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PORTRAIT D'ENTREPRISE

HUB 4. Bâtisseur, gestionnaire et aménageur : les stratégies adaptatives de Fraport


AG et Aéroports de Paris

Charlotte Halpern

Métropolis | « Flux »

2011/2 n° 84 | pages 73 à 89
ISSN 1154-2721
DOI 10.3917/flux.084.0073
Article disponible en ligne à l'adresse :
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Portrait d’entreprise

À maints égards, la diversification de


PORTRAIT D’ENTREPRISE leurs activités s’inscrit dans une dyna-
mique initiée bien avant leur change-
ment de statut pour accroître leur capa-
HUB 4. Bâtisseur, gestionnaire et aménageur : cité de financement et se différencier de
les stratégies adaptatives de Fraport AG leurs principaux concurrents. Les pro-
et Aéroports de Paris jets en cours d’airport cities constituent
autant une opération de labellisation
d’un processus amorcé de longue date,
Charlotte Halpern qu’une opportunité d’accroissement
des revenus non aéroportuaires et de
Après l’analyse de BAA plc (1), nous régulation dual (dual-till price cap), qui spécialisation sur un marché de plus en
terminons la série consacrée aux différencie le périmètre (variable selon plus concurrentiel. L’airport city (4), ou
grands opérateurs de Hub aéropor- les aéroports) des activités régulées (3), « combinaison d’aéroport géant, de ser-
tuaires par l’étude comparée permet d’assurer la rentabilité des acti- vices d’expédition et de centre d’af-
d’Aéroports de Paris (ADP) et de vités aéroportuaires indépendamment faires » (Kasarda, Lindsay, 2011), préfi-
Fraport AG (2). L’enjeu consiste à rendre des recettes commerciales (Yang, gure ainsi l’avènement d’une nouvelle
compte d’une évolution globale du Zhang, 2011, p. 3). Ce mode de calcul ère dans la création de valeur aéropor-
métier d’opérateur, en lien avec les encourage un degré d’investissements tuaire : “location-location-location” (3L’s)
logiques de privatisation et de financiari- élevé, bien que moins incitatif en termes disparaît au profit de “accessibility,
sation précédemment évoquées. de rentabilité économique que celui pri- accessibility, accessibility” (3A’s). Dans
Fraport et ADP ont connu de nom- vilégié en Grande-Bretagne. Cette cette perspective de la contribution de
breuses transformations depuis 2001. double évolution n’a pas remis en cause l’infrastructure au développement du
Tous deux ont fait l’objet d’une ouvertu- la position dominante des deux opéra- territoire, conçue du point de vue de
re, partielle, de capital ; les acteurs teurs au sein de leurs systèmes et mar- son gestionnaire, l’aéroport sort de son
publics (collectivités territoriales pour chés aéroportuaires nationaux respec- emprise et intensifie la diversification de
Fraport, État pour ADP) conservent la tifs. ses sources de revenus. Contrairement
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majorité des parts. Ce changement de Ces transformations ont amené à BAA, qui a affiné son profil de retailer,
statut entraîne une réflexion sur la régu- ADP et Fraport à redéfinir leur métier Fraport investit dans le fret et la logis-
lation économique des activités aéro- d’opérateur après trois décennies pas- tique tandis qu’ADP renforce son profil
portuaires. Le passage à un mode de sées à concevoir et à réaliser des hubs. d’aménageur (5).

Fraport AG : un opérateur sous contraintes


Fraport AG Francfort
Création en 1947 « Verkehrsaktiengesellschaft Rhein-Main » (VAG) ; Transformation en 1952 en Flughafen Frankfurt/Main
AG (FAG).
Transformation en Fraport AG et entrée en bourse en 2001.
Structure du capital (2010) : Land de Hesse 31% ; Frankfurter Stadtwerke 20% ; particuliers 19% ; Lufthansa 9,92% ;
Investisseurs privés 19,83%.
Chiffre d’affaires : 2 G€ (2000) et 2,28 G€ (2010)
Gestionnaire de 5 aéroports (majorité des parts) : Francfort (8e rang mondial passagers, 7e pour le fret), Antalya (Turquie),
Lima (Pérou), Burgas & Varna (Bulgarie).
Nombre de passagers (en millions) : 62,6 (2000) et 88,5 (2010).
Dette (incluant les prêts internes) : 0,32 G€ (2004) et 2,02 G€ (2010).

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Flux n° 84 Avril - Juin 2011

Les choix de Fraport AG ont été réseaux autour d’un hub central, ainsi plus long et le plus violent en Europe
structurés par les contraintes découlant que le rôle stratégique de l’aggloméra- (Rucht, 1984).
de l’organisation décentralisée du trans- tion francfortoise dans l’économie alle- Ces deux contraintes ont pesé sur le
port aérien dans un État fédéral. À ceci mande, ont ensuite confirmé la centrali- développement de la FAG et expliquent
s’ajoutent des contraintes liées à la loca- té de cette infrastructure, dans des pro- la forte territorialisation des choix de
lisation de l’aéroport de Francfort : une portions qui restent largement en des- l’opérateur, en particulier les liens avec
faible maîtrise foncière, une localisation sous de celles observées en France et les collectivités environnantes et la prise
au cœur d’une zone très urbanisée et en Grande-Bretagne (voir Figure 1a en en compte des enjeux environnemen-
une capacité d’extension limitée. Pour fin d’article). L’évolution de la structure taux. Ceci ne signifie pas pour autant
maintenir sa compétitivité, l’opérateur a du capital de la FAG reflète l’engage- que ces relations sont exemptes de
exploré, en véritable pionnier, des options ment constant de l’État fédéral et conflits.
aujourd’hui reprises par nombre de ses Lufthansa, ainsi que des collectivités
concurrents en Europe : spécialisation territoriales (Land de Hesse, Ville de Un modèle d’affaires fondé sur le
dans le fret et les activités logistiques, Francfort) et des acteurs économiques fret et les activités de logistique
internationalisation dès la fin des années implantés à Francfort : leur soutien s’est
1980 et partenariats stratégiques. avéré décisif à chaque menace de Dans ce contexte, l’opérateur réalise
retrait de l’État fédéral, et a structuré les la majeure partie de ses profits grâce au
La FAG : un opérateur à l’étroit choix de développement de l’opérateur. développement de sa fonction de hub,
(1952-2001) La faible maîtrise du foncier a consti- étendue au fret et aux activités de logis-
tué un second élément de contrainte tique, puis à l’exportation du savoir-faire
Dans le contexte du fédéralisme pesant sur le développement de l’opé- acquis à Francfort. L’analyse des actifs
allemand, la centralité du système aéro- rateur, en raison de la présence de la de Fraport rend compte de l’émergence
portuaire ne va pas de soi : elle a été principale base aérienne de l’armée d’un modèle d’affaires fondé sur le trip-
acquise de haute lutte, elle a fait l’objet américaine au sein de l’emprise aéro- tyque suivant : l’acquisition d’un savoir-
de mises en cause récurrentes depuis portuaire et sur les zones alentours jus- faire au sein de la plate-forme francfor-
1952 et elle n’a jamais été formalisée en qu’en 2005. Tous les projets d’exten- toise grâce à des investissements conti-
droit. La position nodale de l’aéroport sion envisagés entre 1952 et 2001 ont nus, l’exportation de ce « modèle de
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de Francfort résulte tout d’abord de la nécessité l’acquisition de terrains sup- référence » vers d’autres opérateurs en
qualité et de l’ampleur (2100 ha) des plémentaires et la recherche de solu- Allemagne et à l’Étranger, et enfin, le
installations aéronautiques héritées de tions en bordure de l’emprise existante, développement d’alliances stratégiques
l’armée américaine en 1947. Le choix avec un impact considérable sur les comme palliatif à l’extension.
de Lufthansa et Deutsche Post en populations riveraines : cet aéroport a La FAG développe une large gamme
faveur de la centralisation de leurs connu le conflit anti-aéroportuaire le de services aéroportuaires (6) : assistan-

La structure de capital de Fraport (1947-2010)

1947 Création de la Verkehrsaktiengesellschaft Rhein-Main (VAG)


1949 Transfert de la gestion du trafic civil à la VAG
1952 Flughafen Frankfurt/Main AG (FAG) : Land de Hesse 45% ; Ville de Francfort 29% ; État fédéral 26%.
2001 Entrée en bourse de Fraport AG : Land de Hesse 32% ; Ville de Francfort 20% ; État fédéral 18% ; investisseurs
privés 30%.
2005 Entrée de la Lufthansa dans le capital de Fraport AG.
2007 Retrait complet de l’État fédéral.
2010 Structure actuelle : Land de Hesse 31% ; Ville de Francfort 20% ; particuliers 19% ; Lufthansa 9,92% ;
Investisseurs privés 19,83%.

