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FB - Droit bancaire

Droit bancaire (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne)

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DROIT BANCAIRE

EDC = établissement de crédit CT/MT/LT = court, moyen, long ODC = opération de crédit
ADC = acte de commerce terme PM = personnalité morale
LDC = lettre de change P = personne TP = Trésor public
SDF = société de financement MA = Moyen-Age SBP = services bancaires de
K = capital RI = Révolution industrielle paiement
ODB = opération de banque MB = monopole bancaire FRP = fonds remboursables du
SS = Sécurité sociale public
R = responsabilité

SEMAINE 1
LECON 1 : Introduction au droit bancaire

SECTION 1 : Définition du droit bancaire

Le DB est une branche du droit commercial, et plus largement du droit économique.


Pourquoi une branche du droit commercial ? L110-1 Ccom élabore la liste des ADC. La loi répute
ADC notamment toute opération de banque, de change, de courtage, de gestion de monnaie électronique et
toute opération de paiement.
L’objet du DB est double : d’un côté c’est un droit des opérateurs, de l’autre un droit des opérations.

§1. Droit des opérateurs bancaires

Le DB porte les règles définissant le statut des entreprises qui se livrent au commerce de l’argent. Il
définit les dispositions applicables à leur activité. En ce sens, c’est un droit statutaire, institutionnel,
professionnel, car il s’intéresse aux opérateurs, aux acteurs qui font le commerce. Pour cette raison, c’est ce
droit qui va réglementer l’accès à cette activité.
Ces opérateurs sont tout particulièrement les EDC, définis par L511-1 CMF : ce sont des entreprises
dont l’activité consiste, pour leur propre compte et à titre de profession habituelle, à recevoir des fonds
remboursables du public et à octroyer des crédits.
Parmi ces EDC, on distingue au 1e chef les banques : toute banque est un EDC, mais tout EDC n’est
pas une banque.
Le DB est un droit étatique, au service de l’IG, car il s’intéresse à une mission régalienne
fondamentale : le pouvoir de battre monnaie.

§2. Droit des opérations bancaires

Le DB a également pour ambition de définir et de régir les opérations bancaires que les opérateurs
bancaires sont susceptibles d’accomplir.
C’est un droit en effet qui s’intéresse également aux contrats bancaires : de ce PDV, c’est un droit
contractuel à certains égards, qui s’intéresse aux techniques bancaires, qui ajd ont une large place à
l’informatique.
Le DB entretient donc de profondes affinités avec des techniques de droit civil. C’est pourquoi dire
que le DB est une branche du droit commercial est vrai mais non suffisant.

SECTION 2 : Présentation du secteur bancaire

Si le DB est fondamental, c’est notamment parce que c’est le droit du commerce et de l’argent. Mais
c’est aussi parce que les banques ont un rôle fondamental dans l’économie.

§1. Le rôle du secteur bancaire dans l’économie

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Le rôle du secteur bancaire renvoie aux missions traditionnelles des banques dans l’économie. On
peut en isoler 5 :

A. La réception des dépôts

C’est le 1e rôle de la banque. Sans compte bancaire, on n’a pas ou peu de vie sociale. La disposition
d’un compte bancaire est un service de base. C’est pourquoi le législateur lui-même reconnaît un droit à un
service bancaire de base, qui participe d’une volonté de lutte contre l’exclusion sociale.

B. Le financement de l’économie

La mission fondamentale des banques est de financer les ménages, les entreprises, et plus largement
l’économie. On reproche parfois aux banques de ne pas faire leur travail. Mais parfois on leur reproche de
trop financer.

C. La fourniture de moyens de paiement

Cette mission, plus récente, signifie que les banques doivent mettre à la disposition des citoyens et des
entreprises, des instruments de paiement, des moyens de paiement (chèques, virements). C’est pourquoi le
compte est un élément nécessaire de vie sociale.

D. La collecte de l’épargne

Les banques, traditionnellement, drainent l’épargne des français. Les banques contribuent parfois à la
placer sur les marchés financiers.

E. L’intermédiation bancaire et la création de monnaie

Les banques ont une mission traditionnelle fondamentale : l’intermédiation bancaire = le financement
parfois dit intermédié ou indirect, que l’on oppose parfois en économie bancaire des financements
désintermédiés.
Le financement direct, c’est quand les acteurs empruntent directement sur le marché sans passer par
une banque. Le financement intermédié, c’est le financement classique.
Le schéma est simple : la banque reçoit des dépôts du public, en particulier des dépôts à vue =
remboursables à tout moment. Elle accorde des crédits aux entreprises et aux ménages. D’une certaine
façon, l’une des opérations est la cause de l’autre. La banque collecte l’épargne, et la redirige vers les
emprunteurs.
On n’est pas dans une figure de représentation, même imparfaite. Supposons un déposant A, qui a un
compte à vue et n’a de lien qu’avec sa banque. Si la banque fournit un crédit à un emprunteur B, la banque
n’a de lien qu’avec l’emprunteur B. Au plan économique, les fonds déposés par A auront été la cause, le
moyen du crédit accordé à B. Ce faisant, la banque joue un rôle d’intermédiaire entre les acteurs qui ont une
capacité d’épargne et les acteurs qui ont besoin d’emprunter. Les dépôts font les crédits.
Cette formulation est exacte en ce sens, mais la banque ne prend pas l’argent de A pour le donner à
B. la banque, en réalité, se couvre avec le dépôt de A, qui lui donne les moyens d’octroyer des crédits. Elle
crée en réalité le montant accordé à B.
Cela renvoie à un autre mécanisme : celui de la transformation d’échéance. C’est là qu’est tout le
risque : la banque reçoit des dépôts à vue, et accorde des crédits à MT ou LT. On dit qu’elle transforme
l’échéance, puisqu’elle se sert de dépôts à CT pour permettre l’octroi de crédits à LT. Ainsi la circulation de
monnaie dans l’économie augmente.
C’est donc un pouvoir d’inspiration régalienne. Cela fait courir un risque de solvabilité et de
liquidité : c’est ce qu’on a pu voir lorsqu’il y a eu des demandes de remboursement massif des dépôts.

§2. Le poids du secteur bancaire dans l’économie

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A. Le poids du secteur bancaire en France

Au 1e janvier 2016, il y avait en France 383 EDC, dont 180 banques, 90 banques mutualistes ou
coopératives, 18 caisses de crédit municipal, et 95 EDC spécialités.
En 2017, on dénombrait en France 37.567 agences bancaires. +99% des français ont un compte
bancaire. Le taux de bancarisation des français est proche de 100%.
L’activité bancaire, en 2016, représentait à elle seule près de 2,7% du PIB français.
C’est un poids lourd de l’économie également au niveau de l’emploi : elle emploie 370.000 P. c’est
un des tout premiers secteurs privés français. 41.100 embauches par an dans le secteur bancaire. 2/3 des
recrutements sont des jeunes. Les banques recrutent à tout niveau de qualification (15% des embauches sans
bac ou bac+1).
60.490 distributeurs en France. En 2015, 19MM d’opérations de paiement gérées par les banques.
67% des internautes paient en ligne au moyen de services bancaires digitaux.
Le taux d’épargne des ménages est de 14,5% : c’est le rapport entre leur épargne et leur revenu brut
disponible. S’agissant des montants détenus par le secteur bancaire en liquidités : les français détiennent
265MM€ en livret A, 102MM € en livret de développement durable (LDD), et 1646MM € d’assurance-vie,
qui sont distribués par le secteur bancaire.
Parmi les 9 premières banques €, il y a 4 banques françaises. Pour les classer, on se réfère au PNB
(produit net bancaire) = la différence entre les produits et les charges d’exploitation bancaire. Mais ce n’est
en aucun cas la rentabilité d’une banque, car les montants sont calculés avant imputation des frais généraux
d’exploitation, qui ne sont pas eux bancaires. Classement :
- BNP Paribas : PNB de 43MM €.
- Crédit Agricole/LCL) : 30MM €.
- Société générale : 25MM€.
- Groupe BPCE : 24MM€.
- CIC : 13MM€.
- Banque postale : 5MM€.
- Crédit mutuel : 1,8MM€.
C’est BNP Paribas qui emploie le + de collaborateurs, suivie de SG puis CA.
On dit souvent que la clientèle est multi-bancarisée, car les clients ont plusieurs comptes.

B. Le poids du secteur bancaire en Europe

Ce poids est variable selon les pays €. On mesure le poids du secteur au regard du PIB. En Europe, la
moyenne est de 4,9% : la France est en-dessous. Au Luxembourg : 29%. Irlande : 10%. Allemagne : 3,8%.
Concernant les emplois, c’est l’Allemagne qui est en tête. Le secteur bancaire est un employeur de 1e plan.

§3. Les défis du secteur bancaire

A. La désintermédiation bancaire

On assiste, depuis 30 ans environ, à un mouvement de désintermédiation bancaire. Les banques ne


sont plus perçues comme le seul secteur possible de financement. A côté, on recherche un financement
direct, désintermédié, auprès du marché, notamment auprès des marchés financiers. En effet, la
désintermédiation traduit le passage d’une économie d’endettement à une économie de marché financier.
Depuis 30 ans, une part de +/+ importante du financement des entreprises se fait directement sur les marchés
financiers sans passer par l’intermédiaire d’une banque. La banque n’est plus alors prêteur, mais voit son
rôle évoluer, et le cas échéant elle prend un autre rôle de placement de titres sur les marchés.
Cela renvoie à un mouvement de déréglementation qui a offert à certaines entreprises la possibilité
d’obtenir des financements sans passer par des banques, notamment par la voie des TCN (titres de créances
négociables) créés en 1985 : parmi eux, les billets de trésorerie, ou les BMTN (bons à MT négociables). Ces
TCN sont juridiquement des emprunts le plus souvent à CT, qui permettent à des entreprises de satisfaire
leurs besoins de trésorerie en s’adressant directement à des détenteurs de liquidités sur les marchés

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financiers. De cette désintermédiation bancaire, il faut avoir une vue raisonnée : il est des banques qui elles-
mêmes souscrivent ou émettent des TCN.
On peut rapprocher un autre mouvement : celui du financement participatif. C’est la nébuleuse du
crowdfunding qui est visée. Il comporte plusieurs espèces, notamment le crowdlending. Dans cette figure,
des plateformes numériques vont permettre à des particuliers de co-prêter à intérêt jusqu’à 2000€ ou sans
intérêt jusqu’à 5000€ à un emprunteur, par une plateforme de collecte de frais. Ces plateformes sont
appelées de intermédiaires en financement participatif. Juridiquement, elles ont des statuts de CIF (conseiller
en investissement participatif). On peut aboutir à des montants d’emprunt très importants. On est dans
l’ubérisation de la banque.

B. La finance de l’ombre

On parle du shadowbanking = un système d’octroi de crédits impliquant des entités et des activités se
trouvant potentiellement à l’extérieur du système bancaire. Finance de l’ombre ne veut pas dire finance
illicite, mais sulfureuse, controversée. Elle est bien souvent licite.
Ce qui est visé, est que le financement, notamment de l’économie, peut se faire par des acteurs non
bancaires, qui octroient des financements non bancaires. Ces acteurs non bancaires sont des fonds
spéculatifs (hedgefunds), des fonds d’investissement, des fonds de pension, des stés de gestion, des stés de
K-investissement. Ce sont des intermédiaires financiers mais pas bancaires : ce ne sont pas des banques, ils
ne collectent pas de dépôts. A ce titre, ils ne sont pas soumis à la réglementation bancaire.
Quel est l’intérêt d’y recourir ? l’objectif est souvent, pour des entités, d’accroitre leur rentabilité, et
ce sans supervision. Elles sont tentées de faire sortir de leur bilan comptable des crédits risqués, en se faisant
refinancer, notamment par la voie de la fameuse titrisation = transformation de crédits en titres. Il est
classique de céder des créances à des fonds de titrisation qui vont acheter des créances aux banques et
émettre des titres sur les marchés financiers qui vont représenter ces crédits. Ces titres pourront être souscrits
notamment par des fonds, qui vont acheter ces titres et le risque afférent, car ils ont de l’épargne à placer. Par
le biais de la titrisation, un risque peut se diffuser dans un autre secteur, dans un autre pays.
Plus la réglementation bancaire est serrée, plus l’intérêt de recourir au shadowbanking est élevé.
Parfois les banques s’en nourrissent : idée de cercle vicieux.
Le shadowbanking présente des risques, tenant aux effets de leviers utilisés parfois dans ces
opérations. Il y a des risques en cas de désengagement massif. Mais l’intérêt reste qu’on essaye soit d’alléger
son bilan en sortant des crédits, soit d’opérer une activité ressemblant à une activité de financement sans
réglementation.
L’enjeu est à la mesure des chiffres : cette finance bancaire faisait +92.000MM $ en 2015 = +150%
du PIB mondial.

C. Les nouvelles technologies

La blockchain est parée ajd de toutes les vertus. C’est le nouvel eldorado. Il n’y a pas un article de
presse qui nous la présente sans dire que c’est génial, car on va pouvoir enfin se débarrasser des banques,
des notaires et du Fisc.
L’idée est que la blockchain est une technologie de stockage et de transmission d’informations
transparente, réputée sécurisée, et qui fonctionne sans aucun organe central ou étatique de contrôle. Elle
pourrait remplacer la plupart des tiers de confiance investis de PPP : les banques, les notaires, les cadastres.
La blockchain conserve la trace de l’ensemble des transactions qui y sont enregistrées, et de leurs
auteurs. On ne peut modifier un bloc de cette chaine sans que cela ne se voit. C’est décentralisé.
Pour l’instant on en parle davantage qu’on ne la pratique. Beaucoup de professions, notamment les
banques, regardent de près ses évolutions, car les détenteurs de registres y sont intéressés.

Le bitcoin est une monnaie cryptographique = une cryptomonnaie, inventée par Satoshi Nakamoto
en 2009. Elle est utilisée dans un système de paiement peer to peer (pair à pair). C’est une monnaie privée et
virtuelle. On est dans un domaine sulfureux : elle servait d’abord au financement d’activités criminelles,
notamment sur le darkweb.
Cette monnaie tend toutefois ajd à rencontrer un certain succès, pour plusieurs raisons :

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- La simplicité du système : transactions infalsifiables grâce à la technologie de la blockchain.


- L’anonymat.
- La faiblesse des coûts de transaction.
Le bitcoin a été tiré à 21M d’unités, mais chacune est divisible jusqu’à la huitième décimale.
Que faire de tout cet argent ? l’Etat s’en méfie.
Le bitcoin est-il une monnaie ? non, si on suit les critères classiques et organiques. Mais si l’on
regarde les critères fonctionnels, la monnaie est fondamentalement une unité de compte, un instrument de
paiement, et une réserve d’épargne.
Aux US, un juge a décidé que le bitcoin était une forme de monnaie, notamment parce qu’il était
convertible avec des monnaies normales.

SECTION 3 : Histoire du droit bancaire

§1. L’Antiquité

Le Code d’Hammourabi date de 1700 av. JC. L’activité bancaire a des racines anciennes : elle se
pratiquait notamment à Babylone. Ces activités bancaires sont souvent pratiquées dans un cadre religieux et
dans l’enceinte de temples. Ce n’est que dans un second temps qu’elles sont pratiquées en-dehors.
Sous l’époque romaine, on voit apparaître des financiers : des argentarii, qui réalisaient des
opérations à caractère bancaire, de prêts, de dépôts, d’avances d’argent moyennant intérêts. Mais jusqu’au
Bas MA, les activités de banque se limitent le plus souvent à des opérations de caisse.

§2. La Renaissance

C’est à partir du 11e s. que l’activité bancaire reprend de sa superbe. On le voit notamment à
l’épisode des Croisades, qui appellent des financements, lesquels se font via des banques. Mais au-delà, des
déplacements de population, d’armée, s’accélèrent et appellent des financements d’achats, de ventes de
biens, de matières premières. A partir du 11 e s., c’est l’Italie qui devient le siège de la finance et un haut lieu
de l’invention en matière bancaire. La 1e banque est créée à Venise. Les banquiers florentins sont reconnus.
A cette époque, la banque joue un rôle fondamental d’intermédiaire. La LDC était un instrument
fondamental de paiement et de crédit. Ces instruments accompagnent le développement du commerce au
MA, des grandes routes commerciales…
Le nord de l’Italie produit des banquiers lombards. Ils inventent notamment l’année lombarde, ou le
mécanisme du gage avec pacte compromissoire. L’Eglise catholique, par le Concile de Latran, a interdit le
prêt en 1215, tandis que le Concile de Trêve a interdit en 1237 la rémunération des dépôts.
L’activité bancaire est confiée pour des raisons religieuses aux protestants et aux juifs, moins sujets
aux foudres que les catholiques.
Pendant tout le MA, le rôle du banquier se diversifie. Il va devenir plus volontiers prêteur.

§3. De la Renaissance au 18e siècle

La Renaissance est une période d’essor de l’activité bancaire. Se constituent des familles de grands
banquiers privés (les Médicis ; Jacques Cœur). Des techniques bancaires voient le jour.
Les grandes découvertes des explorateurs appellent aussi des financements.
Londres et Amsterdam deviennent des places financières de tout premier plan : puissances maritimes,
commerciales, bancaires et financières.
Apparaissent les 1e banques sous forme de stés.

§4. Le 19e siècle

c’est une période caractérisée par la RI, la création de la machine à vapeur, le développement de la
production d’acier, de charbon, de textile, création d’une classe ouvrière, développement du capitalisme et
du libéralisme… tout ceci appuie le développement des banques.
Ce développement procède de 3 causes :

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- Développement de la monnaie fiduciaire.


- Développement de la monnaie scripturale (développement des chèques).
- Utilisation de +/+ importante des titres de stés pour financer des entreprises.
Le Ccom de 1807 ne consacre pas de disposition spécifique à l’activité bancaire : c’est une période
de liberté. De grandes banques se créent à cette époque : le Crédit Lyonnais en 1863, la SG en 1864. Les
premières banques d’affaires apparaissent. C’est une période de liberté sans réglementation.

§5. Le 20e siècle

Il y a eu un changement de paradigme avec la crise de 1929. C’est le siècle de la restauration de


l’autorité de l’Etat sur le secteur bancaire. Aux US, Roosevelt va mettre les banques à pied en séparant les
activités de banques d’affaires et de banques de dépôts. En France, un interventionnisme étatique se traduit
par l’adoption d’une loi de 1930 sur la profession bancaire : c’est une loi de moralisation.
Mais ce n’est qu’avec les lois de 1941 que le législateur institue véritablement en France un contrôle
des banques. Il en résulte un encadrement juridique assez strict : des organismes professionnels de contrôle
sont alors institués. Ce mvt va se prolonger à la fin de WWII, puisque l’Etat souhaite s’approprier les
banques au sens strict pour avoir la main sur l’économie d’après-guerre et obliger les banques à financer
certains secteurs. Une loi de 1945 relative à la nationalisation et l’organisation du crédit réglemente les
lois sans les abroger.
Le taux de bancarisation française explose : les banques s’ouvrent à de nouveaux clients (les femmes,
les jeunes, les enfants). De nouveaux moyens de paiement apparaissent (la CB). Les activités des banques se
diversifient, elles investissent dans l’industrie, dans l’immobilier, elles s’activent sur les marchés financiers.
Dans le même temps, les banques s’internationalisent : beaucoup ouvrent des succursales dans
d’autres pays.
Il y a un formidable mouvement de concentration du secteur bancaire : diminution considérable du
nombre d’EDC. En 1987, il y avait 2152 EDC ; fin 2005, 855 ; fin 2012, 572 ; 2016, 383.
En 1984, adoption de la grande loi bancaire relative à l’activité et au contrôle des EDC. C’est ce
texte qui détermine cette catégorie générique d’EDC. Cette loi s’ouvre aux banques mutualistes et
coopératives. Elle définit les institutions bancaires et autorités de contrôle. Elle a facilité la constitution de
banques universelles. Elle continue ajd de constituer le socle de l’actuel CMF.

SECTION 4 : Sources du droit bancaire

Ces sources sont classiques, mais sont marquées par une forte influence €.

A. Les sources nationales

1. Les sources écrites

Les textes intéressant le DB sont nombreux. Ils sont le plus souvent de valeur législatives. En vertu
de la C°, les obligations civiles et commerciales sont de la matière législative.
Il faut cependant préciser que la loi renvoie parfois à des arrêtés du MDE pour fixer des règles de
DB. Depuis la loi de sécurité financière de 2003, c’est le MDE qui est invité à arrêter pour les EDC de très
nombreuses règles (L611-1 CMF) : concernant les conditions des opérations que peuvent effectuer les EDC
dans leurs relations avec la clientèle ; les instruments et règles du crédit.
On est dans une matière où on va forcément rencontrer Bercy.
Certaines autorités de contrôle ont aussi des pouvoirs normatifs.
Mais c’est le CMF qui concentre le cœur des règles qui intéressent cette matière. Il a été promulgué
en 2000. C’est un code qui définit le statut des EDC, les modalités de contrôle de leur activité, et certaines
règles relatives aux fonds et à la gestion de portefeuilles. Il y a 7 livres dans le CMF : la monnaie, les
produits, les services, les marchés, les prestataires de services, les institutions, les dispositions relatives à
l’Outremer.
Ce CMF est fondé sur la LB de 1984 mais a été modifié à de nombreuses reprises :
- Loi MURCEF de 2001 : loi fourre-tout.

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- Ordonnance de 2009 & ordonnance de 2017.


- Ordonnance de 2013 relative aux EDC et aux SDF.
Mais on ne trouve pas toute la réglementation dans le CMF. Souvent, il faut se reporter aux autres
codes : le CC (Q° de contrat de prêt, de dépôt), le Cconso, le Ccom (droit du billet à ordre).
Le DB est assez riche en règles de droit dur. Mais il est aussi friand de soft law, de chartes. On a
également des codes de bonne conduite comme la transparence tarifaire.

2. Les usages

En DB, la place des usages est importante. La Q° est celle de l’opposabilité de l’usage au client du
banquier. Il faut remarquer le procédé qui consiste à attester à la fois de l’existence d’un usage, et de la
teneur de cet usage. Ce certificat est un parère (en 1973, le président de l’association professionnelle des
banques délivre un parère sur la pratique des lettres d’intention : pour attester de cet usage, il écrit une lettre
dans laquelle il affirme « dans les usages bancaires français, la lettre par laquelle une sté de renom
indiscuté sur le plan tant de la morale commerciale que de l’assise financière, parraine une sté qu’elle
contrôle pour l’obtention ou le maintien d’un crédit, constitue un engagement moral d’assurer la bonne fin
du crédit et est considérée comme présentant en pratique une sécurité comparable à celle d’un engagement
de caution »).
Ces usages sont parfois contestés. 2 ex :
- Les dates de valeur : pendant longtemps, les EDC ont adopté un usage bancaire contesté, car il
conduisait à retenir des dates de remise au crédit ou des dates de débit différées ou avancées selon le cas.
Cette pratique est portée devant Cass. 6 avril 1993.
- L’année lombarde : elle est faite de 12 mois de 30 jours = 360 jours. Cet usage a été censuré dans les
rapports entre une banque et un non-professionnel dans Cass. Civ. 19 juin 2013 : le taux de l’intérêt doit
être calculé sur la base de l’année civile, sous peine de nullité.

3. La jurisprudence

Elle a toujours eu un rôle important en DB. Elle a permis de figer le compte courant. Elle a permis
d’imposer un devoir de mise en garde du prêteur à l’égard de l’emprunteur profane ou d’une caution
profane.
Arrêts de l’AP sur la sanction de la violation du MB.

B. Les sources européennes et internationales

1. Les sources européennes

Le DB s’est profondément européanisé. Etapes-clés de la construction bancaire dans l’UE :


- 1977 : 1e directive € de coordination bancaire.
- 1993 : marché unique € bancaire.
- 1999 : institution de l’€.
- 2002 : introduction des pièces et billets en €.
- 2013 : les Etats de l’Union adoptent un mécanisme de supervision unique € (MSU), qui constitue un
pilier de l’Union bancaire.
En 2014, le Parlement € a adopté l’Union bancaire, qui est une réponse de l’Europe à la crise
traversée juste avant par la Zone €. Dans le cadre du MSU, un système d’agrément unique est en principe
prévu pour les banques par la BCE. C’est également cette Union bancaire qui institue un mécanisme de
résolution unique (MRU), qui est le 2e pilier de cette Union bancaire.
L’idée est que ce sont des institutions de l’UE, qui vont avoir vocation à répondre et assurer la
solvabilité des banques en Europe.

2. Les sources internationales

Il y a des conventions fondatrices :


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- Convention de Genève de 1930 sur la LDC et le billet à ordre.


- Convention de Genève de 1931 sur le chèque.
- Convention d’Ottawa de 1988 sur le crédit-bail international et l’affacturage international.
De plus, il y a une influence de forums, comités, groupes internationaux, où de grands banquiers se
rassemblent pour améliorer la supervision bancaire internationale. Ces forums vont permettre de préparer la
conclusion d’accords. 2 ex :
- Le Comité de Bâle : forum où 4x par an, sont traités et évoqués des sujets de supervision bancaire. Ce
comité est émergé par la Banque des règlements internationaux. Il a vu le jour en 1974 à la suite de la
liquidation d’une banque allemande. Les gouverneurs de 10 banques centrales se sont réunis. On
l’appelait au début le Comité Cook (?). Ajd, dans ce comité, on trouve des représentants de banques
centrales de 13 pays. il est en train de s’ouvrir à un nombre de +/+ conséquent.
- Le conseil de stabilité financière : émergé par la banque des règlements internationaux de Bâle. Créé en
2009 à Londres sous l’autorité du G20, succède à un forum de stabilité financière. Ajd, 26 pays l’ont
rejoint. Objectif de coopération, supervision et surveillance des institutions financières.

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SEMAINE 2
LECON 2 : Les opérations bancaires

SECTION 1 : Identification des opérations bancaires

Elles sont au centre de l’activité bancaire et du DB. La loi de 1941 a défini les banques par référence
à l’activité de recevoir des fonds du public, affectés à des opérations de crédit et opérations financières. La
LB de 1984 définissait déjà 3 ODB dans son art. 1 al. 2 : « les ODB comportent la réception de fonds du
public, les ODC ainsi que la mise à disposition de la clientèle ou la gestion des moyens de paiement ».
Ajd, les choses ont changé, surtout suite à l’ordonnance de 2013, en vigueur depuis 2014 : elle a
resserré la définition pour correspondre mieux à un droit € qui a une conception plus étroite des EDC. Art. 4
du règlement € de 2013 définit l’EDC comme une entreprise dont l’activité consiste à recevoir du public
des dépôts ou d’autres fonds remboursables et d’octroyer des crédits pour son propre compte. Une directive
du même jour dresse une liste des activités possibles de la part d’EDC. Ces activités sont les activités au
sens le plus large : toutes celles offertes au banque, en raison de leur MB ou non.
- Réception de fonds remboursables.
- Prêt.
- Crédit-bail.
- Services de paiement.
- Emission et gestion d’autres moyens de paiement.
- Octroi de garanties.
- Transactions pour fonds propres ou pour le fonds de clients sur les marchés financiers.
- Participation aux émissions de titres.
- Conseil aux entreprises.
- Intermédiation sur les marchés bancaires.
- Conservation et administration de valeurs mobilières.
- Renseignements commerciaux.
- Location de coffres.
- Emission de monnaie électronique.
- Gestion de patrimoine.
Il s’agit des activités bancaires et non des ODB, qui font l’objet du MB. L311-1 CMF définit les
ODB : la réception de fonds remboursables du public, les ODC, les services bancaires de paiement. Ce sont
des ODB par nature, énumérées de façon limitative.

§1. La réception de fonds remboursables du public

L312-2 CMF retient définition qui résulte de l’ordonnance de 2013 : « sont considérés comme fonds
remboursables du public, les fonds qu’une P recueille d’un tiers, notamment sous la forme de dépôts, avec
le droit d’en disposer pour son propre compte, avec la charge pour elle de les restituer ». 4 conditions
peuvent être isolées :

L’exigence d’une réception de fonds : cette remise procède de l’idée que les fonds sont recueillis
auprès d’un tiers, que celui-ci est invité à remettre des fonds et l’EDC à les recevoir. Que sont des fonds ?
c’est un terme générique qui vise soit des espèces, soit de la monnaie scripturale, quelle que soit la façon
dont ces fonds sont recueillis. La collecte de fonds par les établissements de monnaie électronique en vue
d’émettre de la monnaie électronique n’est pas considérée comme une réception de fonds du public au sens
de cet article.

Une remise procédant du public : le public est un tiers non étroitement lié au dépositaire, sinon il
n’est guère utile d’imposer l’intermédiation d’une banque à travers le MB. C’est pourquoi le législateur
exclue de la catégorie, la réception de fonds ne venant pas véritablement du public. C’est pourquoi L312-2
CMF exclue de la qualification de fonds remboursables du public 2 séries de fonds :
- Les comptes courants d’associés (L312-2, 1° CMF) : fonds déposés par des associés pour le compte de
la sté. Le législateur y assimile les fonds résultant de prêts participatifs (L313-4 CMF) : en présence des
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2, il y a la volonté que cet argent soit laissé à la disposition de l’emprunteur. Un prêt participatif confère
un droit infra-chirographaire.
- Les fonds qu’une entreprise reçoit de ses salariés dans la limite de 10% de ses K propres : afin de
permettre à l’entreprise d’avoir des fonds d’épargne pour ses salariés.

La libre disposition des fonds reçus par la banque pour son propre compte : l’ADN de l’activité
bancaire est que les dépôts font les crédits. C’est une liberté rencontrée en matière bancaire en l’absence de
disposition contraire.

Une dette de restitution : le dépositaire doit avoir une obligation de restitution des fonds déposés.
C’est la contrepartie du dépôt : à tout moment, ce sont des fonds remboursables, et le dépositaire a une
obligation de restitution. Le déposant doit pouvoir retirer son argent à tout moment, directement par retrait
ou indirectement lorsque je désigne qqn à qui je souhaite virer de l’argent.
Le texte dit « notamment sous forme de dépôt » : ces fonds remboursables peuvent l’avoir été dans le
cadre d’un contrat de dépôt au sens strict. Le dépôt implique une obligation de conservation, qui n’est pas de
l’essence de la qualification de fonds remboursables du public. Ces fonds peuvent être recueillis à un autre
titre que le dépôt : également prêt, mandat. Il suffit que le dépositaire ait l’obligation de restituer les fonds
déposés.

 A la rencontre de ces 4 critères, on est en présence de fonds remboursables du public.

§2. Les opérations de crédit

C’est une ODB par nature, dès lors qu’elle répond à la définition de L313-1 CMF : « constitue une
ODC tout acte par lequel une P agissant à titre onéreux, met ou promet de mettre des fonds à la disposition
d’une autre P, ou prend dans l’intérêt de celle-ci un engagement par signature tel qu’un aval, un
cautionnement ou une garantie ». Critères :

Une P agissant à titre onéreux : il y a action à titre onéreux toutes les fois qu’une P perçoit un
intérêt, mais plus généralement dès lors qu’elle agit dans la perspective d’une contrepartie, même aléatoire.

Une avance ou promesse d’avance : il y a octroi de crédit en présence d’une remise immédiate de
fonds ou de la promesse de remise de fonds. Il s’agit de tout acte juridique qui donnera lieu à une avance de
fonds ou promesse d’avance de fonds. On retrouve sous ce vocable des opérations très différentes :
- Prêt d’argent.
- Prêt de consommation.
- Ouverture de crédit (la promesse d’ouverture de crédit oblige à effectivement verser les fonds).
- Découvert en compte.
- Opération de mobilisation des créances (escompte, affacturage).

Une avance de fonds : toute ODC, mais rien que des ODC. Les opérations de swap sont des
opérations d’échange et non d’ODC. Dans les engagements par signature, le banquier promet sa garantie, car
il s’est engagé par sa signature : il doit payer si le débiteur n’honore pas sa dette, c’est donc une ODC au
sens de ce texte.
L313-1 al. 2 CMF énonce que sont assimilés à des ODC le crédit-bail et de manière générale toute
location avec option d’achat. On n’est pas dans l’étude de l’ODC par essence, mais à une assimilation. A
contrario, s’il y a location sans option d’achat, on n’est pas en présence d’une ODC.

§3. Les services bancaires de paiement

C’est la catégorie la plus difficile à concevoir. Le CMF porte le poids de l’histoire : ajd, il est Q° de
services bancaires de paiement. On doit cette formule à l’ordonnance de 2009 relative aux conditions
régissant la fourniture de services de paiement et portant création des établissements de paiement. Les
établissements de paiement vont grignoter l’activité constitutive des services de paiement qui auparavant
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était l’apanage des EDC. On continue de dire que c’est réservé aux EDC, mais en réalité, la directive SEPA
de 2007 fait une summa divisio latente entre les services bancaires de paiement, et les services non bancaires
de paiement. Le MB porte sur les seuls services bancaires de paiement.
Mais personne n’a pris la peine de définir ce qui est spécifiquement un service bancaire de paiement.
Si on se reporte à L311-3 CMF, il définit les services de paiement, plus spécifiquement les moyens de
paiement, et renvoie aux services bancaires de paiement mentionnés à L311-1 CMF.
L311-3 CMF définit ainsi les moyens de paiement, bancaires ou non : tous les instruments permettant
à toute P de transférer des fonds, quel que soit le support ou les procédés techniques utilisés (chèques, CB,
paiements dématérialisés). L’article suivant parle des éléments de gestion des moyens de paiement ou mise à
disposition de la clientèle. Ce que l’on appelle ajd de façon générique « service de paiement » est ce qui
rentrait en 1984 dans le cœur du MB. Ajd, ces opérations de gestion/mise à disposition de moyens de
paiement peuvent rentrer dans 3 catégories : SBP, activités relevant de la monnaie électronique, services de
paiement listés à L314-1 CMF, qui ne font pas l’objet d’un MB mais du monopole des nouveaux
établissements de paiement créés en 2009.
Ajd, ce qui reste l’apanage des EDC = ce qui relève du MB des EDC, est la délivrance aux clients de
formules de chèques. Les autres services de paiement peuvent être accomplis par les banques, mais pas au
titre de leur activité réservée : elles accomplissent ces services au titre des activités qui leur sont permises.
On les appelle des « activités connexes » : ce sont notamment les activités de gérer des services de paiement
non bancaires. Ca ne relève du MB.

Ces dispositions vont évoluer à compter du 13 janvier 2018 par suite d’une ordonnance de 2017 qui
transpose une directive de 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur.

