichquil'aposée en «agencement machinique dedésir».Dansladeuxième synthèsede
pionnierdanssoncélèbreouvrageLaPsychologie demassedufascisme l'inconscient
décritedansL'Anri-Œdipe, onvoitdéjàapparaîtrele
» Foucaultsoutient
lui aussi
queleproblème dupouvoir nedoitpas
être conceptde«machine sociale: il s'agitd'unagencement d'ordre
fondamentalement poséentermes d’«idéologie »,parce
qu'unerelle physique,
corporel,maisquiconstitue égalementunemachine sémio-
notion
présuppose
uneconception
du«sujet
»doté
d'une
«conscience
», tique,
c'est-à-dire
unagencement
dénonciation.Nousavons
làlesdeux
propre
à laphilosophie
classique
etdevenue
obsolète. pôles
d’unagencement,
cartoutagencement
«estàlafois,etinsépara-
Examinons
lamanière
dontMarxlui-même
décrit,defaçon
synthé- blement,
d'unepartagencement
machinique,
d'autre
partagencement
tique,cequ’ilappelle
idéologie
: d'énonciation?
».Celasignifieque
lorsqu'unagencement
seproduit
matériellement,
il semetd’une
certaine
manière
à«parler
» :lemode
Danslaproduction
sociale
deleurexistence,
les hommes
nouent
desrapports d'organisation
matériel
(lesrapports
matériels
deproduction)
dela
déterminés,
nécessaires,
indépendants
deleurvolonté;
ces rapports
deproduc- machine
socialeseconstitueetopère
lui-même commeun«signe».
tioncorrespondent
àundegré donnédudéveloppement deleurs
forces Pourutiliser
unvocabulaire
courant
chezleslinguistes,
onpeut
dire
productives
matérielles.
L'ensemble
decesrapports
formelastructure
écons- que,
dans
l'agencement
machinique
pensé
comme
machine
sociale,
miquedelasociété,
lafondation
réelle
surlaquelle
s'élève
unédifice
juridique
etpolitique,
etàquoirépondent desformesdéterminées
delaconsciente ms

sociale,lemodedeproductiondela viesociale,politiqueetintellectuelle. 2.KarlMarx,Critique


del'économie
politique,
inŒuvres
économiques
1,Paris,
' als «LaPléiade
»,1963,
p.272. |
apanDeleuze
ecFélix
Guatrari,
Mille
plateaux.
Capitalisme
esschizophrénie
2
1.Baruch
Spinoza,
Traité
théologico-politique,
trad,
de].Prat,
Paris,
Alia,
2015.
P.À deMinuit,
1980,
p.629.
Énoncésdesorganisations
depouvoir/idésologies.…
199
198 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

il y a d’uncôtéune« formede contenu»,etde


l'autre, àsOnpôle ceaux
déterrivorialisations
etdécide
quand
ilpeur
ounon
libérer
lesséries.
Ledespote nedissimulejamais
sonvisage.
Certes,
opposéqui«énonce»quelque chose,une«formed'expression
,
lemaquiller,il peutportermilleetunmasques,
expressions,
DeleuzeetGuattari
identifient
icipluslargement
unproblèmequ'il
il peut ormances
du corps,mais
il nesecache
pas.Il s'efforce
qualifient
de«tyrannie
dusignifiant
»,résultant
d’unePrédominance
delaformed'expression
surlaformedecontenu, c’est-à-dire
d'une r enlui lespuissances
deconcentre dufaux,bienqu'elles
puissent
se
prédominance dessignifiantssurcequ'ilssontcensés«désigner
. manifester
n'importe oùetfinirparluiéchapper.
Concentrer
ensoi
Le « régimedesignes»signifiantseseraitconstitué
comme
l'un L issances
dufauxestl'opération
même
dupouvoir
quiconcentre
les
LeLaproduction,
etparconséquent
l’anti-production,
le «contrôle
régimes
majoritaires
enOccident,
bienqu’un
régime
n'opère
jamais
seul
etquelesrégimes
soienttoujoursmixtes,
Lerégime
signifiantentraine &u roduction
»,comme diraient
lesmarxistes.
uneformed’assujettissement
desautresrégimes;
il estconstitutif
del; ou lesénoncés
depouvoir,
il yabiendumensonge,
mais
presque
forme-État
elle-même,
bienque
l'État
nedoive
pas
être
considéré
comme desecret.
Tout aupluslepouvoirs’abstient-il
dedissimuler
l'exis-
uneréalité
exclusive
del'Occident.
Quoiqu'ilensoit,la«forme-Étar rence
dusecret;
il tientmême
à montrer
qu'ilcache
quelque
chose.
Le
trouve
ici sonpôlesémiotique
enmême temps qu’elleseconstitue mensonge
expliciteestla manifestation
ostentatoire
dupouvoir,
l'une
commemachine
sociale, à l’autrepôledecetagencement.
Entre
la deses
plusimportantes
opérations
d’intimidation.
Lalignedefuite
du
production
sociale
etledespote-État
setrouvent
lesprêtres
magiques, régime
signifiant
coïncideengénéral
avecleboucémissaire,
aveccelui
lessages,
lesbureaucrates: ceuxqui«interprètent»,la«lettre
dela quisera
puni,sacrifié
: ledémon
paropposition
auDieu(Dieu-despote),
loi».C'estpareuxquetoutelaproduction sociale
estattribuée
au lamenace
qui
doit êtreéliminée,
lemarginal,
lecriminel,
lesubversif
«despote-État»,auquel ondoitlavieetquiestmaître delamor: quidoivent
être exemplairement punis.Cette
ligne defuicepourrait
extrêmeplus-valuedecodequifairdudespote lemaîtreàlafois
dla
e également
avoir uneposirivité,
commeforce créatricequiselibère
de
production
et del’improduction -—del’uneenvertudl'autre.
e Cequi L tyrannie
dusignifiant,
instaurantuncertain rapport
d'horizontalité
estappelécouramment «langage »parlessciences
occidentales
dans entre
formed'expression
etformedecontenu, ainsiqu'uneformetoute
leurmajorité,
tendàs'identifier
exclusivementauxcaractéristiques
de provisoire
deplurivocité
entredessémiotiques distinctes.
ce«régime signifiant
».Dansl'actionde«stocker»sibiendécrire
par Enrevanche,
dansunrégime
post-signifiant,
certe
lignedefuite
prend
Marxcomme fondatrice
del'État,
il nes’agit
passeulementdestocker unsenspassionnel
er autoritaire.
Il n'yaplusuncentredesignifiance,
desbiens
et desrichesses
matérielles,
maiségalement
destocker
ce qui mais
unelignequiéchappe etinstaure unprocessusdesubjectivation
doitêtre«déchiffré»,donnant naissanceàuneclassequipossède
un conduisant
àlaconstitution
d’un
sujet. Enlieuerplaced'unerelation
telpouvoir.C’estpourquoi l'apparitiondel'écriture
estuneforme
de signifié-signifiant,
c’est
unsujetd’énonciationquis'instaure,
seréférant
«stockage»,toutcomme l'opérationmagique quidéfinit
lemonopole d'emblée
à un sujetd’énoncé,lui-mêmeimmédiatement
rabattu
sur
delaviolence parl'État. lesujet
d'énonciation.
Lafuitehorsd'Égypte
dupeuplejuif,décrite
Seconstituealorsunprocédé où
le signerenvoietoujours
ausigne, dansMilleplateaux
commele paradigme durégimepost-signifiant,
etcelaàl'infini,paruneforme deredondance quirend àmaintenir témoigned’untelmouvement. Cetteformedréciprocité
e entrece
tout
le réelenclos dansuncercle vicieux
d’interprétations.
Toutes
cs AUseresponsabilise
etcequiestresponsabilisé,
commence dansle
interprétations
sontrenvoyées àun«centre »qui
fonctionne commeun Judaïsme
paruneidentificationentreDieuerl'Homme —identi-
«signifiant
majeur»,etsecharge degérercette
expansion.C'est
pourque! an quiserapoussée à l’extrême
par
le christianisme.
Dansles
laconstitution
d’une «visagéité»estfondamentaledanslamiseenplace tionslimitesqueconnaîtlepeuple juiflorsdesatraversée
du
durégimesignifiant.Cettevisagéité estLevisagemême dudespoe: Fo 7 R d'abandonner
Moïsec'estmenacer
d'abandonner
celui-ci
opère comme uneformed'expression oùtouslessignilan® . die destin,et trahirMoïse,c’estenmêmetemps
trahirDieu
seterritorialisent.
En unsens,
c’est lecorpsdudespote routentie1 me r soi-même.Commenousl’apprend Nietzsche,
|instaura-
prendLadimension d’un«visage »oud’une«visagéité ».Etcet ainsi cn unefaute estenmême tempsl'instauration
d'une
conscience
:
qu'ilcentralise
lesséries
signifiantes,
qu'illesattireroutes
àlui,fixe
uné Parellequeseconstitue
lesujet.
Deleuze
erGuattari
établissent
200 AGENCERLESMULTIPLICITÉSAVECDeLeuze Énoncés
desorganisations
depouvoir/idésologies.…
201

une
sortedegénéalogie
decerégime
post-signifiant,
quiaboutit nt».Ainsi,ladettevis-à-vis
del'Écat
erladette
vis-à-vis
«“
ie secombinent parfaitement
danslecapitalisme,
parune
cogito
cartésien
età l'impératif
catégorique
kantien.
L'identifiez,
*
Dieu-homme, Homme-Dieu ettoutes
lestrahisons
et lesmenaces
d desoi”! efficace
quivide ledésirdetoutcontenu,
qui«destitue
le
trahison,sontportéesà leurlimiteen un législateur-sujer
quide PEon
Fe
être
objectif
ailleurs,
».
il y à deuxautresformes
derégimes
designes,
deux
qu’àlui-même.
«On à inventé
unenouvelle
formed'esclavage
a.
esclave
desoi-même,
oulapure“raison”,
leCogito‘,, |]y2làee deconstitutiondesagencements
sociaux,
sachant
queles
formed'identification
entrelaréalitémentaleetlaréalité
dominante cementssont toujoursmixtes,et quaucunn'estconstitué
par
agen
Obéiràla«raison»—Raison-Dieu —ouaux«universaux »,c'esobéir unseulrégime
designes.
Cesdeuxrégimes
sontnommés
«régime
àsoi-même. LouisAlthusserauraitperçuavecjustesse lemode È pré-signifiant » et « régimecontre-signifiant
».Le premiersemble
; constitution
dusujetendécrivant leprocessus socialquiproduit
ce r presquesymétriquement
au régime
signifiantil leconjure,
s'oppose
qu'ilappelle
uneinterpellation
: «Hé,vouslà-bas!»MaisAlthusse, delamême
manière
quepourPierre
Clastres
certaines
sociétés
dites
nevoitpasque
le sujetlui-même neconstitue enréalitéqu'unrégime «primitives
»conjurent
la formation
del'État.Lathèse
deClastres,
designesdéterminé,
etparconséquent unagencementsocial. reprise
etprolongée
parDeleuze
etGuattari,
estquelessociétés
sans
Defait,pourDeleuze etGuartari,
il n'existe
pasdesujet,maisseufe. Ératconnaissent
déjàl'État,ou du moins
le pressentent,
avantmême
mentdes«agencements
collectifs
d'énonciation
».Lasubjectivation
es qu'ilneseforme,et empêchentainsisaformation.Dans
le régime
l’unedesformesparlesquelles
sedonnel’énonciation,
maisc'est
loin pré-signifiant,
lesformesd'expression
neprennent paslepassurles
d'être
laseule.
Ainsi,outrequelesujetn'estpasundonné
- ilest
donc formesdecontenu.Il n’ya doncpasderéduction àunevisagéiré
toujourssocialementconstitué—certainsagencementsmachiniques
et commesignifiant centralauqueltouslessignesseraient
renvoyés.
sémiotiquesprécèdent
l'existence
detout
sujet,etvontjusqu'à coexister Lafaçonspécifique
dont
les formesdecontenu erlesformesd'expres-
endesrégimes mixtes avecdesagencements
desubjectivation.Avant le sions'entrecroisent
ici, en seterritorialisant
et ensedéterritorialisant
sujet—qu'ilsoitsujetd'une«conscience»oud’une«idéologie . -ce lesunes
danslesautres,
garantit
laplurivocité
decesystème
oùdes
qu'ontrouve,c'estun«agencement». End’autres termes,
le processus formes
decorporéité,
degestualité,
dedanse
etderythme
coexistent
quiconstituelesujetestd'embléeéconomique.Il estantérieur
àtout avec
laforme
vocale
proprement
dite.
cequiest«idéologique »etnesecrouveenaucune autreinstancequi Laquatrième
sémiotique,
la sémiotique
«contre-signifiante
»,
puisse
êtrequalifiée
de«superstructure
».Lecapital lui-même apparait quelque
peuénigmatique,
opèrepar«arithmétique
»etpar«numéra-
àcetitrecommeun«pointdesubjectivation parexcellence»,qui tion».L'usage
dusigne
numérique
diffèreicidesonutilisation
par
produitun sujetsupposéautonome,un jugequise jugelui-même, l'État,
quisesertdesnombres pour«représenter
»oupour«signifier
».
d'autantplusassujetti
à unecertaineéconomie libidinale
quecette Lastratégie
nomade utiliselesignenumérique
demanière
immanente
économie sejoueenuneautreinstance que
celle delaproduction aumarquage
quil’institue,
eneffectuant
unerépartition
plurielle
et
économique. L'apparitiond’unsujetetd’uneconscienceest,en
ce mobile,
enétablissant
descorrélations
etenprocédant
àdesarrangements,
sens,leprocessus
d'intériorisation
d’unedette;une
telle opération
est des
coupures,
desdéplacementsetdesmigrations.
Un
tel rapport
aux
elle-même décisive
pourlaconstitutiond’une«detteimmanente » nombres,
quinepassepaspardes«cotaux
»oudes«unités
»,constitue
ducapitalisme.
Ellecorrespond
àl'intériorisation
d’une
faute.quiest un. stratégique
décisifdelamachine
deguerre. |
socialement
produite
toutcomme
l'ancienne«dette
transcendante
1 … Dans
leuractepolitico-philosophique
contre
la«tyrannie
du
l'égarddu Dieu-Despote-État
(encoreactivedanslesrapports
sou signifiant
»Deleuze
etAt ser lacritique
desdifférentes
capitalistes),
maisquis'endistinguent
justement
parsoncarisléte *Images
delapensée»,déjàprésente
chezDeleuze
avantsarencontre
2vec
Guattari.
Lesdeux
auteurs
s'attachenc
alors
àdéconstruire
cequ'ils
4.Ibid,p.162. in appellent
les«postulats
delalinguistique®
»,dans
le chapitre
deMille
$.LouisAlthusser,
«L'Idcologia
etl'appareil
idéologique
d'Évat
».
in /!at me

Paris,
Éditions
sociales,
1976,p.128. 6.GillesDeleuze
etFélixGuartari,
Milleplateaux,
op.cit.,p.95.
Énoncésdesorganisations
dePouvoir/idésologies.
+ 203
202 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

plateaux
quiprécèdeimmédiatement
celuisurlesrégimes
deù. a maisaussideconjurerlesujet: laconscience
quitriomphent
Cesposrulats
sont
les suivants
: es, àeuxdansle régimepost-signi ant. |
uantre présupposition
réciproque
entreexpression
et contenu,
décou-
1)Lelangage
serait
informatif,
etcommunicatif.
2)
11yauraitunesde É Es mslev,
aétéRe décisive
pour lecture
deleuzienne
abstraice
delalanguequineferaitappelàaucunfacteur
«cxtrinstque deFoucault.
Dèsl'Archéologie
4savoir
(1969)°,
Foucault
décrit
les
3)Il yauraitdesconstantes
oudesuniversaux
delalangue,
quipermet, nsentrele «visible»—conçuaussi
comme «non-dicible
»—et
dedéfinircelle-cicommeUn système
homogène.4)On nePourrait
étudie,
rapp°
cable»,pensés comme deuxtermesirréductibles
l'un
à l'autre,
scientifiquement
la langue
quesouslesconditions
d'unelangue
majeure
ou l«bis en relationde présupposition
réciproque.
Puis,dans
standard. né ler etpunir(1975)?,le visiblerevêtunedimensionpositive,
formedecontentquicorrespond auxenvironnements carcéraux,

Cesquatre
postulats
sont
le produitdesdeuxrégimes
deSignes oùl'énonçable,
formed'expression, correspondauxénoncéssurla
prédominants en Occident : le « régime
signifiant »et
le «régime délinquance.
Ladistinction
profonde existant
entre
cesdeuxformes,
ne
post-signifiant
». Ils dessinentunesortedestructureautonomedy lesempêche
pasdecommuniquer constamment entre
elles.C'estpour
langagequi tendà le viderde routematérialité.Pourtantc'est
au mieuxcernerlesmodalitésde certecommunication
queDeleuze
moyend'unealliancescelléeaveccertainslinguistesque les deux insiste
surleconcept
dediagramme
proposé
parFoucault.
Si, dans
auteurs
s'opposent
à cespostulats
delalinguistique.
Cesalliés
sont
en l'Archéologie
dusavoir,Foucaultabordelesstructures
depouvoir
comme
l'occurrence
ceuxquiontsurelever,
aumoinspartiellement,
danske desmachinesconcrètes,encoredécritesà l'échelledesformations
théories
linguistiques
deleurspairsdesproblèmes similaires
àceux
que historiques,
à présent
lacomplexité
delacommunication
entre
ces
soulèvent
DeleuzeetGuattari.
Il s’agit
iciprincipalement
deMikhal instances
inter-communicantes
etindépendantes
—àlafoisdistinctes
BakhtineetdeLouisHjelmslev.Bakhtineintroduitenlinguistique etenprésupposition
réciproque
—quesontle visible
erl'énonçable
le
l'idéedeplurivocité.LouisHjelmslevdéfendune«solidarité
»entre conduisent
àmettreaujourunplanabstraitoùlepouvoir estdécrit
l'expression
erlecontenu,
etmontre quetousdeuxsesituent
dans
un entermes
de
stratégies.End’autres
rermes,
Foucault
en vientàdécrire
rapport
de«présupposition
réciproque
»: lepouvoir
àl'échelle
desmouvements microphysiques,
desdevenirs,
desopérations
moléculaires,
c'est-à-dire
sur
le plan(parfaitement
réel)
Lafonction
sémiotique
estenelle-même
unesolidarité
:expression
ercontenu duvirtuel.
sontsolidaires
etseprésupposent
nécessairement
l'unl’autre’. Lediagramme
oulamachine
abstraite
estalorscequifaitsigne
vers
uneréalité
plusprofonde
que
les deux
faces
del'agencement,
Cette réciprocité
permetdefairel'expérience
d’unrégimede signes toujours
enrapportetenprésupposition
réciproque.
Lamachine
pré-signifiant
danstoutesaplurivocité,paruneopération stratégi- abstraite
traceunplandeconsistance
oùonnepeutplusdistinguer
quementliée àlapuissancemême dla
e pensée —etnotamment deli entre
leplandel'expression
etleplanducontenu.
Elle produit
et
philosophie—entantque
cettepuissanceestassociée
aufairdererrouver conjugue
à la foislesdéterritorialisations
d’unagencement,
etopère
laviemême comme «production»,comme autopoiésis.
I yalàune œqu'onpeutappeler
unediagrammatisation.
Leprocessus
àl'œuvre
opération éminemment politique
etétroitement
liée àl'affirmation nestautreque la constructiond’unenouvelleréalité,etcelle-cise
deDeleuze etGuattariselonlaquelle,
avantcoutlangage,
il ya une déploie
précisément à mesureque
le diagramme accueille
les pointes
politique.Estpolitique,
aumêmetitreque l'opérationdeconjurer extrêmesdesprocessusdedéterritorialisation.
Unemachine abstraite
le triomphedu signifiant,uneopérationpourconjurer
le criomphe tend
même
à distribuer
danscesstrates
denouvelles
formes
d'expres-
del'Éta. Cependant leproblèmen'estpasseulementde«conjurer
- Sion
etdenouvelles
formes
decontenu.
Avec
lediagramme
se crée
une
me

7.LouisHjelmslev,
Prolégomènes
à unethéorie
dulangage,
Paris,
Éditions
de : MichelFoucault,
L'Archéologie
duSavoir,
Paris,Gallimard,
1969.
Minuit,2012,
p.66-67. +I, Surveiller
etpunir,Paris,
Gallimard,
1975.
204 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDeLeuze

nouvelle
réalité
;onnepeut
y distinguer
la formeetleContenu
pa
quechacun,danssonprocessus sh à est entré
dedéterritorialisation, dace XVI
l'autre.
L'écriture
peuralorsêtreenpleine adhérenceavec leréel,
a
réelpeuttraceruneécriture.
La notiond'idéologie,commelefaitapparaître ladescription
desdeuxrégimes designes prédominants, présuppose desrapports Perspective,
cadre,
philosophie
:
sociaux deproduction etdesagencements depouvoir décisifs
dans la peintured’aprèsDeleuze
laconstitution ducapitalisme proprement dit. Laforme «part,
constitue unagencement similaire
à l'organisation
delaProduction
danslecapitalisme, enparticulier
àl'organisationdutravail dans
le
GREGORY FLAXMAN
capitalismeindustriel
:àl'opposition
entre lesingénieursetlesgérants
d’unepart,eles
t travailleursetemployés d'autrePart,corresponden
icicelledesdirigeantsetintellectuels
d’uncôté,etdesmilitants de
l’autre(travailintellectuel
contretravailmanuel).Leconcept d'idéo-
logiesertà délimiterl’espacedes« politisés» et tendà fermersur
PourDeleuze,
leconcept
deperspective
appartient
àdeux
histoires
- l'histoire
dela philosophieetl’histoirede
l'art, Nousserions
tentés
elles-mêmes lesorganisations
politiques.
Carcesorganisations
n'ont
d'en
conclure
quelaperspective
estun«concept pourphilosophe»,
decessedeproduire l'énoncé«noussommes ceuxquis'yconnaissent
alors
quec'est
unepratique
ouunetechnique d'artistes,
Maiscepartage
enpolitique»: nousavonsune«conscience politique
».Deleuze,
dans
nousapparaît
déjàtropréducteurpourembrasser
les complications
l'unedesesinterventions endéfense dumouvement demai1968,
perverses
delaperspective,
lesrelations
incestueuses
entre
l’artetla
expliquequ'encertainsmoments cequ'onappelle habituellement
la
philosophie
(présentées
comme«deuxdesfillesduchaos »)!,etles
politiquesereferme,enprenantlaformed'unpouvoir, qu’une
force
profondeurs
vertigineuses
dans
lesquelles
Deleuze
entraîne
leur
couple.
detransformation politiquenesauraitvenirquedudehors de ce
‘où,
dans
Différence
etrépétition,
Deleuze
formule
leperspectivisme
territoire
closdelapolitique.Comme si le devenir-révolutionnaire
ne
philosophique
selondeslignesquenouspourrions
tenir pour
esthé-
pouvaitcommencer queparles«dépolitisés »,oùmême - pourquoi tiques,
àlafoiscommeunart(unetechnologie comme pratique)
et
pas?—les«désidéologisés».Ledésirpolitiqueexploserait
enpremier
un
type (une
lignéecomme genre).
«Il yauneexpérience
cruciale
de
lieud’une
façon
présignifiante,
pleine
deplurivocité
—donc
aussi ifférence
eruneexpérience
correspondante
: chaque
foisquenous
antérieurement
à laconscience
etdemanière
pré-idéologique.
Nous RouS
trouvonsconfrontés
ou liésparunelimitation
ouuneopposition,
indiquons
doncpour
finir troispistes,
troisoutilspossibles
pour nousdevrions
nousdemandercequ'unetellesituationprésuppose
»,
l'actionpolitique.
Il s'agit: 1)deposerlesproblèmes
politiques
en écrit-il,
«CelaPrésuppose unessaimdedifférences,
unpluralisme
termesdedésir;
2)de
fairel’expérience
durégime
pré-signifiant
et& différences
libres,sauvages,brutes,
unespace-tempsproprement
s'installer
danssaplurivocité;
3)desavoir
comment
le pouvoir
opère
différentiel
eroriginal; toutcequipersiste
le longdessimplifications
à partirdecequenouscomprenons
comme« machine
abstraite
»€ delalimitationet de l'opposition?.» En faced’unesituationqui,
*diagramme
».Comment
mettre
enœuvre
lapensée
deDeleuze
€t
Sonsidérée
d’unautre
pointdevue,aurait
autorisé
derecourir
àune
Guartari
dans
l’actionpolitique
?
is détermination
ou à la dialectique,Deleuzeinsistealorssurle
fitque
notre
tâche
est dedécouvrir
«unesurimposition
deperspectives,

AE 0ntre
M.

” Gilles Différence
ie Paris,
PUF,
coll.«Bibliothèque
de
e»,1968,
p.71.
206 AGENCERLESMULTIPLICITÉSAVECDeceuze
Penpective
cadre,
philosophie
:Lapeinture
d'après
Deleuze
207

unenchevêtrement
depointsdevue,unecoexistence
demoments
ui torde sdelamodernité,
marqueles… d’uneimage,
qu'elle
soit
essentiellement
la représentation
».Et il ajouterapidement
ue dessinée
Parlamain,
mécanique
. numérique,
lanature
physiologique
peinturesou lessculpturessontdéjàdetellesforcesdepr Ps énoménologique
delavisionumaine
neforme
pasdebord
défini,
Ainsi, pourrions-nous
dire,Deleuzeconduitlaperspective
. ” L'oprométrie
définiclechampde
vision enaccord
avec
lasynthèse
de
etdans
la vision,
às'appuyer
sur laphilosophie.
Dansunpauses
Ldr rives
monoculaires,
detelle
façon
quelavue
s'étende,
de
connuduPi",il vajusqu’à
suggérer
queLeibniz,
Nietzsche,
Wii è rc àgauche
etàdroite,
dunezàl'oreille
:ainsilacombinaison
James,
HenryJamesouWhitehead étaient
desperspectivistes.
Enh deces
deux
images
monoculaires
produit
unchamp
«stéréoscopique
».
sens,cetessaicommenceparinverserla tendance,
c'est-à-dire
à faire Naturellement,
lalargeur
devuevaried'unepersonne
àuneautre,
et
delaperspective
visuelle
lesujetdelaphilosophie.
Il yabiensürun alors
quenous
pouvons
parler
d'une«norme
»(aux
États-Unis,
par
à grandnombredethéoriesdelaperspective
toutfait remarquables’ exemple,
untestdeconduiteautomobiledemandeauconducteurde
maiscomment,aveclapermission deDeleuze, secomporterfaceà erunchamp dvision
e d'aumoinscinquante
degrés),
jesoutiens
unephilosophie
delaperspectivevisuelle
oùsespropres remarques précisément
quelechampdevisionmanque d'unefrontière
claire.
éparses
montrentleurimpuissance? Pourcefaire,nouspourrions Latechnologie du cadredevraitêtrecomprisecommeopposée et
prendrenotrepoint de départde la méthodeperspectiviste,
carle inhérente
à la foisà la visionhumaine.Précédantle floudelavision
dispositif
quidonneuneimportance
centrale
àunpointidéalrequiert périphérique,
le cadreintervientdanslavisionenmarquant la limite
uneconditionpréalable.
Comprise
comme laméthode qui
fabrique définie
dela représentation. En d’autresmors,lecadreintroduitun
unesurfaceen deuxdimensionsdonnantl'illusiond'unetroisième, voirdedélimitation,
ou commediraitDeleuze,
desoustraction.
laperspectiveseraitimpossiblesansl'imposition d'uncadre. Dansle Àl'âge
ducadre,ceconcept
est sidominant
quenousferions
biende
DePictura,lepremier etleplusinfluent destraités
innombrables dela nousdemander:quelouvrage
depeinture,
peint
surunesurface
plane,
Renaissancesurlaperspective,
Albertiinsiste surlefaitque
la première peut-il
exister
enl'absence
decadre?
Onpourrait
parler
despanoramas,
étape
danslaproduction d’uneperspective quiapparaisseréelle,
consiste quoique
lasurface
soitcourbe,
er desfresques,
quoiqu'elles
nesoient
àtraceruncadre. Pourquoi ?L'illusiondelaprofondeur, desgens et enaucun
casuniverselles,
mais
il estfrappant
que
l'exemple
leplus
desobjetss'échelonnant
demanière proportionnellelelongd'une ligne pertinent
soitceluidugraffiti.
Lessignes
etlesimages,
griffonnés
sur
orthogonale,
jusqu'àdisparaîtreaupointdefuite,signifie aussique les lesportes
descabines
detoilettes,
raroués
sur
les parois
enbrique,
mêmes lignescontinuentàl'extérieur.
Enl'absence decadrage,le monde projetés
parbombes
surleswagons
demétro
sontdéfinis
comme
pictural
s'étendrait
indéfiniment,
maisdufaitquec'est
impossible, grafiti
précisément
danslamesure
oùilsnemanifestent
quepeu(ou
lecadreprocure
à lafoisune
limitearbitraireetl'illusion
del'infini. pas
dutout)
derespect
pourtoutcadre
prédéterminé.
Le débatqui vientsuità LatraceLelargedéveloppement
ducadre, On
ne sera
pasétonné
deretrouver
certeforme
illicite
degraphisme
notamment
quand
il devient
le travail
decadrage
delaperspective. dans
lesanciennes
civilisations(elleéraicomniprésente
parexemple
à
Monbutestd’esquisser
leséléments
decetteconjonction. Pompéi),
maisnotre
sensdugraffiti
doitplusàlaville
deNewYork
Lavisionhumaine
n’estpascadrée,
maisvécue.Alorsquelebord
des
années
1970,
quand
les inscriptions
àlabombedevinrent
àlafois
d’une
peinture,
d’une
photographie,
d’unfilm,oud’undes
nombreux sn prise
depositionpolitique(derésistance
etdeterritoire)
etune
se esthétique
(l’art derueer,
plus tardlesSsyle
wars).Biensûr,
&Lau
tn 1980,
« desartistes
graffiti»telsJean-Michel
Basquiat
3.Ibid,p.
78(je
souligne). + à à Haring,
avaient
étéannexés
parlascène
del artcontempo-
4.rh LePh.Leibnizetlebaroque,
Paris,Éditions
deMinuit: confiné
àà dansce processus,
le graffitilui-même
Ps CRE
coll.«Critique», 1988,p.27. | jé oh. ù surfaces
prédéterminées
parcontrat,
Oumême
destoiles
5. ErwinPanofsky,HubertDamischetJamesElkinsfontpartiedesFr sh Ature es.En fait,legraffitia toujours
rendu
àsesoucier
moins
dontletraitement
delaperspective
demande desconsidérations
PR
VoirPerspective
asSymbolic
FormdeVanofsky,TheOrigins
ofPerspective
ie Pliruncadre
oumême
d'avoir
uncadre,
queSTE
DamischerElkins,ThePoeries
ofPerspective
d'Elkins. —Surtoutunesurfacedont personne
nepeutréclamer
208 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUzE pmpestive,
cadre
philosophie
:lapeinture
d'après
Deleuze
209

propriété
légale.
Du pointdevuede
la législation
(dejure).in La
rradirion
delafresque
atteint
sonapogée
àlaRenaissance,
mais
detellesmarques
et laisserderrièresoi un dessin,constitue
“ de a mporté
aussi
unetransformation
remarquable
quandils'agit
- vandalisme,
dégradation
depropriété
—maisdefacto,
levrai
. cela : ux, notamment
le détachement
progressif
del'image
du graffiticoncerne
l'absencedecadre‘.En un sens,celaconte àsesfondements architecturaux.
Pourledireàlamanière
questiondustreet
art,etdansunetentative
récente
pourpourui,
e deDeleuze
: lecadreestdéterritorialisé
detoutmilieuprédéterminé
desartistes
deruecomme ShepherdFarey
oudécouvrir
cequisedu ie Évidemment,nousne pouvonspasrendre
justice iciaulong
sousl'identité
Banksy”,
nousdécouvrons
lepointdevuejuridique
ex uscomplexe
decettedéterritorialisation,
maisà lalumière
de
économique,
autrement
dit, l'espace
officieldel'artvisuel—dont
le ad précède,
notammenten prenantenconsidération
l'Église,
nous
développement
nousrenvoieà laquestiondelaperspective. pourrions
analyser
cebouleversement
d'abord
etpourl'essentiel
en
L'histoirede
l'art attribuegénéralement
leconcept
decadre termes
derelationsd'échangecapitaliste.
En Italie,l'émergence
d'un
l'architecture,
carla géométriedessurfaces
—murs,encadrements mercantilisme
debonaloià l’intérieur
desCités-États
autonomes
et
vestibules
—produitinévitablement
rouslestypesdecadres.
Ainsi,
les envre
elles,a inséréla peinturedansdesfluxdecapital
deplusenplus
anciens
Égyptiens
gravaient
deshiéroglyphes
surleslarges
surfaces
de mobile,etdansdescircuitsd'échangetoujours
pluslarges.
Déjàau
leurs
monumentsetdeleurstemples,
candis
que
l'architecture
classique xv'siècle,
l'art étaituneentreprise
pleinement
commerciale,
fournis-
desGrecsimposaitdescolonneset desarchesqui encadraient
les santdesclients
deplusenplusdivers.Comme MichaelBaxandall
l'a
statues
ou délimitaientl'espace
réservé
auxbas-reliefs.
Cesexemples magistralement
démontré,lesservices
despeintres
decerteépoque
révèlent
àquelpointleconcept decadren'estpasseulement redevable étaient
engagéspardesparticuliers,
pardescommissions
degroupe
et
àl'architecture,
maisplusprofondément à l'antériorité
dumilieu« par
desinstitutions
corporatives,
nonseulement
de l'Église
catholique,
àlacontrainteinamissibledesmatériaux.Lecadre estfourni,
pour mais
aussi
d'institutions
séculières®.
Enaucun
casn'ont
disparu,
sans
ainsidire,parleséléments concretsdel'espaceàpeindre oudela plus,
lesconditions
favorables,
esthétiques
etfinancières,
quel'archi-
surfaceàremplir
: lemilieudonneformeàl’artpicturaletlui appar- tecture
religieuse
avaitproduites,
maiscesopportunités
ontcommencé
tientenconséquence,impossibleàséparerdel'espacephysiquequile àcoexisteretà composeravecdesconditions matérielles
quiont
faitapparaître.
Cesconditions ontdominéleMoyenÂge,quand les finalement
définil’art danslaligneducadre,
le cadre
parsacapacité
artistes,
tributaires
del'Église,
dépendaient
dessurfacesetespaces
variés demobilité,
et l’image parsacapacité
d'autonomie.
C'est
enfonction
àdestinationdesquels
les artsplastiques
—peinture,sculpture,
vitrail dececontexte quenouspouvons commenceràcomprendre
pourquoi
mosaïque,etc.—inspiraient
lescommanditaires.Lesimages comman- ilaétéinévitable
que
le cadre
sedésamarre
del’espace
concret,
carcela
déespourles cathédrales
étaientspécifiques
ausite,cequiveut dire, 2permis
queletravailartistique
soitdirectement
soumisaucontrat,à
soitqu'elles
étaient
destinéesà unmilieuprédéterminé, soitqu'elles l'échange,
àlapropriété,àl'évaluation,
à lavente
et finalement augoût
demandaientà êtrecréées
suroudanslemilieului-même. Danslecas propre
duclientpour
lequel, commenouslesavons bien,il n'existe
desfresques,
oùlasurface
estpréparée
avecunenduit
frais
(affree)
ils Pas
delivres
decomptes?
chaux,
l’artisteétaitlittéralement
soumisauxexigences
del'architecture
quidéterminait lecadre—parexemple, lesmurs,voûtes,
plafond.
me

8.Baxandall,
14.
renfoncements etautres surfaces
propres
auxcathédrales.
Sans
aucur
. ie etGuartari
suggèrent
quelque
chose
decerte
rransformation
àlafois
del'Écols
à et
esthétique,
àpropos
delapeinture
vénitienne
: «Prenez
l'exemple
6.Danslesannées
récentes,
lesparcsnationauxetlesparcs
ded'État
deCalibur
ontétéenvahis
paruneprolifération
degraffiti—leraggagedelanature
- d'ou
la us deVeniseen peinture: au mêmemoment
où Venise
développait
le
question
desavoirsilapeinture
d'unrocher
est différente
de l'artdruc-
e donne _. lepluspuissant,
créant
uneCiré-État
dotée
d'un
large
degré
7.Fareyaétépoursuivipouractes
devandalismeàDérroit,
jusquà€ 4%À Les
couleursa Peintureseconformait apparemmentàuncodebyzantin
oùméme
poursuites
soient
abandonnées.Lespoursuites
contre
Bansky restent
&Te0f
# hiérarchie€ leslignesétaientsubordonnées
à unsignifiant
quidérerminait
leur
symptomatiques
: desinformaticiens
ontétéchargés
dedévelopperuit_- #confrodansunordrevertical,
Mais,verslemilieu
duxv'siècle,
quand
Venise
pourdéterminer
l'identité
decetartiste
derueanonyme. À "AEauxpremiers signesdesondéclin,
quelquechosesecasse
dans
sa
& quiapparaîtrait
commeunautre
monde
s'ouvre,
unauire
art,
dans
210 AcRNCaR1.88
MULTIPLICITÉS
avecDersuzr
penpective,
cadre,
philosophie
:La
peinture
d'après
Deleuze
21}
Mais,
si ladéterritorialisation
du cadrea été«catalysée
, “autres
chotes,
ladimension
«figurative, quenouspouvons
conditions
del'échange,
elleestvenue
égalciment
d'avancées
ne rmid'auoscomme anthropomorphique
; lesensdu«motif»ou
logiques
etd'inventions
techniques,
nonmoinsCapitalisées,
qui
te nc décrire
EnTuer àlareprésentation
soncontexte:l'imposition
du
» reconfiguré
lapratique
delapeinture
elle-même.Alorsqueie du genre
“ bienquedecequenousappellerons
le «hors-cadre
:
tecture
procurait
unelégitimation
spatiale
delafresque,
lapeinture. ®cadre°ie quiorientel'imageen«profondeur ».Entoutou
partirduxvi'siècle,s'estréorganisée
autourdel'adoption
génre Jemise uelatransformation del'image
cadréedérive
d'unnouvel
delatoiletendue,l'inventionet ladiffusiondesPeintures
}l'huile kne peintre etdelasurface,
etque,comme nousallons
le
etsurtoutl'introductiondu chevaler,Ce dernierdéterritorial,,
; ie,certe
mise
enscène estcoordonnéeparlebiais
dla
e Perspective.
cadredesonsupportphysique etexigeadoncquel'image existe
n
de
pour elle-même,
Comme tel,lecadre
libère
l'image
delasurface
matériel}, ; ce l'art l'art, Ù,pour
s'exprimer
déterritorialisant
lesartspicturaux,
etnotamment laPeinture,
à ne tu relative,
latechnique
duchevalet
enpeinture
arrache
contraintes
d’unmilieuconcret.Non seulement
les images,
mais
le
l'image
àlalégitimation
dumatériaupréexistant,
Toutcequiapparaît
corpsmêmedl'artisteselibèrent
e descontraintesdel'architecture danslecadreserafixé,maisle cadrelui-même
estphysiquement
et
Làoùlatradition
delafresque
faisaitdel'artiste
l'esclave
d'exigences
financièrement
mobile.Sans
aller au-delà
deslimites
évidentes,
une
inamovibles
(ilsuffitdepenser
auxcontorsions
deMichel-Ange
Peignant
leplafond
delachapelle
Sixtine),
lechevalet
adaptable
àpermis
j; peinture
surtoilepeutêtresuspendue
surn'importe
quelmur,une
photographie
montrée,
unfilmprojeté
n'importe
où.Il nes’agit
pas
mainetàl'œildepasser
decompromismatériels
àdescoordonnées
pourmoiderendrecesartsvisuelséquivalents,
maisdesuggérer
que,
deplusenplusabstraites
(dans
le casdeJaPerspective,
nouspouvons
dans
Lamesureoù lapeintureinaugureunnouvelâgeducadre,
repris
dire: descoordonnéesdegéométrieprojective).
Quelquesoitle
lieu—dans
l'atelierouenpleinair—lecadrefixésurlechevalet
est exérendu
àd’autres
médias,
lapeinture
gardeune
relationàl'archi-
tcture
(figurativement,
etpeut-être
même littéralement),
quenous
situéenrelationavecuncorpsà laverticale,
disposéd'unemanière
quiassureunecoordination
optimaleentrel'œiletlamain.N'étant
nepouvons
pasfeindre
d'ignorer.
plusdéterminépardesréalités
topographiques
concrètes,
le peintre Telestlecœurdemonargumentation. Carladéterritorialisation
découvrelesmoyenspratiques
d'atteindre
unesorte
d'idéal.
Comme picturale
ducadreademandé unconcept matériel etunmoyen de
l'écrit
Deleuze
dansLogiquedeLasensation
: reterritorialisation
pouraccommoderl'image
à lasituation nouvelle
dumouvement et del'échange.
Lasécularisation
subieparlapeinture
occidentale,
et 758profondément
encoreà laRenaissancedel'Europe
Carlechevaler
était
unélément
décisif
nonseulement
danslemaintien
d'une
duNord,ouàl'Âged’orhollandais,
asignifié
queles i devenaient
apparence
figurative,
danslarelation
dupeintre
etdelaNarure
(larecherche
sujettes
auxvicissitudes
delaventeetdelarevente,
ne etdu
dumotif),
mais
aussi
pour
la délimitation
(cadre
et bords)
oupour
l'orgatu-
vol,dureceletdel'exposition. Ce n'estpasquenousdécouvrions
sationinterne
ducableau
(profondeur,
perspective.)
1°.
partout
le mouvement danslapeinture delaRenaissance,c'estplurôt
quelespeintures étaient
inséréesdanslesAuxdemouvement etde
On peutégalement
voirque,pourDeleuze,latechnologie
du Gpital.Unepeinture n'étaitplusdestinéesimplement àunmilieu
chevalet
estinséparable
d'unensemble detechniques,
d'habitudes
donné,lle étaitobligée
d'existerpar
elle-même, etparconséquence
personnelles
—unemanièred'organiser
lapeinture.
Celainclurait,
dSisterdanstout
espace quelconque.Latechnéquiarendu
celapossible
était
laperspective.Avantlatoile,unpeintre détermine unpoint
lequel
leslignes
sontdéterritorialisées,
lescouleurs
sontdécodées,etneserélereuit defuiteverslequels’avance l'espaceetdepuis lequelil estprojeté
maintenantqu'aux
relations
qu'elles
entretiennent
entreelles,
etl'uneavec
l'autre
- cnogonalement au-delàducadre. Si laperspective
aspire àrepré-
VoirL'Anti-CEdipe,
laris,Éditions
deMinuit,1972,
p.368-370. AerUnsenscohérentde l’espace
d’éloignement,
c'est parceque
10.GillesDeleuze,
Francis
Bacon.Logique
deLasensation,
V'aris,
LaDillerense.
coll.«Lavue,letexte
»,1996(4éd.], p.70. lesparamètres
—lesproportions
et lesdocs ducadre,
l'échelle
€tladistance
decequiest vu,l’avanrage
delaposition
quenous
sue,
cadre,
philosophie
: Lapeinture
d'après
Deleuze213
212 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZzE

.sforcés
desynchériser,
«partes
extra
partes
»(cen'est
pasun
occupons
—sont
l'objetd’une
décision
arbitraire.
Quand
Deleuze
di
quelecadre
est déterritorialisé,
il veutdireque,détaché
dumonde

:Deleuze
décritainsilamanière
dont
l’espace
aététradition-
rectanglevagabondérablit
sonpropre
critère
delamesure.
Peut-êe * ctériséet ensuiteessentialisé
parDescartes
etKant).
pellement
SE del'espace
cadré
- aussitôt
infinietfragmenté
-
est-ilinévitable
qu'unedécouverte
aussirévolutionnaire
nepuine 2 Due courulerisque(ou,commelesartistes
ledirontplustard,
survenirquesouslecouvertd’unmodèlequi semblerétrograde,un
in lapossibilité
»)d’une
distorsion.L'imagedans lecadre
n'a pas
termearchitectural
: commeAlberti
l’a établid'entrée
dejeu,lecadre
‘offertrdoudemesure 4priori,etdoncsadéterritorialisation
libère
estlecadre
d’unefenêtre.
Onne
peutsous-estimer
l'importance
delafenêtre,
car
elleréinro. ibilitéd’uneintroduction
subreptice
d'éléments
non-familiers.
duitunesorte
d'architecture
imaginaire
pourdesimages
quiprécisé. laposs ivea représenté,
entreautreschoses,unessaidetraiterce
ment
semblent
détachées
detoutenvironnement
concret.
Pour
ledire 4 or de
le corriger.Comment?Aprèsavoirconseillé àl'artiste
autrement: Lafenêtrereterritorialise
l'image,
séparée
de1architecture, rs lecadre,
Albertiinsiste
surlefaitque
l'espace
etl'échelle
surl'illusion
del'architecture.
Nousvoyons celanonseulement
dans del'image
sontdéterminéspar | introductiondela formehumaine
le«modèle »concretsurlequellaperspective
estfondée(àsavoir
que (OnPainting,
53-54).
Danscette
optique,
laperspective
présente
]incérér
regarder uneimage cadréevaudraitàpeuprèscomme regarder
par derétablir
quelquechosecommelesmesures
de| hommevitruvien,
unefenêtre),
maisjusquedanslapeinturedecadres
architecturaux, afindedonner unestabilitéà l'espacenonréeldel'image cadrée.
La
peints
comme
s’il s'agissait
d'installer
l’image,
nondans
unmilieu
réel terrifiante
visiond’un«monde sans lesautres »,comme Deleuzel'a
maisfeint,conduisanttoutdu longautrompe-l'œil.L'imagen'est une foisnommé, vientdecequelenaufrage suruneîledéserteperd
paspeintesurun mur,maiselleapparaîtcommeunefenêtre dans lasource laplussûredelamesure : l’«autrepersonne »nousprotège
unmur,uneouverture versundehorsquiautrementresteraitobscur desillusionsd'optique, mirages ouhallucinations (MichelTourner,
ouhors-cadre.
Sanssonsupportconcret,
la peinturecherche
unalibi Vendredi ouLeslimbes duPacifique).On nedoitpasseulement prendre
architectural,lefac-similéd’unsupport quiasontoursupportera enconsidération le typedelangage, enpartievenude l'histoirede
lefac-similédeLaperspective. Lecadre, renduportable etmobile, l'art,
quelecinémadéveloppe pourdécrire ladistanceerl'échelle.
déterritorialisé
matériellement erfinancièrement, découvre dans
la Grosplan,planéloigné, planaméricain : cestermes etexpressions
perspectivelesmoyens defixerlafluidité del'image, etdelarendre tirentleurscoordonnées ducorpshumain.
lisible,
oùqu'elle apparaisse.
Ainsi,comme l'expliquent Deleuze
et 3)Inspirésparleur environnement architecturaldecathédrales
et
Guattari danstoutL'Anti-Œdipe, cequiestdéterritorialisé
d'unemain d'autresespacesquivisaient
àmettre enscène uneiconographiedivine,
estreterritorialisé
del'autre.L'image cadrée —uneimage dérachée les
peintres
duMoyen
Âgeerdudébut
de laRenaissance
ontsouvent
d'unmilieudonné etrendue enperspective —présente quatreaspects travaillé
selonuneorientation
pour
l'essentiel
verticale.
Parcontraste,
delareterritorialisation
: 1)l’espace infini;2)l'anthropocentrisme: l nature
dlea visionstéréoscopique
(humaine)estorientée
horizon-
3)l'horizontalité(lagravitation)
; 4)lehors-cadre. talement,
etc'estselonceraxequenotrevisionpériphérique
est la
1)Laperspective
est traditionnellement identifiéeavecl'hypothèse meilleure,
Parconséquent,
leconsidérable
éventail
desimages
verticales
del'espaceinfini.Laperspectiveinscrit
l'extension infinie
danslepoint
ce Pourdéfierla vision,pour impressionner
lespectateur
parnos
defuiteverslequel convergentenprofondeur routesles
lignesortho-
ires
face
àlatranscendance.
L’iconographie
detelles
images
recourt
gonales,
commelefonttoutesleslimitesducadreverslesquelles
ces
Aemment à la verticalité
pourdonnerlareprésentation
d'une
mêmeslignesorthogonaless'étendent.La naturede l'espace
exprimée
danslaperspective
picturale,
et plustardreprise
parlesmoyensphoto- de. - d êtres
quisesuccéderaientdepuis
l'humain(#omo/Humus,
mécaniques,
consisteà arracherlerectangle
vagabond del'image
à la ui appartiennent
à lasphère terrestre,
les créatures
de
la terre),
«fabriquedumonde visible».Maissilemondequisetrouvederrière Papesetlessaintsquiontgagnélecheminduciel,jusqu'aux
lecadreestinvisible,
il estaussi
contigu,detellefaçon
quelevisible 11.Voi Jeuze.
soittoujours
unfragment d'unespace extensif
etcompact,
quenous Voir
lecours
deDeleuze
surLeibniz
(20/05/1980),
<http://wwwwebdeleuze.
Pap/texte
php?cleh]30&groupe=
Leibniz langue=2>.
214 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDeLEUzs Perspective
cadre,
philosophie
: lapeinture
d'après
Deleuze215

anges
et,delà,audivin.Paropposition
àl'arrière-
plan d'innombrable,
rminé
parl'image
visible,
l'espace
hors-cadre
est
défini
comme
fresques
atteignant
le cieletsortant
deslimites est
bedére : lecadreformeunefrontière
au-delà
delaquelle
l'espace
se
denosregards,
nous
devrions
dire quelecadremetenmouvement linvis! urle dire ainsi, en tant Que non-vu,inactualisé. Ces aspects
uneréorganisation
de
l’image.
Assurémentla réorientation
ducadreSurunaxehorizon tient,
Fe sontprofondément imbriqués
etpratiquement
inséparables,
constitue
une
territorialisation
de
l'image: nonseulement
l'image
si del_ ilsdélimitent
laconjonctionducadreetdelaperspective.
estvenue
à s'accommoder de plusen plusà la visionhumaine,
mais a comprendre àquelpointlapensée deDeleuze- définie
par
lesscènesdépeintes
ont étéde plusen plusdéterminéesPar
la force je plan
d'immanence (plan,champ, cadre)
etledehors(hors
champ,
de
la gravitéqui,pourainsi
dire, a rabaissé
lareprésentation
vers
la e cadre, dehors)—rendlisiblelecœurphilosophique
delapeinture.
terreetdéfini
l’actionselonl'axedenosyeux.Tandisqueles cadres
duportraitcontinuaientdesuivrel'orientation
verticale
ducorps
humain,
divers autresgenres—peintureépiqueet historique,
scènes
domestiques,
portraits
degroupes
etpaysages
—ontcommencé une
expansion
latérale
quiaexplosédanslesmédias
suivants,
Lefilm,
la
télévision,
lesécrans
d'ordinateur
sontdessinés
maintenant
selon
les
lignes
denoscapacités
visuelles.
Enfaitl'accès
horizontal
à l'image
est
sidominant
que,lorsqu'un
groupe d'artistes
d'avant-gardeproposé
récemment
demettresurécrandessériesdefilm orientées
verticale.
ment,
l'espaceleplusadapté futceluideséglises
2,
4)L'importancedumodèle de
la fenêtre
consiste
moinsdanssaconfi-
gurationdecequenousvoyons, quedansl'imposition
decequenous
nevoyons pas,
l'illusionquel’espacecontinue
quand lecadre
s'arrère.
L'imagecadrée,ernotamment
l'imageperspective,
introduit
l'existence
d'un«hors-cadre »oudecequenousappelons pluscommunément
«hors-champ ».Ce termeaétéinventé par
le théoricien
ducinéma
Noël Burchpour désigner
l'espace, d’abordinvisiblemaiscontigu,
imaginaire
etpourtantdéterminé,
quisetrouve
derrière
lecadre.
Tandis
quelecinémas'estdotédemoyensrévolutionnaires
pourmanipuler
l'espace
hors-champ
(c'est-à-dire
l'invention
dumontage,
ledévelop-
pement
delacaméra
mobile,
l'introduction
duson),ceconcept
dérive
del'hypothèse
préalable
qu’une
image,
déterricorialisée
delafabrique
dumonde, retient
pournous
le sensdumonde:comme unamputt
cherchant
à atteindre
unmembrefantôme,nousextrapolons
l'extension
decequia étécoupé.End’autres
mots,tandis
que
l'espacedel'écran

12.«VerticalCinema »estunesérie
dedixœuvresdecommande degd
échelle,
réalisées
pourdessites
spécifiques
pardescinéastes
etvidéastes
de<a
internationale,
etquisontprésentées
surdespellicules
en35min,€tsr
verticalement
encinémascope.Leprogrammede90minutes futpro)ele
Prék
première
fois en2013,etaétédepuis
projeté
dansdesmuséeserdeslesuis

monde entier,
Voir<http://verticalcinema.org>.
XVII

Deleuze,
devenir-ingénieur

GEORGES
AMAR

L'œuvredeGillesDeleuze
atrouvé
deséchos
bienau-delàdela
sphère
philosophique,
notamment
dans
divers
champs
artistiques.
Il ne
seraitpasétonnantqu’elleaittrouvédeslecteurs,
desurilisateurs,
dans
bien
d’autres
domaines
encore.
Celuidel'ingénierie
n'était
peut-être
pasleplusprobable.
Je n’entraiterai
pasdefaçon
systématique,
ni en
m'adressantdirectementauxgénieslesplusprometteurs
ouinquié-
tants aujourd’hui,
le biologiqueouledigital.
Moninterventionest
plutèrletémoignaged’unlecteurpassionné,
quel'œuvredeleuzienne
aaffectéjusquedanssavieprofessionnelle
d'ingénieur.
Aprèstout,
Deleuze aimelesmachines! Entoutcasles«machines deguerre»,
lesagencementsmachiniques.Lamachine deleuzienne
parexcellence,
c'estlaMachineabstraite.
Sidoncil y aunrapportentreDeleuzeet
l'ingénierie,
peut-être
faudra-t-il
lechercherducôtéd'une
«ingénierie
à conceptuelle
».Écho
la vision
deleuzienne
delaphilosophie
comme
créationdeconcepts,cetteformule estsurtout,
pourmoi,unindice
del’évolution
de
l'ingénieur.
Ingénieur
deformation, j'aitravaillé
toute
unecarrièredansune
grande entreprisedetransport urbain.Cettecarrière
aconnude
nombreuses bifurcations.
Lapremière eurlieucinqousixansaprès
mon entréedansl’entreprise,
etellefutsansdoutelaplusimportante.
Oril setrouve
quec'estexactement l'époquedemadécouverteetdema
lecture
enthousiaste
deMilleplateaux.
Cette
lecture
n'est
paslacause
factuelle
del'aventure
professionnelle
etintellectuelle
dans laquelle
je
vaisalorsmetrouver
engagé.
Mais
elle vatomberàpic.Lesdirigeants
del'entreprise
decerte
époque
lancent
unprojet
derecherche
très
ouverte
qu'ilsnomment« Réseau
2000».Nousétionsalors(1982)à
unedistance
respectable
del'an2000.
Était
doncrassemblé
ungroupe
d’une
dizaine
dejeunes
cadres,
issus
d’une
large
variété
desecteurs
etde
métiers
del’entreprise,
avecuncahier
descharges,
unmotd'ordre
assez
Deleuze, devenir-ingénieur 21 9
218 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVEC
DELEUZE

simple
dans
saradicalité
:«Penser
autrement
»l'avenir
dutranspor sant etmême
handicapant
pour
penser
lamobilité
urbaine
sa roi conceptuel
prit laforme
d’un nouvel
axiome
Quis’éno ïc
urbain.
En
insistant
particulièrement
sur
ladimension
urbaine,
don, LeÉ.unréseau
detransport
estfaitdelignes
etdepoints
ouUE
évolutions,
sinon
la crise,
interpellent
la culturemanagériale
àdominan
technicienne
del’entreprise.
Commence alorsuneextraor
re Àavenir
contrairement
àcequiàprévalujusque-l,
lespoints
auront
aventure
instirutionnelle-intellecruelle,
dontleplusétonnant
estnr ent,sinon
plus
d'importance
que leslignes.
Cette
formulation,
qui
aitpourcadre
uneentreprise,
etsurtoutqu'elledure,longtemps
_ is “'érair
qu'unpointdedépart
assez
vague,
permit
d'ouvrir
despistes
de
detrente
ans(moyennant
reformulations
périodiques)!
Cetre
aventure gavail
etderecherches
nombreuses
etfécondes.
Leprimat
despoints/
estalimentée
detoutes
sortes
denourritures
intellectuelles,
grâce
à Jœuds
permettait
entreautres
demieux
traiter
laquestion
dulocal
et
unprocessus
intensif
decollaboration
avecle mondedelàrecherche durapport
auterritoire,devaloriserlevoletimmobile
dessystèmes
(sciencessociales,
cognitives,
degestion,etc.),
et parceque
le «groupe demobilité
(les«stations
»engénéral),
etdemettre
l'accent
surle
pilote» estsavamment composé,multidisciplinaire et relativemenr principe
deconnexion (inter-modalité)contre
le principedecircula-
mixte
(hommes/femmes).
Or,comme
je
l'ai dit, c’estprécisément
Je ionalors dominant. Surleplanconceptuel, la réflexion
portaitsur
moment
où,quantà moi,jedévore
Milleplateaux.
Lesmembres
du lamorphogenèse desréseaux etconduisaitàunedéfinitionabstraite
groupe
sont
également
lecteurs
deFoucault,
deMichel
deCerteau, duréseau comme «processusdeformatage récursif
dessingularités
».
deLefebvreerbiend’autres.
Noussommes auxgrandesheuresdes Jepasse à mondeuxième exemple demutation conceptuelle
courants
depenséesystémique,
de
l'auto-organisation,
desthéories
des - paradigm shiftcomme ondit dans le jargondesthéoriciens
dela
catastrophes,
delacomplexité.
LeprojetRéseau 2000devient
le foyer prospective.Laformulation quej'en donne ci-après
estpostérieure
à
d’uneeffervescence
intense,
Lesdirigeantsde
l'entreprisequi,àcette lapremière période dudispositif Réseau2000 quejeviens
d'évoquer,
époque sontpresquetousdesingénieurs, souventpolytechniciens, mais elles'inscrit
danslamême perspective
d'un«travail
dufutur »,
l'accueillent
avec bienveillance
etl’encouragent. ens'appuyantsur uneffort derénovationconceptuelle,
étayé
deconnais-
Pourmapart,entant qu'ingénieur,
celaconstitue
lepoint
dedépart sancesscientifiquesnouvelles.Laformule quiexprime
cettemutation,
d’une
bifurcationradicale.
Avantcelaj'avaisétéuningénieur
normal, s'énoncecomme le PassageduTransport àlaMobilité.
Cela
supposeune
plutôt
bon!J'utilisais
unpeudemathématiques pourposererrésoudre discussion critiquedu#ransport entantqu'ilimpliqueuneréduction
desproblèmes
d'optimisation,
parexemple
pourlarégulation
deslignes delamobilité au«déplacement », c'est-à-dire
àl'équation
:comment
Ro J'étais
uningénieur
prometteur
—erpuis,patatras!
À partir aller
leplusvitepossible dupointÀ aupointB?Maispour contester
et
cemoment,
jecommence
à expérimenter
—sansenêtrevraiment dépasser
durablement leparadigme dutransport-déplacement,
il fallait
conscient
—unetoutautrefaçon d’être
ingénieur.
Émerge uneforme construire,
explorer,
déployer,
et d’abordnommer
lenouveau
champ
d'ingénierie
collective,
multidisciplinaire,
ouverte,
hétérogène,
impli- conceptuel
delamobilité.
Champ
conceptuel
traversé
debouleverse-
quant
par-delà
le«groupe
pilote»unefoule d'acteurs,
dansl'entreprise ments technologiques,écologiques,
sociétaux…Nepouvant
décrire
etaudehors.
Uneingénieriedontl’horizonn’estplusd'optimiser,
icilepaysage conceptueldecettenouvelle
mobilité,
quiemprunte
deconsolider
oudévelopperlesystème detransport
existant,mais
beaucoup à l'espritdu nomadismedeleuzien,
jemecontente
d'en
deproduire,
percevoir,
exprimerdesmutations conceptuelles.
Jene indiquer
quelques
aspects
quifontsigne
vers
des
concepts
deDeleuze
et
peuxici qu'indiquerbrièvement
quelquesexemplesde cesmutations.
Guattari.
Leshjff
dont
il estquestion
n'implique
rien
demoins
qu'une
Lepremier: nousavons
très viteétéamenésà travailler,
surle
révolution
denosrapports
àl'espace
etautemps,
àlanotion
même
concept
de réseau,
enlui donnantd'embléeuneextensionbienplus
delieuetàceque
signifie «perdreougagner dutemps
». ‘
large.Bienquenousn’ayonspasexplicitement
utilisélererme
de
. Surla questiondeslieux,j'ai étéamené
il y aquelques
années
à
_ . _ ar quecelui-ci
nous
a stimulés.
Il s'agissait
par introduire
lanotion
etl'expression
de«lieu-mouvement
»,pOur
aborder
roms enrichir
leconcept
standard
deréseau envigueu defaçon
nouvelle
desquestions
telles
que:«Qu'est-ce
qu'unestation
de
lus mr Fu RS Pa
CRUE me Métro
?Qu'est-ce
qu’une
gare
multimodale?
»Est-ce
un«Non-lieu
*
-tuyau
»comme
nous
l’appelions,
deveni! mmesemble
lesuggérer
l’anthropologue
Marc
Augé?
uen
Deleuze,
devenir-ingénieur
n1
220 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

qu’un
lieuàl'âge
delamobilité
généralisée
etdunumérique
?Qu'est-ce qur
lesmutations
CONEEP
cuelles,
travail
deconception.
Enparlant
qu’unlieu àuneépoque oùlatechnologie nouspermet dedonner d'ingénierie
conceptuelle,
jeneveuxpasdirequ'elle
serait
purement
unRendez-vous sansenfixerlelieu?Lelieu,finalement,résulte-t.} smellecuelle.
Lepropre
del'ingénieur
dans SOnrapport
auconcept
de
l'intersectiondedeuxtrajectoires
?Et mêmedeleurintersection si qu'ilpasse
parunrapport
auxmatériaux,
auxsubstances?,
Etilne
dynamique,à vitesse
non-nulle?J'aitrouvé
ujour,
n chezJulesVerne s'agit
passeulement
desciencedesmatériaux,
dontonsaitqu’elles
ont
constituéune base solide des sciences de l'ingénieur. C'est l'invention
unetoutepetite
phrase,
uneritournelleparfaite
pour
saisirlePropre
L
lanouvelle
mobilité.EllesetrouvedansVingt-mille
lieues
souslesmers,
et denouvelles
matières,
denouvellessubstances,
Il n'yapasquelapierre,
c'estladevise
latineduCapitaineNemoetdesonNautilus: «Mobil leverre,
lebéronetl'acieretlesmatièresorganiquesousynthétiques.
in mobile».C'estcelala mobilité: bougersur un solquilui-même L'énergie
n'est-elle
pasdevenuele principalmatériau
del'ingénierie
du
bouge,
alorsqueletransport
traditionnelpourrait
êtrerequalifié
de x siècle?
Maisd’autres
sontapparues.
Onparle
d'ingénierie
financière.
«mobilis
instabile
»!GrâceàJulesVerne,
j'ai comprisque
le véritable Ladernière-née
des«substances»estleData,
l'omniprésent,
le «big»
emblèmedelamobilité
nouvelle
estleSurf,lesurfing'entoutes
ses duta,
ennoblidésormaisparl'établissement
d’unetouteneuveData
versions,
aquatiques,
numériques,
urbaines.
Surlaquestion
dutemps, Science.
Notons
l'émergence
parallèle
deformes
artistiques
liées
àces
lebouleversement
est aussi
profond.
Sile temps detransport
est,
par nouvelles
substances.
Arts del'énergie
(Beuys
enfutunprécurseur),
construction,
untempsperdu,qu'iln’estquestion
quederéduire
en art
del'argent
(Warholenfutgrand
prêtre),
Data
Arr,digital
enplein
accroissant
la vitesse
(l'idéaldutransport
étant
la téléportation),
la durée essor.
Onpeut
yobserver
desdevenirs
croisés,
l'artiste
devient
àsafaçon
delamobilité
estaucontraire
unedurée
vivante.
Dansleparadigme uningénieur,
comme
s’il y avaitundevenir-artiste
del'ingénieur…
dela«viemobile
»,bouger
n’est
pasuneperte
detemps.Onpourrait
mêmeenvisager,
au moinsthéoriquementou musicalement,
que
certaines
formes
d’activité
oudemouvement
produisent
dutemps.
J'ai trouvédansle 11°plateau
deMille plateaux,(page431),cebeau
passage
: «Laricournelle
fabrique
dutemps
» ; etcelui-ci
: «Il n'y
paslerempscommeforme4priori, maisla ricournelleestlaforme
4prioridutemps,
quifabrique
àchaque
foisdesremps
différents.
»
Je concluraienévoquantbrièvementla questionde l'évolution
del'ingénieur
etdel'ingénierie.
Endépitdesonomniprésence
dans
la sociétéetl'économiecontemporaines, l'identitéde l'ingénieur
estaujourd'huibrouillée.D'unepartelleestpriseen tenaille entre
lesBusinessschools,
les« Creativeschools
» (Design),et la recherche
; scientifique
d'autre
partl'ingénieur
estdevenu
suspect
d'être
l'agent
complaisant
desmanipulations
génétiques
oufinancières,
ouducontrôle
généralisé
parleDigital
—BigBrother
devenu
BigData.L'ingénieu"
n'est-ilpasl’âmedamnéedesnouveauxpouvoirs?MaiscetteEE
d'identité
estpeut-être
cequilerendaujourd’hui
intéressant.
J'aisuggere
l'hypothèse
d'une
ingénierie
conceptuelle
dontl'horizon
n'est
pe
l'optimisation
dessystèmes,
maislapréparation
desmutations
à=,
a Lerapport
del'ingénieur
auconcept
revêtplusieurs
formes.
Tree
fameux
ingénieurs
1.Merci
àPascale
Criton
de
m'avoir
initié
àl'art
eraux sibus
ravaux
de
G Pd du2.Comme onlevoitdansl'œuvre
erLes
écrits
del'undesplus s à «explorer
et
2esiècle,
PeterRice,pourquilemétier
del'ingénieur
consistait
Soultrait,
le dieu
dusurf!
Voirsonouvrage
:L'entense
dumouvement. »lepotenriel
desmatériaux.
XVIII

Sémiotiques
etmicro-esthétique
dudesign

VINCENT BEAUBoIS

S'intéresser
audesign,
Entant
que
pratique
conceptuelle,
c'est
s'atta-
cherà suivrelaconstruction
denoscadresmatériels
devie,s'étonner
dufaitquelagrande majorité
desobjets
quenousmanipulonsquoti-
diennement ont tousémergédansunespace-temps
originaloùils
ont
été dessinés,restés,échelonnés
enversions,
expérimentés,
avant
deseretrouverauprèsdenous.Danslesannées 1950-1960,des
outilsméthodologiques propres
àl’activité
dudesign
seconstituent,
poursuivantpar-làl'élaboration
decertediscipline
comme pratique
spécifique,
différentedel'ingénierie,
deladécoration
oudel'artisanat.
Laquestiond’unesémiotique pourledesigncommence às'esquisser
danscecontexte, trouvant uneplace
centraleausein
desréflexions
menées àlaHochschule
fürGestaltung
(HFG)
d'Ulm,École
etcentre
actif
derecherche
européenne
en design.
Tomäs
Maldonado,
quirejoint
l'école
d'Ulmdès1954,marque
profondément
Lebouleversement
pédagogique
queconnaît
ledesign
àcette
époque,
cherchant
àsortir
la
discipline
de
l'expression
artistique
i s'érair
instituée
avec
leBauhaus
(1919-1933),
pourlui donner
unebase scie
affirmeainsi que
« lesconsidérations
€ ériquesont
basecncpttils solidepour
le design
industriel’
»,faisant
E
mathématiques,
desthéories
delaperception,
de
l'ergonoi
sciences
del’ingénieur,lesdisciplines
clésdelaformation
duy
arles
Sanders
Peirce,
de
Influencé
parletravaildeCh

delaHFG
d'Ulm,
Tomé
à : chercheur
ausein :
1,Au départ,simpleenseignant
cher à l'architecte
suisse
Maldonado devient
directeur
del'école
: dès1957:
succédan
Im, voir Paul
Betts,