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Portrait d’entreprise

ce aux personnes à mobilité réduite, (FPS Frankfurt Passenger Services pour la construction d’un nouvel aéro-
services de nettoyage et dégivrage des GmbH, 51% des parts), qui remporte port à Berlin (1996). Au terme d’un long
avions, restauration des personnels, les appels d’offres des compagnies feuilleton politico-médiatique, émaillé de
etc. Le découpage de ces activités en aériennes implantées dans l’aéroport de scandales financiers, l’opération se
filiales autonomes facilite l’exportation Francfort, comme par exemple la com- solde par l’éviction du consortium au
de ce savoir-faire dès la fin des années pagnie charter Condor ; puis, exporta- profit d’une solution de financement
1980, par le biais d’acquisitions, de tion au-delà des frontières nationales à public (2004) et un dédommagement de
joint-ventures ou de contrats. Le domai- Vienne Schwechat (Fraport Ground 4,8 M€ pour Fraport qui s’était investi à
ne des systèmes de communication et Services Austria, 2000, contrat BOT), hauteur de 7,5% (Halpern, 2006). Par la
d’information aéroportuaires est parti- en Grèce (Goldair Aviation Handling SA, suite, l’opérateur développe des parte-
culièrement représentatif de ce systè- 19,5% des parts) et au Portugal nariats avec des investisseurs et/ou
me : à partir de l’expérience acquise à (Portway, 40%). opérateurs locaux, que ce soit pour
Francfort, la filiale AirIT Services AG En parallèle, la FAG valorise son mener des activités de conseil sur le
(100% des parts) est créée en 2000 savoir-faire dans le développement et développement aéroportuaire ou d’acti-
pour exploiter cette activité dans les l’exploitation d’un hub international. vités de fret en Inde et en Chine
plates-formes situées en Allemagne et L’opérateur s’inscrit dès le départ dans (Shanghai Frankfurt Airport Consulting
dans lesquelles l’opérateur possède une démarche collective avec de Service Ltd, 50%), ou pour s’engager
des parts (Francfort-Hahn puis grands groupes allemands des secteurs dans la réalisation de ces projets dans le
Hanovre-Langenhagen). Enfin, une filia- bancaire, financier et d’ingénierie qui lui cadre de contrats BOT.
le spécifiquement dédiée à l’exploration permettent de financer ses ambitions à Enfin, l’opérateur investit dans la
du marché américain est créée l’international, comme à Moscou (1990, constitution d’un vaste pôle intermodal,
quelques mois plus tard (Air-Transport contrat achevé) devant BAA. Cette stra- qui combine l’intégration par les trans-
IT Services, Inc, 100% des parts, tégie est également développée au ports et les activités de logistique. La
Orlando, FL). En prévision de la libérali- niveau national, parmi les différentes FAG n’agit pas en autonomie, mais
sation des services au sol dans les solutions de substitution explorées au dans le cadre de partenariats de longue
aéroports européens (7), la valorisation cours des « décennies perdues » qui durée avec d’autres grandes entre-
de cette activité s’organise sur un sché- suivent le conflit “Startbahn West”. La prises publiques, comme Lufthansa qui
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ma similaire et permet de compenser FAG répond, conjointement avec un y a officiellement installé sa base en
les pertes de revenus liées à l’arrivée de consortium d’investisseurs privés piloté 1970. Cet effort collectif porte d’abord
concurrents : mise en place d’une filiale par le groupe Hochtief, à l’appel d’offres sur la desserte terrestre, pour étendre la

L’aéroport de Francfort en quelques étapes

1949 Système de 2 pistes parallèles


1970 Contrat avec Lufthansa pour y développer sa base
1972 Terminal 1, Gare souterraine
1984 Mise en service de la Startbahn West (décollages)
1994 Terminal 2 ; Système de transport passagers SkyLine
1995 Retrait partiel de l’armée américaine
1997 CargoCity Süd
1999 Gare ferroviaire à grande vitesse, introduction de l’AIRail
2000 Optimisation des installations existantes (terminaux 1 et 2)
2005 Départ définitif de l’armée américaine
2008 Extension du Terminal 2
2009 Construction d’une quatrième piste (atterrissages, horizon 2011), Terminal 3 et Centre de maintenance Airbus A380
2010 Mise en service de 2 nouvelles tours de contrôle

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Flux n° 84 Avril - Juin 2011

zone de chalandise de l’aéroport, de fret/an à partir du Terminal tion d’une 4e piste, des espaces d’ac-
aujourd’hui estimée à 43% de la popu- CargoCitySüd et développe des joint- cueil passagers associés et installations
lation allemande (radius de 200 km, ventures sur certains segments haute- dédiées à l’Airbus A380 (4G€). À ce
étendu jusqu’à Bruxelles et Ams- ment spécialisés de ce marché, comme coût global s’ajoute l’acquisition de ter-
terdam). Des investissements publics les produits dangereux et périssables. rains en vue de la réalisation du projet
majeurs portent sur les infrastructures : Les bénéfices dégagés avec les (61 ha) et d’une zone tampon (450 ha)
transports routier (principal échangeur activités de fret conduisent la FAG à visant à protéger les populations rive-
autoroutier de l’Allemagne de l’Ouest), s’engager dans les aéroports de raines conformément aux engagements
ferroviaire (régional, urbain) avec une Saarbrücken, Hanovre et surtout, à pris par les actionnaires publics de
gare souterraine (1972) et la grande Frankfurt-Hahn, pour limiter les effets de l’opérateur. Le financement de ces opé-
vitesse (1999). L’effort porte aussi sur concurrence et pallier l’absence de rations nécessite une levée de fonds
les services aux voyageurs, en coopéra- réserve foncière disponible dans l’aéro- considérable, ainsi qu’une réflexion à
tion avec Lufthansa et Deutsche Bahn : port de Francfort. Reconverti au trafic plus long terme sur la rentabilité de
Lufthansa Airport Express (1982), puis aérien civil en 1993, l’aéroport Frank - l’opérateur. En janvier 2001, la société
le service AIRail (1999) qui comptabilise furt-Hahn connaît une croissance rapide anonyme Fraport AG-Frankfurt Airport
aujourd’hui 4,2 millions de passagers/ suite aux investissements réalisés par la Services Worldwide remplace la FAG.
an pour des trajets en code-sharing FAG en 1998 (79% des parts) pour L’ouverture partielle de capital, en juin
avec 27 compagnies partenaires. rationaliser l’offre aéroportuaire (fret, de la même année, rapporte 903,9 M€
Les perspectives d’extension compagnies à bas coût) dans la métro- à l’opérateur.
ouvertes par le retrait partiel de l’armée pole francfortoise. La FAG ne se limite Largement fondés sur les services
américaine (1995) conduisent l’opéra- pas au marché national, et participe à la aéroportuaires et les activités liées au
teur à investir massivement dans le création de la Tradeport Hong Kong Ltd fret, les revenus de l’opérateur dépen-
développement d’installations intégrées (18,5%) pour développer les activités de dent étroitement des fluctuations du tra-
pour le fret à CargoCitySüd (1997). fret dans cet aéroport. fic aérien, particulièrement importantes
Cette zone de 149 ha comporte en 2002-2003 (attentats du 11 sep-
58 000 m2 entièrement dédiés, ainsi Fraport AG entre levée des tembre, guerre en Irak, épidémie du
qu’un Terminal AirMail, conçu conjointe- contraintes et value management SRAS) : en 2003, Fraport est devancé
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ment avec Lufthansa Cargo (40%) et (2002-2010) par ADP pour le transport de fret (voir
Deutsche Post (20%) pour le transport Tableau 1 en fin d’article). Le groupe
postal. En l’espace de deux décennies, L’annonce du retrait définitif de l’ar- doit aussi faire le ménage parmi les
l’aéroport de Francfort s’impose au pre- mée américaine, en 1997 pour 2005, actifs hérités de la FAG, dont certains
mier rang des aéroports allemands et conduit l’opérateur à développer un pèsent sur les résultats financiers en
européens dans le transport de fret (voir vaste programme d’investissements 2002, en particulier le projet de
Figure 1b et Tableau 1 en fin d’article) et (FRA North) dont la réalisation est pré- construction du terminal 3 de l’aéroport
confirme son caractère stratégique vue entre 2007 et 2015 pour un mon- international de Manille à l’origine de
dans une économie nationale fondée tant total de 7 G€. La mise à disposition 289,5 M€ de pertes (8). Cette perfor-
sur les exportations. De manière similai- de 400 ha environ à l’intérieur et en bor- mance mitigée se reflète dans le cours
re à la démarche observée pour les ser- dure d’emprise aéroportuaire permet de l’action, qui perd 36% de sa valeur
vices aéroportuaires, le savoir-faire d’envisager un accroissement de capa- au cours de l’année 2002 (voir Tableau
acquis dans ce domaine est valorisé par cité à 88 millions de passagers annuels 2 et Figure 2 en fin d’article).
Fraport Cargo Service GmbH. Cette à l’horizon 2020 : modernisation des Le programme “Value management
filiale à 100% traite plus de 500 000 m3 installations existantes (3G€), construc- 2005 : creating value for the future”,