Les services de paiement en général sont définis par L314-1, II CMF :


- Versement d’espèces sur un compte de paiement et gestion de ce compte.
- Retrait d’espèces sur un compte de paiement et gestion de ce compte.
- Exécution d’opérations de paiement (ex : prélèvements).
- Paiement par carte de paiement (pas CB, car pas dans le domaine bancaire).
- Virements.
- Services de transmission de fonds, quel que soit le support utilisé.
Le texte parle de compte de paiement, définit à L314-1, I CMF : compte détenu au nom d’une P aux
fins d’exécution d’opérations de paiement. Dans la logique du législateur €, le compte de paiement
ressemble à un compte bancaire, mais se distingue parce que l’établissement de paiement ne peut utiliser les
sommes déposées pour son propre compte, et le compte de paiement doit avoir pour objet exclusif
d’effectuer des opérations de paiement.

SECTION 2 : L’institution d’un monopole des opérations bancaires

La loi de 1791 (décret d’Allarde) est due au Baron Pierre d’Allarde, rapporteur de ce texte. Il a
marqué l’histoire du droit commercial : il est désormais « libre à toute P de faire telle négoce ou d’exercer
telle profession ou métier qu’elle trouvera bon ». Il est venu affirmer pour la 1e fois la liberté d’entreprendre,
qui a ajd une valeur constitutionnelle. Cette loi a été suivie par la loi Le Chapelier de 1791 qui a interdit la
reconstitution des villes et corporations et autre organisations professionnelles qui contrôlaient l’accès à un
métier.
La loi Royer de 1973 a énoncé que la liberté et la volonté d’entreprendre sont les fondements des
activités artisanales et commerciales.
Le droit communautaire garantit un libre exercice des activités économiques, qui est un principe
général du droit communautaire pour la CJ.
Le MB est fondamentalement une exception à cette liberté constitutionnelle d’exercer toute
profession. C’est pourquoi l’activité bancaire s’est d’abord exercée à l’abri de cette liberté d’entreprendre. Il
a fallu attendre la loi de 1941 pour encadrer l’activité bancaire et la faire sortir de cette oasis qu’est la liberté
du commerce. Le diplôme n’était pas une condition d’accès à une profession de commerçant.
Les EDC ont été soumis à des règles de contrôle dont la contrepartie est un domaine réservé : pas de
concurrence avec autrui.
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§1. Les fondements du monopole bancaire

Plusieurs fondements :
- Raison historique : protéger les déposants, pour renforcer la confiance dans les EDC. Il faut être sûr que
la P qui gère mon argent a la capacité de me rembourser.
- Encadrer la distribution du crédit. Après la loi de 1945, le gouvernement s’est attaché à encadrer la
distribution de crédit. Les banques créent la monnaie, mais si elles en créent trop, elles créent de
l’inflation, qui érode le pouvoir d’achat de la monnaie. La politique d’encadrement a ajd changé : la
politique monétaire est déterminée par la BCE.
- Assurer la liquidité des marchés financiers.
- Garantir le public contre le risque systémique d’insolvabilité des EDC . Les EDC sont liés les uns aux
autres. Risque systémique = que le système bancaire se fracasse : c’est le chaos.
Mais ces fondements sont souvent contestés par certains. L’activité bancaire est de +/+ concurrencée
par le financement non bancaire : on s’aperçoit ajd que les fondements du MB semblent un peu moins
solides à certains égards, que le périmètre du MB tend à se resserrer.

§2. La définition du monopole bancaire

Le MB revêt un double aspect.

A. Le monopole des opérations bancaires effectuées à titre habituel

C’est l’ADN du MB. Le MB est la conséquence de l’agrément en qualité d’EDC qui est imposé par
la loi (L511-10 CMF). On n’est pas EDC si on n’a pas été agréé par les autorités qui peuvent agréer.

Ce MB se traduit par L511-5 CMF, modifié par une ordonnance de 2013 : « il est interdit à toute P
autre qu’un EDC ou une SDF d’effectuer des ODC à titre habituel. Il est en outre interdit à toute P autre
qu’un EDC de recevoir à titre habituel des fonds remboursables du public ou de fournir des SBP ».
L’al. 1 établit un monopole partagé entre les EDC et les nouvelles SDF. Pour le cœur de l’activité
bancaire, on a certes des EDC, mais aussi des SDF. Le cœur du monopole des banques est donc un duopole.
Tandis que la réception de FRP et la fourniture de SBP sont bien monopolistiques.
Certains parlent de MB, d’autres préfèrent parler de domaine réservé.

Les EDC, seuls ou avec d’autres, ont un monopole portant sur les 3 ODC vues plus haut. 5
précisions :

Le MB renvoie à un critère d’habitude. Seules sont interdites les opérations effectuées à titre
habituel. L’habitude suppose une répétition dans le temps. A contrario, les opérations effectuées de manière
occasionnelles sont libres, elles ne tombent pas sous le coup de la loi pénale.
Théoriquement, l’habitude peut apparaître dès le 2nd acte. Cette appréciation revient aux juges du
fond. Mais la Ccass contrôle : elle est intervenue à plusieurs reprises pour casser des arrêts qui avaient admis
une habitude là où pour elle il n’y en avait pas. La Ccass a en effet jugé à plusieurs reprises que pour qu’il y
ait habitude, il faut non seulement une pluralité d’opérations, mais également une pluralité de clients. Celui
qui se livre à plusieurs actes avec un même client reste un occasionnel de l’activité bancaire. Pour être un
professionnel de l’activité bancaire, il faut le faire plusieurs fois avec plusieurs P. Cass. Crim. 2 mai 1994 :
la CA retient le délit d’exercice illégal de la profession de banquier en présence d’une P qui a consenti
plusieurs prêts successifs à une même sté > cassation. Cass. Com. 9 mai 2002 : entre 1975 et 1984, un
individu accorde 9 prêts successifs à titre onéreux mais à la disposition d’un même client > c’est occasionnel
car il n’y a qu’un seul client. C’est assez contre intuitif comme solution. La Ccass a ajouté au texte une
condition : l’habitude s’entend non seulement de la pluralité d’actes relevant du MB, mais de la pluralité de
clients d’autre part. Cass. Com. 7 juillet 2004 : une banque belge prête à un emprunteur français. Elle
n’était pas à l’époque agréée. La Ccass relève que, fusse à titre occasionnel, la banque belge aurait dû

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obtenir l’agrément à peine de violer le MB. Donc un seul prêt à un seul client = violation du MB. Mais on
peut oublier cet arrêt : la position officielle est pluralité d’actes et de P.

On n’a pas la mention de l’onérosité. Est-ce que toutes les ODB sont interdites, ou seulement les
onéreuses ? si l’exigence d’onérosité n’est pas littéralement reprise dans l’énoncé, la notion même d’ODC
suppose, pour être bancaire, d’être onéreuse. On doit en déduire qu’il faut effectivement que ce soit une
activité consistant à effectuer des ODC à titre onéreux. En revanche, pour la réception de FRP, l’onérosité
n’est pas une condition de l’interdiction.

Le MB des EDC est partagé avec les SDF pour les seules ODC.

S’agissant des opérations autres que l’octroi de crédit, 2 observations :


- Le monopole de réception des FRP joue quelle que soit la durée du dépôt . Avant l’ordonnance de 2013,
le législateur français avait cantonné le monopole à la réception de dépôts d’une durée inférieure ou
égale à 2 ans. depuis 2013, le monopole s’applique quelle que soit la durée du dépôt. On est dans une des
rares hypothèses où on est en présence d’un renversement du monopole.
- Le monopole des SBP est devenu un leurre . Les SBP ne sont qu’une petite fraction des services de
paiement. Les banques ont le droit, au titre des activités connexes, mais pour lesquelles elles n’ont pas
d’exclusivité, de pratiquer tous les services de paiement au sens de L314-1, II CMF. Ici, on est en dehors
du monopole bancaire, et en présence du monopole des nouveaux établissements de paiement. Dans les
activités connexes que les banques peuvent accomplir sans monopole (L311-2 CMF), on a :
o Les opérations de change.
o Les opérations sur or, métaux précieux et pièces.
o Les opérations sur valeurs mobilières.
o Le conseil en gestion de patrimoine.
o Le conseil en ingénierie financière.
o Les opérations de location de biens mobiliers ou immobiliers.
o Les services de paiement (L314-1, II CMF).
o L’émission et la gestion de monnaie électronique.
« Les banques peuvent également fournir des services d’investissement, mais elles doivent être
agréées en tant que PSI = prestataires de services d’investissement ».

Ce monopole est d’application territoriale : il ne s’applique qu’aux ODC localisées en France.


S’agissant des crédits, on a égard soit au lieu de conclusion du crédit, soit au lieu de son exécution.

B. Le monopole des dénominations bancaires

Seuls les EDC ont le droit d’utiliser une dénomination faisant croire qu’elles sont agréées en qualité
d’EDC. Toute publicité, toute communication, toute expression laissant entendre qu’une P qui n’est pas
EDC le serait, est sanctionnée par L511-8 CMF. Ce monopole concerne également les SDF, qui partagent le
marché duopolistique de l’octroi de crédits à titre habituel : seule une SDF a le droit d’utiliser la
dénomination « SDF ». Ce texte est sanctionné pénalement.

§3. Les sanctions du monopole bancaire

A. Sanctions pénales

Il existe un délit pénal d’exercice illégal de la profession de banquier. L571-3 CMF : « le fait pour
toute P de méconnaitre l’une des interdictions de L511-5 et L511-8 est passible de 3 ans d’emprisonnement
et 375k€ d’amende. Le tribunal peut ordonner l’affichage ou la diffusion de la condamnation ».
Cass. Crim. 22 février 2017 : la Ccass approuve la caractérisation du délit : des particuliers avaient
remis des fonds au prévenu dans un but de placement financier.

B. Sanctions disciplinaires
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Ce MB est toujours assorti de sanctions disciplinaires, qui peuvent être prononcées par l’ACPR
(Autorité de contrôle prudentiel et de régulation). L612-39 & L612-40 CMF : il s’agit du retrait partiel ou
total de l’agrément bancaire. Comme l’agrément est délivré par la BCE, c’est l’ACPR qui saisit la BCE pour
lui proposer le cas échéant un retrait de l’agrément.

C. Sanctions civiles ?

Le législateur n’a pas institué de sanctions civiles. Cela signifie qqc. 2 questions :

1. La nullité ?

Longtemps, la chambre commerciale annulait les conventions faites en violation du MB. Cass. Com.
19 novembre 1991 : un particulier s’approvisionne en cassettes de magnétoscope = crédit-bail. On est en
violation du MB. Mais pas de conséquences sur la validité des contrats pour la CA > cassation.
La 1e chambre civile avait une position opposée dans Cass. 1e civ. 13 octobre 1982 : pas de nullité.
Solution reprise en 1993. Cette solution est absurde : la Ccass est nulle en droit civil. Il y a une erreur de
raisonnement. Cass. AP 4 mars 2005 : prêts sous seing privé qui donnent lieu à une affectation hypothécaire
en France et en Belgique. On a un actionnaire de la sté emprunteuse qui demande de constater la nullité des
crédits et donc de l’hypothèque. La CA refuse et déclare irrecevable la sté à agir en nullité. La sté invoque
que les intérêts sont d’OP et peuvent être invoqués par toute P y ayant intérêt. Rejet du pourvoi : la seule
méconnaissance de l’agrément n’est pas de nature à entrainer la nullité des contrats conclus > aucune
motivation. Cette solution a été confirmée par Cass. Com. en 2006 et 2008. Ces arrêts ont montré que la
chambre commerciale est rentrée dans les rangs.
- Avantages : sécurité juridique.
- Inconvénients : le MB perd tout prestige. On est dans une incitation à violer le MB : la probabilité de se
faire attraper est faible.

2. L’action civile ?

Comme c’est un délit pénal, peut-on intention une action civile en réparation, naissant du même
préjudice ? La chambre criminelle a d’abord refusé la constitution de partie civile (Cass. Crim. 9 mai
1972).
Ajd, la chambre criminelle admet la constitution de partie civile, elle la déclare recevable. Mais ce
n’est pas pour autant que la demande va prospérer. Cass. Crim. 3 juin 2004 : la Ccass admet la possibilité
que le délit d’exercice illégal de la profession de banquier cause un préjudice personnel à des particuliers.
Mais elle constate l’inexistence d’un tel préjudice. En l’espèce, relations anciennes entre des particuliers et
des brasseurs de bière, qui consentaient des crédits aux particuliers. La chambre criminelle dit que les
particuliers ne pouvaient pas se méprendre sur le fait que les brasseurs de bière n’étaient pas banquiers. La
chambre criminelle admet très difficilement l’existence d’un tel préjudice.
Ce préjudice personnel peut se concevoir dans le cas où l’entreprise obtient d’un client le dépôt de
fonds en se présentant comme une banque.

 Le MB est d’autant moins fort ajd que son champ tend à se réduire.

§4. Les dérogations au monopole bancaire

A. Les dérogations de portée générale

Elles résultent de 2 articles : L511-6 & L511-7 CMF.


L511-6 CMF (modifié par ordonnance de 2017) : les interdictions de L511-5 ne concernent pas
untel, untel, untel & telles, telles ou telles activités (voir article).
L511-7 CMF : l’interdiction ne fait pas obstacle à telle, telle ou telle opération (voir article).

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Le MB ne s’applique pas aux EDC relevant de L518-1 CMF (le TP, la Banque de France, la Poste,
l’Institut d’émission des départements d’Outremer, l’Institution d’émission d’Outremer, la Caisse des dépôts
et consignations).

Le MB ne s’applique pas aux entreprises d’assurance ou réassurance, entreprises d’investissement,


organismes de titrisation, organismes de placement collectif en OPCVM, établissements de monnaie
électronique, établissements de paiement. Mais dire cela ne suffit pas : ces différents établissements sont
soumis à des règles qui encadrent leur activité propre, mais l’interdiction formelle de conduire des
opérations bancaires notamment de crédit ne les affecte pas.

Mais la tendance est au développement des exceptions au MB. Ex : le crowdfunding (financement


participatif), introduit par une ordonnance de 2014, échappe aussi à l’interdiction relative aux ODC. C’est
pourquoi les P physiques et particuliers qui délivrent des prêts respectant certaines conditions sur les
plateformes de crowdfunding ne violent pas le MB. Cela participe de la désintermédiation bancaire.

B. Les dérogations spéciales

1. Le crédit interentreprises

Un des vecteurs de désintermédiation bancaire ajd, est que les entreprises qui ne sont pas des
banques ont vocation à certaines conditions à se faire crédit les unes aux autres. 3 formes :
- Les délais de paiement : le MB n’interdit pas à un fournisseur d’accorder des délais de paiement à son
acheteur. C’est un crédit, car il permet à l’acheteur de ne pas avoir à solliciter le financement bancaire
pour payer son vendeur tout de suite. Mais ce sont aussi un danger : la France a tendance à en abuser.
Donc on trouve des plafonds à L441-6 Ccom : pas +60 jours à compter de l’émission de la facture.
- Les opérations de trésorerie intragroupes : permettent, à certaines conditions, à des stés qui constituent
au sens économique un groupe de stés, de constituer une centrale de trésorerie interne au groupe. Il y a
groupe quand il y a liens de K entre stés dont l’une a un pouvoir de contrôle effectif sur les autres.
- L’amendement Fromantin (loi Macron) : permet, à certaines conditions, à des stés justifiant de certains
liens économiques (13 critères alternatifs à R511-2-1-1 CMF), d’établir un prêt par écrit d’une durée
inférieure à 2 ans.

2. Autres dérogations

Voir L511-6 et L511-7 CMF.

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SEMAINE 3
LECON 3 : Les opérateurs bancaires

La grande LB de 1984 a supprimé les établissements financiers et a introduit le vocabulaire € : EDC.


Depuis cette loi, on a vu réapparaitre une mosaïque d’institutions, chacune ayant souvent un monopole dans
son domaine, chacune devant être agréée pour le type d’activité qu’elle se propose d’exercer. Parmi ces
institutions, on trouve la catégorie des entreprises d’investissement (introduite en 1993), la catégorie des
établissements de paiement (2007), catégorie des établissements de monnaie électronique (2009).
Les EDC sont les opérateurs bancaires principaux, mais il y en a donc d’autres.

SECTION 1 : Les établissements de crédit

De 1984 à 2013, l’activité des EDC était identifiée par référence à la notion générique d’ODB.
Depuis une réforme de 2013 et entrée en vigueur en 2014, on a resserré cette définition pour correspondre au
D€ qui a une vision plus étroite des EDC. Il faut se reporter à l’art. 4 du règlement de 2013 : il définit
l’EDC comme « une entreprise dont l’activité consiste à recevoir du public des dépôts ou d’autres fonds
remboursables et à octroyer des crédits pour son propre compte ».
Ce règlement a appelé une évolution de la définition française des EDC, qu’on trouve à L511-1 al. 1
CMF (ordonnance du 20 mai 2015) : « les EDC sont les entreprises dont l’activité consiste, pour leur
propre compte et à titre de profession habituelle, à recevoir des fonds remboursables du public mentionnés à
L312-2, et à octroyer des crédits mentionnés à L313-1 ». Cette définition appelle 3 observations :
- La notion d’EDC ne renvoie plus aux ODB en tant que type d’activité, mais seulement à 2 des 3 espèces
d’ODB par nature (réception des fonds du public & octroi des crédits). La doctrine en dit que sous
l’influence du D€, est un EDC celui qui à la fois reçoit des fonds du public et octroie des crédits. En
1984 au contraire, on considérait que l’accomplissement habituel de l’une quelconque des ODB suffisait
à conférer la qualité d’EDC. L’ODB ne figurant plus dans le texte est les services bancaires de
paiements, qui sont devenus la simple délivrance de formules de chèques.
- Le texte se réfère à la notion d’entreprise, qui peut être individuelle ou en sté. Un EDC peut-il donc être
une P physique ? C’est inenvisageable, l’agrément ne peut être délivré qu’à une P morale (L511-10
CMF). Mais il y a une certaine liberté dans le choix de la forme sociétaire.
- Il y a un lien indissoluble entre l’agrément et la reconnaissance de la qualité d’EDC. Il n’y a pas d’EDC
sans agrément. mais cet agrément est l’agrément du « genre EDC ». Mais il y a d’autres genres : selon
L511-9 al. 1 CMF, « les EDC sont agréés en qualité de banques, de banques mutualistes ou
coopératives, d’EDC spécialisés ou de caisses de crédit municipales ».

§1. Les banques

Les banques se distinguent par leur compétence générale. Au 1 e janvier 2016, il y avait 180 banques.
En vertu de L511-9 al. 2 CMF, les banques peuvent effectuer toutes les ODB. Or les banques sont une
espèce du genre EDC, et l’EDC ne se définit plus par référence à la notion générique d’ODB, or l’espèce
« banque » du genre EDC, continue dans sa définition, de se référer à la notion générique d’ODB. Ce n’est
pas gênant mais ce n’est pas logique.
Il y a une grande diversité de banques : il y a des banques généralistes, des banques régionales, des
banques spécialisées (dans l’immobilier, dans la consommation), des banques de marché. La spécialisation
est possible de la part de l’EDC agréé comme banque, qui peut choisir de se spécialiser volontairement sur
tel ou tel segment de marché.
Mais l’agrément lui-même peut réduire l’objet social de la banque agréée à certaines activités. En ce
cas, la spécialisation de l’activité de la banque est dépendante des termes de son agrément. La spécialisation
n’est plus voulue mais imposée par l’agrément.
Les EDC, comme les SDF, sont affectés par un principe de spécialité bancaire. Les P morales ne se
voient reconnaître la PM que dans un certain but. Ce principe de spécialité bancaire se retrouve à L511-
3 CMF : toute la banque, mais rien que la banque = les banques peuvent effectuer toutes les ODB et peuvent
pratiquer librement les activités connexes sans MB, mais les banques ne peuvent à titre habituel s’immiscer
dans des activités qui ne sont ni bancaires ni connexes : elles ne le pourraient de façon habituelle que si elles

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y étaient invitées par arrêté du MDE. Cela signifie qu’il leur est interdit de conduire des activités de
production, de fabrication, d’achat à titre habituel pour revendre. Le fondement de cette interdiction est
qu’elle est la contrepartie du MB, et qu’il ne faudrait pas établir une concurrence malsaine des banques qui
ont des moyens en K extrêmement élevés > protection des clients contre les risques commerciaux qui
s’attacheraient à de telles immixtions de la banque.
Ce principe de spécialité bancaire est tempéré par d’autres règles : les banques peuvent prendre, dans
une certaine mesure, des participations dans des stés existantes ou en cours de création. Cela dépend des
secteurs : par ex, dans le domaine de l’assurance/réassurance, pas de plafond à cette prise de participation >
c’est ainsi que s’est constitué le domaine de la bancassurance. En revanche, les participations considérées
comme notables (+10%) dans des entreprises non financières, sont limitées par un règlement du comité de la
réglementation bancaire du 20 juin 1990 : aucune des participations notables des EDC ne saurait excéder
15% des fonds propres de cet EDC, ni 60% pour le total de ses participations.

§2. Les autres établissements de crédit

A. Les banques mutualistes ou coopératives

Au 1e janvier 2016, il y en avait 90 (Banque populaire, Crédit agricole mutuel, Caisses d’épargne…).
A l’origine, ces organismes avaient reçu mission de participer au financement de certaines professions,
notamment de la solidarité. Ex : le Crédit agricole avait pour mission première le financement de
l’agriculture. Le Crédit mutuel avait pour mission l’octroi de crédit aux P modestes sur fond de solidarité
mutuelle. Ces fondements n’ont pas disparu : on peut trouver des références à ces missions anciennes (L512-
85 CMF : mise en œuvre des principes de solidarité et de lutte contre les exclusions, par ex).
Ces missions expliquaient la compétence limitée à l’origine de ces établissements, en contrepartie
des avantages qui leur étaient reconnus. Par ex, le Crédit agricole avait seul le droit d’octroyer des prêts à
taux bonifiés aux agriculteurs. Les caisses d’épargne avaient le monopole de la distribution du livret
d’épargne.
Ces spécificités ont largement disparu, d’abord parce que la LB de 1984 a largement soumis ces
établissements au statut bancaire de base, ensuite parce qu’on a assisté à une suppression des bénéfices dont
ces établissements pouvaient bénéficier à titre exclusif. Il y a une banalisation de ces banques mutualistes et
coopératives. Elles se sont vues reconnaître une compétence générale, dans le respect des textes législatifs et
réglementaires qui les régissent (L511-9 al. 3 CMF).
Leurs propres statuts se caractérisent par une organisation pyramidale et particulière, marquée par
leur longue histoire : nombreuses caisses locales, qqs caisses locales, et un organe central qui assure la
cohérence du réseau et sa représentation auprès du pouvoirs publics. Ces organes centraux existent toujours
ajd (ex : Crédit agricole SA).
Ajd, les banques mutualistes et coopératives interviennent sur un secteur ultraconcurrentiel.

B. Les caisses de crédit municipales

On en dénombrait 18. Elles sont chargées d’histoire : fondées en 1918 pour remplacer les anciens
Monts-de-piété, qui étaient des établissements de prêt sur gage. On les désignait affectueusement en disant
« je vais chez ma tante » ou « je vais mettre au clou… ».
Ces caisses ont eu pour objet de rendre moins sulfureuses et davantage encadrées ces activités de prêt
sur gage. Ce sont des établissements publics communaux, ayant reçu pour mission principale de consentir
des prêts sur gage corporel. Statut à L514-1 CMF : elles combattent « l’usure par l’octroi de prêts sur gage
corporel dont elles ont le monopole ».
Le montant du crédit que peut consentir la caisse de crédit municipal ne peut excéder les 2/3 de la
valeur du bien. En revanche, si on met au clou des métaux précieux, le prêt peut aller jusqu’au 4/5 e de la
valeur, qui est estimée par des professionnels appelés des appréciateurs (ce sont des commissaires-priseurs
judiciaires).

C. Les établissements de crédit spécialisés

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On en dénombrait 95 en 2016. C’est une nouvelle catégorie d’établissement introduite par une loi de
2013. Ils se substituent à 2 catégories anciennes : les stés financières et les institutions financières
spécialisées.
Ajd, ces EDC sont définis négativement par L513-1 CMF : ils ne peuvent effectuer que des ODB
relevant des lois qui leur sont applicables ou de la décision d’agrément qui les concerne. Donc cet EDC est
spécialisé par essence et non par choix. L’agrément en qualité d’EDC spécialisé va préciser les activités
offertes à ce dernier (ex : en crédit à la consommation, en crédit-bail, en crédit immobilier…).
Puisque ces entreprises sont des EDC, on leur accorde le droit dans le cadre de leur activité,
d’octroyer des crédits. Ces EDC bénéficient du passeport €.
2 ex d’EDC spécialisés :
- Les stés de crédit foncier (L513-2 CMF) : elles ont succédé au Crédit foncier de France, qui avait une
mission d’IG de financement de la construction. Ces SCF financent des travaux et acquisitions
immobilières de P publiques, et leurs crédits sont garantis par des hypothèques de 1 e rang. Pour se
refinancer, elles émettent des OF (obligations foncières, ou covered bonds) qui profitent d’un régime de
faveur pour les porteurs de ces OF.
- Les stés de financement de l’habitat (L513-28 s. CMF) : système très proche des SCF, car les SFH en
sont inspirées. Mais l’objet est plus étroit : elles ne peuvent prêter que pour le financement en France ou
en Europe à des conditions strictes. Ce doivent être des financements sûrs. Elles se refinancent en
émettant des OFH (obligations de financement de l’habitat, ou covered bonds).

SECTION 2 : Les établissements bancaires autres que les établissements de crédit

Certains de ces opérateurs sont habilités à effectuer des ODB, d’autres non.

§1. Les opérateurs habilités à effectuer des opérations de banque

A. Les institutions de L518-1 CMF

Ce sont des établissements qui relèvent du secteur public. Ils peuvent effectuer des ODB sans être
soumis au statut des EDC : ce sont le TP, la BDF, les services financiers de la Poste (ajd exercés par la
Banque postale), la Caisse des dépôts et consignations.
Certains auteurs considèrent qu’on est quasi en présence d’EDC innommés. Ils peuvent faire à peu
près tout ce que peut faire un EDC.

B. Les sociétés de financement

La loi de 2013 entrée en vigueur en 2014 a institué une nouvelle catégorie française : la catégorie des
SDF. Elles ne bénéficient pas du passeport €. Elles se définissent à L511-1, II CMF : les SDF sont les P
morales autres que les EDC qui effectuent à titre habituel et pour leur propre compte des ODC. Mais elles ne
sont pas autorisées à collecter des fonds du public, car elles ne sont pas des EDC.
C’est pourquoi il y a en réalité un « duopole » et non un MB : on y trouve les EDC et les SDF.

§2. Les opérateurs non habilités à effectuer des opérations de banque

A. Les compagnies financières holding

Ce sont des établissements financiers qui ont pour filiale des EDC, des entreprises d’investissement
ou des établissements financiers. Ce sont des holdings qui contrôlent des groupes bancaires et financiers.

B. Les établissements financiers

Ils ne peuvent pas recevoir des fonds du public. Ils peuvent avoir 2 activités :
- soit prendre des participations dans des EDC,

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- soit exercer une ou plusieurs activités visées à L311-2 CMF , précisément au 1°, 3°, 4°, 5°, 7° de ce texte
> opérations de change, services de placement d’achat ou de vente de valeurs mobilières, conseils
d’ordre financier, services de paiement.

C. les établissements de paiement

Création par l’ordonnance de 2009 qui a transposé la directive SEPA de 2007. L’objectif était
d’accroitre la concurrence sur le marché des services de paiement qui était monopolisé par les banques et
EDC : but d’ouvrir ce marché à des opérateurs non bancaires.
Ce sont des P morales qui effectuent à titre de profession habituelle des services de paiement (L311-1
CMF). Ces établissements ont un monopole limité aux services de paiement. Sur les services de paiement,
on a en concurrence les établissements de paiement et les EDC pour leur activité connexe.
Réglementation plus souple que les EDC car activité moins dangereuse, mais il reste des règles
strictes quand à la lutte contre le blanchiment de K.

D. Les établissements de monnaie électronique

Ils ont été introduits par une loi de 2013 qui transpose une directive communautaire de 2009.
L526-1 CMF les définit : ce sont des P morales qui émettent et gèrent à titre de profession habituelle de la
monnaie électronique.
La monnaie électronique n’est pas la cryptomonnaie, le bitcoin. Elle est définie par la directive
comme une valeur monétaire stockée sous forme électronique, représentant une créance sur l’émetteur et
acceptée par un autre que l’émetteur (ex : Monéo).
En 2016, il y avait 6 établissements de monnaie électronique.
Ils sont soumis à des règles allégées, notamment de K social : seulement 350k €. Si la monnaie
électronique en circulaire est de -5M€, le montant de K social minimum baisse à 100k €.

E. Les intermédiaires

1. Les intermédiaires en opérations de banque et services de paiement

L511-1 CMF : ce sont des P qui exercent à titre habituel et onéreux une activité consistant à
présenter, proposer ou aider à la conclusion d’ODB ou de services de paiement. Mais ils ne font pas d’ODB
et ne fournissent pas eux-mêmes de services de paiement.
Ils doivent faire l’objet d’une immatriculation obligatoire à l’ORIAS.

2. Les intermédiaires en financement participatif

548-1 CMF : leur métier est la mise en relation au moyen d’un site Internet (plateforme de
crowdfunding) d’un porteur de projet et de P finançant ce projet. Egalement immatriculation à l’ORIAS.

SECTION 3 : L’agrément des opérateurs bancaires

Très vaste harmonisation dans l’UE par directive CRD4 de 2013. Art. 8 : les Etats-membres exigent
des EDC qu’ils obtiennent un agrément avant de démarrer leurs activités.
En droit français, l’agrément est régi par 511-9 s. CMF. L’agrément est une autorisation
administrative qui va conditionner l’accès à la profession. Cette condition est exigée dans l’intérêt de la
sécurité des déposant et du système financier en général.

§1. L’autorité compétente pour agréer

A. L’évolution

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Dans la LB de 1984, l’agrément était délivré par le CEC (Comité des EDC). Ce comité est devenu
depuis 1996 le CECEI (Comité des EDC et des entreprises d’investissement). C’est une ordonnance de
2010 qui a créé l’ACP (Autorité de contrôle prudentiel), compétente pour apprécier les demandes
d’agrément déposées par les entreprises souhaitant accéder à la qualité d’EDC. Mais elle délivre aussi les
agréments pour les autres établissements. Par une loi de 2013, l’ACP devient ACPR (Autorité de contrôle
prudentiel et de résolution).
Ajd, c’est toujours l’ACPR qui joue un rôle déterminant dans la délivrance de l’agrément, mais plus
seulement.

B. Le couple ACPR/BCE

Ajd, l’ACPR doit composer avec la BCE, et ce depuis la mise en place du MSU (Mécanisme de
surveillance unique), qui est l’un des 3 piliers de l’Union bancaire (avec le MRU = mécanisme de résolution
unique & la garantie € des dépôts). Le MSU est ajd le mécanisme de supervision €. Depuis 2014 (mise en
place du MSU), la délivrance d’agrément revient à la BCE s’agissant des EDC installés dans la zone €.
En réalité, la décision de la BCE est préparée et instruite pour la France par l’ACPR, et pour les
autres Etats de la zone €, par leurs autorités homologues. C’est l’ACPR qui instruit la décision d’agrément
de la BCE, mais elle ne prend plus la décision d’octroi de l’agrément. L’ACPR arrête un projet de décision
d’agrément qu’elle adresse à la BCE. La BCE est réputée l’accepter par son silence sous 10 jours ouvrables.
La BCE ne s’opposera au projet d’agrément que si les conditions du droit communautaire n’ont pas été
satisfaites.
Il n’y a pas de parfaite symétrie : l’ACPR continue d’être compétente pour les retraits d’agrément.
De plus, elle agrée les succursales d’entreprises relevant d’Etats tiers à l’UE. Enfin, elle est seule
compétente pour l’agrément des SDF (qui sont une spécificité française).

§2. Le processus d’agrément

A. Les conditions de l’agrément

L’ACPR ne se contente pas d’un examen formel : elle se livre à une étude longue et tatillonne.
N’accède pas à la profession bancaire qui veut.

1. La forme sociale

L’ACPR doit d’abord s’assurer de l’adéquation de la forme sociale de l’entreprise. Depuis la LB de


1984, seules des P morales peuvent être agréées en EDC. En droit communautaire, exclusion totale des P
physiques depuis la directive de coordination de 1977.
Sous réserve d’être doté de la PM, le requérant à la qualité d’EDC peut en principe opter pour la
forme sociale de son choix. En pratique, ce sont surtout des stés de K. Mais quasi rien n’est exclu : un GIE
est concevable, ou bien une S€. Q° pour une SAS : en 2014, l’ACPR prend position et estime que les EDC
souhaitant exercer une gamme étendue d’activité ne sauraient choisir la SAS.

2. La conformité des activités projetées avec l’objet de l’agrément sollicité

Très fréquemment, le requérant, en plus de demander la qualité d’EDC, va demander dans le même
temps un agrément PSI (prestataire de services d’investissement). En ce cas, l’ACPR va contacter l’AMF
pour obtenir ses observations.
L’agrément est spécial : le requérant doit demander à bénéficier de tel espace d’agrément. Quant à
l’ACPR, le CMF lui demande de vérifier l’aptitude du requérant à réaliser ses objectifs de développement
dans une sécurité optimale.

3. La viabilité

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L’ACPR doit vérifier la viabilité de l’entreprise dont l’agrément est demandé. Le CMF précise que le
candidat doit avoir les moyens techniques et financiers correspondant à ses projets :
- Des ressources humaines adéquates.
- Des employés compétents.
- Un système de contrôle interne efficace.
- Une dotation initiale en K élevée (entre 1 et 5M€ pour les banques et EDC / entre 1,1 et 1,2M€ pour les
SDF).

4. L’actionnariat

Le requérant doit fournir des informations détaillées sur les apporteurs de K : qui sont-ils ? d’où
viennent les K ? L’ACPR vérifie que l’actionnariat présente patte blanche.
Il est aussi exigé que le requérant identifie des actionnaires de référence, à qui une lettre de garantie
peut être demandée (garantie de renflouement de l’établissement s’il connaît des difficultés).

5. La direction de l’EDC

L511-13 CMF impose la règle du double-regard : l’activité de l’EDC doit être dirigée par au moins 2
P, nommées dirigeants responsables ou dirigeants effectifs. Ces dirigeants ne doivent pas nécessairement être
français, en revanche ils doivent justifier de qualités d’expérience, de compétence et d’honorabilité.
Aucun des 2 dirigeants ne doit avoir un domaine réservé vis-à-vis de l’autre, de façon à ce que
l’empêchement de l’un n’empêche pas la continuité des opérations par l’autre.
La Q° a été posée dans la SA : est-ce que le président du CA dissocié du DG peut être un de ces 2
dirigeants ? non : il doit s’agir de directeurs généraux ou équivalents.