Bill,Surlatransformation
pédagogid""
dudesign
àU nn Reropete Lie,
Semiotics
andSociery
:TheUlm
Hochsehule
ir ersémiotique
Gestaliu Dour à
»»Ulm5, 1959,p- /*
vol.14,n°2, 1998,
e
p.67
L -82.
unication «
2.Tomés Maldonado,
«Comm se shot

| =
224 AGENCERLESMULTIPLICITÉSAVECDELEUZE Sémiotiques et micro-esthétique
du design ns

etdelalinguistique
structurale
deFerdinand
deSaussure,
Maldonade
fairégalement
delasémiotique
un desprogrammes
derech
eh Focalisant
Dar
sat filre»dudesign
avant
d'interroger
ses
cardinaux
pourledesign?. " ,fairs
»,nous
souhaitons
envisager
cette
pratique
depuis
La
logique
Aumoment
del'apogée
delaconsommation
demasse,
Jedes:
. ratoire
qu'ellemeten œuvre,ennousintéressant
auxSignesque
lesdesigners
manipulentaucoursde
leurs recherches.
L'objet
d'une
estchargédedonnerune« lisibilité » aux objets,traitantdis
telle
sémiotiquen'est
pluslesigne
comme résultat
final
d'un
processus
artefact
matériel
comme porteur
d'unmessage
que le consommateur designification,
maislesigne comme participant
deceprocessus
:
doitpouvoir
«discerner
»danslasursaturation
de
l'offre marchande celui
quichercheàconcevoir quelque
choses'engage
alors
dans
une
L'entrée
delasémiotique
danslechampdudesign secaractérise
ain;
parla promotiond'unesémiotiquedesobjers*: il s'agitderendre
sémiogenèse,
quin'affleurejamaisexnihilo,
maisseconstruit
depuis
ces
signesmatériels
qu'onnommera, avec
Guattari,
«asignifiants
»et
compte, à partird’untravailde formalisation,
del’objet entantqu'il dontils’agit
derendre compte.
signifie.
Ceuevolonté derendrecompte
des significations
del'objet
v
polariser
l'ensemble
delarecherche
danscechamp jusqu'aujourd'hui’. 1.PRATIQUE DIAGRAMMATIQUEDUDESIGN
Cependant, ledesign
ne
se limite
pasàl'élaboration
deproduits
d'usage,
il nesecontentepasderendrelesobjets
signifiants.
Ledesign
nedoit Ledesign,
entantqueprocessus
deconception,
s'intéresse
moins
à
pasêtreévalué
simplement
à l’aunedesesproduits,maisaussi
à partir produire
directement
desobjets
oudes
images,
qu’àinstituer
des
dispo-
desprocessusqu'ilmetenœuvre. Dupointdevuedecelui quiconçoit, sitifpourconcevoir
ceschoses.
Parexemple,
lesdifférentes
personnes
il n'yapasd'abordunproduit «final»,maisunepratique inventive
s impliquéesdansunprojetdedesign
automobile
(stylistes,
modeleurs,
faisant:concevoir,
cen’estpassereprésenteruneidéeàréaliser,
mais ingénieurs,
graphistes,
maquettistes,
etc.)nesepréoccupent
pastant
de
expérimenter àpartir
de signesspécifiques
—quesont,parexemple,les laproduction
desvéhicules
eneux-mêmes
quedelaconfiguration
d’un
croquis, lesmaquettes,
lesmodélisarions—unechose à instaurer.
Au dispositif
matérieletsocial
auseinduquel
lagenèse
d'unvéhicule
devient
seinduprojet deconception,
cessignes nesontpasencoresignifiants, possible.
Cedispositif
estlui-mêmeproductif
en cequ'ilengendre
une
entantqu'ilsparticipentà uneopération deconception en#rain
de quantité
impressionnantedecomposantesquinesontpasencore
de
sefaire,sansprésager
desonrésultat final.Penser
de
tels signesnous l'automobile,
maisqui vontagircomme
un «milieu»pourconcevoir
éloigned'unesémiotique simplement descriptive
etnousengage à l'automobile
:maquettes,
plans,
extures,
gestes,
procédures,
infographies,
suivreunelignéephilosophique déplaçantla questiondusigne
vers etc.Ainsi,laconceptionnes’oppose
pasàlaproduction,
étantdéjà
en
unen-deçà delasignification
: GilbertSimondon,GillesDeleuzeet elle-même unephaseintensede«miseenproduction
».Onpeutainsi
Félix
Guattari
participent
ainsidecette
pensée
dusigne
nonencore qualifier
ledesign
d'activité
diagrammatique.
Lerégime
du«diagram-
signifiant,
maisengagé
dansun procèsdeconstitutiondusens”. matique
»vientqualifier,
pourFélixGuattari,
lamodalité
d'une
chose
entrain
de sefaire,
unechose
engenèse.
Guararisesert
del'exemple
de
lmicrophysique
pourrendre
compte
de certe
modalité
d'existence
:une
3.Ibid,p.75. Particule
n'existe
jamais
àpartir
d’une
expérience
directe,
maisnécessite
4.«Objet»renvoie
iciàunecatégoriegénérale
: il peurs'agird’unne
commed'unebaguette
depain,d’uneaffiche,
depâtesalimencaires,devairures,
de toujours
uncomplexe
«théorico-expérimental”
»composé
d'équations
mathématiques,
d'accélérateur
de particules,
depersonnel
scientifique,
signalétique,
d'interface
graphique,
etc. :
5.VoirAnne
Beyaert-Geslin,
Sémiorique
dudesign,
Paris,
PUF,2012.
L'au#" teurs,
etc.,
venant
qualifier
sonévolution.
L'ensemble
deces
Poursuit,
danscetouvrage,
ceprojetd'unesémiotique
desobjers
pourstat SMposantes
formeun«diagramme
»rendant
compie
de
la particule,
l'aide
d'outils
desémiotique
contemporains.
e-cin'existant
que«virtualisée®
»parcediagramme
même.
6.AnneSauvagnargues
2ainsimontréque,dansledéploiement
de»0œuvre
Deleuze« élabore
unesémiotique
capable
deprendreencompte les esdu Re
lamatérialité
d'uneexpression
irréductible
àlasignification
langagiète
"7"
[ANNE
Ex Guateari,
Lignes
de
faite:pour
unautre
monde
de
possibles,
LaTour-d'Agee
Sauvagnargues,
Deleuze
etl'art,
Paris,
PUF,2005,
p.14).
Lesigne
passe
2° nsdef”Aube,
&bd 2011,
p.168.
registre
del'interprétation
àceluidla
e force».
Sémiotiques
etmicro-esthétique
dudesign227
226 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDeLEUZE

Delamême
façon,
une«chose
enconception?
»n'existe
d'abord dif.
. Unautreusage
pourrait : iPératoire.
it être dito j I]nes'agir
k

virrualisée
parundispositif
diagrammatique
constitué
depror gr À desobjetsdonnés,maisdefairedelasémlotique 4eLa
de tion.Decepointdevue,
le signe nepeutêtre
directement
demaquertes,
de plans,demanifestes,
etc. NormanPotter,desia
anglais
erfondateur
delaConstruction
School
deBristol(1964-1979) vipts ilnepeutservir
àexposer
unsens
donné
entant
qd paridge
insiste
ainsi
sur lefaitque«lesdesigners
pensent
etparlent
entermes 3'insaurationd’uneentitéencore
virtuelle
etdontlasignification
d'esquisses
etdeschémas, decoupes,dedétailsgrandeurnaturei, n'est
pasfixée.D'un pointdevuedoctrinal,
notamment
au seinde
c'estdansla matérialité
decescomposantes, dansleurconfronta- laHG,cesdeux
usages
tendent
à seconfondre
:l'utilisation,
à certe
tion et leur coexistencequ'une chose en conception vient à être. ue,d’unesémiotique
structuraleinfluencéeparlalinguistique
de
Unemaquerte,
uncroquis,
unprototype
nepeuvent
se comprendre Saussure
etdeJakobson
et insistantsurlasignification
différentielle
entermes de« représentation»d’un résultatà atteindre,Dired'un des
signesdoit,parexemple,
servird'outilà laconception.
Lesdeux
rough qu'ilreprésente
celvéhiculeachevé,
c'estseplacerdepuisl'objet usages,
descriptif
etopératoire,
seconfondent parcequeledesigner
déjàconstitué, déjàadvenuetnondepuissonprocessus deconstitu. est
pensé
comme
unagent
conférant
une
signification,
indexant
un
tion; c'estpenser4posteriori
lecroquisà partirdu véhiculeeffectif. «message
»àl'objetconçu
:
Il n'ya rienà représenterdansun espace de conception,puisqu'on
nesaitpasencore
ceque
sera lachoseàconcevoir.Lateneurd'un Pourcomposer
sonmessage,
ledesigner
adû,plusoumoins
consciemment,
espace
diagrammatique
tient
ainsi plutôtdela«simulation
»oude puiser
dansuncode,dansun système
destructures
générales
reçues
comme
la«préproduction
»,pourreprendre
lescermes
queGuattari
oppose références
danssonmilieul?.
auparadigme
de la représentation
!!. La spécificitéde sapensée,
coupléeàcelledeSimondon etdeDeleuze,
estalorsdechercher
à Toutefois,prendreleplid’unepratique
inventive
sefaisant,
implique
qualifier
cescomposantes diagrammatiques
entermes sémiotiques, l'impossibilité,
danslemoment même dece«faire»,d'objectiver
un
dessinant
par-làlapossibilité
d’unepensée
dusignequinesoitni sensdéjàlà.
Il s’agit
aucontraire deconduirelagenèsed’unsens
non
représentative
nisignifiante. préexistant.C’estlesensd’unesémiotique proprementopératoire,
cherchant
à rendre compte dessignesparticipant
d'uneopération
entrain
IL.SÉMIOTIQUES
OPÉRATOIRES
: SIGNE/SIGNAL desefaire.
L'originalité
delapensée
dusigne
deGilbert
Simondon
se
caractérise
ainsiparuneattention
àladimension
opératoire
de
l'infor-
Deuxusages
delasémiotique
peuvent
êtredistingués
danslechamp mation,
etsonrapprochement
de lanotion
de«signal*
».Signal
et
dudesign.
Toutd’abord,
unusagedescriprif
participe
del'analyse
des signe
s'opposent,
classiquement,
en linguistique
:silesignal
chemine
: produits
dudesign
il s’agit
derendre
compte
delasignification
des hors
syntaxe
etresteindissociable
desonréférent,
le signe
linguistique
objets
quipeuplent
noscadres
devieenlesidentifiant
àdessystèmes
de
signes.
Cettesémiotique
peutêtreditesignifiante
encequ’elle
cherche organise,
quant
à lui,àpartird’une
structure
dont
on peut
formaliser
, Caractéristiques
logiques.Lesignalresterait
pauvrement
matériel,

àdécrire
unsens.
Lamobilisation
d’une
sémiotique
structurale
parJean
Baudrillard,
danssacritique
dudesign,
estexemplaire
decetusagt oùlesigne
seraitpursignifiant.
Simondondéplace
certe
distinction
en
sefocalisant
sur lagenèse
de
l'information.
Lacondition
fondamentale
Pour
qu'une
information
aitlieunetient
pas
àunétat
particulier
de
. Nous
qualifierons
de«chose
enconception
»cesurquoi
travaillent
lesdesign
——_
mi
5 md deleurpratique,
Atjustement celle-cin'étant
àdéfinir
cette
chose, pasencore
quecelle-ci définie,routleur
soitunobjet, cravail
uneimage.
U
dispositif,
uneinterface
graphique. 12:JeanBaudrillard,
Pourunecritique
del'économie
polirique
dusigne.
Paris,
10.Norman
Porter, Qu'es, dt "jo 1969].
Paris »1972,
p.229-255.
B42,2011,
p.139. Qu'est-ce
11.FélixGuattari,
qu'undesigner
La Révoluri
: objets,
3
lieux,messages
h
|
er
p.943
enVanLier,
«Culrure
er
industrie
:Ledesign»,
Crrigue,

246,
1967:
2012,
p.429, tion
moléculaire,
Paris,
LesPrairies
Ordir d' GilbertSimondon,
»Grenoble,
L'individuarion
Millon,2005,
à Lalumière
p. 222.
desnotions
deforme
et
Sémiotiques
etmicro-esthétique
dudeïign229
228 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECD'ELEUZE

ji. L'atrachement
deBense
aucouple
Signal/signe
vient
d'abord
l'émetteur
ni àunepropriété
du message,
maisà unétatSPécifique
4
dispositif
quilieunémetteur àunrécepteur,
queSimondonquais intérêtpourl'éthologie
a pourlephénomène d'imprégna-
de«métastable
»entantqu’ilestchargé
depotentiels
rendans
Possible Sn décrit
parKonradLorenz,c'est-à-dire
aulienexistant
entre
un
l'émergence
del'information.
Ainsifaut-il
entendre
«l'informatio Gest déclencheuretuncomportement. Replaçant
cePhénomène
comme
signification
relationnelle
d’une disparation,
c'est-à-dire
se. dans
lecadredl'expérience
e esthétique,
ilenvientàdévelopper
une
“émiotique
du processus de constitutiondesœuvres,
qu'ilnomme
comme problème nepouvantêtrerésolu
queparamplification
: micro-esthétique
»?1,Ce programme peutêtre rapproché
duprojet
GillesDeleuzereprend,
dansDifférence
etrépétition,
cette
ne
tionrelationnelle
d'unsystème
capabledeproduireuneinformation,
sémiotique
que
laquestion développeront
Deleuze
d’unesémiologie, etGuartari
d’une:ils'agit
c'est-à-dire de
science déplacer
dessignes
précisant
les rôles
du«signal»etdu«signe»dans
ce dispositif.
consrirués,
àcelled’unesémiogenèse,
àsavoir
comment
du signal,
Nousappelons«signal
»unsystème douéd'élémentsdedissymétrie,
ie nonencore
signifiant,
appelle
à lastructuration
d’une
information.
d'ordres
degrandeur
disparates
; nousappelons«signe»cequisepasse
dans
untelsystème,
cequifulgure
dansl'intervalle,
telleunecommunication
“ III. PLURALITÉ
SÉMIOTIQUE
s'établir
entrelesdisparates.
Le signeestbienun effet,maisl'eferàdeux ET MICRO-ESTHÉTIQUE
aspects,
l’unparlequel,
entantquesigne,il exprime
ladissymétrie
productrice,
l'autre
parlequel
il cend
àl’annuler'é, Lesigne
quisestructure
àpartird'unsignal
peut
êtredetrois
sortes,
suivant
en celaLatypologiedessémiotiques
queGuattariénonce
dans
Lesigne,
chezSimondon
commechezDeleuze,
n'estpasl'expression LaRévolution
moléculaire,
maisaussi,avecGillesDeleuze,
dans
Mille
d’un
sens
déjà
constitué,
maislamanifestation
d’unpotentiel
appelant plateaux®?.
Cesdifférentes
classes
designes
sont
impliquées
dans
la
àsestructurer.
Comme l'indiqueMurielCombes danssonouvrage pratique
même dudesign, modulant
lecheminement du
travailde
surlapenséedeSimondon, « il annonce moinsqu'iln'appelle
une conception.
Premièrement,lesigne
peurêtre
ditsignifiant
entant
qu'il
réponse,plusproche encelad'unsignedelamainqued’unsigne estattaché
aulangage. Ce niveausémiotique
est
le niveauclassique
prémonitoire
? ».Il estintéressant
denoterquecettepenséedu
signe d'analyse
del’activité
deconception:quelssontlesdiscours
énoncés
n'est
pasétrangèreàlaconstitution d’unesémiotique
pourledesign par
les
designers
ausujet
deleurtravail?
Quedisent
les
usagers
sur
leurs
auseindel'écoled'Ulm.Lesrecherches sémiotiques
calquéessurle pratiques?
Commentinterpréterlasignification
d’un
objer?Dèslors
modèle
linguistique, bienqu'elles restent
dominantes,nesontpas que
dessignes
nesontpasliésàunsystème linguistique,
ilssont
dits
lesseules
à s'exprimer
danscetétablissement.
Le philosophe
Max présignifiants.
Laformed'expression
estalorsliéeàlamatérialité
même
Bense,
enseignant
àUlmentre1953et1958,développe
ainsi,
dans dusigne
:lescouleurs,
les textures,
lesformes
plastiques,
enrant
que
sonouvrage
Aesthetica"#,
unepensée
dusigne
lié àlamatérialité
du matériaux
deconception,
jouentunrôledesignes
présignifiants.
C'esrà

15.
bide,
p.318. 19.Ils'écarte
ainsi
despositions
défendues
parMaldonado
en1958,
quidélaisse
16.
Gilles
Ddleuze,
Différence
errépétition,
Paris,
PUF,1968,
p.31.
17.Muriel
Combes, Simondon,
individu
etcollectivité.
Pourune
philosophie
és Lquestion
dusignal
pour
se concentrer
surlesigne
comme
élément
d'unsystème
ique.VoirTomasMaldonado, «Communication
etsémiotique
».
transindividuel,
Paris,
PUF,1999,
p.62.
18.
MaxBense,
Aerthetica.
Introduction
àLa
nouvelle
esthétique,
Paris,
Le
Ce,207. 20.MaxBense,Acsthetica,
op.cit.,p.200. |
Aethetica
n'est
pasunouvrage unitaire,
ayantétérédigé
enplusieurs
étapes
enlié
D 21.Bensedéveloppe
cetce
idée dansuncourttexte
incitulé
«Macro-etmicro
a 1982.I] manifeste
ainsi,aufil despages,
l'évolutiondelapenséedesonauteur
2. ke. ibid,p.189-200. &
452;Gilles
Deleuze
: uattari,
LaRévolurion
moléculaire,
op.
cit.P.
SilaPremière
partie,datant de1954,marque unintérêtpouruneherméneuti" ëFälix
Guattari,
MillePlateaux,
Paris,
ns deMinuit,
1980.
P.RES
dusigne
esthétique,
laseconde, rédigéeen1956,s'intéresse
davantage
à laQr
Iinformation
eràLacybernétique.
C'est
dans
certe
seconde
partie
qu'une
re terminologie
varie
parfois
dans
cesrextes,
lestermes
«post-signifiant
».*ask
dusigne
àpartir
deLanotion
designal
estmise
enœuvre, jun de»,
Partir €st«asignifianc
ces ources, »secroisant
unetypologie par
pm
claire oments.
our NousDL
lapratique dusÉ,
sémiorique
émi quesetmicro-esthétique
dudesign231
230 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

ceniveau
quesesitue
l'enjeu
dutravail
descroquis,
desMaquettes,
des dansleprocessus
de conception,exà lafoisPrésignifiante
entant
qu'elle
échantillons
dematière,
desprototypes
danslapratique
deConception jimeune
certaineformeà partirdesamatérialité,
mais également
SiDeleuzeetGuattari
parlent
parfoisde«sémiotique
primitive
, ; su signifante
entantquelleagitaussi
comme unsigne
effecteur
poussant
sujet,il nes'agit
absolument pasdedirequ'elles
sontarriéréesou in rransformation
26,C’estparcequelaconfrontation
d’unprototype
sommaires,
mais
d’insister
plutôt
surleurancrage
avec
lecorps,
ave. ÿunscénariod'usagepeutentraînerunemodification
réciproque
de
lagestualité
ducorps*.Danslecadredudesign,
ceciCorrespond
à ces
deux
signes,
queceux-ci
entrent
dans
uneasignifiance,
C’est
dans
la
desformes
d'expression
artisanales
dont
la disciplinehéritedepuis
le existence
etlaconfrontation
dseignes hétérogènes
quelaconception
x siècle?. consistance.
L’asignifiance
désigne
ainsi,
nonun#pe
designe
Enfin,Guattari
identifie
untroisième
rypede
signe,qu'ilqualifie iculier,
maisunecaractéristique
trans-sémiotique,
c'est-à-dire
un
depost-signifiant.
Ceueclasse designesconcernelechiffreerlacompu- mode
derelation
productrice
entre
signes.
Noussouhaiterions
donner
à
tation,
leur histoireérantnotamment
liée, à partirdesannées 1950. l'analyse
decesopérateurs
sémiotiques
lenom
de«micro-esthétique?
»,
audéveloppement
industriel
delacybernétique
etàladiffusion
des enréférence
ausensqueMaxBensedonne
àceterme
dansson
analyse
technologies
numériques.
Unsignepost-signifiant
diffèred'unsigne delapeinture.
Bense
oppose,
en effet,
unemicro-esthétique
àlamacro-
pré-signifiant
commeunemaquette
encarton
diffère d'unemaquette esthétique.
Par macro-esthétique,
nousentendrons
dansunpremier
numérique,
lerendu
decerte
dernière
étant
assuré,
nonplus
par
la tempslathéoriedesaspects
accessibles
etévidents
lorsqu'il
s'agit
de
modulationdelamain,maispardesalgorithmes
variant
en fonction laperceptionoudelareprésentation
d’unobjetesthétique
oud'une
deslogiciels
urilisés.
Cessignes
impliquentdesformesd'expression œuvred'art,tandis
queseranommée micro-esthérique
lathéorie
des
typiquement
industrielles,
c'est-à-dire
nonplusliées
àlagestualité
des aspects
nondirectement
accessibles
ounonévidents
del'œuvre
d'art
ou
corps,
maisà desréseaux
techniquesd'échelle
plusvaste.
Cesdiffé- del'objet
esthétique
: celle-ci
jettelesbases
d’unsystèmedes
éléments
rentes
sémiotiquesrestent
descriptives
sil’onconsidèreunénoncé,
unemaquetteouunalgorithme
pourlui-même, c'est-à-dire
endehors
duprocessus
deconceptionauquel
il participe.
Cependant,dèslors 26.Nousmodifions
unpeulesensduconcept
d'«asignifiance
»pour
ledistinguer
quecessignes
setrouvent
manipulés dansunespace deconception, decelui
queluidonnent
certains
commentateurs
delapensée
guattarienne
(notamment
Maurizio
Lazzaro
etGaryGenosko).Cf.Maurizio
Lazzarato,
Signs
andMachines
:
ilsnesontjamaisdéfinispoureux-mêmes
: on neconstruit
pasune
Capitalism
andtheProductionofSubjectivity,
LosAngeles,
Semiotext{e),
2014;
maquette pour faire une maquette, mais pour configurer, commeon Gary
Genosko,
«Banco
surFélix
»,Mulrinudes,
n°34,2008,
p.63-73.
Pour
ces
derniers,
l'avu,cemilieu
associé
àla«chose
enconception
». l'asignifiance
correspond
àcequenous
avons
nommé
le«post-signifiant
»,àsavoir
Ainsi,
ces signes
(pré-/post-/signifiants)
sontd'abordcultivés
pour une
sémiotique
propre
auxfluxchiffrés,
numériques,
informatiques
- Guattari
notant
leurcapacité
ànourrir
lagenèse
decette
chose
quine
fair pasencore lui-même
plusieurs
foislerapprochement
qui
existe,
pour
lui, entre
post-signifiant
sens.
Ausein
decetespace
deconception,
ils entrent
alors
dans
un &asignifiant.
Toutefois,
Guattari
précise
aussi
que
l'asignifiance
désigne
d'abord
un
devenir
asignifiant,
danslesensoiùls sontmisautravailpour
instaurer devenir
possible
detoutes
lesautres
sémiotiques
(mêmedes
sémiotiques
signifantes)
:
*Cesmachinesasignifiantes
continuent
des'appuyer
surlessémiotiques
sigrifiantes
choseenconception.
L'asignifiance,
pour Guartari,désigne
ainsi lincluant
ici lessémiotiques
pré-etpost-signifiantes},
mais
ellesnes'en
servent
plus
que
lestatut
desémiotiques
qualifiant
cequiestencore
dudomaine
du “mme d'unoutil,d'uninstrument
de dérerritorialisation
sémiotique,
qui
permettra
virtuel,
L'asignifiance
rend
dès
lorssensible
unequestion
philosophique aufursémiotiquesd'établir
desconnexions
nouvelles
avec
lesfluxmatériels
Les
plus
importante
danslechamp
dela conception
er
de lacréation
engénéral: déreritorialisés
»(FélixGuartari,
LaRévolution
moléculaire,
op.cit.P. 452).
Ainsi,

quel
estlemode
d'être
d'unprototype
oud'uncroquis?
Unemaquetk: Stvrai
queLessémiotiques
chiffrées
del'informatique
sont
particulièrement
endines
‘l'asignifiance,
dessémiotiques
pré-signifiantes
ousignifiantes
peuventDU
tee ter dansundevenirasignifiant
dèslorsqu'elles
sont
travaillées
parrage _
23.Gilles
Deleuze
etFélix
Guattari,
Miplateaux,
op.
cit.pY47-
. Qui sepassepourunemaquetteouunprotorype dans
unprocessus
dedesign.
Les
24.C'est
encesens
qu'ils
nt dele D ledei de de présignifiant: 27.Le Préfixemicrovientde l'importance
querevétent
poursa $
25.C'anes cea E É illiamMor Buleversemenrs
apportés
parlamicrophysique.
Il partage
ainsi
avec
FélixMat
sens Comme €
sources qu'on
d'influencepeut
lireLerôle
dumouvement deJohnRuskin
moderne etdeWill
endesign. Beggeention
àune
matière
incrinsbquement
dynamique
etimperceptible.
*ethelica,
op.
cit.,
p.91-192.
Séniotiques
etmicro-eshétique
dudesign
333
232 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDeLeuze

esthétiques,
des
signes
etdeleurs
processus”.
LaMACTO-esthétique
mer delacompréhension
pourentrer
dans
celui
delaproduction
:
enjeudes
sémiotiques
descriptives,
signifiantes,
fonctionnant
; Partir ne fait«signe»,nondemanière
universelle,
mais d'abord
pour
d'unités
stables.il insisteainsisurlefaitqu unepensée
del'œune lesigni leprendenchargecommetel,pourceluiquiassume,
par
celui
+ lerenvoientreunemaquerteetuneinfographie,
entre
un
cherchant
àcomprendre
lamanière
dont
elle s’instaure,
chnique etun manifeste,
prolongeant
par-là
lagenèse
dela
pour
peu
qu'on
s'intéresse
àses
signes
constitutifs
etauxprocessus
Quiseniks .
choseen conception ».
siens,
nerelève
pasdudomaine
strictement
descriptifdelamacro-csthétique
mais
constitue
lacomposante
principale
d'unemicro-esthétique*.

Celle-ci
qualifie
doncunesémiotique
opératoire
etnonplus
simple.
ment
descriptive
:

Lessignes(lerythme, lemètre,lesrapportsforme-couleur, lesparticules


syntaxiques,
les significations,
lesmotseux-mêmes, lescouleurs elles-mêmes)
remplacent,enmicro-esthérique,les objetsdela représentation (leschoses
réelles,
lesscènes,lesfables,
lesactions,lesconflits,etc.),qui,eux,
relèvent
dumonde macro-esthétique*!,

PourBense,
unesémiotique doitêtrecapablederendrecompte
desrelations
detension entrecesdifférents
«signes-particules*
»
quiconfèrent
undynamisme àlapeinture.Si sonanalyse
entermes
micro-esthétiques
selimite,danscecourttexte,àrendrecomptede
lapeinture
deMaxBill,il noussemble quel'opérativité
desoutils
guartariens
danslechamp même dudesign —pluralité
deformes
et
dematières
d'expressionsémiotiques,importancedessémiotiques
asignifiantes
pour
qualifierleprocessusdegenèse—peut
servirdebase
àl'instauration
d’unemicro-esthétique
du design,
s'intéressant
moins
auxformes
molaires
qu'ilproduit
qu’àcessignes-particules
quifont
ledétaildutravaildeconception.
La questiondu signesort
ainsidu

——.
28,Jbid.,p.192.
é 29.Ainsi,Parexemple,
«laséparation
entreformeetcontenu
semble
être
une
différenciation
macro-esthétique
» (ibid, P- 194),De même,
les catégories
chassique

Somme
le«beau
»oule«aid»appartiennent
non-beau
SomMencent
àlamacro-esthétique
ainsiàperdre
cequ'illeur
:«Le
"beau
«1

restaitdecaractère
identilicaruite
cœidr csattriburs
gnoséologiquestelsqu'ilsenpossédaient
dansl'artmatter
esthétiquemonde
desobjets
»(ibid, p.193-194).
30.
/bid.,
p, 191, ;
31.
Jbid,,
p.193,
tr Guatari
L'inconscient
machinique.
Enais
deschigoanalye,
Varis,
Rehetde
Joueur de tambour Tarahumara
Nararachic, Mexique (photo Ravimonde (

}
JoueurdeflüteectambourTarahumara
(avril19 Le dernierChaman Tarahumaraet sarape (ni
Nararachic,
Mexique(photo: Raymonde
Carascu Nararachic,
Mexique(photo
: Raymond
PRENDRE SOIN
DES LIGNES DE FUITE
XIX

«L'artestcequirésiste
même
si cen’est

laseule
chose
quirésiste
»

RAYMOND
BELLOUR

Le17mars1987,GillesDeleuze
prononce
devant
lesétudiants
de
laFEMISune
conférence: «Avoiruneidéeencinéma »,quideviendra
? fameuse
sousletitre«Qu'est-ce
que
l’acte decréation!
». Ilcommence
pardesqualifications
et desdistinctions
entre
domaines,
comme
il
lefera
quelquesannées plustardavecFélixGuartari
dansQu'est-ce
que
laphilosophie
?Uneidée
setrouve
par-là,
d'emblée,
vouéeàtelou
teldomaine. «C'esttantôtuneidéeenpeinture,tantôt
uneidée
en
roman, tantôtuneidéeenphilosophie,tantôtuneidée
enscience.
»
Ainsi
la philosophie,
ditDeleuze,
«consisteàcréer
oubieninventer
des
concepts»,alors
que
le cinémainvente,
lui,«desblocs
demouvements/
durée.Lapeinture invente
untoutautre cype
deblocs.Cene
sontni
des
blocs
deconcepts,
ni desblocsdemouvements/durée,
mais
des
blocs
lignes/couleurs.
Lamusiqueinvente
untout
autre
rype
deblocs,
toutaussiparticuliers
». La limitecommune
à toutes
cesinventions,
ajoute
Deleuze,
c'est
laconstitution
desespace-temps.
Etc'est
ainsi
que,
s’arrêtant
surplusieurs
exemples
couchant
le cinéma,
opposant
par-kà
l'artàl'information
et àlacommunication, etrevenantsurle
nouveaudestin propre
auxsociétésdecontrôle,posant encelaque
«lacontre-information
n’esteffective
quelorsqu'elle
devient
unacte
derésistance
»,Deleuzeenvient àformuler«une affinitéfondamen-
tale
entrel'œuvred'arterl’acte
derésistance
».Iléclairecerapport
“mystérieux»parcequ'ilappelle«unbeau concept philosophique
deMalraux disant«unechose trèssimplesurl'art[..},que€st
me

Da ete 2térepris
danslesecond
volume
desrestes
deGilles
Deleuze
réuR
Pa"
jade,
Deux
régime
de
fou,
Paris,
Éditions
deMinuit.
2003.
7e
Pr toutes
lescitations
quiyrenvoient,
etParis,
lieudepublication
pour
us
ce 242 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECD'ELEUZE
V7 L'artestcequi;résiste
même
si <e#65pas
m4 la seulechosequi rés, 243

seule
chose
qui résiste
à la mort».Ainsi «l’artestceQuirésisr
eintitulé
:«L'image
delapensée
»,Deleuze
s’
sicen'est
paslaseule
chose
qui
résiste».Revenant
surle de æœ
a contre lespostulats
—ilendécompte ir an defaçon
Straub,
Deleuze
développe
finalement
à partir
deleur Pie des philosophie
uneimage de
la pensée:«Imageengénénlquien
faces
del'acte
derésistance
: «Il esthumainetc’estaussi
r subjectif
delaphilosophiedanssonensembles
, tuele
l'art.Seull'actederésistance
résiste
à la mort,soitsouslaforme
d’ vaut
ici pour
représentation,
maisletermed'«image doute
»reste
bien
œuvred'art
soitsous
laformed'uneluttedeshommes.
, 1eÈ une alors
visé
enlui-même comme «Icône»àdétruire.Pour
compliquer
decerapportressort
endernier
lieu desmots énigmatiques
deP ladonne,
c'est
àl'artmx dans
celivre
dont
l'avant-p
Topos
compte
Klee
queDeleuze asouvent
aiméinvoquer,surlepeuple
quiman 4 1deréférences
aux écrivains,
queDeleuze
revient
e e
cepeuple quin'existe
pasencore
etauquell'œuvre
d’artfaitàQue, wr rendre
àlaphilosophie
lemodèle
d’une
er minces
Il peurparaître
étrange
quelaphilosophie
n'entre
pasdans ceris àunartsingulier
: «Lathéorie
delapensée
estcomme
lapeinture,
delarésistance,
alorsquec'estsaforcemêmedeposercerapport we elle
abesoin
decette
révolution
qui
la faitpasser
delareprésentation
l'artetlaluttedeshommes.Et si la convictiondeMalrauxsurl'an àl’artabstrait
: telestl’objetd’unethéorie
delapensée
sans
imaget,
»
« comme la seulechosequirésisteà lamort»estqualifiée
parDeleure ILestfrappant
qu’aufil del'ouragan
précipité
dixannées
durant
par
dephilosophique, elle n'ensuppose pasmoinsquel’artferait
par
là larencontre
avec
FélixGuattari,unteldilemme
paraisse
s'être
comme
cequenefaitpaslaphilosophie. Danscetournoiement depositions évanoui
(«marencontre
avecFélixGuattari,
diraDeleuze,
achan
etdemors, il fautvoir,semble-t-il, bienplusqu'uneapparencede bien
deschoses”
»).DansL'Anti-Œdipe
comme
dans
Mille
plateaux,
contradiction,
l'indiced’unrapport fondamentalementindécis
entre toutes
sortesd'œuvresd'artsetrouvent
régulièrement
convoquées,
l'artetlaphilosophie donttoutel'œuvre deDeleuzetémoigne,
pour soutenant
librementdesdéroulés
conceptuels
qu'elles
semblent
aussi
lebienmutuel del’unetde
l'autre,etquisemble valoir
d'êtreprécisé. biensusciter.
La pensée,
avecou sansimage,
nesemble
pluscomme
J'aidéjàinsistéicietlàsurcetteindécision,
et jevaissimplement telle
unsouci; desimages affluent detoutespartscomme pensée(s),
enrappeler d'abord quelquestoursetdétours pourtenterdemieux desvisions
pressantesetplurielles
dontla réalité
del'art(alors
surtout
lacerner àtravers lesdeuxderniers livresdeDeleuzeoùelleatteint littérature
etmusique) pourraitêtrelalignedefuite
laplussüre,
comme
unpoint
d'effervescence,
Critique
etClinique
etL'Épuisé.
Onsait
à entémoigne,
d’ungrand livreàl’autre,leurKafka.Pour
une littérature
quelpoint,aunomde l’imagedelapensée inlassablement
dressée
par mineure,
Aussi
est-cetoutnaturellement queDeleuzeva,pendantles
Proustcontrecelledelaphilosophie, Deleuzea insisté
dansProust
et annéesquisuivent,consacrer seslivresàdesartsd'image, peinture
Lessignes
(1964)surla rivalitéainsiouverte,
écrivant parexemple
: etcinéma.Comme s’il s’agissait,
désormais, deremplirpositivement
«Laphilosophie, avectoutesaméthode etsabonnevolonté, n'est l'image
delapensée parl’artdesimages elles-mêmes,
devenantainsi
rienfaceauxpressions secrètes
del'œuvre d'art.» Ouaussibien,
au legarant
delaphilosophie commeart.
nomdelanécessaire violence
propreà lapensée : «plusimportant LelivresurBacon,Logique delasensation,
dontDeleuze
asouligné
à quelephilosophe, lepoète. »MaisDeleuze n'enprécisepasmoins, leplaisir
singulier
qu'ilavaittrouvél'écrire,estexemplaire
àbien
des
d’unretournement quiouvreuneperspective affoléeàuneopposition égards.
Onpeut
sanstropdedifficulté
yreconnaître
unper
ainsi
destinée
àdevenir
d’une
ambiguïté
souveraine,
etannonçant
# fantastique
doncBacon
luipermet
deréaliser
àsonprof
l'imag*,telle
qualification
futurede
l'affirmationdeMalraux: «Il sepeut
que
la qu'il
l'avait
quelques
annéesplus
tôtcernée
dans
laconclusion
ajoutée
critique
dela philosophie,
tellequeProustlamène,soitéminemment
sonlivre
surProust
déjà
auparavant
augmenté,
«Présence
etfonction
philosophique?.
» delafolie
: l’Araignée
».Proust
y devenait
«leNarrateur-araignée
dont
,
On
sait aussi
combien,
quatre
ansplustard,dans
Différence
à nn

répétition,
reprenant
d’unlivreà l’autre,pourunchapitre
cœnt 3.Gilles
Deleuze,
Différence
etrépéririon,
Paris,
PUF,
1996,
p.
172
4.Ibid,
p.354. . ario
1% 5.GillesDeleuzeet ClaireParnet,Dialogues
(19771,
Paris,
Fan
se 2 Deleuze,
Proust
etLes
signes,
Paris,
PUF,1976,
respectivement
P coll.«Champs», 1990,
p. 23.
244 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE
VTT
«

latoilemême
est
la Recherche
entraindesefaire»: «unénorme
Corps
sans
organes.
»C'est
cette
même
image
queDeleuze
retrouve jaueles*.
formule»Ceserait
consacrée sags Mais
deBeckett.RAGE faire
l'image
entre-temps
s’est »,ans
joué
d Suivant
tla
lesrois
àtravers
lafonctionde«la Figure,quiest l’improbable
même
, derniers
livres
deDeleuze
unesorte
de«drame
»(c'est
lemor
parlequel
«précisément
lecorps
sans
organes”
».Figure
inlassablement
dévelop
; j qualifiait
dans| Avant-Propos
deDifférence
etrépétition
l'aventure
àtravers
maints
tableaux
deBacon
er qui
le reconduit
vers Proust desconcepts).
Drame quiporte
auplusloin
la tension
parlaquelle
qualifier
auplus
près
ladémarche
dupeintre
etcequ’ilcherche
enlui: (selon
cequ'ilécritdans
sa«Lertre-Préface
»aulivre
deJean-Cler
Martin)Deleuzesevoulaitdefaçon très classiqueunphilosophe du
Bacon,
quandilrécuse
ladouble
vued’une peinture
figurative
etd’une dés ème,mais supposaitquecesystème soitunehétérogenèse,
«cequi,
abstraite,
semetdans une
situationanalogue àcelledeProustenlittérature mesemble —ajoutait-il, modestement et fièrement —n’ajamais été
Proust
eneffetnevoulaitpasd’unelittérature
abstraite
trop«volonraire, genté!!
».Autantdire: uneouverture surl’improbable.
(philosophie),
etpasdavantaged’une
littératurefigurative,
illustrative
: Onsaitcomment, pourproprement qualifierlaphilosophie
entant
narrative,
apteàraconterunehistoire.Ceàquoiil tenait,
cequ'ilvoulait ecréationdeconcepts, Deleuze aentrepris,
dans sondernierlivre
amener
au
jour, c'était
unesorte deFigure,arrachée
àlafiguration,
dépouillée écrit
avecFélixGuattari,Quest-ce quelaphilosophie},
deladistinguer
deroute
fonctionfigurative
: uneFigure
ensoi,parexemplelaFigure
en etdel'accorder
à lafoisavec lesdomainesconjointsdelascienceetde
soideCombray.
Il parlait
lui-même de«vérités
écrites
àl'aide
defigures®. l'art.
Siconnu celasoit-il,il vaut
la peinedelerappeler,souslaformu-
lation
laplussynthétiqueque leursauteurs enaient
donné :«Lestrois
On
est aussi
frappé
que,dans
ce livre,lesréférences
soient
pour sont
irréductiblesavecleurséléments :pland'immanence dela
l'essentiel
faitesà desécrivainserà despeintresservantà parfaire philosophie,
plandecomposition
del'art,planderéférence
oudecoordi-
l’image
queDeleuze chercheàdresser deBacon: Kafka,Becker, nation
delascience
;formeduconcept,
force
delasensation,
fonction
de
Conrad,
Burroughs,Lewis Carroll,
Moritz,Turner,Cézanne,Artaud, laconnaissance
; concepts
etpersonnages
conceptuels,
sensations
etfigures
VanGogh,Michaux, Gauguin,D. H. Lawrence àpropos duquel athétiques,
fonctions
etobservateurs
partiels"?
»C'est
entre
cesdivisions
Deleuze
rappellequ'àsesyeux«lapomme deCézanneest [..] plus tranchées
queseposeleproblèmecrucial
des«interférences
entre
plans
importante
que
l’idéedePlaton”».Ainsi,
la Figuredevenant
parlegeste quisejoignent
dans
le cerveau».Interférences
extrinsèques,
d’abord,
dupeintre
comme le modèle desrequalifications
duconceptpropre quand parexemple«unphilosopherentedecréerleconcept
d’une
àlaphilosophie,
Deleuzedégageàtravers cesimagesdepeinturesa sensation
».Larègle
veut
alors
«que
la discipline
interférente
doi[ve]
méthoderenouvelée
dephilosophe;ildressesapropre
erbonne image procéder
avec
sespropres
moyens
».Maisunsecond
type
d’interférence
delaphilosophie
comme
art, dont
l’art ouvreladimension.
Etainsi, est
dite«intrinsèque,
quanddesconcepts
oudespersonnages
concep-
passant
de lalogique
delasensation
àcelles
deJ'image-mouvement tuels
semblent
sortir
dupland’immanence
quileur
correspondrait,
etdel’image-temps,
Deleuze
accomplit
aufilducinéma
untour
des pour
seglisser
surunautre planparmi
lesfonctions
er
lesobservateurs
imagesdusiècle
dont
la vircualité
deplusenplusaiguëserre
d'un partiels,
ouparmi les sensations
etlesfigures
esthétiques;
etdemême
tourd'écrou
supplémentaire
l'avancéedesaphilosophie. Jusqu'à
@æ pourlesautrescas»,Il envaainsideZarathoustra
chezNietzsche,
livreentrepris
sur
le virtuel,
ouautour duvirtuel,
dixansplustard, d'Igitur
chezMallarmé.
Cesont
là «des
plans
complexes
difficiles
à
dontseules
quelquespagessontrestées,
témoignantduprojet d'aller qualifier
».Enfin,lesinterférences
illocalisables,
lesplus
difficiles
à
auplusextrêmed’unepenséepossible
del’imagecomme incertitu Sncevoir,
cherchent
àcerner
lafaçon
dontchaque
discipline
entre
etindétermination
: «Toutactuels'entoured’unbrouillard
d'images
mr
—————_—_—__—__m-
10.
Gilles
Deleuze
erClaire
Parnet,
Dialogues,
op.
cit.
p. 179.
6.GillesDeleuze,
Proust
erLes
signes,
op.cit.,p.218. Variations.
7.Gilles
Deleuze,
Logique
deLasensation,
Paris,
LaDifférence,
1981,
p.33: La11.
« Lettre
Préface
Philosophie
de deGilles
Gilles
Deleuve,Deleuze
Paris, »,inJean-Clet
Payot, p.8. Martin,
1993, |2,Paris,Éditions
8./bid,p.46, 12.
Gilles
Deleuze
etFélix
Guattari,
Qu'ésr-ce
que
Laphilosophie
9.Ibid,p.57. Minuit,
1991,
p.204.
246 AGENCSR
LESMULTIPLICITÉS
AVECDeLeuze
er
àparce quirésiste
même
sicen'est
pasLaseule
chose
quirésine,247

àsamanièreenrapport avecunnégatif,unenon-philosophiew qre


Foucault
etMichaux
ned'autant
Plus
forte
qu'elle
nesemble
pas
non-art,
unenon-science,qui
se «distinguent
encorepar
ra . ireudefondement réel—Michaux estparexemple
citédeux
fois
plan
cérébral
[...]maisnesedistinguent
plus parrapportauchaos sine, etdefaçontriviale,
dans
les quatrevolumes
desDitsetécrits,
dans
lequel
lecerveau
plonge ».C'estalors,
entoutefindeParcou Erc'est
ainsique,deFoucaultàLeibniz,Michaux
Servant
encore
querevient
«l'ombredu“peupleà venir”,si prochedu “peuple
. quns
LePHdemodèleà l'implicationentrelesdeuxniveaux,micros-
manque”
invoqué
àlafindeQu'est-ce
quel'acte
decréation»,
:ombre cobias& macroscopique,
de « la Perceptiondans
les plis»,il en
quesemblentpartager
cestroisgrandsdomainesun Peuplusrér viendra
àoccuperdansQu'est-ce queLaPhilosophie
?uneplaceou
qualifiés
de«Chaoïdes,
lestroisfillesdu chaos!».
plutôt
unefonction
absolument singulière:fonction
deconfusion
Unexemple
setrouve,
àtravers
celivreetdansd’autres,
antérieurs, entre
leplandecomposition de
l’art etlepland'immanencedela
deDeleuze,
servirdefigureélective
à cesinterférences
intrinsèques
ü philosophie,
ensortequil deviennel'exemple
Princeps
decequise
illocalisables,
qualifiées
aussi
d'indécidables.
11s'agit
d'Henri
Michaux,
gouve
ainsi
le plusdifficileà qualifier,quelquepartentre
lesinterfé-
surlequeljedoisrevenir
même sje
i l'aidéjàfaitparledérail
dans
le rences
intrinsèques
et
les interférences illocalisables.
Michauxestcité
cadre
dl'éditiondeses
e Œuvres complètes
danslaPléiade.L'usage
fair sixfoisdanscelivre”.Unefois,simplement,
aunomdel'athlétisme
deMichaux sembleainsiavoirlongtemps
cristallisécequisepréci- affectif
erdel'écriture
comme santé.Uneseconde
fois,logiquement,
pitera
dans
lesdeux
derniers
livres
deDeleuze.
11apparaît
d'abord
de quand,
envisageantcequi sépare,
maispeutaussirelierpersonnages
façon
stratégique
audébutdeZAnti-Œdipe, quandil s'agitdedonner conceptuels
et
figures esthétiques,
Deleuze
erGuartari enviennent
à
emblée uneimagedl'inventionschizophrénique,
e àtraversl'évoca-
envisager
comment,
dansdes
tiondelafameuse
«tableà rajouts»décriteà loisirdansLesGrandes
Épreuves
del'esprit'*.
Maïsc'estdans
le Foucaultquela référence à
Michauxacquiertunedimensionde trouble.En premier lieu, de œuvres
auxpiedsdéséquilibrés,
Hôlderlin,Kleist,Rimbaud,
Mallarmé,
Kafka,
façon
implicite,
aumoment
où,pourqualifier
lecœurdelapensée Michaux,Pessoa,
Artaud,beaucoup
deromanciers
anglais
etaméricains,
de
deFoucault,
Deleuze
recourtà un titreemblématique
deMichaux
: Melville
àLawrenceouMiller{.….],
les deux
entités
passent
souvent
l’une
«unespacedudedans,quiseratoutentier coprésent
àl’espace
du dansl'autre,
dans
undevenirqui
lesemporte
toutes
deux,dansuneintensité
dehors
surla
ligne dupli!5.» Puis,defaçon
insistante,sitôtqu'en quilesco-détermine.
(p.64-65)
findeparcours,
dansdespages d’uneforcedesuggestionvibrante,
Deleuze
s'attache
à ressaisir
«lagrandefictiondeFoucault
»,partagée Desorte
que«cespenseurs
sont«àmoitié»philosophes,
mais
entre
levisible
etl'énonçable,
Lumière
et Langage,
maisvisant
au-deli issont
aussi
beaucoupplusquephilosophes
».Maisdans
lesquatre
lapureligne
dudehors.
Il y fautpourl'exemplifier
cequ'ilnomme autres
occurrences,
Michauxsetrouvecitéuniquement enregard
«dessingularités
derésistance
»ou«sauvages ».D'uncôtélaligne dephilosophes.
D'abord,quand
il s'agitdedéfinir
le rapport
entre
deMelville;
del'autre
lalignedeMichaux, «auxmilleaberration, ksconcepts
erLepland'immanence
: «d'Épicure
àSpinoza
{…],
de
àvitesse
moléculaire
croissante
».Et,reprenant
lesmotsd'espace
du Spinoza
àMichaux,
leproblème
delapensée
c'est
lavitesse
infinie
»
dedans
exposant
ledehors,
Deleuze
leséclaire
pardeux
titres
encore *38).
Puisàproposduplanencore
:
deMichaux
: «Lepluslointain
devient
intérieurparuneconversion
auplus
proche
:L2viedans
Les
plis.»Il yreviendra
encore,
dans
un On
court àl'horizon,
sur
le pland'immanence;
onenrevient
avec
les
Entretien
sursonlivre,postulant
avecinsistance
une
relationélective Yeux
rouges,
mêmesi cesontlesyeuxdel'esprit.
MêmeDescartes
ason
rève.
Penser,
c'est
toujours
suivre
une
lignedesorcière,
Parexemple
Le
plan
ne,

13.
/bid.,
p.205-206. ; en

14.
Gilles
Deleuze
etFélix
Guarari,
LAnti-Œdipe,
Paris,
Éditions
deMinuit, 1 16.GillesDeleuze,
« Un portraitdeFoucault»,entretien
avec
ClairePamnet,
1972,
p.13. 86,inPourparlers,
Paris,Éditions
deMinuit,1990,p.152-153.
15.
Gilles
Ddcuxe,
Foucaur,
Paris,
Éditions
deMinuit,
1986,
p.126. 17.GillesDeleuzeet FélixGuattari,Qu'est-ce
queLaphilesophie?,
op.cit.,
UP. 163,64-65,38, 44, 59, 195.
“7
ns et cequi réviste
même cens pasa seule
chose
quirés» 49
248 AGENCER
LES
MULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

d'immanence
(C'est
moiqui
souligne)
deMichaux,
avecsesMouvements rdesns directes
PE desœuvres
philoso
phiques
ses
vitesses
infinies,
furieux. ades
textes
d originesin de ormules
poétiques
pourKane:
çainr-Paul
pourNietzsche;
À redJarrypourHeidegger.
L'effet
Michaux
setrouve
ensuite
associé
denouveau
à Foucault
quand
i] enl'occurrence,
décisif, et bienau-delà
àtravers
l'ensemble
dulivre
processus
decontamination,implicite
plusqu'explicite
ads
s'agir,
danscequiestpeut-être,
écrivent
les auteurs,
«legestesuprême estainsi le
delaphilosophie»,deressaisir
lemouvement infiniduplanerde + pluspuissant,
quise tresse
entrecesœuvres
sidi i
pr soient
delittérature
oudephilosophie,
mou
rvenir
ainsi
àlepenser
continuellement
comme dedans etdehors
àL
Lngage,
etquitiennent
decetteunitéd'expression
unecommunauté
fois,telquel’afairparexcellence
Spinoza,
«leChristdesPhilosophes
.
Enfin,
quand
il fautendernier
lieupenser
le concept
dans
sonrapport indéfecrible
d'artetde pensée
—depensée comme art,d'artcomme
Soulignons,dernierpoint,quequatre
decestextesportent
sur
essentiel
aveclechaos,
soitatteindre
« leplusvitepossible à desobjets
mentaux déterminables
commeêtresréels»,Michaux se trouve associé des
auteurs
auxquels
Deleuze
adéjàconsacré
unouplusieurs
livres,
certe
foisàSpinozaetàFichte,dèslorsque,comme il dit, «cequisuffit œquisouligne
leurvaleurd'insistance
; desortequ'uneffeprojectif
aux«idées
courantes
»nesuffitpasaux«idées
vitales
»—celles
qu'on ge
rouve
ainsiportérétroactivement
surl'ensemble
del'œuvre.
doitcréer».Oncomprend que
cesoit àpartirdecepointdeconfusion Maissurtout,on s'arrêtera
surletextefinal,Spinoza
etlestrois
entreartetphilosophie,
dontMichauxestainsidevenupourDeleuze «Éthiques
»,auquelsapositionconfèreaussiunevaleur
stratégique.
l'emblème énigmatique,
qu'il faillesituerle troubleplusextrême
qui Onserappelle
évidemment queDeleuze publieen1968Spinoza et
sepropage
àtravers
sesdeuxderniers
livres.On peuttenter
d’abord Lproblème
del'expression,oùil cerne
en appendice laquestiondes
del'esquisser
àtravers
deuxaffirmations,
l'une
qui
introduit
lapartie deuxÉthiques
dansL'Éthique, entrelacontinuitédespropositions,
«art»deQu'est-cequelaphilosophie
?,
l'autrelaphrase deProust qui
sert démonstrations
etcorollaires.
Il revientrapidement
surcepoint,en
d'exergue
àCritique etClinique.
Lapremière reprend lathèsecentrale 1981,
dansladeuxième éditiondesonSpinoza Philosophie
pratique.
portéeàtraversMalraux dans«Qu'est-ce quel'acte decréation? »: Dans
sa «Lettreà RédaBensmaïa surSpinoza»(1989,reprisedans
«L'artconserve,
er c'est
laseule
chose aumonde quiseconserve". » Pourparlers),
il introduit
l'idée
d'unetroisièmeÉthique,exainsi
devrois
Laseconde,àtraversProust,
qualifie
la littérature.et l'artàtravers
elle: langues
mêléescorrespondant àtroisniveauxconceptuelsdistincts.
«Lesbeaux livres
sontécrits
dansunesorte delangue étrangère”.» C'est
certe
idéequ'ildéveloppe iciànouveau enrevisitant
souscet
Étrange livre,pourpeuqu'ony songe, queCritique etClinique. angle,
enparticulier
à traverslelivreV, laforce
expressive
erlegénie
D'uncôté,fortdesonchapitred'ouverture, «Lalittératureer lavie», philosophique
exemplaire
deL'Éthique.
Sans
entrer
dans
ledétail
il seprésente
commeunensemble
d'essais
variéssur
la littérature
qui vertigineux
decetexteadmirable,
rappelons
queDeleuze
ydistingue
à
viendrait,
onl'imagine,
paracheverlamasse
considérable
derextes
et travers
lestrois
Éthiques
lesSignes
ouaffects,
lesNotions
ouconcpts,
delivres
déjàconsacrés
aufil dutempsparDeleuze
à desécrivains, etlesEssences
oupercepts.
On remarque aussitôt
quecesderniers
se
demanière à configurer,
à l'intérieurde l'ensemble
del'œuvre,
un wouventdésormais
seulsdotésdelavitesse
absolue
qui qualifiait
le
équivalent
massifmaisfragmentaire de songrandtravailsystéma- concept
deuxansplustôtdansQu'est-ce
quelaphilosophie?
leconcept
tiqueportant
surl’art du cinéma.Il estd'autrepartimportantde n'étant
plusiciaffectéqued'unevitesse
relative.
On se rappelle
aussi,
soulignerque,parmilesdix-sept
textes
quicomposent le livre,
sept d'autre
part,quepercept
étaitalors(combiné
avec
affect)
undesdeux
sont
inédits,cequitémoigne d'autant,
alorsqueDeleuze était
déjà termes
quiservait
àqualifier,
paropposition
au concept
propreau
affaibli
parlamaladie,deleurnécessité,
deleururgence. Ensuite,
S% dimmanence
delaphilosophie,
leplan
decomposition
del'art
dans
le
decesdix-sept
textes
n'ensontpasmoinsconsacrésàdesphilosophes livre
antérieur.
Citonssimplementquelqueslignes
quitémoignent
de
(Kant,
Nietzsche,
Heidegger,Platon,
Spinoza).
Enfin,troisd'entre
eux " déportinspiré
parlavisiondesessences
comme *PUrES figures
de
umière»(onnoteleretour
en forcedecemotde«figure ».
5 central
18,
/bid,
p.154. dansl'approche
deProustetdeBacon,
parled'elle- même):
et laréférence
faite
àBlanchot
19.
Gilles
Deleuze,
Critique
erClinique,
Paris,
Éditions
deMinuit.
1993:
P7.
ju tee quirésiste
mbme
ce nt pasLaseule
chose
quiré » 251
250 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVEC
DeLEUZE

{lnoussemble
quelelivreV rémoigne
decettepensée
irréductible
àcelle
Qui Un
texteestcentral
à“ PE Critique
€t
Clinique
:«Bégaya-
parnotions
communesauCOUFS
desquatre
premiers
livres,
SiJes
lire, vil.»Deleuze
Y reformu
ane “es initiale
quelevéritable
ferivainestcelui qui, travaillant
là languecommunequ'il a reçueen
comme
dieBlanchot,
ontpourcorrélat
«l'absence
delivre»(ouunlivele
héritage:
fairbégayer
cettelangue,
defaçon
àinventer
dans
salangue
secret
fait
dechair
etdesang),
lelivre
V peut
être
cette
absence
ou
ce secrer
du aneautrelangue,
cette langueétrangère
invoquée
parProust
comme
lequel
lessignes
erLes
concepts
s'évanouissent,
etleschoses
semettent
àécire celle
desbeaux
livres,
etplacée
parDeleuze
enexergue
dusien.
Sibien
parelles-mêmes
etpourelles-mêmes,
enfranchissant
desintervalles
d'espaces
»]fautcomprendre
que,fairebégayer
lalangue,
pourDeleuze,
ce
a passeulement,
deMichaux àBeckert,
deGherasim
Luca
àCéline,
Parrapport
àdetellesdistinctions,
onestégalement
frappé
que,
danssontextesurT. E. Lawrence,
Deleuzedistingued’uncôtéles
deMandelstam
àBielyetàKhlebnikov,
recenser
lesétats
extrêmes
ImagesouVisions,
del'autre
lesEntités
ouAbstractions,
spirituelles
er decesbégaiements avérés
quiconstituent
une
sortedecœurvibrant
critiques.
Cesdernières
sonttrès
prochesdesconcepts
(mêmesiDeleune delalicrérature
comme telle.Mais,puisqu'il
n'yasans
doutepas
de
n’emploiepaslemot),maisdemeurent pourtantdesémotions etdes ilosophe
et ainsidephilosophie
quipuisse
àproprement
parler
faire
affects,
etparlàserapprochent
aussidecedontellessedistinguent’,
Le bégayer
salangue
au risquedesedénier
elle-même,
c'est
aussi
etavant
passage
entrelittérature
etphilosophie
s'effectue
ainsidansCritique
et toutpourDeleuze
setenirenvued’une
telleexigence
parlesvariations,
Clinique
aupoint
qu'ildevient
difficile
delesdistinguer,
saisies
comme lesdétours,
lesemportements
desonstylepropre
: unstyle
unique,
elleslesontdansunmêmetravaild'inventionetdeconception,
par salangue
étrangère
àlui,accordée
àtoutes
lesstratégies
mélangées
de
rapport
àl'autre
langue
qu'elles
visent,
comme
parrapport
aujugement celivrecompositedanslequellittératureetphilosophie
continuel-
qu'elles
suspendent
et à l'ucopiequ’ellesportent.C'estcomme
si lement s’assemblent,
finissantparsembler neformerqu'unemême
Deleuzepassait
ici au-delà
desinterférences
intrinsèques
pour
dessiner matière.
Peut-être
est-ce
làcequin'avait
jamais
été
tenté,
La
perpétuelle
entre
littérature
etphilosophie
unesortedeplancommun, plan hétérogenèse
du système.
d’immanenceetdecompositionmélés,
quinerelève
pourtant
pas
de Maisil y a un livreencore,unpetitlivredanslequels'incarne
l'indiscernabilité
desinterférences
illocalisables.
On lesent
à l'élan l'avancée
extrême delarentative. L'Épuiséestletexte
où,Beckett
quilielestextes,
autressage
quis'effectue
entreeux,mulriplement, prenantdefaçonextensive lerelaisdesirruptionsponctuelles
de
auxmots quilestravaillent.
On remarqueraaussiquecontrairement Michaux, Deleuze aurapoussé leplusloincerteconfusion
entre
la
auxpartagesentrematières
d'expression
queDeleuze souligne,
dans litérature,
l’artetlaphilosophie recevantdeleurconjonction
une
«Qu'est-ceque
l'actedecréation?»,pourdistinguerparexemple
la dimension d’art.Achevé d'imprimer,presquejourpourjour,unan
peinturedelamusique etchacuneducinéma autantquepourspéci- plustôtqueCritique etClinique,onnesait,ouaumoins jenesais
fierlaphilosophie,
il s'attache
àdégageràtraversCritique
etClinique comment
l'écriture
deL'Épuisé
s’est
accordée
àcelle
deschapitres
inédits
«unepeintureerunemusique propresàl'écricure??
»,etàconsidérer dudernier
livre,enparticulier
à«Bégaya-t-il
»etàSpinoza etlestrois
lesécrivains
comme
autantdecoloristes
etdemusiciens.
Qu'onme *Éthiques
».On pense aupremiertexte
parce qu'ilfaitlargement
comprenne
bien.I] nes'agit
pasde
faire direà Deleuze
autre
chose &hoauxpages
quiconcluentL'Épuisé;
etausecond
parce
quelaseule
quecequ’ilapudire,desembler
le fairesecontredire,
mais
defaire référence
philosophique
substantielle
dececommentaire
despièces
comprendre quecequi peutsembler contradictoire
estvraiment
cœ Pourlatélévision
de Beckettrevientà souligner
chezl'épuisé,
celui
qu'ildit,cequ'ilnepeut
dire autrementqu'enparaissant
se contredire Qui
enàfini
aveclepossible,«unspinozisme
acharné”
».Épuiser
le
Pourarriver àdirecequ'ilveutvraiment
dire. Possible,
soitDieu,«l'originaire
»,«l'ensemble
dupossible
»,converti
n Rien.Il estégalement
frappant
qu'une
même
tripartition
formelle
20,Jbid.,p.184,186. ascendante
conduise,
dansletexte
surSpinoza,
des
Signes
ouaffects
ke21.
ÀLa
findeSpinoza.
Philosophie
pratique,
Deleuze
soulignait
comment
s'opère
=. nn

Te concept
etdel'affecr,
Paris,Éditions
deMinuit,1981.
P-174. 33.
SamuelBeckert, etautrespiècesr Lavélévision
suivideL'Épuisé
par
”: , P. .
Deleuze,
Paris,
ÉeonsdeMinuit1992,
p 57.
NT
ant est ce qui résisté même sice n'est pas la seule chose qui résiste» 253
252 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

abriue». C'est-à-dire
qu'ilfasse
œuvre,
sipeuquecesoit,mais
auxNotionscommunes ouCONCEprspuisauxEssencesouPerceprs,
inélucrablement,
selon|adage
deBecker
convoqué
:«Imagination
etdansl'analyse
deBeckert,
d’unelangue à uneautre.Commes’j
s'agissait,
dansuncascommedans
l’autre,dansl'œuvre
d'artcomme Morte
Imaginez.
Ainsi,écritDeleuze,
Faireuneimage,
detemps
en
dansl'œuvre
dephilosophie,
decoucherlepoint
d’abstraction
sensible temps
[...},Farc,laPas laDRE peuvent-ils
avoirunautre
but[...]2?»Maisil précise
: «On ninventera
pasune
entitéqui
leplusradical
pour
re identité
s’érablisse
entre
deuxmodalités
: serait
l'Art,capable
defairedurer
l'imagel’imagedureletemps
furtif
d'écriture
erde :
SeLe ainsichezBeckett,d’abord,
la languedesnoms denotreplaisir,denotreregard”.» Dans
cet écart
delamajuscule
(une«langue
très
spéciale
[...]atomique,
disjonctive,
coupée,hachée, erdelaminuscule, c’estla revendication
d’unartmineur
inlassa-
oùl'énumérationremplacelespropositions
»); ensuite,
lalangue blement
réitérée,ou plusprécisément d’unusagemineur
de
l’art
desvoix,ondes
oufluxqui«pilotentetdistribuentlescorpuscules quiestréaffirmé,
dont
le minimalisme
beckertien
offre
unexemple
inguisiques»:_ / langue: imagesDhran etsonore)
etdes extrême,
quisemble
presque
incomparable.
Mais,enmême
temps,
À es . travers les deuxpremièreset contre elles, cettetroisième suffit del'évocationémued’unepetitesculpture
deLichenstein
et
Len Me des« limiresimmanentes», en créant« detemps en d'une
notesoulignant
que«ladissipation
del'image
ou
de laFigure
temps»uneimage,qui achèvetout le possible“.Il y a donc,chez apparaît
entermestrèsvoisinsdanslapeinturedeBacon », pourque
Beckett,
quatre
façons
del'épuiser
: formerdesséries
exhaustives
de l'artmodernesetrouvesaisidanscertevision.Il suffitdurappel
de
choses;
tarirlesfluxdevoix; exténuerlespotentialités
del’espace; ladevise
fameuse
deGodard(«Justeuneimage
»),desmentions
de
dissiper
lapuissance del'image. C'estpourquoicequiseprépare, l'effer
defragmentation
propre
augrosplanchez
Bresson,
deceux
danslesromans etlethéâtre commeà laradio,s'accomplit avec la propres
audispositif
duzoom dansWavelenghth
deMichael
Snowetà
télévision
—aufildesquatre pièces
pour
la télévisiondeBecker dont kscission
voix-image
danslecinéma
desStraub
etdeMarguerite
Duras
ladescription
etledécoupage composent
la première partie
decepetit (quatre
références
majeures
deL'Image-temps),
pourque
l'essentiel
livre
dont
l'essaideDeleuze forme laseconde,desortequeleuranalyse ducinéma
enparticipe.
À travers
cette
convocation
variée
d'œuvres
permettededérouler pasàpaslacourbe dl'épuisement.
e Touttend d'images
ou/etde son,il s’agitavanttoutdevisercequelelangage,
ainsi
dans ceprocessus
versl'image,àproportiondelalassitudedeplus tropmarquépar « le vieuxstyle»,seraitdevenuimpuissant
à faire.
enplusgrandeéprouvéeparBeckett, Deleuze yinsiste,
envers
lesmots. Alorsqu’«on peut
le fairesurla surface
dla
e toilepeinte,
comme
D'oùlecaractèreexemplaire desquelquesmotsquiachèvent celivre Rembrandt,Cézanneou Van Velde»,ou«surlasurface duson,
aussi
minuscule
qu’essentiel,
L'’Image: «C'estfaitj'aifaitl'image.
» comme BeethovenetSchubert»—Beethoven erSchubert
dontdeux
L'image
faite
pourêtre
àsontourdissipée,comme cela s'accomplit pièces
demusiqueinduisentavecune
délicatesseminimale
ladissipa-
dans
laquatrième
despièces
deBeckett,
Machs
undTräume,
àtravers tion
de l’image,
respectivement
dansTriodufantôme
etdans
Nacht
lerêve
del'insomniaque.
C’est
làqu'ilfautserrer
deplusprès
letexte undTräume.
C'estainsiquecout
l’art, de
l'imageetduson,dans
ses
deDeleuzepoury relever
unesuite
denoms, derermes,
deproposi- Œuvres
lesplushautes,setrouveconvoqué.Ce queDeleuze
qualifie
tions.
Ils touchent
d'uncôté
la réalité
oul’irréalité
de
l’art, del'autré sibien
de«lame
defondpropre
àl’art#
».
laqualification
desdifférents
arts. . Etc’est
parlà qu’au
gréd’unretournement
final,Deleuze
en
Soulignons
d’abordcombien,
danssonanalyse aussibelle
que ent àinvoquer
chezBeckert
cesmoments
deplusenplusprégnants
tnt durêved'insomnie,
Deleuze
revient
surl’idéeque«cerêve:i deD. Compositions
litrérairestardives
oùs'impose
une«musique
ut lefaire.Lerêvedel’épuisé,
del'insomniaque,
del'aboulique,
nst
poésie
lueà voixhauteetsansmusique ».C'estlemoment
Fu “mn lerêve
dusommeil quise faitroutseuldanslaproforr me
rpsetdudésir,c'estunrêvedel'esprit,
quidoit être
faic
25.
Ibid,
p. 101
me
26.
Ibid,sé7.
24.
Ibid,
p.66-71, 27.
lbid,p.77.
28.
Ibid,
p.103-104.
w
254 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

d'«un
nouveau
style
enfin[.] quand
lesmots
sepercent
etseretourne XX
d'eux-mêmes
pourmontrer
leurpropre
dehors?”
».Deleuze
achève a;
ss
sontexte
surdesexemples
tirésdespoèmes
Comment
dire erio
pire,
dans
lesquels
Beckert
faitbégayer
lalangue
en traitant
Jelanga
commeune matièresonore
:lesens
n'enestpasabsent,
car
lesMots
ne Le presquerienquitourneenligne
peuvent
qu'yfaire
sensencore,
maiscesens
s'ytrouve
comme évanoui
àtravers
lespressions
sonores
des
effetscumulésdeladifférence
er
d’expérimentation
delarépétition.
Sibienquelarépétition
sembley devenir,
comme
Deleuze
l'écrivait
autrefois,
«ladifférence sansconcept
»,
On sedemandera peut-être
ceque j'ai viséenConvoquant
ainsi ANA GobINHo
dansuncertain
détail
Critique
etCliniqueetsurtout
L'Épuisé,
dans
à leur
apposition
auxpartages
la foisclairs
etambigus
deQu'est-ce
que
laphilosophie
?C'estavant
toutle désirderépondre
au problèmeposé
àpartirdeMalrauxdanslemomentfinalde«Qu'est-cequel'acte
de C'est
à l'infinid'une
ligne
defuiteque
surgit
leguerrier.
création?»etrepris danslespremières lignesdelapartie consacrée
l'artdansQuest-ce quelaphilosophie?,surl'artcomme la seulechose
aumonde quiseconserve,laseulechosequirésiste àlamort.Cequeje Leguerrier
de
l’île deSentinelle semble vouloirdire«fuyez,sortez,
veux direousuggérer,c'estquelaréversibilité
plusoumoins constante, partez.».Etlesdeuxguerriers forment
une ligne ouplutôt, deux
dans l'œuvredeDeleuze, entrecequitouche àl'art etcequitouche lignes
adjacentes.
Biensûr,aumilieude l'ile, ilyal'idée que
la vie
àlaphilosophie, induitunecontamination tellequ'onnepeut pas prévaut
toujours.[l y aun«processus »depassage delaviequiest
éviterdeseposer laquestion,sansdoutesansréponse maisnonmoins impersonnel,
puissance anomale quialieuenmême temps quese
essentielle,
delaphilosophie commeart,et parlàaussi biencomme acte déchaînent
lesopérations pratiques
d'émission, dedémontage etde
derésistancequecomme chose quirésisteàlamort. Il semblequece redistribution
departicules. Cequicompte, cesontleschangements
soit
le style
propre decetteœuvre dans sonensemble, saisie
comme elle denature
etlanature des
liaisons—il importe defaire proliférer
les
l'est
dans unetension sans issue
entrelevieuxstyle etlenouveau
style liaisons.
Leprocessus n’enestque
la condition.Nous crionsàlamort :
invoqué depuisl'avant-proposdeDifférence etrépétition,
etcherchant iln'yapas
demort.
Il n'yaquedes
changements
décisifs.
Ondéfaille
dans
l’image
del’artcequesevoudrait
idéalement
laphilosophie
si plutôt
qu'onnemeurt.On al'impression
qu'iln’yapasdemort.
cen'était
pastendre par-là
verssadisparition
—il semblequecesoit Nousnevoulonspaslui échapper,
nousnevoulons
quedévelopper
et
certe
tension
unique quiconfirme
Le plusproprementla philosophie
en faire
proliférer
lespuissances
defuirepositives.
«Laviecrie
àlamort,
tantqu'art,
S’ilfallait
tenter
delier parunterme unique, aussi
bien
œ mais
justement
la mortn’est
plus
cetrop-visible
quinous
fait
défaillir,
quiqualifie
tantd'œuvresd'artettantd'œuvresphilosophiques
mises elle
estcerte
forceinvisible
que
la viedétecre,
débusque
er
faitvoiren
enjeuparDeleuze, quelesmodes d'approcheparlesquelsilcherche Giant? »Comment peut-ondétournerune
ligne demortdeue
inlassablement
àenfaireressortir
lavaleurd'expérienceetdepensée, qu'elle
aille
vers
lavie?Defaçon
qu’elle
setransforme
enligne devie?
lanotion
demouvementaberrant
mise
enavantparDavid
Lapoujade Peut-on
changer
lesforcesdemort
enforces
devie?
Mais,s'iln'yapas
dans
sonrécent
beau
livre meparaîtrait
laplusappropriée
: caf€
ressaisit
toutes
lesstrates
irrationnelles
du«sans-fond
»que
n'acessé
d'opposer
aux rationalités
dufondement.
mms .