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Portrait d’entreprise

Principaux actifs de Fraport AG à l’international (2010)

Aéroport Nombre
Date Contrats
et type de trafic de parts

2001 Lima (Pérou) : international 70% Construction/exploitation (30 ans + 10)

Burgas & Varna (Bulgarie) : charter 60% BOT (35 ans)

Conseil modernisation, développement et exploitation ;


2006 Dehli (Inde) : international 10%
(30 ans, reconductible)
Construction d’un nouvel aéroport et exploitation (activités
Dakar (Sénégal) : international —
aéroportuaires, immobilier, commerces) (22 ans)

Antalya (Turquie) : charter 51% Exploitation (25 ans, renouvellement d’un contrat BOT).

Conseil construction ; puis gestion en vue de la


Le Caire (Égypte) : international —
2007 constitution d’un hub passagers + fret (8 ans +2)
(1999) Riad & Djeddah (Arabie Saoudite) : inter-
100% Contrat d’exploitation et développements futurs (6 ans)
national
Indirect
Xi’an (Chine) : international
(24,5%)
St Petersburg (Russie) :
2009 35,5% Concession
international

adopté en 2002, amorce la refonte des d’attente passagers suite à une joint- Development GmbH (80%) pour le pro-
structures et des modes opératoires de venture avec ECE (Airport Retail jet AirRail ou « The Squaire » (2007-
Fraport AG dans une perspective de Solutions GmbH) ; et l’opérateur place 2010) qui prévoit la construction de
rentabilité économique : trois divisions « l’homo aeroportis globalis » (Fraport 200 000 m2 (espace de conférence,
sur cinq sont consacrées aux activités AG, 2005, p. 31) au cœur du futur bureaux, hôtellerie de luxe et com-
non aéroportuaires, développées dans Terminal 3 qui disposera de 15 000 m2. merces) ; un partenariat public-privé
le cadre d’un projet d’Airport City. Cette Dans le cadre de la refonte des struc- (Ville de Francfort – 50%, ING Real
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évolution se traduit aussi en termes de tures de la FAG, les divisions ancienne- Estate, etc.) pour le projet de quartier
contribution de chaque segment aux ment engagées dans la valorisation des tertiaire Gateway Gardens (700 000 m2 à
revenus du groupe (voir Figure 3 en fin terrains dédiés au fret sont rassemblées horizon 2020 : Foire Internationale de
d’article). L’enjeu consiste à investir les au sein d’une structure unique, Francfort, sièges de KPMG et de la
réserves foncières libérées par l’armée Immobilienservice und -entwicklung compagnie charter Condor, etc.).
américaine à l’intérieur et en bordure GmbH, spécialisée dans la gestion de Parallèlement à la diversification des
d’emprise pour développer des zones biens et l’immobilier. Pour une part de activités, Fraport AG intensifie la straté-
d’activités différenciées (tertiaire, logis- son activité, la filiale poursuit et intensifie gie d’internationalisation et de spéciali-
tique, commerces). Jusque-là, l’opéra- le développement des activités de fret et sation qu’avait mise en place la FAG.
teur pouvait être qualifié « d’anti-BAA logistique : extension de CargoCitySüd Dans le domaine des services aéropor-
plc », avec 109,9 M€ de revenus liés (6700 m2 supplémentaires), projet tuaires, l’opérateur acquiert, en 2002,
aux commerces, services et publicité en Mönchhof (110ha, parc d’activités). 55% des parts d’ICTS Europe, un grou-
2002, sur un total de 1,9 G€. La situa- Fraport AG s’engage aussi à hauteur de pe hollandais spécialisé dans la presta-
tion s’inverse entre 2002 et 2005 : 20% dans de vastes opérations immo- tion de services de sécurité (67,3 M€),
200 000 m2 sont ouverts dans les zones bilières et d’aménagement : avec IVG et finalise l’acquisition de Air-transport IT