B. Les décisions relatives à la demande d’agrément

1. L’octroi

C’est le résultat du travail préparatoire de l’ACPR, qui va vérifier les conditions objectives et
subjectives. Puis elle va notifier à la BCE son projet de décision. Dans le principe du règlement MSU de
2014, elle peut proposer un agrément total ou limité à l’exercice de certaines opérations. Elle peut aussi
assortir l’agrément de conditions particulières visant à préserver l’équilibre financier de l’établissement et le
bon fonctionnement du système bancaire. Enfin, la décision d’octroi peut être subordonnée à la prise par le
requérant de certains engagements.
Lorsque des entreprises agissent dans le secteur de l’économie sociale et solidaire, l’ACPR est
invitée à prendre en compte la spécificité des missions d’IG au regard de la lutte contre l’exclusion et de la
reconnaissance effective d’un droit au crédit.

2. Le refus

L’ACPR va refuser l’agrément, si elle estime que sa mission de surveillance du requérant pourra être
entravée par des liens de K et de contrôle entre le requérant et d’autres P. En particulier, elle refuse
l’agrément s’il existe des motifs raisonnables de penser que la qualité des apporteurs de K ne permet pas de
garantir une gestion saine et prudente. Ou que le dossier n’est pas suffisamment détaillé. Il est très difficile
d’être agréé en qualité de banque. L’agrément sera aussi refusé si les dirigeants ne présentent pas
l’expérience ou les compétences adéquates.
En cas de refus, le requérant est susceptible d’un REP devant le CE. Si le refus émane de la BCE,
possibilité d’un recours en annulation devant le tribunal de 1e instance de l’UE.

3. Le retrait

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La décision sur le retrait d’agrément ne présente pas la même symétrie que l’octroi d’agrément. En
principe, ajd, c’est la BCE qui seule doit prononcer un retrait d’agrément pour tout EDC ayant son siège
dans l’EEE. L’ACPR a de ce PDV perdu du pouvoir : elle ne peut seule retirer un agrément.
La BCE le peut soit à la demande d’un établissement lui-même, soit d’office parce qu’il ne remplit
plus les conditions de son agrément, ou qu’il n’en a pas fait usage depuis 12 mois, ou qu’il n’est plus en
activité depuis 6 mois.
En cas de retrait total d’agrément, il va entrainer la liquidation de l’EDC si celui-ci a son siège en
France. L’agrément est intimement lié à la notion même d’EDC. Les fonds devront être remboursés au
client, et les avoirs seront transférés sur un compte auprès d’un autre EDC.

4. La modification

En vertu du L511-12 CMF, il y a des modifications affectant la P agréée qui peuvent susciter des
modifications par l’ACPR. Ex : si elle souhaite modifier sa forme sociale ou son nom, réduire son K social,
modifier son objet social, il faut demander une autorisation à l’ACPR.
C’est un régime de déclaration qui s’appliquera aux modifications les moins graves (ex :
ouvrir/fermer des guichets, augmenter son K social).

§3. Les effets de l’agrément

Ces effets sont essentiels : l’agrément emporte des effets à la fois en France et en Europe.

A. L’agrément emporte le droit d’effectuer des ODB à titre habituel en France

L’agrément confère le droit d’accomplir des ODB correspondant à l’espèce pour laquelle l’entreprise
a été agréée. Il faut donc que l’établissement agréé respecte scrupuleusement les éventuelles limites et
conditions de son agrément. En ce sens, il existe un principe de spécialité de l’agrément.
Si on sort des limites de son agrément, on est en violation du MB.

B. L’agrément emporte le droit d’effectuer des ODB à titre habituel en Europe

1. Le principe

On a une vraie évolution de la législation, qui s’est considérablement européanisée. Auparavant, les
banques étrangères qui avaient leur siège dans un Etat extérieur à l’UE, devaient obtenir un agrément auprès
du CEC ou CECEI avant d’embrasser une activité bancaire en France. Le principe communautaire de liberté
d’établissement restait subordonné à l’octroi d’un agrément national.
Les 2 directives de 1973 et 1977 avaient pourtant déjà harmonisé les conditions de l’agrément, ce
qui pouvait poser la Q° de la licéité de la règle française selon laquelle une banque située dans un Etat
membre ne pouvait pas prêter des services bancaires en France sans y être installée. Selon le droit bancaire
français de l’époque, qu’une banque soit non française car dans l’UE ou tierce à l’UE, la règle était la
même : il fallait un agrément en France.
Dans plusieurs affaires, la CJCE a été saisie. CJCE, 9 juillet 1997 : une banque agréée en Belgique
prétendait exercer une activité de délivrance de crédits hypothécaires en France. C’est contraire au droit
communautaire que d’exiger un agrément d’une banque non française mais membre de l’UE. Cass. Com. 22
novembre 2005 : en visant l’arrêt de la CJCE, elle a adopté la même solution sur le fondement de la liberté
de prestation de service.
Les choses ont changé avec la directive de 1989 de coordination bancaire (applicable depuis
1993) : elle a institué un principe d’agrément unique, désigné sous l’appellation « passeport € ». Les termes
ont depuis été repris dans une directive de 2006 de consolidation. Ce passeport a été étendu à tout l’EEE.
L’EEE est un traité qui rassemble 28 pays = 25 pays de l’UE + les 3 pays de l’AELE (Norvège, Islande &
Lichtenstein). Ce passeport fait qu’un EDC établi dans l’un des pays de l’EEE est libre d’établir, sur le
fondement de la liberté d’établissement, une succursale dans un des autres pays de l’EEE sans avoir à
demander d’agrément dans l’Etat d’accueil. Une seule exigence s’impose à lui : il doit notifier son projet à

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l’autorité de supervision dont il dépend, qui doit le transmettre à l’autorité de supervision du pays d’accueil.
Il peut également délivrer des services bancaires sur le fondement de la liberté de prestations de services
sans agrément.
Cet agrément unique est prolongé par un contrôle unique par l’autorité du pays d’origine : c’est le
Home Country Control.

2. Les incidences du Brexit

Le RU, contre toute attente, a déclenché 50 TFUE : en 2019, le RU sortira de l’UE. Hard Brexit ou
Soft Brexit ? L’enjeu est que l’UE doit trouver avant la sortie des moyens aux banques anglaises de
continuer à effectuer des services bancaires.

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LECON 4 : La surveillance des opérateurs bancaires

Autrefois, on parlait de tutelle des EDC. Cette tutelle avait plusieurs caractères :
- Déléguée : conférée à des autorités.
- Sectorielle : spécifique aux banques.
- Nationale : la France contrôlait ses banques.
Ajd, les choses ont beaucoup évolué, mais ne se sont pas vraiment simplifiées. Ajd, les traits sont les
suivants :
- La tutelle est partagée : entre les autorités et l’Etat qui reste présent (à travers le MDE).
- La tutelle est plurisectorielle : il y a une tutelle commune à la banque et l’assurance.
- La tutelle est européenne.

Ajd, on ne parle plus de tutelle mais de supervision = surveillance & contrôle des EDC. La
supervision est étatique mais dépend de beaucoup d’autorités, de banques centrales (nationale & €). La
surveillance, qui peut être nationale comme €, peut être :
- Micro-prudentielle : s’attache à vérifier la solidité financière de l’EDC.
- Macro-prudentielle : s’attache à vérifier la solidité du système bancaire dans son ensemble.
Ajd, on parle de +/+ de régulation bancaire : c’est le nouveau nom swag de la réglementation. Sont
donc apparues les autorités de régulation. Il semblerait qu’il y ait une nuance : que la régulation soit une
réglementation qui tend à gommer les déséquilibres produits par la seule action du marché d’une part, et
qu’on ne passe pas par l’Etat mais le cas échéant par les autorités non étatiques d’autre part.

SEMAINE 4
SECTION 1 : Les autorités de surveillance

§1. Les autorités françaises

Il existe 2 organes consultatifs, qui ne sont pas des autorités de surveillance : le Comité consultatif du
secteur financier (CCSF) et le Comité consultatif de la législation et de la réglementation bancaire
(CCLRB).
La BDF n’est plus, depuis une vingtaine d’années, une autorité de contrôle et de surveillance, car
depuis le 1e juin 1998, a été créée la BCE qui officie depuis le 1e janvier 1999. La BDF est encore ajd la
banque centrale nationale (BCN) : c’est une institution créée le 18 janvier 1800, nationalisée par loi de 1945
du Général DG, et depuis cette date propriété de l’Etat. Elle a la PJ, mais a perdu la charge technique de la
surveillance, du contrôle de la profession bancaire. Elle a également perdu le monopole de la définition de la
politique monétaire française. Elle est ajd sous la tutelle de la BCE. Toutefois, elle continue de participer à la
tutelle des EDC et établissements bancaires, pour des raisons sociologiques : le président de l’ACPR est le
gouverneur de la BDF. Et le personnel de l’ACPR provient de la BDF qui les emploie. Ainsi la BDF reste
présente, incarnée à travers son gouverneur qui préside l’ACPR, et ses personnels.

Dans les autorités françaises de surveillance, il y en a 2 qui renvoient à la surveillance micro-


prudentielle d’une part (aspect de l’individu) et macro-prudentielle d’autre part (aspect du système) :

A. L’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution

1. Présentation de l’ACPR

Elle est en charge du contrôle micro-prudentiel. Elle a pour mission de maintenir les EDC en bonne
santé et veiller à la protection des déposants. C’est une autorité administrative, adossée à la BDF qui lui
procure ses moyens informatiques, humains et matériels.
Autrefois, c’était la Commission bancaire créée par la LB de 1984 qui était chargée de contrôler les
EDC et sanctionner leurs manquements. La loi de modernisation de l’économie de 2008 a opéré une
fusion : plusieurs autorités de contrôle et d’agrément ont été fusionnées : Commission bancaire + ACAM +
CECEI + Comité des entreprises d’assurance. Cela a pris effet par une ordonnance de 2010 qui a créé
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l’ACP. Cette concentration des institutions est due à la crise de 2008 qui a montré que les secteurs bancaires
et assurantiels étaient largement liés et qu’il était dangereux de les dissocier. Un décret d’application de
2010 a précisé les modalités, le fonctionnement, les procédures de l’ACP.
La loi de 2013 dote l’ACP de nouveaux pouvoirs : des pouvoirs de résolution bancaire = traitement
d’une difficulté bancaire qui ne passe pas par une PC. Elle prend alors le nom ACPR.
Les pouvoirs de résolution de l’ACPR sont étendus du secteur bancaire vers le secteur des assurances
en décembre 2016.
Ajd, l’ACPR est l’organe national de supervision des secteurs de la banque et de l’assurance. Elle
participe aussi à la lutte contre le blanchiment de K et le financement du terrorisme.

2 précisions :
- Depuis que l’Union bancaire a été mise en place en 2014 dans la zone €, elle repose sur 2 piliers : le
MSU & le MRU. Puisqu’ajd le gros des pouvoirs a été européanisé, l’ACPR est devenu un cabinet de la
BCE. C’est un collaborateur des institutions € ajd. Son rôle a décru.
- Une loi de 2017 a modifié L612-1 CMF qui définit l’ACPR : « l’ACPR veille à la préservation de la
stabilité du système financier et à la protection des clients, assurés, adhérents et bénéficiaires des P
soumises à son contrôle ». Mais ce qui ne figure plus est qu’il s’agit d’une AAI. Cette loi porte statut
général des AAI et en donne une liste actualisée : l’ACPR a perdu son rôle d’AAI.

Ajd, on ne sait pas très bien ce qu’est l’ACPR. Elle n’a pas la PM. Elle reste une autorité
administrative mais dont l’indépendance n’est plus affirmée. C’est une entité sui generis très particulière.

2. Les missions de l’ACPR

a) La contribution à la stabilité micro-prudentielle du système financier

L’ACPR instruit les demandes d’agrément en matière de banque et d’assurance. Elle exerce aussi une
surveillance permanente des établissements soumis à son contrôle, mais en réalité uniquement des petites
banques : les grandes font l’objet d’une surveillance directe de la BCE. Elle vérifie également que les EDC
respectent les règles relatives à leur activité, les termes et limites de leur agrément, et veille à l’élaboration et
mise en œuvre des mesures de résolution des crises bancaires.

b) La protection de la clientèle

L’ACPR veille au respect par les établissements sous son contrôle, des règles assurant la protection
de la clientèle. A cet égard, elle peut coopérer avec l’AMF. Les 2 constituent un pôle commun de traitement
des demandes du public.

c) La représentation de la supervision française

Elle incarne et représente la supervision française dans les instances € et internationales. Pour exercer
ces missions, l’ACPR dispose de 3 types de pouvoirs :
- Pouvoir de contrôle (sur pièce et sur place).
- Pouvoir de police administrative.
- Pouvoir de sanction.

3. L’organisation de l’ACPR

Elle se fait autour de collèges et de commissions. Elle est incarnée par un Secrétariat général, le
secrétaire général étant arrêté sur décret du MDE sur proposition du président de l’ACPR. 3 collèges
importants :

a) Le collège de supervision

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C’est l’instance normale, de droit commun, de l’ACPR. Ce collège est composé de 19 membres et est
présidé par le Gouverneur de la BDF. Il comporte plusieurs formations lui-même. Ce collège plénier traite
des Q° générales de supervision communes à la banque et à l’assurance, fixe les grandes orientations de
l’ACPR et les priorités pour l’année à venir.
Il y a 2 sous-collèges : un sous-collège de la banque et un sous-collège de l’assurance (8 membres
chacun). De même, il y a une formation restreinte composée de 8 membres, qui traite de Q° individuelles qui
intéressent les 2 secteurs.

b) Le collège de résolution

Il a été créé par la loi de 2013 qui lui a donné son nom. Il est présidé par le Gouverneur de la BDF. Il
est composé de 6 membres et traite des mesures de prévention et de résolution des crises bancaires.

c) La commission des sanctions

Elle a pour mission de sanctionner des manquements aux statuts des EDC. Elle détient le pouvoir
disciplinaire de l’ACPR. Elle est indépendante du collège de supervision de l’ACPR. Ce dernier initie et
exerce les poursuites, mais les sanctions reviennent à la commission des sanctions. Les membres de l’un ne
peuvent être membres de l’autres.
Elle est composée de 6 membres (un Conseiller d’Etat, un Conseiller à la Ccass, 3 professionnels & 1
rapporteur) qui ont un mandat de 5 ans renouvelable 1x.

C’est le Secrétariat général de l’ACPR qui élabore des rapports, identifie des anomalies. Le collège
de l’ACPR peut au vu de ces rapports, décider de l’ouverture d’une procédure disciplinaire. Dans ce cas,
l’ACPR notifie les griefs aux intéressés et saisit la commission des sanctions en lui notifiant les griefs. La
commission des sanctions veille au caractère contradictoire de la procédure.
Dans le cadre de cette procédure, le président de la commission désigne un rapporteur qui aura pour
mission d’instruire préalablement à l’audience le dossier : c’est un peu un juge d’instruction au sein de
l’ACPR. Il établit un rapport, communiqué à la P concernée. A la suite de ce rapport, il y aura une audience
et une décision de la commission des sanctions. La P mise en cause sera convoquée à une audience. Le
rapporteur ne doit pas participer au délibéré et à la décision. L’audience en principe est publique, mais la P
mise en cause peut demander à ce qu’elle se déroule à huis clos. La décision est notifiée à l’intéressée et au
collège de supervision. Elle peut faire l’objet d’un recours en PC devant le CE, dans les 2 mois suivant la
notification.
Cette décision peut être d’une grande diversité (L612-39 s. CMF) :
- Avertissement.
- Blâme.
- Interdiction d’effectuer certaines opérations pendant max 10 ans.
- Limitation de telle ou telle activité.
- Suspension d’un dirigeant pour max 10 ans.
- Démission d’office d’un dirigeant.
- Retrait partiel ou total de l’agrément.
- Sanction pécuniaire jusqu’à 100M€.
Selon L612-40 CMF, si l’établissement a manqué aux règles prudentielles € qui lui sont applicables,
les sanctions encourues peuvent être portées jusqu’à 10% du CA ou 2x l’avantage retiré. Le dirigeant peut
encourir une amende jusqu’à 5M€.
Ces décisions sont diffusées dans un registre officiel, et peuvent être diffusées par voie de presse.
Mais la commission des sanctions peut prévoir une publication non nominative afin de ne pas porter
gravement atteinte aux marchés financiers.

B. Le Haut conseil de stabilité financière

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Le HCSF est l’autorité macro-prudentielle française. Il est chargé d’exercer la surveillance du


système financier dans son ensemble, dans le but d’en préserver la stabilité et la capacité à assurer une
contribution soutenable à la croissance économique.
Il s’occupe de la politique macro-prudentielle à l’échelle nationale. Il doit essayer de prévenir des
crises du système financier : c’est le « risque systémique ».

1. La composition

8 membres :
- 5 membres de droit : le MDE, le Gouverneur de la BDF, le vice-président de l’ACPR, le président de
l’AMF, le président de l’Autorité des normes comptables.
- 3 personnalités qualifiées : des économistes, choisis pour 5 ans.

2. La mission

Elle est de prévenir le risque systémique, qui attenterait au système financier dans son ensemble. Le
HCSF lutte ainsi contre l’aléa moral (moral hazard) = un effet pervers qui peut porter un individu à un
comportement d’autant plus immoral et extrême qu’il ne paiera pas les pots cassés. Quand les acteurs ne
sont pas les payeurs, risque que l’acteur fasse n’importe quoi. On a vu avec la crise de 2008 un aléa moral.
Ex : je mets le feu à ma maison pour obtenir de l’argent. En 2008, on a vu que c’est les Etats qui ont
renfloué largement les banques pour éviter une crise mondiale. Les banques sont « too big to fail » : elles
prennent des risques et c’est l’Etat qui paye.
Le conseil doit veiller à ce que liquidité sur les marchés soient assurés, à limiter l’aléa moral, à
renforcer la résilience des EDC.
Il se réunit 4x par an et établit un rapport annuel.

3. Les pouvoirs

Il peut prendre des avis, mais aussi surtout des mesures contraignantes. Il les prend en vertu d’un
principe du pouvoir discrétionnaire orienté : il écoute, regarde, mais au final c’est lui qui décide
discrétionnairement. Il n’a pas en rendre compte à qui que ce soit.
De façon obligatoire, les EDC doivent constituer un coussin contracyclique, dont le taux doit être
déterminé par le HCSF. Ce matelas d’argent a vocation à minimiser les cycles économiques : il augmente en
période de croissance et diminuer en période de crise.
Le HCSF peut imposer aux EDC un coussin de risque systémique facultatif.
Le HSCF peut enfin fixer des conditions d’octroi de crédit. Il peut aller plus loin que ce que les
autorités € imposent : il peut prendre des mesures de lutte contre le risque systémique plus importantes.

§2. Les autorités européennes

A. La Banque centrale européenne

C’est une institution publique qui gère la monnaie d’un pays ou d’un groupe de pays et à ce titre,
gère la masse monétaire en circulation. La BCE est la banque centrale de 19 pays de l’UE qui forment la
zone €. Elle est située à Francfort. C’est ce qu’on appelle le système € des banques centrales, institué en
1998. C’est depuis 1999 que la BCE est responsable de la mise en œuvre de la politique monétaire de la
zone €. Celle-ci forme la 2e économie mondiale.
Elle est dotée de la PJ, et participe au système € de banques centrales. Celui-ci se compose de la BCE
et des BCN de l’ensemble des Etats membres de l’UE. On parle de l’euro-système, constitué de la BCE et
des BCN.

La BCE a un objectif général et primordial : maintenir la stabilité des prix. Au-delà de cet objectif, il
est fondé sur une croissance économique équilibrée, une économie sociale de marché hautement compétitive
qui tend au progrès social.

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La BCE définit la politique monétaire de la zone €. Elle émet et a le monopole de l’émission des
billets de banque dans la zone €. Elle est tenue de missions prudentielles et de contrôle. En vertu de 627
TFUE, la BCE assume des missions spécifiques de contrôle prudentiel des EDC des Etats membres. Elle
conduit donc des missions de surveillance prudentielle dans le cadre du MSU.
Ce MSU est en vigueur depuis 2014, et associe étroitement la BCE et les autorités nationales de
supervision des pays membres. La BCE doit assurer le fonctionnement efficace et cohérent du MSU.

Elle a des missions de contrôle prudentiel. Elle peut accorder ou retirer leur agrément aux banques.
Elle peut fixer des exigences ou des coussins de fonds propres plus stricts que celles déjà prévues. Elle
garantit et veille au respect des règles prudentielles €. Elle contrôle directement les banques plus importantes
des pays de la zone € représentant 95% des actifs. Elle pourrait à tout moment décider de superviser une
banque moins importante pour renforcer ses exigences de supervision.

B. L’autorité bancaire européenne

C’est une autorité indépendante au sein de l’UE qui veille à garantir un niveau de réglementation
efficace et cohérent dans l’ensemble du système bancaire €, au niveau micro-prudentiel. Elle est entrée en
fonction en 2011. Elle s’est substituée au Comité € des superviseurs bancaires qui a disparu à son profit.
Son siège est à Londres > problèmes post-Brexit. Elle a la PM. C’est l’une des 3 autorités € de
surveillance. Les 3 participent du SESF (système € de supervision financière) : ABE + AEMF + AEAPP.

Le rôle de l’ABE est d’améliorer la surveillance prudentielle au niveau €, et plus précisément la


surveillance micro-prudentielle. Cela se traduit par le fait que sa principale tâche est d’élaborer des normes
techniques, contraignantes pour les unes, d’orientation pour les autres, uniformes en €. L’ABE doit ainsi
élaborer un manuel de surveillance €, notamment à l’attention des autorités nationales de supervision,
édictant les meilleurs pratiques. Ce manuel unique est un recueil de règles prudentielles harmonisées destiné
aux autorités nationales de supervision mais également à tous les établissements financiers de l’UE. Le but
est d’assurer et d’inviter à la convergence des règles et pratiques prudentielles.
L’ABE n’a pas de pouvoir normatif. Elle a le pouvoir de fixer des règles techniques, dont la matière
bancaire est riche. Donc finalement, cela confine tout de même à un quasi pouvoir normatif.
L’ABE a la charge d’évaluer les risques et faiblesses des EDC du secteur bancaire €. L’ABE établit
des simulations de crises €.
L’ABE a un rôle de médiation en cas de désaccord avec les autorités nationales pour les cas de
situations transfrontalières.

C. Le Comité mixte et le système européen de surveillance financière

1. Le comité des autorités européennes de surveillance

Le comité mixte associe les 3 autorités € de surveillance évoquées : ABE, AEMF, AEAPP. Il assure
la cohérence et la bonne articulation des autorités. Il est composé des présidents des autorités € de
surveillance. Il est présidé à tour de rôle pour un an, par le président de chacune des 3 autorités € de
surveillance. Le président a la qualité du vice président du Comité du risque systémique.

2. Le système € de surveillance financière

Ce système, en vigueur depuis 2011, s’inscrit dans une logique plurisectorielle. C’est un système à la
fois micro-prudentiel et macro-prudentiel. C’est un réseau € d’autorités de supervision. On y met en réseau
les différentes autorités de supervision nationales, le comité mixte, les 3 autorités € de surveillance ainsi que
le CERS.

D. Le comité européen du risque systémique

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Institué à la suite d’un groupe de travail présidé par J. Larosière, qui a été directeur du FMI de 1978 à
1987 et gouverneur de la BDF jusqu’en 1993. La Commission € lui a demandé un rapport pour éviter que
cette crise ne se reproduise à nouveau. Ce travail a souligné qu’il fallait mettre l’accent davantage sur le
contrôle macro-prudentiel. A l’échelon €, il voulait qu’on crée un organisme pour la surveillance du système
bancaire € dans son ensemble.
Par un règlement de 2010 relatif à la surveillance macro-prudentielle, il a institué le Comité € du
risque systémique. Celui-ci n’a pas la PM : il est adossé à la BCE. Il est chargé de la surveillance macro-
prudentielle du système financier de l’UE.
Dans le cadre de ce travail macro-prudentiel, il évalue les risques systémiques et peut émettre des
alertes et des recommandations.

SECTION 2 : Les modalités de surveillance

Elles sont également plurielles. Elles constituent un carcan de règles qui enserrent l’activité des EDC.

§1. Les règles prudentielles

A. Les règles de surveillance macro-prudentielle

Elles renvoient au rôle des banques dans la création monétaire. Si les dépôts font les crédits, c’est le
mécanisme de transformation d’échéance qui concourt à l’augmentation de la masse monétaire. La
régulation du crédit est donc indispensable pour gérer le risque monétaire. Quand on parle de contrôle de la
masse monétaire, on parle d’encadrer le crédit de 2 façons.
Longtemps, l’Etat français contrôlait le crédit soit de façon quantitative, soit de façon qualitative. Il
contrôlait le crédit de façon qualitative en orientant les crédits plutôt vers certains secteurs de l’économie. Il
contrôlait le crédit de façon quantitative par 2 procédés :
- Le plafonnement du réescompte par la BDF.
- L’encadrement du crédit : la limitation quantitative du volume des crédits que les EDC ont le droit
d’émettre.
Jusqu’en 1986, la BDF déterminait le volume global des crédits que chaque EDC était autorisé à
consentir.
L’encadrement du crédit a été supprimé en 1986, remplacé par une nouvelle politique monétaire
conduite par la BCE : il lui revient d’encadrer l’activité du crédit en déterminant les grandes lignes de la
politique monétaire.
2 types de règles macro-prudentielles :

1. La constitution de réserves obligatoires auprès de la BCE

La régulation du crédit s’opère notamment par la constitution de réserves obligatoires imposées aux
EDC. Ce système a été assoupli mais non supprimé. Les EDC doivent déposer à la BCE sur des comptes
rémunérés une fraction des dépôts qu’ils reçoivent du public. Cela réduit une part des liquidités que les
banques sont susceptibles d’utiliser. Depuis 1999, la BCE peut faire varier le taux et le périmètre de ces
réserves obligatoires.

2. La fixation de taux directeurs par la BCE

Les banques centrales déterminent la politique monétaire en agissant sur leurs taux directeurs = taux
d’intérêt fixés au jour le jour, pouvant évoluer d’un jour à l’autre, déterminés par la banque centrale d’un
pays. Ajd, ces taux sont déterminés par la BCE.
Il y a 3 taux directeurs :
- Le taux de rémunération des dépôts (-0,4% ajd).
- Le taux du prêt marginal (+0,25% ajd).
- Le taux de refinancement (0% depuis le 16 mars 2016).

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Ce dernier est le baromètre du taux du crédit, et le principal instrument au moyen duquel la BCE peut
réguler le niveau de crédit octroyé dans la zone €, et donc agir sur l’inflation dans cette zone. La BCE
refinance les banques, la banque me finance, elle se refinance auprès de la BCE qui lui reprête. Plus le taux
de refinancement est élevé, plus mon taux de prêt sera élevé. Si le taux de refinancement augmente, les
banques vont augmenter le taux de leur crédit.

B. Les règles de surveillance micro-prudentielle

Ce sont toutes les mesures destinées à prévenir la défaillance des EDC, à assurer leur stabilité
financière. La prévention des risques bancaires repose sur des règles de bonne gestion financière. Ces règles
se trouvent à L511-41 s. CMF. Principe général : les EDC et SDF sont tenus de respecter les normes de
gestion destinées à assurer leur liquidité et leur solvabilité ainsi que l’équilibre de leurs structures
financières. Ils doivent respecter des ratios de couverture et de division des risques.
La vie quotidienne des EDC est faite de nombreux ratios :

1. Le ratio de solvabilité

Il tient aux différents accords de Bâle. L’Accord de Bâle 1 de 1988 a recommandé l’institution d’un
rapport minimal entre les fonds propres réglementaires des banques (d’au moins 8%) et leur niveau de
risque (« ratio Cooke »). Il ne concernait initialement que le risque de crédit. Il a été introduit dans l’UE par
la directive de 1989 relative aux ratios de solvabilité des EDC.

Bâle 2 de 2004 affine l’approche des risques bancaires et fait en sorte de couvrir non seulement le
risque de crédit, mais également le risque opérationnel et le risque de marché. C’est un nouveau ratio,
toujours à 8%, qui se substitue au ratio Cooke. Il s’organise autour de 3 axes :
- Exigences renforcées de transparence financière.
- Individualisation plus grande de la surveillance prudentielle.
- Niveau minimal de fonds propres pour couvrir le risque de crédit, de marché & opérationnel à la fois.
Cela a également porté sur la notion de fonds propres : apparition de fonds propres « tier one ».
Ces exigences ont été reprises par 3 directives communautaires CRD 1, 2 et 3 en 2006, 2009 et 2010.

Avec Bâle 3, on a des ratios et un coussin. Il est signé après la crise de 2008, en 2010. Il garde les 3
piliers, mais propose d’augmenter fortement la qualité et la ventilation des fonds propres. Il est d’abord
envisagé que le ratio soit progressivement porté à 10,5% en 2019. Ce n’est pas certain : une banque, avant
de prêter, doit avoir les moyens de répondre de ses engagements. Si une banque prête 100, il faut qu’elle ait
8 en fonds propres. La composition des fonds propres a en tout cas changé : introduite par la directive
CRD4 de 2013, le règlement CRR de 2013 et l’ordonnance de 2014. Les fonds propres « tier one », de
4% sous Bâle 2, sont portés à 6% sous Bâle 3. Au sein de ces 6%, il y a un noyau dur de fonds propres, le
« core tier one », porté à 4,5% (2% sous Bâle 2).
Bâle 3 a institué un coussin de fonds propres : « coussin de conservation des fonds propres » fixé à
2,5% : il doit être composé de « core tier one ». L’objectif est d’éviter l’érosion des fonds propres des
banques. En cas de besoin, les fonds propres vont puiser dans ce coussin afin de ne pas avoir à affecter ou
puiser dans le niveau des fonds propres réglementaires de 8%.
4 autres coussins ont été institués par Bâle 3 :
- Le coussin contracyclique : on y puise en cas de crise. Il est de 1 à 2,5%, mais c’est l’HCSF qui
détermine le niveau précis.
- Le coussin systémique facultatif : que le HCSF peut décider de rendre obligatoire au niveau national. Ce
coussin tend à prévenir des risques systémiques. Il peut être porté jusqu’à 5% des actifs de la banque.
- 2 coussins ne concernant que les établissements ayant une importance systémique : ils sont tenus de les
constituer. Ils sont alimentés en fonds propres du noyau dur et peuvent osciller entre 1 et 3,5% des actifs.

2. Le ratio d’effet de levier

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L’effet de levier est un effet démultiplicateur, lié à la possibilité de verser une somme faible en vue
de l’obtention d’un gain élevé. On y a recours par des produits dérivés, connus pour un fort effet de levier.
On y recourt également lorsqu’on recourt à l’endettement (ex : j’ai 10 de K, je les investis dans une
opération et j’emprunte 90). Plus on démultiplie l’emprunt, plus le risque d’insolvabilité est élevé.
C’est un effet encadré : rapport entre les fonds propres « tier one » (numérateur) sur le total des actifs
de la banque (dénominateur). Bâle 3 l’a plafonné à 3%. Il entrera en vigueur au 1e janvier 2018.

3. Le ratio de liquidité

Il a pour but d’éviter le risque de panique financière. Le risque de liquidité n°1 est le retrait massif
d’argent des déposants. Puisque la banque fait des crédits à LT, et que ce sont des dépôts de liquidité à très
CT qui peuvent être retirés à tout moment, on a une déconnexion des échéances. Effet grave : les dépôts ne
font plus les crédits. La banque ne peut plus satisfaire à son exigence de restitution.
Pour éviter ces difficultés, Bâle 3 a institué 2 ratios :

Le ratio de liquidité à CT : son objectif est d’assurer que la banque dispose d’un niveau adéquat
d’actifs liquides de haute qualité pouvant être convertis en liquidités pour couvrir ses besoins sur une
période de 30 jours en cas de difficultés de financement. A partir de 2018, ce ratio devra être d’un montant
minimum de 100%. Formule : les actifs liquides de haute qualité (numérateur) sur les sorties de trésorerie
prévisibles sur les 30 prochains jours (dénominateur). Ce rapport doit être > ou = à 100%. L’établissement
doit disposer de suffisamment de liquidité en caisse pour que, même si elle a du mal à se refinancer après,
elle puisse sur une période de 30 jours, répondre à toute demande de restitution.

Le ratio de liquidité à LT : tout EDC doit justifier d’un financement stable pour pouvoir poursuivre
sainement ses activités dans un délai d’un an. Formule : le montant de financement stable disponible = le
passif (numérateur) sur l’actif (dénominateur). Le ratio doit être > ou = à 100%. L’objectif est que la banque
puisse financer ses actifs de LT par un financement stable sur un an. Ce ratio doit entrer en vigueur à partir
de 2018.

4. Le ratio de grand risque

La prudence commande de ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier : les EDC doivent
respecter des règles de division des risques. Un grand risque est défini par le règlement CRR comme une
exposition sur des clients qui mobilisent +10% des fonds propres de l’EDC. Un grand risque à l’égard d’un
même client ne saurait dépasser 25% des fonds propres d’un EDC. La somme de tous les grands risques ne
saurait dépasser 800% des fonds propres.

§2. Les règles comptables

Les obligations comptables des EDC sont considérablement renforcées aux fins d’une plus grande
transparence, d’une meilleure surveillance, afin de détecter des anomalies avant qu’une crise ne survienne
(L511-35 s. CMF). Les comptes des EDC sont certifiés par au moins 2 CAC au sein de chaque EDC.
L’ACPR va veiller au respect des obligations comptables.

§3. Les règles de gouvernance et de gestion

Ces règles ont été renforcées par l’ordonnance de 2014. Il y en a plusieurs :

A. Le contrôle interne

L511-41-1 B CMF : les EDC sont tenues de mettre en œuvre des procédures de contrôle en temps
réel des risques attachés à leurs activités. Ces risques sont de plusieurs ordres. Le contrôle interne concerne
le risque opérationnel lié aux activités. De ce contrôle interne, il faut rapprocher le fait que les EDC font un
contrôle de conformité aux règles de droit.

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B. La gouvernance des EDC

L511-45 CMF : les dirigeants sont soumis à un contrôle renforcé des organes sociaux, le tout
contrôlé par l’ACRP. Ils doivent aussi consacrer un temps suffisant à leurs fonctions, et l’EDC doit veiller à
ce que les dirigeants suivent des formations pour maintenir leurs compétences.
Pour éviter des prises de risques excessives, la part variable de la rémunération ne peut excéder la
moitié de la part totale des rémunérations fixes.
Il y a des dispositions intéressant l’interdiction du cumul des mandats.
Lorsque des EDC importants dépassent un certain seuil, des comités spécialisés doivent être
institués : comité des risques, comité des nominations, parfois un comité des rémunérations.
L511-64 CMF : les EDC doivent se doter d’une fonction de gestion des risques indépendante des
fonctions opérationnelles.