1980,
1.pG. 340.
illes
Deleuze
etFélixGuartari,
Milleplateaux,
Paris,
SR La Différence,
29.
Ibid,
p.104-105, à 2,GillesDeleuze,
FrancisBacon.
Logique Paris,
delasensation, .
30.
Gilles
Deleuze,
Différence
esrépétition,
op.cit.
p. 38. 981,vol, LAP. 42.
4
Lepresque
rienquitourne
enligne
d'expérimentation
257
256 AGENCER
LES MULTIPLICITÉS
AVECD'ELEUZE

rerprération
»Où«solution
»achevant
lamort
quitourne
alors
au
deforces
demort,
qu'est-ce
doncquelamort,
comment
une|; « Lalignedemortfasciste
estsuicidaire.
Qu'est-ce
quisepasse?
viesedérourne-t-elle
verslamort?Voilàcequenousdevrons€Xaminer suic" nesepasserien.Rienn’estarrivédanscequis'est
passé,
I]“à
Lamortn’estpas3e
unprocessus,
elleestétrangère
àtoutProcessus
4(.: , ER passé,
parcequerienn’estpassé.
Leprocessus
aétéinterrompu.
C'est
l'arrêt
complet,
l'impasse
totale.
Défaillance
d’une
Organisation
quj
Mais
auraitpusepasser
quelque
chose.
Cette
possibilité
existair
et
s'effondre,
caratonique,
demanièreimpensable,
necessant
de tomber xistera
EnCOre.
On neniepasla MON,
On necherche
pasnonplusle
Etsoyons
concrets, leprocessusdevienecherche
ni l'immortaliré
ni
ur oul'immortalité.
Deleuze
dit: c’esttrèssimple,
il n'yapasde
larédemprion.
Il fairsortirletempsde
ses gondbs
et
l’espacedetous
ses
côtés.
Qu'est-ce
queceprocessus?
Unplan?UnePhysiquedesrelations mort.
Silamort
est arrivée,
nousnel'avons pasexpérimentée,
donc
Entre
unemultiplicité
erl’autre,
entreuneparticule
subatomiqueer ousn'en
avons
pasfaitl'expérience.
Pour
ce faire,
ilfauttransformer
l'autre,
entreune
cellule et
l’autre,la façonde faireou demarcher laconscience
:
d'avancer
—quicoïncide
avec
leprocessus
—ledébloque.
Toujours
certaine
manière,
unmodeparticulier
d’entreretdesortirduchamp 11
s’agit
biend'une
prise deconscience,
quoiqu’elle
n’ait
rienàvoiravec
une
historico-mondial
(commeles jeunes
fillesentrent
etsortent
dans
le conscience
psychanalytique,
ninonplusavec
uneconscience
politique
marxiste,
mouvement
desauter
à lacorde)etd'enfranchirleslimites. oubienbrechtienne.
La conscience,
la prisedeconscience
estunegrande
Bien
sûr, onpeut
dire qu'ily aaussi
certaines
manières
dedevenir puissance,
maisn'estpasfairepour
les solutions,
nipour
lesinterprétations.
unelignedemort.De
faire ensorteque
toutfinisseenpuredestruction C'estquandla conscience
a abandonné
les solutions
etlesinterprétations
etabolirion.
Certe
possibilité
existe
toujours.
Laligne
defuite
cesse qu'elleconquiertalorssalumière,sesgestes
etsessons,
sacransformation
d’êtreunelignedecréation etestavalée
paruntrounoir.Lamort décisive.
HenryJamesécrit: «Elleavaitfiniparensavoir
cantqu'elle
ne
infligée
auxautres,
lamortinfligée
àsoi-même.Leschoses
peuvent
mal pouvaitplusrieninterpréter;
il n’yavait
plusd’obscurités
quiluifissenc
voir
finir.Onne
tient paslecoup,oubienonleveutardemment. Cequi clair,
il nerestaic qu'unelumière crue.»Plusonatteint
àcetteformede
auraitdûêtreunechance accordée
à lavieseretourne
contre
elle, conscience
deminorité, moinsonsesentseul. Lumière.
Onestunemasse
larenverse,
l'absorbe,
l'interprète
etdevientuneentreprise
mortifère. àsoitoutseul,«lamasse demesatomes ».Etsousl'ambition
desformules,
Ques'est-il
passé?
demande souventDeleuze.
Une
lignequientre
dans ilyalaplusmodeste
appréciation
decequepourrait
être[..]unélément
unmouvement fasciste—«mouvement perpétuel
sans
objet
nibut» pourunnouveau
devenirdelaconscience.
quidevient
mouvement dedestruction
pure.Nousfaisonsmourir
les
autres.
Etàlafin,vientnotrepropremort.Pluslaguerreestperdue Sous lalumière crue,sansqu'onsache
direcequec'estoucequ'il
etplus
s'accroit
l'accélération
—jusqu’au
fameux
télégramme
d'Hitler: Ya,quelque chose sepasse,
un«presque rien».Toujourslarumeur
imperceprible
d’unmondenouveau et étrange
qu’onaperçoit
àpeine
«Silaguerre
estperdue,
queLanation
périsse
»,danslequel
Hitlerdécide
dansleplusinnocentet leplusdiaboliqueintervalle.
Unepluiefine
d'associer
ses
efforts
àceux
deses
ennemispourachever
la destruction
deson ' lignessanscontour,lignesderienétiréesàl'extrême,
vibrantes,
Propre
peuple
enanéantissant
lesultimesressources
desonhabitat,
réserves Impondérables,émettrices,
toujoursmobilesetquiprolifèrent
sans
diviles
detoute
nature(eau
potable,carburants,
vivres,
etc.)[.…].
«C'était
déjà limites,
D'autres lignesexistent,
maisnousnenous Occuperonsque
cette
réversion
delalignedefuiteenlignededestruction
[…].Une machine
decelles-ci.
Laquestionserenverseetchange
de direction
: cepresque
deguerre
quin'avait
plusque
Laguerre
pourobjet,
et quiacceptait
d'abolir
# rien
n'opère-t-il
pasutournant
n quichange
lanature
etses
trajectoires?
Propres
servants
plutôt
qued'arrêter
ladestruction?.
» ligneseplieà nouveau
—lalignedemortdevient
lignedeve I n'y

à C'est
,
unemanière
d'ensortir
sans
expérimentation
nipassaB®* Pasdemort!
I] n’yàplusdehautnidebas,
decentre
oudaxes,
de
ceoudedos,
rien quedeszones
affectives,
des
lignes
quibiaisent
“ plutôtnon,carcen'estpasunemanière
Rue d'ensortir,Tout ————————-

4. Car # ps d ici de Minuit,


1979.k Pr ne et Gill Deleuze,S#
Gilles rions,
Superposi Paris,
Éditions
3.GillesDeleuze
ecFélixGuartari,
Milleplateaux,
op.cit, p.283.
Se Lepresquerien quitourne enligned'expérimlation 259
258 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVEC
DeLeUzE

ts,desdifférences
devenues «infiniment ou: elleseretourne
sur elle-même,
sans
Objet
nimoi,
etdevient
RÉ ETS malléables.
On faitlecheminimpossible
+,, jumière
flux*delumière,
c'est-à-dire
devie.Combien
serait-il
plussimple
mémoire,
pasencore
cracé.
Lamanière
defaire,C'esttenter
dePlier
La
devoirqu'une
lignedevie” <nunjour,
à n'importe
quelle
heure
:
ligne,
essayer
delaplierà nouveau,
fairel'expérience
dePlieren unorganisme
meurt,uneétoilemeurt,
le garçoncesse
desourire
et
chaque
micropli.
Alors,
pourquelalignedemorttourneenlignedevie plusrien.Maisçarecommence,
qu'onleveuille
ounon.
nefaur-il
pasune«prise
deconscience»ausens oùDeleuzel'entend? Lamortn'estpasunprocessus,
<enestmême lecontraire.
Dansle
Laviesortdelamortparcequetouteslesconditions
delanon rocessus
comme
danslavie,iln Yamême
pas
depréparation
à[a
sontécartées.
Lesreflets
delalumièrecruedelaConscience
rendanr mort.
Il y a mortde fair. Et puisil ya desmortspetites
ervariées.
impossible
lavision,
l'audition,
letoucher,
lesparticules
indiscernables Lamort
elle-même entre
dansunedisjonction,
sedémultiplie,
Laligne
traversent
desdistances
incommensurables,
au-delà
de[avitesse
de demorttraverse
lesmorts,va-et-vient,
Danscedouble
mouvement
lumière.
Desmulriplicicés
voyageuses
traversent
l'espace
indéfini,
sans (disjonction
et conjonction)quelque
choseagitsur,coïncide
etse
dimensions,
etletemps
estmaintenant
horsdesesgonds.
UnMoins wransfère
versla
ligne devieetdecréation
erverslaviemême,
versla
querien,minoritaire,un presquerien, un air Ou un ventou un santé
despetitesviesquiici,toutcomme
les morts,
sontportées
par
dechaleuraffaiblissent
le mouvement
fascistequiest ennoustous lemêmeflux.Lavieestunfluxetlamortpeur
le devenir.
«Lachose
Ilarrache
laconscienceàelle-même
pour
en faireunmilieu,
il détache estdèsledébutdevenueindépendante deson“modèle?” »,
et on
l'inconscient
etfaittravailler
lesdeuxdanslesfrontières,
dansles n'expérimente
quesi on estassezfort.Nouveaudevenir,conquête
ornières,
danslesfissures,
lesbrisures,
lesruptures,
dans
les seuils
etes
delalumière,
recommencement, leprocessusestunflux,unedanse,
abimes.
«/ wouldprefer
notto »,onfranchitleslimites,
onvaau-dels
c'est
ceque
les enfants fonttoujours.
Onentreparunendroit obscur, onsortparunendroit imprécis, On
n'échappe pasaudésirdemourir;enmême temps,
le processus
Lesparties
sedisjoignent,
lavieàdeux,l'inventionprodigieuse
des
l'emporte
trèsloin,enun lieu incertain.
Il nes’agit
passeulementde
multiplicités
quidéraillentàchaque
instantdanslajoie,sanscôtés, dénouerleslignes,
il s’agitd'expérimenter
à tout
prix.Expérimenter,
dimensions
oucoordonnées. Lavienon
fasciste,fragile,
nouspénètre.
nepasmourir afindepouvoirrecommencer denouveau etàchaque
fois
dereprendre lemouvement. Larépétition
duva-et-vientréduit
LEJEU DU PRESQUE
RIEN lamortauminimum delaforme, aupresque
rien, auminimum du
modèle delamortpourenextraire unemultiplicité
demorts qui
Onpourrait
commencer
aveclamort.Paramour
pour
la vie.
Alors,
on dterneavec lavie.Lamultiplicité
peuralors
conquérirceminimum
commence
aveclavie.Delamême façonqu'onpeutcommencer
impondérable
qui passeradu côtédelavie.On abandonne
sans
avec
lamort
duporc-épic
ouaveccelledelataupe,
ouencoreavec
la
mort
dans
lamusique.
Parce
que«même
larareté
estunflux,
même complaisance
les solutions
miraculeuses,
onpasse
de
l’autrecôté
er
Onrevient
munid'unemachineconscience-inconscient.
Onrenonce
letarissement,
mêmela mortpeutledevenir’»,eton peutenfaire
unevariation.
Une
ligne demortpeut-elle
devenir
unelignedevie? àcomprendre,
onenfinitaveclesfausses
connexions
etonfaitde
Comment
unarrêt
sidéfinitif
peut-il
déclencher
ànouveau
lemouve- “laDe »deconscience
un«courant »«asubjectif
»,untrain
en
marche.
ment?
Qu'ya-t-ildans
unelignedemortqui
lui permet
deserourner
vers
lavie?«Lejeune
homme
cesseradesourire,
maisrecommencera.” Leproblème
collectif
alors,
c'est
d'instaurer,
trouver
ouretrouver
unmaximum
LeMouvement
sedéclenche
ànouveau
parce
quelaconscience
est
une
Brande
puissance
etdans
son«nouveau
devenir
»,
« elleconquiert
st deconnexions
[.…].Laquestion n'est
pas
d'opposer
sociéré
etnarure
artificiel
SEnaturel.
Peuimporte lesartifices.
Mais,
chaque
foisqu'une
relation
physique
=
re traduite
enrapports
logiques,
le symbole
enimages,
lefluxensegments,
3:GillesDeleuze,
Criique
i erClinique,
RE Paris,Éditions
de
| Minuit,
à 1993,
is, p.6 8 l'échange,
découpé
ensujets
etenobjets,
lesunspour
les autres,
ondevra
6.GillesD el
deMinuit,1991mer élixGuattari,
Qu'est-ce
quelaphilosophie?,
Paris,
Édit
Éditions sien
7.Ibid,
ÿ
Lepresque
rienqui tourne
enligned'apérimentation
261
260 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

fly a unecirculationdu dedansversledeho


direque
le mondeestmort,
et quel'âmecollective
estàsontourenf, Ts,qui bifurque sans
dansunmoi,quecesoitceluidupeuple
ouceluidudespore.
Lu s Le desoi,dans
uneexclusion
oucontrad
; iction
mobile,
mais
aux
pasretourà lanacure,
il n'yaqu'unproblème
politiquedel'ime se onséquences
précises
—ellearrêteou interrompt
leprocessus.
Mile
lesconnexions
dontunesociété
estcapable,
lesfluxqu’elle
Supporte,
invente méretemps»
ilyauneautre
circulation
sansdedans
ni dehors,
quiaaussi
laisse
oufaitpasser". des
effets
réels.
Un processus
quine sera
jamais
interrompu
s’ébauche
suruncertainplan.Car il acquiertunecertaine
qualité
radicale
qui
PourDeleuze,
processus
etlignedevienefontqu'un.
Laligne Leconserve
etlefaitproliférer
: lavie.Une
certaine
viemachinique
et
d’expérimentation
estle processus-mouvement,
machineBuerrière intense,
c'est
le presque
rien.Mouvement
qui peut
mal
tourner
oubien
traqueuse
dechances,
dumoment
favorable,
c'est
la ligne
des
affecre tourner.
Qu'est-cequi fait la différence?
Dansunprocessus
defuite
quis'oppose
absolument
auxinterruptions
et auxarrêts,
à[amaladie fasciste,
leslignes
n'ontqu’une
seuledirection
mortelle,
unedirection
Lamortesttotalement
dérachable
deceprocessus,
etil nepeur
en sratifiée.
Dansunprocessus
non-fasciste,
leslignes
changent
dedirec-
étrequ'ainsi.Parexemple,
entrela vie et la mort,la vieillesse
agit ion.Lemouvement
est unemachine
quiopère
despassages
(
comme unesorte depresque
rienqui réduitla Figuredelamort. « lly spatio-temporel,
décodage
devitesse
etlenteur,
d'affects).
11s'agit
d'un
a descasoù la vieillessedonne, non pas une éternellejeunesse,
mais «presque
»quia lanaturedetous
les plans,il peutdoncallerpartout
et
aucontraire
unesouveraine
liberté,unenécessité
pureoùl’onjouit tour
emporter
partout.
«Lemouvement
est dans
unrapport
essentiel
d'unmoment
degrâce
entre
lavielamort,ettoutes
lespièces
dela avec l'imperceptible,
il estparnatureimperceptible!!.
»
machine
secombinent
pourenvoyer
dansl'aveniruntraitQuitraverse Il estaussifacultatif,comme
le choixdelaviequinousconvient.
lesâges”.
»Quicombine
routes
lespièces
delamachine?
Lepresque Presque rien,un certaintravailou un usage
dla
e différence,
un
petit
rien.C'est
le presque
rienquiagitdans
la prisedeconscience,
c'est
lui lieuirréductibledeforcesou une«prise»deconscience. Processus
de
quiagitpourcréerdesmouvements-multiplicités.C'estencore lui fuie=Prisedeconscienceet de l'inconscient quisecompénètrent.
quitransforme lesmultiplicités
delamorten«prisedeconscience ». Expérimentation-passage
àtravers
deszones
particulières
dutemps
et
Entretoutes lespiècesdelamachine,unprocessus serisse
erse del'espace
etau-delà.
Uneprisedeconscience
mais
aussi
d’inconscient.
rerisse,
nousl'appelonsfuite,
«moment degrâce»ou«agent duchaos» Denatures
différentes,
amnésiques,
la conscience
etl'inconscient
commu-
qui
estenlui,dans sonvoisinage,ouhorsdelui.Comme dans
lecas niquent
enproduisant
desfluxqui
lesalimentent
et quialimentent
tout
delasouveraine
libertédelavieillesse,
voicilajeunefille lemonde.
Plusjamaisuneproduction
desujets
etd'objets.

être
dfuite«qui
e »nesedéfinitcertes
pasparlavirginité,
mais parunrapport Aucontraire,
tantquela consciencetraverse
Lechamp transcendantal
àune
demouvement etderepos, devitesseetdelenteur, parunecombinaison vitesse
infinie
partout
diffuse,
il n’yarienquipuisse
larévéler.
Ellenes'exprime
d'atomes,
uneémissiondeparticules [..] Aussilesjeunesfillesn'appar- enfairqu'enseréfléchissant
sur unsujet quilarenvoieàdesobjets'?.
: tiennent
pasàunâge, àunsexe, àunordreouàunrègne ellesseglissent
Plutôt,
entre.Lajeunefilleetl'enfantnedeviennent pas,c'est
ledevenir Bien
que
lepresque
rien ne
s'exprime
pas,
nous
savons
qu’il
accélère
et
lui-même
quiestenfantou jeune
fille, {...].Savoirvieillirn'estpasrester Sereproduit
sanscesse
: c’estlefascisme.
Il s'exaspère
jusqu'à
enmourir,
jeune,
c'est
extraire
desonâge
lesparticules,
lesvitesses
erlenceurs,
lesflux iln'yaplusdeprocessus,
oubiencedernier accélère
autrement
et retrace
quiconstituent
la jeunesse
decerâge.
une
ligne
qui
reprend
l’ensemble
des
lignes
defuire.
Àcemoment-là,
elle
devient
uneligneabstraite.
C’estl'instant
delaprise
deconscience
quis'aiguise,
s’intensifie
etdevientuncourant
qui entraîne
avec
lui
la
ms —_——————— Sonscience
et
l'inconscient.C’estunesorted'éveil
delaconscience,
8.GillesDeleuze
ÉCritiqueetClinique,op.cit., p. 69-70. , ns
9.GillesDeleuze
etFélixGuattari,Qu'est-ce
queLaphilosophie?
op.cit P:: 11.
Jbid,
p,344,
10.d, Milleplateaux,
op.cit.,p.340. 12.Gilles
Deleuze,
Deuxrégimes
defous,
Paris,
Éditions
deMinuit,
2003,
p. 360.
N
Lepresque
rienquitourne
enligne
d'expérimen
tation 263
262 AGENCER
LES
MULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

pourl'élargissement,
l'approfondissement,
lan
e,c'estundevenir
deplusenplus
conscient
(.. ji jeunes
Files
quimes
Fe esdelumière,figuresdelumières
chez
leguerrier
del'iledeSentinelle
communicantes.
Oui,entre
la
laconscience
sensibl
d'un
état
deconscience"? ñ a mort,
«ilyaunmoment
[oùjoue
lepresque
rien]
quin'est
es queceluid’uneviejouantaveclamort!$
».
extension
delaconscience
sensible
qui appréhende
unensemble,
«
masse
demesatomes».

C'est
comme
unfleuve
quitantôt
s'étale
ertantôt
sedivise
enmille
4
ranrôt
accélère
etrantôt
ralentit,
maistoujours
affirmant
sonunitéradicale

Ouencore,
c'est
une«conscience
petitenfant »,pouremployer
des
expressions
deDeleuzedansCritique
etClinique. Devenir
deplusen
plus
conscient,
conscience
d'enfant,
dejeune
fille,priseparlePresque
rienparundevenir
quin’estpasunquelconque devenir
—conscience
inconsciente
del'univers.
À cemomentprécis, laconscience
coïncide
avec
sonprocessus
defuire.Et dansl'espace
précis,
insaisissable,
réduitauminimum,elle-même changede directionetdenature.
à Çatournetoujours,
c'estlachance
quiest offertela vieavec
desrègles
toujours
facultatives,
sobres,prudentes.
La vieelle-même entredans
l'expérimentation
laplusbizarre
et,étantportée
parlemouvement,
devient
conscience
vivante,
enprisedirectesurlemonde.
Elle devient
monde —«lamassedemesatomes »—ayantlepouvoirdetoujours
recommencer.
Etlamachinedupresquerien,courant
deliens
imper-
ceptibles,
produit
desagencements
différents
etsimultanés
avec
chaque
chose,
c'est-à-dire
qu'ilgarde
erextrait
duminimum duminimum
(desformes,
desfonctions,
dessujets,desstrates)lesmatériaux,
les
affects
dont
la vieesttissée.
Lepluspetitagencement,
incassable,
adésormais
lepouvoir
d'être
prisetemporté
àl'infini.
Devenu ténu,
fragile,éphémère,rienqu'un
fil
delumière
(dans
l’espacelisse,
dansl'entre-temps),
il estlaparticule
la
plusdélicate,
laplusproche
duchaos.Lieninfimedelachaîne
capable
desupprimertoutcequil'empêche deglisser.Machinemoléculaire,
indomptable,
puissance sauvage
faisant fonctionner
uneconscience
ouverte,
inhumaine,«c'estàlafoisprisedeconscience
etlaconscience
atteinte,
laconsciencerévolutionnaire
atreinte!*
».Desmiroirements
quipassent.
«Presque rien»librement machinique,
jouantchez
les

p. 13.{d,Critique
etClinique,
op.cit., G4
14,
bid.,
p.172, ns me,

15.Gilles
Deleuze,
L'Image-mouvement,
Paris,
Éditions
deMinuit,
1983.
P-$5. 16.Id, Deux
régimes
defous,op.cit.,p.361.
Sur

XXI

Danser,expérimenter

NapDiA
VADORI-GAUTHIER

Bactre,
sedérouler,
n'avoir
pasd'image,
pulser,
scander,
avoir
une
ceraine
vitesse,
unrythme,
êtreuncontinuum
indivisible,
unmouve-
ment... OÙ :
Fendre
levent,fouler
la terre,secomposer
avec
l'air,
la poussière,
engager
sesmuscles,
sestendons,
le poids
deses
organes,
letambour
dusang,
avoir
unecrinière,
voirl'herbe
filer
sous
ses
sabots,
sencir
la
uiesur
ses flancs,
traverser
la rivière,
secabrer
sous
lafraîcheur
de
l'eau,
allerplusvite. ou :
Voiruncheval
quigalope,
enêtreimpressionné,
le trouver
beau,
suivre
satrajectoire
du regard,
sentir larésonance
dugalop
en soi,
sesentir
plusvivant,
augmenté
d’unepuissance,
alors
vouloir
saisir
l'événement,
lecapturer,
fairedurersonéternité,
prendre
desphoto-
graphies
ducheval,renter
de fixersavitesse,
sonincursion
fulgurante
dans
le visible.ou:
Regarderlesimages
fixesdugalop d’uncheval,
nepassesentir
concerné,
s’endétourner peut-être,
êtrelespectateur
d’uneimage
banale
centfoisvueaupréalable...
ou:
Être
intéressé,
remarquer
la position
desjambes,
ladécomposition
dumouvement,
saforme,
l’analyser.…
ou :
Êtreprisparlefoyerde
l’image,convoquer
lamémoire
d'un
galop
ensoi,
faire lecheminà rebours,
avoirsoudain
envie
d’ailleurs,
sortir
prendre
l'air, marcher
auborddufleuve,sentir
battre
sonsang,
danser,
embrasser
l’espace,
devenir-cheval,
frapper
lesoldeses
sabots,
Sagencer
aubruitdel’eau,auxarbres,
auxlumières
delaville,àdes
fragments
demémoire,aurouged’unvêrement,
devenir
unbouquet
derythmes,
unemultiplicité
degalops.…
ou :
Devenir
tour
à tour,surunmêmeplan,
galop,cheval
quigalope,
témoin
de
l'événement,
faiseur
d'images
ermultiplicité
desgalops.
ST
266 AGENCER
LES
MULTIPLICITÉS
AVEC
DELEUZzE Danser,
expérimenter
267

lareprésentation.
Il pourrait
sembler
parfois
plusfaci
L'art
peut
tenter
demettre
enŒuvre
desimages
quidéfonce
|'; el show
»,dedonnerquelque
chose
enpâture
àg .
dominante,
outoutaumoinsladécadrent,
lafloutent
ouencore
|,
rrouent;
etceci
afin
derenouer
avec
lavie,avec
l'intensif,
avec Jajoiede à implique
àmonsens
unetristesse
incommensurable,
une
coupure
noscorps
réels
etnonfantasmés,
avecceux,
réels,desautres
vivants,
avec d'avec
la
vie. Alorsqued investir
unecruauté,
au sens
d'Artaud,
c'est-
celui
de
la Terre,
deséléments,
desmatériaux,
des
rythmes.
Cela
implique 3-dire
uneintensité
deRUES EUduparaître,
estplus
difficile,
ussolitaire,
maisaussiapporte
plusdejoieetcrée
desconnexions
parexemple
dansmapratique
artistiquededanse
etdePerformance,
depasser
parlasensation,
d'investir
unplanintensif,
d'engendrer
L ersales
entredesintensités
hétérogènes.
plandeconsistance
sans
rien perdredu mouvement de l'immanence, Aufildes
danses,
jouraprès
jour,
jepasse
par
des
états
discontinus
dejoieoude
tristesse,dedouteoudeconviction.
Cesétats
sontengen-
decomposeraveclecyclesensori-moteur
et lessynthèsesdetemps,
d'activer
desmodalités,
nonexclusivement
optiques,
deregard,
de drés
parlanature
même desdansesquotidiennes,
leurs
répétitions
er
composeravecUn inconscientmachiniquequi ne préexisre
Pasàson leurs
différences.
Il y aaumoins
trois sortes
dedanses,quin'ont
pas
expression.
Dans«Ouvrirlecorps»,JoséGil mentionne
unregard véritablement
dedifférence
denature,maisdesdifférences
dedegrés
quimesembleproche
deceluiquej'expérimente!.
Ceregard
indlur intensifs
: lesspectaculaires,
lessingulières
etlesbanales.
Jevoudrais
deséchanges
osmotiques
entrelescorps,
àdesniveaux
inconscients. mertre
cettesuccessionde danses elien
n aveclesphotographies
de
Il évoque
également
un«corpsspectral
»,quin’apasd'image
nide Muybridge
queDeleuze
mentionne
en1983,
audébut
deses
écrits
figure,
etquiseconnecte auxforcesdeformes(forcesquiémanent
des surlecinéma.Le mouvement
y estdécomposé
enunesérie
d'images
formes)plutôtqu'auxformes
elles-mêmes’.
En travaillant
àproduire
des fixes
équidistantes*.
Cesclichés
photographiquespermirent
derendre
dispositifs
artistiques
quiactivent
unezoned’interconnexionosmotique compted'unnouveaupointdevuesurlemouvement. Eneffet,
avec
entredesinconscients,
onpeutcontribuer àsoigner quelquechose l'invention
delaphotographie,
l'artn'apluslerôledeproduire
une
dansnosfaçons d’être
ensembleetaumonde. Car
le corps spectral icône
représentative
dumouvement,
il peur
endonner
desinstants
estinséparabledumonde, commeleCsO oulecorpsspinoziste. quelconquesàpartirdecoupes
effectuées
dansl'immanenced'unflux.
Ils'agirait,
enquelque
sorte,d'investir
undisparaîtreactifàuncertain Deleuze,àpartirdesexemples
quedonneBergson,pense
lacréation
régime
de visibilité
quientraîne
unapparaîtresurunautre registre dans
undecesmoments quelconquesouplutôt
: dansl'intervalle
pourautantqu'onsetienne
vivant,àl'œuvre,caprantdesforces,sur entre
cesinstants.Se
glisserdansl'entre-deux,
estune
façondefaire à
leseuil
decertetransmutation.
Unrégime devisibilité
cède place
àun laquelle
il nousinciceégalement
en1981 :«Onnecommence jamais,
autre: uneimage
desurface
dontla natureestdesefiger,sedissout onnefaitjamaistablerase,on seglisse
entre,
onentre
aumilieu,
on
pourque
se révèleuneimagepartielle,
mouvante. Cen'est
pasune épouse
ouon imposedesrythmes”. »Danslesminutes
dedanse
c'est
extériorité
qui
se dissout
auprofitd'une
intérioritéquiémerge.
C'est surcemodeque
je procède
: seglisser
entrer
aumilieu
deschoses.
l'écran
duvisible
quisetroue
pour
accueillir
uneextériorité
constitutive Fairepartieintégrante
du milieu,nonseulement
l'épouser
mais
s'y
plusvaste,
undehors
volumétrique
etmouvant.
Lorsdemes
minutes fondre.
Parexemple
:être
unebarre
métallique
parmi
d'autres.
Ces
trois
dedanse
quotidiennes,
je metrouveainsidans
l'écart entrecéder
au sortes
dedanses
ontdesdegrés
variables
quiparfois
serejoignent
ou
spectaculaire
etfaire
image”,
alors
quej'essaie
par
ailleurs
dedéfairt s superposent.
Lesdanses
plusbrillantes
nevontpassans
lesplus
me

1.
JoséGil,«Ouvrir
lecorps
»,inDel'œuvre
àl'événement.
Noussommes
lemes æqui
estlà,eràposter
ladanse
enligne
lejour-même.
Ils'agit
dedanser
comme

ÀvousdedonnerLe
souffle,
catalogue
de
l'exposition,
Nantes/Dijon,
Musée
desbeat Manifeste,
pourœuvrer
àunepoésie
on pouragirparlesensible
conure
laviolence
arts
deNantes/Les
Presses
duRéel,2005,p.63. decertains
aspects
dumonde, sans
autres
armesquecelles
dusensible,
pournepas
2. Ibid. p.65. Céder
àl'anesthésie,
Lapeuroulapétrification
ercréer
desconnexions
vivantes
aux
Aus, auxenvironnements
(ewww.uneminurededanseparjour.
comp). ur
3 Uneminutededansepar
jour, estun projerquotidiende
résistanceinitiék
14Janvier2015, suite
auxattentatsà Paris.Cetteactionpoétique
consiste
à 193,
Gilles Deleuze,
L'/mage-mouvement.
Cinéma
1,Paris.
Éditions
deMinuit,
uneminute erquelques rouslesjours,sansmontage aveclesmoyensdu »P. 14,

lesétats
etleslieuxdanslesquelsjemetrouve, sansmiseenscène,riend'autre
q#° 5.Hd,
Spinoza.
Philosophie
pratique,
Pass,
Éditions
de
Minuit,
1981.166.
V7
268 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVEC
DELEUZE

obscures,
lesplus
agissantes
nevontpassans
lesplus hésitantes
& XXII
pluspartagées
etcommunicatives
nevontpassans
les plusdésere,
C'est
parce
quenombre
d'entre
elles
sontquelconques
quecerta
peuvent
êtresingulières
ou spectaculaires.
Le penduleoscille
pe,
despôles
mobiles.
J'habite
auquotidien
uneoscillation
lumineuse. Laschizoanalyse
oularévolution
obscure
quejesouhaiterais
rapprocher
decellequiconnecte
Dionysos copernicienne
del'inconscient
àApollon.
Selon
Deleuze,
dansceprocessus
dedevenir,
«l'affirm
ation
résulre
delanégation
enconservant
ce quiestnié».Ainsi,|agenèse
d'images
dionysiennes,
toutendissolvant
les icônes
apolliniennest,
les
active
enmême temps
qu'ellelesnie.Elleleshabite,lesdéfait
Puisles FLORENT
GABARRON-GARCIA
recompose.
Cepointparaîttoutà faitessentieldanslarechercheque
jemène,caril suggère
quec'est enhabitantle régime delareprésen.
tation
quel'onpeuts'yopposer.
L'affirmation
d'unautre
régime
de
visibilité
impliquerait
doncunesolidarité
avecceluiqu'ilnie.Dionysos S'appuyant
surquelques
déclarations
freudiennes
rapprochant
secache sousApollon,
il lerépète
pourmieuxledéplacer. Demême, la psychose
del’auto-érotisme,
certains
analystes
défendent
l'idée
nouspourrionsinvestir
desimages,
lumineusesenapparence, pour
les selon
laquellelepsychotique
n'aimerait
quelui-même,
ousondélire.
doubler
d'unepuissance
mouvante.
Dionysosjoueaveclerayonnement, Letraicement
dela psychose
estalors
purement
et simplement
renvoyé
laclarté,
la beauté
d'Apollon,pour
les entrelacer
à unepartobscure. Aune «impossibilité
technique
». Letravail
del'analyste,
segardant
du
» Obscur,
neveut
pasdireterrible,
démoniaque,
dangereux.
Obscur
se risque
transférentiel,
devraitsebornerà «normaliser!
la personne.
rapporte
aucœurinformulé
deschoses,
desidées,desimages.
C'estune Dans
la psychose
il n’yauraitpasdesujet”.
À l'inverse
decette
concep-
intensité
devie,unfourmillement
depuissances. tiondéficitaire,
pourDeleuze etGuatcari,
etin fine
JacquesLacan’,
le
délire
n’est
pasunsolipsismeerle psychotiqueoul'autiste
nesont
pas
coupésdumonde. Bienplutôt, c'est
l'homme normalquines'aper-
çoitpasquesesparoles luisontimposées®.Plutôtquedepostuler
la
forclusion*,
DeleuzeetGuattari proposentdeprendre au«sérieux
le
à délire
erdel’écouter
»,l'instardugeste fondateurdeFreud
quiavait
prisausérieux
l’hystérique
et sespropos.
Noussouhaiterions
rappeler
iciquelques
éléments
théoriques
de cette
approche
er,par
l'exposition

1.Carole
Dewambries-La
Sagna
etJean-Pierre
Defieux,
L'Amour
dans
les
prychoses,
Paris,
Seuil,
2004
;Jean-Claude
Maleval,
LaForclusion
dunom-du-père,
Paris,
Seuil,
2000;
Marcel
Czermak
etJean-Louis
Duhamel,
«L'homme
aux
paroles
imposées
»,
Lediscours
psychanalytique,
n°7,1992:
Patrick
Chinosi,
Transferts
etstructures
en
Pychanalyse,
Paris,
L'Harmattan,
1996.
2.Déclaration
d’unpsychiatre-psychanalyste
connulorsd'uncolloque
desociété
Psychanalytique
àParis
en2013.
3.Jacques
Lacan,
«Latroisième
»,Lettres
del'école
freudienne,
n°16,1975.
P.177-203.
Voirégalement
Florent
Gabarron-Garcia,
«L'Anti-Œdipe,
unenfant
fitdans
ledos
deLacan,
père
dusinchome
»,Chimères,
n°72,
2010.
4.ld.,Lesinthome,
Paris,
Seuil,
2003,
p.95.
————————_—-
3:Quin'était
—mais
faut-il
lerappeler?
- «même
pas
unconcept
»,nimime

6.Id,,Différence
etrépétition,
Paris,
PUF,1968,
p.75. thèse
»,pour
Lacan,
Voir
Jacques
Lacan,
Les
psychose,
Paris,
Seuil,
1981,
p. 7%:
Nr
270 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE ti pizoanalyse
oularévolution
copernicienne
del'inconscient
271

d'unrécit
de
cure, illustrer
cliniquement
letravail
qu'elle
àperm, il puisse
s'Ycopains= s'enregistrer
commetelen«bout
de
d'entreprendre.
son
Sujer Le
dàl'autre
d'unnom élire,
lorsqu'il
es
dans
u adisjonction
ne igu,
ne cesse
pasde
fire
infinie,
Freud,
ci
ne»(jesuisceciou cea : MonsieurDupontoùcharpentier,
” lire révèle
lapathoplastie
insuffisamment
aperçue
de
la libido
etc.).

par
Deleuze
etGuattari
avait,
dailleurs
biennoté
l'importance
dos u routSu)
de er et
la fragilité
detout
signedans
sonapparcillage
age d'effer-
divisions
dansledélire.Cependant,
il a rabattucettespécificiré
re ser,
quand lacliniquedu névrosé
lamasque
par
le mécanisme
du
lemodèle
projectif®.
Une
fois lessynthèses
disjonctives
rapportées
à let etlapossibilité
deproduction
desemblants
davantage
l'imagination
inconsciente
surlemodèle
hystérique,
FreudnePouvait ,subilisés
».Au-delà
decesenjeux
métapsychologiques
cruciaux,
une
reconnaître
quelepère
danslesproductions
deSchreber. dinique
nouvelle
peutêtredégagée.
Reprenant cetteinvestigation spécifique,DeleuzeetGuattari Cette
nouvelle
écoute
desénoncés
entantqu'ils
sont
Producteurs
et
dégagent touteuneheuristiquenouvelle.La synthèse disjonctive nonpastoujours
déjàrévélateurs
dereprésentations
intrapsychiques
que
témoigne eneffetdela facultédela libido à sestructurer selon des l'ondécouvrirait
dansun «sujetfamilialréussi
»,modifie
également
le
signesdisjonctifs
quelconques et nonexclusifs,parlesquels ellefait maniement
dutransfert
etlaponte
dunr nes L'hsnaicioss
passersonSujet.Soitun usage desnomsqui, au lieu d’être exclusif , d'abordreconnusous lesigne d'une uverte, maisj/ est
oulimitatif(oubienÀ, ou bienB) estaffirmatif,illimitatif,inclusif Dilend prodsiet(co)production
dansLetravaildelacureetendehors.
(soirB,soit
À, soit C.…..
etc.),erquifair passer
le Sujetd’unétatàun S'ily adesconstructions
dansne c'estdre l'analyste,
loin
le autre
parunvécu
desoncorps’.NonpasqueleSchizo
«seprenne d'yêtre
neutre,
estlui-méme
pris dans processus.Cette
conceptionn'est
pourNapoléon
»,comme
le senscommuncroitlerepérer.
Cen’est
pas
à sansmodifierà sontour l'aborddelapsychose,
quiplusestdans
unmoiqui
se reconnaît
dansun nompropre.L'opération
duschixo sonrapportà l'institution".Lasciencepsychiatro-psychanalytique
: qui
consiste
àidentifier
n'estpasl'identification
elle estsans
leMoi. ordinaire
et sondiscours diagnostiquesefont
fort derendrecompte de
Il s'agitdecoutautrechosequi necessepasdeminerde
l'intérieur manièresavante destroubles(parleDSMou la forclusion,cequi,en
l'identification
elle-mêmecomme possibilité.
Lesgrands
personnages, pareil
cas,revientaumême) etd’eninformer
le patient.
Parfois,
celui-ci
lesdieux,
lesracessontdesnomsquidésignent desintensités
qui vajusqu'à
intérioriser
cediscours.Lanégativité
delapulsionnalité
qui
fulgurent
ertraversent
leSujet.Lathéoriedesnomspropres nese l'emporte
est arraisonnée etcontrainte
desepositiver
dans lediscours
conçoit
plusentermes
dereprésentation
parrapportaunomdupère,
médical
psychiatrique.Certeopération peutêtremenée d'autant
plus
mais
sereconnaît
parseseffets
réels
: facilement
pourcespatients oùcen'estpasseulement l'impossibilité
demettreenrécitsaviesurlaquelle onbutte,maissur
l'absencemême
Non
pass'identifier
àdespersonnes,
mais
identifier
lesnoms
del'histoire
àdes
a demémoire.
Alorsmême
que
le trauma
bel etbien
eulieu,
iln'yen
zonesd'intensités
surlecorpssansorganes,
etchaquefais lesujetcrie«c'est
anulletracedanslesouvenir
oulelangage.
Parfois
même,
il peut
moi,c'est
doncmoi!»,On n’ajamaisfaitdel'histoire
autantqueleschizo,et
être
interditausujetdelepensersouspeinede_ voire_
à de
lamanière
dont
il enfair.
11
consomme
enune
fois
l'histoire
universelle! Mourir.
Dèslorslatemporalité
sedéfait,
le sujet
s'annihile.
Absent
sa
Proprehistoire,
il s’appareille
deforceàl'établissement
psychiatrique.
: D'unpointdevuemétapsychologique
leSujetdevient
«transpo” L'aliénation
socialerépressive
redouble
alorsl'aliénation
inconsciente
du
sitionnel”
»: iladvient
auterme
d’unprocessus
desynthèses
passives
Sujet
etLepatients'alièneaupersonnage
dumédecin. .
qui
le produisent
jusque
danssoncorpsetses«sentirs
»,jusqu'à
€ Oncomprend aisément
enquoil'approche deleuzo-guartarienne
———- cliniqueserévèle cruciale
icipourpouvoir tenter
dedéfaire
ce
pas Es Deleuze etFéix Guartari,
'aris,ÉditionsdeMinuit, 1972,
L'Ansi-Œdipe.
p. 19-20,
Capisalime
er
schieaphrit meme

10.Nousavonségalement
illustré cesenj r uneaurre
curedirede
à
: Ga pre
Sberie
Blanc,
Laproduction
dudésir,
Paris,
PUF,
2010. À
Psychoti Jeuxpour
Uque » (FlorentGabarron-Garcia,
« Passage
à
l'acte,acteare |
J Ibid,p. 394-395,
9% etFélixGuattari,
j op.cfir.,p.28.
p'étation *,Cliniques,
n°9,2015); maisaussi
dans
lecadre
d'une
cureg |
"SNGabarron-Garcia,
«Lucille
erlaguerre
»,Chimères,
n°83,2014,
p. 83.
\/
” chizoanalyse
ouLarévolution
copernicienne
del'inconscient
273
272 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

ursesmobilités
inattendues,
toutenLes
prenant
touràfaitau
il del'analyste,
surleborddel'institution mots
s Qu a--il derrière
moidesi monstrueux
?Quelritedoit-il
nœud.
eu àproduire
deseffers
dedécalage,ennes
ne unecrédibilité
àcertenégativité
dudélire,Ensuspendans Afectuer
entournantautour
de sachaise, oulorsqu'il
lèveétrange-
«ses
bras?Dequoia-t-ilsi peurpour
se recroqueviller
dansun
ss rinencede
l'aliéné dansleSujer,enquestionnant
cette partde
voirdelascience
médicale
psychiatrique
queleSujetaintél. _ desalle?Mes questions,et peut-être
ueljelespose,ainsiqueledébit également
dema voix,le toninsistant
finissent
parfaire
jusqu'à
senierentantqueSujet,ons'aperçoit
quecettedérive dans x Monsieur
L.,sans
prévenir,
s’assoit
brutalement,
commeense
lesNomsde
l'histoire nesefaitpasau hasard.À! éprouver
etàs'en bissant
romber de
fatigue(cettefatigue
estd’ailleurs
bienréelle).
À ma
faireledestinataire
malgrétout,il apparaît
queledélirantà souvent surprise,
il mevoit.Il mesemble même quenousnous voyons
pourla
debonnes raisons
dedélirer
plutôtlesesprits
que
les races,ou
le soleil
Aussi fous
soient-ils,
cesnoms portent
eneffet lamarque d’une
tentative ièrefois.11meplantesonregard désespéréetbouleversant
dans
lesyeux.Nousrestons làensilence,enface-à-face.
Jeneparleplus.
desefaire uncorps,maiségalement unepromesse :celle
depasser
de
l'êtreparléàunêtrepouvantparler.Il convient
doncde tenter
de les Il aarrêté
sesactionsincessantes.Pour lapremière
fois,MonsieurL.
écouter,de
les prendreausérieux,des’enlaisser
traverser,
pour
peur. vapouvoirs'adresserà moi. Au seindeceregarddepurdésespoir,
il
êtrelesscander,tenter
d'yrépondre, tenter
d’êtreunefigured'autre wabredouillerquelquesmotsque je vaispouvoircomprendre : «Les
quisoitàlahauteur decequiestensouffrance, làoùlesujetn'apas Djinns
sont partout
etilsm’aident
pourlesNoirs: il nousfautnous
pufaireautrement
que d'absenter
toutautreà lalimitepsychiatrique. défendre.
»J'acquiesce
silencieusement
etjesoutiens
son
regard
enlaissant
Auterme
dela cure,
ledélire
desNomsde
l’histoirefinitpartrouver voir
quejesuisaffecté.
Laprésence
physique
denoscorps
etdenos
l'articulation
qui
lui manquait
pour
s’articulerdans
l’histoiredusujet regards
quisevoientl’unetl'autre,comme pourlapremière fois,
sans
plusavoir
besoin
derecourir
àlarépression
psychiatrique. vient
faireun«bordage »à lalettredudélire
quivenaitdirectement
lecontraindre
àdesactions.
1.DÉLIRERLESNOIRS ET
LES DJINNS MonsieurL. vapeuà peuconstruire toutundélire surlesnoirs
etlacolonisation
où il prendlaplacedusauveur.Il nevaplusêtre
L'ensemble
dutravail
avec MonsieurL. sedéroule
en«psychia- directement
etuniquement prisdansdesmouvements decorps.Ilpeut
trieordinaire
».MonsieurL. aétédéclaré
psychorique
et«forclos
». rester
assis
etnouspouvons parler.
Aufildelacure,
cesNomsautour
Aprèsplusieurs
joursd'enferment,
jelereçois.
Lespremières
séances d'unethématiquesurlesNoirsnevontcesserderevenir.
Nonseulement
sontparticulièrement
difficiles.MonsieurL. vientbiendelui-même jeprends
ausérieuxsesénoncés,
maisje soutiens
toutàfait lapossibilité
mevoir,mais
il estincapable
deparlerintelligiblement.Il s'exprime deleurfabrication.
Monsieur
L. se sertdesNomsdel’histoire
pour
se
essentiellement
pardesgestes
étranges.Il selèvedesachaise, tourne faire
uncorpset tenter
deconstituer
son adresse.
Detemps entemps,
autour,
puisserassoitenpoussantdescriseffrayés
etenpointant de ilestparticulièrement
exalté
ets’élance
dansdessortes
deharangues:
son
indexquelque chosequi
seraitderrièremoi.Puis,ilvaserecroque- «jesuisMartin Luther King, je suisun génie,je suisMalcomX,
viller,apeuré,
dansuncoindelasalle,ensebalançant
sur
lui-même. jeporte
lepoidsdumonde!!.…
» Je luifaisalorsremarquer
nonsans
D'abord désarçonné
etquelque
peumédusé desesgestes,
jedécide
de
empathie
quec'estlàunetâche
quidoitêtre
épuisante.
Monsieur
L.
lelaisser
faire
ces
mouvements
étranges.
Detemps
entemps,
il arrête S’affale
alors
sur
la chaise
etreconnait
safatigue
etsalassitude
dont
nous
ses
actions
contraignantes,
meregarde
bizarrement
comme
s’il voyait
Pouvons
discuter.Par
ailleurs,au-delà
del'importance
decerte
mise
en
Àtravers
moisansmedistinguer,
puisil recommence.
Il ponctué
se
forme
dudélire,je suisréellement
sensible
à plusd'unaspect
deson
gestes
dequelques
motsincompréhensibles,
voire
dequelques
bribes
de ours.
Jeneluicache
pasquecertains
aspects
decequ'ilditsont
Phrases
inachevées
oudésarticulées.
Lorsdecespremières
séances,
jeme
es :«L'esclavage
abeletbienexisté
etlacondition
des noirs
sens
assez
impuissant
et unesidération
angoissante
tendàm'envahir. ee fragileetroujours
révoltante.
»Danscesmoments,
Cependant,
je finisparm'enhardir,
ettoutenluilaissant
faire
cs maleteetil meregarde, manifestant
sonintérêt,
quelque
peusup
ments,
j'essaie
decommenter
ceque
je vois,erdemettre
des
semblant également heureuxdevoirqu'ily aquelqu'un
quile
V
7h AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVEC
DeLeuze Laschigoanalyse
04Larévolution
copernicienne
del'inconscient
275
2

…schève.
Je nevaispluslevoirjusqu’à
ce qu'il
x. Nousnepartageons
plusseulement
dutemps
« pe _., entretiens
etqueCommence
uneSi
prend au
l'espace, mais également
desbribesdesignifications.
Lapossibilie
éd clquesmoisplustard.On m'informe
alors
queMonsieur
L
cequ’ilappelle
«sespensées profondes
»,nous
le
mecommuniquer rune«Brave Dre F levée dutraitementmédicamenteux
C'est
enacceptant
demefaire lepartenaire
deceProcessus faitva en réalité,
mettreàjour| immensetristesse
deMonsieurL..
co-production
quesondélireauraputrouver,danscepremier
ui masquaitvraisemblablementsondélire
antérieur,
Nous passons
àseconstituer.
échanges
Maisplusencore,
nesontplusdélirants,
àprésent,
maisces
nonseulementCertains
constructions/productions
Fu
quersséances oùjeluiPA ” nva obligé deparler
etque
là gore
qu'émergent
quelques
trouvailles,
dontil va5eessais,etqu nsnoustenir ensemble, ensilence.Parfois,
nouseos larmescoulentlelongde
sesjoues sans
one
cerévéleront
décisives
pourlasuite
delacure.
Lorsde
l’un denos
Entre. ete IIapparaîtra
quesacapacité
àexprimer
satristesse
—fut-ce
en
tiensoù il meraconte
ànouveau
«l'Histoire
desNoirs»,j'enchaine
A silencieusement
—estproportionnelle
àsacapacité
d'échange
anslui
laisser
leremps
depoursuivre
surunequestion
très
co Pl aboration,
insoupçonnable
lorsqu'ildélirait,etlapréfigure.
qui
va précipiter
l'avancée
ducravail
: «Mais,vous-même,
d'oùétes. et scependant
amené
àdevoir
le rassurer
dans
unpremier
temps
:
vous
originaire?»Mr. L. : «Je viensdesComores».Je commente lesui
àpourquoi
mevoirpour
parler? »medemande-t-il,
«n'est-il
pasfou
alors,
«Ah, c'estuneîleça. ».Mr. L. : «Oui,c'estcommeAimé
Césaire.
»Éronné etsansréfléchir,
jeluidis:«Vousconnaissez
Aimé comme
le disent
lesdocteurs?
».Jerelativise
ouvertement
lesavoir
: Césaire?
Il yaunlivrequej'aime
beaucoup c'estCahiers
d'un
retoup médical
enluidisant
quilavait
certainement
debonnes
raisons
detant
souffrir
erqu’ilestimportant
que nouspuissions
discuter
descauses
qui
aupaysnatal.»MonsieurL, à sontourtrèsétonné
: «Ahoui,jele
onc
pulemettre dansuntelsk ps désespoir.
nn En L
connais
celivre,monpèrel'avaitdanssabibliothèque!
Je l'ailu,ily
de
la :e associeret va me parler ses« origines». C'est première
alongtemps!
»Sans
réfléchir
er, certe
fois,unpeuétonné
deceque
ut meparlede lui. J'apprends alorssonhistoire.
II meParledes
jem’entendsdire
: «Si vousvoulez,je peuxl'apporter
laprochaine
jeuxqu'ilavaitlorsqu'ilétaitpetitaveclesautresenfantsduvillage,
fois,etnouspourrionslelire. » MonsieurL. semontreaussitôr
delavierythméepar
les saisons
etdestravauxdeschamps,
desfêtes
enthousiaste.
NouslironsdoncLescahierschacunànotretourpendant
plusieurs
séances.
Certe
lecture
aurauneffetimmédiat
: ellel'apaise devillages
etdesramadans,
decertains
fruitsraresque
l'onnetrouve
aussitôt
etsonétat
va s'améliorer rapidement. De tempsentemps, pasane dela lumièredesonpayslointain
qu'àn'apasrevu
nous
entrecoupons
notrelecture
et il meparlealorsdechanteurs
derap
depuis
silongtemps,
de ladifférence
des
climats.
Jen'hésite
pas
àlui
noirs
très
engagés
politiquement
pourlareconnaissance
deleurs
droits demander
demetraduirecertainsmotsdefrançais
encomorien,
ce
civiques
auxÉtats-Unis.
Jen'hésite
pas àluiparler
delaNégrirude
et qui
le faitbeaucoup
rireet plaisir.
Il meparle
aussideBobDénard,le
descourants
politiques
etlittéraires
decontestation
ducolonialisme, «français»,le«blanc»quidominait sonpays.Nousaurons l'occa-
qui
d'ailleursm'intéressent
particulièrement.
Il m'écoute
avec
une siond’yrevenir.Il meparleégalement desonenfanceauprès desa
grande
arrention.
Nousparlons
delacritique
deSenghor,
del'utopie tante,
quil’aélevé suiteaudécèsdesamère,lorsqu'il
avait
cinqans.
desÉtats-Unis
d'Afrique
deFanon.Puis,nousnousremettons
àlire Lorsquemonvisages'assombrit enréaction
àcettedernière
informa-
Césaire.
Peuàpeulorsdesentretiens,
nousallonsparler
deplusen tion,
aussitôt
il chercheàmerassurerenmedisantque«c'estcomme
plusdepoésie.
Monsieur
L. vasemettreà écriredespoèmes
qu'ilva ça»,que«laviecontinuait »,que«routs'était
bienpassé,
enfinde
m'apporter.
Jel'encourage
dans
les voies
qu'ilprend
etjeluisuggère compte
». Pourlors,je décide,
làaussi,
denepasinsister
sur
cetaspect.
qu'ilpourrait
publier
sesécrits
dans
le journaldl'hôpital,ce
e qu'ilfera. Lors
des
entretiens,
Monsieur
L.faitmontre
d'humour
etderépartie.
Cetravail
d'élaboration
vaseprécipiter
etdéboucher
sur uneétape
IL.LESCOMORES
: «RETOURAU PAYSNATAL” majeure
lorsque
je suisamené
à l’interroger
sursonarrivée
enFrance.
Jedécouvre
pourla première
foisladouloureuse
histoire
desonexil.
Désormais
jugé«stabilisé
»,MonsieurL. vasortirdéfinitivement ArrivéenFrancelorsdesesquatorzeans,
il devaitretrouver
son
del'unité
fermée.
Il nedélire
plusducour.Unepremière
période
de père
qu’il
n'avait
encore
jamais
vu,
carilétait
parti
avant
sanaissance.
L ”d
276 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE aschizoanabye

Lerévolution
copernicienne
de
lincomieng
y7y

Ilmeparle
alors
deses désillusions
lorsdeson
arrivée,
deson«choc,
be ueje lesache,qu’un«blanc»,qu'un«français
» (l
desavenue
danslefoyer
etdesesgrandesdifficultés
àl'école
f,
ee àun«noir»,àses: comorien »,connaisse
[ans et”
oùil avaitété«rétrogradé
».Un lourdsilences’installe
unmomen ë le aveclui,avaitétédécisifdansceprocessus
d'élaboration.
Cette
puis
ilreprend
foyer
: «Maintenant
delaSonacotra,
c'était
quej'ypense,
biensordide.
lorsque
jesuisarrive
Onétaitqu'entre
nous,
er
Ryporhèse
allaittrouver
par
la suiteuneconfirmation
importante.

onétait
pluspauvres
qu'aupays.
C'étaitcomme
sionétait
parq HI. COLONIALISME
comme
une
sorte decamp.Celan'avaittellement
pasderaPPort
avec ET RÉPRESSION PSYCHIATRIQUE
lavieque
je m'étaisimaginée.C'était
pirequ'aupays.
»Tout«allant
demalenpis»,il avaitfinipar«chuter»jusqu’à
entendre
desvoix Malgré
l'avancée
dutravail,
unegrande
tristesse
revenait
sanscesse,
lorsd’unefêtecomorienne
deuxansplustard.MonsieurL,laisse
dors Elle
allait
même,progressivement,
reprendre
ledessus,
jusqu'à
bloquer
la
unsilence,
toutéronné
duflotd'informations
qu’ilvient
dedélivrer cure
etletravail
d'association.
Nousallons
voirenfaitqu'elle
témoignait
qu'ilavaittujusque-là.
Aprèsunmoment,je lui dis: «Jecomprends d'unrapport
symptomatique
à l'appareillage
institutionnel
dans Lequel
bienpourquoi la lecture
desCahiers
d'unretouraupaysnatal vous
à Le
clinicien
quej'étais
était
pris,malgré
lui.Étrangemen
cette
tristesse
permis d'allermieux.Vousavezcommencé à allermalsuiteàvotre apparaissait
dèsquenousparlions
deson«pays
natal
».Lorsque
je
arrivée
enFrance, suiteàladouleur devotreexil.»Monsieur L.me l'interrogeais
sur
les raisons
desonmalaise,
sesévocation
portaient
sur
regarde.
Unlongsilences'ensuit. Sesyeuxs'emplissentdelarmes qui savieactuelle
concrète
qui,
il est
vrai,était
alors
objectivement
morne.
coulentsursonvisage. Nousnedisonsplusrien,jepasse ainsi
un S'ilserendaitbienauxactivités
del'hôpital
dejour,
il s'yennuyait
moment aveclui,puisnousarrêtons laséance. «àmourir
».Il seplaignait
longuement
du«vide
deses
journées
»et
Nullequestion detriangulation œdipienneici. Onnepeut inférer de«l'absence
desesperspectives
sociales
».«N'était-il
pasrevenu
à
decettechute dupèreimaginaire desonenfance, aussibienabsent lacase
départ?!
»Laformation
professionnelle
danslaquelle
ilétait
qu'idéalisé),
quand lepatient découvre enréalitéladéchéancesociale auparavant
engagé
avaitétésuspendue.
«Bloqué
dans
desateliers
»,
il
dontcelui-ciestfrappé,
l'absence «delamétaphore paternelle
»etsa n'avait
plusgoûtàrienetilétaitabattuparcequiluiapparaissait
comme
«structure
psychotique »supposée. Cette interprétation
commune n'est un«arsenal demesures queluiimposait l'hôpital
».Ilprotestealors
passeulement
typique d'uneillusionrétrospective.Frappéed'idéalisme, auprèsdemoienmefaisant valoir«qu’iln’est
plusunenfant»,«qu'il
elleabstrait
letrauma etdénie l'histoire
pourmieux faire
l’économie n'apasbesoin d’untuteur pours'occuper desonargent».Il ressent
des'enoccuper. Or,c’est belerbiendanslescoordonnées relatives
à unegrande privationdesaliberté. Jesuissensible
àcequ'ilme dit:
sasituation
concrète d’exilépostcolonialquesonprofond malaiseavait iln'yaiciriendedélirant.Je luiindique quetout
n'estpas arrêtéet
à surgi.
Forcél'exildans l'espoir d'améliorer
sesconditions
de vie,ces qu’ilpeutdoncsefaireentendre
auprès
demes
collègues.
Cependant,
dernières
allaientaucontraire devenir catastrophiquespourdevenir ilserésigne
àson«programme
de soin».Certe
astreinte
va,dès lors,
celles
d’un«relégué enfoyer».L'aliénation sociales’enchässait
icià leminer.C'estcomme
si, acceptant
lestatut
«d'handicapé
»,
il en
l'aliénation
psychopathologique.
Dansl'après
coup,ledélire
lui-même était
devenuun.Accablé,
Monsieur
L.vaconfiner
danslemutisme
enportait
clairement
lestraces,
tantdans
saforme
(quimertait
enscène pendant
plusieurs
séances.
l'esclavage
desnoirsetleur
lutte) quedanslemoment desaproduction Unjour, jeluifaisremarquer
qu'ilsegarde
bien
dedivulguer
ses
(lepatientsemeràdélirersuiteauxeffetsdesonexpérience dans
le Critiques
ailleurs
quedansmonbureau
et qu'ilneproteste
pas
auprès
institutions
françaises
dufoyer,del'école
àL'HPetd’unefête deson
pays demescollègues.
MonsieurL. s’emporte
etsemeralors
àcritiquer
enFrance).Lagrande Histoires'invitaitdans
l’histoiredusujetpouf ‘ilemment nosséances
etàdouter
deleur
pertinence
:«Deroutefaçon,
faire
trauma
ers'actualiser
lorsdesonarrivée.
Peudetemps
4P lanesertàriendeparler
et d'évoquer
monhistoire!
Jesuis
bloqué
Monsieur
L. parlera
de«sonretour à lui»,unjour,auxComores ns *Lorsdurendez-vous
suivant,
Monsieur
L.nevient
pas.
Alors
Suite
àcesélaborations,
il reprendracontactavec
certainsmembre Qu'il
dispose
demonnuméro,
etqu'il
s'en
est
déjà
servi
àdes
moments
desacommunautéavec lesquels
il avaitcoupé
tourlienjusqu
nié tiques,ilnem'appelle
pas.Enrevanche,
je reçois
vers
Lafindenotre
DELEUZE
ouLarévolution
copernicienne
de
Roue F 279
278AGENCER
LES
MULTIPLICITÉS AVEC

Oui,Dénard
avai :
séance,, l'appel d e ma coll e Rares
gonerilpouvait ne sutquand
lsbissns
non quelque
emba ègue
del'hôpital
dejJour 5 E peut-être er tee propres fins de di

Den
Dé rras El
qu ù
il a critiqué
iquétoutes , que Monsi
lesmes eurL.n . Elle m'
m'expliq ren faire, car vous a
bienemporté
votreun Dénard,
ce«blancresvillages
ecem ..
Ls s'estenfinfaitentendre
fai ures.D'une certai
PRESS plusveniue,
l'arrends
I è L
etque, s4il souhaite.Aussi,
h
jel appelle eat wop
petir
etimpuissant.
ui qui vienne
me
le dL arreter ses €
ntreteet je ] 5
Je
.lui ex
re, Mon
pliqu
li

Sieur
sa voixqu qu'i ire.Monsieur ae il faut €que
j Monsieur L.Jes'effo
nd

d vo ilest heureux de m L. fait l'étonné quecela k


lerde
sa tristesse PU alorsch cod
lewepa ceFde lesséances.
liberté e je LeF isal
Très meer lait
e maréacri etLa
lui faire&aborer, c’airaità présent.L on évitement
initi
: al ë r, C était aussi - Lu!faire , nitial pour
de nos dr Fe il a depuis le as qu'au on, jusqu lors s en sortir. O 1 lever le dli oquer sa do

y parler
veni ercritiquer
(5 se
institufio qu'on
Ed y mène : t €estpeut-
-êtreKad,
celui men
aupersonnage
mitbien
qu'il
agede
par
lequel
il -
coins
del'histoigesparentaux,
car
li agit
dene
pass: se4
euir,Monsieur
L mes pe,
mais
Àpeutégale
onseulemens,
il à pasclore
la vérité È , aussi
7 En effet,cedécès inconscient
est0 tenir
seule-
j'ai
l'impression queourit
seul. Ça a quelque des
par ce
etacquiesce. Pui ment
deque vous venez. defaire,
décider
Puisil dixi 1e
Le
: C'esté
; nepas psychotique
n'yse Sujet,
sans
cubeen edà quatre
permet
devoir
quej rassurant,
J'exi e,jenesuisange, projets qu'on
santé . r
lui
u
avai€passon
ait imposés
origine
uni queson décen l ne
nivoque. L'i fo 2 chement
Parce
que
j'ai ejenesuis
pasfou xiste.
Letravail
qu’ne , l'avait
renvoyé
à l' etparlesquels
i infancilisati
“ inte » + . » on .
« avaitressentis fa À ye à1 impuissan " uelsil s'était senti i on des
onsieurL. venir aux séan e sort que
lui fai en
rapport
avec cela …à
sa mè:
dominatire,décédé
DS
éece
dans des eetaudé
infantil
ci tua impuis-
ésespoir w'il
, S peut cesco ui faisaitinsti gs un temps,assiminationfrançaise circonstances q
l'empris del prendre un È mme un Linsti-
go e l'appareillage
in e positionsubicoriveparolevéritable
Rene et : stituti e à ÿ singularitéde Le Re ilé malgré lui à e lesComores.L' Be,
l'emprisebed uneFRERE La cureDe décaler de
d'handicapé
avsouffrance
dupatienl'institution
qui
co analyste,
pe power_. serelâcher
. céedécisive.
de Te sent,avait
bai Depropel “ie nleréduisant
aua
l’accabler
- auRss rumeur égard.
maisRes æ Erse
derrisementrattrapé parlarépé
Lndesdi s t colonialquiRE ent
pas
les
siens
et
ac. éli-
dun
unemploi
du r d'écrou
que
lui avai
satristesse
—qui conti n'allait delle Es qe ar ele istoire
ressent
sane à drastique
qUI“re imposé
l'équiicontinuaitde
° 7 © s 1 éd ic j
u ; la contrainte
trouver les resso P FN a ER L, sans délire: ;
NN
ous re “cures terribles
nt dns s suR*
associer sur Le En
seeffetà Fe
, rqu'il etquesaparolercespourpri à : iatrique
quis'exerçai r,puisse
Pig alorsde son = fl avait entenduespo EP Àcerte puisse être ensemble d t sur lui,
sr uisappliquant
la iresurLeNe pareïl était
enfant. smsouffrance
ptôme
de plancienne
l'i plus ou et mncrrrminii
mod éabli
tjustement i,
Lesentreti nstitution : ss avaitpermisd accéder
mystériet,sans
Fa uses : « V.prévenir,
, sur règle de l'associati
le décès d ei oppression
ionlibre, il enchaiaux der. tiens sui psychiatrique e soustraireson
ère est mort: ous savez qu : e sa mère et L nchaine Saepenser
à ce ivants,MonsieurL.
reste
évasif,
j he»Comme
j'i ejenesaismêmeses
circonstance Ent àEvanu nousavonséch medir qu’ilhe .
disco
ir , je lui fais
qui, deDécree insiste fl pas com
point
erque Mgun ardet s
énard, cier
et àparle
2 ; angé.
Il vademie
. pasarrêté
:
sa mère. M æ ard, s’est q = I étrange enchai onsieur L
lui
lorsqu'il
; lescrlines
qu'ilsedécuple.
Il revient
souxenmieux.