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Services aux États-Unis (8,2 M€) : la pour 110 M€. Malgré ces quelques ports évolue (OECD/ITF, 2010). Depuis
signature d’un contrat avec United opérations, l’opérateur préfère nouer 2000, Hambourg, Hanovre, Düsseldorf
Airlines en 2004 en fait l’un des trois des partenariats stratégiques ou « hub- et Francfort peuvent faire l’objet d’un
premiers groupes présents sur ce mar- alliance » avec ses principaux concur- modèle de régulation unique (single-till
ché hautement spécialisé. À l’internatio- rents (Munich, Zurich) et en soutien au price cap) par les prix. En pratique et
nal, tout en procédant à la cession des développement de Lufthansa, qui a contrairement à l’application stricte pra-
actifs déficitaires, comme à Manille, racheté la compagnie Swiss (2005), et tiquée par le CAA en Grande-Bretagne,
Fraport AG renouvelle ses partenariats de Star alliance. Ce partenariat straté- le régulateur, en l’occurrence les autori-
stratégiques : avec l’opérateur néerlan- gique entre opérateurs constitue l’abou- tés régionales, adopte une lecture diffé-
dais Schipol Group pour explorer le tissement d’une longue tradition d’inté- renciée entre les activités aéronautiques
marché chinois ; avec Lufthansa dont rêts partagés avec Lufthansa, rapide- et les autres (dual-till price cap) (Müller
l’entrée au capital en 2005 permet à ment imitée par ADP et BAA, respecti- et al., 2008, p. 12). Plus précisément, le
l’opérateur de bénéficier des opportuni- vement avec Schipol Group (SkyTeam) système repose sur des accords-
tés offertes par le réseau des compa- et Madrid-Bajaras (One World). cadres pluriannuels de droit privé négo-
gnies membres de Star Alliance. Le por- Contrairement à la situation obser- ciés entre chaque aéroport et ses utili-
tefeuille des principaux contrats en vée en Grande-Bretagne, ce marché sateurs (compagnies aériennes), leur
cours montre que l’opérateur dispose reste dominé par les acteurs publics, en validation par l’autorité régionale pou-
d’importantes parts sur différents seg- particulier les Länder et les municipalités vant donner lieu à une nouvelle négocia-
ments du marché aéroportuaire interna- (Dumman, 2005). Ce mode de finance- tion avec l’aéroport sur tout ou partie du
tional. Les acquisitions réalisées à ment, ainsi que l’absence de régulateur document. Ce système à deux niveaux
Antalya et au Pérou ont constitué, sur la unique, expliquent le maintien de statuts permet d’associer les compagnies
période, une source de revenus particu- juridiques et de modes de régulation aériennes très en amont de la négocia-
lièrement dynamique. diversifiés. Hormis le cas berlinois, les tion, et diffère de la situation observée à
Enfin, l’évolution du capital de l’opé- rares cas d’ouverture de capital s’expli- Londres et Paris où les négociations
rateur permet la redéfinition des rela- quent soit par la volonté de retrait de entre opérateur et régulateur priment
tions avec Lufthansa et les actionnaires l’État fédéral (Fraport AG), soit par la (Gerber, 2002). Introduite à Hambourg
publics, dans un contexte d’ouverture volonté politique des municipalités de (2000) puis étendue à Hanovre (2003) et
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du marché aéroportuaire allemand. À conserver un aéroport compétitif contre Düsseldorf (2005), les négociations ont
cet égard, les opérations menées par l’avis des autorités régionales. À échoué à Francfort : suite à la médiation
Fraport AG sont limitées, ce qui montre Düsseldorf (1997, 30%) et Hambourg du Land de Hesse, l’aéroport a bénéfi-
ses réticences à disperser sa capacité (2000, 50%), Hochtief développe une cié pour 2007-2009 d’un système de
d’investissement, si ce n’est pour ren- joint-venture avec des partenaires irlan- régulation par les coûts avec une haus-
forcer son profil de spécialisation dans dais (Dublin airport authority, Air Rianta se des charges limitée à 2% annuels
les activités de fret et de logistique. International) pour s’implanter durable- (10) (contre 3,5% en 2001-2006). Sous
Fraport maintient son engagement à ment dans le marché aéroportuaire alle- la pression du régulateur, un accord a
Saarbrücken, et renforce sa présence à mand. À ce jour, ce groupe d’ingénierie été trouvé pour 2010-2015, qui tient
Hanovre (2008) avec l’achat de 10% de constitue le seul investisseur privé d’en- compte des investissements en cours :
parts supplémentaires (31,4 M€). vergure internationale présent en en 2010-2011, les charges pourront
L’opérateur projette d’y développer un Allemagne (9). augmenter de 12,5% au total, puis de
hub spécialisé dans le fret et quelques Parallèlement à ces timides ouver- 2,5% annuels maximum entre 2012 et
activités non aéroportuaires (immobilier, tures de capital, le système de régula- 2015.
logistique, zones de stationnement) tion économique des principaux aéro- Depuis 2008, Fraport est entré dans

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Portrait d’entreprise

une nouvelle zone de turbulence et auxquels s’ajoutent 900 M€ de prêts transfert de la participation de Fraport
concentre sa capacité d’investissement (11)), tout en renforçant le poids des dans l’aéroport Frankfurt-Hahn vers le
sur le projet d’extension. Ses principaux relations avec ses principaux action- Land de Rhénanie-Palatinat (12).
revenus proviennent des services aéro- naires. Depuis 2008, les résultats du L’opérateur-logisticien paye le retard
portuaires et du fret, ce qui accroît sa groupe sont tirés par la croissance enre- pris au cours des « décennies perdues »
dépendance aux fluctuations du trafic gistrée à Lima et Antalya, mais l’opéra- sur ses principaux concurrents, ainsi
aérien, particulièrement défavorables teur a dû céder ses actifs en Grèce, au que les choix d’investissements réalisés
(crise économique, intempéries, érup- Portugal, ainsi que ICTS Europe (10 000 depuis le début des années 1990. Son
tion volcanique, etc.). Ceci contraint les employés, 81 sites dans 24 pays), développement sur la longue durée
possibilités de recours aux marchés vendu à 100 M€ aux 2/3 de sa valeur montre aussi sa capacité à s’inscrire
financiers pour financer le projet d’ex- (pertes estimées : 67,3 M€). À ceci dans une dynamique collective au servi-
tension (800 M€ d’obligations en 2008, s’ajoutent 3,3 M€ de pertes lors du ce de Deutschland AG.

Aéroports de Paris
Aéroports de Paris Paris
Créé en 1945 sous forme d’établissement public à caractère administratif. Transformation en 2005 en société anonyme à
conseil d’administration ; Ouverture du capital (33%) et introduction en bourse en 2006.
Répartition du capital (2009) : État 52,8%, public 29,8%, Fonds stratégique d’investissement 8%, Schipol Group 8% et
salariés 2%.
Chiffre d’affaires : 2,29 G€ (2007) et 2,73 G€ (2010)
Gestionnaire de 13 aérodromes franciliens ouverts au trafic aérien civil, dont Paris-Charles de Gaulle (7e rang mondial), -
Orly et -Le Bourget (1er aéroport d’affaires en Europe).
Nombre de passagers (en millions) : 82,8 (2010)
Dette (incluant les prêts internes) : 2,29 G€ (2004) et 2,33 G€ (2010)

Le groupe Aéroports de Paris (ADP) opérations d’aménagement de la années 1970, ADP est un organisme
fait son entrée en bourse en 2006, suite Région Île-de-France. structurellement déficitaire et sous-capi-
à une ouverture partielle de capital. talisé, dont la capacité de financement
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L’opérateur avait amorcé la diversifica- ADP : un opérateur historique dépend du Ministère des Finances, qui
tion de ses activités et sources de reve- doté de ressources assure sa tutelle avec son homologue
nus dès le début des années 1980. considérables des Transports. Paris-CDG constitue le
ADP bénéficie d’un double avantage qui principal vecteur d’autonomisation
lui confère une autonomie considérable En 1945, l’enjeu confié à ADP est de d’ADP, avec l’acquisition d’importantes
dans la conception et la réalisation de taille : il s’agit de réaliser 40 GF d’inves- réserves foncières et la mise en place
ses choix d’investissements : la tissements nécessaires à l’extension d’une stratégie d’autofinancement.
construction d’un nouvel aéroport éloi- des aéroports d’Orly et du Bourget L’opérateur obtient l’accord de ses
gné des zones urbanisées et des entre 1949 et 1959, tout en dévelop- tutelles pour acquérir une réserve fon-
réserves foncières d’une ampleur pant un projet de nouvel aéroport qui cière considérable (3100 ha), à laquelle
exceptionnelle (3100 ha). Ces dernières permette à l’opérateur de s’affranchir s’ajoutera une zone tampon à l’extérieur
sont mises à profit pour procéder à l’ex- des contraintes héritées d’un système de l’emprise (7500 ha au total) pour pro-
tension continue des installations aéro- aéroportuaire préexistant et, en particu- téger les populations riveraines, ainsi
nautiques et s’affirmer comme un lier, la localisation au cœur de zones for- qu’un programme d’investissement à la
acteur de premier plan dans les grandes tement urbanisées. Jusqu’à la fin des hauteur des prévisions de croissance