C. La séparation des activités bancaires et financières

Le législateur est intervenu après la crise des subprimes pour filialiser les opérations spéculatives.
L511-47 CMF impose que les activités spéculatives soient logées dans une filiale autonome, distincte du
reste du groupe, soumise à des règles prudentielles qui lui sont propres : souvent une entreprise
d’investissement. Cela ne concerne en pratique que 2 grandes banques.

§4. Les règles de prévention et de traitement des difficultés des EDC

A. Le devoir d’actionnaire

L511-42 CMF autorise le président de l’ACPR, en cas de difficulté d’une banque, et si la situation le
justifie, à inviter les actionnaires à remplir leur devoir d’actionnaire = remettre de l’argent. C’est une
invitation à fournir le soutien nécessaire. Si c’est un EDC important, significatif au sens du D€ (un des 120),
le gouverneur de la BDF doit préalablement saisir pour avis la BCE.

B. Les mesures conservatoires

Si cette invitation ne suffit pas, et que la solvabilité d’un EDC semble compromise, l’ACPR peut
prendre 14 mesures conservatoires (L612-33 CMF), qui peuvent se cumuler : surveillance spéciale,
réduction du champ d’activité, réduction du risque, suspension des dirigeants, cession d’une partie du
portefeuille, interdiction de distribution de dividendes aux dirigeants…

SEMAINE 5
C. Le fonds de garantie des dépôts et de résolution

Le fonds de garantie des dépôts a été créé par une loi de 1999 sur l’épargne et la sécurité
financière. Il est devenu depuis le FGDR en 2013. Il est régi par L312-4 s. CMF. Son rôle est de limiter les
risques de défaillance bancaire à la faveur d’un fonds de garantie.
Celui-ci a succédé à l’ancien système antérieur à 1999 : la « solidarité de place », qui était un
mécanisme prévu par un ancien article de la LB de 1984, et invitait toutes les banques françaises en bonne
santé à renflouer les banques en difficulté.
Principe du FGDR : les banques sont obligées d’y adhérer, elles versent une contribution perdue (pas
vocation à être récupérée) d’un montant déterminé par le MDE. Ce fonds répond à plusieurs objectifs :

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- Garantir les dépôts et le financement des mesures de résolution que l’ACPR peut adopter toutes les fois
qu’un EDC ne peut plus faire face aux demandes de restitution de ses clients.
- Garantir les cautions : se substituer à une banque défaillante en qualité de caution.
- Garantir les investisseurs (porté à 70k€ par P et par EDC) et les titres (qu’un PSI ne pourrait restituer en
cas de faillite).
Ce qui est important est la garantie des dépôts : indemnisation des déposants dans un délai de 7 jours
ouvrables, jusqu’à 100k€ par P et par EDC. L’ACPR utilise le fonds pour indemniser les déposants. La
garantie des dépôts couvre l’ensemble des sommes déposées sur les comptes en tous genres. 2 remarques :
- On cumule tous les comptes qu’un même client détient auprès d’un même EDC. Au-delà de 100k€, les
dépôts ne sont pas garantis et peuvent être totalement absorbés en cas de défaillance d’un EDC.
- On ne compte pas les débits des comptes, on ne compte que les crédits, sauf dans un cas : si une clause
de compensation a été convenue > on intégrera les débits en soustraction des crédits.
Les déposants protégés sont les particuliers, les entreprises, mais non les opérateurs bancaires eux-
mêmes qui sont assujettis à la constitution de ce fonds de garantie mais pas bénéficiaires. Donc un client a
intérêt à répartir son argent sur plusieurs établissements.
Lorsque le fonds de garantie décaisse, il est subrogé dans les droits du désintéressé : il aura un
recours contre les EDC défaillants mais surtout leurs dirigeants fautifs pour fautes de gestion.
L’intervention du fonds s’accompagne en principe du retrait de l’agrément de l’EDC secouru.
Le fonds peut aussi financer le repreneur de tout ou partie de l’activité de la banque défaillante. Ce
faisant, il prend part aux mesures de résolution permettant leur financement concret.
Le FGDR français est à l’échelle nationale. Le fonds de résolution unique (FRU), au niveau €, est
abondé par le FGDR.

D. La procédure de résolution

Les PC ne sont pas toujours adaptées aux défaillances bancaires. Dans certaines PC de banques,
souvent les actionnaires et certains créanciers tiraient leur épingle du jeu en s’abritant derrière l’aléa moral et
le « too big to fail ». L’objectif de la résolution n’est pas d’éteindre un passif mais de limiter cette situation
de crise bancaire de manière réactive, dynamique. Pour éviter que la crise bancaire ne contamine l’économie
en général, on prend des mesures de résolution.
C’est le MRU (mécanisme de résolution unique), institué par une directive de 2014, qui est le 2nd
pilier de l’Union bancaire (le 3e pilier de l’Union bancaire est le système € d’assurance des dépôts, en cours).
Ce MRU est adopté par un règlement de 2014 pour les pays de la zone €. Il a été revu par un règlement de
2015. On a une intervention à 2 échelons :

Intervention nationale : c’est l’ACPR qui pourra ouvrir une procédure de résolution, à la demande
du gouverneur de la BDF, du DG du TP, ou de la BCE, si 3 conditions sont cumulativement réunies (L613-
49, II CMF) :
- La défaillance de l’EDC est avérée ou prévisible.
- Il n’existe aucune perspective raisonnable d’évitement de la défaillance dans un délai raisonnable
autrement que par la mise en œuvre d’une mesure de résolution.
- La mesure de résolution est nécessaire au regard de ses objectifs, et une LJ du Ccom ne permettrait pas
de satisfaire aussi bien ces objectifs.
Objectifs de la résolution :
- Continuité des fonctions critiques d’un établissement (traiter une crise).
- Eviter des effets négatifs sur la stabilité financière.
- Eviter le recours au « bail out » : protéger les deniers de l’Etat.
- Protéger les fonds et les actifs des clients, en particulier ceux couverts par la garantie des dépôts.
Les mesures de résolution (L616-31-16 CMF) sont notamment :
- Cession d’activité.
- Remplacement des dirigeants.
- Mise en place d’une structure-relais chargée de recevoir des actifs et des dettes en vue de leur transfert
ultérieur (« structure de défaisance »).
- Recours à une structure de gestion d’actifs.
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- Mesures de renflouement interne.


- Emission de titres de K.
- « Bail in » : mesures de réduction de la dette des créanciers qui ne sont pas privilégiés.
L’ACPR est tenue de respecter les rangs des créanciers. Il n’est pas possible de leur imposer des
sacrifices supérieurs à ceux qui résulteraient d’une LJ.

Intervention € : Le MRU a d’abord institué une autorité de résolution €, le CRU (Conseil de


résolution unique) qui fonctionne depuis 2015 et dont le siège est à Bruxelles. Le MRU a également institué
le FRU (fonds de résolution unique), financé par le secteur bancaire € : l’idée est qu’il soit à la mesure des
crises susceptibles de survenir dans le cadre € = doté de 55MM€.
Lorsque les banques sont d’importance systémique, la BCE en traite directement. De même, le CRU
est responsable directement de la résolution des plus grandes banques qui sont sous la R directe de la BCE.

E. Les procédures collectives bancaires

Elles sont différentes, adaptées.


La PC ne peut être ouverte sans un avis conforme de l’ACPR, qui peut préférer des mesures de
résolution.
L613-26 CMF retient une notion de la cessation des paiements spécifique. D’après L631-1 Ccom, la
cessation des paiements d’une entreprise est son impossibilité à faire face à son passif exigible avec son actif
disponible. La LJ est l’hypothèse dans laquelle la situation de l’entreprise est totalement compromise. La
notion de cessation des paiements, en matière bancaire, est aménagée : l’EDC n’est pas en mesure d’assurer
ses paiements immédiatement ou à terme rapproché.
Il existe un principe cardinal des PC : pour organiser le règlement du passif d’une entreprise, il faut
faire un inventaire de l’actif de l’entreprise, et déclarer le passif. Les créanciers doivent déclarer leurs
créances à la faillite. Un créancier qui ne déclare pas sa créance ne pourra recevoir de sommes d’argent dans
la PC. Ce principe cardinal reçoit une exception à L613-30 CMF : les déposants, ainsi que le fonds de
garantie, sont dispensés de déclaration à la PC de la banque.
Il y a des titulaires de la PC qui sont des professions réglementées (désignées par le TC) :
- l’administrateur judiciaire : administre l’entreprise, assiste le dirigeant voire se substitue à lui.
- le mandataire judiciaire : réalise les actifs pour le compte des créanciers.
Ce couple existe toujours en matière bancaire, mais pratiquement, l’ACPR aura désigné des
administrateurs et/ou des liquidateurs. Le rôle des administrateurs et mandataires judiciaires va être en-decà
en matière bancaire.

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LECON 5 : Les devoirs du banquier

On va parler des devoirs du banquier, et non ses obligations. L’obligation est une créance du côté
actif, une dette du côté passif. Le banquier n’est pas tenu d’obligations au sens juridique du terme, mais tenu
de « devoirs ». Ce n’est que si ses devoirs venaient à être violés par le banquier que ça donnerait lieu à une
obligation, à une dette du banquier.

Parfois, certains devoirs en télescopent d’autres : on a un conflit de certains devoirs passablement


contradictoires qui supposent d’être articulés (ex : droit d’être informé + droit au respect de la vie privée).

Ces devoirs n’ont pas tous la même source : certains viennent du droit commun (informer, mettre en
garde, se comporter de façon loyale). D’autres sont propres au banquier.

SECTION 1 : Les devoirs procédant du droit commun

Le droit commun est omniprésent : la relation banquier/client est contractuelle, et relève du droit
commun des contrats > R contractuelle & précontractuelle.
Le banquier est tenu de certains devoirs et peut engager sa R délictuelle envers certains clients (1240
& 1241 CC).

§1. Les devoirs au plan de la formation du contrat

A. Le devoir général d’information précontractuelle

On est en plein droit commun : droit civil & droit de la consommation.

1104 CC : les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de BF. C’est une disposition d’OP.
Il existe aussi un devoir d’information précontractuelle, repris à 1112-1 CC : « la partie qui connaît
une information dont l’importance est déterminante pour l’autre doit l’en informer. Cette information est
due lorsqu’une partie fait confiance à son cocontractant. Ont une importance déterminante les informations
qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la nature des parties ». En matière
bancaire, le client fait confiance à l’EDC, investi par l’agrément. Et le client non expérimenté sera toujours
plus volontiers le bénéficiaire de cette obligation d’information. Le contrat bancaire est un contrat
d’adhésion : se prend comme un tout, ne peut se négocier. Dans la réforme des contrats, en plus des clauses
abusives chassées, depuis la réforme de 2016, 1110 & 1171 CC : « les clauses créant un déséquilibre
significatif entre droits et obligations dans un contrat d’adhésion sont réputées non écrites ».

L111-1 Cconso : obligation générale d’information de la part des fournisseurs de biens/services au


profit des consommateurs sur les caractéristiques essentielles des prix et services proposés. Ca concerne
également les banques.

L’EDC devra remettre à son client des écrits pour rapporter la preuve de son information du client.

B. Le devoir de mise en garde

Dans certaines hypothèses, la seule délivrance d’une information brute ne suffit pas. La JP fait peser
sur le banquier un devoir de mise en garde des risques inhérents à telle ou telle opération. Ce devoir joue
dans 2 séries d’hypothèses (non exhaustif) :
- A l’encontre de l’emprunteur non averti : le banquier doit alerter le client sur les risques d’endettement
excessif (Cass. Ch. mixtes, 29 juin 2007). De même, il existe à l’encontre de la caution non avertie.
Après la mise en garde, il peut contracter : pas de devoir d’abstention.
- A l’encontre de l’investisseur non averti. Cass. Com. 18 mai 2016 : la banque dispensatrice de crédit,
qui n’a pas à s’immiscer dans les affaires de son client pour apprécier l’opportunité des opérations, n’est
pas tenue d’une obligation de conseil mais seulement de mise en garde.

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§2. Les devoirs au plan de l’exécution du contrat

Exécuter les conventions de BF signifie de façon loyale. Le banquier doit se comporter loyalement
auprès de ses clients, mais aussi de ses pairs (autres établissements), et également de ceux qui ne sont pas
ses clients. Un banquier ne saurait utiliser les informations d’un client A au profit d’un client B (violation du
secret bancaire) ou à son profit personnel (conflit d’intérêt).
Le contrôle interne de la banque se fait par un déontologue.

SECTION 2 : Les devoirs spécifiques au banquier

Le banquier est tenu de devoirs qui lui sont propres. Ces devoirs tiennent notamment au statut
bancaire et au rôle des banques dans la création de monnaie scripturale, mais aussi dans la gestion des flux
financiers. L’idée d’une police bancaire n’est jamais absente totalement du droit positif. C’est assez
largement l’ACPR qui veillera à la déontologie des banques, quitte à prononcer des sanctions
administratives.
Plusieurs raisons aux devoirs du banquier :
- La profession bancaire comporte des risques spécifiques : la participation d’activités illicites.
- C’est un rappel : les banques doivent se soumettre à des exigences, des standards élevés > elles doivent
se montrer vertueuses et dignes du monopole dont elles jouissent.
Ce particularisme de l’activité bancaire conduit à un renforcement du devoir des banques dans leurs
relations avec la clientèle en particulier. On parle des devoirs professionnels, statutaires, institutionnels du
banquier : distinction entre devoirs du droit commun et devoirs relevant de la qualité de banquier. Ce sont
plus des normes de conduite qu’on attend des EDC.
Ces devoirs dérivent pour certains expressément de la loi, pour d’autres, de la JP (forçage du contrat :
1194 CC > ex : obligation de sécurité dans le contrat de transport).

§1. Le devoir de non ingérence

C’est le commandement fait par le juge à l’origine au banquier : tu ne t’immisceras pas dans les
affaires de ton client = devoir de non immixtion. Ce devoir renvoie à la qualité d’intermédiaire de l’EDC.
Cet EDC est un outil au service de certaines finalités, mais il n’est pas en charge des affaires de son client. Il
ne peut se substituer à son client dans la gestion de ses affaires.

A. Les sources du devoir de non ingérence

On fait généralement remonter ce devoir à Cass. 28 janvier 1930.


Ajd, ce devoir se trouve dans certains articles, notamment du Cconso. L761-2 Cconso traite du
surendettement des particuliers et des sanctions civiles qui peuvent être prononcées dans ce cadre : « l’EDC
qui tient le compte du déposant […] conformément à ses devoirs de non immixtion et de diligence […] ».

B. Les fondements du devoir de non ingérence

La doctrine considère que ce devoir est fondé sur le droit de chacun au respect de sa vie privée (9
CC).
On peut aussi le fonder sur 8 CEDH : le droit au respect de la vie privée et familiale. Mais ce droit
vaut pour les P physiques mais non pour les entreprises.
Le vrai fondement, pour le prof, est donc la liberté d’entreprendre : la liberté du commerce et de
l’industrie, garantie constitutionnellement ajd, comporte comme élément la liberté de gérer ses affaires et de
prendre ses décisions de gestion commerciale.

Il y a un autre pôle : le devoir de non ingérence protège le client, mais également le banquier > on ne
va pas lui coller la R de surveiller ce que fait tlm, tout le temps.

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C. La teneur du devoir de non ingérence

Ce devoir emporte 2 propositions :


- Négative : le banquier n’a pas le devoir d’empêcher son client d’accomplir un acte irrégulier, inopportun
ou dangereux. C’est à tempérer : ça se retrouve dans le devoir de vigilance. Le principe reste celui de la
réserve. Cass. Com. 30 janvier 1990 : des chèques litigieux ne présentaient aucun indice de falsification
pouvant être décelés par un employé de banque normalement avisé. La banque n’avait pas à s’interroger
sur la raison d’encaissement d’un montant plus élevé que d’habitude en s’immisçant dans les affaires de
son client. Cass. Com. 14 octobre 2008 : un client a fabriqué des fausses formules de chèques au moyen
de photocopies. La banque a traité des chèques forgés et fabriqués comme des vrais. On l’a accusée
d’avoir encouragé le client à poursuivre ses falsifications (+3 ans). C’est le client qui a des remords et va
jusque devant la Ccass pour reprocher à la banque de ne lui avoir pas dit d’arrêter. Pour la Ccass, le
devoir de non ingérence fait interdiction à un EDC d’intervenir pour empêcher son client d’accomplir un
acte illicite. Cela veut dire que pour tout ce qui concerne les dépôts, retraits, remises de chèques, l’EDC
a le droit de ne pas rechercher l’origine et la destination des fonds (exceptions : anomalie apparente +
lutte contre le blanchiment). De même, le banquier n’a pas à dire au client qu’il est en train de faire une
mauvaise affaire. L313-11 s. CMF : devoir de mise en garde de la banque à l’égard d’un consommateur
sur les risques qu’il prend au stade de la solvabilité. Mais il n’est pas tenu de le conseiller.
- Positive : le banquier a l’obligation d’exécuter les ordres de ses clients, quand bien même ils ne lui
paraitraient pas opportuns.

§2. Le devoir de secret

A. Les sources du secret bancaire

Pendant longtemps, aucun texte n’instituait un devoir exprès pour le banquier de secret bancaire.
Mais depuis la nuit des temps, il sait qu’il est tenu à une certaine discrétion. On s’est demandé si on ne
devait pas ranger les banquiers au rang des « confidents nécessaires » = les P auxquelles on doit, à un
moment de sa vie, faire confiance (ex : notaire, médecin, prêtre).
Il est revenu à la LB de 1984 d’y répondre : depuis, selon 226-13 & 226-14 CP, le secret bancaire est
sanctionné pénalement par 1 an d’emprisonnement et 15k€ d’amende.

Ajd, le CMF comporte une Section 5, « le secret professionnel » :


- L511-33 CMF : les dirigeants de l’EDC sont tenus au secret professionnel. Il s’étend également aux
employés.
- Les P qui, dans le cadre de leurs fonctions, ont reçu des informations confidentielles de la part d’EDC
(ex : autorités de surveillance et leur personnel ; le personnel de la BDF).

B. Les fondements du secret bancaire

C’est la protection du client, et la relation de confiance entre le client et l’EDC. Le secret bancaire a
pour but de renforcer la confiance du client dans l’institution bancaire. Pas de confiance sans secret.
Si l’on cherche des fondements textuels, on va trouver le respect de la vie privée du client : 9 CC.
Nos dépenses disent tout de ce que nous sommes.
Autre fondement : la protection du secret des affaires en général. 9 CC protège les P physiques. Le
secret des affaires protègera mieux les entreprises.

Ce secret bancaire va conduire à pouvoir être opposé par l’EDC à des tiers. Il s’oppose en principe à
toute communication couverte par le secret à des tiers.
Contrairement à d’autres secrets professionnels dits absolus, le secret bancaire est relatif. Il est
nécessairement d’intérêt privé : selon la LME de 2008, le bénéficiaire du secret peut renoncer à ce dernier et
autoriser le banquier à révéler des informations couvertes par le secret. Ajd, la conception de privatisation
l’emporte : on peut disposer du secret bancaire.

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C. La teneur du secret bancaire

1. Les bénéficiaires du secret bancaire

a) Principes généraux

Le secret profite au client de l’EDC, à l’égard des tiers qui souhaiteraient obtenir des renseignements.
Mais les textes ne limitent pas le périmètre de ces bénéficiaires. On admet que le secret bancaire protège les
clients mais aussi l’ensemble des P avec qui le banquier est en relation, même indirecte, à l’occasion de
laquelle il a reçu des informations confidentielles.

b) Difficultés d’application

Concernant les P physiques : celui qui a procuration sur le compte d’un client, à l’évidence, ce n’est
pas véritablement un tiers vis-à-vis du client, et donc on ne va pas lui opposer le secret mais le protéger au
contraire, d’après Cass. Com. 25 février 2003 : une P morte reçoit des virements de la CNAM. Celui qui a
procuration sur le compte ne prévient pas la caisse que le bénéficiaire est décédé. La caisse diligente une
enquête pour fraude à la SS et demande à la banque de donner le nom du mandataire. Selon la Ccass, cela se
heurte au secret bancaire, qui s’étend aux P qui ont pouvoir de faire fonctionner le compte. C’est un
empêchement légitime qui peut être opposé au juge civil. Mais depuis L114-19 CSS : les caisses ne peuvent
plus se voir opposer le secret professionnel.
De même, en matière d’encaissement de chèques, une JP nourrie considère que le porteur d’un
chèque peut être couvert par le secret bancaire même s’il n’est pas le client de l’EDC, et que c’est l’émetteur
du chèque qui lui est le client. La JP a plusieurs fois refusé de communiquer au client tireur du chèque la
photocopie du verso d’un chèque encaissé par un bénéficiaire non client. La JP admet que l’on transmette le
recto, mais pas le verso (numéro de compte & signature du client). Cass. Com. 21 septembre 2010 : la
banque, en divulgant les informations figurant au verso du chèque, porte atteinte au secret dû au tiers
bénéficiaire de ce chèque. Le secret professionnel, ici, s’étend non au client de la banque mais au tiers. Le
devoir du banquier est donc spécifiques : il profite au client mais pas que.
Quid du tuteur ? Le tuteur, l’administrateur légal d’un client P physique, ne sont pas des tiers p/r à ce
client. Ils ont la charge de veiller aux intérêts de la P protégée, ce ne sont pas des tiers, ils ne peuvent se voir
opposer ce secret, ils peuvent accéder aux informations.
Quid du conjoint et des proches ? Le conjoint est un tiers p/r à son époux. Chacun jouit d’une
indépendance envers l’autre. Les proches de la famille d’un client ne peuvent avoir accès aux informations
confidentielles de ce dernier. Ils ne le pourront qu’à son décès s’ils sont l’héritier direct. Toutefois, dans
l’hypothèse d’un compte joint, cela postule une levée du secret bancaire dans une certaine mesure : chacun a
accès au solde, au retrait effectué sur le compte bancaire, mais aucun n’a accès au détail des dépenses faites
sur la CB de son conjoint = autonomie de chaque époux.
Les héritiers du défunt prolongeant la P de celui-ci, le banquier doit en principe leur répondre. Mais
on considère généralement qu’il n’a pas à leur communiquer des détails susceptibles de porter atteinte à la
vie privée du défunt.
Quid de la caution d’un client ? CA de Colmar, 7 juin 2007 : le secret bancaire est opposable à la
caution d’un client. Mais Cass. Com. 16 décembre 2008 : cassation, car il appartient au banquier de
prouver à la caution le montant dont il lui réclame règlement. Elle peut obtenir des éléments de preuve
nécessaires à l’établissement de la dette principale.

Concernant les P morales : les dirigeants et membres des CA et CS agissant collectivement ne


peuvent se voir opposer le secret bancaire de la P morale qu’ils dirigent, ce ne sont pas des tiers. Au
contraire, les associés à R limitée peuvent se voir opposer le secret bancaire de la sté. En revanche, les
associés à R illimitée prennent de tels risques qu’ils ne peuvent se le voir opposer.
Quid d’une filiale p/r à sa mère ? Elle a l’autonomie juridique : elle ne peut recevoir d’informations
confidentielles concernant sa mère, et à l’inverse la mère ne peut communiquer d’informations sur la filiale
à la banque.

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Différent pour les succursales, qui n’ont pas d’autonomie : admis qu’une banque transmette au
dirigeant d’une sté détenant une succursale des informations sur celle-ci.

Concernant les banques les unes envers des autres : il n’y a pas de texte permettant le partage de
secrets entre banques. Cependant, quand elles interviennent ensemble, elles se libèrent de ce secret.

2. Les informations couvertes par le secret bancaire

Le secret bancaire ne couvre que les informations confidentielles. Elles répondent à certaines
caractéristiques :
- Non publiques.
- Précises.
- Chiffrées (ex : crédit, revenus, solde, indications médicales).
Le banquier ne saurait déférer à la demande de renseignement qu’un tiers formulerait sur la situation
financière de l’un de ses clients, comme à la demande d’un autre client.
Le secret bancaire n’est pas général : il ne concerne que certaines informations confidentielles. Si le
banquier ne peut violer le secret bancaire, en revanche il a le droit de délivrer à des tiers des informations
d’ordre général : non chiffrées, non précises (ex : stabilité du client, bon ou mauvais crédit). C’est une
pratique ancienne qui permet la pratique des renseignements commerciaux. C’est ce que dit Cass. Com. 18
septembre 2007 : l’obligation au secret professionnel à laquelle sont tenus les EDC leur interdit de fournir
au client qui en ferait la demande des renseignements autres que simplement commerciaux ou d’ordre
général et économique sur la solvabilité d’un autre client.

3. La durée du secret bancaire

La durée est pérenne : le devoir pèse sur l’EDC aussi longtemps que nécessaire pour le respect des P
protégées par le secret. En principe, le fait que le bénéficiaire du secret ne soit plus client n’a pas la
possibilité de délier la banque du secret. Le fait que le client décède ne la libère pas non plus du secret.

D. Les exceptions et les inopposabilités du secret bancaire

Il existe des dérogations de +/+ importantes au secret bancaire. On est dans une sté qui veut plus de
transparence.
L511-33, I al. 2 CMF énonce l’inopposabilité générale du secret à certaines institutions et dans
certains cas.

1. L’inopposabilité du secret bancaire au juge pénal

Le secret ne peut être opposé dans le cadre d’une procédure pénale. Le banquier doit témoigner et
communiquer toutes les informations demandées dans le cadre de la phase d’instruction. En revanche, en cas
de simple enquête préliminaire, le secret subsiste et est opposable aux OPJ.

2. L’opposabilité circonstanciée du secret bancaire aux juges civil ou commercial

Si le secret est inopposable au JP, il est en principe opposable au juge civil & au juge commercial.
C’est pourquoi il doit en principe être observé dans les procédures civiles et commerciales.
Mais 11 CPC : « les parties sont tenues de concourir à la manifestation de la vérité. Le juge peut
ordonner la production de tout doc détenu par des tiers, s’il n’existe pas d’empêchement légitime ». Le
secret bancaire est l’archétype de l’empêchement légitime : si la banque viole le secret bancaire, elle encourt
un délit. C’est légitime pour elle de ne pas déférer à des mesures d’instruction.
Ce n’est donc que si on a des textes spéciaux que le juge pourra passer outre le secret bancaire :

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Matière civile : dans le cadre d’une procédure de divorce, 259-3 al. 2 CC permet la levée du secret
bancaire. Le juge peut faire procéder à toute recherche utile auprès des teneurs de compte sans que le secret
bancaire ne puisse lui être opposé.
En matière de saisie, plusieurs articles permettent de lever le secret bancaire.
- Cas général (162-1 CPCE) : saisie-attribution d’une somme sur un compte bancaire. Lorsqu’une saisie
est pratiquée entre les mains d’une banque, elle doit renseigner le créancier saisissant sur l’état du
compte bancaire du client.
- Cas renforcé (152-2 CPCE) : en cas de difficulté d’exécution rencontrée par l’huissier, les banques
doivent indiquer le nombre et la localisation des comptes auprès de divers EDC.

Matière commerciale : en matière de PC, selon L712-6 Cconso, le banquier ne peut opposer le secret
au président du TC pour qu’il puisse superviser la procédure.
En matière de PC dure (RJ & LJ), le secret bancaire ne peut être opposé au juge-commissaire > 623-
2 Ccom : il peut obtenir toutes les informations sur les risques bancaires, relevés bancaires…

3. L’inopposabilité du secret bancaire aux autorités de surveillance

C’est évident : elles doivent pouvoir contrôler. L’ACPR, la BDF, la BCE ne peuvent se voir opposer
le secret. C’est parce qu’elles ont accès aux informations qu’elles sont tenues elles-mêmes au secret
professionnel.
Le secret bancaire, par analogie, n’est pas opposable au FGDR > affirmé dans Cass. Com. 30 mars
2010 : le crédit martiniquais tombe en faillite. La commission bancaire avait recueilli des informations sur la
défaillance et les fautes des dirigeants dans un rapport d’inspection. Le FGDR demandait l’accès au rapport
pour établir les fautes et demander au crédit martiniquais de rembourser. La Ccass a admis que le FGDR
puisse s’appuyer sur le rapport de la commission bancaire.

4. L’inopposabilité du secret bancaire à l’administration fiscale et au TRACFIN

Le secret n’est pas opposable au fisc, ni au TRACFIN, qui est le destinataire des soupçons de
blanchiment de K & du terrorisme.
Ajd, le secret bancaire n’est pas non plus opposable dans le cadre d’enquêtes pour fraude à la SS.

5. Les communications autorisées

Depuis la LME de 2008, le législateur a ouvert des exceptions au secret bancaire, dans 2 séries
d’intérêts :
- Communication par les banques aux agences de notation : ces agences notent le bon crédit de tels ou tels
débiteurs/entreprises/Etats...
- Communications afin de faciliter le refinancement des banques (511-33, 6° CMF) : pour se refinancer, la
banque doit délivrer au cessionnaire les informations sur la solvabilité.

§3. Le devoir de vigilance

A. Le devoir de vigilance de droit commun

On le qualifie d’« obligation générale de prudence » > erroné et imprécis car vigilance et prudence ne
sont pas identiques.
Le devoir de vigilance est profondément paradoxal : par nature, il vient affronter le devoir de non
ingérence. Idée : un EDC ne peut accorder une confiance aveugle à son client, quand bien même il serait
ancien ou fortuné. « L’attention du banquier doit rester en éveil » (Gavalda & Stoufflet). Ainsi, si s’opèrent
certains événements, il doit ouvrir les yeux, sortir de la non immixtion et réagir. Exemples :
- Avant d’ouvrir un compte, le banquier doit vérifier l’adresse.
- Le banquier doit comparer la signature du chèque au spécimen fourni.

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Mais puisque le banquier ne peut tout vérifier tout le temps, la non ingérence commande que la
vigilance reste au second plan toutes les fois qu’on n’est pas en présence d’une anomalie ou irrégularité
manifeste. Il doit identifier 2 séries d’anomalies :
- Les anomalies matérielles (formelles) : si un chèque apparaît falsifié après un simple examen, R de la
banque engagée. Cass. Com. 7 juillet 2009 : une banque a encaissé un chèque détourné au profit d’un
autre bénéficiaire. La banque oppose son devoir de non ingérence. Or il y avait sur le recto du chèque
une 4e série de numéros révélateurs d’une fraude.
- Les anomalies intellectuelles (substantielles) : concernant le montant, la complexité, la fréquence
inhabituelle au regard des habitudes, des possibilités ou des besoins du client (ex : chèque d’un
trafiquant de stups au profit d’un trafiquant d’êtres humains).
SEMAINE 6
Ce devoir rentre en conflit avec le devoir de non ingérence. C’est ce dernier qui constitue le principe,
le devoir de vigilance se trouvant en réserve. S’il se produit un événement de nature à éveiller la vigilance,
celle-ci va repasser au 1e plan : c’est le cas de l’anomalie matérielle ou de l’anomalie intellectuelle.
Cass. com. 11 mai 2010 : une banque a manqué à son devoir de vigilance en ne constatant pas qu’il
y avait qqc d’anormal à ce que le client fasse l’objet de saisies conservatoires, et que pendant qu’elles étaient
opérées, le dirigeant de la sté se faisait remettre +420k€ en espèces. Cela ne pouvait qu’alerter la banque, qui
aurait dû alerter le client sur les détournements de fonds que son dirigeant était en train d’effectuer. Cass.
com. 2 novembre 2005 : c’est au stade même de l’ouverture du compte bancaire que la banque a manqué de
vigilance. La carte ID était périmée et portait une adresse différente. Cela aurait dû alerter la banque qui n’a
pas respecté son devoir de vigilance.
Si des anomalies apparentes se révèlent, il doit refuser de prêter son concours à l’opération en Q°,
illicite elle-même ou préjudiciant des tiers. La banque est invitée, selon le cas, à se rapprocher de son client
pour savoir ce qu’il se passe.

B. Le devoir de vigilance de droit spécial

Il résulte de la lutte contre le blanchiment de K et le financement du terrorisme.

1. La problématique du blanchiment

Le blanchiment de K consiste à recycler des fonds d’origine criminelle résultant du trafic de


stupéfiants, d’êtres humains, d’armes. Cette technique de blanchiment comporte 3 étapes :
- Le placement (prélavage) : introduire des fonds illégaux dans le système financier légal en multipliant
les versements de petites sommes dans de multiples commerces (casinos, bureaux de change, restaurants,
discothèques).
- L’empilement (lavage) : faire circuler les fonds le plus possible, afin d’en masquer l’origine illicite >
achats, ventes, placements. L’idée est de diluer les fonds frauduleux.
- L’intégration (recyclage) : réinvestir l’argent dans des activités licites.
Les chiffres du blanchiment sont difficiles à connaître. Rapport de l’ONU en 2009 : 2,7% du PIB
mondial = +2600MM$ de blanchiment par an.
Pourquoi lutter contre ? Le blanchiment de K peut déstabiliser la monnaie, endommager la santé
financière des banques, contaminer des opérations financières légales, concourir à des mouvements
incontrôlés internationaux de K. Il a de graves coûts sociaux et politiques : il permet la corruption des
gouvernements, l’infiltration des autorités étatiques, judiciaires, dans de nombreux pays.
Les EDC ont été nécessairement au cœur de ce système. Pour blanchir, à un moment donné il faut
passer par un compte bancaire. Les banques, parfois volontairement ou non, ont été concernées par ce
blanchiment.
Depuis une ordonnance de 2009, la lutte contre le blanchiment de K a été étendue à la lutte contre le
financement du terrorisme, car parfois la vente de drogues permet le financement d’actions terroristes.

2. La genèse de la législation

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Cela fait longtemps que des travaux sont menés au sein d’autorités internationales. Le GAFI, un
organisme intergouvernemental, est le Groupe d’action financière, qui rassemble 35 pays + 2 organisations
régionales. Il a été créé en 1989. Ses travaux n’ont pas de portée normative, mais ont inspiré beaucoup de
législations nationales, et la législation communautaire.
En France, 1e loi : loi du 12 juillet 1990 sur le blanchiment de K. Elle n’a eu de cesse d’être révisée
et renforcée. L’UE s’y est intéressée avec une directive DAB 1 de 1991. Puis une DAB 2 de 2001. Puis une
DAB 3 de 2005. Enfin, une DAB 4 de 2015. La DAB 3 a été transposée en France par l’ordonnance de
2009 et le décret de 2010. La DAB 4 a élargi considérablement le champ des P soumises à des obligations
de déclaration de soupçons (davantage d’autorités doivent être vigilantes) et a renforcé une coopération €
entre les organismes de lutte contre le blanchiment. Cette DAB 4 a intégré des recommandations du GAFI
(les dernières datent de 2012). Elle a été transposée par une ordonnance de 2016, renforçant le dispositif
français de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme.
Toutes ces règles se trouvent consolidées dans un Titre 6 du Livre 5 du CMF, « Obligations relatives
à la lutte contre le BK, le FT et les paris et jeux prohibés » (on l’appelle le dispositif LCB-FT) > L561-1 s
CMF.