Préparsnlr œnmie
oo
à ne
ère: tai 1 i à uven
faites
remaonsieur
L.me
diporté
sans
transiti inement
de599 : ai ÿ nt ca AS
sicepa jemerendslt sssiohe: »Main ion sur
la disparition Plusieursséa cn jeE luidisalors,
à la.
librementet
e l'une d'entre elles :
mentsurcesmoti
L sedeladisparition desa
des
choses
œlé7 Dénard
compte
que
je me. em vous
mee
longsilence1étaientfréquequi l'avaitemportée Rp demandé n'est
pasim,
je reprends doucement
aidir.…
: » Jelaisse

S'installer,
puisntes
comme
jevousnur cesont surlesNoirs probable,
, mai
, mais C’
vouséri
ee
, l'escla
us
estvousqui
sa déliriez,
NT som
; , cn ic, de vous
endre
lorsque
vous A
280 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

défendrecontrecemercenaire
BobDénardquiétait blancetQuiconti XXII
effectivement
unesortedemissioncoloniale,Ce blancterrorisai
[à région
etvosproches.

Aprèsun longsilence,MonsieurL. seraclela gorge,visiblemens Poétiques


del’immanence
:
trèsnouée,
etmerépond: Deleuze,Beckett
Oui,maintenant
quevousledites,
c'estvraiqueBobDénard
nous
ai
saiterquedansmondélireil s'agissait
biendesedéfendre
contre
unetele
oppression
desblancs
ercertainement
de Dénard.… ANNITACosrAMALUFE

Sondéliresurlesnoirs,commesatristesse, venaient commeen


échoà l'Histoire,dansla réalitédesonpeupleeffectivement asservi
parunblanc,un Français,Dénard. L'essentielsignifiantdesCahiers L'expérience
de
la lecturedestextes
deGillesDeleuze
estsouvent
d'unretour
aupays
natal
trouvait
làunedimension
supplémentaire décrite
comme
unvoyage,
comme
unparcours
des
sensations,
parmi
etplusprofondeencorequ'auparavant,
puisqu'ilfaisaitégalement despaysages
distincts,ou uneespèce
denavigation
surdeseaux
plus
signeà laquestiondelamortdesamèreaupays,nonmoins qu'à oumoins
turbulentes.
On exprime
fréquemment,
parmises
lecteurs,
l'Histoire
coloniale
quil'avait
vraisemblablement
causée.
Etdans
son l'impression
d’unfluxdesmotsquiconduitcomme dans
unemusique,
délire
venaient
à lafoissecontracter
etsecondenser
La chute
dupère quelquefois
sanssignifiéprécis,une
sorte d'inséparabilité
entre contenu
entant
que
liéeàl'Histoire
desonpeuple
noirasservi,
maisaussi,
plus erexpression.
C'estencesens,del'expérience
d'intensité
provoquée
secrètement,
lamortdesamère qui,danslaréalité,
étaitprobablement àlalectureparlestyledeleuzien,
quej'essaie
dem'approcherd'un
morte dufaitdeblancs
mercenaires
etcolonialistes. conceptdepoétiquequ'onpourrait
dégagerdecette
pensée-écrirure.
Aujourd’hui
MonsieurL.,avec
quijesuisrestéencontacr,
vabien. D'une certaine
manière,quandonparled'unepoétique
del'imma-
Il vitdenouveautranquillement
danssonpays. nence,
il s’agit
desouligner
uneinversion
detoute
unetradition
d'une
poétique
de la représentation,
donctranscendante,
quiamarqué
les
arts
occidentaux
—depuis Aristote.
Etil mesemble
quecetteinversion
nousestapportée
parla penséedeDeleuzeetGuartari,
maisbien
sûr,
elle
indique
aussi
l'extrême
importance
quelesarts,
etlalittérature,
prennent
dansleurpensée
philosophique.
Cetravail
s'appuie
surl'hypothèse
suivante
:laprésence
d'une
Puissance
poétique
dans
l'écrituredeDeleuze,
ycompris
dans
les
œuvres
co-écrites
avecGuattari.
Cette
hypothèse
part
del'idée
que
l'on
éprouve,
àlalecture
deces
textes,
une
sensation
proche
del'expé-
rence
vécue
lors delalecture
d'unpoème
:laforte
présence
dela
Matérialité
desmots,
du«physique»langagier,
pourparler
avec
Paul
Valéry
(lasonorité,
lerythme,
les vélocités
desphrases,
lespauses),
et,
surtout,
la difficulté
defaire
une
paraphrase
deces
rextes
—ou,EnCOrE,
lasensation
d'une
perte
irréparable
àchaquetentative
deredire
ceque
texte
dit.Cetteespèce
de«court-circuit
»,commeleditMaurice
lanchot
sur lapoésie,
entre
contenu
et expression,
signifié
ersignifiant,
282 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZzE Pobiques
de
Fimmanence
;Deluxe,
chu: 393
jt,àlalimite,lanaturemêmedusens,si meceluiquin'estplusattaché
àlatranscendance.
Lé-que
Sendceconcept telqu'ilesttravaillé
parRUE Spécialemenr com”
èreOCCUrrence;
l'expression
«levieuxstyle»estconvoquée
à
Logique
dusens.LesenschezDeleuze estpar sa Cequ'on
n'anr derni
FA Beckett
lui-même,
dansl'article
queDeleuze
juico
nsacre,
pasàparaphraser,
à redire.Il sedit RE l n'estpasdelasus usé Ici,elleseréfère
àlarecherche
beckettienne
d'unnouveau
langagièredusignifié,
quilui permet êtrereditPe d'autres Ûle,quipasserait
Parldarupeureavectour
Il s’agit
pourDeleuze d'unsens situéhorsdelaSignification,
hors sy roduire
oulibérer esvisions qcode,
er sons ui Cestyle
serair
restaient capable
cachés
derrière
ladésignation
d’unobjet
etdelamanifestation
d’unsujet,
DOn, Je deER langage”.
Jevoulais
souligner
ainsi
laréférence
àBecker
quand
sens
aquelque
chose
d'évanescent,
d «incorporel
», comme le rues pourDeleuze, depenser à unrenouvellement
stylistique,
Teprend
Deleuze
auxStoïciens.
Lesens persiste
àlasuperficie
desmots Comme remarquer
également larésonance
entre
sesconceptions
poétiques,
unevapeur
qui s'élève
d'elle.Lesensestunévénementqui se donne : unelettrebienconnue,
citéeparDeleuze*,
Becketr
inéisre
sur
entre
lescorps
et lesmots,il estdela naturedesforces.AvaAt tour,le lanécessité
deselibérerd’un style« caduc»,celuidi sine À
sens
aunenature
deperformance,
de«temps-réel
». unusage
correct
delalangue,
unusage
normatif,
figé,
quicacherait
Quandil s'agitd'uneécriturephilosophique,qui produitdé quelque
chosede plusvivant.Pour Becker,
il faudrait
malmener
le
concepts,
onvoitbientôt
la difficulté.
Comment
faire ensorte
que langage,
lui faireéprouverun échec dsignification,
e d'efficacité
:
leconcept
opère
au-delà
delasignification
?Comment
faireque
le «Yforeruntrouaprèsl’autre
», dit-ilÿ.11
faudraitcasser
lacorrection
concept
travaille
dansunautre
régime
designes
?Comment
fabriquer du
style,lagrammaire
etsesconventions.Beckertsedemandetoujours
:
leconcept-événement
ou leconcept-performance
? Comment
faire «Comment
maldire?»Comment
rompre la surface
dulangage,
rompre
que
le concept
opère
sur
les corps?
C'estlaproblématique
qu'on
voir ses
conventions,
seshabitudes,
les clichés
du«bien-dire
»,dubien-
exposée
parDeleuzeetGuattaridansQu est-ce
quelaPhilosophie
. représenter.
Et encore,
comment
faire quelalittérature
rompe
avec
l'idée
d’unconcept
disant
l'événement,
et non
les états
dechoses,
ainsi certe
nécessité
d'expression
du«monde »oude«l'âme ».C'était
une
quel’insistance
sur
la dimensionaffective
du concept.D'unecertaine tache,
pourluiet pourtoute
lalittérature
desontemps
:«dire
pour
manière,ceproblème nousforceà considérerunenouvelleécriture soitmaldit»,commeonvoitdansCapaupire(traduction
française
philosophique.
QuestionqueDeleuze lui-même posait avecinsis- del'original
enanglais
Worstward
Ho):
tance
—depuis lapréface
deDifférence
etrépétition
: lanécessité
d'un
nouveau
style pourunenouvelle
philosophie.
Il fautremarquer que, Encore,Direencore.Soitditencore.
Tantmalquepisencore.Jusqu'à
plus
pourévoquerceprojet
philosophique,
Deleuzereprend uneexpression mèche encore.Soitditplusmècheencore.
dupoète,écrivain
etdramaturgeirlandais
Samuel Beckert :«levieux Direpoursoit dit.Maldit.Diredésormais
poursoitmaldit.[.].
style.
»L'expression
est, chezBeckert,
unesortederengaine, demotif L...]Tout
jadis. Jamaisriend'autre.
D'essayé.
Deraté. N'importe.Essayer
répété
parundecespersonnages.Winnie,lavieilledame,la reprend encore.
Raterencore.Ratermieux.[...].
plusieurs
foisaucours
de
la pièce
OhLes
beaux
jours
!,pour
suggérer
que
les«beaux
jours»,labelle
époque,
sontdéjàpassés!.
Deleuze
utilise Dans
leparcours
deBeckett,
Capaupireestune
intensification
vers
fréquemment
l'expression
beckettienne
danssonparcours,
lapremière
étant
peut-être
danslapréface
deDifférence
errépétition,
en1968.

qu'il
aappelé
une
« littérature
dunon-mot
».Son
projet
poétique
est
Deleuze
revientsur
l'expression
deBeckett,dansuneclasse
surke
ns ——————

Cinéma
en1984
—ildir:«C’est
levieux
style,
comme
dirait
Beckett.» 3.1d.,
L'Épuisé,
inSamuel
Beckett,
Quad
erautres
pièces
pour
latélévision,
Paris,
itionsde Minuit, 1992,p. 104-105.
Dans
cecontexte,
Deleuze
définir
le stylephilosophique
modeme 4.Lettre
envoyée
parBeckett
àsontraducteur
allemand
:«Lalertre
allemande
»,
- ———_——_—_ iane Beckett,
ObjerBecker,
Paris,
Éditions
duCentre
Pompidou/IMEC,
2007,
1.Samuel
Becket,
OhLes
beaux
jours!suivi
dePasmoi,Paris,
Éditions
deMinuit,
p.15.
1963/1974, 5.Ibid.

2.Gilles
Deleuze,
Cours
68du06/11/1984,
Université
Paris
8.1984. ns »P.7-8.
Samuel Beckett,
Capaupire,trad.
ÉdithFournier,
Paris,
Éditions
deMinuit,
284 AGENCER
LES MULTIPLICITÉS
AVECD'ELEUZE Poétiques
del'immanence
:Deleuse,
Bechere…
285

sir ines d'atteindre


uneécritureau-delàdesmots.Défire linachèvement
»En mêmetemps,
onrencontre
dans
lapoétique
qui
lelangage,
dissoudre
sontissu,
pourqu'onpuisseenfindireJesilence 5manifeste
entre
Deleuze
etBeckert,
unrenversement
del'idée
plus
l'inédit,
oulenonsense.
Untravailquiiradans
le sens d’une radicale fréquente
- puisque
nous,occidentaux,
sommes
dans
unetradition
raréfaction dulangage,jusqu'àlalimitedeladésarticulation
SYntactique mimétique
delapoétique
—d'une
déficience
dulangage
parrapport
a ànerienlaisser sinonlesquelette de mouvement desmots.Comme auxchoses.
On l'opportunitéderenverser
la pensée
générale,
plurôt
dicIsabelle Ost,«Capaupirea la particularité derassemblerenune pltonicienne,
selonlaquelle
lelangage
neserait
jamais
capable
debien
unique “équation”,commedir Beckett, les “éléments”
indispensables ésenter,
ou dereprésenter
suffisamment
leschoses.
Aucontraire,
etles“axiomes” de
l'écriture” ».Ainsi,ceteffortdelaisser
lelangage chez
Deleuze
etBecker,
il fautcomprendre
que
lareprésentation
est
faillir,iraradicalement,chezBecker,avecun travailsurlerythme et inévitable
eromniprésente.
Leproblème
seraitdonc plutôt
:comment
lasonorité desmots.Un usage « mineur» dela langue,
si onreprend s'en
sortir,
commentforerdestrousdans
l'extrême
habiletéreprésen-
laterminologiedeDeleuze etGuattari.En quoil'onsupposait un utive
desmots.
Aulieud'unedéficience
dans lesmots,
il yaurait
dans
traitement
rransgressif
delagrammaire etdelasyntaxiquenormatives, lesmots
poétiques
unexcès. Unephrase prolifère,
ellevatoujours
oùl’ordredelasignification
estprivilégié.
DansMilleplateaux,parti. au-delà
deschoses
qu'oncroyaitreprésenter
enelle.Ouencore,
pour
culièrement
dansle plateau
4,«Postulatsdela linguistique
»,
le style voirleschosesà l'inverse,
lareprésentation
esttoujoursuneréduc-
estdéfini
comme unevariation
continue,appliquéeàlalanguemajeure tion,une
limitationdespossibilités connectives.
Donc, leproblème
oudominante, ou«untraitement mineurdelalangue standard!». serait
plutôt
: «comment se sortirdeLareprésentation?
»,plutôtque:
Excette
variationestuneespèce
demodulation sonorequisoumettrait «comment l’accompliroularenforcer? »
lalangue,comme onlevoitexemplairement danslefluxdemots Entermes deleuziens,ondiraitquecescrous
danslesmots seraient
destextesbeckertiens,
toujoursplusintensedepuisl'expérience
de l'opportunité
degriffer
le langage superficiel
parlenonsense.
Trous
de
L'Innommable (1953). silence,
abimes dusignifié,points
aveuglesdans
lavisibilité
identifiable.
OnpeutvoirqueDeleuze estsensibleàceproblème beckertien
: Lestrous
entantquenonsense,
commeDeleuze
ledéfinit
dans
laLogique
« Beckett
a supportéde moinsen moinslesmots»,dir Deleuze”. dusens,
seraient
donccequipeutgarantir
lafabrication
même du
Becketta supportéde moinsen moins la résistance
delasurface sens,
entantqu'ilserait
toujoursàlafoissens
etnonsemse,
ensemble
et
desmots,leurextrême adhérence,
leur résistanceau nonsense
età dansunerelation
d'immanence. Les«abimesinsondables
desilence
»
l'échec
delasignification,
ladifficulté
d'y«forerdestrous
».Cha désirés
pourBeckett'?,
sontpourluiunesortededéfiqueselance
h
Beckett,
commedans
des
définitions
fréquentes
dustyle
présentes
dans lictérature.
Quelque chosequ'elle
devrait
apprendre,
avec lamusique.
l'œuvre
deDeleuze,
onrencontre
unrenversement
dusens
commun Parmi
lesstratégies
créées
parBeckert
pourtrouer
lalangue,
ÿchercher
selon
lequelle«bon»style
serait
celuidelacorrection
syntaxique
€ lesilence,
onpourrait
relever
larépétition
et l'interruption
provoquée
grammaticale.
Onlesait, pourDeleuze,
lesgrandsécrivains
sont
Œœux Par
l'insertion
d'unélément
dépourvu
designification
—comme
dans
quiont
réussiàfairebégayer
lalangue!°,ceuxquicreusent
doncune
limite
asyntactique,
anti-normative.
Lestyle,
chezlesdeuxécrivait ne

1.Jbid,p.11. g
estplusducôtédudétour, de
l'erreur, quedela «beauté»où 1:EtatdelLeteallemande»:
[Sinon td queee
lacorrection.
«Lalittérature
estplutôt
ducôtédel'informe,
08 cheminsdel'ancienne paresse
depuis
longtemps
délaissés ?
me Peinture?
Y a-1.ilquelque
nds le paralvsant
dansleexea
bee Ont,
Samuel
Becker
erGilles
Deleuee
:cartographie
de
dsPP 4MO,quinesetrouve
pasdans
leséléments
desautre
ar? Este
it Me
re,Bruxelles,
Facultés
universitaires
Saint-Louis,
2008,
p.19. FF Quiexplique
pourquoi
lamatérialité
rerriblement
een seb
8.Gilles
Deleuze
ecFélixGuattari,
Mille plateaux,
Paris,
Éditions
deci Go"NE
Peutpas
sedissou
dre,
comme parexemple
Lasurface
#0n06sat
1980,
p.132. Sési Pmphonie
deBeethoven
dévorée
pardes
immenses
pauses
sombres
de#0Ta
9.4,L'Épuisé,
op.
cit.
p.103. ; deP#Bs
entières
nous
nepouvons
percevoir
autre
chose
qu'un
YTBP Obja
Cri Conformément
auLe debégaiement,
travaillé
dansGillesDda®*"
*0n4
reliant
des
abimes
insondables
de
silence?
[...)
»(SamoelBC
Piquet
Clinique,
Paris,
Éditions
de
Minuit,1993. *OP
cit, p. 15.)
286 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECD'ELEUZE Poéiques
de
l'mmanenc
:Déeus
Beta 389

Lecasde«Pim»,dans
le romanComment
c'est(1961),
oude4bi intdecésure
dans
l'écrit, uncreux
quirompt
lesmots
etpro
danslebref
rexte
homonyme: ng» E abimede silenceou de suspension.
On Peutremarquer
queles
y régies
vontdans
le sensdedésarticuler
la syntaxe,
commLe
srratég Hi :
[..] Murmureà peinepresque jamaisuneseconde peut-être
uneie fvelyne
Grossman,
pourquil'écriture
beckettienne
serait
dans
rs
Têreboulebienhaute yeuxbleupâlepresque blancbingmurmure bj , mo uvement
continu
dedéfiguration
.
silence.
Bouchecomme cousue filblanc
invisible.Bingpeut-être
Une
nature Ontrouvera
chezDeleuze
desprocédés
littéraires
similaires
à
unesecondepresquejamais çademémoire presque jamais,
Murs
blanc quelquesprocédés
beckettiens.
Desprocédésquivont
danscesensde
chacunsatracefouillissignes
sanssensgrispâlepresque blanc,
Las casser
lalogique
discursive
oulecode,etde«traiter
l'écriture
comme
chaleur
coutsurtoutblancinvisiblesrencontresdesfaces.
BingMurmure un
flux, pascomme uncode!».L'usagedessauts,
descoupures
entre
peinepresque jamaisuneseconde
peut-être
unsensçademémoire
presque lesphrases,
peutêtreconsidéré
comme une
stratégie comparable
à
jamais
? [...). celle
deBeckett.Lastratégie
delarépétition
égalementet,avec
elle,
laconstitution
decyclesdedifférentes
étendues,
àpartirdemots
qui
Comme onvoitici, lemot«bing»s'insère
àplusieurs reprises fonctionnent
comme
despetitsrefrains.
Danslesdeux
auteurs,
ona
dans
le texte
(21fois)etintroduit
unrythme
irrégulier.Ils’agit
d’une unfonctionnement
oralcommeeffetdecemouvement
cyclique
du
interjection,
d’unmotsanssignificationprécise.En laissant
decôtéles texte
:letravail
aveclamémoirecourte
de laparole,
aulieu
delalongue
tentatives
d'interprétation
ducontenu
(lesspéculations
selonlesquells mémoire,arborescente,
del'écritetdesconcepts,
comme Deleuze
et
«bing
»serait
placé
aulieudeBion,lepsychanalyste
chezquiBeckerr Guattari
lesuggèrent
dansle plateau
« Rhizome!”
».Etontrouvera
aconsulté,
erc.),il s’agit
d’unmotquifonctionne réellement
comme aussi
chezDeleuze
(etavec
Guattari,
spécialement
dansMilleplateaux
unpointenblanc dans
le texte,untrou,quiinterrompr lacontinuité etL'Anti-Œdipe),
laprésence
du
discoursindirect
libre
comme stratégie
significative,
linéairedulangage. Cetexteestexemplairement
construit decroisement
desvoix—unautre pointdecontact
aveclesstratégies
parpermutation destermesquiserépètent selondifférentes
combi- beckettiennes
privilégiées.
naisons—procédé récurrent
danslesdernières œuvres beckettiennes. Chez
DeleuzeetGuattari,
lessauts
oupointsdecoupuresontprovo-
Ainsi,parexemple, larépétition delapaire: «bingsilence
»,«bing qués
plusfréquemment
parl'insertion
d’un
fragment
d’un
autre
auteur
murmure »,«pâlepresque blanc»,«têteboule»,ousimplement le dans
lefluxdutexte.
CelaestremarquéparFrançois
Zourabichvili
à
mot«blanc »,«presque »,etc.*. Cesrépétitions
secondaires
sont
une propos
de
l’écriture de L'Anti-Œdipequi,selonlui,dramatiserait
le
autre
couche derythme quiconstitue
le texte,surtour
si onconsidère processus
deproductiondudésir.
Zourabichvili
souligne
lacoupure
lerythme
comme
unhybrided'éléments,
résultant
d'unemodulation entre
lesfluxdesvoixdeDeleuze-Guattari
etceux
desautres
auteurs
entre
desimages
hétérogènes
:visualités,
sonorités,
tactilités,
métriques, - Beckett,
Proust,Butler,Kafka,Artaud,etc.- pourmontrer
àquel
respirations,
associations.
Lecouplage
dumot«bing »avec«silence» point
l'écrituremême
dulivreseconstruit
selon
le mouvement
flux/
» €t«murmure
renforce
lasensation
produite
par«bing
»comme un Coupure
deflux.Ainsi,L'Anti-Œdipe
nousmontrerait
qu'ilnesuffit
Pasdeparler
surlamachine
désirante,
il fautLefaire.
Etpour cela,
euzeetGuattari
ontcrééuneécricure-flux
continue,quicoupe
» 13.
pS
1972, amuelBeckett,
. 62.63, «Bing
ing »[1967],in
[1 i Tétes-mortes,
: js,Éditions
Paris, deMinuit, “arrache
avecelleplusieurs
types
deflux,
lelangage
comme
#7
fux
: l 14.E5ndépit
k delaproximité
avecdespropositions
ici istiques
artistiques des
années1950,
Soten
Parmi
d'autre
fluxdumonde.
Comme
l'a ditDeleuze
« Écrire,
c'est
Unfluxparmi
d’autres,
etquin'aaucun
privilège
parrapport
AUX
ap 7.enœuvre
etici lasingularité
dutravail
decombinatoire
unecombinatoire, chezBeckett.«Letravail
par la répétitiondesgroupes d_quiù
demots
Re
es
Me redans Maiscettecombinatoire
est
lesexpérimentations
de biendifférente
l'OuLiPo, decelles,
oude“Mille contemporain",
Milliards
de à ME ÉvelyneGrossman,
inuit,2004,p.71.
LaDéfiguration.
Artaud-Beckets-Michaux,
Paris,
Éditions
Queneau. »(Henri
l'intelligence Prade,
artificielle «Laquestiondelareprésentation
delalinrératuré
) Gilles
Deleuze,
Pourparlers,
Paris,
Éditions
deMinuit.
nie) 16
», Beckett],
2014.) éune
étude
deBing
î de
Samuel
S BeckerrRemuene
[DS
»,Remue.nel
7.GillesDeleuzeer FélixGuartari,Milleplateaux,
op.cit.p.24.
288 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE Poétiques
del'immanence
: DeluseBeck _

par
Ce autres!®.
»Lecexte
n'exprime
pasleréel,
mais
est
lui. même un il crée
lalangue laquelle; it. fragmen
A langue,
ouil crée
etClinique B°aider,
peutnous par c'est
laquelle
ilse
undes fair.
raresCe
fragments
à
réel.Ou, encore,uneécriture« à mêmele réel»,n
dans
unplantranscendant
parrapport
auxchoses,
-e SituantPa . peut
trouver
unesOrte
dedéfinition
deDeleuze
surlapoétique
Deleuze
etGuarrari!”. SORA
} insisteny
L'immanence,
donc—immanence corps-mots,
langage. GiLalangue
seconfond
avec
laparoke,
c'est
seulement
avec
uneparole
très
langage-pensée.
langue-parole,
et lesens
compris
comme in péciak.parolepoétique
quieffectue
routelaPuissance
debifurcarion
erà
n'estpasqu'une
chose àdécrire.L'immanence impliqueunemedD variation,
d'hétérogenèse
etdemodulation
propre
àlalangue,
cffecrive
desmodesd'écriture,diraitZourabichvili,Unebois
nv
proposeunsensau-delà
de
la signification,
ouau-delà dejann C'est
comme
si seprésentait
lanécessité
d'unnouveau
style
pour
tation,
comme chezDeleuze
dansLogique dusens,
il fautleGoir« chaque
nouvelle
pensée
—ouencore,
d'unenouvelle
langue
pour
lefaire
effectivement,
danslapratiquemême defabricationdusens chaquepensée nouvelle.Donc,pouropérer aveclesconcepts-perfor-
Exl'inspiration
musicale,
dansla compositionsérielledecelivre
mance, pour
les faireopérerdefait,il fautpeut-être
changer
leton,
n'estpasaléatoire
ou sansconséquence,
c'estDeleuzelui-même
qui wavailler
lesvélocités
desvoix,lespauses,lesmouvementsdesmots;
lerelève®.
C'estunequestion
surlaquelle FrançoisZourabich
vila c'est-à-dire,
prendreencomptela consistance duplandecomposition.
insisté,
dansplusieurs
essais
surLalittéralité
dansl'écrivure
deDeleuxe
: Jediraique,sansunvéritabletravailavecLacomposition
dulangage,
{...)l'immanence
n'est
pasquelque
chose
quipuisse
s'affirmer
sans
sefire avecsapuissance
affective,
saprésence (salecture
comme événement,
performance),
onrisque derester dans le«vieux
style
».Donc,pour
{ilserait
contradictoire
d'endonner
simplementunereprésentation,
dllequi ledireavec
Deleuze,onrisque derester aussi
dansl'ancienne
pensée.
bvertir
l'ordre
delareprésentation
pourluisubstituer
Laproduction)
[..]?.
Cependant,
c'estexactement cerisquequ'on prendchaque
fois
qu'on
recommence à parler,à écrire.
Il fautdoncl’affronter
toujours
de
Tout le problèmesembleétre: comment
faire l’immanence? nouveau.
Oucomment faire
quelelangage
opère
souslemodedel’immanence?
Lelangagen'est
pasunemétaphoredumonde. C'estlaproposition
quirapproche
la philosophie
deDeleuze
etunecertaine
conception
de
lapoétique
danslaquelle
unepensée
sefaitaumoment même oùdle
crée
ses
proprespossibilités
d'expression.
Unepoétique
de l'immanence
implique
l'idée
d'unepensée-écriture
oud'unpland'écrirure-pensée.
: Planauto-poiétique,
doncil sefaitenmêmetemps qu'ilcrée
sa

18.GillesDdeuze,
Pourparlers,
op.cit.,p. 17. ,
19.
Gilles
Ddeuze
erFélix
Guartari,
L'Anti-Œdipe,
Paris,
Éditions
deMinuit.
1972,
p.47.Certe
expression
sera reprise
aumoinsdeux
foisdans
Mileplates
:
*Unagencement
d'énonciation
neparle
pas“des”
choses,
maisparle
àmémeles
étas
dechoses
oulesétats
decontenu
»(p.110);«Alorsl'écrirure
fonctionne
àmême
k
réel,
tout
comme
leréel
écrit
matériellement
»(p.177).
20.Dans
l'entretien
«L'Abécédaire
deGilles
Deleuze
»,àlalertre
«SdeSyk”
Gilles
Delewxe,
L'Abécédaire
deGilles
Deleuze
(vidéo),
direction
:Pierre-André
Bounré
Paris,
Montparnasse,
1996. g
21:
François
Zourabichvi,
«L'Écriure
liérale
de
£'Anri-Œdipe»
inN-CONS
——_ J-Ch.Goddard
(dir.),
Ateliers
sur
L'Anti-Œdipe,
Milan/Genève,
Mimesis/
Presses,
2008,
p. 247. 2. Gilles
Deleuze,
Critique
erClinique,
7
Paris,
Éditions
je ©
deMinuit,
1993,
137.
p.136-
XXIV

L'effetGuattari

ANDREWGOFFEY

AprèslapublicationdeL'Anti-Œdipe,
Guattari
aétémarginalisé,
sacontribution
autravailcollectif
qu’ilavait
entrepris
avec
Deleuze
éeaudeuxième
rang.
«Mister Anti»,comme quelques-uns
l'avaient
à nommél'époque,était traitéplutôtcomme untrouble-fête,
unirres-
ponsable,
voireun criminel.Et cequiest sansdoutepire,onlevoyait
aussi
comme quelqu'unquiaurait
séduitetégaréDeleuze,quiaurait
pudevenir
untrèsgrandphilosophe siseulement
il s'était
confiné à
destravaux
plusoumoinsproches de
l'HistoiredelaPhilosophie.
Cesopinions-là
continuentd'exercer
uneinfluencesournoisesurla
lecture
dutravaildeDeleuzeetGuattari,même aujourd'hui.
Il est
pourlemoinssurprenant
qu’onpuisseécrire
deslivres
surDeleuze er
lapsychanalyse,
parexemple,
enignorantàpeuprès toutdutravail
de
Guattari,
C’estcommesi cesgens-là
voulaient
ignorerjusqu'aux dires
deDeleuze
lui-même,
selon
qui
il n'aurait
jamais
pufaire
cela
tout
seul,
oucommes'ilsnesavaient
pastropquoi
fairedufaitqueGuartari
avait
nonseulement
travaillépresque
toute
savieàLaBorde,
mais
enmême
temps
qu’ilcontinuait
àpratiquer
comme
analyste.
À mon
avis,
onne
peutpascomprendre
lesmutations
assez
considérables
de
style,
deton,d'adresse,
en brefdel’énonciationchezDeleuze
suite
à
&irencontre
avecGuattari,si l’onn’essaie
pasdeserendre
compte
de
&enquoiGuattari
acontribué
àleurtravail
commun. ;
sQuelques-unes
descommunications
àcecolloque
nous
ontdéjà
faitremarquer
comment
le problèmede
l’image de
la pensée
chez
Deleuze
avaitchangé
depuis
L'Anti-Œdipe,
cequiestdéjà
unefaçon
deSignaler
l'importancedel’effer-Guattari.
Je croisqu'ilfauteye
deconsidérer
le planpropredela penséedeGuarrari,oudune
€faire
percevoir,
Cequiveut
dire, dumoins
pournous
PES
ue nousdevons
admettre
queGuattariasuproblématiser
lapes
soncôté.
Celaveutdireaussi
quenous
devons
prendre
ausérieux
292 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE
LeftGuattari
293

lecadre
institutionnel
desontravail.
Laquestion
«comment
Gun . Ilyaunemanière
deseis is l'institution
chez
Guatari,
que
a-t-ilsuproblématiser
la pensée
? »exigede nousuneréponse
l'onnedoitpaspe vue.
2 cetégard,
ilesttrès
important
de
concrète.Etsijepuismeservird'uneformuledeleuzienne,
touten|, noterquel'institution,
l institutionnalisation,
formeunepartie
deson
modifiant unpeu(c'estuneformulequi setrouvedans
son Fouce gravail
qu'iln’ajamaisreniée, transparaissant
même dans
ses
écritsles
_ selon
laquelle
«Problématiser
lapensée,
c'est
expérimenter!
»,
je dirais lusspéculatifs.
L'institution importe
même —etsurtoutquandil
qu’ondoitpartirdla
comprendre
comment
e pratique
de | expérimentation
il asuproblématiser
lapensée.
chezGuattari
C'estautour
pee
de
s'inréresse
defaçon
Usubjectivité
plusévidente
àcequ'il
appelle
»,àl’artetaumilitantisme.
la«production
Àcetégard,
je fais
de
mention
ceproblème
quej'aiordonnéunpeumesidées.Laquestionesricide d'une interview quiétaitapparue pourlapremièrefoisdanslelivre
comprendrecequeveutdire«expérimenter»chezGuattari —question jauedel'institutionnel
et politique
en1985,ouil dit:«L'individu
àlaquelle
jetentederépondreà partirdequatrethèmes
: l'institution, n'est
au
fond que l'intersection
descomposantesinstitutionnelles.
Même
latransversalité,
lepouvoirpsychanalytique,
etlesthéories,
1]sera sesrêvessontinstitutionnels,branchéssurdesfilms,desséquences
toujours
question
dansceschampsdeceque
fait Guattari. élévisuelles
; toutcela,c'estdel’institution?.
»Unautre textetrès
intéressant
à cetégard,
c’est la deuxième
partiedu
livre DeLéros à
I. LESINSTITUTIONS LaBorde,ou
il s'intéresse,
parmid’autres
choses,à laquestion
dela
formation
dessoignants
etoùil parle
dudésintéressement
des
psycha-
ChezDeleuze,
l'institution
occupeuneplaceimportantenon
seule. nalystes
envers
cequisepasse
dans
lesinstitutions
desoins.
Cequ’il
mentpar
rapportà Hume,à Sacher-Masoch età Sade,etc.,mais
aussi
fautremarquer
surtoutdanscetexte,c’estqueGuattari
parledesa
danssamanière defairedelaphilosophie. Pourtant
cet aspect
de «fidélité
»àl'expérience
institutionnelle
àLaBorde,unefidélité
qu’il
l'institution
n'est
pastoujours
très évident chezlui.Maisonn'aqu'à qualifie
précisément
à partirdecequ’ilappelle
lesquatre
«impéra-
liresesPourparlers
avec
ClaireParnet,oùil estquestion
desnouveaux dfs»quisontaucœur
deson
livre LesCartographie
schizonalytiques.
philosophes,
dumarketing,del’histoire
delaphilosophieparrapport Nécessitation,
hétérogenèse,singularisation,
irréversibilisation
:voilà
àl'imagedelapensée,
pours'apercevoir
assezrapidement queDeleure cequiimporte
pourêtre fidèleàunetelleexpérience.
savait
bienjeter
unœilsurcequise passaitdans
les établissements
dits
philosophiques.
Et ondoitnoterquesafaçond’agencer
uneécriture [Cesimpératifs
schizoanalytiques
seraient
toutautant
applicables
auchamp
àdeux avec
ClaireParnet
asespropres
accents
institutionnels,
quand
delapédagogie,
del'écologie,
del’art, etc.C’estquelaracine
éthico-politique
ils'agit
des'expliquer.
Onpourrait
comprendrel’imagedelapensée del'analyse,
conçue
ici, jelerépète,
commeproduction
de subjectivité,
entre
quis'appelle
«philosophie
» précisément
parrapportà ladistinction ensymétrie
d'échelle
—pourreprendre
uneexpression
desmathématiques
queValentin
Skaepelynck
a faiteentrel'institution
etl'établissement, fractales
—avec
tous
lesautres
registres
deproduction
desubjectivité.
Sans
aucun
risquedefausser
cequeditDeleuze?.
Etpour
enfoncer
un
peuleclou,onnepeutpasoublierletexte
écritparDeleuze
autout
LepetitpontqueGuattari
aconstruit
danscetexte
entre
laquestion
début
deses
Pourparlers,
oùilestbien
question
d'entrer
encombat
avec delaformationetLesCartographies
schizoanalytiques
importe,
caril
les
puissances
(les
médias,
lascience,
l'opinion
et ainsi
desuite),
texte Sert
àsouligner
uneremarque
deJean-Claude
Polack
dans
son
essai
quitémoigne
defaçonassezbelled’unefortechargeinstitutionnelle surGuattari : « L'analyse entre psycho- ecschizo.»SelonPolack,
dans
laphilosophie
pourDeleuze. #sexpériences
àLaBorde
avaient
toujours
étéaucœur
du travail
de
Mattari
—y comprislesécritsphilosophiques.
Il nesertà riendelire

On 1.Formule
phélphie? Auqu’on
trouve
danssonFoucauls, quedansQuest-ce
demême quels Guattari
dansl'abstrait,
comme
sl’on
i pouvait
comprendre
samanière
nes

2.Communication
faire
àcecolloque.
C’est
unedistinction
faite
également
P# 2013,
3.Rou ris dans
Félix
ï Guartari,
Qu'est-ce
, quel'écosop:
, hie?, Paris, Lignes/IMEC,

ie Oury.
Voir
Jean
Oury,
Onse
heures
dusoir
àLaBorde,
Pas
4:Félix
Guattari,
DeLéros
àLaBorde,
Paris,
Lignes/IMEC,
2012,
p.82.
294 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE
L'effet Guattari 295

expérimentaledepensersansla rattacherà cettedimens


iontout à sinimpossible.
Or,réaludelus CE
quiimporte
ici,c'est
que
faicpratique
del'institutionetde l'institutionnalisation
lu Félixne bsransversalité
aitun
rapportavec
ceque
dautres
avaient
nommé
le
cesse
alors
desingulariser
sarecherche,
auplusprès
deson
exre ransfert
institutionnel
»eton Guartari
s’eflorçait
derendre
compte
quotidienne”.
»Cen'estpassimplement
unequestion
decom
_ ens'appuyant
sur Winnicort Ce estqu'ily avaitautre
chose,
qu'on
commes’ils'agissait seulement de bien situersesécrits.Quai ,
n'arrivait
pasàanses ue F :ravailthérapeutique
avecdespatients
l'insticution
et l'instiutionneldecontextedesonécriture alorsN hospitalisés,
cequilaissait
deviner
unedimension
d'inconscient
de
s'agit
delamatière
pragmatique
desontravail,
réintroduirait
enAc
l'institution,
débordant
l'inconscientindividuel,«Unefoisfranchi
le
main
undualisme
entrethéorie
etpratique
queGuattari
àtour
far d'affirmer
qu'ilexisteun “objetinstitutionnel”
spécifique
ànotre
pouréviter.
Ou bien,il s'agirait
deretenir
touteuneproblématique recherche,
unprécipice
théorique
nousattend
:lasaisie
decerobjet
herméneutique
qui,elle,aurait
biensûr
ses propres
difficultés,
S;l'on augréd’une
“subjectivité
degroupe”.
»[lfaut
icique
nous
nous
veutconstruire
le plandelapensée proprementguattarienne,me rappelions
qu'il étaitquestiondesétablissements

il s'agissait
de
semble
qu'ondoitconsidérer
quel'institution, l'institutionnalisation soigner
despsychotiques,etqu'ainsi,
latransversalité
répondait
bien
entrentdanssesconceptsmêmes,
avec lasignification
processuall àladifficulté
qu'ily avaitdesoigner
les psychotiques
dans
le cadre
qu'illeuradonnés.On peutavoiruneidéedecequecelapourrair érroit
del'analysestandard.
Il y vadetouteunehistoire
despsychoses
à vouloir
dire sinousprenons
unexemple,celuidla
e «transversaliré parrapport
la psychanalyse,
dumanque d'attirance
deFreud
(er
deLacan,
àcequ'ilmesemble)
pour
les psychotiques.
D'unpoint
II. LA TRANSVERSALITÉ devueclinique,cequi importesurtoutc'estque
la transversalité
conteste
lebien-fondé dutransfert
proprement
dit. C'est
l'institution
Valentin
Skaepelynck
nousa faitremarquer
queleconcept
que lui-même,
et l'insticutionnalisation
commeprocessus,quiengendrent
développe
Guattariseréfèreauxidéesde Sartre,etcomporte
une des«greffesdetransfert »,donnant uneprise
surcequiarrive aux
distinction
tout
à faitimportante,
maisaussi
toutàfaitrelative,
entre patients
hospitalisés. Certeidéede«greffesdetransfert»faitdire
groupes-sujets
etgroupes-assujettis,
etdoncquelatransversalité
est àGuartariquel'institution, c'estcomme une«pâte àmodeler® ».
une
idée quia uneimportance
surtoutpolitique.Je suistoutàfait C'est
uneidéequ'iltrouve chezGisela
Pankow quis'enservaitelle-
d'accord.
Mais
la transversalité
aaussidesaspects
cliniques.
Sil'on même pourdécrire l'effet
quepouvaitavoir
ladite
pâtedans lesmains
veutbienapprécier
lebouleversement
qu'avait
accompliGuartaripar d'unpsychotique : c'est-à-dire
quelàoùlalangue nedonne aucune
rapport
àl'institution
etnotrecompréhension
decequec'estqu'une prise,
d'autres matières d'expression
pourraient
endonner. Nousvoilà
institution,
nousdevonsnoter
quelatransversalité
arecadré
deséléments donc
aubord
du«précipice
théorique
».
essentiels
de
la théorie
etdelapratique
de
l'analyse.
Émergeant
dans
lecadre
desdébats
danslesmilieux
depsychothérapie
institutionnelle, III. LE POUVOIR
latransversalité
aproposéuneréponse
àlaquestion
desrapports
entre
lapsychanalyse
etlapsychiatrie,
àlaquestion
decequepourraient Alors,
revenons
àcette
question
dusortqu'a
faitlatransversalité
au
à avoir
pour
valeurlesconcepts
et lescechniques
psychanalytiques
dans transfert
«proprement
dit ».Valentin
nousdit quelegroupe-sujet
unhôpital,
oùilétait
surtout
question
desgens
qui
étaient
«unpeu contestait
le bien-fondé
desrapports
hiérarchiques
dans l'établissement,
fous».Il yavait
àl'époque
denombreuses
tentatives
derhéoriser
œ
Ycompris
lerapport
hiérarchique
entre
médecin
et patient,
etceci
parce
qu'était
uneinstitution d’unpointdevuepsychanalytique.
Guaran,
Pour
sa part,nevoulaitpasque
l'on considèrel'institution
comme me

une
structure
—cela
revenait
àlaréifier,
etrendair
toute
praxis
en599 6.Félix
Guattari,
Pychanabye
ettransversalité
[1972],
Paris,
LaDécouverte,
2003,
p.87.
——_————n s Ibid, P. 88.

8.Guattarireprendl'expression
un peupartout.
Voir,parexemple,
FélixGusrari.
n°# orage_ Polack,
«L'analyse
entre
psycho
etschizo
»,Mulinads
va3 ose,
Paris,
Galilée,
1992,
p.98,
p.119
ctDe
Léres
àLaBorde,
op.
GtP-66.
296 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE L'effet
Guattari
297

uec'était
unequestion
derapportssociauxqui passaient
Àtraverse
nsLadivision
detravail,
etc.—doitêtreremis
enchantier.
Tdi
« ni ditclinique.
Donc,
ce quiimporteaussi,c'estque
la transverahg uel'analyse
pourraitconsidérer
commestable»ne
l'est plus,etce
déplace
d’une
façon
très intéressante
le ressort
traditionnel
d
UPouvoir si arrive
dans
l'analysen'aura
plusdevérité
que
relative
—relative
à
analytique.
À ladifférence
dudiagnostic,
traiterles çout
unensemble
derapportssociaux,
àtouteunesérie
decaractéris-
semble
un problème
difficile.Comme
l'a remarqué
Jean-Claude quesmatérielles
etrelationnelles.
Dèslors,
surleplan
del'institution,
Polack,
niFreud
ni Lacan
nesemblaient
vouloirs'enPréoccuper,
«x l'expertise,
lessavoirsprofessionnels
nevontplusdesoi.C'esttrès
nesemblaient
questionner
lasituationdebasedel'analyse
àcerper important
pourcomprendre I effetGuattari
:lestatut
dupatientet
Comme Deleuze
etGuattari
nous
le disent
dansL Anti-Œdipe,
Freud lesrapports
entreraisonet folieontchangé. Cequesontlaraison
er
semblait
nepasaimer
les schizophrènes.
Cen’est
pasunePlaisanterie lapensée,
vuesdepuis
l'institution,diffèrevraiment.
c'est
unequestion
des«présupposés»théoriquesetPratiques
del
nalyse.
Biensûr,dansunérablissement
desoins,les dynamiques 1.THÉORISER
AVEC
LES ARTIFICES
DULANGAGE
transférentielles
sontd'unecomplexité
énorme,maislaquestion
àune
portée
plusgrande.
C'est
quelasituation
debase
enpsychanalyse,
etce Danslesannées1960,la façonguartarienne decomprendrela
queprésuppose
letransfert,
c'est une
situation énonciative
quitrouve rransversalité
mettaitencauselasituationénonciative
dudialogue.
son
ressortdans
quelques-unes
descaractéristiques
delalangue
parlée, Bien
qu'ilcritiqueunpeulastructure,
sesécrits
sont
toujoursmarqués
ChezGuartari,
danslesannées
1960,
c'est unproblème
qu'ilqualifiait parsonrapport
avecLacan.
Or cequiesttrèsintéressant,
c'est
qu'il
d'«individualismeméthodologique ».Et mêmes’il necritiquait
pas commence,mêmedanscesannées-là, àélaborer
touteuneconception
vraimentLacan àcette
époque-là, onpeutbienremarquer quecequi delapratiquethéoriquequi le mènetout
droit verslasortiedela
estmisencause, c'est
unaspect crucial
dulangage. langue
dont
il parledanslesannées1970,
surtoutdansL'/nconscient
Onnedoitpaspenser quelatransversalité
soitcomme unpréalable machinique.
Quantàsonrapport avecLacan,
même quand ilparle
du
auvraitraitement,
comme siles «greffes
detransfert
Ȏtaient
dessoins signifiant
dans
les écrits
desannées
1960,
c’est
toujours
avecdes accents
supplémentaires,
commesi cequisepassaitdans
la cuisineàLaBorde sartriens.
L'action
dusignifiant
estcomprise
comme néantisation,
par
était
tout
à faitsecondaire
parrapportauvraitravaildesoin.
Celanous exemple.
C'esttoujoursdanscestermes-là
qu'ilqualifie
lesignifiant
ferait
manquerle plansurlequel les rapportstransversalisants
font dans
LaRévolution
moléculaire,
exjusquedanslesCartographies,
oùil
leurtravail.D'ailleurs,commeont su le montrerIsabelle
Stengers tient
toujours
àparler
delapraxis.
PourGuattari,
lathéorie
c'est
déjà
etLéonChertok,
le transfert
proprement
dit [cequisepasse
dans delapratique.
C'est
cela
quiestmisnettement
enrelief
dans
son
texte
lebureau
del'analyste],
c'est
cequidonne
une
alluredescientificité «D'unsigneà l’autre»,où
il parledel’énonciation
collective
dela
autravail
del'analyse,
aurapport
que
l’analyste
sait créer
avec
son physique
théorique,
desaqualité
demachine
sémiotique
gigantesque,
analysant,
C'est
letransfert
qui
faitqu'ilsoitpossible
deprétendre
que etdesacapacité
d'interpréter
toutesles«manifestations
théorique
cequ'onfait,c’estuneanalyse
de l'inconscientindividuel,
qu'ilyva ment
aberrantes
»desparticules
élémentaires.
Il commence
déjà
à
d'une
vérité,etnonpasuntravail qui
fabriquedessouvenirs’.Orc comprendre
lesmontages
théoriques
etleurs
particules
élémentaires
quimesemble important
chezGuatrari, c’estquelatransversalité àpartir
d’unrapport
avecledésir
:
relativise
l'importance
decequise passedansla situation
detransfer
Proprement
dite. Auniveaudel'institution,
il y acouteunesérie
de quoique
sur
unmode
différent
del'objet
dudésir
humain,
défini
commedésir
facteurs
actuels
quichangent
la donneentièrement, quifontque
FE del'autre,
les objets
delaphysique
théorique
n'en
sont
pas
— +
cequelapsychanalyse
tenaitcomme allantdesoi—rapportstructuré régis
paruprincipe
n d'altérité
leur
interdisant
toute
possibilité
desentrecroiser
aulangage,
architecture,
situation
parrapport
auxautres
gens,
POsIt19" Sureux-mêmes
sans
faireéclater
leurpropre
identité".
en - RE

ir Léon
Chertok
etIsabelle
Stengers,
LeCœur
et Laraison.
L'hypnose
enques" »

10.«D'un
signe àl'autre
»in
, FélixGuartari,
Pychanabyse
eff
ité,

;
voisier
à Lacan,Paris,Payot,1989,p. 266. P: cit.,p.144.
298 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE L'effet
Guattari
299

rapportdirect, mais un rapport mettanten jeul'ensemble


d'un i
Mémeavantqu'il n'aitécritce texte,dansuneautreétude

héorico-expérimental"?.
letransfert
quidatede 1964,
il voue Freudct l'usage
qu'ilfair
desmythesparrapport
auxérymologies
archaïsantes
deHeid ex,
Cequil'intéresse
chezFreud,Free efficace
tientdelalettre Cequim'intéresse
danscette
lecture
hjelmslevienne
dessciences,
lacanienne
danstouteson«artificialitéPet ces l'artificialiré
qui c'est
saqualitéexpérimentale.
Il y vad uneapproche
qui
peuttoujours
importe,
etnonpaslecôté« réductions
mythico-linguistiques
, ourner
maletqui,comme
dans
les sciences,
peut
trèsbien
nepas
verslesquelles
unelectureheideggérienne
del'analyse
Pourrait marcher.
Doncc'estlateneur
hautement
pragmatique,
c'est-à-dire
la
mener!!,
Guatrari
était
déjàentrain
de sortir,nonseulement
des façon
defaireque
les conceptsetde
l'écriture soientà même
leréel,
présupposés
épistémologiques
qui s’attachaient
à lacompréhen. quiimporte.
Et si çatournemal,eh bien,
il fautfabriquer
autrechose.
sionstructuraliste
dulangage,
maisaussid’unelecturede
l'incons. Guattari
se servaitde Hjelmslev,depuissontravailsurL'Anti-Œdipe,
cientindexée
surlepassé,
etceladufaitqu'ilcomprenaitl'activité pourmeneràbienune critique duformalisme logico-mathématique
de
théorique
commeunagencement théorico-expérimental,
à partir
de Lacan.
Onabeaucoup
disserté
surceque
disentDeleuze
erGuattari
lascience.
Cerrecompréhension-là
semarqueencoreplusnettement àpropos du signifiant,
et sur
leur critiquedustructuralisme.Maisil
dans
lesÉcrits
pourL'Anti-Œdipe,
oùil ditparexemple
: «leréa, esttoutaussi
intéressant
de lirecequeGuartariessaie defaire,d’une
cen’estpasl'impossible
(commelesoutientLacan),maisl'artificiel, autrefaçon.Lessignes-particules,
cesontdesentités quis'échappent
C'est
l'artifice
quiprime
partout
danscesécrits?etil témoigne
d'une descoordonnées d'espace-temps,
quis’échappentdecequ'onpourrait
compréhensiondu réel,nonpascommenégativitéparrapport
aux appelerlescoordonnéesordinairesdel'expérience compriseenun
structures
venantd'uneépistémologie
formalisatrice,
maiscomme sensphénoménologique. Donc, on pourraittrèsfacilementlirece
cequ’on
arriveàagencer dansdesmontages expérimentaux
deplus queGuattariessaiede faireà partirde Hjelmslev,surlabased’une
enplusartificiels.
Guattariserapproche
ici dutournant« pratique» pratique
théorico-expérimentale,
comme unecritique
assez
forte
de
desétudes
dela scienceetdelatechnologie,
même si sacompréhen- laPhénoménologie.Or celle-ci
aeuunrôleimportant enpsychiatrie,
sionde
la théorievadansunsensdifférent,etnecomporte aucune parrapport àlacompréhension despsychoses,etil mesemble que
apodicticiré.
Cettecompréhension nettementexpérimentaleest sinousvoulonscomprendre unpeumieux l’efficacedutravail
de
encoreplusmarquée danslesannées1970,etil estimportant
de Guattarietl'importance
del'institution,
il fautmettre sonrapport
noter
les liens
fortsentre
l'usage
quefaitGuattari
deHjelmslev,
et aveclaPhénoménologie enévidence. Il mesemble qu’onpeut
lire
certe
lecture
expérimentale
delathéoriescientifique.
Parexemple, lacritique
quefaitGuattaridelasituation énonciativeduellede
dansLaRévolution
moléculaire,
c'estparrapportauxsciences
que lapsychanalyse,
enmêmetempscomme une
critiqueindirecte des
Guattari
parledessémiotiques
asignifiantesmettantenjeu des coordonnées
spatio-temporelles
mises
envaleur
parlaphénoméno-
systèmes
designes-particules.
Comme il ledit logie.
Maisc'estune
critique quin’en
restepaslà.C’est
une
critique
quineprend
sonsens
queparrapport
àunepratique
expérimentale,
l'opposition
entre
lesigne
et leréférent,
parexemple
danslaphysique
chéorique, tentant
denousmenerà desintuitions
quisortent
descoordonnées
semble
perdre
uncertain
degré
depertinence
[.…].Cerypedesémiotique
met reterritorialisantes
de
la langue
dite naturelle*.
C'est
peut-être
àcause
à enjeucequenousappelons
dessignes-particules,
c'est-à-dire
desentités
qui decela,
autantqu’àcausedesavaleur
critique
l'égard
dusignifiant,
sontpassées
endeçàdes
coordonnées
detemps,
d'espace,
etd'existence.
Ent me

lesigne
etleréférent,
unnouveautype
derapports
s'est
établi,
non plus
u ëer Félix
Guattari,
LaRévolution
moléculaire
11977,
1980),
Paris,
Les
De
7 2012,
p.412.
Remarquons que
Guartari
tient
toujours
àsouligner
+
raies
nr en sémiotique
qu'ilpuise
chez
Hjelmslev
aideàpenser
kes
«sémiotiq
ee:Sa es»(ibid.,p. 450). D 4 . k né
li. FélixGuattari,
Pychanalyse
ertransversalité,
op.cie.
p. 55. de Éd
le oitàClaude
Imbert
toutuntravail
quimer
enévidence
rapport
12Voir,Parmi
plusieurs
exemples,
«Signe
depuissance
»,Félix
Guartari,
18 <ompréhension
«naturalisante
»delalangue
etlaphénoménologie.
VoirClaude
Pour
L'Anti-Œdipe,
Paris,
Lignes/IMEC,
2012,
p.323,
326,
327,
330. »Phénoménologies
etlangues
formulaires,
Paris,
PUF,1992.
300 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

queDeleuze
etGuattaripeuvent
faire l'élogedeHjelmsley
dns XXV
L'Anti-Œdipe
—laseulelinguistique
à la hauteurdel'axiomatisaron
capitaliste.
Cen'est
qu’àpartirdecegenre
detravail
“artificialisanr
ù
l'agencement
d’uneénonciationthéorique
susceptible
detravailler
de
façontransversalisante,
et detravailler
avectoussesTOUAGES
—ce que Deleuze
:levrai-fuyant,
lapoésie,
lesGrecs
Guartari
appelle
sa«baroquisation
»—quenousarriverons
à Penser}
mêmeleréeldel'expérience
institutionnelle.

V. PENSERAVEC, NI DEVANT NI SUR ARNAUDVILLANI

J'ai essayé
demettreen valeur ici la qualitéà la foisthéorique
etpratiquedu travailde Guattari.Penserà partirdel'institution, Mon
intervention sesituedansunerecherche
d'histoire
dela
ettoujoursenrapportà l'institution,lui a valude mettreenavant philosophie.
Elledésiredérerminerledéplacement
quelapensée
touteunepraxisexpérimentale qui, à un niveautrèsconcret,
lutte deleuzienne
y opère.Il faudra
évaluer
avec
lemême
souci
la rupture
contre
uneimage
delapensée
faisant,
à lamanière
dustructuralisme forteentrepenséeprésocratique
et traditionplatonicienne,
cequi
etdelaphénoménologie,desdistinctionsnettesentreraison etfolie, permettra
d'apprécier
la rupture
dontpeutseprévaloir
l'initiative
théorie
etpratique
et,
discursif
er lediscursif.Il arriveparfois
àDeleuze deleuzienne
elle-même.
de dire qu'il pensedevant: devant les rats qui meurent,devantles
analphabètes,
etc.Pourmapartetpourcompliquer unpeuleschoses, I. LE VRAI-FUYANT
jedirais
quecequ'ilarriveà Guattari
defaire,c’estdepenser
avecles
fous,
de savoirfairemonter desagencementscollectifs
quimettent
en Danscecorpus,un point reste étrange
: ladiscrétionsurune
causeceque
c'estqued’être expert,
et decréer
la possibilité
defabri- téléologie
coextensive
à lasphèrede
l’homme.Pourtant, quel
plusbel
a querdesrapportstrèsdifférents
decequ’onl'habitudedenommer exemple
defaux-mouvement? Leté/os
opère
parmouvement rétrograde
«expérience
». duvraieassimilation
t desétapesàladernière,réputéetriomphale.
Touty estredondance, répétition
delafin.Faceà cette répétition
quin'avancepas,toutensedisant
« progrès»,lafuiteestmanièrede
S'égayer
sansautrebutquedesauver sapeau(*nem -1).Lafuite,
parce
qu'elle
n’apasété«arrêtée »,programmée,
est comme unecontraction
involontaire
et créatrice: «C’esttoujourssurune
ligne defuiteque
l'oncrée,
parcequ'ony traceduréel!.»Telleestlavérité delafuite
4usens existentiel
devrai-fuyant.
secondsens
estle néologismeobtenueninversant l'expression
*faux-fuyanc
», désignant lemontage d'indices
quilaissent croire
Que ladirectiondelafuiteestautreque
celle quiaétéempruntée.
ux-fuyantestfaçondebiaiser,d'emprunter unetransversale.
Propredufaux-fuyant
est derecouvrir
uneopération parunécran
fumée.Or,outrequela notionclassique
devéritéfairl'objetd’une
meme

P.a 1gues
avecClaireParnet[notédésormais
DCP\,
Paris,Flammarion,
1977,
Deleuze
: levrai-fuyans,
Lapolie,lesGrec Fa
302 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

etsoitpourtant
bienfermée
sursoicomme
unœuf,» :
forte
critique
delapart
deDeleuze,
n'a-t-on
pas,
dans
lefaux-f,
unevalorisation
delatransversale
?Etla fuite,undesappuisde dadeux fuites,passive
et active”.
Lafuiteactive
témoigneFa ps
meavecellecedehors,même s’il peut
avoirl'allure
duchaos,
philosophie
avec
lachute,
n'est-ce
pasbiaiser,
«prendrelans
Admetrons queDeleuzesoitbienlechantredu«vrai-fuyant
» etle
Alorslenéologisme
romberait
àplat,faisant
même contresens,
sas
maitre
delalignedefuite,l'ouverture
àfond que demandait
Hôlderlin
Deleuze
neseprivepasd'utiliserlanotiondefaux-mouvement
en
arribuant
un sens
négatif.
Ainsi,«Hegelfaitunfauxthéâtre,
una. lavraie
sensibilité
auchaosartiste.Maisalors,
deuxénigmes.
Pourquoi
ien'yobtient-elle
paslestatutdelalittérature,
ducinéma,dela
drame,
un fauxmouvement”». L'affairedevientambiguë
dèslorsFe
msiiaue?Et pourquoilesGrecsd'avant Socratesont-ils
simaltraités
danslecinéma,
ondistingue
entreimage-mouvement et image-temps
L'opposition
dunouveau
réalisme
àl'image
mouvement
etsonappareil dans
certe
œuvre?
Car,pourtant,
l'une
erlesautres
représentent
des
beaux
exemples
derésistance
etdenouveauté,
sefaisant
letype
même
sensori-moteur
modifielavisiondu faux-mouvement.«L'image.
d'un
«dehors
».À ceteffet,
il conviendra
d'entrer
dans
une
théorie
du
commande aufaux-mouvement*. »Impossible
denepas tenir compte
ecombet>:À noterquenousobtenonsavec
le«vraifuyant,
la poésie,
icila«puissance
dufaux*».Et Deleuze envientà fairedufaux-fuyant
lesGrecs,lecombat»,unesériehétérogène
qui
écartèle
d'autanc
les
deBergalaunecatégorie positive,comparable
audysnarratif®,Même
silefaussaire
n’apaslapuissance
demétamorphose,
la puissance
du différences
quecelaluipermet
d'entireruneextrême
proximité.
fauxestvérité
delacréation‘.
Serions-nous
malengagés
avec
certe
idéede«vrai-fuyant»? IL.LA POÉSIE,LESGRECS
Il fautdoncexaminer
un troisième
sensde
l'expression,où«vrai»
serait
lesubstantif,
et«fuyant »l'adjectif.
Contretouslesmensonges Aprèsl'énigme d'unvraiqui
se transforme
en faux
etd’unfauxqui
qui
nousfontcroire que
le réeldoiveêtreplanifié,
levraifuyant
estla devient
vrai,voiciunenouvelle anomalie
surlaligneanguleuse
que
révélation
d’unevérité
glissante,
métastableetinstable,
sorte
detapis trace
Deleuze.Il s’agit
du«poétique».Etbiensûrdes
poètes
sont
cités,
roulantqui,dèsqu'ony aposélepied,vousarrache àgrande vitesse parfois
analysés : GherasimLuca,Ginsbergpourlepoème Kaddish,
versdescabrioles
insensées.
Alorslevrai-fuyant
s'oppose
auxmisérables BobDylan,D.H. Lawrence pourses Tortoises,
Emily
Dickinson,
faux-fuyants
dénoncésdansL'Anti-Œdipe’, àlareprésentation
infinie Mandelstam, Pessoa, Rimbaud, Nerval,
Hälderlin,
Artaud'®.
Ilest
etàtouteslesmanières
de
faire expier
la différence.
Lavéritésur(er
de) vraiaussi
quelepoème Passionnément,
dans LeChant
delacarpede
lafuire
estdonc
celle-ci
:«çam'intéresse
qu’une
page
fuiepar
tous
les Gherasim
Lucaestsplendide,
surtout
lupar
Régis
Lefor,
etque
lecourt
commentaire
deDeleuze: «SilaparoledeGherasim
Luca
estainsi
éminemment
poétique,
c'estparce
qu'ilfairdubégaiement
unaffect
2.Différence
etrépétition
[notédésormais
DA], Paris,PUF, 1968,
p. 18.Demême, delalangue,
nonuneaffection
delaparole!"
»esttrès
éclairant.
Hest
DR,p.16,oùKierkegaard
etNietzsche
reprochent
àHegelcefauxmouvement,
&
LeBergsonisme
[noté
désormais
B],Paris,
PUF,1962,
p. 38,oùcefaux
mouvement
éf
dénoncé
parKierkegaard,
Feuerbach,
Marx,Nietzsche,
auquelonajoutera
Maldiney 8.Pourparlers
[notédésormais
Pour],
Paris,
Éditions
deMinuit,
1990.
25:
surlacertitude
sensible
hégélienne. Quurce
que
La
philosophie?
noté
désormais
Qph],
Paris,
Éditions
de
Minuit,
1:
3.Deuxrégimes
defous[notédésormais
DRF],
Paris, Éditions
deMinuit.
Lg P-116
:«lesystème
leplusclosaencore
unfilquimonte
vers
Levirtuel,
er d'où
p.252.Voiraussi
p.330:«lecempscessededécouler
dumouvement, ilse descend
l'araignée,
»Rhizome
[noté
désormais
Rh},
inMillplateaux
(noté
désomit
enlui-mêmeersuscitedefaux-mouvements,
d'où l'importancedu faux MP,Paris,
Éditions
deMinuit,1980,
p.43:«resiruer
lesimpasses
#0rs
4.Kafka
\noté
désormais
A1,Paris,
Éditions
deMinuit,1975,
p.90:L1m4f? Ouvrir
enlignes
defuite.»DRF,p.261: «Pourmoiunesociété,
c'est
quelqued&
[notédésormais
27], Paris,Éditionsde Minuir, 1985,p. 170et 172:etL'Image- Qui
fuirpartouslesbouts
»(Deleuze
enprofie
pour
plaider
pour
unétat
BAR
toutes
choses). .
mouvement
[noté
désormais
{M],
Paris,
Éditions
deMinuit,
1983.
p-288
:* 2002,
p.385.
fauxdevient
le signed'unnouveau réalisme, paroppositionaufaire-vrai
delancien” 9.L'Île
déserte
noté
désormais
JD],
Paris,
Éditions
deMinuit:
ssÉditions
de
«pluson estfaux,pluson va
loin, le fauxc’estl'au-delà». 10.Successivement,
Cririque
erClinique
[noté
désormais
ca,es 308
:Qh.
5.1T,p. 177.
Minuit,
1993,p.129,
etA4,p.128:
AOË,
p.331:
DCP.P.
13:40
DE p.65.
6.IT,p.191. P.77,
155er158,
186:
AOE,p.102,
396:
AOË,
P.1505
4OË.p.
LIB5AR
7.P,398-400. 1.CC,p.171.
Deleuze: le vrai-fuyant,
lapoésie,
LesGrecs 305
304 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

vraiqu'après
unpremiercommentaire surMallarmé!?
trèsnégatifs ades
vivants
chez
RenéClair15
7k «cinéma
dePoésie
»assimilé
chez
lesecondparaît
l’abstract
d’un
livre entier
: : Pasolini
audiscOUrS
indirect
libre”*;
lecommentaire
bref
surl'émeraude
deNovalis
etsonondine,comme preuve
queNovalis
allait
plusloin
Lepliestsans
doutelanotionlaplusimportante
deMallarmé,nonsde. Kantdans” SE dfu dusensible?.
1]paraît
clair
ment
la notion,
mais
plutôtl'opération,
l'acte
opératoire
qui
en faitungrand ieest lecas d'un
cris temps,necessant
de
que
ns nonseulement
ahoubpemaisréelle
tr
poètebaroque.
ucttél qu’elleunit par « brisure».Avecsonabsencedefinalité,
Cesfulgurations
laissent
entrevoir
unethéorie
forte,
comme
unlivre çon
refusd'accumuler (licote,aposiopèse,
«blanc»)#,sonouverture
nonécrit.Quandonvoitcomme
la pensée
deleuzienne
convient
àun aux
règnes,
leDOADAAGS
QUEONAEORSélocutoire
exerce
sur
l'effet
poème deRitsos,Avantl'homme, «Passageprintanier
defemme »,ou disciplinaire
dumotd'ordre
etdusens,
lafermeture
ducaquet
de
deDylanThomas, Visionetprière,
«Desonanniversaire»,onnepeur l'Hommequeproduitsapudeuraformelle,
asignifiante,
atélique,
a
querelever,del’unàl'autre,despointsdeconvergence. Pourfaire poésie
estl'exemple
même de
l'acte derésistance
de
l’art. Deuxième
bref,etenévitantde
resservirlesplatirudesdecequiva toutdroit énigme
donc: pourquoi
ce livred’uneimportancemajeuren’a-t-il
(prose)etdecequiserecourbe (poésie),
«pensée pauvre»lorsqu'on pas
étéécrit,ou du moinsrassemblé
?
veut
l'appliquer
à ladifférence
desAnciens
etdesModernes
#,
jeciterai Avec
letraitement
infligé auxpremiers
penseurs
grecs,
cequi
était
lesuspens
virtuel,qui consonneavecla «disparitionélocutoire
»etle lacune
énigmatique
pouvant êtreimputée
àun«fragmentarisme
»,
suspensdesignification
dupoème ; ladépersonnalisation
dupoète, devient
préjugé.
Il estsurprenant
qu'avec
saconception
positive
du
quiredonne auxrègnes unevaleurégale,etpermetuneéclosion chaos,
sathéorie
dumouvement, safocalisation
surlevirtuel,
Deleuze
individuante
d’heccéités
etdepetitsmoipassifs!*,
larésonance
et
la n'ait
nonseulementjamais« rencontré
»lesPrésocratiques,
mais
ait
remontéedans
les plis,
la ritournelle,
quiconsonnent
avecle«retrait
» mêmechoisi
de lesvilipender.
Est-ce
unréflexe
anti-généalogique
qui
(versus)
poétique.J'accordeunegrande importance
àladécouverte, ledétourne
d’une
« origine»,cequ'aurait
renforcé
laridicule
emphase
dansDifférence
etrépétition
(page
373),dupassagesuivant
: heideggérienne
d’une«aurore
de
la pensée
»?Quelle
estcerte
cécité
quileprive
decomprendre
à quelpoint
les Grecsd'avant
Socrate
sont
lapuissance
dulangage
inspire uneidéedelapoésie excessive.
Pourquele bienuntypedecedehors
delapensée
qu'ilrecherche?
Pourquoi
ne
poèmeprenne
naissance,
il suffitquenousidentifiions
leprécurseur,
lesséries peut-il
deviner
sous
lePoème
parménidien
autre
chose
qu'une
logici-
s'organisant
encouplets,
leprécurseur enrefrain. sation
transcendante
? Est-ceuneinsuffisante
acculturation
grecque
qui
luifaitcitercomme
simple
rumeur
l'absence
defondement
de
Cetexte
quin’al'airderienetrenvoie
à ladistinction
indiscernable laphilologie
heideggérienne?!?
En toutcas,sadétestation
duSchritt
del'éclairetdesonfuscumsubnigrum,
pourraitavoiruneétonnante ærück
éclate
dansRhizome
(page
8)lorsqu'il
dit,suruntonagacé
:
fécondité
dansunecritique
poérique
sérieuse.
Manifestement,
Deleué PRE
avuquelque
chosed’essentiel
dans
le geste
etl'atmosphère
poétiques 17.1M,p.63.
Cequiexplique
ces
fulgurations
poétiques
:l'homogénéisation
des 18.
1M,p.108.
: DR,
p.287. HE
12. QPh, P- 43. 38. nomme««image
0.CequeDeleuze delapensée
», enréalité
»,est 5 une -
machine
13.
Nietzsche
etLp
ahilosophie
noté
désormais
NPh},
Paris,
PUF,
1962.
P Pete
auprofit,
Pouvoir, non
guerre).pas
d'un
État
Lapoésie, quelconque,
commelesent mais
d'une
idée
estede!
Apollinaire, Feat
Ce- a
npos#to®
14,
DR,
p. 311. doideu
15.
J'ai tenté,
dansunouvrageencoreinédit,Lapoésie,
unPas40 reveair axfon« dans
larésistance
àceresprit
:«Pitiépour
nous
. combattons
PE deprésenter
lapoésie
selon
laformule
: «minorerlesujet,
faire tières
del'impossible
a" nousester
«Lanouvelle del'illimité.
parvenue »(La
quepas Jolie
une rousse|
érymologie
demn si
n'était
monde,bâtirunmonde enabrégé.
» Sarrebruck:
16.Certeidéeestlems d'untravailprésenté
aucolloque
de
surlarévolution
poétique
hälderlinienne
erleslignes/plis
deleuziens-
Cr P-83).
L'allusion
paraît
claire
aulivre
deMeschonnic,
Langage
Deleuze
: levrai-fuyant,
lapoésie,
lesGrecs307
306 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

| derencontrer
Deleuze,
j'avais
faitl'expérience
prati
«ilyaquelque
chose
de pireque
les objections
erlesréfutations,
c'esr
ke
“retourà.….”.»Cet agacement
se sentdans
l'entretien avecClai Fhapitre del'ouvragedeHumboldt, EssaisurleKen a.
dnsje,le«duel»entanc
que«casgrammaticaldedualité
»adisparu
Parnet,dePourparlers(page155).Mais
il a beauinvoquerut
il nepeut
faire paraître
pourbonargument l'idéeque,S'agissant
_ lalangue
grecque,
c'est
quelapensée
qui
le soutenait
(telle
est
derce
à l'«en-pensée» de GustaveGuillaume)avaitelleaussi
d'interpréter
maisd'expérimenter,
lenouveau
serait
«cequiMe ma
trainde
se faire»,«l'expérience
aujourd’hui?
». Carcetteaffirmation .J'ailongtemps
réfléchi
àcemodèle
dusymbolon.
J'aimené
concept
jusqu'àunestructureencinqpoints: 1)différentialité
seraircontradictoire
avecl'intempestif
et l'internel.Sedonnealors
librecourscetteétrangefaçondetraiterlapenséePrésocratique? paire; 2)opposition
violente;
3)faille
irrémédiable;
4)incise
Lethème estlesuivant:lesGrecsdecette haute
époque habitent
des réciproque
etasymétrique
; 5)unitéfaillée
toujours
àreconstruire??,
cavernes.
Deux régimes
defous,page59: leprésocratique
est« retour
au Mais
uncapàétéfranchi
lorsque
j'ai perçu,chez
tous
les auteurs
qui
souterrain
»;Logiquedusens, p. 153: «Laphilosophie
présocratique jen
le symbolique,
la présence, par-derrière#,
d’unecommune
nesortpasdelacaverne,elle estimequ'onn'yestpasassez
englouti, «épaisseur
»,commeuneréserve
temporelle
pourpoursuivre
lalurre
Lesprésocratiques
ontinstallélapensée
dansdescavernes,
la viedans elamonteren puissance.
: laprofondeur
dela terre
»;Logique
dusens,
page154: «leprésocra- Exc'estbienlàl'originalitéetlamodernité
decesymbole
il pose
tisme,
c’estlaschizophrénie
philosophique
de
la profondeur
absolue, autrement
le problème ducombat,il résout
autrement
leproblème
de
lesretrouvailles
delaprofondeur
»; Logique dusens, page158:«la laviolence.
Il fautbienque
les forces
aillent
quelque
part.Leur
affron-
philosophien'estpasplusl’être
descavernes quel'oiseaudePlaton, tement
semble
n’admettre
quela«rétroaction
positive
» (lesystème
mais l'animaldessurfaces.
»Et Deleuze emboîte lepasàlacritique aplose)
oularétroaction
négative
(lesystème
implose)?”.
Maisles
lucrétienned'Héraclite,
Empédocle, Anaxagore (livre I).Même sila Grecs
ontgénéralisé
unmodèle
d’affrontement
(polemos
d'Héraclite)
profondeur,
lesbas-fondspeuventêtreliésàl'éternelretour“,
même si oùlesdeuxforces,
parcequ'ellesrésistent
et«tiennent
» (uneidée
d’autrespassages,
suivant
les recherchesdeFoucault, louent
lesGrecs quiesttoujours
pourtantvaloriséechezDeleuze),
tirent
puissance
deleurinvention
de lasubjectivité??,
resteàtenter decomprendre
certe mutuelle
deleuraffrontement.Lecombat estuneréférence
perma-
exclusionradicale.
Cequidemande unenouvelle pensée
ducombat. nente
chezDeleuze*. Mais,lorsque cecombatestprésenté
comme