79
Flux n° 84 Avril - Juin 2011

établies conjointement avec les services social pour financer ses projets d’inves- participation dans les aéroports de
de l’aviation civile. À compter de 1966, tissements. Conakry (1994, 29%), Beijing (2000,
cet aéroport, conçu dans une période Bien qu’Orly demeure officiellement 9,9%), et Liège (1999, 25,6%) pour les
de croissance économique et servant le principal aéroport francilien jusqu’à activités de fret. La seconde, créée en
une volonté de prestige national, l’adoption du Schéma Directeur de la 2000, valorise les compétences du
concentre la majeure partie des investis- Région (1994) et la mise en service du bureau d’architecture et ingénierie
sements. Hub d’Air France (1996), l’aéroport d’ADP à travers des activités de
La récession économique contraint CDG fait l’objet de programmes d’in- conception, maîtrise d’œuvre et assis-
l’opérateur à développer sa capacité vestissements réguliers dans les instal- tance à maîtrise d’ouvrage en France
d’autofinancement. L’aménagement du lations aéronautiques, les infrastructures (Gare TGV Aéroport CDG, terminaux
nouvel aéroport permet à l’opérateur de de desserte (RER, TGV) et les zones Eurotunnel à Calais, aéroport Bordeaux-
jeter les bases de son autonomie future d’accueil passagers et commerciales. Mérignac) et à l’étranger.
en développant les activités non aéro- L’installation du hub européen de FedEx Cette forte autonomie rend compte
portuaires (commerces, restaurants, (1994) accélère le développement du du statut exceptionnel dont bénéficie
hôtels, entrepôts) au sein de la plate- transport fret et postal. L’adoption d’une ADP au cours de la période, l’opérateur
forme. L’évolution de la structure de structure modulaire combinée avec des étant parfois qualifié « d’État dans l’É-
revenus d’ADP rend compte de ce pro- réserves foncières disponibles à l’inté- tat ». Le gigantesque work-in-progress
cessus. En 1973, un an avant la mise en rieur de l’enceinte aéroportuaire facili- que constitue Paris-CDG justifie l’inter-
service de Paris-CDG, ADP affiche un tent l’étalement des travaux et leur réa- nalisation des compétences néces-
déficit de 15 MF et ses ressources pro- lisation en autonomie. L’opérateur saires, tandis que les relations avec les
viennent d’emprunts (74%), d’autofi- bénéficie des compétences en architec- compagnies aériennes, les entreprises
nancement (15%) et de dotations en ture et ingénierie constituées en interne, publiques en charge de la desserte fer-
capital (11%) (13). En 1985, les sources avec la mise en place de son propre roviaire et les acteurs du territoire franci-
de revenus de l’opérateur se sont diver- bureau d’études (fin des années 1970) : lien sont réduites au minimum, ceci
sifiées, avec des recettes commerciales ceci lui permet de conserver la maîtrise expliquant le caractère inabouti de l’in-
(13,2%) et domaniales (10%) ; l’opéra- de ses projets d’aménagement sertion territoriale de l’opérateur au
teur est le 12e investisseur français (conception et réalisation) tout en déve- regard de Fraport notamment. Plusieurs
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(400 MF/an) et au 5e rang pour sa loppant des activités de conseil à l’inter- facteurs contraignent l’opérateur à une
marge d’autofinancement (14). L’État national, à travers ADP Management ouverture qui reste toute relative : l’op-
actionnaire ne s’y trompe pas : ADP est (ADPM) et ADP Ingénierie (ADPI). La position suscitée par le lancement du
contraint à un remboursement anticipé première, créée en 1990, intensifie ses projet Roissy 3, la contestation, par les
de 1,5 GF du prêt consenti par le Fonds activités suite à l’entrée au capital du compagnies aériennes (Air France com-
de développement économique et groupe Vinci (1999, 34%) : prises de pris), des choix réalisés lors de la mise

L’aéroport Paris-CDG en quelques étapes

1966 Roissy 1 : Terminal 1, tour de contrôle et 1re piste (1974)


1976 Roissy 2 : 2e piste (1979), Terminal 2 et ses modules (A-B-C-D) (1982-1993)
Desserte par RoissyRail (1976)
Interconnexion par le RER B (1987)
1994 Ouverture de la Gare intégrée TGV/RER ; Installation du Hub européen de FedEx
1996 Mise en service du Hub d’Air France
1997 Mise en service du CDGVAL, métro automatique
1998 Roissy 3 : 2 pistes supplémentaires (1999 et 2000), tours de contrôle, modernisation du Terminal 1
2007-8 Extension des Terminaux 3 et 2 (modules F-E-G et satellites associés S3-S4)

80
Portrait d’entreprise

en service du hub (1996) et de la répar- nyme (2005), dont 33% des parts sont Comme pour Fraport, ce régime favori-
tition des créneaux entre Orly et Roissy. mises sur le marché (2006) à destination se le maintien d’un programme d’inves-
Enfin, l’effondrement d’une partie du des particuliers, acteurs institutionnels tissements ambitieux dans les installa-
Terminal 2E en mai 2004, et les résultats (45€/action) et salariés du groupe. À tions aéroportuaires (env. 2 B€ pour
des différentes enquêtes administratives l’issue de la procédure, l’opérateur aug- 2006-2010 ; 1,5 B€ pour 2011-2015),
et judiciaires, montrent les limites d’un mente son capital de 600 M€. de diversification (600 M€ pour 2006-
modèle fondé sur un opérateur à la fois L’ouverture de capital et les modifica- 2010 ; 300 M€ en 2011-2015). Le gel
maître d’œuvre et maître d’ouvrage. tions apportées à la structure initiale cla- des redevances en 2010 et le maintien
rifient en partie les relations avec l’État de taux bas sur la période 2011-2015
Vers une clarification des règles actionnaire. Un cahier des charges défi- montrent la volonté d’ADP de rassurer
encadrant l’activité nit le cadre général de l’exploitation et les compagnies tout en limitant son
aéroportuaire ? les obligations de service public qui endettement et le recours à l’emprunt
Contractualisation, incombent à l’opérateur (16) ; le régime (330 M€ en 2005, 500 M€ en 2008), ce
régionalisation, privatisation de régulation économique passe par la qui confirme le rôle crucial de cet outil
contractualisation. Les « contrats de pour promouvoir la compétitivité des
L’ouverture du capital (2006) et les régulation économiques » (CRE) pré- aéroports (voir Tableau 3 en fin d’article).
transformations survenues depuis voient une augmentation des rede- L’adoption de ce cadre de régulation
répondent en partie seulement à ces vances aéroportuaires conditionnée par économique contribue aussi à clarifier
demandes d’ouverture. La réforme la qualité des services fournis et le mon- les relations avec les compagnies
aéroportuaire initiée en 2005 (15) définit tant des investissements (modernisa- aériennes. En ce qui concerne les rela-
les modalités de privatisation et de tion, développement). Sur la première tions avec Air France-KLM (25,6% du
régionalisation des aéroports français : période ou CRE1 (2006-2010), les chiffre d’affaires en 2005), la tendance
abandon du statut d’établissement investissements prévus par ADP justi- est également à la contractualisation, ce
public, adoption par le Parlement d’une fient l’augmentation des tarifs (+5% en qui permet à la compagnie d’être asso-
loi de privatisation et, en fonction de la 2006-2007, puis +3,25% maxi- ciée plus en amont de la conception
taille de l’aéroport, contrôle du respect mum/an), tandis que la seconde pério- des projets d’extension (Satellites 3 et
des règles de la concurrence par la de ou CRE2 (2011-2015) prévoit un gel 4).
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Commission européenne. L’évolution du des redevances en 2010 et une évolu- Enfin, la prise de participation croi-
cadre juridique permet de doter les opé- tion moyenne de 1,38%/an. Pour la sée entre ADP et Schipol Group, son
rateurs de l’autonomie financière néces- période 2011-2015, l’opérateur est homologue néerlandais, initie une
saire à leurs besoins d’investissements. soumis à un mode de régulation dual « hub-alliance » (2008) qui renforce les
Dans le cas d’ADP, l’opération (dual-till price cap), qui restreint le péri- complémentarités en termes de gestion
nécessite la création d’une société ano- mètre des activités aéroportuaires. des actifs. L’échange de participation se