3. La teneur des devoirs de vigilance

Ce dispositif s’applique aux EDC, mais aussi aux autres professionnels, toujours plus nombreux,
assujettis à ces obligations de vigilance. La liste est donnée par L561-2 CMF : EDC, établissements de
paiement, établissements de monnaie électronique, PSI, intermédiaires de financement participatif,
changeurs manuels, assureurs, mutuelles, experts comptables, avocats, huissiers, notaires, commissaires-
priseurs judiciaires, AJMJ, avocats au CE & Ccass, tous les opérateurs bancaires & professions du droit et
du chiffre.

Ces devoirs s’articulent autour de 2 pôles :

a) Les obligations de vigilance

 La vigilance de base.

C’est la vigilance commune, qui pèse sur le banquier avant son entrée en relation avec le client mais
également tout au long de cette relation. Au titre de cette vigilance, le banquier doit d’abord se renseigner
sur l’identité de son client avant l’entrée en relations d’affaires, donc avant l’ouverture d’un compte. C’est le
principe KYC (Know Your Customer).
Cela veut dire que le banquier doit vérifier l’identité de son futur client par des documents écrits
probants et des moyens adaptés, et recueillir tous les éléments pertinents sur son client potentiel, sur l’objet
et la nature de la relation bancaire envisagée.
Si le client ne paraît pas être le bénéficiaire véritable de l’opération projetée, le banquier doit
rechercher l’identité du bénéficiaire effectif. Celui-ci est défini par L561-2-2 CMF : c’est la P physique qui
contrôle directement ou indirectement le client, ou la P pour laquelle une opération est exécutée ou une
activité réalisée. Il faut savoir si la P qui se présente n’est pas un prête-nom cachant un Escobar !
Cette vigilance doit s’exercer aussi pendant la relation d’affaires, 1x celle-ci nouée. L561-6 CMF
impose au banquier une vigilance constante et une connaissance actualisée du client, et un examen attentif
des opérations effectuées. Le banquier doit s’assurer de la cohérence entre la connaissance actualisée de son
client et les opérations qu’il passe. C’est un travail très lourd, très contraignant pour les EDC. A des
conditions strictes, ils peuvent déléguer cette analyse à des tiers.
Si le client qui se présente est un client occasionnel (= opération ponctuelle), s’appliquent des règles
particulières : le banquier doit identifier le client ou le bénéficiaire effectif dès lors que l’opération envisagée
est de +15k€, même sans soupçon de blanchiment.
La conséquence de cette vigilance de base est la suivante : si le banquier ne peut identifier d’élément
pertinents rassurants, il doit s’abstenir d’entrer en relations d’affaires avec lui. S’il l’est déjà et que sa
connaissance actualisée l’invite à avoir des doutes, il doit mettre un terme à cette relation, dès qu’un risque
de blanchiment apparaît, même faible, quitte à effectuer une déclaration.

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 La vigilance allégée.

Elle peut être atténuée dans 3 séries d’hypothèses :


- Le risque de blanchiment paraît faible. Mais, a minima, l’EDC doit identifier son client à l’origine.
- Le client ou le produit bancaire envisagé figure sur une liste prévue par décret (R561-15 & R561-16
CMF) : assurance-vie de +1000€, crédit à la consommation de -1000€…
- Le bénéficiaire est lui-même un EDC de l’UE.

 La vigilance renforcée.

Elle est renforcée dans 3 séries d’hypothèses :


- La banque est correspondante ou distributeur d’instruments financiers pour un établissement situé dans
un pays hors UE et ne présentant pas de garanties équivalentes.
- Le risque de blanchiment de capitaux paraît élevé à raison du client, du produit ou de l’opération.
- Le banquier est confronté à une opération particulièrement complexe, ou d’un montant inhabituellement
élevé, ou ne paraissant pas avoir de justification économique ou d’objet licite.
Dans ces cas, le banquier doit se renseigner sur l’origine des fonds, sur la destination des fonds et sur
l’identité du bénéficiaire de ces fonds (art. L561-10-2, II du CMF).

Il y a aussi des obligations de vigilance complémentaires : on les rencontre lorsque le client n’est pas
physiquement présent lors de son identification, ce qui doit susciter une suspicion de la part du banquier et la
crainte d’un prête-nom, d’une fausse identité. La banque doit demander une pièce d’identité supplémentaire,
une confirmation d’identité par un tiers indépendant, ou encore qu’un virement soit opéré d’un compte déjà
ouvert par ce client dans un autre pays d’Europe vers son compte.
On rencontre cette vigilance complémentaire dans tous les cas d’e-banques : on ne rencontre pas le
banquier physiquement. Les banques en ligne sont assujetties à cette obligation complémentaire.

Les informations collectées par la banque doivent être conservées durant 5 ans après la clôture du
compte ou la cessation d’affaires avec le client.

b) Les obligations de déclaration

 Objet des déclarations.

La déclaration doit porter sur toutes les sommes inscrites en compte, et sur toutes les opérations d’un
client, et ce dans les cas suivants (L561-15 CMF) : le banquier sait, soupçonne ou a de bonnes raisons de
soupçonner qu’elles proviennent d’une infraction passible d’une peine privative de liberté de +1 an, ou
qu’elles procèdent du financement du terrorisme, ou de fraude fiscale. Depuis 2009, c’est toutes les peines
privatives de liberté de +1 an : vol, escroquerie, abus de confiance, extorsion. Cela a facilité le travail des
banques : avant, difficile d’identifier l’infraction. Ce soupçon s’étend aussi à la tentative du client de réaliser
des opérations sur des fonds eux-mêmes issus d’infractions.

 Modalités de la déclaration.

Cette déclaration se fait auprès du TRACFIN : cellule spécialisée anti-blanchiment qui dépend du
MDF.
Il faut distinguer ces opérations des COSI (Communications systématiques d’informations) qui se
font aussi auprès du TRACFIN : selon R561-31-2 CMF, la banque doit lui communiquer dans les 30 jours
de façon automatique (même sans soupçon) tous les opérations de banque faites par un client sur un même
compte pour un montant supérieur à 10.000 € par mois calendaire.
Cette déclaration est faite par écrit, par un déclarant spécialement habilité à cette fin dans un EDC. Il
y a un système interne de répartition des pouvoirs.

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En 2015, TRACFIN a reçu plus de 42.000 déclarations de soupçons, soit 3 fois plus qu’en 2008
(14.000). C’est un système efficace rentré dans les mœurs. Les 2/3 proviennent des établissements de crédit,
le tiers restant des autres entités qui y sont tenues.

 Suites de la déclaration.

Les banques bénéficient d’une immunité quand bien même elles auraient déclaré un soupçon
infondé. Elles n’encourent aucune responsabilité envers le client pour le cas où elles auraient déclaré un
soupçon infondé. L’objectif est d’encourager les banques à déclarer.
La déclaration de soupçons doit rester totalement confidentielle : la banque ne peut informer son
client qu’il a ou va procéder à une déclaration auprès de TRACFIN. Cela s’étend aux tiers, que le banquier
ne peut prévenir. C’est une dérogation au secret des affaires. La peine encourue est une amende de 22.500
€ : art. L574-1 du CMF.
Le fait de ne pas répondre à une demande de TRACFIN dans le cadre d’une enquête est passible d’un
an d’emprisonnement et 15.000 € d’amendes.
Le banquier doit s’abstenir d’exécuter l’opération, et TRACFIN pourra s’opposer à l’exécution de
l’opération pendant une certaine période, et saisir le Procureur de la République aux fins d’enquête.

Si une banque qui aurait dû déclarer ne déclare pas, elle encourt des sanctions disciplinaires
prononcées par la Commission des sanctions. De même, si son système de détection est défectueux, elle est
sujette à des sanctions disciplinaires.
Encourt-elle des sanctions pénales ? En principe, non. Elle en encourt si elle informe son client, mais
pas si elle n’a pas déclaré. Toutefois, dans des situations très graves, un délit de blanchiment peut être retenu
contre l’établissement de crédit qui s’est rendu complice de l’opération en ne déclarant pas
intentionnellement.
Quant aux sanctions civiles, on s’est demandé si la banque pouvait engager sa responsabilité civile
envers un client ou un tiers qui aurait souffert de ce manquement à la vigilance. Com. 28 avril 2004 : une
banque n’a pas réagi alors que le montant des opérations était supérieur à 1 million de francs. Selon le client,
l’absence de vigilance de la banque l’a conduit à subir un détournement de fonds. La CASS énonce que
l’obligation de vigilance a pour seule finalité la détection de transactions portant sur des sommes en
provenance du trafic de stupéfiants ou d’activités criminelles organisées. Ces informations ne peuvent être
retenues à d’autres fins. La victime d’agissements frauduleux ne peut se prévaloir de l’inobservation de cette
obligation pour réclamer des DI à la banque car la seule finalité est la détection des transaction et les textes
n’ont pas pour but de protéger les clients.

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LECON 6 : Le droit commun des comptes bancaires

Ce sont le principal vecteur de réception des fonds remboursables du public. Seuls les établissements
de crédit peuvent recevoir des fonds remboursables du public. Ces comptes bancaires s’inscrivent donc dans
le monopole des établissements de crédit. Le compte est également un instrument qui permet la réalisation
d’opérations de crédit. Mais c’est aussi le support des services de paiement.
On envisagera ici le droit commun des comptes de dépôt et des comptes courant.
On ne verra pas le compte de paiement, institué par directive SEPA de 2007, ne permettant pas à
l’établissement de crédit de disposer des fonds remis par le client, limité à l’utilisation des services de
paiement.

Qu’est-ce qu’un compte bancaire ? pour Michel Vasseur, c’est un tableau des crédits et des dettes
réciproques de 2 P. C’est 2 choses :
- Une entité d’ordre comptable : me compte bancaire est un document comptable qui assure la traçabilité
matérielle et temporelle des opérations d’un client avec son banquier. Le compte va enregistrer les
entrées et les sorties. Ce compte est identifié par le nom du client et par une série de chiffres qui désigne
l’établissement de crédit, le guichet teneur de compte, et le client. Il est identifié par un IBAN (numéro
international de compte bancaire) : c’est une suite de caractères qui permet d’identifier le compte du
client partout dans le monde. Matériellement, cet instrument comptable est constitué de 3 colonnes : une
colonne pour les débits, une colonne pour les crédits, et une colonne pour le solde du compte. Les
opérations portées au crédit du compte sont celles qui alimentent positivement le compte : ce sont les
dépôts du client sur le compte. On distingue parfois les dépôts directs et indirects en doctrine. Le dépôt
direct est le versement d’espèces, mais aussi la réception d’un virement. Le dépôt indirect est la remise
par le client à son banquier d’un effet ou d’un instrument de paiement qu’il le charge d’encaisser. C’est
un dépôt irrégulier au sens du droit civil : translatif de propriété de la somme déposée au banquier, à
charge de restitution, alors qu’en principe le compte de dépôt n’est pas translatif de propriété. Cela
entraine une créance de restitution du client sur son banquier. Les opérations de débit peuvent se traduire
soit par une restitution directe des fonds (guichet ou CB), ou par des dispositifs de restitution
indirecte (le client donne l’ordre au banquier de régler un tiers qui est son créancier).
- Une entité d’ordre juridique : la doctrine majoritaire a conduit à rapprocher le compte de dépôt du
compte courant, et considère que tout compte produit par nature un effet de règlement des sommes
inscrites sur ce compte. Les créances et dettes réciproques qui entrent en compte sont réglées et éteintes
par le fait de l’entrée en compte. Le compte a un effet juridique de règlement des créances et dettes
réciproques. Il n’est pas qu’un instrument comptable de traçabilité. Ce compte, s’il est juridique, c’est
également parce qu’il est la résultante d’une convention conclue avec le banquier : on considère que la
convention de compte bancaire est le premier acte de la qualité de client d’un établissement de crédit. De
sorte que la convention de compte bancaire participe de ce qu’on considère comme un contrat-cadre de
services bancaires.

Ce compte est gouverné par des règles bancaires spéciales, mais procède aussi du droit commun des
contrats et du droit des contrats spéciaux (dépôt, mandat et prêt).
En droit français, on a un système de poupées russes : le droit commun des contrats qui chapeaute
toutes les relations contractuelles et un droit spécial qui pour telle ou telle catégorie de contrat déroge ou
développe le droit commun. On a des sous-espèces de contrat : selon qu’un dépôt est fait auprès d’une
banque ou d’un autre commerce, les règles ne sont pas les mêmes.
On peut se pencher sur l’analyse juridique du compte bancaire. Un auteur, Nicolas-Henri Aymeric,
défend l’analyse selon laquelle le compte n’est pas un mécanisme autonome des obligations mais un bien,
plus précisément une universalité de fait.

SECTION 1 : L’ouverture du compte

§1. La décision d’ouverture du compte

A. Le principe de liberté d’ouverture du compte bancaire

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Le compte bancaire est la résultante d’une convention. En droit civil, on est libre de conclure un non
un contrat, et de choisir son cocontractant. En principe, la relation entre un client et sa banque relève de cette
liberté contractuelle. En théorie, le client est libre d’ouvrir ou non un compte bancaire, et la banque est libre
d’accepter ou non l’ouverture.

Le client est libre d’ouvrir ou non un compte bancaire. Mais s’il y a liberté ou non, la liberté du client
de choisir son cocontractant est limitée par le monopole des EDC. On ne peut que choisir au sein de ceux
qui ont été agréés par la BCE.
Le banquier est libre d’accepter ou non : cette liberté a toujours été consacrée sur le plan de l’octroi
de crédit, puisqu’il n’est pas obligé de prêter. Mais plus compliqué pour sa liberté d’ouvrir un compte. Peut-
il s’asseoir sur son monopole pour refuser de servir sa clientèle ? Malgré tout, depuis l’art. 89 de la Loi
bancaire de 1984, les banques ont été soustraites à la sanction du refus de vente ou de prestation de
services. Aujourd’hui, l’art. L121-11 du CCONSO sanctionne ce refus par un professionnel à un
consommateur. Les banques peuvent librement refuser l’ouverture d’un compte. Cette solution est encore
ajd inscrite dans le droit positif. On la retrouve à L131-71 CMF : la banque peut refuser de façon motivée de
fournir des formules de chèque à un client. Mais L312-1, II CMF prévoit que l’établissement peut rejeter la
demande d’ouverture de compte. Pourquoi alors qu’il dispose d’un monopole ? 2 raisons :
- la convention entre un banquier et son client relève d’un fort intuitu personae et de la confiance. On
choisit son cocontractant.
- Si le banquier refuse, il doit le faire au motif que l’intéressé peut bénéficier d’un compte de dépôt dans
les conditions mentionnées au III du même article. On sait que ce refus ne portera pas nécessairement de
conséquences car il existe un droit au compte.
Cette liberté ne doit être ni abusive, ni discriminatoire. Le banquier est libre, mais ne peut exercer
cette liberté de façon abusive. EX. S’il fonde son refus sur des considérations politiques, s’il attend trop
longtemps, ou refuse de façon discriminatoire. La HALDE avait précisé que le refus d’ouverture d’un
compte ne pouvait jamais être fondé sur des considérations de sexe, d’ethnie, de religion, etc.

B. La nécessité d’ouverture d’un compte dans certains cas

La loi impose souvent indirectement l’ouverture d’un compte. De plus en plus, le législateur fait la
chasse l’espèces : c’est ce qui permet le blanchiment, le trafic, l’emploi de travailleurs clandestins, la fraude
fiscale.
Art. L112-6, D112-3 et R112-5 du CMF : Si le débiteur a son domicile fiscal en France, il est interdit
de régler plus de 1.000 € en espèces. Le versement des traitements et salaires est interdit autrement que par
chèque ou virement pour plus de 1.000 €. Ces règles s’appliquent toutes les fois que le bénéficiaire a son
domicile fiscal en France et agit à titre professionnel.
Pour les autres cas, la somme est portée à 15.000 €.
Quant aux particuliers résidant en France, s’ils n’agissent pas pour des besoins professionnels, ils
peuvent faire des règlements en espèce jusqu’à 15.000 €.
Art. L123-24 du CCOM : tout commerçant est tenu de se faire ouvrir un compte dans un
établissement de crédit ou établissement de chèques postaux.

C. Le droit au compte

C’est une véritable exception à la liberté de ne pas ouvrir de compte. Il est prévu par L312-1, III du
CMF, initialement créé par la loi bancaire de 1984. Il a été étendu à plusieurs reprises, d’abord étendu par
la loi de simplification de 2011 à tout français même résidant hors de France, puis enrichi par la loi du 26
juillet 2013.
L’objectif est de rendre effectif le droit au compte proclamé en 1984. Ce droit au compte tend
aujourd’hui à être reconnu au plan européen. Directive de 2014 sur l’accès à un compte de paiement
assortis des prestations de base : le législateur européen a lui-même reconnu un droit au compte avec des
prestations bancaires de base. Mais le droit européen n’impose pas la gratuité des services bancaires de base.
Le droit français est plus protecteur en reconnaissant la gratuité de certains services bancaires.

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Une ordonnance et un décret du 22 décembre 2016 ont transposé la directive de 2014. L’apport
principal est de préciser la liste concrète de ces services bancaires de base.
Quel est le dispositif ? Il profite à toute personne, qu’elle soit physique ou morale : art. L312-1, I du
CMF. C’est le droit à l’ouverture d’un compte de dépôt dans l’établissement de crédit de son choix. Ce droit
profite même aux personnes frappées d’une interdiction bancaire, et même à un Français résidant hors de
France. Un ressortissant de l’UE agissant de façon non professionnelle peut également s’en prévaloir en
France. Tout cela sous réserve de ne pas déjà avoir un tel compte en France.

Si l’établissement de crédit refuse l’ouverture, depuis la loi du 26 juillet 2013, il doit remettre sans
délai, gratuitement et systématiquement à l’intéressé une attestation de refus d’ouverture de compte. Elle
doit informer immédiatement l’intéressé qu’il peut saisir la BDF et lui demander de lui désigner un autre
établissement de crédit.
Si l’intéressé est une personne physique, l’établissement doit même lui proposer d’agir auprès de la
BDF en son nom et pour son compte en ce sens, càd en qualité de mandataire. Cette demande peut
également émaner du département, d’une CAF, ou d’une association à but non lucratif pour les personnes en
difficulté.
La BDF doit désigner un établissement de crédit chargé d’ouvrir le compte. Cette désignation doit
s’accompagner de l’ouverture d’un compte de dépôt dans les 3 jours suivants.
2 précisions :
- quantitative : en 1985, quand le droit au compte est consacré, seules 3.000 demandes ont été faites
auprès de la BDF. En 2015, il y en a eu 62.000.
- qualitative : encore faut-il qu’il y ait certains droits bancaires de base reconnus à l’intéressé. Ce service
bancaire a été appelé service bancaire de base, et a été institué par la loi de 1998 de lutte contre les
exclusions. L’ouverture d’un compte est un élément d’inclusion sociale. Ces services bancaires de base
sont précisés par l’art. D.312-5 modifié par un décret de 2016 : ce sont l’ouverture tenue du compte, la
délivrance de RIB, la domiciliation de virement, l’envoi d’un relevé mensuel, l’encaissement de
chèques, le paiement par prélèvement, la consultation à distance du solde, dépôt et retrait d’espèce (DAB
ou guichet), et carte de paiement permettant de payer sur internet. Ces services sont gratuits en France,
pas nécessairement en Europe.

§2. Les conditions d’ouverture du compte

A. La vérification de la capacité du titulaire

Pour ouvrir un compte, encore faut-il qu’il soit apte à consentir, à jouir de droits et obligations, qu’il
ait la PJ.

1. Les personnes physiques

Dès lors que la P est capable, et non sous tutelle/curatelle, l’ouverture d’un compte est possible.
Rappels :
- Des époux peuvent chacun se faire ouvrir sans le consentement de l’autre un compte de dépôt : art 221
du CC). C’est par une loi du 14 juillet 1965 que le législateur avait mis fin au principe antérieur selon
lequel la femme mariée ne pouvait ouvrir un compte sans l’autorisation de son époux.
- Un mineur émancipé a les droits d’un majeur. Un mineur non émancipé ne peut ouvrir de compte que
par l’intermédiaire de ses représentants légaux. Le compte fonctionne en principe sous l’initiative de
ceux-ci. Mais il peut effectuer des versements seul sur son compte. Mais il ne peut seul effectuer
d’opérations de débit. Mais la pratique bancaire est autre : les EDC ont intérêt à essayer de fidéliser des
clients assez tôt. Il y a donc un procédé en droit des personnes, la « capacité d’usage coutumière »
reconnue au mineur, qui permet de faire des achats mineurs de la vie courante : art 388-1-1 et 408 du
CC. Cette capacité d’usage fait qu’on admet, à certaines conditions, qu’un mineur puisse retirer des
espèces sur un compte, et parfois même effectuer des paiements faibles.
- Le majeur incapable, s’il est sous un régime de tutelle, est représenté par son tuteur dans tous les actes de
la vie civile. C’est le tuteur qui ouvre et qui gère le compte. En matière de curatelle, plus légère, le

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principe est que la personne protégée peut ouvrir un premier compte de dépôt toute seule, car c’est
considéré comme un acte d’administration. Mais elle ne pourrait ouvrir un 2 ème compte sans l’assistance
de son curateur car considéré comme acte de disposition. Pour le fonctionnement, la personne peut faire
fonctionner son compte assisté de son curateur. On demande souvent la condition de double signature.
Mais la réforme de 2007 a essayé de développer l’autonomie du majeur incapable : le juge des tutelles
peut autoriser l’intéressé, quand il ouvre la mesure de protection, à faire des actes seul sur son compte
sans besoin d’autorisation ou d’assistance. EX. Retrait d’un montant modeste. De plus, l’art. 427 du CC
protège le majeur incapable contre son représentant légal, celui qui a la charge de la protection des
intérêts de l’incapable, ne peut modifier seul le compte du majeur incapable. Il lui faut l’autorisation du
juge des tutelles ou du conseil de famille.

2. Les personnes morales

Il faut que la P morale soit capable, donc immatriculée au RCS.


Si on est en présence d’une sté commerciale, la banque doit s’assurer des pouvoirs du représentant
légal de cette sté.
Quid lorsque la sté n’a pas la PJ ?
- Elle peut ne pas encore l’avoir : la sté en formation marche vers la personnalité juridique, et les
dirigeants peuvent agir pour son compte. Ils peuvent conclure tous les actes nécessaires à la création de
la personnalité morale et portent ses actes personnellement en attendant. La personnalité morale pourra
reprendre rétroactivement les actes.
- Pour celles qui ne peuvent l’avoir (groupe de stés ou SEP), on ne peut ouvrir un compte pour elles. En
pratique, l’associé de la SEP va ouvrir un compte en son nom personnel. Il prête son compte et sa
personnalité juridique.

B. Les formalités de l’ouverture du compte

1. Le formalisme

La convention de compte est un contrat d’adhésion : on discute peu les conditions générales de la
convention. On y adhère plus que l’on y consent. Depuis le 1er octobre 2016, toute clause abusive dans un
contrat d’adhésion est réputée non écrite (concerne le B to B depuis 1975, mais aussi B to C depuis 2016).

Il y a une exigence d’écrit, formulée par la loi MURCEF (mesure urgente de réforme à caractère
économique et financière) de 2001 qui a imposé un écrit pour les conventions d’ouverture de compte
conclues entre une banque et un non professionnel. Cette obligation est sanctionnée par une amende fiscale
de 75€. Toute modification ultérieure de la convention de compte doit être communiquée par écrit au client
au plus tard 2 mois avant l’entrée en vigueur de la modification. Si le client reste silencieux lorsqu’il reçoit
la proposition d’avenant à la convention de compte, son silence vaudra acceptation. Le but est de protéger
l’établissement de crédit.
L’écrit est-il requis pour la validité ou la preuve de la convention ? Le droit positif ne tranche pas la
question. Pour le prof, plutôt formalisme ad validitatem. Sur cet écrit, il y aura des mentions portées à
l’attention des clients.
Cet écrit peut être en papier, mais dans certaines banques totalement électronique.
La loi de séparation des activités bancaires de 2013 a étendu l’exigence d’un écrit aux relations B
to B, càd aux conventions de dépôt avec des personnes physiques ouvrant des comptes à des fins
professionnels. Cette obligation est entrée en vigueur en 2015 et est prévue à l’art. L312-1-6 du CMF. On est
plutôt en présence d’un contrat solennel. A contrario, pas d’exigence d’écrit pour les personnes morales pour
les conventions de dépôt.
Pour les comptes courants, pas d’obligation d’écrit ni pour les personnes physiques ou morales.
Le banquier doit demander au client un spécimen de sa signature ; ce qui lui permettra de vérifier la
régularité des opérations par la suite.

2. Les devoirs du banquier

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a) Les devoirs d’information

C’est la loi MURCEF de 2001 qui a imposé des obligations d’information détaillée au banquier.
Lors de l’ouverture du compte, le banquier doit informer son client sur les conditions générales de
fonctionnement du compte, sur les tarifs des différents services qu’il propose, et sur les droits et devoirs
réciproques des parties. Cette convention a un caractère synallagmatique, et oblige les 2 parties l’une envers
l’autre. Un code de bonne conduite a été élaboré par la Fédération bancaire française et est venu harmoniser
les modalités de présentation par les banques de leurs tarifs et de leurs conditions de fonctionnement des
comptes.

b) Les vérifications

Le banquier est tenu, au moment de l’ouverture du compte, de procéder à certaines vérifications


alourdies par le devoir de vigilance spécial dans le cadre de la lutte contre le blanchiment. Le banquier doit
connaître son cocontractant. Ces obligations varient selon que le client est une personne physique ou morale.
Art. R.312-2 du CMF précise ces vérifications :
- Personne physique : le banquier doit vérifier le domicile et l’identité du client, qui doit présenter un
document officiel comportant sa photographie. Le banquier doit conserver et recueillir les informations
suivantes : nom, prénom, date et lieu de naissance… Cette obligation s’étend au domicile, par la pratique
de la « lettre d’accueil » : le banquier envoie une lettre à son client, si elle revient en NPAI (n’habite pas
à l’adresse indiquée), le banquier n’ouvre pas le compte.
- Personne morale : le banquier demande la présentation de l’original ou copie de tout acte officiel du RCS
datant de moins de 3 mois. EX. très souvent, copie des statuts, Kbis, spécimen de signatures des
dirigeants. Le banquier devra procéder à une déclaration aux services fiscaux. L’art. 1649 A du CGI fait
obligation aux banques de déclarer à l’administration fiscale l’ouverture comme la clôture des comptes
de toute nature.

SECTION 2 : Le fonctionnement du compte

On est ici au stade de l’exécution de la convention de compte, qui intéresse 3 types d’acteurs : le
client, le banquier, et le tiers qui a envie de saisir le compte.

§1. Le pouvoir du client de faire fonctionner le compte

C’est le titulaire du compte qui a le pouvoir de faire fonctionner le compte si P physique, et si P


morale, son représentant légal.
Le banquier devrait vérifier systématiquement au titre de son obligation de vigilance pour toutes
opérations les pouvoirs de celui qui agit sur le compte et son identité. En pratique, ces vérifications ne sont
pas faites systématiquement parce qu’elles ont un coût. Il y a lieu de distinguer selon la gravité des
opérations en question :
Les opérations de crédit peuvent être effectuées par toute personne sans avoir à justifier de sa qualité
ou capacité. La personne peut aller déposer de l’argent seul. C’est un acte conservatoire. Les virements sont
aussi enregistrés au crédit sans que la banque ne vérifie toujours la cause, ou la capacité du donneur d’ordre
au titre de la non immixtion.
Les opérations de débit appellent davantage de vigilance par la banque. Emettre un chèque, donner
un ordre de virement, supposent toujours un écrit (papier ou électronique). Le banquier doit comparer la
signature de son client au spécimen, vérifier la nature de l’opération et les pouvoirs du titulaire du compte
sur son compte. C’est toujours la conformité apparente qui est le point d’équilibre. Com. 30 octobre 1984 :
la banque n’a pas à s’immiscer dans les opérations de sa cliente car les chèques remis par sa cliente ne
présentaient aucune anomalie apparente. Il fallait juste vérifier la signature.
Le banquier peut être également tenu de vérifier les pouvoirs de celui qui prétend agir sur le compte.
Il est fréquent que le client donne procuration à un mandataire d’agir sur son compte. La procuration est
consensuelle, n’est pas soumise à des conditions de forme particulière. Simplement, le banquier doit être

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informé de l’existence de la procuration même s’il est tiers. Il convient de donner au banquier un spécimen
de la signature du mandataire qu’il vérifiera à chaque opération de débit avec celle du titulaire. Il devra
vérifier que les opérations de débit sur le compte, dans ce cas, résultent soit de la signature du mandant, soit
de la procédure du mandataire.
La banque peut voir sa responsabilité engagée :
- si elle n’a pas vu d’anomalie apparente ;
- si celui qui a ordonné le paiement n’en avait pas le pouvoir (pas ou plus de mandat) ;
- si la signature est contrefaite.
De façon plus générale, l’art. 1937 du CC entre assez souvent en considération :
« Le dépositaire ne doit restituer la chose déposée qu’à celui qui la lui a confiée, ou à celui au nom
duquel le dépôt a été fait, ou à celui qui a été indiqué pour le recevoir ».
Mais le client peut aussi engager sa responsabilité avec la banque. EX. Le client n’a pas contrôlé les
opérations de débit sur son compte après que son chéquier ait été volé. Com. 10 juin 1980 : La CASS
caractérise l’imprudence. Le client a négligé la garde de son chéquier. Il aurait pu vois en regardant son
relevé que la première opération de crédit n’était pas de lui (1 er sur 20). La responsabilité est alors partagée
avec la banque.
De plus en plus, dans des conventions de compte, sont admises des conventions sur la preuve pour
des droits dont les parties ont la libre disposition : il sera indiqué de quelle façon certaines opérations seront
prouvées.

§2. La tenue du compte par le banquier

Le compte bancaire est matériellement tenu par le banquier, qui a l’obligation de le tenir en exécution
de la convention de compte conclue avec son client. Cela impose plusieurs choses : le banquier doit passer
les opérations en compte, il doit rendre compte à son client, et en contrepartie, il peut percevoir une
rémunération.

A. La passation des opérations en compte

1. La nature des opérations

Le banquier a toujours 2 casquettes, mais parfois il peut en avoir une 3e :


- Le banquier agit en qualité de dépositaire et en application des règles de dépôt (du CC) : dépôt irrégulier,
argent fongible et liquide, il y a un transfert de propriété vers le dépositaire, etc. Donc le client est un
déposant ;
- Mais il agit souvent également en qualité de mandataire au titre de toutes les opérations ordonnées, au
nom et pour le compte de son client ;
- S’il est toujours dépositaire et mandataire, il est souvent aussi prêteur, en tant qu’il consent un crédit, une
avance, un découvert.

2. L’enregistrement des opérations

Le banquier doit enregistrer les opérations accomplies par son client : pour chacune d’elles, il doit
enregistrer sa nature, la date de l’opération, le montant de l’opération, le solde provisoire résultant de
l’opération. Le banquier le fait par plusieurs mécanismes : par la voie d’un récépissé d’opération, ou par un
relevé périodique (généralement mensuel) des opérations.
Le banquier doit agir avec diligence = avec ponctualité et exactitude. Il doit accomplir ces opérations
dans les plus brefs délais. S’il commet une erreur, ça peut engager sa R civile contractuelle à l’égard de son
client. A cet égard, la JP se fonde notamment sur 1937 CC selon lequel le dépositaire ne doit restituer la
chose déposée qu’au déposant, ou à celui que le déposant a désigné pour recevoir la chose déposée.
Selon la JP, parce que l’EDC est un dépositaire, la charge de la preuve de prouver la bonne restitution
des fonds incombe au banquier. Cass. com. 19 septembre 2006 : au visa de 1937 CC notamment, c’est à
l’EDC dépositaire qu’incombait la charge de prouver qu’il avait restitué les fonds déposés conformément
aux instructions de son client. Cette charge de la preuve est une protection fondamentale du déposant. Cette
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solution s’applique par ex en présence de chèques contrefaits, de paiements par CB, de virements. S’il y a eu
délit pénal, la banque qui est victime se constitue partie civile toutes les fois que les faits incriminés sont
pénalement sanctionnés.
Mais il faut rappeler qu’un partage de R entre l’EDC et le client est possible, notamment lorsqu’une
faute du déposant peut être retenue à son encontre par exception. Mais là encore, ce sera au banquier de
démontrer la faute exonérant totalement ou partiellement le client de sa R (ex : que le déposant a laissé
trainer ses formules de chèques et ne regardait pas les relevés de compte qui lui étaient adressés). Cass.
com. 18 septembre 2012 : « le banquier dépositaire de fonds, devant restituer ceux-ci, répond, au titre de
cette obligation de résultat, de tous ses retards, erreurs et manquements, et doit de ce fait supporter les
conséquences d’un mauvais paiement, même en l’absence de faute, sauf à démontrer celle du client
l’exonérant totalement ou partiellement de sa R ».

On distingue 2 dates : la date de l’entrée en compte et la date de l’inscription en compte. Le compte


est à la fois une unité comptable, mais aussi juridique. Ici, on retrouve cette idée :
- L’entrée en compte est une notion juridique, abstraite, non comptable, non matérielle. Une créance entre
en compte quand elle est juridiquement affectée à un compte ou appréhendée par ce compte. En principe,
pour rentrer en compte, une créance doit être susceptible d’être payée, càd certaine, liquide et exigible.
Elle est à cette date juridiquement appréhendée par ce compte : c’est la date de naissance de la créance,
ou plus précisément, la date à laquelle la créance d’une partie sur l’autre a acquis les caractères
permettant son entrée en compte (certitude, liquidité, exigibilité). Cette date est en principe celle qui
compte juridiquement. C’est elle qui permet en principe de déterminer le solde provisoire d’un compte à
un instant T.
- L’inscription en compte est une notion comptable, concrète, matérielle. Elle ne fait que matérialiser
comptablement l’entrée en compte préexistante. Il peut y avoir un décalage entre l’entrée en compte et
l’inscription effective en compte au débit ou au crédit, parce qu’il peut y avoir un décalage dans le temps
entre la constatation matérielle et l’entrée juridique.
A l’instant T, le solde peut être créditeur (créance de restitution du client sur sa banque) ou débiteur
(avance par le banquier à son client = ODC au sens du CMF). Selon la JP et la doctrine majoritaire, qu’on
soit en présence d’un compte de dépôt ou d’un compte courant, l’entrée de la créance en compte provoque
son extinction par fusion dans un solde provisoire. C’est une solution évidente et traditionnelle pour le
compte courant, et on considère dans une moindre mesure que c’est le cas pour le compte de dépôt. La
créance disparaît et se fond en un solde provisoire. Ce solde provisoire, s’il est débiteur, correspond à une
dette unique, et non une pluralité de dettes. De même, si le solde est créditeur, j’ai une créance unique envers
mon banquier.