III. PENSER LE COMBAT 26.


Wilhelm
vonHumboldt,
/ntroduction
àl'œuvre
surleKavietautres
essais,
trad.
Pierre
Caussat,
Paris,Seuil,coll. « L'ordrephilosophique
»,« Leduel»,p.99-131.
À montourd'inventer,
pourenfairehommage àcerte
philoso- . 27.
C'est
pourquoi
il estinsupportable
d'entendre
lesobjections
irréfléchies
qu'on
phie,unnouveau
concept
quipropose
unesolution
pources
énigmes. li fit,Que
lesymbolique,
ausens
platonicien,
romantique,
baudelairien,
lacanien,
Ou celui
que
décrit
Gilbert
Duranddansses
ouvrages
sur
l'imaginaire,
n'aitrien
à
Ceconceptconcerne
uncasdedualité,untypedecombat dont,
Voir
avec
Deleuze,
j'en conviensrourà fait.Maisceluidont
je parleiciesttourautre
:
ExUnassaut«comparatif
» oùlesforcess'affrontent
sansfaire
demorts
nid'esclaves
verPlus
loinl'exemple
dubébé). J'aimêmepenséàparler
de«symbolition
»pour
22.Pour,
p.145
et 155.
Avec
lanuance
qu'apporte
QPh,
p. 51:«LesPrésocratiques Yindre
l'idéed'abolition
delatotalité
surplombante.
ont-ilsuneimage
commune delapensée?
» " d 28.
Cequidonneuneparticulièreprofondeur
àlapensée
dePascal
surla«pensée
23.D'autantplussurprenante
quec’estunpointsurlequel
il diverge
d'avec
«eng *,maisaussià l'interdiction,
faiteàOrphéeouIzanagi,
deregarder
Nietzsche. : b > rise sta
24.DR,p.311.L'atraque
esttropforte
pourn'être
qu'une
amplification
de
formule
deNietzsche
:«LesGrecs:superficiels
parprofondeur
». à li “Ar Cequen'apascompris
l'Occident,malgré
lesefforts
désespérés:à
25.«LesGrecsont
inventéunepolitique comme rapport
depouvoir
D mePremière
philesophie
de1pri erde
la Nr laPhénoménalogie,
c'est
qu'un
hommeslibres
»(Pour,p. 153);«lesGrecsil fautlesinventer
».«Cequ” Fa d'un qui
5€termine
par
Lamort
d'un
des
belligérancs
ouadéfinition
d'un
Sup
Grecs,
cen'est
pasdéplier
l’ouvert
ourévéler
l'Être,
mais
ployer
ledehors
rs 30F Reur,
revient
àune
défaire
delapensée. 7
exercices
pratiques.[lsontpliélaforceetl'ontrapportée
àsoi»ee t«
Dpt Corps
à corps
(Proust
erles
signes,
éd.
de1979,
P-us
(go désormais
Æ},
Paris,ÉditionsdeMinuic,1986,p. 106et107). œnquére
JS COPs-langage
», Revue
Cririque,
n°214),
athlétisme
( o ‘le
(CC,p. 165« 167),écreince
(Foucaulr,
p. 114,DRF,p.303), bauaï
Deleuze
: levrai-fuyant,
lapoésie,
lesGrecs 309
308 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

dichotome”,
il neremplitquelacatégorie
desecondéité
dePeirce conquête
delapart
fluente
»(p.12,69).DanssonFoucault,
il faitvoir
« Sonerreurestmanifeste
: il necomprendpasquela relation
+ ,deux
forces
s'insinuant
Î unedans
| autre
dans
la bataille
»(p.73),erle
extérieure
àsestermes»,il nevoitpasquetoute
relationdemande ploiement
deforces
del’agonistique.
C'est
dans
sonanalyse
du«pathé-
une
loi ou principedelarelation,autrement
dit unetiercéité.Bref,la »,
à propos
deGriffith,qu'ilmontre
saconnaissance
decerype
plupartdes«combats» sontdes« symboles» infantiles,neparve- d'epérimentation
:«il nes’agit
pasdelaprogression
desoppositions,
nant
pas à rencontrerleuressence detiercéité.Mais,souscenom& mais
dupassage
d’unopposéà l’autre,du sautdanslecontraire
[..],
«combat
»,Deleuze
pense
d'abordlajoutederivalité
(«symbolom
, surgissement
de
l'autreàpartirdel’un,passage
pathétique
de
l'opposé
vientdu grecsymballé,
comparer: comparaison/comparution),
un dans
son
contraire,
bond
oùledeuxième
instant
acquiert
unenouvelle
fortancien
modèle
qui
estaussi
laréalité
même
etquimaintient
àla guissance,
puisque
lepremier
estpassé
enlui*.»
foisdistincts
etinséparables,
«inexclusifs
»,lestermes
dumouvement, Cequia recouvert
cemodèlesymbolique
er,dèsHéraclite,
l'a rendu
parcequecelui-ci
nelesquittejamais. «obscur
»,c'estl’image dubijoucoupéendeux,préexistant
àcout
Cequinepeut
alors
quesusciter
monembarras,
c’est
queDeleuze mouvement,
l’image del'Androgyne,
présupposant
une Unitéabsolue
puisseévoquerce combat sans morts ni domination, sansvoirque alaissanr
désirer
uneUnitéretrouvée,
lafusion
supposée
des
contraires
lespremiers
àenavoirdéveloppé leconcept actif
et créateur sontles das
l'Unitas
multiplexmédiévale.Deleuze,bienqu'il semble
nepas
Présocratiques,
lesTragiquesgrecs,
er lesTaoïstes!J'aimontré dansde avoir
aperçulapréexistence
dusymbole àsonpropre
modèle,
semble
nombreuses érudes
desCahiersdel'Herne, quecemodèle permettait luiavoir
donné, aprèsNietzsche,unenouvelle
puissance,
etenavoir
decomprendre desunivers
d'écriture
paradoxaux,inspirésdelapensée précisé
lesrermes à partirdela rencontre
aveclamodélisation
de
grecqueoujudaïque*.Deleuze
endonne desillustrations
aveclecombat Simondon,évoquée
entreautresenDR317.Dusymboliqueaumodèle
avec(etnoncontre)
lenouveau-né”,
quandil parle
de«symbole rotatif» de
Simondon
erDeleuze,
cequivapersister,
c'est
l'indifférence
aux
danssapréfaceàApocalypse
deD.H. Lawrence, ouquand, dans Critique formes
etl'importance
dumouvement, aveclfauite decemouvement
etClinique,
ildécrit
uncombat qui
rejettelaguerre etconsistedansla qui
nepeut
cesser.
Cequipersiste,
cen'estniidentiténiopposition
ni
analogie
niressemblance
nitéléologie,
mais bienlecaractèreinerme
zone
deturbulence
(DRF,
p.218),
affrontement
(DRF,p.236),
rivalité
d'hommes (désarmé)
decemodèle,
quiledestine
àl’artparcequ'ilestrésistance,
libres
(DRF,p.319),
conflit
(DR,p.140),
effraction
(DR,p.181),
duel
(M,p.139). non-accumulation,
non-guerre.
binôme d’antagoniste
(/M,p. 118),
couple
deforces(/M.p.266),
résistance
(IT. Pour
le reste,
il estbienévident
queleluxededétails
de
l'opération
p.331ecDRF,p. 298),
refoulement
(AOE,p.224).
des
disparation
»chezSimondon puisDeleuze,
n’arienàvoiravec
le
31.
Rh,p.14. aractère
fruste
ouélémentaire dumodèledonrseservaientLaoTseu,
32.Entémoignent
mes
trois
contributions
auxCahiers
del'Herne
:«Figures
de
dualité
: Hôlderlin
etlatragédie
grecque
»dansleHolderlin
(1989),
«Nietzsche
erla Héradite,
Sophocle,
Hëlderlin
(le
cercle
d'effectiviré),
Friedrich
Schlegel
musique
»dans
keNietzsche
(2000),
«Kafka
etlaconscience
del'abime
»dans
lefs Suencore
Nietzsche.
1]nes'agit
pasdedésigner
des
vainqueurs
nide
(2014).
C'est
cemême modèlesymboliquequi,inaperçuchezParménide,
malgré
le
Bitlexicologique
de17couples l'opposition
dansleseulPrologue,
etLarécurrence
de a
47mots etexpressions
signifiant
la«tenue
enun»,aulieud'uneunique OCCurTEn
del'Unentantquelui-même,m'apermisderéévaluer
la probabilité
queP. 1M,
p. 53.Voiraussi
/T,p.313:«uneluttenonpasentre
deuxtrajectoires,
nesoitni unontologue duTranscendantni unlogicien
del'Identique,
comme ue .. nepeut
serévéler
qu’àtravers
lesdeux,
grâceàleurva-et-vient.»
tradition
platonicienne
le voudrait.
VoirParménide.LePoème, trad.Pierre
Hoberey oudu*Ontrouvera
cedétaildeséléments
dumodèle
dela«surface
métaphysique
»
etArnaud Villani,suivideParménide
etLadénomination,parArnaudVillani,
Pars 190
Ce transcendantal,
ouduplan
deconsistance
dans
:DRp-80,
155,
165,
Hermann,
2011,etParménide
(encinqconcepts),
Mons,Sils-Maria.
2013. van227:
239.
277,
296,
315,
317,
323,
326,
356:
M.p5
. 4,
1075
TP.LA:
33.
Voir DRF,p.362
(+les tout-petits
enfants,
traversés
d’uneviti 6ri 1. 77:40,
p.63,
391
;Périclès
erVerdi,
p.20-23:
DRF,
p.32,
245,
327,
359:
et pure
puissance
»)etsurtout
CC,+Pourenfiniravec
lejugement
»P- L vialité :720:134
à136,
246(avec
unusage
intéressant
ducerme
symbole)
:QPh,
p.41,
: 26.4: Proust,
éd.cit.p.134,182;
Rh,p.10,
11, 19,24.26:CC,
p. 83,
] *lecombat
n'estpasunevolonté
denéant»,«lecombatestcettepuissan
le pesit 12P.13,
16,
27,
59,
74,110,
158:
LS,p.65-67,
124-125,
181,
195;
202.
non-organique
quicomplète
Laforce
avec
Laforce
»,«lebébé
estcombat
L---
pe estlieuirréductible
desforces
». ere119, 9,242
P:46,56, ex243,
280,
285,
301, :Phi,
305; Pl,
p.V1,119:
Foucaubs,
310 AGENCER
LES MULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

distribuer
despoints.
Qu'onmepermette iciuneconfidence.
Cequi
m'aretenu,
lespremières
foisque
j'ai fcuilleté
Deleuze,
cen'est
avanttoutlafaçonsi intelligente
dontil dominait
les problèmes
Jes
plusardusdla
e philosophie, maissesremarquessurKérouac,
Miller
Lawrence,
Hopkins,
VirginiaWoolf,CowperPowys,
etlalittérature
anglo-américaine.
Il y avaità del'arc.Et biend’autres
philosophes,
Plotin,Spinoza,
Bôhme,
Schelling,
lesRomantiques,
Schopenhauer,
étaientfétés,commebénéficiantnaturellement
d'uneplacequela
philosophie
classique
leurchicanait
souvent.
11 y avaitJd
àe l'ouver.
ture,uneimposte
chez
Deleuze
ouverte,
uneissue.Lacécitéaumodèle
nefaitpassouci
carelle tient,comme
symbolique
«lalettre
volée
»,
EXPÉRIMENTER
àcequi
est tellement
sousvotrenezquevous finissezparneplusle MICROPOLITIQUEMENT
voir.J'aifini parcomprendre
quesi Deleuzenepouvait
faire celivre
magique
surlapoésie
quej'espérais,
c'estqu'ilétaitcrop«dedans
»,
Ainsi,marencontre
avecDeleuze
n'afaitquepotentialiser
mesaffinités
pourla littérature,
lapoésie,lestraditionshétérodoxes
de lamystique,
laphilologiegrecque,
illustrant
àlafoisl'idéededouble
devenir
asymé-
trique,
etde«double détournement», comme hommage àHëlderlin.
XXVI

Deleuzepolitiqueavant
la rencontre
avecGuattari
Lapolitique
endeçà
etau-delà
delareprésentation?

ANNEQUERRIEN

Àlafin
de l'été
68,jecherchais
surlatable
desouvrages
dephiloso-
phie
delalibrairie
Maspero
une
lecturequipuisse
sourenir
monrefus
des
tentations
terroristes
ou hallucinatoires
danslesquels
secomplai-
sentmes camaradesduprintemps :j'aichoisiDifférence
etrépétition.
J'éais
dans uneprofonde périodededoutesurle fonctionnement
des
institutions
«démocratiques »quiencadraientlemouvementétudiant.
J'avais
vécupendant
trois anslaprise
decontrôlesurlesyndicat
érudiant
d'ungroupepolitiquetrèsminoritaire,
quiprétendaitreprésenter
les
étudiants
entantquecatégorie socialeparticulière,
tourenprenant
ses
ordres
auprès
deresponsables
politiques
plusâgés,
faisant
desétudiants
une
forced'appoint
auparticommuniste,
dansunsystème depensée
niant
tout
intérêtcollectif
desétudes
supérieures.
Ellesétaient
en
effet
conçues,
si
ellesneconduisaient
pas
àl'enseignement,
commeunmoyen
de
trahir
la classe
ouvrière.
J'avais
rencontré
chemin
faisant
un groupe
Politique
toutaussiminoritaire,animéparFélixGuatrariqui,faisant
delasanté
mentale
soncheval
deTroie,partageait
mescritiques
de
®groupe
dominant,
et soutenait
lestentatives
pourfaire
bougerles
pardesactions
concrètes.
C'estainsique
j'avaispassé
l'année
66-67
Àcréer
dessections
localesdeplanningfamilial
danstoutes
les
universitaires
pourdiffuser
la contraception
etlesadresses
pour
Orter.
Uneaction
concrète
dont
les responsables
éraient
aussi
ceuxqui
Porteraient
lescouleursdumouvement du22marspendantMai
68.
Pendant
lemois
demai,
legroupe
deGuartari
avait
rejoint
le mouve-
entdu22mars
auquel
j’appartenais
moi-même,
entant
qu'étudiante
Deleuze
politique
avant
larencontre
avec
Guatrari315
314 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

ensociologieà Nanterre.Le groupedominantavaitcréédescomi LLIMITES


DE LAREPRÉSENTATION
d'actionà laSorbonne,avecle projetexplicitede« faireMe
soufflé
»grâce
à uneonded'activité
apparemment identique,
he Comme ledit Deleuze’,cequiestmanqué danslareprésentation,
sens
contraire.
Pour
les genssérieux,
larévolution
n’était
pasàl'ordre cestlesenscollectifde | être,le jeu de ladifférenceindividuelle.
dujour
: nous«lesfous»,d'aprèsnosprétendus
amis,nousévertuions Ainsi,
TOUSlesmembres
del'organisation
politique
sontconsidérés
chaque
jouràlarendre
effective,
enprivilégiant
d'abord
laPratique EMsemblableset identiques,
capables
desmêmes performances,
L'agencement
collectifcapable
decerteactivation
s'amplifia
jouraprès rai desmêmesidées.La doctrineestélaborée ausommet de
jourjusqu'au
21mai.Cejour-là,
le gouvernement
décida
d'interdire
à l'organisation,
dansun petit« état-major» qui nesouffreaucune
DanielCohn-Bendit,
partienAllemagne
consulter
pourunemaladie disonance
delapart
deses
«troupes
»,ouqui
enferme
les
velléités
rare,derentrer
enFrance.De lasorte,lemouvement
du 22mars
était dediscussion
dansdescourantsminoritaires,
calculés
àdessein
pour
littéralement
érêté
desonporte-voix,
etlapanique
saisit
ceuxquise donner
l'apparencedeladiversité.
Or,danslesmouvements,
dans la
souciaient
desareprésentation.
Unbureau du22marsfutconstitué
à démocratie
d'assemblée,
l'élaboration,
nesevoulant
pasreprésentative,
lahâte,sansélections,
sedonnantà lui-même
la tâchedereprésenter reste
nettement
plusouverte,touslesacteurs
dumouvement pouvantse
le mouvement, notammentauprèsdesmédias.La négation
detoute situer
commeils l’entendent
danslerapport
auxsignifiants
misenjeu.
démocratie
avait
strictement
lamême ampleurquechez nosadversaires! Les
groupements prennentdesformesvariées
selon
laquestion
qui
est
À mesyeux,
c'était
Lafindenotretentative
révolutionnaire, qui
eur endébar.
Lesraccords
ou «discords»,comme
le reprend
Deleuze
de
pourtant
encorequelques
beauxjoursdevantelle.J'étaisintriguée,
er Hélderlin,
sontmultiples
etfavorisent
Ledéveloppement,pour
autant
désolée,
decetimpératif
delareprésentation
consistantà fairedépendre que
lesouci
dereprésentation
er ledésirderespecter
labienséance
ne
unmouvement
de l’image
qu'ildevaitdonnerdlui,
e etdoncàl'érouffer. viennent
pas
toutfiger,
engendrant
la stérilité.
Jen'étaispasauboutdemespeines nidemonétonnement : àlarentrée Lareprésentation,
telle qu'ellesemetenplace à l'âgeclassique,
deseptembre,lesex-leaders
del'ex-mouvement du22Marss'occupaient à supposedesidéesclaires etdistinctes,
éjectant
routrisque deflou,
rédigerfébrilementunlivreintitulé
: «Verslaguerre
civile»,cristallisant excluantlavariation,
exigeant unedéfinition
permettantle calcul.
dansunfantasme belliciste
eruneidéologie vague
les velléités
d'action Mais,préciseDeleuze,l'expression
quifondelareprésentationn'est
desjeunes qu'ilsrencontraient.
Il s'agissait
doncdefigurerdesennemis pastaillée
surlemême patronque la représentation
elle-même.H n'y
àattaquer, dedonner delasociété unereprésentation antagonique, adonc pasadéquation del'expression,quiprécèdelelangage oule
justifiant
desgestessipeuréfléchisoumotivés qu'ilsseretournaient
le suit,
erdelareprésentation, concomitanteaulangage etàsesmots
plussouvent contreleursauteurs.Jerefusaideparticiper àcerte
entre- ‘ordre.
D'oùles ratésfréquents del'expression
: onvoitqu'ilsne
priselittéraire.
C'estdoncdansune solitudeencerclée derous côtés procèdent passeulement d’orateursmalhabiles
quibafouilleraient
pardes«représentations »quimesemblaient mener àl'impasse,
que oumanqueraient
desmots
adéquats,
maisqu’ils
indiquent
une
diffé-
jerencontrai Différence
etrépétition.En lerelisantquarante-sept
ans rence
profonde
denature.Inversement,
etenmanière
depreuve,
on
plustard,jemefélicite toujoursdecetterencontre. Pourmontrer les peut
voiraussi
lesuccès
aiséetimmanquable
desprofessionnels
de
insuffisances
delareprésentation,
Deleuze
convoque
Freud
et lesplus lareprésentation,
on diraitaujourd’hui
de lacommunication,
dont
grandsphilosophes
: Platon,
Descartes,
Spinoza,
Kant,Hegel,
Leibniz, °npeutcomprendrequ'ellenecommunique quesapropreimage,
à
Nietzsche,
Kierkegaard,Heidegger,
Sartre,
erenpropose
unesubversion SoirLacapture
descontenus
sousdesformes
prédéterminées.
Selon
qui
n’a eupour
l'instantdesuites
visibles
quedans
sa collaboration
avec Deleuze,
lapensée
moderne
procède
delafaillite
delareprésentation,
Guartari.
Lesaffinités
deDeleuze
vont
audomaine
lictéraire
nettement dela
défaillance
duprincipe
d'identité,
de ladécouverte
des
forces
qui
plus
qu'au
domainepolitique.
C’est
cedomaine
quejevais
envisager 8issent
sousla représentation
de
l'identiqueerledéforment,
prises
avec
68,maisaussi
une
critiquedelatenration
populiste
trèsprésente Wells
sontdans
lejeu
dla
e différence
etdelarépétition.
Leprimat
de
dansl'extrême
gauche,
etunemiseenperspective
denouveaux mm

devieexpérimentés
par
diverscollectifs. L:Différence
etrépétition,
Paris,
PUF,
1968,
p.387.
316 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECD'ELEUZE Deleuze
politique
avant
larencontre
avecGuattari317

l'identité,
quidéfinissait
toutautant
le sujetquel'objet
dans
| Comme
l'amontré
Foucault
dansLesmors
etleschoses,
leproblème
€monde
delareprésentation,
acédédufaitdelamutation delasoc
étéetde
seur
delareprésentation,
c'estderéaliser
unecoïncidence
des
points
sareprésentation,
bientôt
expriméecomme «déterritorialisation
, 1 eduvoyant
et de l’objetvu. Danscettereprésentation
centrée,
Lesidentirés
sontleseffets
d'optique
produits
parunepensée
engagée qvision
nepeut
guères'écarter
dupoint
devue
dominant
pourgarder
danslarecognition,
recherchant
l'identique
et lesemblable,
incapable une
intelligence
dela situation.La représentation
estporteuse
d’un
decréer
denouveaux
outilspourappréhender
cenouveau
Contexte, ordre
conservateur
quiseperddèsqu'ilYamouvement, etqu'ellene
Il nes’agitpaspourDeleuzedeproduireunereprésentation
de jent
plusàmaintenirsescomparaisonsdanslesconditions
deson
l'image
identitaire
delapensée,
comme
onttenté
de
le faireKi équilibre.
C'est
ici queDeleuzepropose*unepetite
tactique
subversive
:
etNietzsche,
maisdeproduiredansl'œuvre
philosophique,
d'abord déformer
chaque représentation,
l’arracherà soncentre,
luidonner
envisagée
sous
son
aspectlittéraire,
unmouvement
capable
d'émouvoir unautre
pointdevue,supprimerl'identitédeperspective
del'objet
l'esprit
horsderoutereprésentation
etdetoutecomparabilité.
I] s'agit verduvoyant, ensommedes travaux pratiques
proches
deceux que
defaire
dumouvement
uneœuvre,
desubstituer
dessignes
directs
à posaient
les coursdesociologie
deManuelCastells,
à Nanterre,
en
desreprésentations
médiates,
d'inventer
desvibrations,
desrotations,
1967-1968.
EtDeleuze
desedemander
cequireste
dans
lesensible
desdanses,
dessautsquiatteignent
directement
l’esprit?,
Miseenjeu
une
fois
lareprésentation
écartée.
Letenant
de lareprésentation,
repré-
ducorps par
la pensée expérimentéedansdespratiques
professionnelles
sentant
lui-même,
se réclame
d’unénoncécanonique
: «toutlemonde
oudescommunautés politiques,
explorationconcrèted’undevenir
convient
de»,«nulnepeutnierque’».C’estl'énoncé
dominant
par
quinesesépare jamais desonespace dereprésentation.
Lemalheur
axellence,
quienappelle
aubonsens
etausens
commun,
affirmant
desreprésentants,c'est
de«parler pour
» lesautres,c’est-à-dire
«àla par
là-même
queleleader
possède
unenature
droite
er pleinedebonne
place»desautres?. Maisreprésenter,
c’estnégligervolontairement
la volonté.
Cemoment unanimiste
ouconsensuel
del'énonciation
se
conscience
sensible,
er delasorte,serendreinsensible
aumouvement de
alque
d'avance
surunsenscommun admissible
pour
l’ensemble
de
ladifférence
quiperdure ets’entête
ensous-main.Danslemouvement
l'assemblée,
entraînant
desoi
l'adhésion.
Cette
construction
abaisse
politique,
c'estleproblème duleader quiaufil dutemps secoupe
engénéral
l'énoncéverslescontenuslesmoinsélaborés
detousceux
dessensibilités
qu'ila réunies,
etvidedeleurcontenulessignifiants
dont
seraient
porteurs
lespersonnes
rassemblées,
mais
également
les
élaborés
pourindiquer
le «vivreensemble
».Souscerre
stratégie,
ondevine
l'idéequeplusons'éloignedelasensibilité
individuelle plus
violents,
faisanc
resurgir
l'opposition
entre
«Eux»,àabattre,
etdifférentielle,
plusonratisse
large.
Maisplusaussi,
onabesoin
de &t«
Nous»àdéfendre.
Cetteconstruction
quipousse
àleurpoint
répression
pourcontenirensemble
etneutraliser
l'effet
dedivergence
ulime
les
loisdelareprésentation
peut
êtredite
l’antichambre
dela
dessensibilités
bridées
etbrimées.
L'itinéraire
populiste,
fortement Terreur.
LaProposition
deleuzienne
fuitloind’une
telle perspective,
d'actualité,
seconstruitenréférence
constante
à la notiond’ennemi,
“onsidérant
la catégorie
del'ennemi
comme
unconcept
«gros
comme
notionchère
à CarlSchmitt,totalement
absente
delapensée deDeleuze, une
dent
creuse
», |
mais
omniprésente
dans
lapensée
denoscontemporains.
Alors
que
l Laviolence
quelareprésentation
setargue
decanaliser
sediffracte
construction
deleuzienne
procèdedirectement
du désiretdelape 7 desmembresde la scène.Elle imposeà tousl'unitéd’un
afluant
au corps
parl'expérimentation,
lefantasme
d'affronement
qui He jejuge,j'imagine,
jemesouviens,
jeperçois®
».Toutsujet
anime
nos
scènes
politiques
trouve
sonpoint
d'appui
dans
l'opposition “éividuel
acceptant
unereprésentation
collective
etcerte
identité
àunpouvoir
surplombant,
et enconnivenceaveclui.Cette
dernière Unsauxautres,
devient
aussi
virtuellement
chefdel'action
Conception,
courante
enpolitique,
metlaconceptiondeleuzienne
hors Sommune
€; plus
sûrement
encore
chef
de
l'actionindividuelle
quien
A Champ
etinstalle
larépression
aucœurdel’action. * l'identité
desamis
s’oppose
celle
desennemis:
«l'identité
est
ue

2.Ibid,p. 16. Àid, p.78.


3.bid.,p.74, es P.170.
id.p.180.
Deleuze
politique
avant
la rencontre
avecGuatrari319
318 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECD'ELEUZE

conçue,
l'analogie
jugée,
l'opposition
imaginée,
lasimilitude
per pute
individualité
soitpersonnelle
ettoute
singularité
individuelle.
etlechampd'actionévalué.Ladifférence
danslemondedelaa que
1collectif
seconstruit
entressant
lessensibilités
entreelles,
er
sentation
estrécognition,
répartition,
ressemblance,
reproduction ec l'espace
intermédiaire.
recourdupareilaumême,impuissance à penser
la différence
comme
conditiond’unenouvellecréation.Un champencorevierge,àcreuse II. APPRENDRE LESSIGNES
ur nos
relations aveclesmigrants.Deleuzeen appellecertesal
«faculté
desociabilité”
»dontl'exercice
transcendant
estla Révolution Les
signes
témoignent
despuissances
delanature
et del'esprit
quiagissent
usesmots,
lesgestes,
lespersonnages
etlesobjets
représentés.
Ilssignifient
lapuissance
socialedela différence,lacolèredel'Idéesociale.
Sila
l répétition
commemouvement réel,paropposition
à lareprésentation
faculté
desociabilité
s'élève
àcetexercice
transcendant,
elle brise
commefauxmouvement
del'abstrait,
l'unitédusenscommun,fétichedela représentation. PourDeleuze
la luttepratiquepassepar
la différenceet la puissance
d'affirmer,
«Larévolution nepassenullement
par
le négatif.
»Lenégatif
estle Lesensdeschosesestportépar la répétition,qui opèretrans-
corpsobjectif
dufaux-problème,
le fétiche
enpersonne,
quientrave versementsurdessituationsprétendues
identiquesousemblables
l'exercice
delafaculté
desociabilité. gar
lareprésentation. Larépétition,etl'apprentissagedessignes
qui
Larévolutionn’est
pasterminée
avecnoséchecs
etnoserreurs
de s'agence
avecelle,estouverture surl'infinidessituations
possibles
er
pensée,
elle resteunproblèmeà venirqui exigenotre
sortie descadres aur
leur transformation. Par
l'apprentissage,
Le sujetsedécentre
etse
dela représentation.
La multiplicitésocialedétermine
la sociabilité meren mouvement. Il sedécouvredifférent
etse forme àdenouvelles
comme faculté®
: ellen’apasdevisage définiunefoispourtoutes, pas acivités.
L'apprentissagedessignesqueDeleuze découvreicidansLe
declasse sociale
privilégiée.
«L'objettranscendantde
la sociabiliténe tavail
littéraire
deProustetdesartistes contemporains, estaucœur
peutêtrevécu quedanslebouleversement dessociétésparlaliberté.
» detoutapprentissage, quandcelui-cin'estpasimitation, maissaisie
À ladifférencedelatactique danslaquelles'engluelemouvement denouvellescapacités, créationd’un«faireavec ».Au-delàeneffet
social,
il nes’agit
paspourDeleuze deconstruireunealrernativequi
ne destypesd'apprentissage designessupposés par
les différents
cercles
serait
qu’une oscillation
parrapport àl'identité
dominante. L'exercice delamondaniré décrits parProust,
c’estlaposture d'apprentissage
transcendantde
la faculté desociabilité
nes'occupepasdeconstruire quinous intéresse
icicomme modalitéde
l’activitépolitique.
Nonpas
unegouvernance oudesrevendications relevant
duprogramme d'un appartenancepartisane,maisouverture àdesmondes différents
erdes
gouvernementà venir.Il estinstallation
delieuxdepartage dessensi- entreprises
multiplesd'agencements,engagement dans desfaire
concrets.
bilités,
d'écoutedesmotsavant ouau-delà dulangage, detracés de constructions,
occupations,
délégations,activités
empruntées
àun
lignesd’erre,
d'expérimentationdemoments deviecommune, toutes “pertoire
commun,
mais
revues
enfonction
d’«
accroches
»nouvelles.
choses quipeuvent setransporterdansdeslieuxordinaires, comme Chaque
activité
porteson
sens etsamémoire,
maissareprise
l’entraine
autres
pratiques
que
cellesdictées
parlareprésentation.
Uneréalité vers
une
autrehistoire,sitoutefois
lesanciensévitent
deforcersurla
évoquée
parlaclinique
deLaBordeoùtravaillait
Guattari,
parles mémoire
etLesjeunesde«romanticiser »,brefsichacun
seprotège
de
espaces
oùFernandDelignyvivaitaveclesenfantsautistes,
parleM15 htentation
de«représenter »oud'exercer
la dominationdumoment,
enEspagne, leMouvement des places enGrèce,lesgroupesdeprise Sn
étant
plusattentif
àlamatérialitédessignes
rencontrés
erenévitant
deconscienceduMLF,lescollectifsdejeunesévoqués dansl'ouvragé motshérités
dontonpeut les recouvrir.
Constellations,
àtitred'exemples.Autantdemicropolitiques
désirantes Paradoxalement,
c’estlesoucidelibertéinhérent
àl'exercice
trans-
tentées
icietlà.Danstoutes cessituations
s’épanouissent
descollectif: Cadent
delasociabilicé
quipeutlemieuxgarantircerespectréciproque
alors
que
la représentationliel’individuation
aujeeraumoi,exigeant ireaudéveloppementdetouteaction: libertépour
les autreset
a même,maintien
del'ouverture
despossibilités
d'apprentissage
7.Ibid,
p.269. 8 l situation
collective.
Danslefaireensemble,
le dynamisme
de
8.{bid,p.250. Stcréateur
d'espace,
instituteur
d'espace.
Danscetespace;
l
Deleuze
politique
avant
la rencontre
avec
Guattari32]
320 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

desunsn’est
pas«motrice
»desautres
commecelasepasse
dansl'
‘4 voirs
situés
dant »-Apprendre,
disjoint, — élever
avecuneintensité unefaculté
telle seàsonexercice
qu'elle
delareprésentation,
mais«sensorimotrice
».Lemessage
est: 4fais
avec communique
moi»etnonplus«faispourmoi»(àmaplaceoupourmefairePlaisi ne Il existepeut-êtred’autresmodalitésde
|’
apprentissage,
axe reconnaître aumoinsdeuxpermetdesortirdelavoieroyale
L'apprentissage
n'est
pasdéléguémaiscommun,
selondesmodaFe
inventer,
qui
font actuellement
l'objetdenombreuses
réunions
Le Àreprésentation,
etd'admettrequelesmodalités
d'apprentissage
«communs »: «bienscommuns »,«fairecommun»Quivontpeut-ér _. différerpour
les unset lesautres,requérant
desefforts
de
au-delà
dela proposition
deleuzienne
defaireensemble.
L'apprenti» ansmissioN
mutuelset de facilitationcollective,
Uneouverture
à nesefaitpasdanslerapportde
la représentation
l'actioncomme runeautre
façondevoir
les activités
éducatives
formelles,
même
reproduction
dumême (DR,p.35),etrapport
deconditionnement Écelles-ci
semblent
omises,
l'analysesemblantselimiterà l'approche
he partageable
dansunerecherchede
liberté, Dansunrapport
tendant
àl'équivalence,
oùl'imitation
permet
decorrigerdesgestes
sanseninstaurer
denouveaux. À ladifférence
delaSimpleimitation enseignement
oud'apprentissage,
quel
est l'agencement
collectif
lessignes
dumilieuaveclequelonentreenrelationsonthétérogènes
à onerer
quimeten
relationl'agencement
collectif
scolaire,
lemilieu
nous-mêmes,
signalantune
altérité. Ainsi l’hommequi veutapprendre enseignant,
Etl'agencement collectifenfantinetsesprolongements
ànagerdoitapprendrelessignaux
queluifaitlavague
sur lecorps
où urbains
ouvillageois? Lesexpériences sesontmultipliées
pourfaire
danslesyeux.Chaquecorpsapprend
différemment, c'est-à-dire
s'agence del'école
un « milieuapprenant»,cependant quelesmesures de
demanière différente
aveclemilieurelatif.Rapporté
ànotresouci désamorçage
decetapprentissage
collectif,
cherchant
à limiter
ses
politique,
l'apprentissage
deleuzien
souligne
ladifférence
derelation prétentions,
sesontégalement
multipliées.
aupolitiquede
l'ensembledesmilitants
ouparticipants
qui
sepressent L'apprentissage,
c'estlequestionnement,ladécouverte
delarichesse
dansunemême réunion.
Laproduction deslogans quinereflètent despoints
devueassociés auxdifférents
êtres,
ladécouvertedesdiffé-
que
les représentations
desdirigeants
créedessignes
dereconnaissance rences
etdelapensée!®. C'estaussila révélation
des«problèmes »
partiels,
quifontl'impasse
surl'ouverture
dechacun
àl'altérité
er etdeleursconditions,
queDeleuzedéfinitd’unemanière touràfait
empêchent laconstruction
d’unecapacitéd'accueil,
voirel'annihilent. nouvelle,
lapuissancede
se hisserau-dessusd’unesituation
etde«poser
Il estinquiétant
que,dansunevisionmolaire delapolitique,
certains unproblème
»,
dese livrerà uneexpérience
depenséeoud’initier
une
préconisentcettecapturedesaudiencespardesobjetspartiels
erdes expérimentation.
Cen’est quedel’intérieur
d’une
posture
d’appren-
signifiants
vides,
pourconstituer
unsystème «attracteur
» delafoule tissage
quetoutes
cespossibilités
s'ouvrent,
quandlareprésentation
etune capacitépolitiquemajoritaire.
On comprendici pourquoi le contraint
toujours
àlareproduction dumême. Apprendre,
c'est
poser
populisme atoujoursétédedroite,
malgré lesprétentionsdecertains desproblèmes,
condenserdessingularités,
composerdescorps
etdes
del’orienteràgauche. événements
idéauxsansjamais selaisser
capterparl’abstraction
et
Sedonner lapeined'apprendrelessignespeutsembler manquer l'extériorité
delareprésentation.
Apprendre,
c'est
composer
des
points
d’ambition parrapportaudéveloppement delatranscendance des singuliers
desonpropre
corps
avecceux
d’uneautre
figure,
oud'un
espaces desociabilité.
Maisc'estunepremière condition,unebase autre
élément
«quivous
démembre
»etvous
faitpénétrer
dans
des
porteuse delasensibilité
àl’autre.
Cette
altéritésedoubled’unfoison- mondes
deproblèmes
inconnus!!.
Apprendre
c'est
semettre
enjeu,
nement des idées,
delaproduction d’une«symphonie del'idée en .

discordante?
»,bien
éloignée
del'unicité
del’idée
querecherchent
les
tenants
dela représentation.
Apprendre,
er c’estcequi
l'oppose
àla
représentation,
c’estpénétrer
dansl’Idéeerlespointsremarquables
du
milieu
qu’elle
désigne,
différents
suivant
lescorpsquil'approchent,
comme celaaétédéveloppé
parDonnaHaraway etsonconcept
de
10.bi, p. 252,
9.Ibid,
p.191. 1L
bd, p.248,
Deleuze
politique
avant
la rencontre
avec
Guattari323
322 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

gacion.
Qu'il failleenunsensdisparaître
POursecouronner,
III. LESANARCHIESCOURONNÉES
ep ndividuer
53trajectoireetreconnaître
celle
desautres,
choque
trop
Il n'yapasàproprement
parler deproposition
Politique
dans R : on premièrepour ètrepris au sérieux.Pourtant,enopposant
la
Finçuit"
àrespecter
ledélire
erenfaire
cas,àl'ensemble
des
construc-
Différence
etrépétition,
quitiresesréférences
delalittérature
erl
3 ilosophiques
delareprésentation
?,Deleuze
suit
une
même
mythologie,
lespiliers
d'unebonne culture
classique.
À leurs
conf,
Deleuze
retient
la formulationd'ArtauddansHeliogabule
ou|anarchiste
Pi recherche
quecelle
deJeanOuryetFélix
Guattari,
dansun
Lecontexte.
Le systèmepolitiquedignede notreParticipation
couronné,
etla transpose
au pluriel.« Lesanarchies
Couronnées
»se
substiruent
auxhiérarchies
delareprésentation,
commelesdistributions ie paslesfous,bienaucontraireil enfaitdespoissons-pilotes,
nomades
remplacent
les distributions
sédentaires
etsedéploient
dans ds urdoués
etdesartistesdans
la saisiedela réalité.
À lalimitedu
desespacesillimités, de manièrenon appropriative.Qui a connula able,AntoninArtauddésigne
l'anarchiste
couronné
comme
as nage
conceptuel
decesystème.
ErleDeleuze
deDifférence
et
vieenassemblée
générale
etsacapacité
àsesaisir
detourcequipasse
à l'horizon,dansun grandeffortpour
l'égalité de touslesmembres méririon
estprêtàaccueillir
leGuattari
quitransformera
sesséries
en
présents,
grâce
àdestechniques
variées
dedistribution
delaparole, itionsmachiniques
etdésirantes.
Lachao-errance,
quis'oppose
acommencé d'expérimenter
cetteanarchie
couronnéeoùtoutes
les il cohérence
delareprésentation"
deviendralaChaosmose
àl'issue
têtes
acquièrent
uneégale
valeur
parladiversité
deleursapprentis- deleurtravail
commun.
sages,
cequineveutpasdireunevaleuréquivalente
pourunjugement
supérieur,
comme danslaproposition
populiste
quiessaie
derécupérer
cesmoments dansuneperspective
deprisedepouvoiretunretour
forcé2lareprésentation.
Dansl'assemblée
générales'acrualisent
desidées
multiples,sedéploie
unjeudifférentiel
d'initiatives,
àprendresoi-même etàpartageravec
quileveut.Foisonnement interrompu parceuxquiveulent tour
ramener à unmotd'ordreuniqueouà unedéclaration unanime,
c'est-à-dire
dontledessein estdeforcerlemouvement à unelogique
dereprésentation.
Lespassionnés,les «têteschercheuses »desséries
d'apprentissage
perdent duterrain. L'expansionhégémonique erle
centralismemontent enpuissance jusqu'à
produire uneimage stabi-
lisée,
quivarenvoyerles petitsgroupesdanslesmarges etl'invisibilité.
Quelques-uns+refoulent »l'anarchie,
quidevientprovisoirementun
souvenird'abordperçu sursafacenégative,danslacontinuité d’une
logiquederépressionetderefoulement. Laproposition deleuzienne
touteenintensité, imagée parlaproblématique schizophrénique
d'AntoninArtaud,
n'a paslastabiliténécessaire
auxfinspolitiques
pour
mettreenplaceune
stratégie deprisedepouvoir. C'estleregretqu'on
trouvechezlescommentateurslesplusproches,commeGuillaume
Sibertin-Blanc
ouJasonRead.
Danscescommentaires,
ledevenir-mineur
desséries
d'appren
tissage,
explorantleschosesparlesracinessouterraines
du rhizome;
estconfonduavecunêtreminoritaire,
qui devraitsetransformer
par
12.Ibid, p.70.
unsystèmed'alliance
enforcemajoritaire,
susceptiblededominerla
B.Hbid,,
p.80,
XXVII

Lecinéma
comme«artducontrôle
»:
stratégies
duretournement

Dork ZABUNYAN

Les
deux
livres
surlecinéma
deGillesDeleuze
onteuunvéritable
dfersismique
sur
ce quel’onnommeles«études
cinématographiques
»
l'enseignement
et la recherche
encinémaàl’université,
maiségale-
ment
surlacritique
decinéma,
etjusqu'aux
cinéastes
eux-mêmes,
comme
ManoeldeOliveiraquiavait exprimé
ledésirderencontrer
le
ilosophe
pourparler
avecluidutemps filmique!.
Trente
ansaprès
la
ication
deL'Image-temps,
lesrépliquesdeceséisme
sefontencore
sentir,
avec leurlotdelectures
enthousiastes
(surtout
chez
lesjeunes
générations),
demalentendus
persistants
(Deleuze
auraitméprisé
le
vaste
domaine
de
la culture
populaire,
auprofitdesseuls
chefs-d'œuvre
du
panthéon
ducinéma),
voire
dedénis
flagrants
:onpense
ainsi
que
Deleuze
proposeunehistoire
ducinéma
avec
sondipryque
surle 7‘art,
alors
quelapremière
phrasedeL'‘mage-mouvement
est:«Cetteétude
n'est
pasunehistoire
ducinéma.»
Laréception
deCinéma 1et2 mériterait
sansconteste
une
étudeà
part
entière,
enFrancecomme
à l'étranger,
oùlesdeuxvolumes
sont
devenus
devéritables
classiques
(enItalie,
auxÉtats-Unis,
auJapon,
«.).Toutefois,
ils'agira
plutôt
ici demettre enlumière
lesstratégies
critiques
qui
irriguent
les rextes
surlecinéma
deDeleuze,
ycompris

lettre
àSerge
Daney»qu’ilrédigea
en1986,prolongement
décisif
deL'Image-temps
parul’année
précédente.
Il faut
rappeler
que
l'essai
sur
l'art
desimages
enmouvementn’a pasconstitué
undélassement
°üunerécréation
pourlephilosophe,
encoremoins
—c'est
làune
ns
1.Comume
l'arécemment
rappelé
Raymond
Bellour,
cf.«Lecielesthistorique
»,
2Leins n°711,
mai2015,
p. 104.
Image-mouvement.
Cinéma
1,Paris,
Éditions
deMinuit,
1983,
P.7-
TX
326 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE Lecinéma
COMME
©artducontrôle
»:stratégies
duretournement
327

hypothèse
quia puêtreavancée
—uneespèce
derégression
suru
I.LATÉLÉVISION
:
UN«RELAIS»POUR
LE CINÉMA
planpolitique,si on le compareà certainslivresen apparenceDn
«engagés»quile précèdent
(comme Milleplateaux).
Auis)
puisque
L'?mage-mouvement
et L'Image-temps
esquissent
unerecon
f. Chez
Deleuze,
laportée
critique
ducinéma
s'affirme
enoutre
dans
guration
dupolitique
qui,loindetrahir
sabibliographie,
la prolon j relation
quecelui-ci
entretient
aveclesautres
types
d'images
en
etlarelance
suruneautrescèned'engagement,
queDeleuze“ts. mouvement,
COMME celles
delatélévision,
delavidéo,
dujeuvidéo
de
d’ailleurs
de«révolutionnaire*
». nos
jours
OÙdesimages
quicirculentsur
internet.Nousavons
affaire,
C'estcequi expliqueentreautrespourquoinouspouvonsnous dans
L'Image-temps,
maisaussidans
la «lettre
àSergeDaney»,àune
revendiquer
deleuziens
aujourd'hui,
dansla«civilisation
del'image
» vérisable
théoriecritique dont nous ne Soupçonnonspastoujours
qui estla nôtre,même
si celle-cia connu desmutationsmajeures L portée
oulapertinence
pournotreprésent.
Sionlaconfronte
à
depuis
lemilieudesannées 1980.Laportée
critique
dl'essaisur
e le l'ige
del'image
auquel
nousappartenons,
onytrouvera
peut-être
cinémas'affirme
surtout dansL'Image-temps,oùsedéploie eneffer une
raison
supplémentaire
deserevendiquerdeleuzien
aujourd'hui.
uneorientation
politiqueclairement
posée
parDeleuze.Elles'énonce, Commesouvent
chezlephilosophe,
la critique
n’est
riensielledemeure
on
le sait,auchapitre7 decesecond volume,
intitulé«Lapensée er ractive,
siellesepositionneuniquement
contre, dansunrapport
lecinéma»,etlatâchequi nousincombealorsestderetrouver le lien amagoniste
quiplacerait
lecinéma
aupied
dumur
: lecinéma
contre
del'hommeetdu monde.Ou plusexactement, la«croyance »ence htélévision,
lecinémacontrelesnouvelles
images,
etc.Deleuze
n’a
monde-ci,écantdit —c'estle « fait moderne» révélépar
le cinéma jamais
cruenderelles
oppositions,
comme
il n’ajamais
adhéré
àl'idée
après-guerre
—quenous«nousnecroyons
plusencemonde.
Nousne d'une
hiérarchie
entre
unartducinéma
prétendu
noble
erlamyriade
croyons
mêmepasauxévénements
quinousarrivent,
l'amour,
lamont, d'images
relevant
d’unecultureditepopulaire.
Il nefaudra
jamais
commes'ilsnenousconcernaient
qu'àmoitié“».Le moteurdecerte assez
lerépéter
: certedistinction
entrehaute
etbasseculture,
sielle
croyance,
nouslesavonsaussi,
c'estcequeDeleuzeappelle
lephéno- peurêtre
effective
dans
les faits,n'est
guèrenormative
chezDeleuze,
mène devoyance,
c'est-à-dire
lavisionélevée
àsonexercice
supérieur; «l'élitisme
présumé
quienserait laconséquence
—c'est
unreproche
une
visionensurrégimequifonctionne
sansles schèmes
inoffensifs
de queles
«étudescinématographiques »luiontsouvent
adressé—ne
lasensori-motricité,
caractérisés
parunereconnaissance
automatique tentpas
uneseconde
si l’onconsidèrel'attention
concrète
qu'il
portait
decequinousentoure etparunjeud’action etderéaction
apaisant par
exemple
auxclipsvidéo,auxsketches
deBennyHill, ouencore
oùsedéroule
laplusgrandepartiedenosexistences’.
Deleuzeprendra aux
play-back
deClaudeFrançois£.
soinderepérer
danslamodernitécinématographique
rous lesperson- Donc,
pasd'opposition
deprincipe
à latélévision,
quiintéresse
nages
qui—delafigure
d’Irène
(Ingrid
Bergman)
dans
Europe
51de pour
lesvirtualités
créatrices
qu'elle
contient
àundouble
niveau,
Rossellini
àLaFemme duGange
deMarguerite
Duras,
enpassant
parle “audio
»et«visuel».À l'instardelavidéo,
comme
lemontrent
Les
prince
Salina(BurtLancaster)
dansLeGuépard
deVisconti
—SOnttous pages
sur
Michael
SnowouNamJune
Paikenconclusion
deCinéma2,
devenus
desvoyants
et, parlavoyance,
ont
su restaurer
demultiples ‘télévision
constitue
unvéritable
«relais
»pourlescinéastes
qui
manières
celiendel’homme
etdumonde. Femparent
deces
nouveaux
médiums,
comme entémoignent
Les
films
ons
*Voirenparticulier
la«Lertre
à Serge
Daney: optimisme,
pessimisme
&t
ne 1986)
repris
dans
Pourparlers,
Pa Éditions
deMinuit,
1990,an
3.Àcer
égard,
voir
Dork
Zabunyan,
Les
cinémas
deGilles
Deleuze,
notamment
le
Gi que»
Ccomme
CuLA Glen
Ernie aautant
defonctionesthétique
mr “bg Len de
chapitre« LesenfantsdeMai 68 », Paris,Bayard,2011,p. 143-160.
4.L'Image-temps.
Cinéma
2,Paris,
Éditions
deMinuit,
1985,
p.223.
5.Sur«l'exercice
supérieur
»desfacultés
dans
leslivres
surlecinéma
deNL bique
del'in ),disponible
enDVDauxéditionsa néesdeGilles
on
LE voirDorkZabunyan,
GillesDeleuze.
Voir,
parler,
penseraurisqueducinéma
dé Débury…."Sme supposé
deDeleuze,
voirDorkZabunyan,OUTÉolaise
d
Paris,
PSN,2008{2°éd.]. lexpérie
%.dit,enparticulier
lechapitre
«“Danslatête
duspectateur
Cinématographique
»,p.109-122.
D.
ia comme
«artducontrôle
»:stratégies
duretournement
329
328 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

n,QU'EST-CE
QU'UN«ARTDUCONTRÔLE
»?
pourlaTV deRossellini
(analysés
dans
le chapitre
9 deZImage-tem
«Lescomposantes
del'image
»),lesessais
deGodard
(comme Si,2 Celàque
Deleuze
vaélaborer
unenotion
étrange
qui
semble
taillée
deux,
auquel
Deleuzeconsacre
l'undesespremiers
longstextes
pin notretemps;une notion opératoirepour
se repérer
et trouverdes
lesimages
animées,
souslaforme
d'unfaux
entretien
avec
lesCohigpe
ducinéma).
Toutefois,
cetaccueil,
parlesréalisateurs,
d'autres er l'intérieur
d’unâgemarquéparuntrop-plein
d'images
- unâge
. comme
l'écritDeleuze
dans
lesillage
deSerge
Daney,
«l'image
glisse
d'images
s'établit
enfonctiond'une
alternativequipeutparaitre
toutà mn suruneimage préexistante,
présupposée,
quand
le“fondde
faitnuisible
aucinéma.
Eneffet,
soit lecinéma
trouve
dans
cesimages
le
terrain
denouvelles
expérimentations,
denouvelles
inventions,
soitcs Rneetttoujours
déjàuneimage”,
àl'infini?
».Cequi
vapermettre
relais
constituent
une
réellemenaceàsonexistence,
aveclerisque
que denous
orienter
danscevastemagma d'images
enapparence
indif-
» cœux-ci
entraînent,
ni plus,nimoins,
sadisparition.
C'estleproblème férencié,
c'est
ledéveloppement
d’un«artducontrôle
: expression
poséparDeleuzedansles«conclusions»deL'?mage-temps:«L'image mystérieuse,
quin'enpossède
pasmoinsunevocationprogramma-
électronique,
c'est-à-dire
l'imagetéléou vidéo,l'imagenumérique sique,
positive
malgrélesapparences. De quois'agit-ilexactement
?
naissante,
devaitoubientransformer
le cinéma,ou bienleremplacer, [s'agit
des'imprégnerde la « fonctionsociale»delatélévision,
de
enmarquer
la mort”.»Mêmesi Deleuzeneprendpasausérieux l'idée simmerger
danssesproductions
que
l'on estime
parfois
médiocres
d'unemortducinéma —uneidée«débile»selonlui—,il n’enreste ouéœurantes
(commele traitementdle'information dansunJT),
pasmoins que
l'on retrouvecertealternative
entretransformation
et desuivre
deproche
enproche
cette «froide
organisation
deladébilité
disparition
ducinéma dans
la «lettreàSergeDaney». Elles'exprime ducrveler
»queDeleuze
entrevoit
danscertains
desesprogrammes,
certe
fois suivant
une
distinctionconceptuelle
quimobilisedeux genres par
exemple
danscequ’ilappelle
le«marché
delachansonnerte
»,
defonctiondl'image:
e unefonction «esthétique
»etunefonction «crise
d'épilepsie
minutieusement contrôlée»,quin’estpassanslien,
«sociale
»,lapremièreoùlatélévision
estunvecteurdecréationpour d'après
lui,avec
leseffets
engendrés dansl’entre-deux-guerres
parles
lecinéma,
la seconde,
aucontraire,
oùellel'empêche
d'avancer,
dese gandes
propagandesd’État(latélévision
comme nouveaufascisme?)°.
transformer
: Imprégnation,
immersion, quasi-empathie avecl'insupportable
:c'est
Bl'une
destâches
ducinéma danslesannées 1980,la condition
deson
silecinéma cherchaicdanslarélévision
etlavidéoun«relais»pour les nouveau
combat,comme le lieuoùil conquiert unenouvelle
dimen-
nouvelles
fonctions
esthétiques
etnoétiques,
latélévision
desoncôté
(malgré Sion
critique
—par«retournement »del'ennemisur sonpropre terrain.
depremierseffortsrares)
s’assurait
d'abordunefonction
sociale
quibrisait esttrès
clairsurcepoint: silatélévision
est«laforme
sous
d'avancetoutrelais,
s’appropriait
detoutautres
pouvoirsauxpossibilités
de laquelle
lesnouveaux pouvoirs
de«contrôle »deviennent
immédiats
beautéetdepensée®. &directs
»,alors
il importe
d'
Latâche
descinéastes
n’est
cependant
pasdesubir
certe
dichotomie aller
aucœurdelaconfrontation,[ensedemandant]
si lecontrôle
nepeut
anesthésiante.
Maiscomment faire
ensorte
quela«fonction
sociale
» Pas
être
retourné,
misauservice
delafonction
supplémentaire
[c'est-à-dire
miseenévidence
icinetriompheendéfinitive
dela«fonction
esthé- Sthérique]
qui
s'oppose
aupouvoir.
tique»abordée
parDeleuzedanssa«lettre
»aucritique?
. Avant
d'ajouter
—etc’est
pratiquement
unprogramme
pour
les
dutemps
présent
:

7.L'Image-remps,
op.cit.,p.346. :
8.«Lettre
àSerge
Daney :optimisme,
pessimisme »,9p.GifP- 101-102
ervoyage
pour
lacitation
(souligné
parDeleuze).
ee p.107,
"idP.109
etp.106
pour
laréférence
aufascisme.
peintscomme
«artducontrôle
»:stratégies
duretou su
330 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

inventer
unartducontrôle,
quiserait
commelanouvelle
résistance,

‘ nullité d
| Ja production
. se ériau cinématographique
d'images
dans
lequel »outélévi
ilfaudra
nue
: 7" « é * l'Ofter
lutteau cœurdu cinéma,faireque le cinémaen fassesomproblèmea “
: au
frc'est tou rvenir
àle«retourner
».C'est
là quenousNess he
delerencontrer
dudchors. Pa delavoyance
ji veut car,demêmeque
le VOÿant
voitpar-delà
pet quinousempêchent
phénomène depercevoir
littéralement
leschoses,
D'où,aussi,
cetétatde«crispation
»annoncé
parDeleuze
bo arsbres dontll estquestiondans la «lettreà SergeDaney
»
deDaney,certesériede«convulsions »entrel'artdu cinéma etls ne voirsans
esquive l'intolérable,
l'insupportabledes«données
imagesquis'en distinguent,lesquelles
peuventtoutà faitlis
es »véhiculé
parla télévision,
la publicité,
lesmauvais
films,
enretour,mêmesi lecinémagardecettepossibilité dles
e rer“e. figurati
de
les renverser: moment« où lecinémas'appuiepour se reteurser _sionveut
parvenir
àleurrésister.
C'est
encesens
quelaposition
contreLesystème qui veutlecontrôlerou lesuppléerlui-mémer, dtique
qui
sedégage
de certe
stratégie
deretournement,
outre
qu'elle
D'unecertainemanière, lecinéaste
setrouvedanslamêmesituation àtoute
lecture
catastrophiste
(letrop-plein
d'images
serait
la
quecelledupeintredécriteaudébutdu chapitre11deLogique dela ause
d'unedéréalisation
du monde),nefcposepassuruneopposition
sensation
(«Lapeinture,
avantdepeindre.»).11n'yapasde«surface fonale
entre
lesmédiums, danslamesureoùlecinémasesitue
plucèt
blanche
»pour
le peintre,
commeil n'yapasd'écranimmaculé
pour dnsunezoned'indiscernabilité
oùl'abject
côtoielemeilleur,
oùde
lecinéaste;
l’un etl'autreaffrontent
toutes sortesde«données
figura- l'abject
même peutsurgirlemeilleur.
Deleuzeneditpasautre
chose
tives»avantdecommencer à peindreune
toile ouàtournerunfilm. d'ildéclare
àDaneyque,dans le «maniérisme »enquoiconsiste
Comme
le soutient
Deleuze
danssamonographie
surFrancis
Bacon œute
«convulsioncinéma-télévision
»,«voisinent
le pireetl'espoir!
».
parueen1981:«Lafiguration
existe
»(sous-entendu
: lafiguration
non Sil'onconsidèrelesauteurscitéspar Deleuzedanssondiptyque,
artistique,
nonpicturale),
« elleestmêmeun préalableàlapeinture» fun
d'encre
euxcorrespond
parfaitement
à ceretournement
propre
à
précise-t-il.
Defair, «l'art
ducontrôle
»qu'ilappelledesesvœux.Cetauteur
estFederico
Fellini,
Audébuc
deL '?mage-temps,
lephilosophe
analyse
eneffet
les
nous
sommes
assiégés
dephotos
quisont
desillustrations,
dejournaux
quisont «visions
»ducinéaste
italien, visionsdevoyant,
forcément,
quiont
desnarrations,
d'images-cinéma,
d'images-télé.
1]y adesclichés
psychiques wujours
manifesté
uneforme d'affection
pourlesétats
decorruption
autant
quephysiques,
perceptions
toutesfaires,souvenirs,
fantasmes
!?. oudedécadence.
Fellinia toujoursprissoindelesobserver
avecune
fculté
devoirindifférenteàladérobade ouàladénégation,
éprou-
Er Deleuze remarque bienqueces«données figuratives
»,qui mntaucontraire
unecurieuse sympathie pourcesétats
proches
dela
reposent surdesreproductionsquinecessent deglisserlesunessur déroute
affective
ouexistentielle.
C’est
ainsi queDeleuzeécrit
dans
lesautres,decirculer
dansunvaste espacedesignes visuelsentout Cinéma
2que
les
genre,«nesontpasseulement desmoyens devoir»,puisque «c'est
elles
quonvoit,etfinalementonnevoitqu'elles»,rejoignant
en cesens les visions
deFellinisontinséparables
d'une«empathie »,d'une
sympathie
manières dontla«fonctionsociale » delatélévisionforcentnotre subjective
(épousermême ladécadence
qui
fair qu'on
aimeseulement
en
regard,régentent
notrevision'?, tveouensouvenir,sympathiser
avec
cesamours-là,être
complice
dela
«L'artducontrôle
»suppose luiaussi
que
le réalisateur
estenvironné décadence,
etmêmelaprécipiter,
poursauver
quelque
chose,
peut-être,
d'imagesdetoutes
sortes:clichésaudiovisuels,
imageriesdominantes, autant
qu'il
est possible...)
Deleuze
ne
cite pasGinger
etFreddeFellini,
quisortsurlesécrans
11.Jbid.,p.107: «son»estsouligné
parDeleuze,
noussoulignons
les occurrenes
duverbe«(se)retourner
», :
lmêmeannéequeL'Image-temps,
maisvoilàbienun«filmsurla
12.GillesDeleuze,
Francis
Bacon.
Logique
delasensation
1981),Paris,
Seuil, nm

2002,
p. 84. e «Lettre
àSerge
Dancy
»,op.cit,p.109.
13./bid.,
p.86. “Gilles
Deleuze,
L'Image-temps,
op.
cit.
pe14.
y inéms
comme
«artducontrôle
»:stratégies
duretourne 333
332 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

télévision
»oùlalucarne
télévisuelle
estpresque
detouslesplans
—S gra peintres
les savent
brenir qu'il
unvrai nesuffit
rire, pasde
unevraie mutiler,
malmener,
déformation
?. parodi
filmquitentede
la retourner
sur sonpropre
terrain,conformément
à Jediché
pour©
uneposture
souvent
défendue
parFellini
: «cen'est
pasuprocès
n fair
C'est rquoilerecournement
invoquéparDeleuze
estunetâche
parunjuge, c'estunprocès faitparuncomplice. »GingeretFred :un
filmoùcoexistent
bien «lepireerl'espoir
», où
la laideur duspectacle ent
difficile.
L'immersion,
voire
la«sympathie
»avecl'ennemi
célévisuel
estdonnée àvoirauspectateursansqu'aucuneleçon lui
soit getcondition nécessaire
(maispassuffisante),
sachant
aussiqu'iln'y
» faitesursanullité,
etoùmême unpeudegrâce est«sauvé: chez les spas
d'art
ducontrôlesansphénomène devoyance, puisque«c'est
cela
quil
fut voir»,justement —ladécadence, lavulgarité,
l’intolérable
techniciens
del'émission«Eccoa Voi»,quel'on aperçoitfurtivement,
ouchezcelles etceuxquiy participentsanstropycroire, comme les dans
tous
lescas—,comme y exhorte
lephilosophedanssa«lettre
»au
personnagesdeGingerRogers etFredAstaire,interprétés
parGiuletra dique.
«Celaqu'ilfautvoir»,cesontaussi
bientous lespouvoirsde
Massina erMarcello Mastroianni. œntrôle
erdesurveillance
quipassentparlatélévision,
aujourd’huiles
ordinateurs,
etc.Étant
dit, biensûr,quetourdépend desusagesque
I. LE «RETOURNEMENT» : l'on
enfair,etqu'il n'y a pas,répétons-le,
decondamnation
4priori
UN CONCEPT CRITIQUE QUI TRAVERSE de
cesmédiums
parDeleuze,danslamesureoù«latélévision
aautant
TOUTE L'ŒUVRE de
fonction
esthétique
potentielle
qu'unautremoyen d'expression»,
Encore
une
fois,l'argumentd’unélitisme
deDeleuze netient
pas,
« 11fauindiquer ici queleretournement del'art ducontrôle »se ailest
àparier
quele philosophe
aurait
étéintrigué
parlephénomène
distinguetrèsnettementdesstratégies
dedétournement que
l'on peut actuel
desséries
télévisées,
dontcertaines
(LesSopranos,
Breaking
Bad,
trouverà l'œuvre danslesapproches detypesituationniste oupost- ac)mettentenlumière lespotentialités
expressivesdelatélévision
siruationniste,
lesquelles
procèdent souvent parparodie oumoquerie -par
leurdurée,par
leur construction
sérielle,parlesfigures
d'acteur
decequiestdénoncé. Nulledénonciation
decegenre chezDeleuze,à oud'actrice
qui
reviennentd’unesaisonàl’autre,erc.-, potentialités
larecherche d’uneposturecritique
plussobre,quinerombe pasdans d'expression
luiconférantunespécificité
médiumnique quinedépen-
lespiègesdurirejauneoude la raillerie.
Fellini,pour
reveniràlui, drait
plusuniquement ducinéma etdesonhistoire, même sil'un
et
neparodie paslatélévision,
demême queFlaubert neprenait pasla l'autre
necessentpasd'influencerlescréateurs
desériesTV.
plume pourproposer unbétisier
desonremps. Deleuze insiste
surcerte Pourterminer,
uneprécisiond'ordreconceptuels'impose,
quipeut
exigencedesobriété endiversendroits
desonœuvre. Surl'expérience ouvrir
surunproblème réellementpratiqueenmatière decinéma
delabêtise
etdesareprise
enart,enparticulier
dans
les pages
bien entour cas
decinémadit «derésistance»,outoutsimplement doté
connues
deDifférence
etrépétition,
il déclare
ainsique d'une
portée
critique,apparente
ou pas.On aimerait
faireporter
certe
Précision
surleconceptderetournement
propre
à«l'artducontrôle
».
laplusmauvaiselictérarure
fairdessottisiers;maisla meilleure
furhantée lon parcourt
lereste
del'œuvre
deDeleuze,
onserend compte
que
parle problèmedela bêtise,qu'ellesutconduirejusqu'auxportesdela ‘elui-ci
n'apparaît
passeulement
aveclarédaction
dela«Lettre
àSerge
philosophie,
enluidonnant
route
sadimension
cosmique,
en ique ey»;ilest
déjàeffectif
ailleurs,
etilsera
également
opératoire
par
etgnoséologique
(Flaubert,
Baudelaire,
Bloy)*. suite,
après
laparution
del'essai
surlecinéma.
Nous
letrouvons
: &xemple,
dansuneoptiqueautrequ’esthétique,
dans
la21*série
Ou encoredansLogique
delasensation,
oùlaluttecontrelesclichés Logique
dusens,
lasérie«Del'événement
», où
il s’agit
d'une
autre
nepeut
seconfondre
avec
lesimple
faitdelesparodier
: rquètequecelled’unactedecréarion
sesoustrayant
auxclichés
sou àuneimagerie dominante.
Maisydemeurenéanmoins
EE mn

16.
Id,Différence
etrépétition,
Paris,
PUF,1968,
p.196. : »” Logique
*Lettre delasensation,
àSerge Paris,LaDifférence,
Daney»,op.cir.,p. 103. 1981,
P. 85.
332 AGENCER
LES
MULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE Lecinéma
comme
€7+ducontrôle
»:stratégies
duretournement
333

télévision
»oùlalucarne
télévisuelle
estpresque
detouslesplans: jesgrands
peintres
savent
qi Lossuffitpesdemutiler,
malmener,
parodier
filmqui
tentedelaretourner
sursonpropre
terrain,
conformémen jecliché
pourobtenir
unvrairire,unevraie
déformation
"7.
uneposture
souvent
défendue
parFellini: «cen'estpasunprocès
fair
parujuge,c'est
n unprocès
faitparuncomplice.
»Ginger
erFred:
un C'est
pourquoi
leretournement
invoqué
parDeleuze
estunetâche
filmoùcoexistent
bien«lepireet
l'espoir »,oùlalaideur
duspectacle ement
difficile.L'immersion,
voire
la«sympathie
»avec
l'ennemi
télévisuel
estdonnée àvoirauspectateur
sansqu'aucune
leçon
lui ae estlacondition
nécessaire
(mais
pas
suffisante),
sachant
aussi
qu’il
n'y
faite
sursanullité,
ecoùmême unpeudegrâceest «sauvé
»:cherk apsd'artducontrôlesansphénomènedevoyance,puisque«c'est
cela
techniciens
del'émission«Eccoa Voi
», que
l'on aperçoit
furtivement, ilfautvoir»,justement—la décadence,
lavulgarité,
l'intolérable
ouchezcelles
erceuxquiy participent
sanstropy croire,commeles a tous lescas—,commey exhortelephilosophe
danssa«lettre»au
personnages
deGingerRogers etFredAstaire,
interprétés
parGiulerra critique.
«Celaqu'ilfautvoir»,cesontaussi
bien
tous lespouvoirs
de
Massina
etMarcelloMastroianni. contrôle
etdesurveillance
quipassent
parla télévision,
aujourd’hui
les
ordinateurs,
erc.Étant
dit, biensûr,quetoutdépend
des
usages
que
III. LE «RETOURNEMENT
»: l'onenfait,etqu'il n’ya pas,répétons-le,
decondamnation
4priori
UN CONCEPTCRITIQUE QUI TRAVERSE de
ces
médiumsparDeleuze,
danslamesureoù«latélévision
aautant
TOUTE L'ŒUVRE de
fonction
esthérique
potentielle
qu'unautre
moyend'expression
»,
Encore
une
fois, l'argument
d’unélitisme
deDeleuze
netientpas,
» Il fautindiquer
ici quelererournementde«l'artducontrôle se exil
est
àparier
quele philosophe
aurait
étéintrigué parlephénomène
distingue
très nettementdesstratégies
dedétournementque l’on peut actuel
des
séries
télévisées,
dont
certaines(Les
Sopranos, Breaking
Bad,
trouver àl'œuvre danslesapproches detypesituationnisteoupost- exc.)
mettentenlumière lespotentialités
expressives
delatélévision
situationniste,
lesquelles
procèdentsouventparparodie oumoquerie - par
leur
durée,parleurconstruction
sérielle,parlesfigures
d'acteur
de
ce quiestdénoncé. Nulledénonciation
decegenre chez Deleuze,à oud'actrice
qqui
reviennentd’une
saisonà l’autre,
etc.—,potentialités
larecherche d’une posture
critique
plussobre,
quinerombe pasdans d'expression
luiconférantunespécificité
médiumnique quinedépen-
à lespièges durirejauneoude la raillerie.
Fellini,pourrevenirlui, drait
plusuniquementducinémaet desonhistoire, même sil’unet
neparodie paslatélévision,
demême queFlaubert neprenait pasla l'autre
necessent
pasd’influencer
les créateurs
desériesTV.
plume pourproposer unbêtisier
desontemps.Deleuzeinsistesurcerte Pour
terminer,uneprécision
d'ordreconceptuel
s'impose,
quipeut
exigencedesobriété endiversendroits
desonœuvre. Surl'expérience ouvrir
surunproblème réellement
pratique
enmatière
decinéma
delabétise
etdesareprise
enart,enparticulier
danslespages
bien Entourcasdecinéma
dit «derésistance
»,outoutsimplement
doté
connues
deDifférence
etrépétition,
il déclare
ainsique d'une
portéecritique,apparenteou pas.
On aimeraitfaireportercerte
sur
le Précision
Sur Leconceptddreetournement
_ propre à «l’art
dduc
l'art contrôle
uontrôle
».
laplusmauvaise
littérature
faitdessottisiers:
maislameilleure
futhantée SionParcourt lereste
del'œuvredeDeleuze, onserend compte
que
parleproblèmedelabétise,
qu’elle
sutconduire
jusqu'aux
portes
dela Celui-ci
napparaît passeulement
aveclarédaction dela«lettre
àSerge
philosophie,
enluidonnant
routesadimensioncosmique,
encyclopédique ‘y»:il estdéjàeffectif
ailleurs,etil sera
égalementopératoire
par
etgnoséologique
(Flaubert,
Baudelaire,
Bloy)'f.
ülte,
après
laparution
de
l'essaisurLecinéma.
Nous
letrouvons
u xemple,
dans
uneoptiqueautrequ'esthétique,
dans
la21*
série
Ouencore
dans
Logique
delasensation,
oùlalutte
contre
les
clichés
qe dusens,
lasérie«Del'événement
»,où
il s’agit
d’une
autre
nepeutseconfondre
avec
lesimple
faitdelesparodier
:
L. quecelle
d’unacte
decréation
sesoustrayant
auxclichés
“Oiants
oùàuneimagerie
dominante.
Maisydemeure
néanmoins
Id, 17. Loi
16.
Jd.,
Différence
etrépétition,
Paris,
PUF,1968,
p.196. 18. delasensation,
Paris,
LaDifférence,
1981,
p.85.
16àSerge
Daney
»,op.cit.,p.103.
334 AGENCER
LES
MULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE
be po«gacomme
*ATducontrôle
»:stratégies
duretournement
335

l'idéed'unetransformation,
«retourne»cetteimagerie
commele cinémasetransforme |
oucesclichés
contreeux-mêm,
es.Enf dil
pisde
POELE
=UEag»oùne
Voirdelavérité,
dirigécette
nue Dre danslesillage
foiscontre
deLa Volonté
lesPouvoirs,
desavoir
(1976),
De
etlesdeux
rence,
ils'agit
de
la conquête
del'impersonnel,
cequeDeleuze
MAT Res desonHistoiredela sexualité
neParaîtront
quehui
em card.
Pour
lui, Foucault
renouvelle
l catégorie
dePouvoir
splendeur
du on {...]cellede laquatrième
personne
» momens,
del'événement
delamort,«lepointoù lamor seretourne
us al int
. àcelle devérité,
Surveiller
et et la«contre-stratégie
punirconstitue
«unematière , envisagée
reuraeble
coume
oùlemourirestcommeladestitution delamort Mon, far ir?!».Orc’est
là unpointdedésaccord
entre
lesdeux
Philo-
nv carDeleuzen'adhèrepasàlaposition
deFoucault,
quidonne
etoùl'onatteint
«cepointmobile
etprécis
oùtouslesévé sp ression
dedirequelesdispositifs
depouvoirsontPremiers,et
seréunissent
ainsi dansun seul[et]s'opèrela transmutation!?
De résistance
qu’onpeutleur offrirendépendnécessairement.
On
rexouve
Le
verbe
«se
retourner
»dans
Le
chapitre
«Géophilosnhs _ Deleuze,
aucontraire,
le«statut
desPhénomènes derésistance
»
deQu'est-ce
quelaphilosophie?,
dansunpassagequiportesurLi mine problème
»,puisquecequiestpremier,
d’aprèslui,cesont
relation
susceptible
d'exister
entre
laphilosophie
moderne
er Jecapital
sg 1 defuite»; cesontellesles«déterminations
premières
»,
la«déterritorialisation
»ducapital,
danslaconstitution
«d'unnouvesx
peuple
»(corrélat
du«peuple
quimanque
», présent
dans
L'image arc'est
le«désir»,vecteur
de
ces «lignes
de
fuites»,qui«agence
le
temps).
Ici, l'opérationconceptuelle,
danssadimension
Critique, dump social
»corrélativement.
EtDeleuzedepréciser
:
semble
trèsproche
despages
dela«lettre»à Daney,
ausens
oùk
retournement
préconisé
engendre,
localement,
unanéantissement
des cesontplurôtlesdispositifsdepouvoirqui,à lafois,secrouvenc
produits
forces
ducapital
quisontcombartues
: parcesagencements,
et lesécrasent
oulescolmarent2.

