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Chapitre 14 

: L’évolution du management de la performance à l’hôpital : du


contrôle de gestion au contrôle organisationnel
Les hôpitaux et les établissements de santé sont soumis à une double contrainte qui se traduit d’une
part par une demande de soins en constante progression et d’autre part par une pression de plus en
forte sur les ressources mobilisables. Dans ce contexte, la principale voie envisagée par les tutelles et
les autorités responsables du secteur de la santé permettant de satisfaire simultanément ces deux
tendances de fond consiste à améliorer la performance du système hospitalier.

Suite aux multiples mutations que traverse actuellement le secteur de soins à l’échelle mondiale, les
hôpitaux publics marocains doivent améliorer leurs modes de gestion afin de réduire les dépenses
tout en garantissant la sécurité et la qualité des soins prodigués aux patients. Ainsi, face à l’ouverture
de l’espace sanitaire, aux contraintes et aux menaces actuelles de l’environnement des hôpitaux
publics marocains, le système de contrôle de gestion a été contraint de changer dans ses
conceptions, ses outils, ses missions et ses rôles, en sus de la régulation interne de l’hôpital, il doit
s’intéresser à l’adaptation de l’hôpital aux fluctuations de son environnement. De ce fait, les hôpitaux
se voient dorénavant assigner en plus de la mission médicale et sociale, des missions de qualité, de
rentabilité, de contrôle et de performance organisationnelle. Nous mettons l’accent sur les travaux
de l’ANAP (Agence Nationale d’Appui à la Performance). En effet, cette agence est en charge du
développement de la performance dans les établissements et son programme d’action permet
d’identifier les leviers actionnables par les contrôleurs de gestion mais aussi par les autres acteurs.

1. Une évolution des fondements du contrôle de gestion à l’hôpital   :


Pour analyser comment, à l’hôpital, le contrôle de gestion a, dans une première étape, permis de
sensibiliser les établissements à la performance puis de développer des pratiques de management de
la performance, il est nécessaire au préalable d’en rappeler les éléments constitutifs. En effet le
contrôle de gestion se définit par rapport à un :

A. Cadre conceptuel (quelle performance ?)


B. Cadre stratégique (quels objectifs ?)
C. Cadre ingénierie (quels outils ?)
D. Cadre socio-politique (quels acteurs ?).

Quel cadre conceptuel pour quelle performance ? Une injonction paradoxale pour la définition de
la performance  :

Les établissements de santé présentent une particularité qui entraîne certaines confusions en
matière d’évaluation de la performance. En plus ; les établissements sont désormais confrontés à
une double exigence. Ils sont soumis d’une part à une focalisation intense sur la problématique
budgétaire et d’autre part ils doivent prendre en compte de nouvelles contraintes imposant une
pluralité de critères en matière de référentiel de performance.

 De la révélation de la contrainte budgétaire à sa prééminence  : Cette situation suscite des


inquiétudes quant aux contraintes budgétaires la pression de cet objectif est imposée à
l'entreprise, transmise, entre autres, à travers des articles dans les médias qui se délectent
du volume déficits institutionnels et publicité très forte des programmes rétablir l'équilibre.
Cette nouvelle situation est plus enceinte, elle a été renforcée par l'épée de Damoclès du
déficit la sécurité sociale exacerbe le stress économique pour tous acteurs du système de
santé, dont les hôpitaux dans l'œil du cyclone.
 La nécessité d’une appréhension multiforme de la performance  : En particulier, compte
tenu des différentes missions de l’hôpital, de la complexité de ses activités et de la diversité
des parties prenantes différents modèles ont été développés pour tenter de rendre compte
des multiples facettes de la performance des établissements. Plusieurs modèles peuvent être
retenus pour montrer l’élargissement des critères de performance mobilisables pour les
établissements de santé.

Par exemple : Le modèle du Balanced Scored-Card (BSC) (Kaplan et Norton 1996) repose également
sur une approche multicritère où le principe fondamental de l’outil résulte du constat de
l’insuffisance des indicateurs financiers à guider et évaluer le pilotage stratégique des organisations.
En conséquence, le BSC complète l’analyse financière avec trois autres axes d’analyse (processus,
clients, apprentissage organisationnel) avec une double logique :

 Des indicateurs internes et des indicateurs externes, les indicateurs externes concernent les
actionnaires/financeurs et les clients/patients. Les indicateurs internes sont relatifs aux
processus considérés comme essentiels pour réaliser les missions retenues.
 Des indicateurs permettant le suivi de la performance passée et des indicateurs permettant
le pilotage des constituants de la performance future. Les quatre dimensions du TBP
permettent d’établir un équilibre entre d’une part, les objectifs à long terme et les résultats
souhaités et, d’autre part, les déterminants de ces résultats.
1. La dimension financière
2. La dimension client
3. La dimension processus interne
4. La dimension apprentissage organisationnel
De l’absence de la stratégie d’établissement à son affirmation puis à sa dilution   :

La définition de la performance ne peut se définir que par rapport à un contexte stratégique où le


contrôle de gestion fait le lien entre le contrôle opérationnel et le management stratégique (Anthony
1988, Bouquin 1995). Pour cela ; on a trois étapes principales peuvent être identifiées pour retracer
le développement du management stratégique à l’hôpital :

 Une première étape se caractérise par une absence de démarche stratégique.