3. La contre-passation de certaines opérations

La contre-passation est une institution importante, étroitement liée à la comptabilité. Ce qui a été fait
comptablement ne peut jamais être défait. La contre-passation est une technique permettant au banquier de
radier une inscription en compte erronée, ou un peu anticipée. La comptabilité laisse toujours des traces : il
est inenvisageable d’effacer une écriture comptable antérieure. Donc la contre-passation permet une
annulation économique par une écriture inverse.

B. La reddition des comptes

1. Les modalités de la reddition des comptes

Le banquier est un mandataire. Le travail du mandataire, en vertu de l’art. 1993 du CC, est de rendre
compte de sa gestion. Cette reddition de compte se traduit par l’émission, pour chaque opération, d’avis
d’opérer, appelé aussi avis d’exécution. Il peut également y avoir des relevés périodiques à des intervalles
déterminés par la convention, rendant compte des opérations effectuées sur une période.
Cette obligation est indirectement reprise dans le CMF, notamment pour les clients personnes
physiques n’agissant pas pour des besoins professionnels. L’art. L312-1-5 du CMF précise que ceux-ci sont
informés gratuitement par le biais de leurs relevés de compte mensuels.

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L’art. L.314-14 du CMF s’intéresse aux opérations de paiement. Il précise qu’un prestataire de
services de paiement fournit sans tarder sur tout support durable, à l’utilisateur, les informations sur les avis
et ordres de paiement qu’il a donnés. Les parties peuvent convenir contractuellement que ces informations
seront fournies selon une autre périodicité qui ne peut excéder un mois. Donc par principe, c’est une
opération = un avis.

2. Le silence du client sur la reddition des comptes

Dans le langage commun, « qui ne dit mot consent ». Mais en droit, c’est plutôt le contraire : qui ne
dit mot ne consent pas.
Dans le cas où un client reçoit un relevé de compte et ne dit rien, son silence peut-il être retenu
contre lui ? La JP a évolué sur cette question.
Dans un premier temps, le principe était plutôt celui selon lequel qui ne dit mot ne consent pas. Puis,
elle considère depuis assez longtemps que qui ne dit mot consent, mais avec des nuances et précisions à
apporter.
Il faut distinguer les opérations passées des opérations futures. On verra uniquement les opérations
passées, qui font l’objet de la reddition des comptes. Le banquier peut donner à son client des relevés de
compte qui proposent des modifications de la rémunération de ce banquier concernant des opérations à
venir. Lorsque le client reçoit des documents de son banquier qui mentionnent de façon visible des
modifications tarifaires, le principe est que le silence peut emporter accord tacite, càd un avenant. Cette
solution est à rapprocher de l’art. L.312-1-1, II du CMF : toute modification de la convention de compte de
dépôt doit être soumise au client au minimum 2 mois avant la date de modification de cette convention.
L’établissement de crédit informe le client qu’il est réputé avoir accepté la modification, s’il ne s’y oppose
pas avant ce délai.
Quid d’une reddition d’opérations passées sur lesquelles le client reste silencieux ? Aujourd’hui, le
silence vaut consentement, mais au sens probatoire et non substantiel. Le silence emporte une présomption
simple d’accord de rectitude des opérations passées au débit, et donc de rectitude de restitution des fonds
auprès du client ou de créanciers tiers. Cela vient d’un usage, souvent rappelé sur les relevés eux-mêmes.
Mais c’est une présomption simple qui peut être renversée.
On doit distinguer le délai d’approbation présumée des opérations relatées dans le relevé (en général
un mois), du délai de prescription du droit du client de contester le cas échéant en justice l’opération. Com.
10 février 1998 : la réception sans protestation ni réserve des avis opérés et des relevés de compte fait
présumer l’existence des opérations indiquées, mais n’empêche pas le client pendant le délai de prescription
de reprocher à la banque d’avoir agi sans mandat. Com. 3 novembre 2004 : l’absence de contestation du
client dans un délai d’un mois, ne prive pas celui-ci d’agir durant le délai de prescription légale de 5 ans
pour contester des opérations sur lesquelles il est néanmoins resté silencieux. Le client doit donc renverser la
présomption simple résultant de son silence. Depuis la loi de 2008, le délai est quinquennal. Toutefois, par
convention, il est possible de réduire le délai de prescription, mais pas à moins d’un an.
Il existe un risque d’abus. La Commission des clauses abusives, dans un rapport de 2005, a dit que
dans les conventions de compte, sont abusives les clauses qualifiant le délai de vérification des relevés de
compte, de « délai de prescription ou de forclusion » car elles laissent croire au consommateur qu’il ne peut
plus apporter la preuve contraire de la régularité des inscriptions. Civ. 1, 8 janvier 2009 : est considérée
comme abusive une clause selon laquelle, à l’expiration d’un délai de 3 mois à l’issu d’une clôture de
compte, toutes les opérations relatées sont approuvées. Le banquier ne peut déchoir l’action de son client
Cette solution est parfois appelée la « théorie de l’approuvé implicite » (approbation implicite). Cette
théorie joue surtout en pratique, pour les opérations de débits résultant de chèques que les banques
bénéficient d’une faveur probatoire. En effet, s’agissant des opérations et services de paiement, il y a des
dispositions spéciales sur les délais. 2 règles :
- Art. L.133-23 du CMF : Si un utilisateur de services de paiements conteste une opération, la charge de
la preuve pèse sur le prestataire de service de paiement.
- Art. L.133-24 du CMF : En revanche, l’utilisateur du service de paiement doit signaler au prestataire de
service de paiement une opération mal effectuée dans les 13 mois suivant la dette de débit, sous peine de
forclusion (à condition que le prestataire de service de paiement ait bien adressé les avis correspondants).

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C. La rémunération du banquier

Le banquier peut recevoir 2 types de rémunération :

1. Les intérêts

a) Les intérêts créditeurs

Pendant longtemps, la France et la Grèce étaient les seuls pays d’Europe interdisant la rémunération
des comptes de dépôt à vue. En effet, l’ancien art. L.312-3 du CMF interdisait les banques de rémunérer
les comptes à vue davantage qu’un montant fixé par un règlement du Comité de la réglementation bancaire
(CRB). Or, un règlement du CRB de 1986 avait interdit la rémunération des comptes à vue. La
rémunération n’était libre que pour les dépôts soit excédant un certain montant, soit ayant une durée de plus
d’un mois.
Les raisons de cette interdiction étaient :
- Encourager les Français à placer plutôt leur argent sur des livrets d’épargne à long terme ;
- Lutter contre l’inflation ;
- Ne pas faire peser sur les banques une charge financière trop élevée, et que les banques rétorquent en
augmentant le prix de leurs commissions et autres services ;
- Par souci d’équilibre, car les banques étaient tenues de fournir gratuitement des formules de chèques à
leur client.
Sous l’influence du droit communautaire, les choses ont évolué. La France se singularisait en ne
rémunérant pas les dépôts à vue. La liberté d’établissement et de prestation de services permettait à d’autres
établissements de l’EEE de s’installer en France, alors que les autres pays autorisent les rémunérations.
La banque Caixa/ESP s’est installée sur le marché français et a proposé la rémunération des dépôts à
vue afin de s’emparer du marché. Elle a été sanctionnée par la Commission bancaire en 2002 comme ne
respectant pas l’interdiction nationale de rémunération des dépôts. Le CE a été saisi, et a posé une question
préjudicielle à la CJCE.
CJCE, 5 octobre 2004 : Elle a donné raison à la banque espagnole, et a jugé que la législation
française constituait une entrave à la liberté d’établissement prévue par le droit communautaire. Par la suite,
le CE a annulé la décision de la Commission bancaire, et le législateur a fait évoluer la législation bancaire
avec 2 textes : un arrêté du 8 mars 2005 a abrogé le règlement du CRB de 1986, et une loi du 17
décembre 2007 a abrogé l’art L312-3 du CMF.
Auj, on est donc passé à un principe de liberté de rémunération des comptes à vue. Mais en réalité, il
n’y a que 5 banques en France qui la proposent : Axa banque, Barclays, Caisse d’épargne Normandie, Mon
banquier en ligne Normandie, Groupama banque ; le tout avec des taux très faibles.
La rémunération des comptes à terme a toujours été libre. La rémunération des livrets A, livrets
d’épargne et livrets jeunes, est fixée par la réglementation.
La rémunération des fonds reçus en monnaie électronique est interdite selon l’art. L.511-4 du CMF.
Un établissement de monnaie électronique ne peut verser un intérêt ou rémunération quelconque à
l’utilisateur, lié à la durée de détention de la monnaie électronique.

b) Les intérêts débiteurs

L’EDC peut percevoir des intérêts débiteurs : quand le solde est débiteur, c’est que l’EDC consent un
crédit à son client, naturellement rémunéré par des intérêts débiteurs appelés agios.

Le principe de l’intérêt débiteur : est-ce qu’un compte de dépôt ou un compte courant produit un
fruit ? 1905 CC précise qu’il est permis de stipuler des intérêts pour simple prêt d’argent. Pour que le solde
débiteur d’un compte soit productif d’intérêts, il faut que cela ait été prévu, même oralement, entre les
parties. Le principe de la rémunération du banquier par écoulement du temps nécessite une convention, qui
en principe concerne le compte de dépôt.
Cass. com. 4 décembre 1990 : un compte ordinaire de dépôt n’est productif d’intérêts sur son solde
débiteur que si la convention des parties le prévoit.

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Le compte courant, lui, porte intérêts de droit, car on est en matière commerciale, lucrative. Mais
sans stipulation expresse, aucun intérêt n’est dû, pas même au taux légal. Cela revient à dire que le crédit est,
sauf stipulation contraire, un prêt gratuit. Sans accord des parties sur le principe d’un intérêt, il y aura nullité
de l’intérêt facturé au client sans substitution au taux légal.
Cet accord peut être donné dans la convention de compte, mais aussi relevé de la réception taisante
d’une facturation d’intérêts pour l’avenir.

Le formalisme de l’intérêt débiteur : on a 2 ordres de règles à suivre > un ordre civil et un ordre
consumériste :
- Art. 1907 du CC : le taux de l’intérêt conventionnel doit être fixé par écrit. C’est un formalisme de
validité qui concerne toutes les opérations de crédit. S’il n’est pas fixé par écrit, il ne sera pas dû. Au
maximum, il y aura substitution au taux légal, à condition qu’il y ait eu un accord sur le principe même
de l’intérêt.
- Art. L.314-5 du CCONSO : le taux effectif global (TEG) du crédit doit être stipulé dans tout écrit
constatant un contrat de prêt. La finalité du TEG est la comparabilité des rémunérations des banques. A
l’origine, le royaume du TEG était le Code de la consommation. Mais il s’est peu à peu étendu en dehors
du droit de la consommation. Il s’applique maintenant même pour certains crédits passés à des fins
professionnelles ou passés par des personnes morales de droit public.
L’art. 1907 du CC n’exige pas que la fixation par écrit soit nécessairement préalable à la perception
d’intérêts. Ce peut être fait jusqu’à la date de perception. Mais les textes relatifs au TEG exigent la mention
du TEG dans tout écrit constatant un contrat de prêt. En réalité, c’est exigé pour tout accord même oral,
consensuel ou notarié. Il est même exigé pour une convention de rémunération du compte courant. Cette
mention du TEG doit être préalable à la perception des intérêts, et prévue dans la convention de compte elle-
même, pas ultérieurement.
Depuis le 1er octobre 2016, on ne parle plus du TEG mais du TAEG (taux annuel effectif global). On
y intègre le taux d’intérêt de base du banquier + les frais et commissions liés et dépendants du découvert. On
ne met pas les frais et commissions liés à des services autres que le découvert.
Quid du silence ? Com. 18 février 2004 : le silence conservé par le client sur des relevés de compte
mentionnant le taux d’intérêt conventionnel applicable au solde débiteur d’un compte courant peut emporter
acceptation tant de l’obligation de payer les intérêts que du taux de paiement des intérêts.
Mais cette décision ne vaut pas pour le TEG. Est toujours imposée une mention préalable du taux.
Cet arrêt ne change pas la règle. Mais difficultés pratiques : on ne peut connaître à l’avance le taux exact
global d’un découvert avant qu’il ait été effectivement utilisé par le client. Ce TAEG effectif ne peut être
connu qu’une fois le découvert utilisé. Donc la jurisprudence décide 2 choses :
- A priori, il faut mentionner dans les conventions de compte à titre préalable et indicatif le TAEG. Le
client doit disposer d’éléments de calcul du TAEG avec des taux et des exemples chiffrés.
- A posteriori, le découvert effectivement utilisé, en fonction de son taux, puisque les commissions des
banques varient selon le montant et la durée, il faut mentionner sur les relevés de compte le TAEG
effectivement supporté par le client.
Com. 9 juillet 1996 : La Chambre commerciale sanctionne le CCF qui en présence d’une convention
de compte courant, n’avait pas respecté ces 2 conditions. Com. 9 mars 1999 : la CA admet la facturation
d’intérêts à ses clients. Le TEG n’avait pas été fixé par écrit. Cassation : la CA aurait dû préciser si les
tickets d’AGIOs comportaient les informations nécessaires. Il faut donc les 2 conditions réunies.
Ces règles sont très importantes, car en cas de nullité de l’intérêt soit pour non respect du formalisme
du CCIV ou exigence plus élevé du consumérisme, le banquier perd son droit à l’intérêt conventionnel. On
substituera un taux légal, pourvu que le principe même de l’intérêt ait été convenu.
Pendant combien de temps le client peut solliciter la nullité ? La JP distingue selon la qualité du
client :
- L’emprunteur est un non professionnel : le délai de prescription court à compter de la date à laquelle le
client a pu se rendre compte de l’erreur.
- L’emprunteur est un professionnel : le point de départ du délai de prescription est la réception de chacun
des relevés qui comportaient ou non le TEG.

Le calcul de l’intérêt débiteur : 4 questions :


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- Le taux : Le principe est que le taux de l’intérêt débiteur est librement fixé par les parties. Mais il faut
que le TAEG ne soit pas usuraire. L’usure est déterminée par l’art. L314-6 du CCONSO. En droit
français, depuis de nombreuses années, l’usure est sanctionnée pour les consommateurs, mais pas pour
les professionnels. En revanche, pour le découvert en compte, même le professionnel est protégé par
l’art L.313-5-1 du CMF. Les découverts en compte sont soumis au respect de la législation sur l’usure.
Le taux usuraire est celui dont le TEG excède de plus d’1/3 le taux moyen pratiqué par les autres
banques pour un crédit comparable. Pour les particuliers, pour un découvert de moins de 3000 €, l’agio
qui peut être stipulé par le banquier monte jusqu’à 20,75%. Pour les découverts de 3000 à 6000 €, il est
de 12,8%. Au-delà, il est de 6,8%.
- Les dates de valeur : elles correspondent à une pratique bancaire qui impacte le moment de prise en
considération d’une remise au crédit ou d’une opération de débit. En théorie, une créance doit être prise
en compte à compter de son entrée en compte.
Mais les banquiers ont eu l’idée de ne créditer une remise que postérieurement à son entrée en compte
par des jours de valeur retardés, et de débiter un retrait antérieurement à la date de l’ordre donné par des
jours de valeur avancés. C’est donc la pratique qui consiste à instituer un décalage entre la date réelle de
l’opération et la date à laquelle l’opération est effectivement inscrite en compte. EX. La date de valeur
avancée par rapport à la date d’entrée en compte pour une opération de débit, date de débit en compte
d’un chèque de 10 mars sera avancé au 7 mars. Et inversement pour une opération de crédit, chèque du
10 mars et inscription de 17 mars. Le solde reste débiteur en valeur alors qu’il n’est plus débiteur en
position.
Pendant longtemps, cette pratique s’est développée en dehors de tout cadre légal et a été encadrée par la
JP sur le fondement de la cause. Com. 6 avril 1993 : Au visa de l’art. 1131 du CC, la Chambre
commerciale se fonde sur la cause, et considère que les dates de valeur n’ont une justification que pour
les opérations nécessitant des délais techniques d’encaissement (ex. chèques). Pour les autres, les dates
de valeur sont dénuées de cause.
Depuis 2011, le législateur est intervenu pour préciser ces dates de valeur. Auj, il faut distinguer les
opérations de paiement réalisées par chèque et les autres opérations de paiement.
o En matière de chèque : art. L.131-1-1 du CMF autorise le principe des dates de valeur mais limite
le délai des dates de valeur autorisé (1 jour ouvré).
o En matière d’opérations de paiement autres que le chèque : l’art. L.313-14 du CMF distingue entre
les opérations de crédit et de débit :
 Pour les opérations de crédit, la date de valeur ne peut être postérieure à celle du jour ouvrable
au cours duquel l’opération de paiement a été créditée sur le compte. le jour de valeur est le
même pour le crédit du prestataire de paiement bénéficiaire et son client de ce prestataire. Cela
ne veut pas dire que la date de valeur est interdite.
 Pour les opérations de débit, la date de valeur du débit inscrit au compte de paiement d’un
payeur ne saurait être antérieure au jour où l’opération de paiement a été débitée de ce compte.
Pas de rétroactivité de la date de valeur.
- L’année lombarde : C’est une pratique venant des banquiers lombards qui consiste à diviser l’année en
12 mois de 30 jours = 360 jours.
Com. 10 janvier 1995 : elle a condamné cette pratique pour la première fois. Cette décision concernait
le TEG, et on s’est demandé si elle concernait l’année lombarde en général. Puis Com. 17 janvier 2006 :
c’est une pratique illicite dans tous les cas, qui invalide le TEG mais aussi le taux d’intérêt
conventionnel. En divisant le nombre d’intérêts dus par un emprunteur, cela augmente, dans une
proportion faible, le montant des intérêts dus par le client. La sanction est la substitution par le taux
légal.
Par convention, peut-on réintroduire l’année lombarde ? Com. 24 mars 2009 : Rien n’interdit aux
parties de convenir d’un taux d’intérêt conventionnel calculé sur une autre base que l’année civile. Donc
il est possible aux parties d’en revenir à l’année lombarde. Mais Civ. 1, 19 janvier 2013 : le taux de
l’intérêt conventionnel mentionné par écrit doit, comme le TEG, être calculé sur la base de l’année
civile, dans tout prêt consenti à un consommateur ou non professionnel. Donc pour la Chambre civile,
l’année lombarde est interdite pour le non professionnel. Elle n’est autorisée que pour les professionnels
(plus sensé pour le prof).

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- L’anatocisme, càd la capitalisation des intérêts : C’est le processus qui permet que les intérêts
grossissent le capital, deviennent du capital, et grossissent le principal, qui va lui-même porter intérêt.
Cela permet à l’intérêt de faire des intérêts. Il a toujours été encadré par le CC. Selon le nouvel art.
1343-2 du CC, il faut 2 conditions pour le permettre :
o une convention expresse. En réalité, cela ne vaut que pour le compte de dépôt, car on considère que
le compte courant déroge aux règles du CC sur l’anatocisme.
o des intérêts dus pour au moins une année entière. On ne peut capitaliser des intérêts dus sur quelques
semaines.

2. Les commissions

Elles rémunèrent non pas de l’argent qui dort, comme les intérêts, mais la prestation de service du
banquier.

a) Le principe de liberté

Les commissions sont la rémunération des prestations de service dues par le banquier au titre
de la tenue gestion des comptes, des incidents de paiement… Ces commissions sont en principe librement
fixées à l’ouverture du compte. Il s’agit de l’idée même du contrat d’adhésion : principe de liberté
contractuelle, pour autant que le client ait été préalablement informé.
Ce principe de liberté a été profondément rogné et érodé, notamment sous la pression des
associations de consommateurs ; c’est pourquoi le législateur est intervenu en installant un plafonnement.

b) Le plafonnement des commissions

Les associations de consommateurs se sont plaintes des commissions élevées, que le client connaît
assez tard. Il y a qqs années, les banques se sont engagées à une meilleure publicité bancaire. Mais ça n’a
pas suffi pour les associations. Donc le législateur est intervenu :
- Gratuité de certains services bancaires (déjà gratuité des formules de chèques).
- Gratuité des services bancaires de base listés à D112-5 CMF pour les titulaires du droit au compte.
- Plafonnement de certaines commissions & tarifs bancaires.
o D131-25 CMF plafonne les frais bancaires perçus par la banque à l’occasion du rejet d’un chèque :
si le chèque est rejeté, les frais bancaires sont plafonnés à 30€ pour les chèques de -50€, et à 50€
pour les chèques de +50€.
o Art. D.133-6 du CMF : En cas de services de paiement et incidents de paiement autres que le rejet
d’un chèque, les frais perçus ne peuvent excéder le montant de l’ordre de paiement rejeté, et ce dans
la limite d’un plafond de 20€.
o Art. L.312-1-3 CMF (+ article d’application : R.312-4-1 du CMF) :
 Art. R.312-4-1 du CMF : Pour les personnes physiques n’agissant pas pour des besoins
professionnels, les frais bancaires (liés à des irrégularités de fonctionnement du compte) ne
peuvent dépasser pour un même compte 80€/mois et 8€/opération.
 Art. R.312-4-2 du CMF : Pour les clients en situation de fragilité, la commission peut être
limitée à 20€/mois et 4€/opération. Ce service suppose une adhésion à un service particulier
pour les clients en situation de fragilité, qui coûte 3€/mois.

c) La transparence tarifaire

Les conventions de compte, et dans une large mesure les agios versés, sont des contrats d’adhésion.
La principale arme du client n’est pas tant de négocier mais de comparer les tarifs bancaires.
Le législateur a augmenté la transparence des banques, d’abord par la reddition des comptes. En
janvier, chaque client doit recevoir un récapitulatif des intérêts et frais perçus au cours de l’année
précédente : art. L.314-7, III du CMF. Cette obligation profite aux personnes physiques, professionnelles ou
non, et aux associations.

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De même, le législateur a créé un portail de comparaison des tarifs bancaires. Il est possible de
comparer les frais bancaires de 150 établissements de crédit représentant 80% du marché bancaire.

D. La tenue des comptes présentant un facteur de complexité

1. La complexité résultant de la pluralité de comptes

Il est fréquent qu’une personne soit titulaire de plusieurs comptes auprès d’un même établissement de
crédit : de nature différente (compte à vue, compte d’épargne), ou de nature identique pour différencier
plusieurs opérations.

a) L’indépendance des comptes

Les comptes sont indépendants. Ce principe d’indépendance a été rappelé par la CASS à plusieurs
reprises, notamment Com. 14 avril 1975 : un client a ouvert 2 comptes courants auprès d’une banque, l’un
débiteur, l’autre créditeur. La banque avait prétendu compenser ces 2 soldes mais il n’y avait pas de
convention spéciale qui dérogeait à l’indépendance des comptes. Les divers comptes courants ouverts au
nom de la même personne sont en principe indépendants en l’absence d’accord.
Ce principe a plusieurs conséquences pratiques :
- Les intérêts ne sont dus que par rapport à la situation de chacun des comptes pris isolément ;
- Pour la provision de chèque, on se réfère exclusivement au compte sur lequel le chèque est tiré ;
- En cas de procédure collective, les organes de la procédure collective peuvent demander la continuation
d’un compte et la clôture d’un autre ;
- La banque doit respecter l’affectation des opérations sur les différents comptes. Elle ne peut effectuer
une opération censée être sur l’un, sur l’autre.

b) Les conventions de compensation et d’unité de compte

Il y a 2 conventions :
- L’accord de compensation de compte : c’est un accord portant sur des comptes qui restent
distincts. Il est convenu que les parties, surtout le banquier, pourront décider à tout moment de
compenser le solde débiteur d’un compte A par le solde créditeur d’un compte B. C’est une garantie pour
la banque. On s’interroge néanmoins sur l’opposabilité de cette convention en cas de faillite du client.
- L’accord d’unité de compte à pluralité de rubriques : cette stipulation est plus intense et intégrée. Cet
accord va fusionner les différents comptes en un compte unique mais comportant des rubriques
différentes. On peut en principe fusionner des comptes de nature différente, dès lors qu’ils sont fongibles
entre eux. EX. pas compte de dépôt + compte-titres. Com. 28 septembre 2004 : le fonctionnement de
ces différentes rubriques peut supporter une certaine autonomie. La convention d’unité de compte n’est
pas incompatible avec des intérêts différents pour les deux comptes, avec des relevés séparés pour les
deux comptes, ou avec l’utilisation de devises différentes pour les deux comptes. Com. 2 mars 2010 :
Puisque c’est un compte unique, le banquier est tenu par cette unité de compte, et ne peut facturer le
client débiteur que sur un compte et le créditeur sur un autre.

2. La complexité résultant de la pluralité de titulaires

La pluralité de titulaires signifie un compte collectif. 2 types :

a) Le compte indivis

Son ouverture a 2 temps :


- Compte indivis dès son ouverture : c’est le cas en particulier du compte qu’ouvriraient les associés d’une
SEP, qui n’a pas la PM. Ils sont co-titulaires du compte indivis.
- Transformation d’un compte qui devient indivis en cours de fonctionnement : par ex, par décès du
titulaire du compte > si compte pas clôturé, il devient indivis entre les héritiers du titulaire du compte, et

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fonctionnera avec l’accord unanime des titulaires. Comme cela complexifie le fonctionnement, il est
courant de désigner un mandataire commun.
En principe, les indivisaires sont tenus conjointement = sans solidarité, du solde du compte conjoint.
Sauf si solidarité convenue, et sauf en matière commerciale où la solidarité se présume.

b) Le compte joint

C’est un compte collectif qui connaît une solidarité active des co-titulaires du compte. Cela signifie
que les co-titulaires sont cocréanciers solidaires de la banque pour la restitution du solde créditeur. Chacun
des co-titulaires du compte joint peut librement faire fonctionner le compte seul, effectuer seul toutes les
opérations qu’il souhaite sur le compte.
Il est fréquent que cette solidarité active s’accompagne d’une solidarité passive, auquel cas les co-
titulaires sont tenus solidairement auprès de la banque d’un solde débiteur : pour cela il faut une clause ou de
se trouver en matière commerciale.

§3. La saisie du compte par un tiers

Ce qui intéresse le tiers n’est pas tant le compte bancaire en lui-même, que l’argent qui s’y trouve : il
s’intéresse à la valeur du compte et la possibilité de saisir à un instant T le solde créditeur qui s’y trouve.

A. La saisissabilité du solde provisoire

Le solde provisoire d’un compte, lorsque créditeur, correspond à une créance du client sur sa banque.
A ce titre, nous sommes tous créanciers d’une banque.
Longtemps, la JP a refusé d’admettre que le solde provisoire fut saisissable. En effet, lorsque le
compte est un compte de dépôt, ce solde provisoire semblait non exigible, et si le compte est un compte
courant, il est réputé indivisible, or le saisir aurait été attenter à cette indivisibilité. La position de la JP était
de considérer que tant que le compte n’est pas clôturé, on ne sait pas si le client est effectivement créancier
de l’EDC.
Cette analyse posait beaucoup de difficultés pour les tiers : la CASS a évolué dans sa position. Com.
13 novembre 1973 : elle a fini par admettre que le solde, quoique provisoire, créditeur d’un compte, est bien
une créance certaine, liquide et saisissable, même si pas exigible. En l’espèce, comme la créance fiscale était
redevable sur tout le patrimoine, le solde du compte courant fait partie du patrimoine saisissable. Le solde
provisoire créditeur est disponible : quotidiennement, les titulaires du compte effectuent des retraits,
disposent des sommes sur le compte, pas de raison que les tiers ne puissent pas en profiter aussi.
La saisie a depuis été appréhendée par la loi de 1991 sur les voies d’exécution, qui est venue
consacrer des dispositions particulières à la saisie des comptes bancaires, car cette saisie est une saisie
particulière de créances. Cette loi a entendu faciliter la saisie des soldes bancaires dans un but d’efficacité
économique, et actuellement, le CPCE pose des règles particulières à ces saisies de solde bancaire.
Ajd, on admet que la saisie peut porter sur tout type de compte bancaire. Un compte à vue est
saisissable qu’il soit courant ou de dépôt, mais également un compte d’épargne.
L’ouverture de crédit est une promesse de prêt consensuel, alors que le prêt est un contrat qui se constate par
la remise de la chose. En revanche, Civ. 2, 18 novembre 2004 : lorsqu’il y a une ouverture de crédit, celle-ci
n’est qu’une promesse de prêt à une P dénommée, et la partie non utilisée de cette ouverture de crédit n’est
pas saisissable. Le contrat de prêt entre deux particuliers reste réel, unilatérale avec obligation de restitution.
Règles de prêt = règle de découvert.
Depuis Com. 28 mars 2000, la CASS considère que le prêt consenti par un professionnel du crédit
n’est plus un contrat réel (donc unilatéral) mais consensuel : donc synallagmatique.
Cette ouverture de crédit tient l’établissement de crédit : l’emprunteur a un droit de tirage, càd
d’exiger la remise des fonds. Soit il tire sur l’ouverture et donc les sommes seront saisissables, soit il n’a pas
tiré les sommes, qui ne sont alors pas saisissables par les tiers.
La réforme de 1991, repris dans le Code de 2011, a toutefois entendu faire primer la logique des
procédures d’exécution. En principe, une créance qui rentre en compte perd son insaisissabilité. Or, le
législateur a estimé que certaines créances insaisissables, même lorsque rentrées en compte, garde leur

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caractère insaisissable afin de protéger le client. Dans ce cas, la créance est reportée à concurrence sur le
solde du compte bancaire. Ainsi le salaire porté en compte reste insaisissable à hauteur du montant du RSA,
comme les pensions alimentaires, les prestations familiales, et les contributions aux charges du mariage. En
2017, le montant du RSA était de 545,48€. C’est l’art. L.162-2 du CPCE qui précise, depuis une loi du 12
juillet 2009, que la banque qui est saisie doit laisser à la disposition de la P physique saisie une somme égale
au montant du RSA (« RSA bancaire », qui existe depuis 2002 mais obligatoire depuis 2009).

B. Les procédures d’exécution

Il y a 2 saisies de créances qui existent et sont reconnues à un tiers sur un compte bancaire :
- Une saisie conservatoire (521-1 & 523-1 CPCE) : toute P dont la créance est fondée en son principe,
peut en principe, moyennant une autorisation judiciaire, et même sans titre exécutoire, déclencher une
saisie conservatoire. Il doit justifier d’un péril dans le recouvrement de sa créance. Cette saisie va rendre
indisponible les sommes saisies de façon conservatoire. Le créancier autorisé devra ensuite obtenir au
fond un titre exécutoire constatant qu’il a bien une créance liquide et exigible
- Une saisie-attribution (L211-1 s. CPCE) : s’il dispose de ce titre exécutoire, le créancier saisissant saisira
entre les mains de l’EDC le montant de sa créance.
Le Fisc dispose d’une saisie simplifiée : l’avis à tiers détenteur, à 262 & 263 des Livres de procédure
fiscale > c’est une procédure propre au Fisc pour le recouvrement des impôts.
Rappel : le secret bancaire ne peut être opposé à l’huissier, qui peut demander la divulgation des
EDC auprès desquels le débiteur a un compte. L’EDC a une obligation d’information en tant que tiers saisi,
et doit déclarer au créancier saisissant le solde des comptes au jour de la saisie, et informer le saisissant sur
d’éventuels événements qui pourraient affecter le montant du solde bancaire (saisies antérieures / cessions
de créances antérieures).
L162-1 CPCE prévoit une période de 15 jours permettant la régularisation des opérations en cours
sur le compte. La banque déclare le solde au jour de la saisie, mais dans les 15 jours suivant la saisie, ce
solde bancaire peut être affecté à l’avantage ou au désavantage du saisissant :
- A son avantage, si des remises sont faites au crédit, qui ont été faites avant la saisie mais pas encore
portées en compte.
- A son désavantage, si des opérations en cours de débit sont effectués avant la saisie et non encore
débités. Par faveur pour les banques, cet article reconnaît l’efficacité des contre-passations, qui peut
concerner des chèques. Si la banque a crédité le compte avant la saisie, mais que le chèque est revenu
impayé, elle peut contrepasser = réinscrire le montant du chèque au débit. De la même façon, elle peut le
faire pour les effets de commerce dans le délai d’un mois suivant la saisie.

SECTION 3 : La clôture du compte

Toute clôture de compte doit être signalée à l’AF et déclarée à la BDF. On peut clôturer un compte
pour diverses raisons : pour changer de banque, parce qu’on en n’a plus besoin… Cela traduira la fin des
relations entre un client et sa banque. Le compte bancaire est un contrat-cadre qui sera le support des
opérations entre les 2.

§1. Les causes de clôture du compte bancaire

A. Les causes naturelles

1. La clôture d’un compte à durée déterminée

Il faudra qu’un terme ait été déterminé : très rare. En pratique, seuls les compte d’épargne sont à
durée déterminée. 1212 CC : lorsqu’un contrat est conclu pour une durée déterminée, il doit être exécuté
jusqu’à ce terme. Puis il faut stopper le contrat, sinon tacite reconduction, qui donne lieu à un contrat à durée
indéterminée.

2. La clôture d’un compte à durée indéterminée

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L’immense majorité des comptes sont à durée indéterminée : comptes de dépôt, comptes courants.
2011 CC : chaque partie peut y mettre fin à tout moment, sous réserve du préavis convenu ou raisonnable.
Le législateur est intervenu pour réguler la clôture des comptes de dépôt ouverts par des P physiques
n’agissant pas à des fins professionnelles. L312-1-1, III CMF : si c’est le client qui rompt le contrat, il peut
le faire à tout moment, sans préavis. Toutefois, une clause contraire peut être prévue : si un délai de préavis
est prévu, il ne peut dépasser 30 jours. Mais si c’est l’EDC qui clôt le compte, ce dont il a le droit, la loi
impose un délai de préavis de 2 mois minimum.
Mais le CMF n’impose pas que la banque motive sa décision de clore le compte. La seule limite
tient, tout comme le refus d’ouvrir un compte, est l’abus de droit ou la discrimination : le banquier pourrait
engager sa R. Mais dans le cas où le client a obtenu l’ouverture du compte en vertu de son droit au compte,
dans ce cas le banquier doit motiver par écrit au client et à la BDF les raisons qui l’ont poussé à fermer le
compte.