Laphilosophie porteà l'absoluladécerritorialisation


relativeducapital, C'est
enrebondissant
surcetéchange
àdistance
entre
Deleuze
et
ellelefairpasser
surlepland'immanence commemouvement de l'infini
er Foucault
quenoussouhaiterions
conclure,
ensoulevant
unproblème
lesupprime entantquelimiteintérieure,
L retourne
contresoi,Pourenappeler qui
engage
ladimension
critiqueenveloppée
danscegeste
deretourne-
à unenouvelleterre,à un nouveaupeuple.Mais elleatteintà la formenon
ment,
àtravers
ladérerminationd’une«matièreretournable
contre
le
propositionnelle
duconceptoùs'anéantissent
la communication,
l'échange, pouvoir
».Danssesétudes
sur
les images(peinture,
cinéma),
il semble-
leconsensus
etl'opinion. rait
quel'affrontement,
des«donnéesfiguratives
»dominantes
avec
lemondedesclichés
soitpremier,
etquel’actedecréation
vienne
Lacommunication correspond
ici aunouvelennemi
de laphiloso- ‘une
certaine
manièreaprès—pourlesretourner,
justement,
etpar
phieetdel’art,aprèslabêtise
dansDifférence
etrépétition,
ouencore &retournement
les critiquer,
les«anéantir
»etpeut-être
«sauver
lesclichés
dansLogique delasensation
oulediptyque
surlecinéma. quelque
chose,autantqu'il estpossible» (comme
il estécritdans
Letroisième usageduverbe « (se)retourner
»quenousaimerions
L'Image-temps).
Or laremarque
adressée
àFoucault
laisserait
plutôt
invoquericisesitue
dansledialogue
à distance
instauré
en1977 avec Groire
que,
parextension,
toutacte
decréation,
envisagé
comme
«acte
Michel Foucault,
dialogue
quiprend uneforme
épistolaire
avecLalertre
derésistance
»—résistance
àuneimagerie
commune, àlamédiocrité
de
intitulée
«Désiretplaisir».Danscetexte,
Deleuze
questionne
Foucault kproduction
Courante,
àtoutlemonde
de lacommunication
visuelle,
surl'articulation
entredeux
rypes
devérité
: unevérité
produite
par %:— cetacte
decréation
encinémacomme «artducontrôle
»serait
mmeladoublure d’un«retournement
»initial
decematériau
impur.
19.
Gilles
Deleuze,
Logique
dusens,
Paris,
Éditions
deMinuit,
1969,
p.178-179 nager
(noussoulignons). _—.
20.Jd.,Qu'est-ce
quelaphilosophie
?,encollaboration
avec
Félix
Guartasi,
Paris. a tnt etplaisir»,1977,repris
dansDeuxrégimes
defous,
Paris,
Éditions
Éditions
deMinuit,
1991,p.95(souligné
parDeleuze). 2 Ibid »P-118(nous
soulignons).
336 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECD'ELEUZE

Etnonquel'acte
decréation
serait
unedétermination
XXVIII
Première,
si|'
suitleraisonnement
deDeleuzedanslalettre
qu'ilenv »sil'on
; unequestion
C'est : quel'onpourrait
, à poser
pour oie
finir aux àFoucauhr
ren
qu'est-ce
quiestpremier
finalement
?Latâche
ducinéma
ons Ledevenir
d’Olivia
aupaysdeShonda
d'abord,
en lesretournant,
denousdélester
del'univers
bi sstil
images
communicationnelles
?Ou cequicompte,
avantee
imentation
dedésirs
etproduction
désir
decréation
quipropose
unnouveau
découpage
desactions
erL
choses,
dont
les clichés
etlesimageries
entoutgenrefontPartie,
mais
dont
la critique neserait
qu’une conséquenceindirecte?
Laréponse
appartientauxcinéastes
; elleseloge,peut-être
imperceptiblement,
KPËDÉTIN
MARIQUIAN
AHOUANSOU
danslesfilmsàvenir.

Lefait quelasubjectivité
soitdevenue,
dansLecadre
denos
sociétés,
objet
deproduction
demasse,aumêmetitre
que
d'autres
marchandises,
etqu'ils'agisse
d'une
marchandise
quiconditionne
laproduction
desautres
marchandises,
une
marchandise-clef,
unesorte
dematière
première
fondamentale
deroutautretype
deproduction,nonseulement
debiens
maisaussi
desocialité,
lefairqu'on
ensoitvenu
làdois
aussi
biennousamener
à poserlaquestion
rétroactivement
de
cequ'étaient
lesautresmodes desubjectivation.
Plutôt
que
d'avoirunenostalgie
desorigines,
ilfauts'interroger
surce
qu'étaient
cesorigines
etilest
facile
deconstater
qu'au
fond
il enatoujours
étéainsi.
Guartari,«Singularitéetcomplexité
»,1985",
Cequidéfinitlamajorité,
c'est
unmodèle auquel
il faut
être
conforme.Tandis
qu'uneminorité
n'apas
demodèles,
c'est
undevenir, unprocessus.
Lorsqu'une
minoritécrée
desmodèles,
c'est
qu'elle
veutêtre
majoritaire
ouqu'elle
est
contrainte
desedoterd'un«modèle»nécessaire
àsasurvie
(«avoirunstatut
»).
Deleuze
etGuatrari,
L'Anti-Œdipe,
1972°.

Argument
: Je proposedespistesderéflexionsàpropos
du
enirFrançais
n/Noirs.Processus
sanscesse réactualisé
d’une
minorité
confrontée
àdiversmodèles,
noramment véhiculés
parles
frsquimetentenscènedesacteurs
noirs.SelonTimeMagazine,
me
À.
Féix
Guatrari,
«Singularité
etcomplexité
»,Les
séminaires
de
Félix
Guartari,
1985.
FélixGuartari,
L'Anti-Œdipe,
Paris,
Édicions
deMinuit,1972.
338 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECD'ELEUZE Ledevenir
d'Olivia
aupays
deShonda
339

ShondaL. Rhimesfaitpartiedes100personnalités
lesplusinfluentes l'incelligence
collectives.
L'équationactuelle
(média
=passivité)
disparai
aumonde*.
Rhimes
estprincipalement
connue
en France
pour
sasérie peur-êrre
beaucoupplusvicequ'onnel'imagine®.
Grey's
Anatomy
(GA),diffuséesurla chaînede
télévision généraliste
TF1depuis2005.C'estunescénariste,
une
réalisatrice
etuneproduc- C'esten
partant
de certe
hypothèse
que
j'explore
laproduction
des
triceaméricaine.
Sonparcourssingulier
dansunenvironnement où subjectivités
et proposeuneinterprétation
d'agencements
dedésirs.
lesfemmespeinentàpercer,
surtout
si ellessontnoires,
m'aincitée Lamaisondeproduction deRhimes,ShondaLand,
aétécréée
en2005
àanalyser
sonapportaudébatracialetféministeàpartirdesasérie pour
sapremière
série
GAets'est
agrandie
rapidement.
D'unepart
avec
Scandal.
Parailleurs,
je vaisdiscuterdesmanièresdonts'opèreun ses
créations,
une
série dérivée
deGAentièrement
diffusée
surFrance
2,
dialogue
auseinde«ladiaspora noire/africaine
»parlebiaisdela Private
practice
(2007-2013),
Offthemap
(2011,
unesaison)
diffusée
revue
AssiégéEs.
Élément
central,
la seule
fonction
deladiaspora
étant surGter
erTéva,
et Scandal
(2012-).D'autre
part,avec
lesproductions,
derassembler
lesmembresdugroupequiont
été dispersés*, How
togetaway
withmurder
(HTGAWM,
2014-)
duscénariste
Peter
Lesséries
télévisées
créent
despersonnages
complexesavec
lesquels Nowalk,
diffuséesurM6, et TheCatch(mars2016),qu’elle
écritet
letéléspectateur
est invitéà entreren relationparsesfluxdedésirs. coproduit
avecBetsy
BeersetJulie-Anne
Robinson.Unesérie
crééepar
Ellespeuvent
aussi
fairesentir
«fugitivement
d’unefaçon
autre
que
la Jennifer
Schuuret HelenGregory etdont
l'héroïneestMireille
Enos”.
nôtre,comme
sentirait
unautrequenous®
», J'ai puconstater
aucours Enoutre, unedesparticularités
deShondaLand estderéengagerles
demarecherche
ethnographique
surles Français
n/Noirs
quecertaines mêmes acteurs
desérie
ensérie, dansdesrôles
secondaires
ouprinci-
controverses
quesoulève
Scandals'inscrivent,
avecleurssingularités, paux(Kate WalshdeGAàPrivate Practice
exJerrika
HintondeGAà
dansledébatpolitique françaisetpluslargement dans
la société. Toast)
°. Unréalisateur
ouscénaristepeuttravailler
surplusieurs
séries
Eneffet,
les débats
internesauxpolitiques noiresquifonctionnent àlafoisetjouer
dans
l'une
oul’autre.
C’est
lecas
pour
Debbie
Allen
entredialogues
etpratiquesetquis’exercent sousl’influence
dela (GA),Tom Verica (HTGAWM) et ScottFoley(GA, Scandal,Toast).
diaspora,méritent
quel’on consacre uneanalyse àcemédia enforte Depuis
septembre
2014,lachaîne généraliste
ABCconsacrela
expansion,
d'autant
plusquelesproductions françaises
demeurentpeu première
partie
desoirée
dujeudià ladiffusion
detrois
deses
séries.
diversifiées’.
Guartari,quiécait
trèscritiquesur
les massmedia,àfait ABCfaitpartie,
avecCBSetNBC,destroisréseaux
audiovisuels
lesplus
l'hypothèse
danssondernier écritque importants.
Cette
programmation
intitulée
Thank
GodIt'sThursday
(#TGIT),
est inégalée
dans
l’histoiredelatélévision.
Lasoirée
du
flJ'évolution
destechnologies
introduira
denouvellespossibilités
d'interac- jeudi
estcruciale
pour
les annonceurs,
carc'est
laplusforte
entermes
tionentrelemédiaetsonutilisateur,
etentrelesutilisateurs
eux-mêmes. d'audience,
doncderevenus.
Et,#TGITmetdesfemmes
àl'honneur
Lajonction
entre
l'écran
audiovisuel,
l'écran
télématique
etl'écran
infor- avec
Ellen
Pompeo
(GA),Kerry
Washington
(Scandal)
etViola
Davis
matique
pourrait
conduireàunevéritable
réactivation
delasensibilité
etde (ATGAWM)quitiennentle rôleprincipal
dechaque
série.
Chaque
Personnage,
dontdeux
sontdesfemmes
noires,
incarne
unféminisme
différent,
Lavalorisation
desingularités
diverses
marque
tout
particuliè-
3.Time
Magazine,
4.Stéphane
avril-mai
Dufoix,
2013,
«W.E.B.DuBois,
“Race”
er“diaspora
noire/africaint
à
: a rement
ladistribution
desrôles
dans
GA(racial,
sexuel,
âge,
physique,
Raisons
politiques,
n°21,2006,
p.97-116;
etLadispersion.
Une
histoire
des
usa£®s ee

ladiaspora,
Paris,Amsterdam,
2011. | 8.FélixGuattari,« Pourunerefondation
despratiques
sociales
»,LeMonde
5.Tristan
Garcia,
Six
Feet
Under.
Nos
vies
sans
destin,
Paris,
PUF,
20123
SE atique,
octobre ,
Allouche
etSandra
Laugier,
Philoséries.
Buffy
tueuse
devampires,
Montreuil-sous" ” Jennifer
Shuur
ni 2 laproduction
suite
àdes
désaccords.
Ànoterquela
Bragelonne,
2014;
Mathieu
Potte-Bonneville,
Game
ofThrones.
Série
noire,
Pat Mtaétédéveloppée
par
AllanHeidberg
quifac
parte
deShondaLand
depuis
2006.
Les
Prairies
Ordinaires,
2015. tft. Cexcénariste
pourlatélévision
erlabandedessinée
est
particulièrement
connu
pour
Avoir
crééYoung
Avengers
(2005-)pourlecompte
deMarvelComics.
Unsuccès
6.François
Zourabichvili,
«Qu'est-ce
qu'un devenir,
pour
Gilles
Deleuzt*
ue
7.«Cinéma
français
oùsontlesNoirs»,Rue89,novembre2008:
«En “ommercial
quimetenscène
deux
super-héros
gays
Wiccan
etHalidiag.
ilyaunmarché
pourlesfilms
avecdesacteurs
noirs
»,Slare,
mars2015. 10.Toastestactuellement
encoursdetournage.
Ledevenir
d'Oliviaaupays
deShonda41
340 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVEC
DeLeuze

classe
etc.)
sans
quecela
interfère
aveclescript,
carlesrôles
nesons ba
série
estl'unedesplusdiscutée
surlesréseaux
soc:
iauxFacebook
Her lon BuzzFeed, cequiconfère
unpouvoir
remarquable
à:
écrits
pourêtrejoués
partelle
otelle
u minorité.
Cette
formule
originale
deShondaLand
fonctionne
commeunemarchandise
demasse.
Ainsi
le aréatrice
(tableau).
réseau
FOXdiffusedepuis
janvier
2015
l lemélodrame
musical
F,,,;
crééparLeeDaniels(Precious).
ire
Timbaland,un desproducteurs
de
Facebook Twitter
hip-hopetdeRnB leplus«bancable»,enestl'auteur-compositeur États-Unis France abonnés tweets
etlleneChaiken
(TheL World)
estdepuis
peuson«show
runner
|
Lesacteurs
principaux
etsecondaires
d'Empire
sontmajoritairement (A 4 "11454
32606 &it is
49258 ‘87h
1M 234
ä71K
noirs,
et l'undesprotagonistes
estouvertement
gay.Legroupe
FOX A 12935 324 15K
aétécotémeilleurdiffuseurpourla tranchedes18-49ansde2004
à2009,
cibleprivilégiée
desannonceurs,
et prendlaplace
deréseau he
Catch 110118 234x 5
numéro1pourlesménagesdevant
CBSen2007-2008,EnFrance,
Empire
estdiffusée
surOutre-Mer
1"depuis
septembre
2015ersur D'autre
part,
l'héroïne,quidirigesasociété,
estuneexperte
en
W9 depuisnovembre2015.Encequiconcernele genre,Rhimes
fait jondecriseetl’ancienne
directrice
decommunication
duPrésident
un usageremarquable
de
la diversité
desféminismes.Déjàprésente des
États-Unis.
Popeévolue
donc
dans
unesphère
d'influence
tour
dansGA,cetteapologie
deféminismeshétérogènes
estnettement
plus enl'influençant.
Contrairementà une
critique récurrente
surles
perceptible
dansScandal,
ercesféminismes
concernent
toutes
les
femmes réseaux
sociaux,
sonrôlen'estpasceluid'une
dominée.
Enprétant
dont
les rôles
sontpermanents.
Scanda/
estàsafaçonrhizomatique. uniquement
attentionauxfemmes, lareprésentation
portéeàl'écran
Lepersonnage
central
(objet
duscandale)
n'existe
pasréellement,
sice parRhimes,sacréatrice,
etWashington, l'actrice,
estnouvelle.
Ni celle
n'est,
justement,
dansl'invitation
àcroiretoujoursqu’onvapouvoir
le d'unevictimed’inceste,de violencesphysique ermorale, ni celle
à saisir
dansunedeces lignesdefuite,roujours
la limite
d’unnouveau d'une
esclave (Lacouleur
pourpre,Precious,
12years aslave)
oud'une
scandale
quivient
toucherl'héroïne.
Orlamachine abstraite
(Scanda/) domestique(AutantenemporteLevent,Lacouleurdessentiments),
types
dessine
deslignesqui sebrisentsaisons
aprèssaisons.
Et tandis
que derôles
pourlesquelsla majoritédesactrices
noiresontàcejourété
ShondaLandfait«disparaître
»lasingularité,
elledevient
«normalité
». encensées
parlacritiqueetontgagné ennotoriété,voireontobtenu
Scandal
estunmélodrame etunthriller
politiquecentré
surl’évo- des
distincrions!*.
LupitaA.Nyong'o,
la dernière
actrice
oscarisée
en
lution
professionnelle
etpersonnelle
desemployés dePope &Associates date
(2014)
s'estdernièrement
exprimée
sursoncompte
Instagram
au
etdeleurpatronne OliviaPope.LasérieestdiffuséesurCanal+dès sujer
delapolémique
entourant
la 88°cérémonie
des
Oscars
pour
dire:
lemoisdemars 2013etestparticulièrement bienreçuedupublic.
Tandisquelaseconde saisonestdiffusée
auxÉtats-Unis,lachaîne Jesuisdéçue
parlemanque
d'indusion
desnominations
auxOscars
decette
cryptéeachète
lesdeuxpremièressaisons.
Scanda/arrive
surlesécrans année,
Celam'amène
àréfléchir
àLadiscrimination
involontaire
etàcequi
américains
enavril2012erlaseconde
saisondébuteenseptembre
de mérite
reconnaissance
dansnotreculrure.
LesOscars
nedevraient
pasdicter
lamême
année.
Lesuccès
esttelqu'àpartir
d'octobre
2013,
Canal+ les
termes
del'artdans
notre société
actuelle,
maisécre
plutôt
unreflet
divers
Séries
ladiffuse
àquelques
jours
d'intervalles
desadiffusionaméricaine decequenotre
artaàoffrirdenosjours.
Jemejoins
àmespairs
quiappellent
etqu'elle
arrive
surunechaînepublique,M6,en juillet2014.
Il faut
direqueScandal estatypique
ethistorique.
Washington devientla
secondefemme noire
à interpréter
unrôleprincipal àlarélévision 12.BuzFeed
estunsited'information
etdemédias
Internet
américain.
Lesite
américaine,
etLascénariste
principale
estelle-même
noire"!.
Parailleurs, aété
créé
dans
unevisée
dedivertissement
etpourrepérer
lescontenus
viraux.
Aujourd'hui,
c'est
unmédia
mondial
quipropose
des
sujets
variés
etdes
articles
qui
fétendent
de lapolitique
àlapresse
people.
11.En1974,
Teresa
Graves
tenait
lerôle
dupersonnage
éponyme
Christie
Opara 13,
Dans
l'ordre
desfilmscités,
Whoppi
Goldberg,
Oprah
G.Winfrey,
Gabourey
dansGetChristie
Love! Sidibe,
Lupita
A.Nyong'o,
Hattie
MeDaniel,
Viola
Davis
etOctavia
L.Spencer.
342 AGENCER
LES MULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE Ledevenir
d'Olivia
aupays
deShonda343

auchangement,
àunélargissement
deshistoires
quisontracontées
erà|, nepasdirecontinuellement.
Enfin,Smithestcoproductrice
reconnaissance
despersonnes
quiles racontent, exécutive
deScandaldepuissonlancement.
Entantquescénariste
principale
deScandal,
contrairement
à laplupart
desautres
productions
Nyong'o
sepositionnait
parrapport
àlacontroverse
soulevée
par rélévisées,
Rhimes
nepermetpasl'improvisation
desestextes
etfait
lesnominations
auxOscars
2016qui,pourlaseconde
annéeconsécy. découvrir
auxacteurs
leurrôleaufurecàmesure.
Jamais
plus
d’un
tive,necomptait
pasd'acteurs
noirs. Lescampagnes
Twittercomme oudeux
épisodes
n’est
connu
à lafoisetune
clausedeconfidentialité
#OscarsSoWhitesontsympromatiques
du
fait quelaquestion
raciale leurinterdit
dedivulguer
le scripr.Lascénariste
déplie
l'écriture
de
traverse
lesfrontières.
Eneffet,
bienprésente
dansl'agenda
américain, chaquesaison
enpartantdelaconclusion dudernier
épisode
ets'inspire
elles'infiltreenFrancemalgréun contexte différentquinie souvent explicitement
dedétailsqui fontla personnalité
desacteurs.
Tandis
lapertinence d'analyses
deladiscrimination entermesraciaux. Or, quelesacteursnepeuventmodifierletexteà leurguise,Rhimesne
du côtédela sociétécivile,y comprisavecdescommentateurs, Je donne
aucune
autredirection
pourlejeu.Une
fois lerexte
misenvie,
dialogue quisemblenaîtred’uncôtéde l'Atlantique sepoursuit sur ellepeutcontinuer
à le déployerà partirdela manière dontil aété
l'autrerive,
et viceversa.Aussitôtdénoncée cheznous,la couleurdes jouéparlesacteurs,qui réagissent
peut-être
pluscommespectateurs
Oscars américains questionnait
celledesCésarsfrançais.Demême, en entraindedécouvrirl’actionquecomme acteurs d’unrôlequ'ils
2005,
en pleinscandale nédesconséquences de
l'ouraganKatrina, les maîtriseraient.
Cettesituationproduitaumoinstrois effets.
Ce sont
médias français
s'offusquaientdutraitement
réservé auxnoirs améri- les
propos
(lemonde
deShonda)
explicites
deRhimes
quisont
livrés
cains
delaNouvelle-Orléans, tandis
quelesAméricains pointaient
la aux téléspectateurs
; lesacteurs sont«comme danslavie»,àlamerci
Francedudoigr,alorsque les révoltes
urbainesbattaient
leurplein’. del'incertain,
unincertain quisecombineàunepratiqueduLve-tweet
Bienqu'ilsoitfictif,lepersonnaged'OliviaPopeestinspiré de durant
les épisodes,
l'étonnement seproduit
parrapportà«del’autre
l'expérience
professionnelle
d'unefemme noire,
JudySmith, experte
en toujourspotentiel
»; l'intrigue
traversée
parlesdébatspublicsdèslors
gestion
decriseeren relationpublique.
Soulignerlelienavec«levrai
»/ conduit,danslarépétition,
à unecréativité
singulière
desacteursetde
leréelestd'importancepuisque lavraisemblance estunpointnodal lascénariste
dessinant defaitun«devenir monde!”».
despolitiquesdereprésentations.Smithanotamment étél’assistante Laproductioncontemporaine durenouveauracial
sefairaubénéfice
spécialeetl’artachée
depresse duprésidentGeorge H. Bush(1991- d'une
intense
utilisationdesréseaux
sociaux,
enFrance
comme
ailleurs.
1993).
C'est
l'époque
delapremière
guerre
duGolfe,
desscandales Les
contenus
numériques
etparticulièrement
l'information
ditevirale,
liésàlavente
d’armes
àl'Iranetde
la turbulente
nomination
àlaCour produisent
desinteractions
etnourrissent
dessentiments
degroupes,
suprême
desÉtats-Unis
dusecondnoiraméricain,
Clarence
Thomas, des
subjectivités
existentielles.
Delasorte,
Facebook
erTwitter
sont
accusé
deharcèlement
sexuel
paruneancienne
desesemployées,
noire, utilisés
entant
qu’outils
derésistance
pour
dénoncer
etmobiliser,
cequi
Anita
Hill.Opérations
médiatiques
pourlesquelles
sonrôle
aété
crucial conduit parfois
à desrésolutions.
C’estlecasdel'affaireJean-Paul
sousl'administration
Bush.Aprèssondépart
delaMaisonBlanche, Guerlain de2010oude la controversequitouche lemagazineElle
elleouvre
soncabinet,
Smith
& Company,
etcontinue
à travailler en2012",Pourmémoire, enréponse àunequestiondela journa-
pourdesclientsprestigieux
et surdesscandales
politiques
notoires. listeEliseLucet,Jean-PaulGuerlainavaitdit: «Pourunefois,
je
Entre
autres,
pourMonicaLewinski
dansl'affaire
quil'oppose
àBill]. Mesuismisàtravailler
comme
unnègre.
Jene
saispassilesnègres
Clinton
en1998.
Unclind'œil
auquel
lasérie
faitsouvent
référence, °nttoujours
tellement
travaillé,
maisenfin”. »Pourcequiestdu
Magazine
Elle,c'est
unarticle
enligne
intitulé
«Black
fashion
power
»
14.Proposé
dansmatraduction. ee

15.#OscarsSoWhite,
rerour
surlapolémique,
Première,
janvier
2016. is 17.Édouard
Glissant,
Poétique
deLarelation,
Paris,
Gallimard,
1990.
16.«Suburban
officerscriticized
asinsensitive
toracism
»,NewYorkTimes,
nOvEM 18.Kpédérin
Ahouansou,
«Deladiasporanoire.
Surlestraces
ensuspens
»,
201:*12Nouvelle-Orléans,
victime
desouragans
“racisme
ercorruption”
»RW ' lloque
international,
LIATransOceanik,
2012.
1. 19.Journal télévisé,France2, 15octobre2012.
Ledevenir
d'OliviaaupaysdeShonda 345
344 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

quiafaitréagir
la toilesuiteàunelettreouverte publiée
surJesite volonté
depuissance,
undésird'identification
àlamajorité
blanche
Afrosomething®.
L'article
deNathalieDolivo
discuteles motivations afin
d'échapper
àsacouleur
depeau
?Réduire
lepersonnage
erlasérie
dela«black-geoisie
»quiaurait« intégré
tous
les codesblancs
, nn àcette
posture,
c'estrester
aveugle
auxlignes
defuiteque
créelafiction
« l'influence
ducoupleObama,
et conclutquele chicestdevenu une enacrualisant
sanscesseuneambiguïtédu Personnage
qui,certes,
optionplausible
pourunecommunauté jusque-làarrimée
à sescodes uncertain
pouvoir,
maisdemeure
comme
suspendue,
toujours
streehwear
».Lesmouvements
quidénoncentlesviolences
Policières surlabrèche,
telleunevictime.
Ces
lignesdefuitecorrespondent
au
telsBlack
Lives
Matter
(BLM),Ferguson
inParis,SayHerName,ouqui dogan
: Le
privé
est
politique,
etmontrent
unerésistance
volontaire
et
soulèvent
des
polémiques
endénonçant
Le
racisme
quotidien
àl'aide
de involontaire
aupatriarcat,
auxnormesféministes
etraciales
danstous
hashtags
rels#OscarsSoWhite,#SiLesNoirsParlaientCommeLesBlancs,lesdomaines desavie.Raisonpour
laquelleRhimes
donne
à voirles
soulignent
la place priseparlesnouveaux médias dansuneforme de liens
entre
savieprofessionnelle
etsaviepersonnelle
quinepeut
faire
pratiquepolitiquecontemporaine,où la productiondessubjectivités l'économie
d'uneconnaissance
intimedesesemployés,
Deleuze
nous
n'est
jamais seulement localeounationale,maistoujoursunpeuplus rappelle
que
:
globale.
Ferguson in Parismetenparallèle lescrimescommiscontre
lesnoirsenFrance,auxÉtats-Uniset
ailleurs.Il surgiten2014pour {lle
devenir
n'estpasdel'histoire;
l'histoire
désigne
seulement
l'ensemble
sejoindreà BLM,suite au décèsde Michael Brown. Le mouve- desconditions
si récentes
soient-elles,
dontonsedétourne
pour«devenir
»
mentBLM naîtavecun hashtagpermettantsamondialisation en {...].Ondicque
les révolutions
ontunmauvais
avenir,
Maisonnecesse
de
2013enréaction
àl’acquittement
dumeurtrier
deTrayvon
Martin, mélanger
deuxchoses,l'avenirdesrévolutions
dansl'histoire
etledevenir
Georges
Zimmerman,
pour
s'élever
contre
les violences
policières
et révolutionnaire
desgens.
Cenesontpaslesmêmes gens
danslesdeux
cas,
lesinégalités
dusystème pénalaméricain
(Mirzoeff)?!,
Delamême Laseule
chancedeshommes estdansledevenir
révolutionnaire,
quipeur
manière,
la visibilité
donnée
dansunespacemainstream auhashtag seul
conjurer
lahonte,ourépondre
àl'intolérable??,
#SiLesNoirsParlaienrCommeLesBlancs,
s'examine
dansunensemble
decodes
quiséduisent,
d'uncôté
comme
de l'autre,
lesfaiseurs
d’infor- Ledevenir
révolutionnaire
ademultiples
visages,
larevue
numérique
mations,
les médias demasse
etlesmilitants.
Cehashtag,
quidénonce AssiégéEs
tente
decernerdenouveaux
possibles
encesens.
AssiégéEs
parlasatire
leracisme
quotidien,
s'estvuinstantanément
propulsé
dans aété
créée
pardes«raciséEs
enrésistance
qui[.…]
pensent
l’articula-
des
médias
français
etinternationaux.
Unesiuation
impensable
dix tionrace,
genre
etclasse
» pourparerà l'hégémonie
du«féminisme
ansauparavant. blanc#».Lesauteurs
delarevue,
prolifiques
surlesréseaux
sociaux,
Cette
miseencontexte,
sanscesse
resituée
etrenégociée
parl'émer- revendiquent
unedémarche antiacadémiqueer intersectionnelle.
gence
denouveaux
événements
etacteurs,
participe
delaproduction
des Letrope
féministe
américain
pourpenser
lamultiplicité
erlesinégalités
subjectivités
desFrançais
n/Noirsàl'èrecontemporaine.
Elle autorise ‘stcritiqué
depuis
une
dizained'années
enFrance
(Bilge
etHillCollins
également
l'examen
del'influence
qu'exerce
uneproduction
demasse 2016)#,
Leconcept
d'intersectionnalité
s'impose
avec
unarticle
de
comme
Scandal,
nonseulement
d'unpointdevuedelacouleur
depeau, Kimberlé
W.Crenshaw,
dans
lequelellerevient
suruneexpérience,
sa
maisaussi
dupointdevuedugenre.
Certains,
surles réseaux,
font
le Participation
àl'équipe
dedéfense
juridique
d’Anita
Hill. Crenshaw
reproche
quePopeappartient
à un mondeélitisteerneprésente
pas insiste
surlefait«qu'ilauraitfallupréciser
quelle
différence
faisait
sa
«lescaractéristiques
d’une
féministe
».Sonpersonnage
traduit-il
une ————-

23.GillesDcleuze,
Pourparlers
[1990],Paris,Éditions
deMinuit,2003.
24,<hup://www.assiégé-e-s.com>.
20.«Black
fashion
power
»,ElL,janvier2012. o 25.Sirma
BilgeecPatricia
Hill Collins,
/ntersectionality,
Cambridge,
Policy
21.
Nicholas
Mirzoef,
«Visualité
erdroit
deregard.
Lecas
deBlack
Lives
Matter». ress,
2016.
SéminaireLabToP/CRESPPA,2016. 26.KimberleCrenshaw,
«Mapping
themargins.
Intersectionality,
identity
22.«Tuparles
africain
?Extoicuparles
européen? »,LeMonde,
février
2016; Politics,
andviolence
against
women
ofcolor»,Stanford
LawReview,
vol.43,n°6,
«Unmot-clé
qui
metàmallesclichés
racistes
»,Lejournal
deMontréal,
février
2016. 191,
p.1241-1299,
346 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

différence
»puisque laloisépare
lesdeuxdiscriminations,
etqu'elles XXIX
sontpensées
entermes majoritaires
(femme=blanche, noir homme),
Ellepropose
également,suivant
saspécialité,
ledroitConstitutionnel,
l'usage
deceroutilthéorique
etépistémologique.
Lesrevendications
politiques
dela revuesontnombreuses et soulignentdesprises
de Du«mass
media
act»àlacréation
positions
spécifiques
(l'influenceaméricainedu féminismenoir)et desmédias
libres
contradictoires.
Ce qui retientmonattentionestlarubriqueCulture
dont unesectionestconsacréeaux SériesULS
: sexe,raceetclasse,
En Qu'est-ce
qu'une
stratégie
médiatique
guised'avertissement
s'afficheuncommentaire
lapidaire
deScandal
«Nousn'avons
pasabordé
Scandal
carnoussommes
fatiguéEs
d'Olivia
minoritaire
?
ertout
a étédit.»Suitune
critique globalement
positivedeHTGAWM
etd'Empire.
Ellesconcernent
« l'idéalméritocratique
»danslequel
seraient
enfermées
lesminorités
afind'intégrer
lesmédias
mainstream VivianA Lipuma
qui « masquent
le racisme
structurel » dessexualités
consensuelles
(HTGAWM),
l'hypersexualisation
desfemmes
(Empire),
lesrapports
romantiques entre
unefemme noireetunhomme blanc(H7TGAWM)
acomme pourScandal »… D'oùvient
l'incapacitédenotreépoque
àcréer
desnouveaux
signes,
Icilaproductionvirtuelle
dessubjectivités
serapproche del’hypo- susceptibles
d'esquisser
lechemindenouveaux territoires
d'existence
>?
chèsedeGuartari.
Onpasse demédia =passivité
àmédia =réactivité,
en D'oùvient,encore aujourd'hui,
certedifficulté
ànepasserabattre,
percevant
la ritournelle.
L'usagepar
les auteurs
dela revue desréseaux chaquefoisquelescirconstances
historiques
er
sociales
nous y forcent,
sociauxmanifeste
simulranément despossibles,
quirévèlentunmodéle surcequ'onsaitêtreLeplusvieux,leplusrétrograde,
Leplusfarou-
nécessaire
àsasurvie,etlesrenégociations
permanentes querequiert chement identitaire?
Du Frontnationalà«Je suisCharlie »,cene
Internet2.0.L'objectif
estdefaçonnerdessubjectivités
locales
ense sontcertespaslesdrapeauxquimanquent, maispartoutseulement
fondant
surune
production
majoritaire,
présentant
des
similitudes
dans desdrapeaux.Sansdoute,lechaudrepaire subjectif
vaut,entemps
lesexpériences
duracismeetdugenre.Or, entrejuin2015etmars detourmente,
beaucoup
plusquelapointe
d’unquestionnement
sur
2016,lamajorité
desopinions
émises
danslarubrique sontdevenues nosmanières
devivreetd'agir—bienque,paradoxalement,
aucun
obsolètes,
spécialement
pourScandal.
Tandis
que#TGIT
inviteaux questionnement
ouvertà lacréation
nepuisse
prétendre
surgir
hors
interactions
production
demasse/création
enmultipliant
desavantages delatourmente.
11devientdoncurgentd'observer
ce pointoùdeux
pourABCetShondaLand,
laproduction-interaction
des
subjectivité chemins
bifurquent
: d’une
part
celui
dusujet,
avec
son
système
d'iden-
s'exprime
dans
unerépétition
pourAssiégéEs.
Il estle«mouvement tité,
d'identification
etd’unintégrisme
possible;de
l’autre,celuidela
quiproduittoutcequi
est différent
»: ainsi«lasynthèse
dudevenir subjectivation,
commeprisedeconsistance
àpartir
d’une
multiplicité
etdel'être…affirmé
endevenir?’». itensive,
nonréductible
àunsujetindividué
er seconnectant
decefait
àl'ensemble
desfluxmatériels,
au
lieu derester
prisdans
unsystème
dereprésentation
symbolique.
Silaspécificité
ducapitalisme
contemporain
estdefonctionner
sur
desémiotiquesasignifiantes
(statistiques,
pourcentages,
valeurs
“nBourse),
c’estincontestablement
surdesmachines
signifiantes,
27.Suzana
Milevska
erArunSaldanha,
A.« Theeternal
return
ofrace.
Reflections Produisant
delasignification
et desmodèles
pourdes
sujets
assignés,
on
East
European
racism
»,
inA.Saldana
etJ.-M.
Adams
(éd).
Deleu
and
ut
Edinburgh,
Edinburgh
Universiry
Press,
2013,
p.228
(proposé
dans
ma traduction
Due massmediaact»à la création
desmédias
libres 349
348 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

qu'ilcontinueà s'appuyerà titred'outil'.Parmilesinsta sous


lesyeux.Elledoitdoncsemontrer
capable
d'alleràl'encontre
de
nces
de
productionetdecirculation
decetypede signes,les médias
jou cepouvoir
d'invisibilisation
dont
jouissent
lesmédias.
Si,suivant
notre
chèse,
sociétédecontrôleetsociété
d'information
renvoient
au
àcoupsûrd'unfortpouvoird’assujettissement
social, grâce
à rc
constant
d'images
etdemotsseglissantdansnoscadresperc ux même
diagramme
depouvoir,
quelles
sont
lespossibilités
esthétiques
è »: Cptifser a politiques
devoirsurgirquelque
chose
comme uneimage,
capable
affectifs
erdanslesquels
s'imposent
les codes
culturels
définis
à bars:
descoordonnéesgéoculturelles
du«GrandMajeur»(l'Homme di. derompre avec
nosschèmes sensori-moteurs
endormis,
résignés,
voire
consentants?
Etsurtout,
àquicespossibilités
appartiennent
?
RicheerEuropéen).Est-ce
que
les pratiques
inaugurées
parl' e
capillaire
etdistribuédu réseau
internet,queGuattaribaptise
0
post-média? »etqu'ilsaluecommeunealternativeà lasubjectivation 1,LAVIE MÉDIATIQUE DES«HOMMESINFÂMES
»:
capitalistique,
sontàmême defairebasculer
l'assujettissement
socia] LESSANS-IMAGES,LESSANS-MOTS
enunprocessusactifdesubjectivation
?Est-ce quel'apparition
d'une
nouvellestructure
communicationnelle,nonverticale,
susceptible Dans
le plateau
«Postulats
de
la linguistique
»,Deleuze
etGuattari
d'êtreàlaportéedesminorités
excluesdel'échiquier
delareprésenta- présentent
uneconception
pragmatique
del'énonciation,
selon
laquelle
le
tionmédiatique,ouvreautomatiquementsur un nouvelagencement langage
neserattache
pasàladescription
d’un
étatdefaitquiluiserait
collectif
d'énonciation
?Cettequestionestloind'admettre
uneréponse extérieur,
et surlequelonpourrait
avoirdespositions
discordantes,
mais
simple.
Car,comme
le rappelle
Deleuze,
«il n'yapasdesubjectivation sedéfinitcomme« ouï-dire»,bourdonnementoù s'insèrent
images
indépendante
d’unordreétablid'assujettissement
» : l'impossibilité
de etmors,
signes et récits(« narratives»),dontlevolumeparaîtvouloir
sereconnaître
danslesmodèles subjectifs
dominantsaboutitaupiège occulrer
l'arbitraire.
Lesmédias, maniant professionnellement
cette
d'unealternative
entreun désird'intégration
au modèle,etunrefus pragmatique énonciative,neselimitentpasàfabriquerleréelqu'ils
nécessairement
exprimé
dansles codes
dumodèle
auquel
ons'oppose, feignent
seulement dedécrire,maisrelèvent d'une«transmissionde
afindesemettre
enpositiondlui
e disputer
uneproduction
de signifi- motsd'ordre dansunchamp socialdonné »,c'est-à-dire
unearticu-
cationdans
l'espacedevisibilitédelasociété
civile.Ce nesontpasdes lation
entre lamachine
discursive etlesdifférentes
machinessociales,
nouveauxoutils
quipeuvent
faireadvenir,d'eux-mêmes,desnouvelles parlebiaisdelaproduction d'unesubjectivitécorrespondanteaux
conditions
d'énonciation,
sepassantdesmécanismesd'identification signes
qu'ilsproduisent.
Il nesemble pasexagéré, encesconditions,
du
sujet.Grandes sontaucontraire
leschancesd'assister,
souscouvert d'affirmerqu'ilsconstituentun
lieu privilégié d'unevisibilité
des
d'undroitàladifférence,
àune«disséminationdumajeur» delapart positions
discursives
dominantes,
à partirdesquelles
nouspouvons
desminoritéselles-mêmes. observer
les zones
delumière,toutcommedéduireleszonesd'ombre.
Qu'uneminorité nesedéfinisse
jamaisseulementparunattribut À proposdurôlepolémique que
la télévision
ajouédurantla
(féminin,
noir,étranger),
maïsparunelutte contrel'oppression
du GuerreduGolfe,SergeDaneydépeintBagdadsouslesbombescomme
faitd’undecesattributs(exploitationd’un genre,racisation
d'une
l'imagemanquante »d’une
guerrequiaétéfinalement
«sans
images
»,
ausensoùl'analyse
journalistique
àl'appui
dedocuments estsimple-
couleur,expulsiond’unenationalité)
pouvant à rermemodifier
les
coordonnées dusystème majoritaire,
celasignifiequ'unepolitique ment remplacée
pardesinjonctions
surcequenous devonsenpenser
àtitredecitoyensaméricains,
français,
irakiens*.
Danslessociétés
minoritaire
doitsemontrer capable
d’affaiblir
l'efficacité
ducontrôle
informationnelles,
laconsrruction
duvisible
agitpardécoupages,
exclut
àfaireglisser
imperceptiblement
lesimages lesunesdanslesautres,
entransformant
en clichés
lesoppressions
quenousavons constamment autant
qu'elle
inclut,
promeut
surledevant
de
la scène
publique,
ou
condamne
à resterenmarge
despansentiers
del'expérience
sociale.

1.Félix
Guattari,
«Échafaudages
sémiotiques
»,inLaRévolution
moléculaire 3.Sur
laguerre
duGolfe
etlerôle
delatélévision,
voir
Serge
Daney.
+Montage
Paris,LesPrairiesOrdinaires,2012.
obligé
»,Cahiers
ducinéma,
n°442,1991
;HarunFarock,
«Lepoint
de
vue
de
àBE
2. FélixGuattari,Cartographies
Critique
»,1989.
schizoanalytiques,
Paris,Galilée,coll.« L'Espace
Trafi,n°
50,
2004;
etFélix
Guatear,
«Avez-vous
La
guerre?
»,Chimbre
n°23: PT
350 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE Du«mass
media
act»àlacréation
desmédias
libres351

La«une»desjournaux
fait retentir
desinformations
surlapoliti Lelaisse
parler,riennesortdu cadredece
internationale,
lesactionsoulesfailles
dugouvernement,
touteos Lesmédias
définissent,
eneffer,lescodes
qu’il
estpermis
etlesproblèmes
qu’il
àpartir
dise,
macropolitique
auxaccentsspectaculaires,
accoucheuse demodèles desquels
rendre
compte
desfaitsdesociété,
sibien
que
touteinsertion
subjectifs
dominants—telsun certainmodèlede l’actionpolitique des
minorités
enqualité
desujets
politiques
revient
soitàlesneutraliser
uncertain
modèle
desrapports
d'échange,
uncertain
modèle
dere enrant
que
sujets,soitàlespromouvoir
en tantquesujets
répondant
devie,« un mondevu depuisle pouvoir». Danscettegestion
de aux
significations
quelesmédiasproposent.
Lechômeur,letravailleur
l'attention,
la placeréservée
auxminoritésestà proprementparlercelle précaire,
l'immigrérentrent
toujoursdanslalogique
devisibilité
d’une
derepoussoir.
Lecontrechampconflictuel
queDaney appelle
deses gémiologie
«majeure»,c'est-à-dire
dans
l’espacesémiotique
consensuel
vœuxeroùsedresserait
«l'autre
côtédupouvoir»estdoncpeuplé
de défini
parlamachinemédiatique‘.
Etparadoxalement,
plus
onmontre
«sans-voix
»etde«sans-images
»,
visiblesuniquement
par «lalumière etplusonrendinvisible,
plusoninciteà parler
etplusonfaittaire,
quelepouvoirjettesureux».On entend
ici lestermes
queFoucault detelle
sorte
quel'énonciationensortécrasée
—dans uneinterview
mobilise
dans «Laviedeshommes infâmes*
»etàpartir desquels
nous d'une
émission
télé,commeautrefois
surledivan.
pouvons établirunecomparaison aveclacondition médiatiquedes C'étaic
làprécisément
le pointsurlequel
butait
Foucault
:
minorités.Enévoquant cesviesd'hommes erdefemmes condamnés
àl'asile
ouàlaprisonpouravoiremprunté deschemins déviants, lamême
incapacité
à franchir
la ligne,à passer
del’autre
côté,àécouter
et
Foucaultsoutientquecequiles arracheàlanuitdel'ordinaire,
c’est faire
entendrelelangage
quivientd'ailleurs
oud'enbas,
toujours
lemême
leurrencontreinfortunée
aveclepouvoir.Or,invisibles,
lesminorités choix,
ducôtédupouvoir, decequ'ilditoufairdire.
Pourquoi,
cesvies,
ne
empruntentsouventune
stratégiemédiatique
de
visibilitéenprovoquant pasaller
lesécouter
làoù,d’elles-mêmes,
elles
parlent?
ceheurt.
Sil'on penseaucasdudétournement d’avion,nous avonsun
clairexempledecetypede«visibilisation
»:dansuneinterview, Leïla Il faudraitimagineruneémission detélévision
danslaquelle,
Khaled,militante
responsable
dudétournement enaoût1969 duvol840 laissant
lesminoritésproduireleurspropres
images, leurs
propres
assurant
la liaisonLosAngeles-Tel
Aviv,expliqueque
c'est parce
que discours,
leurspropres
analyses,
onen
feraitdessujets
d'énonciation.
lesPalestiniens
nejouissentpasd’unestructured'information
capable Mis,aulieud'attendre desmédiasuneplaceque
l'on n’apas,
c'est
defaireexisteruncontrechamp, qu’ilsrecourentaudétournement danslatentative
decréerleurspropres
médias
quelesminorités
vont
d’avionavecl'objectif
d'occuper lespremièrespages desjournaux
et chercherlesconditions
d’une
énonciationpossible.
doncd'attirer
l'attention
del’opinionpublique
internationale,
ceque
DeleuzeetGuartari nomment un«mass mediaact». Il. SUJET D'ÉNONCIATION
Cependant, inscrites
danslamatérialitédel'informationmass- ET EFFETSDE MAJORISATION :
médiatique,
lesminoritéscontinuentà êtresujetsd'énoncés,
c'est- LA SUBJECTIVITÉCOMME CLICHÉ
à-dire
d’unepart,unsujetquiindiqueunétatàlatroisième
personne,
d'autrepart,unsujetqui
est ditselon«desénoncés conformes
àla L'absence
d’une
théorie
delacommunication
chez
Marx
aconduit
réalité
dominante».«Il estcourant,
rappelle
Deleuze, que,dans
une lagauchequis'yréférair
àuneimpasse—croirequela«libération
des
émission
detélésurlesprisons,on fasse
parlertout
le monde,
le juge, ias»consistait
àchanger
les contenus
del'information,
au lieude
legardien,
la visiteuse,
l’homme
dlea rue,out lemonde
sauf
un Somprendrequec’estdansleurstructure
même quelesmédias sont
prisonnier
ouunancienprisonnier.
»Or, mêmelorsqu'ilarrive
qu” asujettissants.
Pourqu’unchangement
seproduise,
il fauc
laisser
advenir
l'image
etlaparole
comme
moyens
d'uneprise
deconsistance
Minoritaire.
Rappelons,
à cepropos,
lescirconstances
quiontamené
à
4. MichelFoucault,
«Laviedeshommes
infâmes
»,in Dissetécrifs,
slt
Gallimard,
1994,
r.HI. cris ——————————_-

5.Johan
Grimonprez,
Dial
H-I-S-T-O-R-Y,
68,Paris,
Centre
Pompidou,
19°°° 6.Maurizio
Lazzarato l'exemple
des
intermittents,
Signos,
maguinas

àpartir
de30°35”. bjectividades,
Sao
Paulo,
Bâires
SESC
Po
NN

Due mass
media
act»àLacréation
desmédias
libres 353
352 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

lanaissance,
en1967,duGroupeMedevkine. Invitépardesouvri onttellement
intégré
lasémiologie
dominante
qu'elles
nepeuvent
que
engrèveàleurenvoyer
desbobines,ChrisMarkerfinitparsePs reproduire
desénoncés
etdes
images
quiluicorrespondent,
enréitérant
lui-mêmeà Besançonafinderéaliser
À bienrôrj espère.Lorsd u pourelles-mêmes,
dansunespace
quiSerait
enprincipe
ouvert
àtous
projection
dufilmdansune
salleremplie d'ouvriers,
ceux-cienME Les possibles,
lescodes etlesproblèmes
del'espace
sémiotique
existanc.
mécontents”,
cequiaboutità lacréationd’uncollectifd'actions. Oncomprendmieuxl'énigmatique
formuledeDeleuze
lorsqu'il
cinéastes
oùlesouvriers
parlent
enfinpour
leur propre compte.C'est
là affirme
que
« parler,
même quandonparle
dsoi,
e esttoujours
prendre
lapremière
condition
dupassage desujet
d'énoncéàsujetdénonciation laplacedequelqu'un,
à laplace
dequionprétend parler
et àquion
évidemment
soumiseàdestransformationsmatérielles
erhistoriques refuse
ledroitdeparler».Nepass'inscrire
dansune«méthodologie
» l'extrême
accessibilité
auxoutilsdelafabrication
del'information
a derupturerevient
à produire
desimagesetdesdiscours
commesi le
ladonnenouvelle
del'internet
queGuarrarisaluecomme[apossibilité sujet
d'énonciation
continuaità êtreunsujetd'énoncé,
à travers
une
demettre enplacedesnouveaux processusdesubjectivation.
Mais miseenscène desoi,une
sélectiondecertaines
qualités
desoi-même
il s'agiclàseulementd’unepossibilité,
caruneimageouuneparole (de
rypenoir,femme, immigré),
majorisées
dansdesmodèles
subjectifs
àlapremière personne nesontpasuneconditionsuffisante,
il Eur (dutypehéros,martyr,
victime),
voire
seulement
s'exprimantdansle
encores'inscriredansune«méthodologie delarupture
»,c'est-à-dire modèle
dusujet.C'estlepouvoirquicontinue
àparleretàfaire
voir
êtrecapable d'aller
à l'encontre
desmotsd'ordrequicirculent
dans dèslorsquel’imageresteprisedansun régime
delareprésentation,
"espacesémiotiqueparunereconfiguration
duchampproblématique. ar c'estle systèmede la représentationlui-mêmequi, enconstituant
Si l'oninterroge
plusavant
l’insatisfactiondesouvriersdeBesançon, desobjets
etdessujets clairementdélimités,
enbloquant
lesprocessus
onpeutsedemander cequileur faitdirequecen’est
paslà«labonne desingularisationparuneintégration dessingularités,
empêchela
image
»,àlafoisl'image
qu'ilsauraientd'eux-mêmes,
etl’imagequ'ils formationd’unenouvelle énonciation.
voudraient
renvoyer auxautres entantquesujetsappartenantàune Lavisibilitédesluttesserait-elle
doncseulement une
lutte pour
minorité,
brefuneimage quiles représente.
«Pasuneimage juste,
juste lavisibilité?
Si unetellequestionalemérite derenvoyerlesmédias
uneimage
»déclamait
Godard,
car
les images
justes, àunterrain dedispute, à une«guerre deposition»comme dirait
Gramsci,il fautencore qu’onneretrouve pasducôtédesminorités
c'est
toujours
desidées
conformesàdessignifications dominantes
ouàdes lemême partage entrescène etcoulisses,
entre desqualités
qu'on
motsd'ordreétablis,
c'estcoujoursdesidéesquivérifientquelque
chose, met
enlumière,
etd’autres
qu’on
relègue
dansl'ombre.
La«bonne
mêmesi c'est
quelque
chose àvenir,mêmesi c'estl'avenir
delarévolution®. image
»esteneffet
«uncoup
detamponquinormalise
lesimages
»,
qui
dicteleséléments
quenousdevons
percevoir
audétriment
desa
On aainsiaffaire,
aulieud’unerupture,à l'acceptation
dela complexité,
brefl’autre
nomduchché.
Onpeut
toujours
sedemander
sémiologie
dominante,
enrenversant
toutsimplement
sescritères Sicepassage
parlecliché,cettetransformation
duprocessus
desubjec-
d'évaluation.
Leproblème
deceseffets
de«majoration
»des
minorités tivation
ensujet,n’estpasuneétapenécessaire
pourqu'unecondition
estd’une
extrême
actualité
: nouslesvoyons
serapporter
àunancien deminoritésetransforme
en lutte: delaconscience
declasse
deMarx
passé
mythique,
àlagrandeur
delapatrie perdue,
àlabeauté
dela àlanégrituded’AiméCésaireetà l’émancipationdesmouvements
race,
c'est-à-dire
àroute
une
palette
d«e crispations
subjectives
»quine féministes,
lecritère
même delaconstitution
d’ungroupe-sujer
estla
remettent
nullement
enquestion
lescatégories
erlesmodèles
subjectifs compréhension
de
sa situation
degroupe-assujetti,
dansunagencement
que
les médias
fontcirculer.
Or,c’est
précisément
lesens
queGramse social
quine
laisse pasvéritablement
le choixde
ses propres
lignes
de
donne
à l’«hégémonie
culturelle
»: cette
situation
oùlesminorités subjectivation”.
Cettenécessité
représentative
découlerait
doncdela
nn

7.Antoine
Bonfanti,
LaCharnière,
12’,enregistrement
audio,
Besançon»
1968. 9.Lanécessité
d’undépassement
dupeuple-sujet
estprésentée
entre
autres
Par
8.Gilles
Deleuze,
«Troisquestions
surSixfoisdeux
(Godard)
»,inPourpark Igor
Krtolica
dans
«Artetpolitique
mineurs
chezGilles
Deleuze,
Limpossibilité
Paris,
Éditions
deMinuit,
1990. d'agir
etlepeuple
manquant
dans
lecinéma
»,Silène,
Nanterre,
2010.
TK Du«mass
media
act»àlacréation
des
médias
libres355
354 AGENCER
LES MULTIPLICITÉS
AVECDELEUZzE

dedonner
lieu à unantagonisme.
Cequiveurdonc
dire
«fonction
sociale
»quinelaisserait
subsister
rien dupleindevirtualiré
présent
dans
les images,
parlerabattement
decettevirtualité
auxseuls Tue unensemble
PT k. Portàlamajorité
ct,finalement,
d'être
unensemds tout
court.
L imageestcequifuit
éléments,
qualités,traitsquelafonctionsocialeautorise.Or, l'idéeselon
laquelle
lafonctionsociale
condamnerait
nécessairement
la vircualiré ynemodélisation
Le ne possiS
produit = récuse
subjectif,lapossibilité
créant d'être
unnouveau transformée
«consensus
de
delaperception,
renvoieà une
certainepositionde
la critiqueesthé.
tique,portéepardesauteurscommeJacquesRancière,selonlaquelle uralité».
: Eu comment
cedevenir-minoritaire
pourrait-il
entrer
dans
un
lapolitique
del’artcommegarantd'une«fonctionesthétique
»est
imedevisibilité,commentpourrait-ilsedireersemontrer,
sans
àrelier
àsonautonomie
même
vis-à-vis
duchamp
social,faisanr
finalementde
l'artiste leseulcapable
deluttercontreleclichépar par-là
sefixer,cesser
de«devenir »?Sil'onsetourne
verslesrécentes
rudesensociologiepolitique,
l'onvoitquelesminorités
préfèrent
unereconfigurationdusensible.Une«pédagogiedelaperception
»,
qui permettraitde restitueraux imagesleur épaisseur
et leur virtua- souvent
rester
à|abridelalumière.
LesProjecteurs
serévèlent
génants,
lité,estunthème
qu'onretrouve
à différents
endroits
chezDeleuze, condamnantlasubjectivité
minoritaire
àundevenir-cliché,
soitpar
notamment danslesécritssurlecinéma,maisquis'articulemal,nous lamainmise
desorganes médiatiques
traditionnels,
soitparsapropre
semble-t-il,
avec lesapports
d’uneanalysedusujetd’énonciationdans miseenscène.Ainsi,JamesScottforge
le concept
de «résistance
Milleplateaux: est-ce
qu’iln'yauraitpasdesmanières devoiretde infrapolitique
»pourdésigner
l'ensembledespratiques
qui
révèlent
parlerqui,sansabandonner
les impératifsd’une
politique minoritaire, l'existence
d’unecouchedenon-ditetdenon-montré
danslesdiscours
aboliraient
la distance
entre
l'artcomme
perception
augmentée
etle exlesimagesquelesminorités partagent
sur lascène publique!!,
«peuple
quimanque
»,paruneréappropriation
énonciative
de
la part Ces«hiddentranscripts
»,selonletermequ'illeurprête,
nesontpas
desminorités
? sansrappeler
quelques remarquessporadiques
deDeleuze :endessous
dumotd'ordre,
il y aurait
«quelque chose
comme le silence,
oubien
III. POUR UNEPOLITIQUE DE LA VISION
: commele bégaiement, oubiencomme lecri».InterrogéparNegri
LE DEVENIR-MINORITAIRE sur
lapossibilité
derésistances
àlasociété
decontrôle,
Deleuze
répond
que,pour
cela,
il faudrait
créer
des«vacuoles
denon-communication
»
Nousdevons
déjàdéfinirenquoiconsisterait
aujusteune
telle etfinalement,sedérober
ausavoir.
L'image
serait
doncunemicro-
politique,
quidoitêtresaisie
danssapratique,
danssonagireacte,
n politique
del'imperceptibilité,
brefunrégime
paradoxalement
sans
etnonàpartird'attributs
fixes.DansSurquelques
régimes
designes, images.
Seulement,
celapose deux problèmes.
Lepremier
concerne
les
setrouvecerteimportante
précision: c'esttoujoursd’unpointde moyensàmettre enplace pourl'avènement
d’unemachine
deguerre
subjectivation
quenaîtunsujetd'énonciation etnonpasl'inverse. révolutionnaire.
CommeDeleuze lerappelle
dansTrois
problèmes
de
Lasubjectivation
concerne
moinslesujetoul'identitédecesujet,
que groupes,
celle-ci
nepeutpassecontenter de luttes
ponctuelles
désar-
laproduction
d'unmoded'existence,
seulcapabledejeterlesbases
d’une ticulées
entreelles,voirelaissées
àunpurspontanéisme.
Uneunifi-
politique
dudevenir-minoritaire
parundépassement de lafonction «ation
centralisée
n'est
certes
pasàsouhaiter,
ellequis'est
montrée
énonciative
dans
la fonction
existentielle.
Ainsi,quelafemme aità historiquement
inappropriée,
erquiserait
encore
plusinappropriée
devenir
femme,
le noiraitàdevenir
noir,signifie
qu'ilsont
à redéfinir
aujourd'hui
auxtemps
d’uncapitalisme
décentralisé.
Maisune«unifi-
lesconditions
deperception
d'eux-mêmes
etdumonde
àpartir
de Gtion
transversale
»despratiques
quotidiennes
reste
souhaitable,
afin
lapositionparticulière
qu'ilsoccupent
pourvoiretparler—position
que
lavisibilité
duprocessus
desubjectivation
deteloutelgroupe-
quifaitbouger
lalangue
françaiseàpartirdesaccents
africains,
qui
Sujet
minoritairepuisse
seconnecter
à d’autres
fragments
minoritaires
renverse
lecadrage
d’unephotographie,
quiouvredespossibles
au
Sn
devenir.
Ainsi
enSicile,
lavisibilité
médiatique
provoquée
par
les
tqs
10.
Jacques
Rancière,
«L'esthétique
commepolitique
»,inMalaise
dans
l'esthétique,
Paris,
Galilée,
2004. 11:
James
C.Scour,
LaDomination
etLes
arts
dearésistance.
Fragments
d'un
discours
:Paris,
Amsterdam,
2009.
Du«mass
media
act»àLacréation
des
médias
libre 357
356 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECD'ELEUZE

yment
machinique
descorps,
auxpositionnement
existentiels
qui
militants
dumouvementantimilitariste
NO MUOS a suscitéunePrise Æriennent
laproduction
et laréception
d'images
etmots,
auxn
deconsistance
degroupes
allant
desimmigrés encentrededétention etauxactes
quicréent
cetteruptureavec
lessignifications
dominantes
auxcollectivités
opposées
àlaprivatisation
de
réservesnaturelles,
àde a quiresticuent
lesmultiplicités
intensives
volées.
collectifs
dediscussion
surlaconditiondesfemmes en Sicile,
Le secondproblèmea traità la luttepourla reconnaissance
des
minoritésdansl’espacepublic.On pourraiten effetsedemandersi
IV.NÉCESSITÉ
D'UNERÉAPPROPRIATION
DESOUTILS TECHNIQUESPAR LESMINORITÉS
nousn'avonspasaffaireà laconstitutiond'un « modèle»animé EN DEVENIR
ledésirdedevenir
majoritaire
: lesconditions
devieconcrètes
des
minorités
nepermettent
pasderésorber
laquestiondesprocessus
de
subjectivation
identitaires
ensimples
rermes
deface-à-face
avec
les Dans/cietAilleurs,mettant
enregard
desimages
d’une
famille
modèles
dominants,
pour
la simpleraisonquelesforcesenprésence
française
assistant
auxprogrammes
detélévision,
etdes
images
dela
résistance
palestinienne,
Godarddemande
:
sont
fortement
inégales.
Certes,
l'inclusion
des
sans-droits
àunÉtat
de
droitqui estl'Étatd'exception
lui-même,chosequelesminorités
en D'oùvient-ilquenousavonsétéincapables
devoir
et d'écouter
cesimages
luttesaventmieuxquequiconque,peutparaître« un problème tout routes
simples
etquenousavons,
comme
toutlemonde,
dit autre
chose
à
àfaitsecondaire
parrapport
auxchemins
de
l'imperceptible
».Mais
il
y a,dansl’exaltation
d’unerésistance
jamaisachevée,
le risqued’un propos
d'elles?
Autre
chose
que
cequ'elles
estquenousnesavons
disaient,
pourtant.
Sans
doute,
nivoir, nientendre.
Oualors
queLesonesttropfort
romantisme delaluttequiest àsontourun cliché,et, quiplusest,est
émis depuislelieusûroùnoussommes, nousquinesubissons pastous etcouvrela réalité.
lesjoursdescontrôlesaufacièsdanslemétro parisien.
Alors,comment
laconquête d’unespace de
visibilitéparlesminoritéspourraitengager L'intolérable
duquelnousnecessons
denousdétourner,
cette
lumière
enmême temps qu’undevenir-minoritaire desminorités, undevenir- trop
éblouissante,
est uneexpérience
politiquement
et esthétiquement
minoritairedetoutlemonde? Un véricabledevenir-minoritairese paralysante
àlaquelle
il esturgent,
face
auxgraves
mutations
socio-
définitmoinspar le faitdesavoir cequisepasse dansnotreville,en économiques
en cours,de répondreenrenouant
avecdespratiques
Grèce, enMéditerranée, àCalais,queparl'impossibilité d'esquiver quiprolongentlechampdecréation
ouvertparuntypedepercep-
l'alternative
entre devenir-noirouêtre-raciste,
devenir-femme ouêtre tiondifférenciée,
aulieudesecontenter
decerteperception,
à titre
machiste,engros faire partie
duproblème oudela solution "2.
Il n'ya d'ébauche
d’unmondeque
l’on nefaitpas
advenir.
Dans lanécessité
évidemment pasdepassage automatique delaconnaissance comme d'une
reconfiguration
du
sensibleetdufaisable,
la distinction
que
l'on
ensemble desconditions d'écouteerderegardsur
les barbariescommises opère
entreminoritésetdevenir-minoritaire
semble
souvent
occulter
autourdenousà undevenir-minoritaire. L'image dit précisément leproblème,
pourseprésentertropvitecommela solution.
Sile
cette
disproportion
entre
le«trop»quinousimmobilise,
erl'action devenir-minoritaire
setientcommela possibilité
toujours
ouvertede
qu’ondevrait
engager,
erqui,aulieud'ouvrir
la voieàunenouvelle changer
lesystème
dominantdesignification,
d'identification
etde
perception,
nousfaitnousréfugier
dansleconfortducliché,
cantpour représentation,
nousmaintenons
quelesminorités
ontuneplace
de
lesminorités
quis'enferment
dansdessignifications
données,
quepour choix
dans
ces
devenirs
comme
puissance
d’auto-affecration
existentielle
lerestant
dutissu
social
quifermelesyeux
face
auxarocités
dumonde plusmarquée,
Er c’estauregard
deleurs
capacités
deréappropriation
des
contemporain.
Lesconditions
pourunnouvelagencement
d'énon- Outils
techniques
etdemodification
des
codes
culturels
qui
y priment,
ciationrestent
donc,à notreavis,soumises
à la créationd'unnouvel qu'une
énonciation
nouvelle
peut
produire
unnouveau
mondequi
“tarde
àapparaître
».
12.Guillaume
Sibertin-Blanc,
«Généalogie,
topique,sympromatologie
æ*
subjectivation
politique
:questions-programme
pour
unconcept
politique
deminorité».
Dissensus,
revuedephilosophie
politique
del’Université
deLiège,
n°5,mai2013.
XXX