Schipol Group Amsterdam

Création de N.V. Luchthaven Schiphol en 1958


Répartition du capital (2008) : État néerlandais 69,7% ; Ville d’Amsterdam 20,1% ; Ville de Rotterdam 2,2% ; ADP 8%
Chiffre d’affaires : 1190 G€ (2010) ; Actifs : 5506 G€ (2010)
Répartition des revenus (2010) : aéroportuaire 697 M€ (58%) ; Commerces 297 M€ (23%) ; Immobilier 173 M€ (12%) ;
Alliances et participations 147 M€ (7%)
Gestionnaire de 6 aéroports : Amsterdam-Schipol (5e aéroport en Europe), Rotterdam, Eindhoven (51%), Lelystad, New-
York JFK (Terminal 4, 100%) et Brisbane (18,7%)
Nombre de passagers (en millions) : 48,3 (2010)

81
Flux n° 84 Avril - Juin 2011

Principaux contrats en cours d’ADPM construction, gestion et exploitation


aéroportuaire est menée, respective-
1994 Guinée (Conakry, 29%)
ment, par ADPM et ADPI en France et à
1999 Belgique (Liège, 25,6%, partenariat 15 ans)
l’étranger comme le montre le porte-
2000 Acquisition de parts : Beijing (Chine) feuille des contrats en cours. En ce qui
Alger (Algérie) : mise en service d’un nouveau terminal (2 + 4 ans) concerne ADPM, le partenariat avec le
2004
Égypte, 5 aéroports internationaux : contrat d’optimisation (6 ans) groupe Vinci n’est pas renouvelé en
2005 Assistance technique : Cambodge (2 aéroports, 3 ans + 2) 2004 et l’opérateur contrôle cette filiale
Gestion et assistance technique : Mexique (12 aéroports, 25,5%), à 100%. Le rapprochement avec
2007 Jordanie (Amman, 25 ans, 360 M€), Arabie Saoudite (Terminal Hajj
de Djeddah, 5%) ; Cession des parts à Beijing (Chine) (191,6 M€) Schipol Group doit permettre à ADP
d’intensifier sa présence à l’international
2008 Contrat BOT : Maurice (10%, 7 ans)
grâce aux contrats en cours de l’opéra-
fait sur la base suivante : l’État cède 8% services et propriétaire de réseau sur les teur néerlandais en tant qu’actionnaire
de parts à Schipol Group (530 M€ ou aéroports gérés par le groupe : intégra- (Vienne), opérateur (Aruba, New-York-
67€/action) en échange de l’acquisi- tion de Hub télécom régions (2007), JFK), partenaire stratégique (Brisbane,
tion, par ADP, de 8% de parts du capi- spécialisé dans la traçabilité des mar- New-York-JFK), et en vue du dévelop-
tal de Schipol Group par augmentation chandises suite au rachat de BGI pement d’activités de commerce
de capital réservé (370 M€). Le retrait Technologies ; acquisition du groupe (Stockholm-Arlanda, Jakarta, Canton)
de l’État se poursuit en 2009 avec la Masternaut (2009), qui permet à l’opé- et d’immobilier (Jakarta, Milan
cession de 8% des parts au Fonds rateur de développer des compétences Malpensa).
Stratégique d’Investissement, mais ce dans la télématique et la géolocalisation La réforme aéroportuaire pourrait
dernier reste majoritaire (52,38%), à l’échelle européenne. Pour renforcer ouvrir de nouvelles perspectives d’in-
comme le prévoit la réforme aéropor- les revenus liés à l’exploitation commer- vestissements pour ADP dans les aéro-
tuaire. ciale, ADP noue différents partenariats ports régionaux. Leur gestion était jus-
en fonction des segments concernés : qu’alors confiée aux chambres consu-
Un portefeuille d’actifs qui reflète création (2003) de Société de distribu- laires, sur la base de cahiers des
le rôle croissant des activités tion aéroportuaire en partenariat avec charges établis en 1955 et modifiés en
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non aéroportuaires Aelia (Groupe Hachette, 50/50) ; Duty 1997 : renouvellement des concessions
Free Paris (2009) avec The Nuance aéroportuaires pour une courte durée (3
Outre la clarification des règles du Group (15 ans, 50/50) pour 2500 m2 de à 12 ans), maintien d’un système fondé
jeu, l’évolution du groupe ADP depuis commerces dédiés à la mode. Des par- sur les coûts. La réforme aéroportuaire
2006 est marquée par l’intensification tenariats similaires sont prévus avec JC clarifie la situation à plusieurs niveaux :
de la diversification des activités : l’enjeu Decaux (publicité) et Relay (presse/sou- extension de la durée des contrats de
consiste à réduire la part des activités venir). La réorganisation du groupe concession (40 ans maximum) avec
régulées, qui totalisent 49,3% du chiffre accélère la rationalisation de segments allongements proportionnels en fonction
d’affaires en 2006 (voir Figure 4 en fin d’activités déficitaires, comme les activi- du respect des obligations de mission
d’article). La structure du groupe rend tés d’assistance à escale (Filiale Alyzia, de service public ; modification du statut
compte de l’évolution du portefeuille 2008, 44,3 M€), qui souffrent de la juridique, avec la création de sociétés
d’actifs, avec quatre filiales à 100%. concurrence introduite par la réglemen- aéroportuaires (2007-2008), et du capi-
ADP investit dans la télécommuni- tation européenne. tal, réparti, en moyenne, entre les
cation pour les entreprises à partir de sa La valorisation du savoir-faire de chambres consulaires (25%), les collec-
filiale Hub télécom (2001), opérateur de l’opérateur dans la conception et la tivités locales (15%) et l’État (60%). En