 Une deuxième étape, il faudra attendre la loi de réforme hospitalière de juillet 1991 pour
voir apparaître l’obligation de la formalisation d’une stratégie pour les établissements à
partir de la rédaction du projet d’établissement.
 Une troisième étape a été initiée par la loi HPST (Holcman, 2013) en 2009 qui en instaurant
des CHT (Communauté hospitalière de territoire) donne une nouvelle dimension à la
démarche stratégique de chaque établissement en l’insérant dans une dynamique
territoriale.

Une évolution des outils du contrôle de gestion par l’introduction de la mesure   :

Une première étape par la mesure interne  : par exemple ; cette mesure est développée une
comptabilité analytique qui vise à calculer le coût des patients pris en charge à partir d’une
classification des pathologies classées en fonction du référentiel des GHM (groupes homogènes
de malades).

Une seconde étape par la mesure externe  : La mesure devient externe par la quantification des
prestations réalisées pour la prise en charge de patients.

De l’apparition du contrôleur de gestion à l’hôpital à l’implication des autres acteurs   :


Contrôle de gestion s’accompagne d’une évolution organisationnelle avec l’apparition de la fonction
contrôle de gestion et de l’arrivée d’un nouvel acteur pour l’hôpital : Le contrôleur de gestion est
fréquemment recruté hors du champ de la santé. Il s’agit de jeunes diplômés venant de master ou
d’école de commerce ou de contrôleurs de gestion qui ont une expérience dans d’autres secteurs
d’activité. Leur objectif principal est de développer les outils du contrôle de gestion.

2. La transformation du pilotage de la performance par l’irruption du fait


organisationnel :
On distingue plusieurs actions pour l’amélioration du pilotage de la performance :

Une action multiforme et intégrée auprès des établissements  : Pour améliorer la performance des
établissements, l’ANAP a développé une politique de contractualisation avec les établissements et
les ARS concernées pour mettre en œuvre des « projets performance » avec une approche globale
pour un établissement qui après un diagnostic interne vise à cibler puis faire évoluer des processus
internes.

Une action ingénierique pour développer les outils de management de la performance  : Cette
action concerne le déploiement de la comptabilité analytique hospitalière mais aussi des projets plus
ciblés comme l’élaboration d’un outil performance sur la chaîne de facturation et de recouvrement.

Une action pour faire évoluer le cadre structurel vers l’hôpital numérique  : Cette action sur la
dimension organisationnelle des établissements comprend également une intervention sur les
structures. Un premier volet concerne les locaux dans lesquels les établissements exercent leur
activité ; l’ANAP développe un second volet pour accompagner les établissements dans ce domaine
pour évoluer vers l’hôpital numérique.

Une action visant spécifiquement la performance du secteur Médico-social  : cette action visant à
améliorer la performance de ce secteur pour lui permettre de répondre aux enjeux fondamentaux
auxquels il doit faire face, notamment la prise en charge des personnes âgées et des différentes
formes de handicap.

Une action visant la performance des étapes du circuit du patient  : L’activité hospitalière est
caractérisée par une multitude de processus complexes en interaction qui participent à la prise en
charge globale du patient.

Une action visant la dimension territoriale de la performance  : cette action est également
entreprise visant les systèmes d’information des coopérations pour pouvoir connecter les différents
partenaires et faciliter, à partir de l’échange des données, les activités opérationnelles transversales.

Une action visant la ressource principale de l’hôpital : les ressources humaines  : l’ANAP a développé
une gamme d’outils de gestion des ressources Humaines (RH) et a organisé le retour d’expérience sur
la gestion prévisionnelle des emplois et compétences. (Entre 70 % à 75 % du budget).

Une action visant l’amélioration de la performance par le management de pôle  : Cette action sur la
performance des pôles visant à mettre l’accent sur les acteurs est complété par second volet sur
l’instrumentation de gestion qui fait l’objet de nombreux travaux. Ces actions concernent
principalement la comptabilité analytique par pôle (CREA, TCCM, tableaux de bord) et une aide
méthodologique au dialogue de gestion.

Une action participant à une évolution structurelle de la chirurgie : le développement de la


chirurgie ambulatoire  : La chirurgie ambulatoire constitue une priorité de santé publique, en effet la
France est encore très en retrait par rapport aux autres pays ayant un système de santé comparable.
L’ANAP et la HAS (haute autorité de santé) ont décidé d’unir leurs efforts en construisant un
programme de travail pluriannuel comportant 6 axes de travail :

 Le socle commun de connaissance


 Les recommandations organisationnelles
 L’approche patiente
 Le volet économique
 Les indicateurs
 La certification.

Conclusion  :

En grosso en modo ; le pilotage de la performance est devenu une préoccupation fondamentale pour
l’hôpital. Sa prise en compte est marquée par deux évolutions :

 La première réside dans l’apparition de la fonction contrôle de gestion qui s’est développée
au sein des établissements.
 La deuxième issue de la prise de conscience de la dimension organisationnelle de la
performance a poussé les tutelles à aborder cette thématique avec une perspective
systémique.

Par conséquent, étant donné le rôle central de l'ANAP améliorer la performance du système
hospitalier, les actions entreprises par cette agence permettent d'une part, les travaux menés par
l'agence ont permis de déterminer le levier la mobilisation, et d’autre part, les pistes d’actions pour
les contrôleurs de gestion.

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