Laperversion
deleuzienne
: prise
etméprise

FRÉDÉRIC
RAMBEAU

Laphilosophie
deDeleuze
etGuattari
estbienconnue
pour
sa
promotion
delaschizophrénie
er
l'attention
qu’elle
porte
aux
processus
psychotiques.
On notemoinssouvent
quela perversion
futpour
Deleuze,
avantsarencontreavecGuattari,
unequestion
essentielle.
Alorsque
l'éloge delaschizophrénie
vadepairavecunedestitution
delapsychanalyse,celuidelaperversion
montrelerôleconstitutif
quelapsychanalyse
freudienneetlacanienne
ajouédansl'élaboration
des
premiers
concepts
deleuziens.
Reconsidérant
l'éthique
comme
unesymptomatologie,
Deleuze
découvre
danslaperversion
(àla
findesannées1960,à partirdesaPrésentation
deSacher-Masoch)
unartdel'hésitation
créatrice.
Sapuissance critiquetient
dansune
suspension
dubien-fondé decequiest.Elledestirue
lesensmême de
l'alrernative
erladivision
subjective
quiestcensée s'yjouer,auprofit
d'uneoscillation
humoristique
et,selon
lui,dévastatrice.
Sapuissance
esthétique
tientdans
la bifurcation.
Cettebifurcation, cependant,
est
plusunenature
qu’une
condition.
C'est
une
hésitation
objective
dans
lescorps,dans
la différenciation
biologique
desorganes,
dansla
matière
même
duvivant.
Sansdoute
Deleuze
traire-t-il
laperversion
enmétaphysicien,
plusqu’enclinicien.Laperversion
deleuzienne
est
une
Idée:sonontologie
separtage
entre
une
analytique
deladénéga-
tionetuneesthétique
delabifurcation.
Pourensaisir
Lesens,
ilest
nécessaire
delaréinscrire
dans laloideson
glissement,
ensuivant
le
filparfois
dérourant
desmétamorphoses
desonconcept.
Il prend
sa
source
danslecasSacher-Masoch.
Dérivant
de lastructure
subjective
des
processus
pervers,
mise
enévidence
parFreud
puis
par
Lacan:
ilenrendfinalement
méconnaissables
lescontours
propres
_— e
leterrain
d’origine,
la viesexuelle.
Il disparaît
ensuite,
nr
. Sonéloge
delaperversion
n'enestpasMOINS
nds nsdeleur
tie depersonnages
quis’acharnent
àinstaller
lesconditio
360 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE
Laperversion
deleusienne
:prise +

propre échéancelarvaire,
comme lemasochiste,
etaussiParce
qu’il tient
comple
æ AEAIS lon quel'autre,
sous
l'influence
depulsions,
correspondà uncertain tondelaphilosophie
deleuzienne.
Quand dérache
lemoidecettedernière?,
»LePervers
reconnaît
la réaliré
dt,
elleestaniméeparla vaste
puissance
dusensible,
puissance
derêve
et différence
dessexes,
etlaRe delacastration,
tout
en élaborant
en
descience,elleinvoque,pourtoutethos,
desformesdeviequisont même tempsuneconstruction
fantasmatique
quila destitue
:«jesais
comme
fixées
dansunmouvement
entrainde
se faire,in statunascendi, bienque,maisquandmême...»Lefantasme delamère phallique
L'intimité
delaSangsue
et del'Homme supérieur,l'alliance
somnam. neutralise
l'incidence
dupère
enneluisupposant
plus
ceque
lamère
buliquedelaguêpeetdel'orchidée,
etc.,celan'estpasétranger
au désire.
Toutefois,
si lamèreesttoute-puissant
,C'est
danslamesure
«charme »qu'exerce
cettephilosophie,
danstoutel'ambivalence
du oùelleestbienréférée,
d'unemanièreoud'uneautre,
àlafonction
terme.Au sensoù l'entendDeleuze: celuid'un imperceptible
mais ternelle.
Cettedernière
estcertes
déniée,
mais
ellen’est
pasniée
: elle
définitif
changement
d'atmosphère,
uneoscillation,
untrouble
dans estdéléguée
auprèsdelamère. Enraisonmême del'ambiguïté
desa
l'espace.
Au senségalementd’un enchantement, d’unmagnétisme référence,
lesignifiant
phallique
peut
revenir
àl'instance
maternelle,
envoütant,souventnourride codestrèssibyllins.Son élogede
la créantcommeun «court-circuit»,unedisjonction
danssonattribu-
perversion
abeauêtreponctuel,
il posedoncdesproblèmes
qui
sont tion.Lepervers
semaintientdansunentre-deux
symbolique,il hésite,
aucœurde l'éthique
deleuzienne.
Cettemanière
desoutenir
la règle «oscille
comme
l'amplitude
d’unpendule
».Laréférence
paternelle
enlatransgressant
consiste-t-elle
àensaper
lesfondements
oubien est
suspendue,
nonpasdans
unemère
hors
laloi,mais
dans
une
mère
reste-t-elle
atrachée
àcequ'elle
feintdesubvertir,
sansjamais
rompre quiaprislerelais
delaloi.
vraiment
avecl'ordredont
elle révèlelesstructures?
Et,demême,
en Enétantremise entrelesmains
delamère
(c’est
l'opération
du
portant
à salimite
lesens
spinoziste
del'éthique
(une
éthologie
de contrat),
la loi ordonnemaintenant
cequ'elle
étaitcensée
défendre.
l'Homme)Deleuze
peut-illuiaccorder
unautrerôlequeceluid'être Freud amontré, comme on sait,
la source œdipiennedelaloimorale
«àl'heure
dumonde »,c'est-à-dire
aufonddeserenirdansl’ordre kantienne.L'impératif catégoriqueestl'héritier
directducomplexe
deschoses
? d'Œdipe*.Parsoncaractère structurellementindéterminé,
laLoiest
lamême chose que
le désirrefoulé.Sibienque suivresondésirrevient
1.ANALYTIQUEDELADÉNÉGATION àfairesondevoir.C'estcetteconséquence delaloimorale quele
masochiste
approfondit humoristiquement: saplus
stricte
application,
Il pourraitsemblerqu'unedénégationengénéral
estbeaucoupplussuper- salittéralisation
a l’effec
opposé à celuiqu'onaurait normalement
ficielle
qu’une négation
oumême unedestruction
partielle.
Maisil n'en
est attendu
(cen’est
pasl'inceste
quidoitêtre
expié
parlasouffrance
etla
rien;il s’agit
d’une toutautre
opérationquineconsiste
pasàniernimême punition,
c’estl'inceste
quijouehumoristiquement
commel’expiation
àdétruire, maisbienplutôt
àcontester
le bien-fondé
decequiest,àaffecter delaressemblanceaveclepère).
Leprocessus
pervers,
quiestaussi
cequiestd’une sorte
desuspension,
deneutralisation
propresànous ouvrir, chezDeleuze
celui
duglissement
humoristique
d'undegréàunautre,
au-delà dudonné, unnouvel horizonnondonné". vient
saperladifférence
dessexes
comme causesignifiante
dudésir
et
Lnécessité
del'alternative
imposée
parLetranchant
de lacastration.
Dansladénégation
perverse
(laVerleugnung),
lesdeux
représentations L'hésitation
et l'ambiguïtéperverses
quant
àl'attribution
phallique
contradictoires
erinconciliables
ne
se situent
pasentre
leMoietleça, %etémoignent
pasd’unerégression
pathologique,
elles
n'indiquent
comme
dans
lerefoulement
névrotique,
maisdans
lacohabitation
de Pas
undéfaut
ouunmanque
desymbolisation
(comme
symbolisation
cesreprésentations
àl'intérieur
d’unmême système. «Au
lieu d'une dumanque).
Latransgression
perverse
delaloiest
une
manière
dela
attitude
psychique,
ilyenadeux, expliquait
Freud,l’une,
lanormale, Soutenir
àsafaçon.
mens

1.Gilles
Deleuze,
Présentation
deSacher-Masoch
[désormais
abrégé
PSM].
Paris. 3Sigmund
Freud,
Abrégé
depyychanabne,
Paris,
PUF,1967,
p.80. |
Éditions
deMinuit,
1967,
p.28.
2.PSM,
p. 82. P.4
#9,14,L1
PUF,eproblème
973, économique
p. 295. dumasochisme,
inNévrose,
psychose
erperversion,
Laperversion
deleurienne
:prise
etméprise363
362 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

d'elle
unnouveau
système
deprovocation.
Dans làPrésentation
de
Aussilaperversion
deleuzienne
est-elle
unetrèssingulière
«père. Sacher-Masoch.
cescaractéristiques
delaperversion
étaient
référées
à
version
».Ellerenverse
lalogique
même
surlaquelleelleprend
appui
: unefantaisie
régressive
plusculruraliste
quepulsionnelle.
Ledouble
l'équivalence
freudienne
entrephasephallique,castration
etpère
rovocateurdu masochistequeDeleuzemettait
enavant,
symbolique.
+Lapsychanalyse
freudienne
engénéral
souffre
d'une
inflationdupère»affirmaitdéjàDeleuze
en 1961,danssonpremier
texte
surSacherMasoch*. Lemasochiste
partage
aveclaplupart
des decequesajouissance
seproduitparrapport
àcequin'est
qu'une
représentation
de l'actesexuel.Danslemondedosdesonfantasme,
personnages
littéraires
privilégiés
parDeleuze
(ducélibataire
deKafka,
auxfrères
américains
deMelville)
unemènerévolte
contrelepère.Ilest Lscène
dumasochiste
incarne,
dans
lafigure
d'une
femme
quin'est
l'incarnation
d'unmodedesubjectivarion
anti-œdipien.
Maisc'estun B quepourl'incarner,unejouissance
purequinetombepassousle
anti-Œdipe perverset non pas(encore)schizo.Car l'annulationdu cœoup
duprincipedeplaisirlimitant
saloi,mais
quiestaussipurement
père
nesignifie
pasladestitution
del'ordre
symbolique,
aucontraire, imaginaire.
Lesupra-sensualismedunouvelhomme, nédel'inceste
elleestsacondirionetsoninauguration.
« Il y a lieudes'étonner comme seconde naissanceou«parthénogenèse »,est«sans amours
lorsqu'on
voit
la psychanalyse
danssesexplorations
les plusavancées, seruelles
».DansLogique dusens, laperversion
s'estdérachéeducas
lier l'instaurationd'un ordresymboliqueau nom du père*”.»Cela Masoch. Elles'éloigne
decetunivers mythiqueetimaginaire qui
n'empécherapasLacanderendre
unbelhommage àDeleuze:+ilécrit restait
solidaire
d'unepensée delareprésentation.
Il s’agit
maintenant
surlemasochisme incontestablement
lemeilleurtexte
quiaitjamais d'établir
lastructuredelaperversion,quin'apasbesoin d'être
elle-
étéécrit!»(LeSéminaire,
séance
du14juin1967). Dansl'imagede même perverse,
autrement
dit, d'enproduirecœquiseraitleconcept.
li mère
phallique,
lemasochiste
dissocie
l'Autre,
constitutif
de l'ordre
symbolique,
d'avecle Père.Il ouvreainsiaudésirunemanière
de D'unecertainemanière notreépoquedécouvre
Laperversion
{…].Nous
traversercetordre,
d'vjouer
pleinement,toutensuspendant
ceenquoi cherchonsplurèrlastructure,
c'est-à-dire
laforme
quipeut
être remplie
par
il étaitbienfondé
(la«signification
duphallus+).Lephénomènede @œsdescriptions
etrécits(puisqu'elle
lesrendpossibles),
mais n'apasbesoin
«couverture »queDeleuze
restitue
chezSacher-Masochestceprocessus del'être
pourêtrediteperverse.
quitraverse
unedimension
enlafaisant
devenir
totalementautre,
grâce
àquoiDeleuze,
proposant
unenouvelle imagede
l'organisationdela L'importance
queprend
laperversion
danslelivre
de1969
s'explique
viepsychique,
repensera
dansLogique
dusensl'ensemble
deLachéorie alors
parlerôlequeDeleuzedonneàlasexualité
dans
lagenèse
du
freudienne
despulsions
etdeleurs
destins. sens.
Lagrande
idée
freudienne
selon
laquelle
lapensée
est
delasexua-
litémétamorphosée
ouconvertie,
rendpossibleunrapport
selon
le
IL.ESTHÉTIQUEDE LA BIFURCATION non-rapport
entre
lescauses
corporelles
erleseffets
desens
incorporels.
Lathéorie
psychanalytique
delasexualité
jouealors
pourDeleuze
une
Lesuspens
etlerenversement,l'humour erleglissement,
sontdes
fonction
essentielle,
autant
quelaphilosophie
stoïcienne
des
incorporels,
traits
delaperversion,
décritsdanslaPrésentationdeSacher-Masoth,
dans
l'élaboration
d'unmatérialisme
nonréducrionniste
dusens,
un
queDeleuzeprolonge
etsystématise dansLogiquedusens.
Lapervet-
sion
vient alorsnommerl'artetlaconquête dessurfaces,
«ledouble matérialisme
del'incorporel.
Ellemontre
enquoile symbolique
tient
sensdelasurface,
lacontinuité
del'envers etdel'endroit”
»,quifait
aucorps.
Quand, danssonSéminaire,
Lacan(audébut
delaséance
du12mars
69)rendhommage
àDifférence
etrépétition
etLogique
du
sens,
il soulignequeDeleuze,avec«sasuprême élégance
»,amontré
5. Gilles Deleuze,« De Sacher-Masochau masochisme»,Arguments,
n°21 combien lesstoïciensétaientun sourènement
essentiel
àsonpropre
(5*année,
1"crimestre),
réédité
dans
Mulrirudes,
Exils,
2006,
p.24. discours
analytique.
S'ilfauteneffetselon
Lacan
rendre
justice
aux
6.PSM,56. Stoiciens,
àceslogiciens
pourlesquels
toutestcorps,
€st quils
7.Gilles
Deleuze,
Logique
dusens
(désormais
abrégé
LS],
Paris,
Éditions
de me
Minuit,
1969,
p.168.
8.LS,
p.325-326.
Laperversion
deleuzienne
:Prise
etméprise
365
364 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

témoignentd’unevéritémanifestée
égalementpar
la psychanalyse : afaic
surgir
leMord'esprit
danssarelation
àl'inconscient.
C’est
depuis
l'image
ducorps neseproduit
quedanslacoupurelogique.Lalogique œure
logiquedu sens,instruitepar
la théorie
freudienne
despulsions
deleuzienne
dusens nereconduit
pas lesens
auxcorps.Parcequ'entre jelles
etlathéorie
lacanienne
duphallus,
quedoitsecomprendre
à lesdeux,
elleintroduit
untroisième
termequin'estplustoutfait Je lapromotion
deleuzienne
delaperversion.
Pourtant,
c’estjustement
corps,
ses actions
etsespassions,maisuneimageducorps,et qui
n'est à oùDeleuze
semble
le plusproche
delapsychanalyse,
qu’ils'en
pasencorelasignification,
l’organisation
propositionnelle
dulangage, détache.
Laperversion
bascule
depuislaviesexuelle
(àlaquelle
Freud
maisunfantasme.Cette position
d'«intermédiaire
»,c'est
lasexualité àdonnésonconceptetLacansastructure)
danslavieelle-même,
quivientl'occuper.
Sila pulsion
sexuelle
estdisposée
àouvrir,àpartir dans
desprocessus
éthologiques
oumême physiologiques,
Alors
quela
descorps,unavenirà lapensée,
c'estqu'elleestlaseulepulsionqui nalyse
neparledeperversion
qu’en
rapport
aveclasexualité,
la
nepuisseêtrequepartielle.
Comme
ellerate toujours
la réalisation
de rsion
deleuzienne,
elle,s'affranchir
desonterrain
d'origine
pour
sonbut,
elleproduitunedifférence
d'avecelle-mêmequi
lui ouvre
une désigner
ladiscontinuité,
le trébuchement,
l’accroc
quisingularise
un
nouvellevoie.Parcequela coordinationdeszones
partielles à travers mode
d'existence
immanent
encours
dedifférenciation
:
uneimagecentrale
échoue,l'élément
qui tentaitdecoordonner
les
zones
partielles
(lephallus)
estréduit
àn'être
plusqu'un
signifiant
sans Cequ'on
appelle
pervers,
c'est
précisément
cette
puissance
d'hésitation
objective
signifié,un signifiantvide”.Il acquiertalorsun senssexuel,
àpartir danslecorps,certepartequin'estnidroitenigauche,
cette
détermination
par
du fait de ne plusêtreun organesexuel,
il fait existerunedimension cascade[...] cesuspensqui marque chaque momentdeladifférence,
cette
autonome du sensparrapportà sacausecorporelle.
Autrement
dit, immobilisation
quimarque
chaque
moment
delachute'!.
l'impasse
inhérente
aucorpssexualisé
constitue
la conditiondepossi-
bilitédel'émergence d’uneffetincorporel. Sous cetangle,
laperversionn'estplusunesubjectivarion sexuelle,
Aussi,l’aporie àlaquelle conduit,dansLogiquedusens,lagenèse nimême unstylededésir.C’estuneallurevitaleet,finalement,une
dynamique du
sens, cesautdanslevide,cettecoupure quicourt- opération constitutiveduprocès delanature elle-même. Pasplus
circuite etempêche lacontinuité d’unprocessusgénétique,est-elle que l'organisation
delaviepsychique,la différenciationduvivantne
absolument nécessaire,
structurelle.Elleseule
peutrendre compte,en s'expliquepardesrégressions,
fixationsouarrêts dedéveloppement.
réalité,del’engendrement dusens incorporel
àpartirdescorps.
D'où Cesont desconceptsinadéquatspourexprimerlestracés,
lesglissements,
lerôlecrucial queDeleuze décide d'accorder,
àl'époque,auphallus lesrotationsselonlesquels
procède
la différenciationbiologique des
lacanien,erdoncfinalement àlacastrationsymbolique.
Réciproquement, espèces.Lesvitesses,
lesrythmesdifférentiels,
lesorientations
etlesaxes
il faitapparaîtreleliendelapsychanalyse àcette
autre tradition
dela dedéveloppementsontlespremiersfacteurs
del'individuation.
Cequ'on
logique, irréductibleàlaproposition apophantique: unelogique de appellepervers,cesontcesmouvements «contre-nature »,ausens
«lamatérialitédudiscours erdel'immatérialité
dusens ».Elleremonte où,comme
ceuxdel'embryon,
ils nesontpasviables
spécifiquement,
deMégare auxStoïciens. Elleanimeaussilesusages rhétoriques
et débordent
les limites
desgenres,
ordres
ouclassesquirapportent
les
littéraires
desinversions,
descorsions etrétorsions
dusens, comme chez différences
individuelles
àlaressemblance
eràl'identité.
Laperversion
Roussel, BrissererWolfson : làoùlessujets
parlants
ontau corps,àla n'adonc
plus riend’unartérotique
nid’unritesexuel,
comme elle
matérialité
deleurdiscours
un rapportindu,queréprouve
l'ordrede l'était
danslaPrésentation
deSacher-Masoch.
Elle
estbien
plusproche
lamoraleadulte
er lesensdesréalités,
commelemontraitFoucault à de
la définition
qu’Étienne
Geoffroy
Saint
Hilaire
proposait
dela
propos
desenfantillages
frauduleux
etanarchiques
dusophisme,
quiest
Monstruosité
: «lasurvivance
d’uneformeembryonnaire
transitoire
»,
«ausensstrictuneperversité!°
»—toutecettedimension
dontFre
Que
delathéorie
freudienne
delasexualité.
Elledésigne
certes
un
Mouvement
de choir,
uneéchéance.
Maiscen'est
pascelle
parlaquelle
9.CES.Ziäek,
Organes
sans
corps,
Deleuze
erconséquences,
Paris,
Amsterdam,
2008. Unsujet
adviententombant
hors
delui-même.
Cen’est
pasl'échéance
10.
«Leçons
sur
lavolonté
desavoir
»,inCours
aucollège
de
France
(1970-1971). ————_—_—_———…-
Paris,
Seuil/Gallimard,
2011,
p. 61.
11.LS,
p. 326.
366 AGENCERLESMULTIPLICITÉSAVECD'ELEUZE
Laperversion
deleuzienne
:Prise
etméprise
367

d'unsujetausensoùLacanreconnaissait
danslemasochisme,
dans dredumême couplaforcecritique
qu'ilpouvait
luireconnaître?
à sonacharnement
àinstaller lesconditionsdesapropreobjectivation Qu'est-ce
quiconfère
encore
la perversion
cette
puissance
décapanre
unefigureexemplaire deceteffetdechute,dedéchet,dereste
. decontestation
et de provocation,
quandellen’estplusregardée
ni
l'avènementsubjectif
:cequelesujetdevient
souslaforme
del'objet comme unesubjecrivationsexuelle,
ni commeunedestitutiondela
petita.C'estl'échéance
biologique
de
la différence
individuante,
celle oidupère
?
desralentissements
etdesprécipitations
qui marquent
les durées
de
gestation
deladifférenciation
temporelle desespèces.Danscepassage HI. PRISE ET MÉPRISE
àla
limite, danscerte
métamorphose delaperversion,il peutsembler
queDeleuze finisse
parendissoudre
les contours. Il negarde qu'une DansL'Anti-Œdipe,le « schizo»l'adéfinitivement
emporté
sur
partiedelaconception freudienne d'ensemble delaperversion et lepervers.
En mêmetemps
queDeleuze
sedétache,
avec
Guatrari,
selonleprincipeduparsprototo,l'utilise
pourladétacher decequi delapsychanalyse,
il abandonne
certe figureemblématique
deson
constituel'autrepartiede l'ensemble.
Il laisseraic
ainsidecôtétour travail
précédent.
La perversion
nevautpasmieuxquelesnévroses
cequi,certes,
rendlapsychanalyse
incommode, maisquifaitaussi
sa œdipiennesetlaterreasilaire
de
la psychose.
Ycompris danslesdépla-
nouveautéetluirevient
enpropre(selonlereproche
quedéjàFreud cementsqu'ellefaitsubir
à lalogique phallique,
et dans lesdifficultés
adressait
àJung). quelapsychanalyse connaîtpourenrendre compte,elleestencore
Laperversion
deleuzienne
est unJanusàdoubleface.Elledésigne humaine,trophumaine. Elleappartient
encore,
comme le masochiste
àlafoisuneopération logique(ou«dialectique
»)eruneindividua- de1967,aumonde dl'âme,c'est-à-dire
e del'anti-production,
celuides
tionsymptomatique (ou«esthétique »).Cesontlesdeuxversants, «fantasmes»quinesontpasdes«programmes »,desdésexualisations
critiqueetclinique,desonIdéede la perversion.
Ladissociation etdesresexualisations
quimanquentles déterminationsmachiniques
critiqued'avecroutelogique delanégation oudelacontradiction etquantitatives
delaproduction désirant.
Aussilalecturedeleuzo-
vadepairavecunedescription duprocès delanaturevivantepar guattarienne
deProustnevise-t-elle pasàarracher
la perversion
à
unensemble debifurcationsdisjonctives.
Laformelogiquedudéni saréductionsymptomatique par
la psychanalyse,
comme c'était
le
suspend nonseulement certains
aspects
d'uneréalitéperçue,
mais casdanslaPrésentation deSacher-Masoch.Ellerestitueununivers
lasignification
même duchoixetladivisiondusujetquiest censée schizophrénique,ununivers sensible
quiaurait
étésoustrait àses
s'yproduire.Elleestl'affirmation
simultanéed'unereconnaissance propres
conditionshumaines
et où lalibidos'identifie
àla«pitié»,
conscientedelaréalité, etdelasuspensiondubien-fondédecerte Àunesympathie
naturelle
aveclaviepré-individuelle,
qu'expriment
réalité.
À lapositionmasochiste deladénégationetdelasuspension les«manœuvres
merveilleusement
combinées»que«lesOrchidées
fera
écho,
à l'autre
bout
de laphilosophie
deDeleuze,
l'affirmation
de exécutent
poursefaireféconderpar
les Insectes!"
»,comme toutes
lanon-préférence
radicale
d’unBartleby.
Cerethos
«problématique
» lesautres
captures
instinctives
ecfantastiques
d'êtres
qui
vivent
20
s'enracine
dans
la vieelle-même,
dansleprocessus
dedifférenciation plusloin de tout sujethumain.Certepassion
du merveilleux,
très
etd'involutiondu vivant,Comme le disaitJankélévirchà proposde inspirée
deBergson
etdeSchopenhauer,
quiaccompagnt
: hé
laduréebergsonienne, « la vien’apasà choisirpuisqu'elledure" delanégativité
dudésir,entraîne
enfairledésir
dansunemit
bienplussombre.On nepeutplusguère distinguer
| innocence
L
C'estcequi
inscritl'élogedeleuziende
la perversion
dans
son apologie
delavie.Caraufond, la position subjective
dupervers,
déterminée la«productiondésirante
»desprédations
les es ee ge
monde delaschizophrénie
proustienne,
lemonde oùl'onneLe e
danssonoscillationmême, créatrice
danssonhésication,
vautauss!
biencomme unedescription dumonde, delagrande
Naturedont
la Plus,
l’universsilencieux
végétal,
lafoliedesFleurs
dontlethème
philosophie
deDeleuze fairvoirlecaractère
fascinant
et stupéfiant.
En
sesaisissant
duconcept
de perversion
enméraphysicien,
enledélestant sens
Œuvres,
Paris,
Édition
duCentenaire/
ducontenu
psychanalytique
quiest
le sien,enletransportant
hors 12.HenriBergson
L'Évolution
créatrice,
in
desonchamp
habituel
deschématisation,
Deleuzeneluifait-il
pas PUF,
1959,
p. 639.
368 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE Laperversion
deleuzienne
:Priseetméprise369

accompagne
la rencontre
entreCharlus
etJupien'*,cemonde-là
est ces
exemples,
pourquoi
faut-il
passer
par
eux?
Corps
vidés
aulieu
depleins.
aussiceluioù,comme
l'écrit Deleuze,
«s'entrelacent
detoutesfaçons Qu'est-ce
qui s'estpassé!??
l'innocence
et lecrime».Entrelesdeux,
entrel'innocence
erlecrime,
il n’ya nullecontradiction,
nulledivision.Entrelesdeux,
il n'yapas Il yadans
lemouvement
mêmedudésir,
dans
sapuissance
de
àchoisir, carlavieelle-même nechoisitpas. déerritorialisation,
quelque
chose
comme
unepossibilité
nécessaire
L'alliance delaguêpe etdel'orchidée,quicélèbre l'inventivité
du d'effondrement.
Carle risquen'estpasiciuneéventualité.
Du moins,
vivant,leursymbiose merveilleuse
censéeexprimer l'innocence naturelle lefairquecelapuisse
arriverindique
plusqu'une
possibilité
ence
dudésir inconscient
asonpendant dans unedanse macabre : laparalysie sens
:quelquechosequiappartient nécessairement
aufonctionnement
atrocedela chenille parlaguêpe ammophile hérissée,Latranssexualité considéré,
à telpointqu’ilfailledireque,d'unemanière
oud'uneautre,
rhizomatique, au-delà
desordres etdesrègnes, deladualité dessexes çasepasse toujours
plusoumoins, maisnécessairement,
comme ça.
etdesdifférences degenres etd'espèces,s'exprime également dans
les C'estjustementcette
partdedestructivité
inhérente
audésircomme à
noces trèsesthétiques delaguêpe etdel’orchidée, etdanslasuccion l viequidonneàl'éthique sonrôleetsafonction,
qu'elle
seformule
terrifiantequel'Ammophile faitsubir
à saproie. «L'Ammophile hérissée d'abord,aveclapsychanalyse,
comme unartdescontre-effectuations
donneneufcoupsd'aiguillon successifs
à neufcentres nerveux desa (dans Logiquedusens)ouensuiteavec Guattari,
enseproposant de
: Chenille, erenfinlui happe latêteetlamâchonne, justeassez pour remplacer
la psychanalyse,
comme une
schizoanalysel'étudepratique
déterminer laparalysie
sanslamort. »Lesagressions, lesprédations desdangers surchaque
ligne dedéterritorialisation
dudésir'®.
Il y
lesplusviolentes etlespluscruellesdeviennent indissociables dela constamment chezDeleuze etGuattari
cette
ouverture anxieuse
àla
sympathie universelle
ervicaliste
entreroutes leségales différences.«La tentationpsychotique,
et l'appelàlaprudence,
auxprécautionsnéces-
sympathie bergsonienneserait
entreautres celleduSphex ammophile sairesàlatraversée
dupéril(«l'expérimentation
»)schizophrénique.
pour
le grillonqu'ilvatuer:cette«sympathie »peurêtreagressive et Orce problèmen’est
pasexactement
celuidelaperversion.
Il lui
meurtrière. »L'apologiedelavie,danslemerveilleux fonctionnement est
liébien
sûr.Laperversion
aétéchez
Deleuze
unartmineur
dela
desmachines désirantes,
rendrait-elle
acceptable, sinonaimable, parun suspension,
donc
l'humourestfait decascades
disjonctives,
unepuissance
simplechangement depointdevue(lemême monde, vude l'intérieur), d'hésitation
quin’enestpasmoins
parfaitement
déterminée,
mais
qui
cetunivers oùs'équivalentlesjouissancesetles prédations? Est-cela reste
toujours
avecsapropreannulation
(sousdesformes
defixations,
conséquence perverse
del'éthique vitalistedeleuzienne? Pourquoi, d'hébétude
et de
fascination,
dedemi-conscience
oudesomnambu-
demande
Deleuze
dans
Logique
dusens
en69:«tourévénement
est-il lisme)
dans uneintense
proximité.
DanslaPrésentation
deSacher-
dutypelapeste,
laguerre,
lablessure,
lamort'$?»,ouencore
avec Masoch,la«théologienoire»dumasochistefaitentendre
larépécision
Guartari
dansMilleplateaux,
en80(précisément
après
l'évocation comme lapuissance
terribledel’Instinct
deMort.Mais,précisément,
d'agencements
masochistes)
: € quiimportealors,cequiestdit«pervers»,€stlemunies PS
lequel,
comme enuninstant, lemasochistereconvertit
enplaisir
Pourquoi
cette
cohorte
lugubre
decorps
cousus,
virrifiés,
catatonisés,
aspirés, Purautomatismequi
s’enétaitaffranchi.Leperversestunps
puisque
leCsOestaussi
plein
degaieté,
d'extase,
dedanse? Alors
pourquoi spirituel
»,maissaspiritualité
dientplusàlavitesse
et à 2
saseule
conversion
estcelle
despulsions
endispositions
deL.
€ncapacité
d’abstraction.
Peut-être
cepersonnage
a-t-il,
à FRS
13.Cf.Jacques
Rancière,
«Existe-t-il
uneesthétique
deleuzienne
»,inE.peer jouépourDeleuzele rôled'uneéchappée,
oud'unns ns
(dir.),
Gilles
Deleuze,
uneviephilosophique,
Paris,
LesEmpécheurs
depenser
en delatentation
psychotique.
Etlecouple-phare
dea
1998,
p. 531.
lepervers
etleschizo
rapproche
parfois
lelivredeDeleuze
14.HenriBergson,
L'Évolurion
créatrice,
op.cit,p.641.
15.
Vladimir
Jankélevitch,
Henri
Bergson,
Paris,
PUF,1959,
p.37;cf.Christian ee

Jambe,Apologie
dePlaton,Paris,Grasser,
1976,p. 171. 17.
Mille
plateaux,
Paris,
Éditions
deMinuit,
1980,
p.187.
16.LS,p. 177. 18.
Ibid,
p.277.
Laperversion
deleuzienne
:priseetméprise37]
370 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUzr

d'«auto-analyse
».Arpentant
la surface,
lepervers
provoque,
surson estdecomprendre
cesvides,cesintermédiaires,
cesentre-temps.
Labifurcation
deleuzienne
n'estpas,commeletrébuchement
pour
la
espace
lisse,desaspérités.
ILal'andefairetrébucher
le sens,dle
e faire
glisser
etchuter
et, partant,
de«précipiter»leschoses.C'estcette hanalyse,
le moded'accès
privilégié
dusujetàcequ'ilenestdesa
puissance
dedéviation,
d'irrégularisation,
debifurcation,
qui
estaussi vérité.
Elleestplusbiologique
etcérébrale
quelinguistique
er érotique.
unepuissance
d'accélération.
C'estcepasdecôtéquiaimanteDeleuze, Maissalogiquetrèswitzig,celledela mésalliance,
del'amalgame
et
etquesonélogedelaperversion estvenumettreenlumière. del'hybridation,
partage
avecelleuneméme conviction,
Lescoupures
Laperversion deleuziennenetientpasdanslaprise,maisdansla importentplusquelesassociations,
parcequec'est
dans
les lacunes
et
méprise.C'estparlàqu'elles'inscritdanssonapologicde lavie(et lestrous
quecomportenttouteslesvies,
quesefaitleurmouvement.
qu'ellesedissocie
desdeuxcaractéristiques
communes desperversions
plusordinaires,
lavolontédemaïtrise ela
r jouissanceprédatrice),
Les
machines désirantes
grincent,
s'enrayentetdéraillent,
contrairement
à
cesmerveilleuxinstinctsdesanimaux,cesagencements
parfaits,même
quandilssontatroces,
quifonctionnent
euxsansaucune hésitation.
Comme dans
l'apparcillage
lacanien
de
la pulsion
partielle,
lesmachines
désirantes
nemarchentqu'ensedétraquant.
À partirdumoment où
leplan(celuidelaNatureetceluidelaPensée)
estsaisienlui-même,
indépendamment dubutouduprogramme,affranchi delaformation
régléed'unsujetoudetourprinciped'organisation,
il estforcéqu'il
ratetoujours.
Maisalorslesratés
fontpartieintégrante
duplan.

Lavie:ungesteplusrapide,
unbras quiretombeàcontretemps,unpasplus
lent,unebouffée
d'irrégularité,
unfauxmouvement |...].Cettemaladresse,
cedéplacementsuperflu,
cette
accélération
soudaine,
ceitesoudureratéc,
certemainquis'yreprend
àdeuxfois,cette
grimace,
ce«décrochage »,c'est
laviequiraccroche!”.

Ainsi,
sabrève
ontologie
delaperversion
éclaire-t-elle
lerôledela
bifurcation
danslaphilosophie
deleuzienne.
Elleentrelace
unepensée
quinepensevraiment
qu'inconsciemment,
etunenature quiprocède
toujours
contrenature.Elleestaucœurde
l’inventivitédelacréation,
soussesdeuxfaces,
NoÿsetPhusis.Y compris
dans
l'ultimeconcept
deDeleuzeetGuattari
—l'identité
dumondeetducerveau—cequi
faitdecerte
sorte
desuper-conscience
cosmique
unsujet,
certes
consi-
dérablementexcentré
dusujetdel'inconscient,
cesontseshiatus,
ses
intervalles
etsescoupures.
Làoùpénétrer pour
les chercher devient
créeretoù,
alors, lesconditions
d’unevéritablecritiqueercelles
d'unevéritable
créationdeviennentlesmêmes. Partant,
l'essentiel

a-

2 ——————

19.Roben
Linhart,
L'Établi,
Paris,
Édinions
deMinuit,
1981,
p.14.
XXXI

«Machines
deguerre
»:
entreconcepts,
institutions
etexpérimentation
sociale

VALENTINSCHAEPELYNCK

En1990, àToni Negriquil'interrogeaitsurlapermanence dela


question
politique
danssonœuvre, GillesDeleuzerépondait
que,son
intérêt
s'étant
toujoursdavantage porté
versles«créations
collectives
»
quevers
les«représentations
»,il apurencontrerdanslesinstitutions
«unmouvement quise distingue
à lafoisdesloisetdescontrats».
Dèsledébucdesannées 1950,il repère
eneffetdanslaphilosophie
de
Hume uneconception del'institutionqui
fait decelle-ci
non«une
limitation
comme
la loi »,maisaucontraire
«unmoyen
d’action,
un
système
inventéde moyenspositifs,uneinventionpositivedemoyens
indirects
».À reboursdecequ'affirment
les philosophies
politiques
ducontrat,
quivoientdans
la loil'essence
deLasociété,
etquisituent
lesocial
du côtédu négatif,dlea limitationetdel'aliénation,
Hume
affirme
que
le législateur
est celuiquiinstitue
etnoncelui
qui légifère,
etquesileshumainsentrentensociété,
c'estprécisément
parce
quils
n'ont
pasdedroits
préexistants.
Lesocial
doitêtre
abordéàpartir
du
versant
« créateur
»,«inventif
»,et«positif
»desesmoyens, etCequi
doit
être
enrevanche
regardé
comme «hors
dusocial
»,c'est
lenégatif,
lemanque,
le besoin.Certes,touteinstitution
sedonnecomme
satis-
faction
d’unetendance.
Mais
elle sedifférencie
del'instinct
enceci
qu'elle
n’est
jamaisdéterminée
directement
niexpliquée
parme
étnelasatisfait
queparunensemble
demoyens
obliques
etindirects.
Silasexualité
etl'avidité
rencontrent
parexemple
respectivement
des
modalitésdesatisfaction
danslemariageetlapropriété,
cen'est
pa
sansêtre
elles-mêmes
contraintes
etre-problématisées
àleurtoure
modalités.
Unemême tendance
esttoujours
porentiellement
sati 5
Par
une
multiplicité
demoyens,
cedont
témoigne
l'extrême
diversie
«Machines
de
guerre
»:entre
concepts,
institutions
… 37
374 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECD'ELEUZE

l'opposition
radicale
entre
loisetinstitutions.
En
effetalors
queleslois
desformes
sociales
dans
l’histoire,«lieudesdifférences
».Définie jient
etmoralisent
les actions,
lesimmobilisent
enlesmoralisant,
«de
comme« réflexion
delatendance
dansl'imagination
»l'institution
,
resinstitutions
sansloisseraient
par
naturedesmodèles
d'action
nousramène
selonHumeaux«propriétéslesplusfrivoles
denotre libres,
anarchiques,
enmouvement perpétuel,
enétatd'immoralité
manière
depenser
etdenotrepuissance
deconcevoir! ».
constante
»,maintenant
l'insurrection,
«noncommeunétatmoral,
» L'introduction
aurecueil
« Instincts
etinstitutions
»de1955continue mais
comme
l'étatpermanent
de laRépublique
:
d'affirmer
cetteconception
del'institution
comme positivité
etcréacivité.
PourDeleuze,
ellerencontre
lapensée
deSaint-Just,
enparticulier

où celle-cinousdonnedes«critèrespolitiques»pourdépartager
la Il serait[...] aussiabsurde
quedangereux
d'exiger
que
ceux quidoivent
tyrannie
deladémocratie
:lapremière
comprend
beaucoup
de
lois er maintenir leperpétuel ébranlement
delamachinefussent
eux-mêmesdes
peud'institutions,
laseconde
beaucoup
d'institutions
ettrèspeude êtrestrèsmoraux;parcequel'étatmorald'unhomme
est unétatdepaix
lois.Erdedéfinirl'oppression
comme
cequi«semontre
quand
les etdetranquillité,au lieuquesonétatimmoralestunétatdemouvement
loisportentdirectement
surleshommes,
etnonsurdesinstitutions perpétuel
quilerapproche
de l'insurrection
nécessaire
dans laquelle
il faur
préalables
quigarantissent
leshommes?
».Plusdedixansplustard,
en quelerépublicain
tienne
toujours
legouvernement
dont
il estmembre.
1967,
dans
la Présentation
deSacher-Masoch,
l'argument
est ànouveau
présent,
danslacomparaison
despensées
deMasochetdeSade,
l'une Comme
toutgouvernement
révolutionnaire
risque
desombrer
dans
sesituant
ducôtéd’uneperversionducontrat,l’autres'affirmance lecontraire
mêmedel’étatinsurrectionnel
quil’avunaître,
il nepeut
«républicaine
»danslamesure oùelleopposel'institutionàlaloi. qu'être
immoral,
ausensoiùl relève
del’immoralité
d’unmouvement
Alorsqu'avec
Masoch,
« c'estprécisément
l’œuvre d'artetlecontrat perpétuel
incompatible
avecl’ordre
deslois.Lecaractère
supérieur
de
quifontpasser
de lanature
grossière
àlagrandeNature, sentimentale l'institution
surlaloietlecontratsedémontre ainsiparl'ironie.
Sade
etréfléchie
»,chezSade, contesteunerépublique quicroitpouvoir
resterfidèleàlarévolution
eninstaurantunenouvelle morale,alorsqueseule l'anarchiecomme
aucontraire,
lepassage
delanature
seconde
àlaNaturepremière
n'implique
institution
estsusceptible
dedépasserlaloi’.
aucun
suspens,
aucune
esthétique,
mais l'effort
pourinstaurer
unmécanisme
Larencontre deDeleuzeetGuattarivacontinuer,à partirde1969,
demouvement
perpétuel
erlesinstitutions
dumouvementperpétuel.
d'approfondir cettepenséesingulièrede
l'institution,comme un
Continuum quiserenouvelle
et s'enrichit.
Danssapréface àl'ouvrage
Selonlaperspective
sadienne,loi etcontratsontcequisépare
encorelesFrançais
d'unevéritable
République.
Alorsque« lecontrat
Pychanalyse
ettransversalité,
publié
en1972,
regroupant
des
textes
écrits
estvraimentgénérateur
d’uneloi», parGuartari
entre1955et 1970,textes
quifontunelarge
partà sa
Pratique
demilitant
etdepsychanalyste,
Deleuze
crédite
lemouvement
aucontraire,
l'insticution
seprésente
comme
étant
d'unordrevrès
différent delapsychothérapie
institutionnelle
d'une«sorted'inspiration
à la
deceluidelaloi,commerendant
les loisinutiles,etsubstituant
ausystème Saint-Justpsychiatrique », ayant réussià amorcer
« un troisièmeâge
des
droits
erdesdevoirs
unmodèle
dynamique
d'action,
depouvoir
etde deLapsychiatrie
: l'insticutioncommemodèle,
au-delà
delaloietdu
Puissance,
Contrat®
»,Quelque
chose
sediticinonseulement
de larencontre
de
l pensée
deleuzienne
aveccelle
deGuattari,
mais
avec
lemouvement
L'affinité
deSadeavecladéfinitiondurégime républicain
de toutunensembledepratiques.Maissouscertains
aspects,
cette
Saint-Just
pousse
celle-ci,
écritDeleuze,
jusqu’à
unpointd'ironie
qui fncontre
pourrait
bienavoireulieuvirtuellement
bienavant
1969,
éstpeut-être
sonpoint
le plussérieux,
permettant
de
saisiroùsesitue Somme
si Deleuze
etGuattari
avaientcomme développé
séparément
très
ne

1.Gilles
Deleuze,
Empirisme
ersubjectivité,
Paris,PUF,1953. 3.1d.,Présentation
deSacher-Masoch,
Paris,
Éditions
deMinuit,1967.
2.1d.,
Instincts
etinstitutions,
Paris,
Hachette,
1955. 4.1, «Trois
problèmes,
degroupe
»,inFélix
Guartari,
Pychanalyse
ersransversalité,
Maspero,
1972.
de nes
« Machines de guerre
Fe'emre
concepts,
institutions
… 377
376 AGENCERLESMULTIPLICITÉSAVECDELEUZE

etsoignants
élaborent
ensemble
laviedy lieu
tôt unecertainecommunauté deproblématiques.
En effetEmpirisme edimension
instituante
aumême
ti qu'ils
partagent,
i prend
etsubjectivité
paraîten 1953,soitla mêmeannéequi voitlacréatio 2 uneémission
deradio.
Lesmt . sys
delacliniquedeLa Bordepar
le psychiatreJeanOury,expérien S
gruant
et l’institué
sont
ainsicensés
casser
le monolithis
a ni
fondatrice
pourlemouvement delapsychothérapieinstitutionnelle, formité
purementfonctionnelle
del'organisation
h tabee a
etàlaquelle
Guattari
participe
dèssescommencementsÿ, . . Cequifonctionne
doit faireaaptbe arane . .
L'expression
«psychothérapie
institutionnelle
»estd’abordapparue dysfoncrionne.
DeTosquelles
àOury,il estfondamental
dedine
souslaplumededeuxpsychiatres,Georges Daumézon etPhilippe théoriquement
et pratiquement
l'institution
del'établisserm
. Oury
Koechlin,
danslarevue
Annales
depsychiatrie
portugaise
en19526 formule
trèsclairement
certeexigence
: el
Elleadequoisurprendre audépart,puisqu'elle
nerenvoie endia
casà laquelconque défensed'unepratique
établiedeLamédecine
mentale,maisaucontraireàunetransformation
radicaledelapratique L'établissement,
c'estunbâtimentet uncontrat
passé
avec
l'Étar,
un É
psychiatrique,
à l’idéequ'ilestnécessaire
detraiterl'hôpitalavanc dejournée.L'institution,
quand çaexiste,
c'est
un
travail,une“ui
tout.Cetteexpressionvapermettrederassembler toutunensemble pouréviter
queletasdegens fermente,
comme unpotdeconfiture
donc
le
detentatives
detransformation
erderéforme
de
l'asile,apparues
en couvercle
aétémalfermé’.
Francenotamment sousl'occupation
nazie,
quisedéveloppent
ensuite
ets’intensifient
diversementdansl'après-guerre.
L'expérience
de Certedistinction
nesedéduit
pasdesnotions
elles-mêmes
seule-
l'hôpitaldeSaint-Alban
enestl’undespremiersactes,
etàLaBorde ment,
maisattend d’être
miseenœuvre
parlespratiques
instituantes
ensontreprises
etdéveloppées
leshypothèses
qui,augrédesdécennies elles-mêmes. De soncôtéTosquelles apuréinscrire
sapensée
del'ins-
suivantesetdeleursnouveauxenjeux,
ontperduréjusqu’ànosjours. titution,au-delàdecertetraditionquiveutqu'enEspagne,
«leslycées
Autour
defigurescommeJeanOuryou
le psychiatre
catalanFrançois sont
appelés
“lesinstituts”
»,parrapport
àl'influence
qu’a
exercé
sur
Tosquelles,
militant
duPOUMexilé enFrance,
s'affirme
l'ambition luilekleinismelatino-américain
etsonattention
auxgroupes
etaux
detransformer
defondencomble l'institution
psychiatrique
dansle collectifs.
En particulier,il ditavoirbeaucoupappris
dupsychana-
sensnon-répressif
d'unehospitalité
pourlafolie. Soigner
lespatients lyste
argentinJoséBleger, etdesonidée quelecadrepsychanalytique
suppose
desoigner
d'abord
l'institution,
malade
de
ses cloisonne- lui-même —lecontrat, l'endroit,
la répétition
—estune
institution
ments, desesclivages, desabureaucratie,desahiérarchie oppressive qu'ilfautanalyser.
Tosquelles nemanque pasderappelerparailleurs
» etpathogène. Développantà la foisuneclinique delapsychose et àquelpoint« l'isolement delasituationthérapeutique
lui apparaît
unecritiquede l’aliénationsociale arrimées àlapsychanalyse erau comme «trèsambigu»,parce que,
bien quel'ondisequ'onesten
mantisme,sesprotagonistestentent
de favoriser
l'émergence depratiques dehors dela société,
il n’yajamais autant
demonde quedansle
instituantes,
quipuissent contesterettransformer leshiérarchies
etla discours
psychanalytique
(lesparents,
lesgrands-parents,
lesvoisins.
divisiondutravaildans l'établissement,toutencréant desdispositifs etc),
etqu’on
alàtout
un «discours
réellement
polyphonique,
pluriel
à visée«démocratique »,où lespatientsauront leur motàdire,au etpolyrythmique
».Il estdoncinévitable
selon
luideprocéder
à
même titrequeLesprofessionnels,
sur laviedulieuoùilssontprisen «l'analyse
institutionnelle
dumalade
quel'onreçoit
àlamaison
ouà
charge et«soignés ».Lemot«institution »vadecefairrenvoyer à l'hôpital,
[.…]c'est-à-dire
prendre
encompte
sa classe
sociale,
combien
toutcequ'uncollectif institueactivement, lesnormes, lesmoments, ilgagne,
avecquiil vit*».
lesdispositifs,
lesrèglesquipermettent dedéfinirenacteunepratique
commune. Leclubthérapeutique, dispositif auseinduquel patients
7.
JeanOuryetMarieDepussé,
Àquelle
heure
passe
letrain.
Conversations
surLa
5.FélixGuarcari,
DeLerosà LaBorde,
Paris,
Lignes,
2012. folie,
Paris,
Calmann-Lévy,
2003,
p.296.
6.GeorgesDaumézon
et Philippe
Koechlin,
«Lapsychothérapie
insiraonee 8.François
Tosquelles,
«LesTerrulias
desTavernes
», _
Gârate
Martinez,
inConversations
pychanalytiques,
Paris,
Hermann,
française
contemporaine
»,Anais
porrugueses
depsiquiatria,
vol.4,n°4,décembre
«Machines
deguerre
»:entre
Concepts,
institutions 379
378 AGENCERLESMULTIPLICITÉSAVECD'ELEUZE

Onsait queDeleuze
etGuartariirontencoreplusloin,dansL 4». sociaux
oujuridiques
impensables
auparavant?
».Certeinstitution,
Œdipeex,au-delà,dans
la critiqued’unisolement prétendu dela toujours
solidaire
d'une
lutte etd'uneperspective
émancipatrice,
semble
situation
thérapeutique,
ambitionnant dedépasser lapsychanalyse
vers paradoxale
ARE auregarddelamanièredontlesinstitutions

Real Calor nes


par une«schizoanalyse
»,revendiquant d'envisager
ledélirepsychotique sonthabituellementinvoquées,quecesoit le
au-delàdesescoordonnéesfamilialistes.
Maison peutdireque le
mouvement delapsychothérapie
institutionnelle,
avec
samanière de l'accent
sur
les contraintesexercées
parlesformes sociales
instituées
repenserlapratique
psychiatrique
er laclinique despsychoses, avait surlasubjectivité,
les rypesderégulations
etd'influence surl'action
déjàfaitunpasendirection
d’unecritique delapsychanalyse laplus qu'elles
opèrent.La penséecritique
elle-même, lorsqu'elle
nourrit
orthodoxe, notammentenreproblématisant demanière singulière desinterpellations
militantes
quivisent
l'asile,l'hôpital,
l'écoleoula
l'inconscienten contexteinstitutionnel.Leur démarche,
à laquelle prison,
regardesouvent endirection
dephénomènes decontrainte,
FélixGuattari
a plusquelargement
etoriginalementcontribué,
est dedomination,d'oppression etdecontention, Ladénonciation de
indissociable
d'unecertainepratique
del'institution,
quisemble l violence
symboliqueet dela reproduction
sociale
voitalorsavant
rejoindre,à partirde routesautrescoordonnées,la manièredont toutdanslesmécanismes
institutionnels
cequiengarantitl'efficacité.
Deleuzesesaisitlui-mêmedu conceptdèsEmpirisme et subjectivité. Lasociologie
durkheimienne,
soucieused'objectiver
cesreprésentations,
En effet,
l’idée que
l'institution eststratégie,
qu’elleestappréhensible mouve unappuidansla critique
sociale
quidéconstruir
les effetsde
tout
autant commerésultatinstituéquecommeun courantsubversif l'idéologie
dominante.
depratiques
instituantes,
qu'ellepeuts'ouvrirà l’imprévisible
etau Or,onpeutdirequeDeleuze, puisDeleuze
etGuattari, s'ilsne
singulier, n'entretient-ellepas une certaineaffinité aveccetteidéede nientcertainement
paslaprégnancedanslechamp sociald'effetsde
l'instivution
commemoyenindirect,créatif
et finissant
enmêmetemps domination etde«capture
»,envisagent
desmodesd’instirutionnali-
parexercer
surlatendance saproprecontrainte?
Quecerte stratégie sation
« non-étatiques
»,qui nerenvoient
ni àune«normalisation
»
sedonnepourbutdeconjurer la clôtured’uncollectif
surlui-même, niàune«récupération
»de
la créativité
sociale
etpolitique.
C'estlà
comme sembleleproposer JeanOury,celanenousrappelle-t-ilpas, queleconcept
de«machine deguerre
»intervient
pourarticuler
ces
évidemmentd'unetoutautre manière,
ces«institutions
dumouvement figures
paradoxales
del’action
d’unemanièresingulière.
Développé
perpétuel
»queDeleuze évoque à proposdeSade? demanière
approfondie
dansMilleplateaux,
ceconcept
serévèle
une
Lapenséedel'institutionapparaissait
à FrançoisZourabichvili hypothèse
fructueuse
pouruneanthropologie
politiquequiessaie
de
commeunpointdedivergence entrelesapproches deNegrierde restituer
unegénéalogie
desrapports
entre
laguerre
etl'État”.Maisil
DeleuzeetGuartari.
Il faisait
remarquerquesi,pourlepremier,elle rencontre
aussi
lesquestions,
lesdifficultés
etlesenjeux
concrets
de
seconçoit
toujourssurlemoded’uneextérioritévis-à-vis
de
la vitalité l'expérimentation
politique.
Uneformation sociale
«fait»machine
d'unpouvoir
constituant
qu'elle
dénature,
pour
lessecondés
l'instirution, deguerre
lorsqu'elle
serendirréductible,
hétérogène
auxÉtats,
àleurs
tour
en défigurant
enpartie
le désircomme
moment créatif,
l'actualise «appareils
de capture»,à leursmodesd'administration,
dehiérar-
et,encesens,
devient
elle-mêmeunecréation
originale.
Cetredouble chisation,
dedivisiondu travailetdegouvernement.
Un groupe
dimension
de
l'institutiondevient
paradoxale
aveclesnomades,
qui révolutionnaire,
une bandemafieuse,
uneorganisationreligieuse,
«ne
laissentpasdetracedans
l’histoire»,et«nefranchissent
le seuil une
entreprisetransnationale
maisaussiuneinvention
technologique
delareprésentation
quenégativement,
sous
laforme
d'actes
derésis- Peuvent
fairemachine
deguerre,
etcelanesignifie
pasqueleurs
tance».Laposirivité
deleurrésistance
«rendàpasser
inaperçue
»;
,
enraison
decet«espace-temps
spécifique
quis'instaure
danschaque D
9, François Zourabichvili, ‘ Les deux pensées de Deleuze et de Negri. Une ri }
casetquineselaisse
pasinsticutionnaliser
ausens
courant (ératique)
&unechance
»,Mulrirudes,
n°9,2002. L cnui
duterme, mais[….]relève
d’uneinstitution
paradoxale,
inséparable 10.
Gilles
Deleuze
etFélix
Guartari,
Millplateaux,
Paris,
pc Liu
d’une
criseerd’une
lutte »,qui«ouvredespossibilités
d'agencements 1980;
Guillaume
Sibertin-Blanc,
Politique
etÉcar
chez
Deleuse
et
kmatérialisme
historico-machinique,
Paris,
Acwuel
Marx,
2013.
«Machines
deguerre
»: entre
concepts,
institutions
… 381
380 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZzE

j fallait
libérer
laspontanéité
créatricedesgroupesetdesindividus.
perspectives
politiques
serecoupent
ouconvergent
d'aucune
manière, pésinstitutionnal
isersignifiait
dissoudre
l'emprise
ducapitalisme
etde
DeleuzeetGuattariy insistent,la « machinede guerre» n’apasla sesinstitutions
surlasubjectivité.
Audébut desannées1970,
Guattari
guerre
pour
objet,sicen'estdemanière
contingente,
lorsque
l'État geposedéjàun certainnombredequestionsàproposdumouvement
sel'approprie
pour
son proprecompte: mercenaires
recrutés
pour
ses ialienautourdeFrancoBasaglia,
centrésur
le dépérissement
de l'asile.
guerressecrètes,
multinationalesqui rendentpossiblel'extensiondela
Toutenaffirmant
sasolidarité
politique
avec
cecourant,
il remarque
dominationcoloniale
surdenouveaux
territoires,
pratique
sociale
ou
enmêmetempsqueles«voiesde
la répression
sontparfoissubriles
»,
artistique
quifinitparêtreadministrée
etpromue pardespolitiques
que
plus«efficaces
quedespoliciers
peuvent
devenir
les tenants
d’une
publiques,maisaussitoutedynamiquerévolutionnairequifinit par
êtreintégrée
àlalogiqued'unrégimededominationetdegouverne- normalité
à toutprix »,caravec«lesmeilleures
intentions
dumonde,
ment. Ladiversité
etl’hétérogénéité
desexemplesnemanquent pas, morales
etpolitiques,
onenvient
àrefuser
aufouledroitd'être
fou,
le
machinesdeguerre etappareils
decapturerenvoyant
auxprocessus «c'estlafauteà lasociété»peutmasquer unefaçonderéprimer toute
d’appropriation
etd'autonomisation
multiples
qui
traversent
lechamp déviance ».Apparaîtainsiceseuiloù la « négationinstitutionnelle
!?
socialdanssonensemble.
Dans
la perspective
deleuzo-guattarienne,
le deviendrait alorsunedénégation—Verneinung,ausensfreudien —du
caractère
libérateur
ouoppressifdecesprocessus n’est
enriengaranti fairsingulier
de l'aliénation
mentale
».Faceàcettenégation-dénégation,
ouprescrit4priori,carilssontpriseux-mêmes dansdesrapports de ilfautrappelerque«lacausalité
politiquenerégitpasaussidirectement
puissance quiendéplacent continuellement lespotentialités
etles lacausalitédela folie»etquec’est
effets.
Lessegmentarités souples
—clans,tribus,horizontalité—ont
leurs« noyaux dedureté,d’arbrification,
quianticipent
l'État autant peut-être,
inversement,
unagencement
signifiant
inconscient,
oùloge lafolie,
qu'ils
leconjurent
». Etinversement
les segmentaritésdures—adminis- quiprédérermine
lechamp structural
oùsedéploient
lesoptions
politiques,
les
tration,
stratification
etdivision
hiérarchisée,
organisation
scientifique
du pulsions
etlesinhibicions
révolutionnaires,
àcôté,au-delà
desdérerminismes
travail
—n'auraient
aucune prise
oueffet
si elles
nebaignaienteux-mêmes sociaux
etéconomiques!?.
dansuntissusouple. Il yaenparticulierune«souplesse »,touteune
créativité
perversequisubvertit l'administrationelle-même etses Certecritiqued’unréductionnisme
politico-institutionnel
dela
règlements pourpermettre àlamachine bureaucratiquedes'étendre subjectivité
estréaffirmée
dans
sonjournal
duBrésil,
écrit
àquatre
et de repoussersespropreslimites. mains
avec
SuelyRolnikdanslesannées
1980.
Il insiste
ànouveau
sur
Lacompréhension
decesprocessus
d’étatisarion,
d’auronomisation lespotentialités
micropolitiques
d'expérimentations
dansledomaine
etdeleursinteractions, intéresse
lespratiques politiqueserlesformes delapsychiatrie,de la toxicomanie,
du travailsocial,del'éducation.
desubjectivité qu’elles
engagent.Leconcept de«machine deguerre» I revient
sur
les expériences
deLaBorde, deMarmottan.Celles-ci
renvoie àtoutunensemble degestes,
d'opérations concrètes,
de dispo- invitent
selonlui àconsidérer
à nouveau
lapossibilité
de«processus
sitifsetdepratiques. Dans«Troisproblèmes degroupe »,Deleuze d'institutionnalisation
qui nefonctionnent[pas]surlemodedela
noue dans
ce concept deux exigences
:celle d’une organisationrévolu-
monodie
»,maisdelapolyphonie,
ouverts
au
singuliereràl'imprévu.
tionnaire quise rende irréductible
àl'Étatcomme à sonanticipation
Lesprofessionnels
de la santémentale,
les travailleurs
sociaux,les
dans laforme duParti,oùlesluttespolitiques viendraientconverger
demanière transversale,
sansannuler l'hétérogénéité dont
ellessont Enseignants
peuventbienentenduconcevoir
leurmétiersurlemode
porteuses ; celled'institutions
quis’affirment comme desespaces
de lagestion
bureaucratique,
enappliquant
les recertes
dictées
par
cs créativité,delibérationetnonderépression, dansl'horizondeceque mess
deslieux comme LaBorde ont
su selonluiinventer. À proposdeMai68 11.
Félix
Guattari
etSuely
Rolnik,
Micropolitiques,
Paris,
LesEmpêcheurs
de
etdesessuites, Guattariapusemontrer critiqueenvers cequ'ilapu dE enrond,2007. ii
identifiercomme le «réductionnisme »d'unecritique quin'envisagea 2.Franco
Basaglia,
L'institution
ennégation,
Paris,
Arkhè,
2012
[rééd.].
lesinstitutions
quecomme
desstructures
pathogènes
face
auxquelles 13.
FixGuartari,
«Guérilla
dans
lapsychiatrie
»,
inPychanalys
er
ransversalité,
Maspero,
1972,
«Machines
deguerre
»: entre
Concepts,
institutions
… 383
382 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUzE

DePsychanalyse
ettransversalité
àMilleplateaux,
\adistinction
l'administration
ou
les différentes
versions
du DSM,se contenterde entregroupes sujets et soupes assujettis, entre machines de guerre et
secentrer
surla réadaptation
sociale
ercomportementale
desindividus. appareils
decapture,
nedictepassimplement
unpôleactifetunpôle
MaisGuarrariinsistepourdirequecetteoption« policière»etde passif,
unpôle
émancipé
del'État
etunpôle
quis'y
soumet,
mais
plutôt
«contrôle
social»n'estnullement
un«destin
deleurprofession
»,
différentes
modalités,
sans
composition
sociale
fixe,delasubjectivité,
contrairement àcetadagemilitantqui identifiaittout
travailleur social quisefontfaceautantqu'elleséchangent,
interagissent,
C'estaussi
à un « flic » :
encesensque,pourDeleuze etGuattari,lesthèses
dePierre
Clastres
àproposdesociétésdites«contrel'État!»,parce
qu'elles
conjurent
Du pointdevuemicropolitique,
n'importe
quellepraxispeurêtreounon
policière; aucuncorpsscientifique,aucuncorpsde référencetechnologique
etinhibent
l'apparition
d’une
divisionentregouvernantetgouverné,
negarantituneorientation
juste[.] Lagarantie
d'unemicropolitique
doivent
êtrerelativisées
pourêtreenquelque sorte
amplifiées
contre
processuelle
ne peutêtretrouvéequ'àchaque
pas, à partir desagencements
unepartie
decequ'elles
affirment.D'uncôté,elles
permettent
positi-
quilaconsticuent,
dansl'invention
demodes
deréférence,
depraxis
"4,
vementderécuser
les interprétations
évolutionnistes
quiinterprètent
l'Écatcommele symptômed’uncertaindéveloppement
desforces
Ainsi,
l'« institutionnalisation
»n'indiquepasnécessairement
une productives.
Maisdanslemêmetemps,ellesfantasment,
selonDeleuze
capturenormalisatrice.
Commeprocessus, ellepeutrenvoyer
à un etGuattari,
uneautarcie
peucrédible,
quecontredit
parexemple
versant
positif,
créatif,
àl'affirmation
d’une
libertéetd’une puissance. l'archéologie
quandellemontreque
les «sociétés
contrel'État»ont
Lesmétiers
quiontpourmatière première
lasubjectivité,
sontdonc toujoursnouédesrapports complexes d'échanges etd'interaction
bienplacés
pourtenter uneinstitutionnalisation
quineseramène aveccelui-ci.
AvecClastresetcontre
lui, il fautaffirmer
queconjurer
pasplusàlanormalisationqu'àlarépression.
Certes,
il nes'agit
pas l'État,
c'esttoujours d'unemanièreoud'une autrel'anticiper.
Onne
d'entrer
dansunedénégation inverse,
quirefuserait
deregarderen leconjurequedanslamesure oùil estdéjàlàvirtuellement,
Urstaat
facelecaractère
souventviolemmentrépressif
desinstitutions,
leur capabled'agiry compris
ensonabsence, àdistance
!®.Lanécessité
de
affinitéaveclesappareils
decaptureétatique,
avecdesorientations sesaisir
decesmécanismes deconjuration-anticipation,
n'est-ce
pas
policières,
ouencoreleurtendanceàseconfondreavec cequ'Oury
ou cequeJeanOurypressent lorsqu'il
affirmeque
Tosquelles
appellent
l'«établissement
».Ladistinctionentre
groupe-
sujets
etgroupesassujettis
miseenavant parGuattaridèslesannées sionnepoursuitpasconstamment l'analyse
institutionnelle,
c'est-à-dire,
1960,àpartirdesonimplication
dans
les collectifs
duGTPSIoudu entre
autres,
uneanalyse
concrète
del'aliénation
sociale
quinous
surdétermine,
CERF,a précisément pourobjetdepensercette
conflictualité
entre nousetnotre
champ
de travail,
etqu'on prétend
faire
delapsychanalyse,
dela
autonomie
ethétéronomie,
émancipation
etassujettissement
institu- psychiatrie,
delapsychothérapie
institutionnelle,
destraitements
biologiques
tionnel.
Legroupe-sujet
estunprocessus analytique
ausensoùpeut detoutes
sortes,
onestdansl'imposture!??
: l'entendre
Lapsychanalyse
il viseunetransformation
dela subjectivité
àl'œuvredansladéfinitiondesstatuts,
desrôlesetdesfonctionsde PourGuattari,
cette«analyse institutionnelle
»,préoccupation
chacun- médecins,
infirmiers,
fous,militants
politiques,
etc.—ense permanente
vis-à-visdel’aliénation
possible
deroutepratique,
renvoie
proposant
dereparcourir
autrement
leurs virtualités.
1]sedonnepour Àun«élargissementvirtuel
despratiques
institutionnelles
deproduc-
dâche d'explorer
lapossibilicé
d'unetransversalitédanslesrapports tiondesubjectivité
»,transformant,
delapédagogie auxpratiques
entrelessubjectivités
impliquées
dansl'institution,
endéjouantainsi politiques
eràlapsychiatrie
«deproche
enproche,
[...]l'ensemble
bienlesimpasses
d’uneverticalité
hiérarchiqueeroppressive
qued'une
horizontalité
d'entassement,
oùdesindividus atomisés
secogneraient
lesunscontre
les autressansvéritablerencontre. 15. Pierre Clastres, La sociétécontrel'État, Paris, Éditions de Minuit, 1974.
16.MarcAbélès,
Penser
au-delà
del'État,
Paris,
Belin,
2014.
17.
Jean
Oury,
«Les
résistances
»,
inPatrick
Chemla
(dir),
Résistances
er
mansferts,
14.Félix
Guatrari
etSuely
Rolnik,
Micropolitiques,
op.cit.
Érès,
2004,
384 AGENCER
LES MULTIPLICITÉSAVECDezeuze

dessegmentssociauxquidevaient être{:.] l'objetd’unevér


révolution
moléculaire,
c’est-à-dire
d’uneréinvention per itable XXXII
danslamesureoù«lasubjectivité,
* 8
Àtous
+
les étagesdusociusoùl'o:
Manente

voudralaconsidérer,
n'allaitpasdesoi,qu'elleétaitproduite
da.
certaines
conditions
etquecesconditio nspouvaient CL
êtremodifiées Pourunenomadologie
desinstitutions
per demultiples
di plespprocédures
ur etdefa
e façon
à l'orienter
‘ori dansunsensplus

À distance
de
la loi,ducontrat,
de
l'État mais
aussi
detoute
technique
organisationnelle
et managériale,
DeleuzeetGuattariserencontrent EUGENE
W.HozLanD
doncautour
dece parique
là où
il yadel'institution,
la politique
opère
à reboursdu consensus
etdu fonctionnalisme
bienhuilédel'organi-
sation.
L’assujertissement
peuttoujours
renaître
dansnotredos,dans Lathéoriepolitiqueetlaréflexion
sur
les stratégies
politiques
l'autogestion
comme dans
les formesd'organisation
et de décision
en inspirées
parDeleuzeetGuartari
tendent
àfavoriser
lamicropolitique
apparence
les plusefficacementdémocratiques
ethorizontales.
Sartre - lemoléculaire,
lesmachines-de-guerre,
le«devenir-minoritaire-de-
déchiffrait
danslapsychosociologie
deKurtLewin
et
la dynamique tout-le-monde
»,les«connexions
[deflux]révolutionnaires
contre
degroupes
quiavaitpourtâchededémontrer
scientifiquement
la lesconjugaisons
del'axiomatique
» —etcelapourdebonnesraisons.
supériorité
deladémocratie
américaine
surl’autoritarisme
soviétique,
Parexemple,
dansmon
livresur lacitoyenneté
nomade,
jemesuis
unearmedont l'efficacité
pouvaitêtrearrachée
desmains despatrons limité
à examendegroupesdecitoyens
nomades
qui
s'auto-organisent
pourla retournercontreeux!?.Lesdeuxlecteurs
deSartre quefurent etfonctionnent
de façonautonomeparrapport
àl'Étatetaucapital!
Deleuze etGuattariontproposé unetoutautremanière d'explorer Maiscette
limitation
est,debiendemanières,
malheureuse
- et,par
lesvirtualités
oppressivesetémancipatrices
desinstitutions
etde
leur bonheur,
ellen’estpasnécessaire.
Aprèstour,
danslesecondvolume
critique,
unetoutautreallianceentre
conceptsetpratiques
collectives. deCapitalisme
etschizophrénie,
DeleuzeetGuattari
eux-mêmesaffir-
Lespasses
d'armes
et
les renversements
révolutionnaires
nesauraient mentquelamacropolirique,«lalurteauniveaudesaxiomes»,est
échapper
à l'analyse
deleurétatisation
etdeleurinstitutionnalisation, absolumentnécessaire?,
Danscequisuit,jetiens
doncàcompléter
telsqu’ilsopèrentdanslesplislesplusdiscretsdelasubjectivité. monanalysedescitoyens
nomadesopérant
comme machines-de-guerre
Lesgrandes confrontations
molairesdelaluttedesclasses
doiventêtre indépendamment ducapital
erde
l'État,paruneanalyse
degroupes
subverties.
La«machine deguerre »nousditenpartie cette
exigence, fonctionnant
comme citoyens
nomades
ausein
desinstiutions
déjà
dontlespotentialités
sontencore
devantnous,deconstruiretoujours
de existantes.
Danscedessein,
jeprends
comme point
dedépart
l'analyse
nouveaux rapports
entreconcepts,
pratiques
etsubjectivité
politiques. faiteparAlthusser
desinstitutions
qu'ilaappelées
«appareils
idéolo-
iques
d'Étar”
».
E Deleuze
etGuattari
sontparfaitement
d'accord
avec
Althusser
surunnombreconsidérable
dequestions
fondamentales
:lara
dedélivrer
lemarxisme
del'ombre
deHegel,
parrecours
àLaphiloso-
phiedeSpinoza;lestatut«problématique
»del'économique
comme

Strike,
Minneapolis,
University
ofMinnesota
Press,
2011.
-
2.Mille
plateaux,
Paris,
Éditions
deMinuit,
1980,
p.ne Adi Pi
18.FélixGuattari,
DeLeros
àLaBorde,
op.cit. . 960 3.Louis
Alchusser,
«Idéologie
erappareil
Idéologique ‘
19.
Jean-Paul
Sartre,
Critiques
delaraison
dialectique
1,Paris,
Gallimard,
1960: tionssociales,
1976,p.67-125.
386 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE Pourunenomadologie
des
institutions
387

structure
virtuelle
expriméeetmasquée
pardessolutionsréelles
: roductionparmoyende
l’État (oudecontester
cett ,
l'importance
deladivision
dutravail
enrantquemultiplicité
sociale cequ'Alchusser
identifie
comme
lasubj dr.
tr oductioe),
; ectivitén’esteffective ment«a
(relativement
àlaluttedeclasse)
; le«devenir-nécessaire
»d'unmode autre
choseque
la citoyenneté.
Carla s
ubjectivité
estenfait bi
deproduction
considéré
comme
résultatdesprocessus
machiniques et polymorphequecela.Que
le sujetsoitenfant Se pie
nonpascommepointdedépart
;erenfinmêmele rôlede
l'État dans ouvrier,
amateur,
parent,
consommateur, »frère
tousces ousœur,
sujets étudiant,
nes’alignent
pas
lareproduction
desrapports
deproductioncapitalistes.
Maismalgré surlesujet-citoyen,
qui
existeàcôtédecesautres
sujets-partiels
plutôt
touscespoints d'accordmajeurs,Deleuzeet Guattari ont énergique- qu'ilnelesenglobe.
L'État
n'est
pasle«grand
Autre
»dontdérivent
ment rejeté
lanotion
d'idéologie
- même lanouvelle
version
améliorée lesautorités
institutionnelles,
pasplusQu'ilnfondeni
proposéeparAlchusser,
s'appuyant
surLacan, danssonessai
célèbre
».
e n’assure
leur
cohérenceouleuralignement. Tourcomme lemode
deproduction
l'Étatnefairquetendre verslacohérence,
il esttoujours
seulement
# à + . :

surlesappareils
idéologiques
d'État.Enbref,Deleuze
etGuattari
ont
rejetéla notionconvenue
del'idéologie, parcequ'ellesurestimait
le entraindedevenir-nécessaire,
enraison
deprocessus
machiniques
qui
rôledelaconnaissance,
etignorait
leprimatdudésir.On avaitmal sonteux-mêmesdisparates,
hétérogènes,
multiples.
comprisl'idéologie
commeuncasde«voir,c’estcroire»,alors qu'il Toutefois,laschizoanalyse
neniepasquelafamillenucléaire
estvraimentquestionde«croire,c’estvoir».Selonlaschizoanalyse, contribue
à laconstitution
delasubjectivité.
Cequ'elle
nie,c’est
onvoitcequel'on veutvoir, ceque
l'on désire voir.Maislaversion l'idéequela famillenucléaire
soirleseuloumême
le plusimportant
lacanienne
de l'idéologie
proposéeparAlthusserporteprécisément
sur facteur
danslaformation
delasubjectivité.
Enrevanche,lafamille
ledésircomme désirdel’Autre.
Althusser redéfinit
ingénieusement fonctionne
à côtéd’autres
institutions.
Eneffet,
ellesert
àretransmettre
l'idéologie
comme laconstitutiondusujetparunprocessus d’inter- àlasubjectivité
émergente,
auxtoutpremiers
stades
desaformation,
pellation,
parcequeZizek(suivant Lacan) appelle
le«grand Autre» desdéterminations
venantdecesautresinstitutions.
Etlaschizoana-
—unefigure composée etfinalement factice
fondéesurdesautorités lysenieégalement,
oupeut-êtredemanière encore
plusimportante,
réelles
telles
quepères, professeurs,
prédicateurs,
police,etpatron. leprécepte
œdipienselonlequel
la relation
aupèreouaunom-du-Père
CequiestcrucialchezAlthusser c'estquelesdiversesinstitutions estfinalement
l'axeintersubjectif
leplusimportant
auseindelafamille
danslesquelles
rouscesprêre-noms fonctionnent,sontdesappareils nucléaire.
CarmettrelePèreœdipien aucentredelafamilleà pour
idéologiques
d’État,
et quel'effet
idéologique detouscesappareils
est effetdemajorer
lesrelations
d'obéissance
etdedésobéissance
dans
la
dereproduirelemodedeproduction capitaliste
—cettereproduction
constitution
delasubjectivité
—précisémentlerapport
quiestcentral
constituant
la fonction
essentielle
del'Écat.
Ettoutenidentifiant
la dans
l'interpellation
dusujet
parlapolice
etparlesautres
grands
Autres
prépondérance
del’école(souvent
gérée parl'État)dansl'exécution
desappareils
idéologiques
d’Althusser.
Lescitoyen-sujets
consentent,
decertefonction,Althusser
dramatiselastructuredel'idéologie
en
ourefusentdecontribuer,
à lareproduction
dumode deproduction
montant unescène derueoùlesujetdel'idéologie sereconnaît
au
surl'ordre
de
l’État.Quiplusest,seconcentrer
surlePère
dissimule
momentdeseretourner quandunpolicier
crie«hé,vous,
là-bas!
».
lesrelationsavecla mère,relationsqueDeleuzeetGuattariconsi-
DeleuzeetGuattari
conviendraient
qu’uneespèce
dechaîne
d’équi-
dèrent
comme
bien plusimportantes
etfondamentales.
Lesrelations
valence
relie
eneffer
lesdivers
prête-noms
d’une formation
sociale,
allant
Maternelles
originaires
nesontpas
axées
surl'alternative
binaire
obéir/
dupolicier
aupèreetaupatron,
comme
autoritésœdipiennes,
puisque
désobéir,
mais sont
constituées
d’unmélange
fortcomplexe
deplaisir
l'autorité
dupèredanslecomplexed'Œdipe lui-mêmeestdérivée
dès
ledébut
dediversesformesd'autorité
despotiquedans
lesinstitutions étd'alimentation,
dedésiretdebesoin.
Ellessontdesrelations
d'objets
sociales,
telles
quel'Église
erl'État.Maispour
la schizoanalyse,
ce Partiels
situéesdanslecorps,
plutôtquedesrelations
d'objets
définies
Parlasignification.
Etplusimportant
encore,
elles
restent
parfaitement
qu’Althusser
décriteneffetn’estpaslaconstitution
idéologique
du
sujet,
maisseulement
ducitoyen.Celaesttrèsévident
danslascène les,mêmeaprèsréinscription
dans
les registres
deImaginaire
etduSymbolique,
etmêmelorsque leplacenta,
etensuitelesein,
d'interpellation
aveclepolicier.
Mais,danslamesure oùlafonction
Sontremplacés
pard’autres
sourcesplusmondainesd'alimentation
del'idéologie
danstoutes
lesinstitutions
estdereproduire
lemode de
étdesatisfaction,
pendant
quelesujet
quitte
le sein
etLafamille
pour
Pourunenomadologie
des
instinutions
389
388 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

erparsollicitation,
nonpasparrapport
àunepersonne,
nimême
traverser
d’autres
institutions
tellesquecantines
scolaires,
supermar- rapportàlafigured'unepersonne
(nom-du-père,
porte-parole
aq
chés,resraurants,
boîtesdenuir,centres
commerciaux,
etdes
sites de Loi,sujetaupporemvnite,
maisparrapport
àunensemble
ouunesérie
rencontresen ligne —dont chacunecontribue à un certaindegréà la
d'institutionset de situations,qui contiennentdespersonnes
(comme
constitution
polymorphe
de lasubjectivité. objets-
partiels),
maiscontiennent
également deschosesconcrètes,
des
D'unemanièreprimordiale,
detellesinstitutions
necontribuent
processus
matériels
etdesagencementsinstitutionnels.
L'autorité

passeulement
à lasubjectivation
parinterpellation,
maiségalement
par
augrandAutreSymboliquese déplace
sur lesinstitutions
etsituations
unprocessus de«sollicitation
»ouattraction quiprometunecertaine
actuelles,
quicontiennent
l'autoritédefaçon
immanente
- commele
mesureet unecertaineformed'alimentation et/oudegratification,
soutenait
lathéoricienne
politique
américaine
MaryParker
Follett
-
siatrénuée,sublimée,variéeou perversequ'ellepuisseêtre.À lasuite
sousformed'agencements de«relateddifférence
»,pourreprendre
sa
de BergsonetdeJung, Deleuzeconsidèrel'institutioncomme le
formulation,
c'est-à-dire
sousformed'agencements
rhizomatiques*.
Àcer
principalendroitoù «lesbesoinsinstinctifs»sontassortis
auxobjets.
égard,laconstitution
dessujetschezDeleuzeetGuattari
serapproche
Lessupermarchés
erles restaurants,
parexemple,
répondent
tousles
deuxaubesoind'alimentation,
maisdansdesmélanges
différents
de deBadiouplutôtquedeLacanoud'Althusser, danslamesure
oùle
satisfaction
debesoin Réel,degratification
dudésirinterpersonnel, et sujetmilitantdeBadiouestconstitué parrapportàunÉvénement
dupurplaisirdemanger —réparti
différemment, bienencendu,sur les historiqueRéelplutôtqueparrapport àunepersonne ouunefigure
diverses
sujer-posiions
impliquées,
allantduserveur interpelléparle d'autorité.
Maisilyaaumoins deuxdifférences
capitales
:toutd'abord,
patron,àqui
il obéit,auxsatisfactions
detravailler
enéquipe —c'est- tandisquel'engagement dumilitant deBadiou
à l'Histoireexige
une
à-direenmeute —aveclesautresserveurs,auplaisirconsommé des fidélité
defer,pour ainsidire,vis-à-vis
del'Événement,l'engagement
clients
appréciantleursrepas.
Alors,lesrelationsà l'origine
«mater- dusujetnomade deDeleuze etGuattariestunmélange complexe,
nelles»nesontpas«préœdipiennes »ausenschronologique strict : composé d'attraction,
deréponse auxperspectives
dela satisfaction
elles
demeurenteffectives
—Réellesernécessaires
- durant toutelavie. desbesoins,etdelagratification dudésir.
Et,encesens,ellessontaussibien«post-œdipiennes »que«préœdi- Enaccord avecBergson etJung,
de telles
satisfactions
et gratifica-
piennes».Maisenunsens plusimportant,elles
sontanti-ædipiennes. tionssontconditionnéesparles limitations
desrègles
institutionnelles,
Comme relationsd'objets-partiels,
ellesdéfient
route logiqued'identité alliées
à ladécouverte d'opportunitéssituationnelles.
Alorsqueles
etd’unification,
elles renientetl'autorité(Imaginaire)
dugrandAutre Événements véritablement historiques
selonBadiou sont
rares,pour
etlacohérence (Imaginaire)del’ordreSymbolique —etdénient un DeleuzeetGuattari,c'estlacohérencesociale
erlacontinuité
historique
quelconquealignement (également Imaginaire)desinstitutions
surla quisont
rares, et lesévénements
signaux
presque
omniprésents
: ils
seulefonction d'État: reproduire
lemodedeproduction. Enréalité, s'appellent
lignes-de-fuire.
Or comme
leslignes-de-fuite
tirent
parti
donc,lesinstitutions qu'Althusserappelle« appareils
idéologiques dupotentielde changement
du virtuel,l'aucorité
nomade
consiste
d'État»nesontni purement idéologiques ni exclusivementcentrés enlacapacité
(«voyance
»)d'envisager
unchangement
àpartirdece
sur
l'État. Cequ'ellesconstituentn’estpasunciroyen-sujet—Oupas potentiel.
PourDeleuzeetGuattari
alors,
puisque
route
institution
seulement uncitoyen-sujet—maisunsujetpolymorphe, transindivi- est
définie
parses
lignes-de-fuite,
lasubjectivité
nomade
àsonniveau
dueletnomade quimaintientLecontactcontinu,bienquechangeant leplusproductif
n'estpasconstituée
parrapport
àuneseule
figure
continuellement,
avecleRéel
desobjets
partiels
—routendemeurant d'autorité
niparrapport
àunévénement
singulier,
maisparrapport
soumis
à l'inscription
sociale
dans
l'universde
la signification
ge àcertaines
desmultiples
lignes-de-fuire
inhérentes
àn'importequelle
innombrablesgroupes sociaux
etinstitutions
(comprenant
l'Écat situation
institutionnelle.
Autre
point
crucial
:ces
lignes-de-fuite
ouvrent
maisnonlimités
àlui). ledomaine
social
entier
et lescitoyens
nomades
opérant
en leur
sein
Contrelegenredepersonnificationglobaleimpliquée
dansla ——_—_—__————-

constitutiondu sujetselonSartre,Lacan,Lévinaset tantd'autres, 4,Mary


Parker
Folle,
TheNew
Srae:
Group
Organisation
theSolution
ne
7 lesujer
transindividuel
desinstitutions
estconstitué
parincerpellation Government,
Universicy
Park,
Pennsylvania
Seate
University
Press,
1998,
p.et33.
390 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE
Pour
une
nomadologie
des
institutions
39]

audomaine
socialentier
(etnonpasàuneHistoire
singulière
comme j'institution
puisse
survivre
ouProspérer,
toutcomme
lesjeux-de-langage
chezBadiou).Tout commelafamillenucléaire,
lesinstitutions
sont institutionnels
auniveausupérieur
doiventmaintenir
undegrésuff-
situées
dansleschamps-de-force
dela société
engénéral,dontlesflux santdeconsistance
entreeux,pourque
le modedeproduction
puisse
continuer
à « devenir-nécessaire
»etparconséquent
àse1eproduire.
croisent
continuellement
desfrontières
institutionnelles
perméables
danslesdeuxdirections. Par
rapport
auconcept
deleuzo-guartarien
«d'agencement
collectif
Je disla«sociétéengénéral
»aulieudela«société dansson d'énonciation
»,leconcept
de«jeux-de-langage
»deLyotard
peut
ensemble »ou la«société
entière»puisqu'avec
unordresymbolique avoir
l'avantage
d'accentuer
lamultiplicité
de
jeux langage
opérant
fracturé
oudésagrégé,lasociété,
opérantà dimensionn-1,neforme entension
danstouteinstitution
—comme
nousl'avons
vudans
plusuntour.Seréférant
explicitement
àDeleuze
(quoiqu'employant l'exemple
durestaurant.
Maislanomadologie
deDeleuze
etGuartari
letermedansun senstout
à faitdifférent),Althusseravaitfini par al'avantage
de distinguernettement
entredeuxformesdejeu-de-
décrire
ladétermination
structurale
commeunprocessus de«devenir- langage
: majeure
etmineure,
royale
etnomade,
distinction
parallèle
nécessaire
»perpétuel,
plutôtquecomme
résultatfinal,comme
un àl'opposition
aucœurdeMilleplateaux
entre
logos
exnomos.Dansun
devenu-nécessaire
achevé
—cequiveut dire,dansunidiomelégèrement groupe
purement nomade
et auto-organisateur,
lemanteau
del'autorité
différent,
quel'ordresocialesttoujoursémergent,
et n'estjamaisun reposerait
surceluiquis’est révélé
capable
d'exprimer
la ligne-de-fuite
faitaccompliouunequestion de
lois fixes.
Demême, danslesecond lemieux
adaptée
àl'événement
ouàlasituation
actuelle,
mêmesice
volume deCapitalisme etschizophrénie,
DeleuzeetGuattarirejettent quiconstituele « mieuxadapté»dansunesituation
donnée
nepeut
laprimautédumode deproduction caractérisant
lepremiervolume, êtredécouvert
queparexpérience.
Bienquetouslesgroupes
soient,
etinsisteront
surle faitquelemode deproduction estdéterminé par enuncertainsens,auto-Organisateurs,
ungroupe
devient
institution
desprocessusmachiniques, plutôtque
l'inverse.Danscerteoptique,
enfixant,parexempleaumoyen d’unecharte,
unecertaine
forme
le«devenir-nécessaire»perpétuellement émergent d'unmodede
d'organisation
dansunestructure
explicite
plusoumoins
permanente
productiondépend dudegré deconsistance atteint
parlesmultiples
(structure
ditetranscendante),
en assignant
àl'organisation
desobjectifs
institutions
quilacomposent, et nonpassimplement dudegré auquel
spécifiques,
enidentifiant
lesmoyens
appropriés
d'atteindre
ces
buts
lesmembres desinstitutions
accèdentourésistent
à l'obéissance
àleur
et,
le plusgénéralement
ennommant
desindividus
spécifiques
aux
autoritéfonctionnant comme tenant-lieu
d'État.À uneextrémité
duspectre, une
institutiontendrait versun«devenir-consistant».
positions
plusoumoins
permanentes
d'autorité,
celaindépendam-
Sastructure depouvoirformelle et/oulasubstance desonactivité ment
de lasituation
etdelacapacitéouincapacité
expressive
deces
pratiques'aligneraient
surcellesdel'Étatetducapital etlarenforce- individus
parrapport
àelle.Relativement
à ungroupenomade auto-
raient.À uneautreextrémité,
uneinstitution pourraittendreversun organisateur,
uneinstitution
organisée
decette
façoncourtainsiles
«devenir-révolutionnaire
»,pourautant
quesastructure
etsesobjecrifs risques
combinésde(1)subordonner lapoursuite
desobjectifs
pour
contestent
ouminentla reproduction
continuedel’Étatetducapital. lesquels
elleàétéfondée
àlaconservation
desmoyens
deréaliser
ces
Etil y asansdouted’autres
extrémités.
Mais,encequiconcerne la objectifs,
c’est-à-dire
àlaconservation
del'institution
elle-même,
ou
sociétéengénéral,chaque
institution incarnecequeWirtgenstein Àcequenouspourrionsappelerun«instinctpervers
deconservation
etLyotardontappelé jeu-de-langage,
dont
le rapportavecd’autres institutionnelle
»; et(2)renoncer
à laflexibilité
desesréactions
aux
jeux-de-langage
institutionnels
estindéterminé,
exactement comme événementsimprévusetauxnouvelles
circonstances,
afindemaintenir
auseindetouteinstitution,
il yaunemultiplicité
dejeux-de-langage, structure
transcendante
del'organisation
etlespositions
personnelles
incommensurablessinonmême en tension
ouencontradiction
les uns depouvoir
établies. j
aveclesautres
—lejeud’obéissancevis-à-vis
dupatrondurestaurant, Cetinstinctdeconservation
institutionnelle
doitêtrecompris
à
pour
reprendre l'exemple quenousdonnions
à l'instant,
parrapport lalumière
de lacritique
dela«pulsion
demort
»deFreud
présentée
aujeu-de-l'esprit-d'équipe
desserveurs.
Cesjeux-de-langage
disparates dans
lepremier
volume
deCapitalisme
etschizophrénie.
Bien
que
son
doiventréaliser
uncertaindegrédecohérenceouconsistance
pourque ütre
désigne
le complexe
d'Œdipe
commecibleprincipale
decritique,
lacritique
delapulsion
demort
esttout
aussi
importante.
Et,tout
392 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECD'ELEUZE Pourunenomadologie
des
institutions
393

commepourŒdipe,unecritiquepolitique
est ici associée
à une Ici,comme
nousl'avons
vu,desfinsinstitutionnelles
sontsacrifiées
à
critique
historique.
Lacritique
politique
estaussi
directe
qu'elle
est laconservation
de
l'institution elle-même,
surestimant
les moyens
par
dévastatrice
: avecl'introductiond'une« pulsionde mort mythique», rapport
auxfins,plusoumoins
delamême
façondont
lecapitalisme
l'angoisse
n'estplusattribuée
àlarépression
sociale
delalibido,maisÀ élève
systématiquement
le travailetl'accumulation
au-dessus
dela
l'instinct,
quiprovoque
lui-mêmelarépression
sexuelle
àlaplace. dépense,
laconsommation,
etle plaisir,
c’est-à-dire,
élèvelesmoyens
Desformations
sociales
sontdecefaitaffranchies
detouteresponsa- delavieau-dessus
desjoiesde
la vieelles-mêmes.
bilitédelarépression,
et lapsychanalyse
perdtouteforcedecritique Pourrépondre
àcette
inversion
générale,
symptomatique
et perverse
sociale.
Enoutre,lamortinterprétée
comme instinct
rendnécessaire des
moyens
et desfins,denombreux
théoriciens
politiques,
allant
de
etjustifie
les actesderépression
dite«civilisatrice
»—précisément
le Condorcet
àToniNegri,ontsuggéréune«disposition
decaducité
»
genred'actes
qui résultent
ducomplexe
d'Œdipe.Bienque
la libido pour
les constitutions
nationales,
telleque«chaquegénération
ait sa
ne
soit pasforcément unemenace pourla civilisation,
lamortl’est propre
convention
constitutionnelle
»etpuisse
refaire
ànouveaula
certainement,
etalorslacivilisation
estobligée
deretourner
la pulsion charte
d'organisation
de
la société.
Delamême
façon,
àune
échelle
demortcontre elle-même parl'introjection
del'autorité
paternelle
et pluspetite,l'autorité
institutionnelle
légitimeselonMaryParker
laformationd’unsurmoi. Follett
etDeleuze etGuattari,
dépendrait
decesindividusergroupes
Lacritique
historiqueestpluscomplexe, soulevantdesquestions auseind’uneinstitution—sescitoyens
nomades àelle—quidécèlent
d'ordre
culturel
etéthiqueautantquepolitique
eréconomique.Maiselle ouenregistrent
ses lignes-de-fuite
ertâchent
ainsid'ajuster
sanscesse
présente
de fortesaffinités
aveclescritiques
ducapitalisme
présentées ses
vraisobjectifs
(autres
que,ouau-delà
desapropreconservation)
aux
parWeber, Bataille
etFoucault.
Eneffet,larépressiondelamortpeut circonstanceschangeantes.
Cequitransforme
descitoyens seulement
êtreconsidérée
comme le corollaire
delaformemoderne depouvoir institutionnels
envéritables
citoyens
nomades,
c’estalors
leurrefus
de
queFoucaultcaractérisait
parledicton«fairevivre»plutôtque«faire
prendrelesnormes agréées
dujeu-de-langage
de
l'instinctdeconser-
mourir».Comme dansleurcritique
d'Œdipe, Deleuze etGuattari vationinstitutionnelle
comme cadrederéférence,
et leur
insistance,
neprétendentpasqueFreudavaittoutsimplement tort ausujetde
unpeucommechezle militantdeBadiou,
à relierdefaçoncréative
lapsycho-dynamique delamort: leproblème, c’estplutôtqu’ila
leurs
activités
institutionnelles
auxcirconstances
eraux
événements
attribué
àl'êtrehumain swspecieaeternitatis
undispositifquiesten
historiques.
Cethorizonderéférence
trèsdifférent
et surtout
plus
faitpropreaucapitalisme.Entermes schizo-analytiques,
lecapita-
lismesubordonne
l’anti-production—ladépense, leplaisir,
laperte,
large,
lesincite
àentreprendre
des
démarches,
dans
les
jeux-de-langage
institutionnels,
quidépassent
la seule
désobéissance
(comme
chez
legaspillage,
lamort—àlaproduction
etàl'accumulation
sans
fin.
Alchusser),
quivontau-delà delaseule
transgression
(comme chez
Lesfinssontsacrifiées
auxmoyens.
Les«petites
morts»légitimes
qui
font
partieinhérente
de
la viesontréprimées,
etcequi
étaitréprimé JudithButler
etBataille),
aumoyend’uneexpérimentation
quitend
à
revient,
comme«pulsiondemort»,souslespiresformes.Un ennemi Changer
lesrègles-de-jeu-de-langage
elles-mêmes,
àbriser
effectivement
contre
lequel
onlutteaumoyen
detoutetechnologie
médicale
imagi- lesmauvaises
habitudes
institutionnelles,
etàcréer
continuellement
nable,
parexemple,
quand
il s'agit
de«nous»malades;
undestin denouvelles
démarches,
comme
le suggère
Roberto
Unger
dans
son
cruelprojeté
sur«eux»,surtousceuxquenousconsidérons
«autres
» Programme : «Réaliser
ladémocratie’
».Unobstacle
important
àla
quenous—pourdesraisonsdenationalité,
dereligion,decasteou réalisation
deladémocratie,
c’estprécisément
la structure
dre
declasse,
d'appartenance
ethnique,
d'orientation
sexuelle,
etainside dontranscendante
soutenant
l'instinct
deconservation
adoptépar
suite—aumoyendetoutes
les technologies
milicaires,
policières,
et Plupart
desinstitutions,
quisert
àfixer
ses
objectifs
etsesrs
desurveillance
ànotre
disposition.
Larépression
delamort
sous
ses famène
pourainsi
dire laflexibilité
el'expérimentation
4zéro.à sn
? formes légitimes
parlecapital
alimente
cette
dynamique mortelle
de ©n'est
pasl'institution
quisoutient
l'activité
pratique,
MasVERRE:
disjonction
exclusive
(«nous»contre
«eux»),toutcomme elle anime ms
veAlternative,
NewYork,
l'«instinct
pervers
deconservation
»soussaformeinstitutionnelle. 5.Roberto
Unger,Democracy
Realized
: TheProgressive
Verso,
2000,
394 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE

L'activité
institutionnelle,
ouinstitutionnalisée,
sertlaperpétuation
de
Bibliographie
l'organisation.
Lescitoyens
nomades,
enrevanche,
tâchent
d'assurer
que
les normes
dle’organisationinstitutionnelle
restent
secondaires
parrapport auxvéritables
objectifs
del'institution.
Etpour
ce faire, Certe
bibliographie
indiquel'ensemble
des
ouvrages
cités
dans
lesnotes
ilsuffitdediminuer
les«coups»ordinaires
par
lesquelsonreproduit sofapaginales
descommunications.
Lescitations
d'articles
derevues
ou de
lesjeux-de-langage
institutionnels,enfaveurdescoupsextraordi-
nairesparlesquels
onpeuttransformerlesinstitutions
àlalumière
de sites
internet
n'ontpasétéreportées,
cartropspécifiques
auxcommunications
circonstances
toujours-changeantes
(pourparaphraserRoberto
Unger). dans lesquelles
ellesapparaissaient.
Que
l’on prenne pourclefdecescirconstances
l'Anthropocène,
le
néo-libéralisme,
le patriarcat,
l'ethnocentrisme
ouunequelconque Bauisar
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org/2247>.

BeiLour RAYMOND, critique,écrivain,estdirecteur


derecherche
émérite
auCNRS.Il écritsurla littérarure
(lesBrontë,
1972, Alexandre
Dumas,1990),adirigélapublication
d'HenriMichauxdans LaPléiade,
1998-2004).
Il travaille
aussi
surle cinéma(L'Analyse
du
film, 1979,
LeCorps
ducinéma.
Hypnoses,
émotions,
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2009,Pensées
du
FM 2016),ainsi quesurlesrelations
entrers sortes dpré
intureauximages numériques (toutcequ'ilnomme « l'en
nus: —deuxrecueils sousae 1990er1999, etLaQuerelledes
dispositif.
Cinéma —Installations,
expositions,
2012).Il estmembredu
comité
deTrafic,
«revue
decinéma
».
402 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE
Lesauteurs403

Cosra MALUFE ANNiTaA,PhD, professeurau départementdleittéra- I!travaille


également
dansuneéquipe
mobile
depsychiatrie
eten
tureetcritique
littéraireàl'Université
catholiquedeSäoPaulo,Brésil Centre
médico-psycho-pédagogique.
Philosophe
et anthropologue
de
(PUC-SP), docteuren théorielitéraireà l'UniversitédeCampinas formation,
il ad'abord
enseigné
la philosophie.
Puis,ilatravaillé
àLa
(UNICAMP),Brésil, a réalisédeuxrecherches depost-doctorat
: àJa
clinique
deLaBordefondée parJeanOuryetFélixGuattari.
Docteur
PUC-SP etàl'Université deSäoPaulo(USP),sur le rapportentre
les enpsychopathologie,
il aenseigné
àl'UFRd'étudespsychanalytiques
styles
deDeleuze
etSamuelBeckert.
11apublié
six livres
depoèmes, deParisVII plusieurs
années.
Il apubliéune
trentained'articles
qui
deuxouvrages
d'essais
etplusieurs
articles
depoétique. traitentdesrapportsentrecliniqueetpolitique.

CRITON
PASCALE
estcompositrice
etmusicologue.
Directrice
artistique GrzANAestprofesseure,
chercheure
auCentre
dephilosophie
de
d'Arr&Facr,ellecollabore
aveclelaboratoire
Lutherie,Acoustique
et l'Université
nouvelle
deLisbonne
(IFL-FCSH-UNL),
docteureen
musique(LAM,
Institutd'Alembert,
UPMC,CNRS).Son intérêtpour philosophie
parl'UNL. Ellea publiéplusieurs
articles
auBrésilerles
laphilosophie
delamusiques’estconfirmé
danslesillage
desarencontre livres
: LinhasdoEstilo—Estética
eOntologia
emGilles
Deleuze,
2007
:
avec
GillesDeleuze,
en1974. Elleapublié
récemment : Gilles
Deleuze. et,avec JoséGil, O Humor
e aLégicadosobjectos
emDuchamp,2011,
Lapensée-musique,
coëditéavecJ.-M. Chouvel,Paris,Cdme,2015; tousdeuxauxEd.Relégio d'Âgua,Lisbonne.
IvanWyschnegradsky.Libérationduson—Écrits 1916-1979 (éd.),
Lyon,
Symétrie,2013, prixdesMuses (fondation Singer-Polignac)
; «Bordsà GiJosé enseigne
la philosophieàl’Université
nouvelle
deLisbonne.
bords: vers
unepensée-musique», LePortique, n°20(rééd.enlignesur Directeurderecherches auCollège international
dephilosophie.
<hap://wwwrevues.mshparisnord.org/filigrane/index.php?id=415>); Auteurnotamment deMétamorphoses ducorps (1985)etPessoa
et
«Listeningotherwise. Playing
wichvibrations »,
in Proceedings
ICMC lamétaphysiquedessensations
(1988),cesdeuxouvragespubliésaux
2014,Athens, 2015.Sespartitions sontéditées chezJobert: «www, éditions
deLaDifférence;
et enportugais:Àimagem-nuaeaspequenas
pascalecricon.com>. percepçôes,
1996;Movimento total—ocorpo eadança,2001 ;À Arte
comolinguagem,2010; Ritmosevisées,
2016.
FERRAZ SIEvI0,compositeur
et professeurà l'UniversitédeSäoPaulo
(USP),estl’auteurdeMusicaeRepetiçäo (Educ.,1998)et Livrodas GLowczewskiBARBARA, directricederecherche auCNRS,est
Sonoridades(7letras,
2006).Parmi ses articles
consacrésauxétudesdes membre duLaboratoired'anthropologie
sociale
auCollègedeFranceer
rapportsentreDeleuze etmusique,onremarque le texte«Laformule enseigne
àl'EHESS.TravaillantaveclesAborigènes
d'Australie
depuis
delaritournelle»,publiédanslelivreGillesDeleuze:lapensée-musique 1979,
elle estl'auteure
denombreux ouvrages
(dontRévesencolère,
(Cdmc,2010). Plon,
collectionTerreHumaine)et aproduit plusieurs
multimédias.
FLAXMAN
GREGORY
estprofesseur
associé
delittérature
anglaise
et GorreyANDREW
enseigne
àl'Université
deNottingham.
Il ydirige
comparée,
ainsique
directeur
desétudes
cinématographiques
globales
à leCriticalTheoryCenter.
Il a traduitenanglais
les Cartographies
l'Université
deCaroline
duNordauxÉtats-Unis.
Ilestl'auteur
deGiles schizoanalytiques
deGuattari,
etLaSorcellerie
capitaliste
deStengers
Deleuze
andtheFabulation
ofPhilosophy
: Powers
oftheFalse
(Presses etPignarre,
entreautres.
Il écritencemoment
un livresurlamicro-
del’Université
du Minnesota,2011)eta dirigélelivrecollectifThe
politique
dulogiciel,
etmène
desrecherches
surGuartari
et l'analyse
BrainistheScreen
: Deleuze
andthePhilosophy
oftheCinema,
publié
institutionnelle.
chezlemême éditeuren2000.

GABARRON-GARCIAFLORENT
estpsychanalyste,
chercheurassocié
GuéroNRoDRiGo est professeur
àl'Université
del'État
deRiode
enphilosophie
(EA 5031ERRAPHIS,Université
Toulouse-Jean Janeiro
(UERJ).Il est
l’auteurdeDel'Image
auCliché,
duCliché
à
Jaurès)et membredu collectifde rédactionde la revueChimères. l'Image.
Deleuze,
CinémaetPensée
(RiodeJaneiro,NauEditora,
2011).
Il arécemment
complété
saformation
auBrésilparunstage
post-
Lesauteurs405
404 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECD'ELEUZE

laphilosophie
deGilles
Deleuze,
paruen1993
auxéditions
Payot,
avec
doctoralà l'UniversitéParis-Ouest(Nanterre/LaDéfense),où il a une
lettre-préface
deGillesDeleuze.
étudié
lesrelations
delaphilosophie
politique
deDeleuze
etGuattari
avecMarx.Il estaussiréalisateur
etscénariste
decinémaetdevidéo. OuivetrASANTOS
ABRAHÂO
DEest professeur
depsychologie
àl'Uni-
versidade
FederalFluminense,Rio deJaneiro,Brésil,etdirecteur
du
GuesponMaëLestdocteur del'EHESS,ancienallocataire-moniteur Kirembo
—laboratoire
derecherche
ensubjectivité
erculture
afro-brési-
duCentrederecherches sur
les artsetlelangage
(CRAL,EHESS/
lienne.Il travaillesurlechampsocialetlasantémentale
enutilisant
CNRS).Sa thèse,
codirigéeparEsteban BuchetAnneSauvagnargues,
desconceptsde Félix Guattarier GillesDeleuze.11a publié,entre
estconsacrée
auxenjeuxcliniques,éthologiques
etesthétiques
du
concept
de ritournelle.
Il arécemment publié«Mêmeles constantes autres
: «Gestioncollective
desrêves
:extractions
déterritorialisées
»,
; RevueL'Unebévue,n°31,2014Psicose:questoes
devidaoumorte,Säo
sontpour
la variation» (in P. Criton etJ.-M. Chouvel[dir.},Gilles
Paulo,Vetor, 2006;et«Cultureafricaine
auBrésil: rêve,résistance
Deleuze.
Lapensée-musique,
Paris,Cdme,2015)et «D'une répétition
l’autre.
Laritournelle
dans«Monographie surR.A. »(Chimères, n°79, etsingularisation
»,Chimères,
n°86,2015,
p.73-84,
<hutp://www.
«Chaosmose, temps
pluriels
»,P. Criron[dir.],Paris,Érès,2013). editions-eres.com/ouvrage/3605/les-paradoxes-du-reve>.

Hicaki TATsuyA,néen1964,
est professeur
àl'Université
d'Osaka, PALPELBARTPETER est philosophe
etessayiste.
Il estprofesseur
à
faculté
dessciences
humaines.
Il apublié
: Éternité
etInstant.
Lathéorie l'Université
pontificale
catholique
deSäoPaulo.
Il atraduit
deslivres
du temps
chezGillesDeleuze,
\wanami,Tokyo,2010(enjaponais)
et deGillesDeleuze
enbrésilien,
et aécrit
surfolie,
temps,
biopolitique,
une/ntroduction
à laphilosophie
japonaise,
Jinbun,Kyoto,2015(en subjectivité.
Sondernier
livreestCartography
ofExhaustion
—Nihilism
japonais). Inside
Out.Westmembre
delacompagnie
théâtrale
Ueinzz,
unprojet
dethéâtre
avec
desusagers
delapsychiatrie
àSäo Paulo.
Il est
également
HozLanp EuceneW., professeur
honoraire,Department
of coéditeur
delan-1publications.
ComparativeStudies,Ohio StateUniversiry(E.-U.),est l'auteurde
NomadCitizenship: Free-MarketCommunism andtheSlow-Motion PENHA
GUSTAVO,
compositeur,
professeur
à l'Université
fédérale
de
General
Strike(Minnesota,2011),
et plusrécemment duReaders Guide MatoGrossodoSul (UFMS)er post-doctorant
àl'USPavecbourse
du
toÀ Thousand
Plateaus
(Bloomsbury,
2013). CNPa,il afairsondoctorat
à l'UNICAMP,
avecbourse
delaFAPESP
etsupervisiondeSilvioFerraz,encotutelle
avecl’Université
Paris8.
LipumA Viviana
est agrégéedephilosophie,doctoranteauLabexArts
H2Hde l'Université
Paris8 (Saint-Denis)
etactuellementprofesseure QUERRIEN
ANNE,
sociologue
deformation,
amilité
avec
Félix
Guattari
auCUFde Saint-Pétersbourg.Elle travaille
àlajonctiondela philo- àpartirde1965,
puis travaillé
avec
luiauCERFI,Centre
d’études,
de
sophie
politiqueetde
l'esthétique. Sathèseportesurlesmécanismes recherches
etdeformation
institutionnelles,
àpartirde1967,
et suivi
deproduction desubjectivitéà travers
lesimages danslessociétés leséminaire
deGilles
Deleuze
àVincennespuis
Saint-Denis.
De1985
capitalistes
néo-libérales,
ainsique
sur lesenjeuxd’uneréappropriation à2010,
elle adirigé
larevue
LesAnnales
delaRecherche urbaine
au
decetteproductionpar
les groupes dominés. ministère
del'Équipement
devenudel'Écologie.
Elleestdepuis
2008
co-directrice
de
la revue
Multitudes,
etparticipe
aucollectif
derédaction
MARTINJEAN-CLET,agrégédephilosophie, docteur
enphilosophie, de
la revueChimères.
Auteure
denombreux
articles,
elleapublié
aussi
titulaire
d’unehabilitation
àdirigerdesrecherches,
aétédirecteur L'école
mutuelle,
une pédagogie
trop
efficace?
auSeuil/Les
Empêcheurs
deprogramme
auCollège
international
dephilosophie
deParis
(de depenseren ronden2004.
1998à2004).Il acréélesiteinternet
Strass
deLaphilosophie,
etdirige
lacollection
«Bifurcations
»auxéditions
Kimé.Il estl’auteur
de Ramseau
Frénéric,agrégé,
docteur
enphilosophie,
estmaitre
nombreuxouvrages
dephilosophie
ecd'esthétique
dontVariations, deconférences
àl’Université
Paris8Vincennes-Saint-Denis.
Il est
406 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECDELEUZE Lesauteurs407

performance.
Depuislesattentats
contreCharlie
Hebdo,
elleàperformé
l'auteur
de: Lessecondes
vies
dusujet
(Deleuze,
Foucault,
Lacan), Paris,
Hermann, 2016;Droitdemort
et pouvoir
surlavie,Paris,Gallimard, uneminute
dedanse
par
jour dans
desespaces
publics
nondédiés.
2006,
et denombreux
articlessur
les théories
delasubjectivation
dans
laphilosophie
française
contemporaine. VieiraDASiLvaCinria
est professeur
dephilosophie
àl'Université
fédérale
deOuroPreto(MinasGerais
—Brésil),
vice-présidente
de
RoQuETATIANA, professeure
àl’Institut
desmathématiques
del'Uni- l'Associationbrésilienned'esthétiqueetcoordonnele Groupede
versité
fédérale
deRiodeJaneiro,estmembre associé
desArchives TravailDeleuze de
l'Associationnationale
depost-graduation
enphilo-
HenriPoincaré
(Laboratoire
d'histoire
dessciences
etdephilosophie sophieau Brésil.Sespublications
les plussignificatives
sont
: Corpo
—Université
deLorraine).
Elleaétédirectrice
deprogramme
au Collège epensamento : aliançasconceituais
entreDeleuze
eEspinosa(Corps
et
international
dephilosophie. pensée
:desalliages
conceptuels
entre
Deleuze
etSpinoza),
Campinas,
EditoradaUnicamp,2013;«Intensidade eindividuaçäo: Deleuze
e
SCHAEPELYNCK
VALENTIN,
aprèsdesétudes
dephilosophie
àl’Univer- osdoissentidosdeestética
» (Intensité
etindividuation
: Deleuze
et
sitéParis8 etàl'Université
Paris-Ouest-Nanterre,
asoutenu
unethèse lesdeuxsensd'esthétique),
RevistaAurora,
vol.29,série
46,2017 et
dedoctorat
ensciencesdel'éducation
àl'Université
Paris8,où
il est «Artecomosaüde : critica,
clinicaeo povoquefalta»(Artentant
: actuellement
maître
deconférences(laboratoire
Experience).
Spécialiste que
santécritique,
cliniqueetle peuplequimanque),
Viso,Cadernos
del'analyse
institutionnelle,
il vapublierprochainement
L'institution deEstérica
Aplicada,vol.19,2016.
renversée.
Folie,analyse
institutionnelle
etchampsocial
(Exerotopia).
ViLLANIARNAUD, agrégé
delettres
classiques,
agrégédephilosophie,
SrinpLierFReDriKA,PhDenphilosophie, maître
deconférencesÀ docteur
d'État,a longtempsenseignéenChairesupérieure
(philo-
l'Université
deSüdertürn,
StockholmetRichmond,
VisitingProfessor sophie)
aulycéeMasséna deNice.Il apubliéplusieurs
ouvrages,
àWilliamsCollege,
Massachusetts,
USA. notammentsurDeleuze (parmilesquels
Laguépeetl'orchidée,
Paris,
Parmisespublications
récentes
:Deleuze.
Tänkande
ochblivande
(Deleuze. Belin,1999),etsurParménide
(traduction
etcommentaire,
éditions
Penseretdevenir),
Güreborg, GläntaProduktion2013;Nierzsche. Hermannet Sils-Maria, 2011,2013).Il a entretenu
avecGilles
Kropp,konst,
kunskap(Nietzsche.
Corporéité,
création,
connaissance), Deleuzeunecorrespondance
suivie,dontcertaines
lettres
ontété
Gôteborg,GläntaProduktion2010;Spinoza.
Multitud,affekt,
kraft publiées.
Depuisquelques
années,
ilseconsacre
àdesessais,
poétiques
(Spinoza.
Multitude,
affect,
puissance),
Gôteborg,
Glänta2009. etphilosophiques.
UnoKunuicuiestprofesseur émérite
deRikkyoUniversity
auJapon.
VossDANIELA estactuellement
chercheure
postdoctorale
àl'Univer-
Il apublié
Artaud,Shikô10Shintai,
enjaponais,Hakusuisha,
quiest
sitéDeakin
à Melbourne,
Australie.
Elleaenseigné
àl'Université
de
originairementunethèse dedoctorat
dirigéeparGillesDeleuzeà
Berlin,
puisàl’Université
deHildesheim
enAllemagne.
Spécialisée
en
l'Université
Paris8, TheGenesis
ofanUnknown body,n-1publica-
tions,version
bi-langueenanglais
etportugais,
prêtà publier
Penser philosophiepostkantienne
(SalomonMaïmon,enparticulier),
dans
lecorpsépuisé
deHijikataTatsumi,
Presses
duréel,2017etatraduit laphilosophie
deDeleuze,Spinoza
etSimondon,
elle
est |auteure
de
notammentdes livres deDeleuze,
GuattarietArtaudenjaponais. plusieurs
articles,
publiés
parDeleuze
Srudies,
Parrhesia
etContinental
Philosophy
Review.
Elle
est
l'auteure
deConditions
ofThought
:Deleuze
VaDoriI-GAUTHIER Nabi14,
docteure
enesthétique
del'Université andTranscendental
Ideas
(2013)
excoéditrice
avecCraig
Lundy
deA:
Paris8,enseigne
diverses
pratiques
dumouvement(danse,Mouvement theEdges
of Thought
: Deleuze
andPost-Kantian
Philosophy
(2015).
authentique,
Body-MindCentering®,
Yoga).Aprèshuitannéesde
compagniechorégraphique
(auteur
desepr
pièces),
elledirige
aujourd'hui ZasunyanDonk estmaîtredeconférences HDR encinéma à FU
lesrecherches
duCorps
collectif,laboratoire
artistique
etgroupe
de versité
deLille 3. Il a publiédeuxouvrages
surDeleuze
etlesas !
Gilles
Deleuze.
Voir,
parler,
penser
aurisque
ducinéma
(PSN,
2006)et
408 AGENCER
LESMULTIPLICITÉS
AVECD'ELEUZE

Lescinémas
deGillesDeleuze
(Bayard,2011).Ucollaboreàdifférentes Tabledesmatières
revues comme artpress,
Cahiers
ducinéma,
TraficouencoreCritique.
Il dirigelacollection
« Logique
desimages
»auxéditions
Bayard.
Introduction s

I. FAIRE VARIER LESCONCEPTS


L.Un seulou deuxdésirs?
parCintiaVieiradaSilva 3
Il. Leschemins
ducorps
sans
organes
parXuniishiUno 31
III. Subjectivités
etlignesdfuite
e : surl'amitié
philosophique
parFredrikaSpindler 41
IV. Diagrammes : usages
multiples
parDanielaVoss 53
V. Subjectivationsetdésubjectivations
parPeter
PalPelbart 65
VI.Delacliniqueàlamusique
: stéréorypies
psychiatriques
etritournelles
deleuzo-guattariennes
parMaëlGuesdon 77

IL.CRITIQUERLAREPRÉSENTATION
VIL.Musique
etmodulation
:vers
unepoétique
duvent
parSilvioFerrazetGustavo
Rodrigues
PEnha mm JS
VIIL.Sorcellerie
etmachinisme
Pr Je GA eu 107
IX. Entretotémisme
aborigène
etUmbandabrésilienne
: |
empreintes,
lignesdefuiteetcristallisation
deshétérogénéités
parBarbara
Glowczewski 119
X.Agencement-Candomblé
er lignes
defuice
brésiliennes
parAbrahäo
deOliveiraSantos
meme 131
XI. Ensembles
et multiplicités
parJean-Clet
Martin mme
143
XII.De
la métallurgie
aucyborg
:leproblème
delatechnologie
chezDeleuze
etGuattari
parZatsuya
Higaki LL
Table
desmatières
411
410 AGENCERLESMULTIPLICITÉS
AVECD'ELEUZE

III. TRACERDESDIAGRAMMES
V.EXPÉRIMENTER
MICROPOLITIQUEMENT
XXVI. Deleuzepolitiqueavant
la rencontre
avecGuattari
XUL.Circle
Process
:subjectivation
etprocessualité
musicale
parAnne Querrien . 313
parPascale
Criton
» XXVIL. Le cinémacomme«artducontrôle
: stratégies
XIV.Enquoile capitalisme
est-iluneaxiomatique?
parTatianaRoque …179 du retournement
parDorkZabunyan 325
XV.Énoncés desorganisations
depouvoir/idéologies:
unedifférence
entre
laphilosophiedeDeleuze XXVIIL.Ledevenir
d'Oliviaaupays
deShonda
etGuartari
etlapensée
deMarx parKpédétin
MariquianAhouansou #37
parRodrigo
Guéron 195 XXIX.Du «mass
media
act»àlacréation
desmédias
libres
XVI. Perspective,
cadre,
philosophie : lapeinture parVivianaLipuma. 347
d'après
Deleuze XXX.Laperversion
deleuzienne
: prise
etméprise
parGregory
Flaxman 205 parFrédéric
Rambeau 359
XVII.Deleuze,
devenir-ingénieur XXXI. « Machinesdeguerre»: entreconcepts,
institutions
parGeorges
Amar 217 etexpérimentation
sociale
XVIIL Sémiotiques
etmicro-esthétique
dudesign parValentin
Schaepelynck 373
parVincent
Beaubois 223 XXXII.Pourunenomadologie
desinstitutions
parEugene
W.Holland 385
IV. PRENDRESOIN DESLIGNESDE FUITE
Bibliographie 395
XIX.«L'artestcequirésiste
même sicen’est
pas
laseulechosequirésiste
» Lesauteurs 401
parRaymond Bellour 241
XX.Lepresque rienquitourneenligned'expérimentation
parAnaGodinho 255
XXI.Danser, expérimenter
parNadiaVadori-Gauthier 265
XXII.Laschizoanalyse
oularévolution
copernicienne
del'inconscient
parFlorentGabarron-Garcia 269
XXIII. Poétiques
del’immanence: Deleuze,
Beckett…
parAnnitaCostaMalufe 281
XXIV. L'effetGuartari
parAndrew
Goffey 291
XXV.Deleuze: levrai-fuyant,
la poésie,
lesGrecs
parArnaudVillani 301
Lescolloques
deCerisy
auxÉditionsHermann

ART
Pychanalyse
etcinéma.
Du
visibleetdudicible,
Ch.Clouard
et M.Leibovici,
2019.
Gestualités/Textualités
endansecontemporaine,
S.Genetti,
C. Lapeyre
et
F. Pouillaude
(dir.},
2018.

LITTÉRATURE
VictorSegalen,C. Camelin(dir.),2019.
Littératures
etartsdu vide,J. Duwaet P. Taminiaux(dir.),2018.
L'Algérie,
traversées,
G. Lévy,C. MazauricetA. Roche(dir.},2018.
L'écriture
dupsychanalyste,
J.-F.Chiantaretto,
C.Martaet F,Neau
(dir.),
2018.
Christian
Prigent
: trou(v)er
salangue,B.Gorrillot
etF.Thumerel
(dir.},
2017.
Écritures
desoi,Écritures
ducorps,J.-F.Chiantaretto
etC.Matha
(dir.},
2016.
Périples
&parages.
L'œuvre
deFrédéric
Jacques
Temple,
M.-P.Berranger,
P.-M. HéronetC. Leroy(dir.),2016.
Écriture(s)
etpsychanalyse
:quels
récits
?,Fr.Abel,
M.Delbraccio
etM.Petit
(dir.),2015.
Pascal
Quignard.
Translations
etmétamorphoses.
Avecuninédit
dePascal
Quignard,M. Calle-Gruber,J. Degenève
erI. Fenoglio
(dir.),2015.
1913: centansaprès. Enchantements etdésenchantements,
C. Camelin
et
M.-P.Berranger (dir.),2014.
Écritures
desoi,Écrituresdeslimites,
J.-F.Chiantaretto
(dir.),2014.
Ateliers
d'écriture
littéraire,
CI. Oriol-Boyer
et D. Bilous
(dir.),2013.
Swann lecentenaire,A. Compagnon et K.Yoshikawa (dir.),
2013.
Présence
d'André
duBoucher,
M.CollotetJ.-P.Léger
(dir.),
2012.
L'Ailleurs
depuis
Leromantisme.
Essais
surLeslittératures
en
français,
D.Lançon
etP.Née(dir.),2009.
Yves
Bonnefoy.
Poésie,recherche,
savoirs,
D. Lançon
et P.Née(dir.),2007.

PHILOSOPHIE
Lieuxetfigures
del'imaginaire,
M.deGandillac
etW.Bannour
(dir.),2017.
Àl'épreuve
d'exister
avec
Henri
Maldiney,
Ch.
Younès
etOFrérot
. (dir.),
2016.
JeanGreisch,Les
trois
âges
deLaraison,
S.Bancalari,
J. deGramont etJ. Leclercq
(dir.),2016.
Despossibles
delapensée.
L'itinéraire
philosophique
deFrançois
Jullien,
Fr.Gaillard
et Ph. Ratre(dir.),2015.
Gaston
Bachelard.
Science
etpoétique,
unenouvelle
éthique
?,J.-J.Wunenburger
(dir.),
2013.
CERISY
@
L'Émile
deRousseau
:regards
d'aujourd'hui,
A.-M.Drouin-Hans,
M.Fabre,
D.Kambouchner
et A.Vergnioux
(dir.),2013.

SOCIÉTÉ
L'alternative
ducommun,Ch. Laval,P.Sauvêtre
etF.Taylan(dir.),2019.
Cequela misèrenousdonne
à repenser,
avec
JosephWresinski,
B.Tardieuer
LeCentre
Culturel
International
deCerisy
propose,
chaque
année,definmaiàdébur
octobre,
J. Tonglet
(dir.),
2018. dans
lecadre
accueillant
d'unchâteau
construit
audébut
duxvirsiècle,
monumenthistorique,
Lamésologie,
unautre
paradigme
pourl'anthropocène?,
M.Augendre,
J.-P.Liored desrencontres
réunissant
artistes,
chercheurs,
enseignants,
étudiants,
acteurs
économiques
er
et Ÿ. Nussaume(dir.),2018, sociaux,
mais
aussi
unvaste
public
intéressé
parleséchanges
culturels
exscientifiques.
Quest-ce
qu'un
régime
detravail
réellement
humain
?,P.Musso
etA.Supior
Unelongue
tradition
culturelle
(dir.),2018.
ec Écologie
politique
del'eau,
J.-P.Pierron
(dir.),
2017. - 1910 1939,
PaulDesjardins
organise
àl'abbaye
dePontigny
lescélèbres
décades,
qui
Cultures
etcréations
danslesmétropoles-monde,
M. Lussault
etO. Mongin ee sr P liréspourdébartre
dethèmes
littéraires,
sociaux,
politiques.
(dir.),
2016. - En 1952,AnneHeurgon-Desjardins,
remertantlechâreau
enétar,créeleCentre
Culrurel
ec
Larégion,
del'identité
àLacitoyenneté,
A.FrémontetY.Guermond
(dir.),
2016. poursuie,
enlui d sa marque
p nelle,
l'œuvredesonpère.
Legéniedelamarche.
Poétique,
savoirs
etpolitique
descorps
mobiles,
G.Amar, —De1977
à2006,
sesfilles,
Catherine
Peyrou
erÉdith
Heurgon,
reprennent
keflambeau
er
M. Apel-Muller
er S. Chardonnet-Darmaillacq
(dir.),2016. donnentunenouvelle
ampleurauxactivités.
Peut-on
apprivoiser
l'argent
aujourd'hui
?,}.-B.deFoucauld
(dir.),2016. - Aujourd'hui,
j i après
Ladisparition
iti deCatherine,
i puis
k celle
deJacques
Peyrou
,Cerisy
continue
pe,> direction
d'Édith
Heurgon etdeDominique
Peyrou,avec
leconcours
d'Anne
Peyrou-
Auprismedujeu.Concepts,
pratiques,
Perspectives,
L. MermeretN, Zaccaï- BasecdeChristianPeyrou,
également
groupés
danslaSociété
civileduchâteau
deCerisy,
ainsi
Reyners(dir.),2015. qued'une
équipe
efficace
etdévouée,
animée
parPhilippe
Kister.
Les
animaux
:deux
outrois
choses
quenous
savons
d'eux,
V.Despret
etR.Larrère
Unmême
projet
original
(dir.),2014.
Prendresoin.
Savoirs,
pratiques,
nouvelles
perspectives,
V. Chagnon,
C. Dallaire,
=Accuclile
dansencadre
prnigious,
doigué
desagincions
melon,perdues
vaspilote
C. Espinasse
etÉ. Heurgon
(dir.),2013. assez
longue,despersonnes
qu'anime
un même
attraitpourleséchanges, que,
Villes,territoires,
réversibilités,
F. SchereretM. Vanier(dir.),2013. réflexion
commune, s'inventent
desidées
neuvesetscvisent
desliens
durables.
Lasérendipité.
Lehasard
heureux,
D. Bourcier
etP.vanAndel(dir.),2011. —LaSociétécivilemergracieusement
leslieux
àLadisposition
del'Association
desAmisde
L'économiedelaconnaissance etsesterritoires,
T. Pariset P. Veltz(dir.),2010. Pontigny-Cerisy,
sansbutlucratif
etreconnued'udlité
publique,
présidée
actuellement
par
Jean-Baptiste
deFoucauld,
inspecteurgénéral
desfinances
honoraire.
PeursetPlaisirsdel'eau,B. Barraqué
et P.-A. Roche(dir.),2010.
Unerégulière
action
soutenue
HORSSÉRIE
Jardinsenpolitique,
P.Moquay
etV. Pivereau
(dir.),2018.
Europe
enmouvement
1,W.Asholt,
M.Calle-Gruber,
É. Heurgon
et P.Oster ben
loquesabordant,
donné
lieu,chez
entouteindépendance
divers
éditeurs,
àlaRE RP
d'esprit,
lesthèmes
PSP
lesplus divers.
mule
(dir.),2018.
- LeCentreNationaldu Livreassure
uneaidecontinue
pour l'organisation rs
Europe
enmouvement
2,W.Asholt,
M.Calle-Gruber,
É. Heurgon
erP.Oster
(dir.),2018. Manche,
Mat Coutances
Cnes MeretBocage)
Fa etlaDirection
ner régionale
des
dé es re culturelles
Do apportent
de Nourritures
jardinières
dans
dessociétés
urbanisées,
S.Allemand
etÉ.Heurgon leursoutienau Centre,qui organise,
enoutre,avecl'Université Caen,
concernant
la Normandie. : . |
(dir.),2016.
—UnCercle
desPartenaires,
formé
d'entreprises,
decollectivités
Re uen
les Transplanter.
Uneapproche
transdisciplinaire
:art,médecine,
histoire
etbiologie, blics,
soutient,
voire
initie,
desrenconcres
deprospective
sur principaux
enjeux
Fr. Dclaporte,B. Devauchelle et E. Fournier(dir.),2015.
er
Renouveaudesjardins.ClésPourunmonde durable?,S.Allemand,É. Heurgon —Depuis2012,unenouvelle
salle
deconférences, moderneom j Pre formule
de nouvelle
: lesséminaires
delaLaiterie,
àl'initiative
despartenairesl'Asso
etS. dePaillette(dir.),2014.
De Pontignyà Cerisy(1910-2010): deslieuxpour«penseravecensemble »,
Renseignements
: CCIC, LeChâteau, 50210 CARLA FRANCE
S.Allemand,
É. Heurgon
etC. Paulhan
(dir.),2011. Tél.02334691G6; Internet : Pr
Courriel: info.cerisy@ucic-cerisy.2550.
CERISY
@
Choix
depublications
+L'Algérie,
traversées,
Hermann,2018.
+RolandBarthes,
continuité,
Christian
Bourgois,
2017.
+HenryBauchau,lesconstellations
impérieuses,
AML/Labor,
2003.
+Philippe
Beck,
unchant objectif
aujourd'hui,
Conti,
2014.
+YvesBonnefoy.
Poésie,
recherche,
savoirs,
Hermann,2007.
* Présence
d'André duBoucher,
Hermann,2012.
* Lesymbolique
etlesocial
(autour
dePierreBourdieu),
PU deLiège,rééd.2015.
+Camus l'artiste,
PUdeRennes, 2015.
+Lespluriels
deBarbara Cassin,LeBorddel'eau,2012.
+Versunerépublique desbiens
communs, Lesliens
quilibèrent,
2018.
+L'alternative
ducommun, Hermann, 2019.
+Lescheminsactuelsdelacritique,
\O/18,rééd.Hermann, 2011.
+MichelDeguy, l'allégresse
pensive,
Belin,
2007.
+Les
finsdel'homme (autour
deJ. Derrida),
Galilée,
rééd.Hermann,
2013.
+AsiaDjebar,littérature
ettransmission,
Presses
Sorbonne Nouvelle,
2010.
+Écologies
del'attention
etarchéologie
des
media,
UGAÉditions,
2019.
+AnnieErnaux: letemps
etlamémoire,
Stock,2014.
+Europe
enmouvement
1.À lacroisée
des
cultures,
Hermann,
2018.
+Europeenmouvement
2.Nouveauxregards,
Hermann,
2018.
+Gestes
spécularifs,
LesPresses
duréel,
2015.
* Peter
Handke,
l'analyse
dutemps,
Presses
Sorbonne
Nouvelle,
2018.
+Renouveau
des
jardins.
Clés
pourunmondedurable
?,Hermann,
2014.
+Jardins enpolitique(avecGillesClément),Hermann,2018.
+Depossibles
delapensée.
L'itinéraire
philosophique
deFrançois
Jullien,
Hermann,
2015.
+Kafka,
Cahiersdel'Herne,2014.
«+Littératures
etartsdu vide,Hermann,2018.
* Mallarméoul'obscurité
lumineuse,
Hermann, 1999,rééd.
2014.
+Lamésologie,
unautre igme pourl'anthropocène
?,Hermann,
2018.
* 1913: cent
ansaprès.
Enchantements
etdésenchantements,
Hermann,
2013.
+Pierre
Michon. Lalettre
etsonombre,
Gallimard,2013.
* Robert
Misrahi.Pouruneéthique
deLajoie,Cécile
Defaut,
2013.
* CequeLamisère
nousdonneà repenser,
avecJosephWresinski,
Hermann,
2018.
* Nietzsche
aujourd'hui
?1.Intensités,
2.Passion,VO/18,
rééd.Hermann,
2011.
+Relire
Perec,
PUdeRennes, 2017.
+Ponge,
inventeur
etclassique,
\0/18,rééd.Hermann,2011.
* DePontigny
à Cerisy
(1910-2010): deslieux
pour«penser
avec
ensemble
»,
Hermann, 2011.
* Christian
Prigent
: trou(v)er
salangue,
Hermann,
2017.
* Pascal
Quignard,
translations
etmétamorphoses,
Hermann,
2015.
* W:-G.
Sebald,
littérature
etéthique
documentaire,
Presses
Sorbonne
Nouvelle,
2017.
+Simondon
etl'invention
dufutur,Klincksieck
erC*, 2015.
+Swann,lecentenaire,
Hermann,
2013.
* Volodine,
etc.
Post-exotisme,
poétique,
politique,
Classiques
Garnier,
2010.
* Lasérendipité.
Lehasardheureux,
Hermann, 2011.
* LireZolaauxr siècle
?,Classiques
Garnier,2018.
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