B. Les causes accidentelles

- Le décès du client est en principe une cause de clôture du compte, sauf si l’on décide de poursuivre le
compte qui sera désormais indivis, avec les héritiers du client.
- L’ouverture d’un régime de protection peut entrainer la clôture du compte. On peut le conserver mais il
fonctionnera sous la signature du tuteur légal.
- La dissolution d’une P morale doit s’accompagner de la clôture du compte, mais là encore, le liquidateur
peut décider que le compte continue de fonctionner pendant et pour les besoins de la liquidation.
- La PC ouverte à l’encontre du titulaire du compte : jusqu’à la loi Badinter de 1985, elle entrainait dans
tous les cas la clôture du compte. Depuis, il faut distinguer selon la nature de la procédure ouverte : si le
jugement s’accompagne d’une procédure de sauvegarde ou redressement judiciaire, rien ne s’oppose à la
demande de l’administrateur judiciaire de poursuite de la convention de compte. Cass. Com. 8
décembre 1987 : la Ccass a admis qu’il soit possible à l’administrateur judiciaire de demander la
continuation de la convention de compte courant. En pratique, est établi un solde provisoire au jour du
jugement d’ouverture de la PC. Parfois même, la pratique fait ouvrir un compte bis au nom de
l’entreprise en RJ (on écrira à côté du nom du client RJ pour redressement judiciaire, ou SV pour
procédure de sauvegarde). La dissolution judiciaire suivant la PC est une cause de clôture du compte de
plein droit.

La loi Eckert de 2014 relative aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d’assurance-vie en
déshérence est rentrée en vigueur en 2016. Elle traite de que faire de tous ces comptes et contrats non
clôturés. La Cour des comptes a estimé que leur montant en 2013 était de 1,2MM€ pour les comptes, et
2,76MM€ pour les contrats d’assurance-vie. Cette loi a souhaité créer un équilibre.
Le compte est considéré inactif à 2 conditions cumulatives :
- L’absence d’opération sur le compte pendant 12 mois consécutifs, du chef du client.
- Le titulaire ne s’est pas manifesté auprès de la banque pendant 12 mois consécutifs (ne doit pas non plus
avoir effectué d’opérations sur un autre compte dans la même banque).
Ce délai est porté à 5 ans pour les comptes d’épargne pour les comptes d’épargne et pour les
comptes-titres.
En cas d’inactivité, les banques doivent rechercher si les titulaires sont vivants et s’informer de leur
éventuel décès. Elles doivent informer les titulaires ou leurs héritiers de l’état d’inactivité du compte. Elles
doivent limiter les frais de tenue de compte. Elles doivent transférer, au bout de 3 ans si le titulaire est
décédé, et au bout de 10 ans si le titulaire est vivant, les comptes à la Caisse des dépôts, à compter de la
dernière manifestation du client.
La Caisse des dépôts et consignations va conserver ces comptes pendant 20 ans pour le titulaire
vivant, ou 27 ans dans le cas du décès. Donc passé 30 ans dans les 2 cas, les sommes seront définitivement
attribuées à l’Etat, et il ne sera plus possible aux héritiers ou titulaires d’en demander la restitution.
Il est demandé aux banques de publier annuellement le nombre de comptes bancaires inactifs, et la
CDC doit en faire la publicité. Il existe un site qui les recense.

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§2. Les effets de la clôture du compte bancaire

A. la liquidation du compte bancaire

Le compte est clos, il est donc impossible de faire de nouvelles opérations. Mais le banquier va
solder les opérations en cours : il va inscrire en compte les opérations antérieurement entrées en compte
mais non encore inscrites, et le cas échéant procéder à des contre-passations. Le client doit restituer les
instruments de paiement remis : les formules de chèques, la CB.
Si le solde à la clôture du compte est créditeur, le client est bien le créancier final de cette relation de
compte, et ce solde doit être restitué au client, à ses héritiers ou ses ayants droit. Si le solde est débiteur, il
doit être payé à la banque avant que la prescription soit acquise : quinquennale ou biennale.

B. Les coûts liés à la clôture du compte

Si un compte a porté intérêts mais est clôturé, Cass. Com. 17 mars 1981 : après la clôture du
compte, seul l’intérêt au taux légal reste dû, qui se substitue à l’intérêt conventionnel qui a pu être stipulé.
Mais c’est supplétif de volonté : les parties peuvent prévoir que le taux conventionnel continue à s’appliquer
après clôture.
La banque doit rembourser les frais payés d’avance pour une année.
Lorsque le compte est ouvert par une P physique à des fins non professionnels, la loi Hamon de
2014 a renforcé un principe déjà affirmé en 2001 : principe de gratuité de la clôture du compte, pourvu qu’il
ait été ouvert depuis au moins 12 mois. Cette loi a aussi institué un dispositif d’aide à la mobilité bancaire,
renforcé sous l’influence de règles € : L312-1-7 CMF renforce la concurrence entre banques afin que le
client ne se sente pas prisonnier d’une banque. en France, 6% de français changent de compte par an, contre
9% dans l’UE.
Cette loi renforce le lien entre la banque de départ et la banque d’arrivée. La banque de départ et la
banque d’arrivée doivent s’entendre pour assurer la continuité de tous prélèvements sur le compte pour
libérer le client de la gestion de ses prélèvements. L’établissement de départ verse le solde de compte à
l’établissement d’arrivée, et fournit toutes les coordonnées bancaires des organismes à qui on avait autorisé
de faire des prélèvements sur le compte.

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LECON 7 : Les règles spéciales des comptes bancaires

Le compte courant est plutôt celui des commerçants, le compte de dépôt celui des particuliers. Mais
l’inverse est possible.

SECTION 1 : Le compte courant

Le compte courant a été imaginé en Italie au 12e s. L’objectif était de simplifier les relations entre un
client et son banquier. ce compte courant est un contrat innommé, et non régi par le législateur. C’est un
contrat conclu le plus souvent entre un EDC et son client professionnel, mais il pourrait être conclu avec un
non professionnel.
Ce contrat a été défini par la doctrine : selon Bonneau, c’est une convention par laquelle 2 P décident
de faire entrer en compte toutes leurs créances et dettes réciproques de manière à ce que celles-ci soient
réglées immédiatement par leur fusion dans un solde disponible soumis à un régime unitaire.
Jusqu’en 2008, 624-18 Ccom : le législateur visait la compensation en compte courant.
L’ordonnance de 2008 a supprimé cet article : ajd, le législateur ne vise plus que le compte de dépôt et non
le compte bancaire. Mais certaines règles générales s’appliquent aux 2 : les devoirs du banquier dans la
tenue du compte, le rôle du silence, la détermination des P habilitées à faire fonctionner le compte…
Pour le reste, le compte courant est une création de la pratique et son contenu a été déterminé par la
JP.

§1. La notion de compte courant

A. La nature juridique du compte courant

Thaller a dit : « le compte courant est un creuset dans lequel on jette des créances ; elles se fondent
et de cette fusion nait un résidu qui est le solde du compte ». Ainsi, fondamentalement la créance qui entre
en compte courant s’amalgame et se fonde en un tout : la seule trace qu’elle laisse est d’être un article de
crédit qui va concourir au solde du compte.
3 grandes théories sur la nature juridique du compte :

1. La novation

L’idée de creuset se fonde largement sur l’idée de novation : la créance qui entre en compte se
transforme, perd son individualité, se fond dans un nouvel ensemble, devient indisponible et indivisible des
autres articles du compte. Mais cette analyse encourt la critique.
La critique principale est que la novation a un sens technique en RGO : or ici on voit mal l’obligation
nouvelle qui apparaît. La créance qui entre en compte vient se fondre et s’incorporer à un solde qui existait
déjà, soit en l’augmentant, soit en le réduisant. Il n’y a pas d’obligation nouvelle.

2. La compensation

Cette théorie est due à Esmein, qui a proposé la théorie des compensations successives. Pour lui, le
compte courant permet des compensations successives des créances du client sur la banque et de la banque
sur le client. Mais ça ne marchait pas : les opérations ne sont pas toujours réciproques. On peut parfaitement
avoir un compte courant qui fonctionne et est structurellement débiteur ou créditeur.

C’est pourquoi Roger Houin a proposé la théorie de la compensation in futurum : la compensation


globale de toutes les créances entrées en compte mais à terme. Mais difficulté : cette théorie méconnait le
fait qu’à un moment donné, on avait un solde créditeur ou débiteur disponible ou provisoire.

3. L’effet de règlement

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Cette théorie est due à Rives-Lange, le père du Précis Dalloz de droit bancaire. Il a proposé
d’analyser le compte courant comme un mécanisme de règlement reposant sur la volonté des parties de
payer leur créance par l’entrée en compte. Cette théorie concourt également à donner un éclairage
intéressant au compte courant.

4. Synthèse et nature sui generis

Il est peu utile de chercher à rattacher une institution du 12e s. à une qualification précise.
Le compte courant a en effet un effet novatoire, un effet de règlement, un effet de garantie… Mais on
ne peut le faire rentrer dans une seule case. Il emprunte à ces différentes institutions mais est profondément
original : c’est une institution sui generis.

B. Les éléments caractéristiques du compte courant

Ce qui caractérise le compte courant, ce qui fait son essence, est l’affectation générale et réciproque
de l’ensemble des créances à naitre entre les 2 parties afin de les éteindre mutuellement dans un solde dont
l’exigibilité est repoussée à la clôture du compte. Ces éléments ont été notamment dégagés par 2 décisions
de la chambre commerciale :
- Cass. com. 17 mai 1991 : « le contrat de compte courant est caractérisé par la possibilité de remises
réciproques s’incorporant dans un solde pouvant, dans la commune intention des parties, varier
alternativement au profit de l’une ou de l’autre ».
- Cass. com. 9 janvier 2001 : « la possibilité de remise réciproque peut résulter … ou la dette exigible ».
Si on n’est pas en présence des éléments suivants, on sera en présence d’un compte de dépôt.
Lorsqu’une banque parle d’un compte courant, c’est en réalité un compte de dépôt. Dans la pratique
quotidienne, on appelle compte courant ce qui correspond à un compte de dépôt.

1. Les éléments matériels

a) L’affectation générale des créances entre les parties

Il y a un principe de généralité du compte courant : il doit appréhender l’ensemble des créances entre
les parties, qui doivent s’engager à faire entrer en compte automatiquement toutes les créances dont elles
sont ou seront titulaires l’une envers l’autre. Ainsi, aucune des parties ne peut demander à l’autre le
règlement distinct d’une créance. C’est une garantie fondamentale entre les parties, car on accepte d’ores et
déjà que toute l’activité économique du commerçant entrera en compte. Cela veut dire que les parties
affectent mutuellement leurs créances futures à la garantie des créances futures de l’autre partie.
D’un commun accord, avant que la créance ne rentre en compte, il est possible pour les parties de
décider que telle ou telle créance ne doit pas rentrer en compte. C’est ce qu’on appelle une affectation
spéciale. De même, quand une créance rentre en compte elle perd son individualité, donc si la créance
que je rentre en compte a des sûretés je vais les perdre : on décide de façon tacite que lorsque la créance qui
rentre en compte est dotée de sûretés particulières, on les reporte sur le solde du compte.

b) La réciprocité des remises

C’est une possibilité : elle signifie que le compte doit pouvoir faire l’objet de remises de chacun des
2 correspondants. Il ne fonctionne pas de façon unilatérale, contrairement au compte de dépôt. Dans le
compte courant, les remises doivent pouvoir être réciproques.
Cette condition n’interdit pas qu’on ait un compte courant structurellement débiteur ou créditeur : ce
qui compte est que chaque partie puisse avoir la possibilité de faire des remises. C’est pourquoi on dit que la
réciprocité doit être possible mais n’a pas besoin d’être effective.

c) L’enchevêtrement des remises

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Cet élément ne fait que prolonger le 2e. Cette alternance des remises signifie qu’il y a une possibilité
que les remises soient faites tantôt par l’un, tantôt par l’autre. De même que la réciprocité, cette alternance
n’a pas à être effective.

2. L’élément intentionnel

Les parties doivent avoir entendu travailler en compte courant. Cela montre que le compte courant
est lié à un travail du client, qui est le plus souvent un commerçant : il s’engage à encaisser sur son compte
tous ses chèques. De même, la banque s’engage à faire tous les apports en trésorerie nécessaires, toutes les
avances en compte courant. Le rôle de la banque est de soutenir le client.
Puisque le compte courant est un compte innommé qui repose sur la liberté contractuelle, pas
d’exigence d’écrit particulier, ou d’une volonté donnée dans des formes sacramentelles : la volonté peut être
expresse ou tacite.

§2. Le régime du compte courant

1x caractérisé ces éléments, le compte courant va déployer son régime, avec 2 spécificités :

A. Le règlement des créances

L’entrée en compte d’une créance vaut paiement de celle-ci.

1. L’effet extinctif du compte courant

La créance qui entre en compte courant disparaît, perd son individualité, s’incorpore au solde qu’elle
diminue ou augmente. C’est dès l’entrée en compte que la créance est éteinte.
Dans le compte de dépôt, l’extinction ne se produit que si le solde du compte le permet : pas
nécessairement effet extinctif. Pour le compte courant, toute entrée en compte vaudra paiement, quel que
soit le solde. 3 conséquences :
- Le créancier de la créance en Q° est désintéressé : il n’a plus d’action en paiement contre le débiteur. Il
n’aura d’action en paiement que celle qui peut résulter du solde du compte le jour de la clôture.
- Comme la créance est éteinte, elle cesse de produire ses intérêts : elle ne produit que les effets du solde
du compte.
- Les accessoires de la créance sont aussi éteints. Mais on répute souvent tacitement que les sûretés sont
reportées sur la garantie du solde.

On distingue entre le disponible et le différé : comme les créances sont éteintes dès leur entrée en
compte, n’entrent en compte que les créances certaines, liquides et exigibles. Mais il est certaines créances
non échues, mais si elles ne sont pas éventuelles, elles entrent au différé du compte : c’est un compte
d’attente. On les met en veille. Lorsqu’elles deviendront échues et non conditionnelles, elles rentreront en
compte.

2. L’indivisibilité du compte courant

Cass. civ. 24 juin 1903 : les opérations d’un compte courant se succédant les unes aux autres
forment un tout indivisible qu’il n’est pas possible de décomposer ni de scinder. Cette analyse a longtemps
fait obstacle à l’insaisissabilité du solde du compte courant.
On est revenu sur cette indivisibilité en posant des tempéraments : notamment la saisissabilité du
solde provisoire.
Le fait que le solde soit disponible a toujours été admis : on n’a jamais contesté la possibilité du
client de tirer des chèques. Ajd, on admet que cette disponibilité s’étende aux tiers.
Mais le solde provisoire a beau être disponible, il n’est pas exigible : aucune partie ne peut demander
à l’autre le paiement du solde tant que le compte n’est pas clôturé.

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Quid lorsque le compte courant est cautionné et que la caution résilie son cautionnement ? on
considère que l’obligation de la caution cesse avec sa résiliation. Toutefois, la résiliation est tenue, dans la
limite du solde débiteur, au jour de sa résiliation. L’obligation de couverture de la caution prend fin. Mais
comme la résiliation du cautionnement ne ferme pas le compte, il continue à fonctionner. Cass. Com. 22
novembre 1972 : 1x que la caution a résilié son engagement, le compte courant continue à fonctionner en
sens unique en faveur de la caution > elle est tenue d’un maximum au jour de la résiliation et ne garantit pas
les nouvelles avances aux crédits.

Quid des intérêts du compte courant ? le compte courant est une institution commerciale : il est
présumé porter intérêts, même sans stipulation expresse. Mais il ne produit des intérêts qu’au taux légal, sauf
si les parties ont respecté la règle selon laquelle le TAEG est déterminé par écrit. Les exigences de forme
s’appliquent au compte courant, en tout cas pour le TAEG.
Cass. Com. 22 mai 1991 : les règles du CC sur l’anatocisme sont inapplicables au compte courant >
il jouit d’une capitalisation des intérêts de plein droit. Cela résulte de la fusion du K dans le solde provisoire.

SECTION 2 : Le compte de dépôt

C’est le compte ordinaire, le compte type, le contrat cadre envisagé.

§1. La notion de compte de dépôt

Le compte de dépôt est le compte qui a pour objet d’enregistrer des opérations de caisse qui
augmentent ou qui diminuent le dépôt initial. Il y a une perspective unilatérale et non réciproque. Cass. 1e
civ. 8 janvier 2009 : le compte de dépôt est normalement mouvementé uniquement par des versements ou
des retraits dans la limite du disponible.
Lorsque la P physique n’agit pas pour des fins professionnelles, il y a des règles particulières, à
commencer par l’exigence d’une convention écrite. Ce qui caractérise le compte de dépôt est ce qu’il n’est
pas. Le compte de dépôt n’est pas un compte dans lequel il y a remise réciproque : pas d’effet novatoire
complet, pas de solde indivisible, pas d’intérêts de droit.

§2. Le régime du compte de dépôt

Le compte de dépôt produit des effets juridiques. Il n’est pas uniquement un doc comptable. Mais ses
effets sont nettement moins forts, puissants que ceux du compte courant. Le compte de dépôt n’est pas un
creuset dans lequel on jette des créances des 2 côtés. Il n’est pas soumis au principe de généralité
d’affectation. Je ne suis pas tenu d’affecter toutes mes créances au compte. L’entrée en compte n’est pas
aussi automatique. Les remises sont unilatérales. Quant à l’effet novatoire, il n’est pas aussi fort pour le
compte de dépôt : cet effet ne joue que pour les dépôts que fait le client sur son compte. En revanche, il ne
joue pas à plein du tout pour les créances que le banquier pourrait avoir sur son client. Si le banquier a une
créance sur son client, cette créance qui entre en compte de dépôt ne sera éteinte que si le solde du compte
du client est suffisamment créditeur pour absorber le débit que fait la banque. De ce PDV, on respecte les
règles de la compensation. Le compte de dépôt ne porte intérêt que si c’est stipulé : pas de plein droit. Il est
soumis aux règles de capitalisation des intérêts.

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LECON 8 : Le chèque

La lettre de change, se dégradant, a permis l’apparition du chèque.


Le chèque est un instrument servant à transférer de la monnaie scripturale. Pour ce faire, il existe 2
instruments : le chèque, et les instruments dématérialisés (CB, virements). Le D€ est venu, avec la directive
SEPA de 2007, légiférer sur les services de paiement (transposée par ordonnance de 2009). Depuis, on
distingue les services de paiement, notamment dématérialisés, et les SBP. Dans les SBP, il n’y a plus que le
chèque.

Le chèque est apparu en Angleterre en 1742. La BDF a créé sous le nom de « mandat en blanc » ses
premiers chèques en 1770. Mais il a fallu attendre une loi de 1865 pour que le chèque prenne sa forme
actuelle.
Le chèque est un titre par lequel le tireur (ou émetteur) va donner l’ordre au tiré (la banque) de payer
à vue une somme déterminée au profit du bénéficiaire.
Le droit du chèque a évolué : on a très tôt ressenti le besoin de l’uniformiser. C’est pourquoi la
Convention de Genève sur le droit du chèque a permis qu’en droit international on ait des règles très proches
sur le chèque. Elle a permis un décret-loi de 1935, qui est ajd la substance du CMF. Ajd, dans le CMF, il y a
un Titre 3, « Les instruments de la monnaie scripturale ».
Le chèque n’a plus ajd le vent en poupe. C’est un titre papier, or ajd le papier c’est pas sexy. En
2002, en France, 33% des paiements étaient effectués par chèque, et la même proportion par CB. En 2015,
plus que 11% des paiements par chèque, 51% par CB, et 19% par virements. En 2015, les français ont signé
2,3MM de chèques. Près de 7 chèques sur 10 émis dans l’UE sont émis en France.

Au plan du droit, le chèque est un mandat donné par le tireur au tiré de payer le bénéficiaire. Mais le
chèque recouvre aussi une cession simplifiée de créance, car non subordonnée aux règles du droit civil
concernant les cessions de créance. Par cette cession simplifiée, j’utilise la créance que j’ai sur un EDC pour
la transférer au bénéficiaire : c’est la créance de provision. Le chèque est un titre qui va incorporer la
créance et simplifier sa circulation.
Un titre est un écrit qui constate un acte qui produit des effets de droit. Le chèque est un titre de
paiement, car n’est pas un instrument de crédit. Mais c’est un titre bancaire également : pratiquement, il ne
peut être utilisé que sur une banque.
On dit parfois que le chèque est un titre négociable, et parfois un titre cambiaire. C’est un descendant
de la LDC, qui a perdu de ses qualités. De même, le compte de dépôt est un peu l’ancêtre du compte
courant.

SECTION 1 : L’émission du chèque

Il faut un compte pour émettre un chèque. Sans compte, pas de chèque. Mais il est possible de ne pas
utiliser de chèques.
Il y a 2 étapes dans l’émission d’un chèque : la création et la mise en circulation. On s’intéressera
surtout à la création et aux conditions de validité. C’est un titre bancaire, autrefois cambiaire, mais aussi
formaliste : il doit respecter des conditions de forme et de fond.

§1. Les conditions de forme

A. Les mentions obligatoires

Les 6 mentions obligatoires sont prévues par 131-2 CMF. Cet article impose qu’elles soient
indiquées sur un support papier.

1. La formule de chèque

Rien n’interdit en principe au tireur de tirer le chèque sur n’importe quel papier. En réalité, ça
n’arrive jamais, car dans toutes les conventions signées avec les banques, il y a une interdiction d’émettre

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des chèques sur un autre support que les formules de chèques pré-imprimées délivrées par la banque. de
plus, les banques pratiquent des frais bancaires dissuasifs si ce n’est pas interdit.

2. Le formalisme du chèque

a) La teneur du formalisme

Il y a 6 mentions obligatoires :
- La dénomination de chèque.
- Le mandat pur et simple de payer une somme déterminée.
- La somme écrite en chiffres et en lettres (en cas de différence, la mention en lettres prévaut).
- Le nom du tiré (la banque).
- Date et lieu où le paiement doit être effectué (sans date, le chèque est nul ; si la date est erronée, pas de
nullité ; si le chèque est postdaté, l’émetteur encourt une amende fiscale de 6% du montant du chèque).
- Le lieu de création du chèque.
- La mention du tireur.

SEMAINE 10
b) La sanction du formalisme

L131-3 CMF : « le titre sur lequel une des mentions obligatoires fait défaut ne vaut pas en tant que
chèque ». Il perd sa qualité de titre bancaire. Pour autant, il n’est pas dépourvu de tout effet juridique : il
peut être converti en une promesse de payer, un commencement de reconnaissance de la dette du tireur
envers le bénéficiaire…
L131-4 CMF prévoit de façon supplétive des solutions à certaines omissions :
- Lieu de création non indiqué : chèque réputé créé au lieu désigné à côté du nom du tireur.
- Lieu de paiement non indiqué : chèque réputé payable à l’établissement principal du tiré.

B. Les mentions interdites

Ces mentions sont réputées non écrites car fondamentalement contraires à la nature profonde du
chèque, qui est d’être un instrument de paiement bancaire et à vue (et non un instrument de crédit). Ainsi :
- Le mandat de payer ne peut être assorti de conditions : ce doit être un paiement pur et simple (L131-1
CMF).
- Le chèque ne peut prévoit une acceptation du tiré (L131-5 al. 1 CMF).
- Des intérêts ne peuvent être stipulés (L131-8 CMF).
- Le tireur de la garantie du paiement due au bénéficiaire ne peut en être exonéré (L131-13 CMF).

C. Les mentions facultatives

Elles sont facultatives et pourtant systématiques :


- Le barrement du chèque (L131-44 s. CMF) : au recto du chèque. Le chèque ne peut être payé par le tiré
qu’à un banquier. C’est en principe un barrement général, mais il peut être spécial (payé à un banquier
désigné).
- La mention « non endossable sauf au profit d’une banque » : cette clause interdit l’endossement du
chèque sauf au profit d’un EDC. Il ne peut être transmis par voie d’endossement entre particuliers.
Tempérament : si le chèque est en blanc, alors même si l’endossement interdit est stipulé, il peut circuler
au porteur > se transmet par tradition.
- Le nom du bénéficiaire du chèque : le chèque peut être émis en blanc. En ce cas, il vaut comme chèque
au porteur. Mais souvent, un bénéficiaire est désigné.
- L’ordre à « moi-même » : le tireur et le bénéficiaire peuvent être la même P = chèque de retrait.
- Le nom et le domicile du tireur : seule la signature du tireur est en théorie obligatoire.
- Les mentions de visa, de certification et d’aval.

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§2. Les conditions de fond

A. Le tireur (ou émetteur)

1. Le consentement du tireur

Le chèque est un acte juridique : son émission suppose donc le consentement, non vicié, du tireur. Le
tireur est tenu d’une dette préexistante ou concomitante sur le bénéficiaire, et il émet le chèque pour
l’éteindre. Cette dette doit avoir un contenu licite et le tireur paie par chèque parce qu’il a reçu du
bénéficiaire une contrepartie qui n’est ni illusoire ni dérisoire. C’est ce qu’on appelle le « rapport
fondamental », que l’émission du chèque a vocation à éteindre.

Cette Q° de consentement conduit à une distinction :


- Chèque faux : absence de consentement du tireur dès l’origine > non émis par le tireur, càd le titulaire du
compte (pas sa signature).
- Chèque falsifié : chèque régulièrement émis par le tireur, mais ultérieurement détourné ou altéré (ex :
émis par voie postale & qqn d’autre se l’approprie).
En cas de chèque faux, la JP, visant 1937 CC, est sévère envers les EDC : la banque dépositaire qui a
honoré un chèque faux et donc restitué le montant déposé par son client à un autre, n’est pas libérée >
toujours tenue de son obligation de restitution bancaire. Cass. Com. 12 juillet 2011 : 6 chèques émis ont été
débités par la banque Crédit du Nord. Or il y avait eu vol du chéquier, et les chèques n’étaient pas signés. Le
juge considère que la banque n’avait pas caractérisé l’existence d’un ordre de payer les sommes litigieuses :
elle doit restituer au client les sommes prélevées sur son compte. Cass. Com. 18 juin 2013 : « le banquier
n’est pas libéré envers le client qui lui a confié des fonds quand il se démet de ces derniers sur présentation
d’un faux ordre de paiement ». La CA avait écarté toute faute de la banque en relevant que la falsification ne
pouvait être décelée par la banque > arrêt cassé au motif que les chèques étaient faux dès l’origine puisqu’il
y avait eu vol des chèques. En l’absence de faute du client ou de son préposé, même si la banque n’a pas
commis de faute, elle n’est pas libérée en cas de faux ordre de paiement = R sans faute.
Seule issue : la banque doit démontrer la faute du client qui soit a contribué au dommage (partage de
R), soit a été la cause exclusive du dommage (exonération de R). Cass. Com. 10 juin 1980 : le client a
laissé trainé son carnet de chèques, n’a pas constaté sa disparition, et n’a pas vérifié ses relevés de compte
sur lesquels il aurait pu voir le paiement d’un chèque volé > négligence du client. La banque a été exonérée
de sa R en raison de l’imprudence du client.

2. La capacité et le pouvoir du tireur

La capacité du tireur est nécessaire car l’émission d’un chèque est un acte juridique. Elle s’apprécie
selon le droit commun.
Un mineur non émancipé ne peut émettre de chèque, mais il arrive que des banques délivrent des
chéquiers à des mineurs dans le but de régler des dépenses de la vie courante (moins fréquent que la CB).
Un majeur sous tutelle ne peut émettre de chèque. Un majeur sous curatelle peut en émettre, mais
assisté de son curateur, et seulement en règlement d’actes d’a°.

Le pouvoir du tireur est aussi nécessaire.


Pour une P morale, le chèque ne peut être émis sur son compte que par son représentant légal, ou qqn
qui a une délégation.
En cas de compte indivis, il faut en principe le consentement de l’ensemble des titulaires du compte.
En cas de compte joint, chaque titulaire peut émettre seul des chèques (principe d’autonomie).

B. Le tiré

L131-4 al. 1 CMF : « un chèque ne peut être tiré que sur un EDC ou un établissement assimilé »
(PSI, TP, Caisse des dépôts, BDF). Le chèque est ajd le seul SBP : il ne peut être tiré sur un opérateur ne
recevant pas de FRP (établissement de monnaie électronique, SDF...).

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C. Le bénéficiaire

Le bénéficiaire doit avoir la capacité de recevoir le paiement par chèque : il ne doit pas être un
incapable. Il doit consentir à ce mode de paiement : un créancier est toujours libre de refuser un paiement
par chèque.
De même, un commerçant peut refuser un paiement par chèque, ne l’accepter qu’à partir d’un certain
montant ou le refuser au-delà d’un certain montant. Il faut simplement en informer clairement la clientèle
par voie d’affichage. S’il est adhérent à un Centre de gestion agréé, le commerçant est obligé d’accepter tous
les chèques quel que soit leur montant : ce doit aussi être affiché en magasin.

§3. La provision

Techniquement, ce n’est pas une condition de validité du chèque, mais elle est partout dans le droit
du chèque = le droit de la provision du tireur sur le tiré.
L131-4 CMF : « le chèque ne peut être tiré que sur un EDC ayant au moment de la création du titre
des fonds à la disposition du tireur ».

A. L’existence de la provision

1. Définition de la provision

La provision est une créance de somme d’argent du tireur sur le tiré. Cette créance peut être
constituée soit par le solde créditeur du compte (le résultat d’un dépôt préalable fait par un client sur son
compte), soit par un solde débiteur à condition que le client soit bénéficiaire d’une ouverture de crédit.
L131-4 CMF : « le chèque ne peut être tiré que sur un EDC, un PSI, le TP, la Caisse des dépôts et
consignations, la BDF, ayant au moment de la création du titre, des fonds à la disposition du tireur et
conformément à une convention expresse ou tacite d'après laquelle le tireur a le droit de disposer de ces
fonds par chèque ».
L’autorisation de découvert est une opération de crédit qui permet au titulaire du compte de disposer
des fonds à hauteur de cette autorisation.

2. Existence de la provision

Le tireur est seul tenu de prouver que celui sur qui le chèque était tiré avait provision au moment de
la création du chèque. La preuve se fait par tout moyen (L131-4 al. 3 CMF).
Si le tireur a plusieurs comptes auprès de sa banque, sauf convention d’unité de compte ils sont en
principe indépendants : si le chèque est tiré sur le compte A, on ne peut invoquer le solde créditeur du
compte B comme provision. La provision s’apprécie compte par compte.

a) La provision doit être préalable

Le CMF exige que la provision existe au moment de la création du chèque. IRL, les choses sont
différentes : ce n’est que par l’émission du chèque et son dessaisissement (et non par sa création) qu’il y aura
transfert de la propriété de la provision. Ce caractère préalable concerne plutôt la présentation du chèque au
paiement.
L’émission d’un chèque sans provision n’est plus sanctionnée pénalement.
Le tiré ne prend connaissance de l’existence du chèque émis par son client qu’au jour où il est
concrètement présenté au paiement : il y a un laps de temps. On considère parfois que c’est au moment de la
présentation au paiement que la provision doit être effectivement constituée.

b) La provision doit être certaine, liquide, exigible et disponible

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Le tireur doit avoir le droit de disposer des fonds à l’égard du tiré, en vertu d’une convention
expresse ou tacite > pas de problème en cas de solde créditeur ou d’autorisation de découvert.
Mais problème si le client émet le chèque avant de demander l’autorisation de découvert. Cass.
Com. 4 mars 1986 : le montant d’un chèque en instance d’encaissement ne peut constituer une provision
disponible.

c) La caractère irrévocable de la provision

L’irrévocabilité : ça renvoie à l’idée qu’il faut une provision au moment de la création du chèque.
Mais comme il y a un laps de temps entre la création et la présentation au paiement, le tireur doit garantir
qu’elle existera et sera suffisante au jour du paiement.
C’est pourquoi certains commercialistes parlent d’une « disponibilité de fait » de la provision. Ex : le
tireur a 1000€ sur son compte et émet un chèque le 1 e décembre > si le lendemain, la provision est retirée, la
provision disparaît au mépris de son irrévocabilité. Mais si je reconstitue la provision le surlendemain,
aucune incidence : la monnaie est fongible. Ce qui compte est donc d’avoir une provision suffisante au
moment de la présentation en paiement.
Règle pénale à L163-2 CMF : est puni de 5 ans d’emprisonnement & 375k€ d’amende le délit de
retrait ou de blocage de la provision = « le fait pour toute P d'effectuer après l'émission d'un chèque, dans
l'intention de porter atteinte aux droits d'autrui, le retrait de tout ou partie de la provision, par transfert,
virement ou quelque moyen que ce soit, ou de faire dans les mêmes conditions défense au tiré de payer »
(assez rare).

La révocation d’une autorisation expresse ou tacite de découvert : cas où la provision existe au jour
de la création du chèque et résulte d’une autorisation de découvert, mais le banquier la révoque et le chèque
est présenté au paiement après. Distinction :
- Autorisation de découvert expresse : forme d’ouverture de crédit. Elle est révocable si à durée
indéterminée et après préavis raisonnable. Cass. Com. 30 mai 2000 fait une distinction :
o Pas d’autorisation de découvert : la banque n’est pas tenue de payer un chèque
lorsque le solde du compte tiré était supérieur au montant du chèque lors de son
émission, mais est ensuite devenu insuffisant suite à des retraits du titulaire. Ici, c’est
la R du tireur.
o Provision constituée par une autorisation de découvert : la révocation ultérieure du
découvert ne peut préjudicier au bénéficiaire du chèque. La banque devra payer les
chèque émis avant le retrait de l’ouverture du crédit, mais présentés après.
- Autorisation de découvert tacite : le crédit est une notion ambivalente. Un service rendu par la banque
peut-il être transformé en autorisation de découvert tacite ? C’est la différence entre un engagement
stable et permanent de découvert, et ce qu’on appelle une simple facilité de caisse (= tolérance, ou
facilité ponctuelle et de durée limitée). Cass. Com. 4 mars 1986 : une caisse de Crédit mutuel avait
l’habitude de consentir des découverts momentanés à une P > pas d'engagement stable et permanent de
la caisse de payer à découvert jusqu'à un certain montant les chèques émis par sa cliente. La tolérance ne
fonde pas l’acquisition d’un droit. Si la banque a rendu ponctuellement service, cela ne l’oblige pas à
constituer provision sur d’autres chèques : elle ne peut voir sa R engagée car elle n’a pas accordé de
découvert expresse ni tacite.En revanche, si on est en mesure d’identifier un engagement stable et
permanent (ex : la banque paye chaque mois un chèque à hauteur de 150€), le client a le droit de
considérer qu’elle a une provision à la hauteur du montant habituel. C’est au tireur de démontrer qu’il
bénéficie d’un engagement stable et permanent d’une autorisation de découvert. Cass. Com. 30 mars
2010 : « lorsqu'il n'existe pas de provision préalable suffisante, le banquier, en passant au débit du
compte de son client un chèque émis par ce dernier et présentant toutes les apparences de la régularité,
lui consent une facilité de caisse sur sa demande implicite ».