82
Portrait d’entreprise

fonction de leurs capacités respectives trafic intérieur (55% dans les aéroports Schipol AG, qui exporte son savoir-faire
d’autofinancement et des niveaux d’en- franciliens), voire même européen, à en matière d’airport city. Initié à Orly, où
gagement de leurs actionnaires, les l’image de la situation observée en les perspectives de croissance du trafic
opérateurs régionaux ont lancé d’im- Grande-Bretagne depuis 1986 (voir aérien sont limitées, le projet Cœur
portants projets d’extension des instal- Figure 5 en fin d’article). d’Orly porte sur un quartier d’affaires de
lations aéroportuaires et/ou de diversifi- 13,5 ha, développé en partenariat avec
cation de leurs activités (voir Tableau 4 Une spécialisation dans les Altaréa Cogedim et Foncière des
en fin d’article). opérations foncières régions (450 M€ hors hôtellerie). Au
L’ouverture de capital, confirmée Bourget, aérodrome spécialisé dans
pour Lyon-St Exupéry, Toulouse-Bla- À partir de 2006, ADP renforce sa l’aviation d’affaire et point nodal d’un
gnac et Bordeaux-Mérignac (17), présence dans les différents métiers liés pôle d’activités spécialisé dans l’aéro-
concerne une partie seulement des à l’immobilier (aménagement, dévelop- nautique, il s’agit d’intensifier les rela-
parts de l’État actionnaire, le législateur pement, gestion et maintenance). Cette tions avec les collectivités environnantes
ayant prévu que celles-ci restent supé- évolution permet au groupe de se pour poursuivre le développement de la
rieures à 51% jusqu’en 2015. Cette constituer un profil de spécialisation zone (550 ha, 8 M€ d’ici 2023).
perspective suscite l’intérêt de candi- dans un domaine faiblement lié aux fluc- Beaucoup plus flou dans le cas de
dats français et étrangers : pour ADP, il tuations du trafic aérien : 140 M€ d’in- Paris-CDG et centré sur des « chaînons
s’agit d’une opportunité de développer vestissements sur fonds propres en manquants » et quelques innovations, le
une stratégie de Hub-alliance avec 2006-2010 et 560 M€ en 2011-2015. projet comporte plusieurs dimensions.
Lyon-St Exupéry ; la banque australien- ADP bénéficie d’importants avantages Tout d’abord, « Airport City de Paris
ne Macquarie y voit une opportunité liés à son patrimoine foncier (6686 ha, CGD » permet d’intégrer Roissypôle,
d’entrer sur le marché aéroportuaire répartis sur la totalité de la région), dont zone d’activités existante, et le quartier
français ; quelques groupes d’ingénierie une partie seulement a été aménagée d’affaires en cours d’aménagement
et spécialisés dans les transports (Vinci, en vue d’activités non aéroportuaires suite à l’acquisition de Continental
VeoliaTransdev (18), CDC Infrastruc- (1310 ha dont 446 ha de réserves fon- Square (2009, 60%). Cet espace de
tures, SNC Lavalin (19)) souhaitent ren- cières). L’opérateur limite les risques 50 000 m2 de bureaux rapportant 11
forcer leurs activités dans ce domaine associés à cette activité en privilégiant M€/an a été acheté en partenariat avec
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(Les Échos, 08/03/11). L’entrée des des baux de construction (terrains) et GE Capital Real Estate dans l’objectif
acteurs privés, et à terme l’internationa- d’occupation (bâtiments) de longue d’aménager la zone (3 M€) et d’étendre
lisation et la financiarisation de ce mar- durée, ainsi qu’en maintenant une part les espaces de bureaux disponibles (30
ché, dépendent du choix de la procédu- importante de projets dédiés à l’immo- M€) à l’horizon 2012. Ensuite, le projet
re privilégiée : le gré à gré permet d’en- bilier aéroportuaire (hangars de mainte- Aéroville prévoit la création d’un centre
visager une négociation des collectivités nance, entrepôts, etc.), qui représente de commerces et services (12 ha, 10,5
territoriales avec l’État en vue de solu- environ un tiers du chiffre d’affaires et M€, horizon 2013) consacré aux sala-
tions publiques, tandis qu’un appel des actifs immobiliers en 2009. Au riés des entreprises situées sur la plate-
d’offres ouvert et par aéroport ouvrirait cours des dernières années, ADP a ren- forme et dont la construction est réali-
la voie aux investisseurs privés tout en forcé son rôle d’investisseur dans l’im- sée par Unibail. Enfin, le projet constitue
rapportant 500 M€ à l’État. Du point de mobilier de bureaux (51 millions de m2) une opportunité d’investir le « corridor
vue d’ADP, et quelle que soit l’issue du et l’activité hôtelière répartis sur l’en- aéroportuaire » entre CDG et Le
processus, cette évolution pourrait semble de la Région parisienne. Bourget, et d’améliorer la desserte en
remettre en cause la centralisation du Cette tendance s’accentue depuis transports publics de CDG, notamment
système aéroportuaire national pour le la prise de participation croisée avec grâce au projet CDG Express, lancé au

83
Flux n° 84 Avril - Juin 2011

début des années 2000 et aujourd’hui (compagnies aériennes, voyageurs, mécanismes qui caractérisent ce pro-
au point mort suite à l’arrêt des discus- etc.), encadrée par des cahiers des cessus de changement, ou des effets
sions entre l’État (maître d’ouvrage) et le charges définis par le régulateur (indé- observés sur le modèle d’affaires privilé-
groupe Vinci. Inspiré du Heathrow pendant / administration) et sanctionnée gié. L’analyse ne peut se limiter à l’iden-
Express, la méthode contraste avec par l’octroi de labels internationaux. Ce tification de tendances similaires : ouver-
celle déployée par BAA, qui était parve- double processus entraîne aussi l’évolu- ture de capital, diversification des
nu à obtenir l’accord du législateur pour tion des structures de capital et l’émer- sources de revenus, projets d’airport
financer (fonds propres, emprunts obli- gence de marchés nationaux de l’activi- cities, etc. Ces différences résultent de
gataires) et réaliser le projet dans le té aéroportuaire plus ou moins ouverts contraintes techniques, politiques,
cadre d’un accord avec British Rail. La en fonction des types d’acteurs et de organisationnelles et financières qui
réalisation des différents projets d’air- segments. Les trois opérateurs ont été structurent la capacité des opérateurs à
port cities d’ADP pose de manière plus pionniers en la matière, du 100% privé saisir les opportunités offertes par les
aiguë que jamais la question de l’inser- pour BAA plc – qui reste rare et confiné politiques nationale et européenne du
tion territoriale d’un opérateur qui a au cas britannique – à des structures transport aérien, le calcul de la rentabili-
longtemps pensé son développement hybrides dans lesquelles les acteurs té de l’activité aéroportuaire, la libérali-
en autonomie. publics conservent la majorité des sation des différents segments du mar-
parts, et ce, malgré la tendance au ché des activités aéroportuaires, et
Conclusion. Que nous apprend retrait des États. Ce type de structures l’évolution des stratégies d’autres
l’analyse comparée sur la longue se multiplie aujourd’hui et permet l’en- acteurs de l’aérien. Les opérateurs dis-
durée des principales entreprises trée d’acteurs privés qui contribuent à posent ainsi d’une marge d’autonomie
qui gèrent des aéroports en l’internationalisation des marchés natio- dans la constitution d’un profil de spé-
Europe ? naux. Parmi ceux-ci, les filiales spéciali- cialisation sur un marché de plus en
sées de grands groupes de construc- plus concurrentiel, qu’il s’agisse d’un
Première constatation : l’activité tion diversifiés (Hochtief, Ferrovial, profil d’aménageur (ADP), de logisticien
aéroportuaire a considérablement évo- Abertis, Peel Group, Vinci) ainsi que les (Fraport) et de retailer (BAA). Ces choix
lué, sous le coup d’un double proces- banques et fonds de private equity peuvent aussi renforcer leur dépendan-
sus de libéralisation des différents seg- (Macquarie, Crédit suisse) ont acquis un ce aux marchés financiers, au trafic
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ments du marché et de privatisation des rôle considérable sur un marché de plus aérien et aux catastrophes naturelles
principaux opérateurs. Pour chacun en plus concurrentiel. Les grands opé- selon les cas.
d’entre eux, ce double processus a rateurs européens eux-mêmes contri- Troisième constatation : l’un des fac-
entraîné la refonte des structures, la buent à ce phénomène d’internationali- teurs-clés de développement futur rési-
modification des méthodes de calcul, sation en se positionnant sur différents de dans l’insertion territoriale de ces
une transparence accrue dans la pré- segments du marché (sécurité, com- entreprises et leur capacité à s’inscrire
sentation des résultats financiers et l’es- merces, services au sol, géolocalisation, dans des dynamiques collectives à
timation des risques associés à leurs etc.) et zones géographiques dans un l’échelle métropolitaine. Longtemps
activités. Ces changements se tradui- double objectif de valorisation de leur pensée au travers des relations avec les
sent aussi dans les trajectoires profes- savoir-faire et d’extension de leurs com- populations et collectivités riveraines sur
sionnelles, les politiques de recrutement pétences. des thématiques liées à l’emploi, au
et les méthodes de gestion des res- Deuxième constatation : le maintien bruit et à la qualité de vie, les projets
sources humaines. À ceci s’ajoute l’at- de profondes différences dans les tra- d’airport cities renouvellent la relation
tention croissante accordée à la qualité jectoires de ces opérateurs, qu’il s’agis- entre l’opérateur et son territoire, et ce,
du service fourni aux différents usagers se des facteurs, des rythmes et des à différentes échelles et selon des

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Portrait d’entreprise

logiques de plus en plus différenciées. À privés autour de ces infrastructures. tis globalis » ne constitue pas le moindre
terme, les effets politiques, écono- Après l’ère des bâtisseurs (aérodromes) des paradoxes d’un modèle d’urbanité
miques et sociaux de ces stratégies et des gestionnaires (hub), les opéra- pensé par les opérateurs.
sont potentiellement majeurs en termes teurs se transforment en aménageurs Charlotte Halpern
de réorganisation des politiques (airport city) et sortent de leurs emprises chargée de recherche FNSP
urbaines dans les différents espaces aéroportuaires. Le fait que ces villes (Pacte / IEP de Grenoble)
métropolitains et de concentration aéroportuaires soient privées d’habi- charlotte.halpern@sciencespo-
accrue des investissements publics et tants et centrées sur « l’Homo aeropor- grenoble.fr

NOTES

(1) Halpern, Lorrain, 2010 ; Halpern cès au marché de l’assistance en esca- (12) Depuis 2009, cet aéroport est la
2011. le. propriété des Länder de Hesse (17,5%)
(2) Voir aussi Lorrain (2010). (8) Jusqu’en 2002, les investisse- et Rhénanie-Palatinat (82,5%).
(3) Sur la distinction opérée entre ments du groupe dans ce projet sont les L’opérateur maintient des liens étroits
activités aéroportuaires et non aéropor- plus importants hors d’Allemagne. Les par l’entremise du Land de Hesse et les
tuaires, voir Halpern (2011, p. 68 et pertes accumulées et les suspicions de activités de services aéroportuaires
notes 2 et 4). malversations conduisent Fraport à effectuées par ses filiales.
(4) Ville aéroportuaire ou aéroville en négocier son retrait avec le soutien de (13) Le Monde, 08/03/1974.
français. l’État fédéral, qui assure l’opérateur (14) Le Figaro, 22/10/1985.
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(5) Les sources utilisées sont : la pour ses investissements à l’Étranger. (15) Loi du 20/04/2005 relative aux
presse économique (LexisNexis), les (9) Hochtief Airport, filiale de aéroports.
rapports d’activités annuels des opéra- Hochtief Concessions AG créée en (16) Décret n°2005-828 du 20 juillet
teurs et de leurs actionnaires publics, 1997, est présente dans 3 autres aéro- 2005 relatif à la société Aéroports de
quelques entretiens réalisés en complé- ports (92,7 millions de passagers Paris (JO 22/07/2005).
ment d’un travail de thèse (Halpern, annuels) : Athènes (40%), Budapest (17) L’aéroport de Nice ne fera fina-
2006). Ce travail a bénéficié du soutien (70%) et Sydney (100%). À ceci s’ajou- lement pas partie de ce premier groupe
de la Chaire Ville de Sciences Po et de te une concession (extension/exploita- (La Tribune, 07/03/2011).
l’accueil du Max-Planck Institut für tion, 30 ans) dans l’aéroport de Tirana (18) Gestionnaire des aéroports
Gesellschaftsforschung à Cologne. (Albanie). Beauvais-Tillé et Lille-Lesquin, intéressé
(6) Cette source de revenus fait l’ob- (10) Sauf mention contraire, aug- par Nice-Côte d’Azur.
jet d’une ligne spécifique dans le rap- mentation hors inflation. (19) Groupe d’ingénierie canadien
port financier de Fraport AG (voir Figure (11) Banque Européenne d’Investis- qui gère les aéroports de Vatry, Rouen,
3 en fin d’article). sement, Landestreuhandstelle Hessen Cherbourg, Tours, Vannes, Tarbes-
(7) Directive 96/67/CE relative à l’ac- Bank. Lourdes-Pyrennées.

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Flux n° 84 Avril - Juin 2011

BIBLIOGRAPHIE

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Figure 1a. Évolution du trafic passagers (en millions) Figure 1b. Évolution du trafic fret (en milliers tonnes)
dans les aéroports allemands (1990-2009) dans les aéroports allemands (1990-2009)

Source : Données compilées par l’auteur à partir de ADV / Statistiken. Source : Données compilées par l’auteur à partir de ADV / Statistiken.

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Portrait d’entreprise

Tableau 1. Classement des aéroports mondiaux pour le transport fret


(en millions de tonnes)

2000 2008 2010

Rang Ville (aéroport) Total Rang Ville (aéroport) Total Rang Ville (aéroport) Total

1 Memphis Int. 2,49 1 Memphis Int. 3,69 1 Hong Kong Int. 4.17

2 Hong Kong Int. 2,27 2 Hong Kong Int. 3,66 2 Memphis Int. 3,92

3 Los Angeles 2,04 3 Shanghai Pudong 2,6 3 Shanghai Pudong 3,23

4 Tokyo Narita 1,93 4 Incheon (Corée) 2,42 4 Incheon (Corée) 2,68

5 Séoul 1,89 5 Anchorage 2,34 5 Anchorage 2,58

6 New York JFK 1,81 6 Paris CDG 2,28 6 Paris CDG 2,4

7 Anchorage 1,8 7 Francfort 2,11 7 Francfort 2,275

8 Francfort 1,71 8 Tokyo Narita 2,1 8 Dubaï Int. 2,270

9 Singapore 1,7 9 Louisville 1,97 9 Tokyo Narita 2,167

10 Miami 1,6 10 Singapore 1,88 10 Louisville 2,166

Source : Airport Council International / Data centre, mars 2011.


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Tableau 2. Évolution du chiffre d’affaires (en M€) de Fraport AG (2002-2010)

2002 2008 2010

Montant net des actifs — 3411,9 4019,7

Produit des activités ordinaires 1902,2 2101,9 2284

EBITDA 241,9 600 710,6

Résultat net - 120,8 196,9 271,5

Endettement 324,6 891,4 2024,4

Nombre de passagers 69,3 78,1 88,5

Source : Données compilées par l’auteur à partir des rapports annuels de Fraport AG (2002-2010).

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Flux n° 84 Avril - Juin 2011

Figure 2. Évolution du cours de l’action Fraport AG (2001-2010)


(Montant au 31 décembre)

Source : Fraport AG, Rapports annuels 2000-2010.

Figure 3. Évolution du Groupe Fraport entre 2001 et 2010 :


Figure 4. Répartition du chiffre d’affaires d’Aéroports de
contribution des différents segments d’activités
Paris en 2010 par segments d’activités
aux revenus du groupe
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Source : Données compilées par l’auteur à partir des rapports annuels ADP
Source : Fraport AG, Rapports annuels 2000-2010. (2004-2010) et APE (2005-2010).

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Portrait d’entreprise

Tableau 3. Évolution du chiffre d’affaires (en M€) d’ADP (2004-2010)


2004 2010
Montant net des actifs 5518,5 8283,4
Produit des activités ordinaires 1811,7 2739
EBITDA 542,8 926,7
Résultat net 144,1 300,1
Endettement net 2333,8 2239,8
Nombre de passagers (Orly + CDG) 75,3 83,4
Source : Données compilées par l’auteur à partir des rapports annuels ADP (2004-2010).

Tableau 4. Caractéristiques des quatre principaux aéroports français (2009)

Aéroports Aéroport Aéroport Aéroports


de Lyon Toulouse-Blagnac Bordeaux-Mérignac de la Côte d’azur

Statut SA (2007) SA (2008)

Actionnariat État : 60% ; Public hors État (CCI et/ou collectivités territoriales) : 40%

St Exupéry, Bron Nice Côte d’Azur,


Gestion aéroports Toulouse-Blagnac Bordeaux-Mérignac
(aviation d’affaire) Cannes – Mandelieu
Concession Concession (2007- Concession
Contrat de gestion Concession
(2007-2047) 2048), CRE 2009-2013 (2007-2037)

Chiffre d’affaires (M€) 131 90,4 49 170,6

Trafic passagers
7,7 6,3 3,3 9,8
(en millions)
Ratio dette nette/capa-
3,3 — 1,8 2,96
cité d’autofinancement
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Sources : APE (2010) et DGAC (2010).

Figure 5. Évolution du trafic passagers (en millions)


dans les principaux aéroports français (2000-2009)

Source : DGAC/DTA, 2010, p. 147 et suiv.

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