B. La suffisance de la provision

1. Insuffisance de la provision

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Si la provision n’existe pas ou est insuffisante, le banquier tiré peut refuser de payer le chèque (L131-
73 CMF).Une provision partielle équivaut à une absence de provision de ce PDV.
Cette insuffisance de provision va justifier le refus du tiré de payer : le chèque et sa remise au
bénéficiaire ne lui donne pas l’absolue certitude d’être payé.

2. Garantie de la provision

Le tireur, par sa signature, s’engage à honorer le paiement du chèque si le tiré ne le paye pas : il reste
tenu à la fois au plan du droit cambiaire et au plan du droit fondamental.
L131-67 CMF : « la remise d'un chèque en paiement, acceptée par un créancier, n'entraîne pas
novation. En conséquence, la créance originaire, avec toutes les garanties qui y sont attachées, subsiste
jusqu'au paiement du chèque ». Cela veut dire que l’émission du chèque n’éteint pas l’obligation
préexistante de paiement que le tireur peut avoir à l’encontre de son créancier à qui il a remis le chèque en
paiement.
La remise d’un chèque au paiement se distingue aussi de la dation en paiement = remise au paiement
par le transfert de propriété d’un bien autre que le bien ou le service initialement convenu. Seul le paiement
effectif par le tiré du bénéficiaire éteindra la créance du bénéficiaire.

Pour renforcer la sécurité du paiement, il existe plusieurs mentions facultatives à porter sur le
chèque :
- L’aval : le chèque est une LDC qui a mal vieilli, à ce titre il peut être théoriquement revêtu d’un aval =
possibilité d’un cautionnement solidaire cambiaire d’un effet de commerce, ou ici d’un instrument de
paiement qu’est le chèque. Le donneur d’aval est une caution solidaire du paiement du chèque : il
s’engage à payer le chèque si le tiré ne paye pas. Si l’avaliste paye, il peut se retourner contre le tireur. Si
le chèque revient impayé, le bénéficiaire du chèque peut agir contre le tireur garant du chèque et contre
l’avaliste.L’aval est très rare en matière de chèque.
- Le visa du chèque (L131-5 al. 2 CMF) = mention facultative par laquelle le banquier tiré va constater
l’existence de la provision au jour de l’émission du chèque. Cela n’oblige pas le banquier à immobiliser
la provision, donc cela n’empêche pas le tireur de tirer la provision après l’avoir visée.
- La certification du chèque (L131-14 CMF) : effet plus fort que le visa, car le banquier qui certifie le
chèque non seulement constate l’existence et la suffisance de la provision au moment de l’émission,
mais bloque aussi la provision jusqu’au délai légal de présentation du chèque (8 jours).Cette certification
peut être demandée soit par le tireur, soit par le bénéficiaire du chèque. Elle n’a d’intérêt que si le porteur
du chèque vient demander le paiement dans le délai.
- Le chèque de banque : chèque particulier dans lequel il y a identité de P entre tireur & tiré (on a reconnu
aux banques la possibilité d’être à la fois tireur et tiré, ce qui en théorie n’est pas possible puisqu’on ne
peut être a la fois débiteur & créancier d’une même obligation). Le chèque de banque est un chèque dans
lequel une banque tire le chèque sur elle-même. Pour être valable, il doit être au profit d’un bénéficiaire
dénommé : il est recherché quand il s’agit de régler des sommes importantes (ex : immobilier, voiture,
tableau). Intérêt : la provision est garantie par la banque durant le délai de prescription de l’action contre
le tireur (1 an). Depuis 2015, on ne peut plus payer un achat immobilier par un chèque de banque. Toute
somme > 3000€ doit être payée par virement bancaire à la Caisse des dépôt, puis le notaire accepte ou
non de virer la somme sur le compte du bénéficiaire. Le chèque de banque est ajd menacé car sujet à des
arnaques.

C. Le transfert de la propriété de la provision

L’émission d’un chèque est un mandat irrévocable de payer. Elle emporte transfert immédiat de la
propriété de la provision : lorsque je me dessaisis du chèque, je transfère la propriété de la provision.
Ce transfert n’est pas prévu dans le CMF. Seul L131-20 CMF dispose que l’endossement transfère
tous les droits du chèque, et notamment la propriété de la provision. Ce que peut faire l’endossement,
l’émission du chèque le fait aussi. Dès l’émission du chèque, la créance de provision du tireur sur le tiré
passe au bénéficiaire du chèque, elle sort du patrimoine du tireur cédant et est acquise de plein droit dans le
patrimoine du bénéficiaire cessionnaire de la provision.

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Pourquoi la provision est-elle dite irrévocable ? Pourquoi sanctionne-t-on le retrait avec intention de
nuire ? Donner c’est donner, reprendre c’est voler.Les événements qui affectent la P du tireur sont en
principe indifférents, et n’affecteront pas le porteur du chèque (ex : décès, incapacité, ouverture de PC).
Exception en matière de saisie-attribution de compte bancaire : pendant une période de 15 jours,
possibilité de régularisation des opérations en cours au crédit comme au débit. Concrètement, le porteur d’un
chèque peut être en conflit avec un créancier saisissant le compte. Pour que le porteur l’emporte, il faut non
seulement que le chèque ai été émis avant la saisie, mais aussi qu’il ait été remis à l’encaissement avant la
saisie.Il y a un risque que le porteur du chèque, qui en théorie est propriétaire de la provision, se voie flouer
par le saisissant à cause de la régularisation.

SECTION 2 : Le paiement du chèque

§1. La remise au paiement du chèque

Le bénéficiaire remet à sa banque le chèque reçu en paiement par voie d’endossement. Puis le chèque
est présenté au paiement par le banquier du bénéficiaire (banquier présentateur). Enfin, le banquier tiré doit
effectuer certaines vérifications.

A. L’endossement du chèque

Le chèque peut circuler quand le nom du bénéficiaire n’est pas indiqué sur le chèque. Ajd, les
chèques sont systématiquement barrés et non endossables, sauf au profit d’une banque.Donc le chèque est
bien un instrument bancaire, contrairement à la LDC.
La banque du bénéficiaire présente le chèque car elle est endossataire du chèque, le client
bénéficiaire est endosseur. 3 endossements sont possibles :
- Endossement pignoratif (jamais vu) :pour constituer un gage sur la provision.
- Endossement translatif(L131-20 CMF) : transfère la propriété du chèque.
- Endossement de procuration : mandat d’encaissement.

1. Les conditions de validité de l’endossement

Ce qui compte est la signature de l’endosseur au verso du chèque : théoriquement, seule sa signature
est requise, mais on peut ajouter des mentions. En théorie, il peut signer sur une feuille distincte attachée au
chèque, l’« allonge ».
Le nom de l’endossataire n’a pas besoin d’être désigné : le plus souvent, on endosse en blanc.
De même que l’émission du chèque ne doit pas être assortie de conditions, l’endossement ne peut
être ni partiel, ni conditionnel.
Si l’endossement est un endossement de procuration, il faut en principe écrire au verso du chèque
« endossement de procuration » ou une formule équivalente (en pratique, jamais fait).

2. Les effets de l’endossement

- L’endossement translatif : transmet à l’endossataire l’ensemble des droits résultant du chèque,


notamment la propriété de la provision (L131-20 CMF). Donc l’endossataire devient propriétaire du
chèque, mais il acquiert aussi la propriété de la créance de provision que ce chèque transfère. Il va
bénéficier de l’inopposabilité des exceptions (en pratique, ça ne joue pas). L’endossataire bénéficie de la
garantie solidaire de tous les bénéficiaires du chèque.
- L’endossement de procuration : confère juste un pouvoir de représentation. Il est non translatif de
propriété du chèque comme de la provision.Le banquier endossataire est mandataire, il représente le
bénéficiaire en vue du paiement.

Q° de la volonté des parties : qu’ont-elles voulu ? On trouve rarement cette mention au dos du
chèque.La JP, se fondant sur l’usage et la probabilité, considère que l’endossement est présumé translatif
(bonne solution) :

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- Présomption simple pour l’endosseur & l’endossataire : pour la renverser, il faudrait par exemple une
mention « valeur en recouvrement », ou que la convention de compte dise que les remises de chèque ne
se font qu’aux seules fins d’encaissement.
- Présomption irréfragable pour les tiers : ils sont fondés à considérer que le banquier est bien le
propriétaire du chèque et de la provision.

Au plan des effets de l’endossement :


- Si l’endossement est translatif, on est dans l’escompte (= technique de refinancement) > le chèque est
refinancé par le banquier endossataire qui crédite son montant sur le compte du client, sans attendre de
savoir si le chèque est provisionné, cependant sous réserve de la contre-passation (le banquier peut faire
l’écriture inverse si le chèque revient impayé après sa présentation au paiement).
- Si l’endossement est de procuration, comme le banquier n’est qu’un mandataire en vue de
l’encaissement, il n’est pas tenu de créditer le compte du client avant d’avoir reçu paiement effectif du
tiré > pas d’escompte, pas de refinancement.
Non seulement l’endossement est présumé translatif, mais en plus, systématiquement les banques
avancent le montant du chèque au client, quitte ensuite à contre-passer, alors même que l’endossement
pourrait être un endossement de simple procuration. Cette pratique est si répandue que Cass. com. 19 juin
2012 : la banque a l’obligation de prévenir son client, à peine d’engager sa R, si elle ne procède pas à
l’inscription en compte immédiatement.

B. La présentation au paiement par le banquier présentateur

1. Les vérifications du banquier présentateur

Le banquier qui présente le chèque doit vérifier la régularité formelle du chèque, et celle du
bordereau de remise de chèque qui l’accompagne : il doit vérifier toutes les mentions obligatoires, la
correspondance de la signature au spécimen, l’absence d’anomalies apparentes ou ratures. Le cas échéant, il
en informe son client.
Mais c’est un contrôle formel : combinaison des devoirs de non immixtion et de vigilance. La banque
n’a pas à s’interroger sur la cause de paiement du chèque, ou sur le montant élevé. Elle ne doit pas
s’immiscer dans les affaires de son client (sauf blanchiment d’argent, terrorisme).

Ce contrôle formel est-il suffisant ? Cass. Com. 17 mai 2017 :un chèque de banque de 23k€ est
remis à une banque (vente d’une voiture via internet).5 jour après la vente, le chèque est rejeté et le vendeur
se rend compte que le chèque est un faux (volé et présenté comme un vrai). Pour la CA, il y a faute de la
banque qui a été négligente : le jour même de la remise du chèque faux, elle a émis au profit de la marque de
la voiture un chèque de 23k€ destiné à éteindre le crédit sur la voiture du vendeur, sans s’assurer au
préalable si la somme serait effectivement présente sur le compte qui ne présentait pas de provision
suffisante, et il y avait déjà eu des mises en garde contre les faux chèques de banque. Cassation : la banque
chargée d’encaisser un chèque après s’être assurée du bénéficiaire n’est tenue de détecter que les anomalies
apparentes et la régularité du titre. Elle n’est pas responsable et ne doit pas rembourser le montant du chèque
au client.

2. Le délai de présentation au paiement

Il faut présenter le chèque au paiement dans les 8 jours de sa date de création = dans les 8 jours de la
date portée sur le chèque (L131-32 CMF).Si le chèque est émis en Europe mais hors de France, le délai est
de 20 jours. Hors Europe, il est de 80 jours.
L131-35 al. 1 CMF : le chèque doit être payé même après l’expiration du délai de présentation. Ce
délai n’a qu’une incidence sur les recours. S’il est certifié, la provision est bloqué pendant ces 8 jours
seulement.

En pratique, ce qui est vérifié, ce sont les images numérisées du chèque par la banque, qui les
transmet aux fins de compensation interbancaire à la banque tirée. C’est pourquoi L131-34 CMF précise que

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la présentation du chèque à une chambre de compensation équivaut à une présentation en paiement. En effet,
en 2004, 6 grandes banques françaises ont créé le système STET-CORE (Système Technologique d’Echange
et de Traitement – Compensation Retail), géré par une sté privé.Cela ne concerne pas que les chèques, mais
aussi les virements, opérations par CB. C’est le système de paiement et de compensation le plus important
en Europe en termes de données échangées (5250MM€).

C. Les vérifications du banquier tiré

Le banquier tiré doit aussi procéder à des vérifications formelles, plus substantielles que pour le
banquier présentateur : il doit s’assurer de la régularité formelle du chèque, comparer la signature du tireur
au spécimen, vérifier l’absence d’opposition, la suffisance de la provision (sauf à consentir une facilité de
caisse).
Ces vérifications ont un coût : les banques se sont aperçues qu’il valait mieux de temps en temps
indemniser en cas de non accomplissement de ces devoirs de vérification. La JP a réagi avec Cass. com. 9
juillet 2002 : la CA relève que la banque tirée procède au paiement des chèques de façon informatique, et
qu’ainsi la banque présentatrice était la seule à même de procéder à un contrôle efficace. Cassation : « la
banque tirée est tenue de vérifier la régularité formelle du titre ; en s'en abstenant elle prend un risque dont
elle doit assumer les conséquences ».

Il faut à nouveau distinguer entre le chèque faux et le chèque falsifié :


- Le chèque faux : c’est l’absence de consentement dès le départ. Le tireur n’a pas donné ordre de
paiement (typiquement, sa signature a été imitée). La R du banquier est engagée de plein droit à l’égard
de son client : cette R repose sur 1937 CC. Il faut que la banque soit en mesure d’administrer la preuve
d’une faute du déposant. Mais Cass. com. 28 janvier 2014 : le gérant d’une sté a fréquemment autorisé
sa comptable à émettre des chèques pour le compte de la sté en imitant sa signature. Mais elle va
continuer à le faire pour son propre profit. La banque tirée est-elle responsable de plein droit, ou bien le
gérant a-t-il commis une faute en autorisant qqn qui n’est pas le représentant légal à signer les chèques ?
La CA exonère la banque de sa R et considère qu’elle n’a pas à restituer les fonds à la sté. Cassation :
contrôle strict > la faute du titulaire n’est pas la cause exclusive du dommage, la négligence du tireur
n’est pas une faute suffisamment grande pour exonérer totalement le tiré.
- Le chèque falsifié : créé valablement par le tireur, mais détourné ou altéré. C’est un régime de R pour
faute prouvée du tiré : le tireur doit prouver que le banquier a commis une faute.Cette solution est
constante en JP. La faute s’apprécie p/r a l’employé normalement diligent ou avisé, qui doit savoir
détecter certaines anomalies apparentes. Mais depuis que les chèques sont scannés, c’est plus difficile à
voir. Cass. com. 16 mars 2010 : un chèque est émis par une sté qui fait construire une piscine, au profit
d’une autre sté.Ce chèque a été présenté au paiement par une autre sté qui a rajouté une mention. La 1 e
société reproche à la banque d’avoir payé le chèque, et l’assigne en restitution. La CA condamne la
banque à payer, en retenant que le banquier tiré est soumis à 1937 CC. Cassation : « le rajout sur le
chèque de la mention "Azur Piscines" ne constitue pas une anomalie qu'un employé normalement avisé
aurait dû déceler en procédant à la vérification de la régularité apparente du chèque ». Donc pas de R du
tiré : la faute n’est pas rapportée. L633-3 CMF : 7 ans de prison + 750k€ d’amende pour falsification de
chèque.

D. Le paiement du chèque

2 possibilités :
- Soit le banquier tiré paye le chèque : s’il y a provision et pas d’opposition. L131-38 al. 1 CMF : « celui
qui paye un chèque sans opposition est présumé valablement libéré ».
- Soit le banquier tiré refuse de payer le chèque : le banquier présentateur contrepasse le montant du
chèque revenu impayé.
Pour les dates de valeur, L131-1-1 CMF : la banque ne peut affecter le chèque d’une date de valeur >
1 jour ouvré.

SEMAINE 11 (mardi)

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§2. Les incidents de paiement

A. l’opposition au paiement du chèque

C’est une interdiction de payer adressée au tirée. Cela renvoie à 2 principes clés du droit du chèque
avec lesquels cette interdiction entre en confrontation : le transfert immédiat de la propriété de la provision
& le mandat irrévocable adressé au tiré de payer le chèque.

1. le domaine de l’opposition (L131-35 CMF)

a) L’auteur de l’opposition

C’est le tireur qui fait opposition. C’est la position de la JP, même si elle ne se prononce pas
fréquemment sur cette Q° et qu’on doit chercher les arrêts d’appel. CA de Colmar, 9 avril 2014 : seul le
tireur peut former opposition.
La doctrine est parfois réservée sur ce point. Une partie soutient que le bénéficiaire devrait pouvoir
former opposition, dans le cas particulier où le tireur se serait dessaisi du chèque : il a remis le chèque au
bénéficiaire, qui l’a perdu ou se l’est fait subtiliser. Dans ce cas, on admet que, nécessité faisant loi, le
bénéficiaire puisse également former opposition afin d’éviter que le chèque soit payé au profit de celui qui a
trouvé ou volé le chèque. Mais pas de JP sur cette Q°.

b) Les cas d’opposition

Il existe 4 cas d’opposition envisagés par L131-35 CMF de façon exhaustive :

- Perte du chèque : égarement involontaire. Il n’y a perte qu’en l’absence de toute remise volontaire du
chèque au bénéficiaire.
- Vol du chèque : soustraction frauduleuse du chèque. On y assimile l’extorsion du chèque obtenu sous la
contrainte.
- Ouverture d’une procédure d’insolvabilité à l’encontre du porteur du chèque : il existe la règle de
l’égalité des créanciers. Pour la faire respecter, on permet l’opposition en cas de PC ouverte contre le
bénéficiaire du chèque (en principe créancier de la provision) pour éviter que le montant de cette
provision ne soit détourné au mépris des créanciers de l’entreprise en difficulté.
- Utilisation frauduleuse du chèque : nouveau cas de la loi de 1991, qui ne l’a pas défini. Pour la JP, ce qui
caractérise l’utilisation frauduleuse est la remise volontaire du chèque, à la différence de la perte et du
vol. Il faut que le tireur se soit dessaisi volontairement du chèque. On pense à l’abus de confiance ou
l’escroquerie. La JP se réfère parfois aux promesses mensongères. Cass. com. 24 octobre 2000 :
conception extensible de l’utilisation frauduleuse du chèque. X mandate Y d’acheter pour son compte un
véhicule, et émet à l’ordre de la sté de Y un chèque. Le lendemain, X se rend compte que le véhicule n’a
pas été acheté, et fait opposition au chèque. Selon la CA, pas d’utilisation frauduleuse du chèque malgré
l’absence de contrepartie effective = mainlevée de l’opposition. Cassation : pas de base légale, car le
chèque n’aurait pas été remis à Y sans manœuvre frauduleuse de sa part. Il lui avait affirmé faussement
que le véhicule qu’il était chargé de commander en Belgique lui serait délivré dès après la remise du
chèque. Pour la Ccass, l’opposition est fondée car, suite à une manœuvre frauduleuse du bénéficiaire, le
chèque a été remis et encaissé. Les manœuvres frauduleuses peuvent donc émaner du bénéficiaire du
chèque lui-même.

Peut-on former une opposition en présence d’un chèque de garantie ? C’est un chèque auquel les
parties souhaitent imprimer une fonction particulière : elles essayent de suspendre la fonction d’instrument
de paiement du chèque pour lui imprimer une fonction de garantie. Concrètement, les parties (tireur et
bénéficiaire) conviennent que le bénéficiaire ne remettra pas le chèque à l’encaissement sauf si une
obligation garantie par ce chèque et envisagée par les parties a fait l’objet d’une défaillance (l’obligation doit
être exigible, échue). Ex : un chèque de garantie est tiré par le dirigeant d’une sté sur ses deniers personnels

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pour garantir le paiement de fournitures par sa sté / les locataires d’un immeuble signent un bail et, en
attendant l’émission d’une garantie bancaire, ils signent un chèque de garantie qu’ils remettent au bailleur.
Ce chèque offre en vérité une faible sécurité aux parties : la parole donnée du bénéficiaire a peu de
prix car la nature d’instrument de paiement à vue du chèque sur lequel on ne peut pas mettre de mention
conditionnelle de paiement fait que rien n’interdit au bénéficiaire de l’encaisser.
Le fait pour le bénéficiaire qui encaisse le chèque de garantie alors que la condition n’est pas
survenue est-il une utilisation frauduleuse du chèque fondant l’opposition? Non, d’après Cass. com. 24
octobre 2000 : « un chèque est un instrument de paiement que le bénéficiaire peut faire encaisser même
dans le cas ou il lui a été remis à titre de garantie, sauf à lui en restituer le montant si le paiement reçu était
indu. Le droit d’obtenir paiement d’un chèque ne pouvant être subordonné à la réalisation d’une condition,
ne constitue pas une utilisation frauduleuse justifiant l’opposition la remise de ce chèque à l’encaissement
même s’il a été reçu à titre de garantie ». Ce n’est pas une utilisation frauduleuse car il est de la nature du
chèque de pouvoir être encaissé à tout moment.
Mais décision curieuse dans Cass. com. 22 septembre 2015 : un chèque de garantie n’a pas été daté
lors de sa création, comme convenu par un accord non équivoque entre les parties. Le porteur du chèque, le
jour où il a encaissé le chèque, a posé une date. Q° de licéité ? Cela fonde-t-il une opposition? Non : après
avoir apposé une date, le porteur n’a fait que lui conférer l’usage de chèque de garantie qui lui était
conventionnellement destiné par les parties. C’est un arrêt surprenant, car la date en principe est une
condition de validité du chèque, une mention obligatoire sans laquelle le chèque ne vaut pas chèque. Or ici,
l’arrêt admet la licéité du chèque de garantie grâce à l’accord non équivoque portant sur l’absence de
datation du chèque. On va à l’encontre du formalisme cambiaire.
Donc le chèque de garantie n’est pas un outil d’opposition.
Réserve de la cour de cassation depuis 2000 : « sauf à en restituer le montant si le chèque était
indu » xxx.

c) Les formes d’opposition

Depuis la loi de 1991, L131-35 al. 2 CMF : il faut que l’opposition soit confirmée par écrit (peut être
électronique, mais souvent LRAR).

2. Les effets de l’opposition

Pendant longtemps, le banquier n’était pas juge de l’opposition et devait y déférer. Evolution avec la
loi de 1991 appliquée par L131-35 al. 3 CMF : le banquier doit rappeler à son client systématiquement les
sanctions qu’il encourt si l’opposition est illicite. Le banquier doit rappeler au tireur que le délit de blocage
de la provision existe (5 ans de prison + 375k d’amende).
Depuis cette loi, le banquier doit vérifier la rectitude formelle des motifs d’opposition. Il est juge du
point de savoir si l’opposition entre bien dans l’un des 4 cas prévus par le législateur. Si ce n’est pas le cas,
ce n’est pas un motif valable d’opposition, et le banquier enverra un courrier en expliquant pourquoi
l’opposition ne peut être acquise.
Si le banquier tiré doit vérifier la régularité formelle de l’opposition, son devoir de non ingérence lui
interdit d’aller plus loin : il n’a pas à vérifier le bien-fondé, la véracité du motif, juste vérifier qu’on est bien
dans l’un des 4 cas.
La doctrine remarque que la notion d’utilisation frauduleuse est celle qui prête le plus à
interprétation : c’est celle qui offre le plus de liberté au tireur. xx
L’opposition produit 2 effets :
- L’interdiction faite au banquier tiré de payer le chèque : l’opposition est parfois analysée comme la
révocation du mandat de payer que le chèque avait eu pour effet de conférer au tiré.
- L’obligation faite au banquier tiré de bloquer la provision du chèque : il doit immobiliser, geler la
provision jusqu’à ce que le cas échéant un juge se prononce sur la validité au fond de l’opposition.
On admet que le bénéficiaire du chèque qui critique l’opposition puisse saisir le juge des référés afin
d’en obtenir mainlevée. S’il l’obtient, la banque devra payer le chèque.

B. Le refus de paiement du chèque

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Il s’agit du refus de paiement faute de provision : c’est le 2nd incident de paiement. Si la provision est
suffisante, le chèque sera payé par le tiré au banquier présentateur. En l’absence de provision, le banquier
tiré peut refuser de payer le chèque, sauf dans 2 hypothèses :
- Chèque de faible montant : depuis une loi de 1975, afin d’assurer la sécurité des échanges et d’éviter des
vérifications plus coûteuses que l’indemnisation des cas pathologiques, les chèques d’un montant < ou =
100F doivent être payés par le tiré même en l’absence de provision, dès lors que le chèque aura été
présenté au paiement dans le mois de l’émission du chèque (L131-82 CMF). On est en présence d’une
fiction du législateur : à l’évidence, il n’y a pas de convention entre les parties autorisant le tireur à
émettre des chèques non provisionnés de moins de 15€, mais c’est le cas pour la sécurité des transactions
et l’objectif d’efficacité économique. C’est une atteinte à la liberté du prêteur de ne pas consentir à un
crédit. Xxx Quid d’un fractionnement (émission de plusieurs chèques de 15€) ? Le législateur a prévu
une contravention de 5e classe en cas de fractionnement d’un paiement de +15€ en plusieurs chèques de
–15 euros (R163-1 CMF : 1500€ d’amende, 3000€ si récidive).

xxx Q° de la faute du banquier : le banquier est parfois considéré comme fautif d’avoir conservé au
tireur des chèques. Il n’avait pas qu’à laisser qqn de dangereux avec des chèques entre les mains. Le
banquier a estimé que le tiré devra honorer les chèques émis par ce dernier.
xxx Si un client du banquier devient interdit bancaire et que le banquier ne reprend pas les formules
de chèques, il encourt sa R.

1. Les sanctions du chèque sans provision

Une loi de 1917 a créé un délit d’émission de chèque sans provision. Mais ce délit ne présentait pas
de valeur dissuasive : par la loi de 1991, le législateur a décidé de dépénaliser l’émission de chèque sans
provision. Depuis, elle ne donne pas lieu à une quelconque sanction pénale.
Les seules sanctions qui peuvent se concevoir sont civiles. La principale est l’interdiction bancaire,
qui revêt un caractère infamant : l’objectif est de dissuader l’émission de chèques en bois. Ils font l’objet ajd
d’une police commerciale, civile, confiée aux banques, qui ont une R importante à l’égard du coaching des
tireurs impécunieux. Avant de remettre un chéquier à un client, une banque doit d’abord s’adresser à la BDF
pour vérifier que le client n’est pas interdit bancaire. La banque est en effet tenue d’honorer un chèque
même non provisionné. De la même façon, la loi interdit aux banques de laisser à la disposition de leurs
clients des formules de chèques alors que ces clients ont fait l’objet d’un incident de paiement non
régularisé.

a) Les obligations du banquier tiré

L131-73 CMF est l’article fondamental : il énonce le déroulement des événements lorsqu’un chèque
sans provision est émis.

 L’information du tireur préalablement au rejet du chèque.

L131-73 CMF impose que la banque informe le tireur du prochain rejet du chèque. Cette obligation
d’information a été généralisée à toutes les banques par la loi MURCEF de 2001. Elle a généralisé la bonne
pratique de tous les EDC afin que tous les clients soient traités également : certaines banques informaient
leurs clients, mais pas toutes.
Cette information doit revêtir plusieurs caractères :
- Préalable : elle doit survenir un peu avant le moment du rejet du chèque, l’objectif étant de pouvoir
fournir provision en urgence.
- Précise : le banquier doit informer le client du chèque dont le rejet est envisagé. Cass. com. 18 janvier
2011 : si un tireur a émis plusieurs chèques non provisionnés, cet avertissement du CMF doit être
effectuée chèque par chèque. « Tout refus de paiement d’un chèque doit être précédé de
l’avertissement ».

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Quelle sanction pour le banquier ? Le tireur pourrait invoquer la perte de chance d’avoir régularisé à
temps le chèque. On n’est pas sûr qu’il l’aurait fait, mais la perte de chance est la disparition actuelle et
certaine d’une probabilité d’un événement favorable.

 L’interdiction bancaire.

Si le client n’a pas utilisé l’information pour essayer de provisionner le chèque s’il le pouvait, on
arrive à l’étape de l’interdiction bancaire. Elle se manifeste par une injonction de la banque : elle doit faire
injonction au client de restituer toutes les formules de chèque en sa possession et de ne plus émettre de
chèque. Cette injonction est le point de départ de l’interdiction bancaire, qui a une durée de 5 ans à compter
de cette injonction. Elle était d’un an jusqu’en 1991 où elle a été portée à 10 ans, puis depuis la loi NRE de
2001, la durée est de 5 ans.
L’interdiction bancaire est la perte immédiate du droit d’émettre des chèques. Elle s’étend à tous les
comptes du client, y compris ceux détenus dans d’autres banques. Elle est inscrite au FCC (Fichier central
des chèques).
Cette interdiction a un caractère infâmant. Mais être interdit bancaire ne signifie pas l’interdiction
d’avoir un compte bancaire : ce n’est que l’interdiction d’émettre des chèques. Il faut en effet cumuler cette
interdiction avec le droit au compte. La banque pourra discuter ou renégocier la convention de compte, ou
clore le compte. Mais en toute hypothèse, l’interdit bancaire peut demander l’ouverture d’un compte dans
une autre banque si sa banque initiale l’a chassé, ou bien invoquer auprès de la BDF son droit au compte. Il
peut effectuer des dépôts et retraits d’espèces, disposer d’une CB… Il peut même payer avec des chèques de
banque.

b) Les facultés de régularisation

Il y a une 1e faculté de régularisation avant tout rejet : l’information préalable.


Il y a une 2e faculté, qui joue pendant 30 jours après le rejet : elle permet d’éviter l’émission d’un
certificat de paiement.
Il y a une 3e faculté : la régularisation à tout moment, depuis la réforme de 1991. Aussi longtemps
que dure l’interdiction bancaire, la régularisation est possible. Elle va permettre de faire recouvrer au tireur
la faculté d’émettre des chèques. Elle suppose de payer. Il faut pas que ce soit une régularisation formelle :
le tireur doit payer le montant du chèque au tiré, ou constituer sur son compte une provision suffisante
affectée au remboursement du chèque.

2 précisions :
- Ce rejet du chèque peut s’accompagner de frais. Le client tireur va se faire facturer des frais par la
banque, plafonnés par un décret de 2007 (D131-25 al. 3 CMF) :
o Chèques < ou = 50€ : plafond de 30€.
o Chèques > 50€ : plafond de 50€.
Autrefois, et jusqu’à un décret de 2011, pour mettre un terme à l’interdiction bancaire, le
tireur devait en plus verser des pénalités libératoires au TP, d’un montant qui dépendait du
montant du chèque. Ces pénalités ont été jugées contre-productives. La loi de 2010 de
réforme du crédit à la consommation les a supprimées.
- La principale sanction du chèque sans provision est donc l’interdiction bancaire qui a un caractère
infâmant, mais dont on souhaite que le tireur puisse à tout moment y mettre un terme. Elle n’a
d’infâmant que le nom. L’interdiction ne concerne que les chèques, ce qui n’est pas indispensable ajd. Le
terme fait plus peur que la réalité.

2. Les recours faute de paiement

Le porteur d’un chèque impayé dispose de 2 types de recours : les recours de droit commun et de
droit spécial. Il y a une dualité de recours, qui renvoie au principe selon lequel l’émission d’un chèque
n’emporte pas novation : on a les rapports contractuels fondamentaux, et les rapports quasi-cambiaires.

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a) Les recours de droit commun

Ce sont les « recours fondamentaux », contre 3 P possibles :


- Le porteur contre le tiré : le porteur du chèque a un recours contre le tiré, fondé sur l’appropriation de la
créance de provision. Mais ce recours est fragile : si le banquier n’a pas payé parce qu’il n’y avait pas
provision, le porteur ne peut recevoir plus de droits que le tireur n’en avait. C’est pourquoi il y a un
contentieux concernant l’absence ou la présence de provision au moment de l’émission du chèque. Si le
juge confirme qu’il n’y avait pas provision ou d’autorisation de découvert, le tiré n’a pas à payer le
porteur. Cette action est soumise à un délai de prescription d’un an à compter de l’expiration du délai de
présentation du chèque (8 jours).
- Le porteur contre le tireur : c’est un recours fondé sur la relation contractuelle qui les relie. C’est ce que
l’on appelle la « valeur fournie ». L’action du bénéficiaire contre le tireur sera une action contractuelle
de droit commun en paiement.
- Le banquier présentateur contre le bénéficiaire qui a endossé le chèque : selon l’usage, on ne distingue
pas l’endossement translatif et de procuration. Il est présumé translatif, et généralement le banquier
avance le chèque, crédite le compte de son client, et se réserve le droit de contrepasser le chèque s’il
revient impayé. La banque a le droit de se faire justice à elle-même : la contrepassation est une arme
importante pour le banquier. C’est une technique extra-judiciaire de justice privée. Elle ne s’explique que
par la position particulière du banquier p/r à son client. Ce droit de contrepasser est affirmé par la Ccass,
arrêt après arrêt. Si ce droit n’était pas reconnu, les facilités de caisse n’existeraient sûrement pas. Cass.
com. 23 janvier 2007 : en l’absence de faute de sa part, la banque a toujours le droit de se faire
rembourser par le bénéficiaire des chèques qui se sont ensuite révélés sans provision, le montant des
avances accordées, quelle que soit la nature de l’endossement. Seule limite : il faut que cette
contrepassation soit prévue par la convention de compte, mais c’est un usage.

b) Les recours fondés sur le droit du chèque

Le chèque est un titre quasi-cambiaire, parce qu’il dérive de la LDC qui est un titre cambiaire. Le
porteur d’un chèque sans provision bénéficie des recours propres au droit du change.
Il existe le principe de la garantie solidaire des signataires = toute P qui signe un titre cambiaire devra
payer (L131-51 CMF). C’est pourquoi le porteur peut agir individuellement ou collectivement, en
choisissant l’ordre qu’il souhaite, contre tous les signataires.
Mais en réalité, ces recours cambiaires sont très rares : leur exercice implique en principe que le
porteur ait fait constater le refus de paiement du chèque par un acte d’huissier appelé « protê » (qui vient de
« protester »). Pour que le porteur en bénéficie, il doit respecter le délai de 8 jours. Mais en pratique,
personne ne le fait.
Les recours cambiaires se prescrivent par 6 mois, après avoir fait protê dans les 8 jours. Différence :
lorsque le tireur n’a pas fait provision, on tend à considérer en doctrine qu’on peut agir cambiairement
contre le tireur qui n’a pas fait provision pendant 5 ans = la durée de prescription civile.
On utilise en matière de chèque un autre procédé non cambiaire : le certificat de non paiement
évoqué plus tôt. Ajd, il a largement terrassé feu les recours cambiaires et feu les protê. Ce certificat a été créé
par une loi de 1985, modifiée par la loi de 1991. Cette procédure est décrite à L131-73 al. 3, 4, 5 CMF.
L131-74 CMF est à rapprocher de la régularisation possible à tout moment : en vertu de cet article,
tout versement effectué par le tireur sur le compte sur lequel a été émis le chèque impayé est affecté en
priorité à la constitution d’une provision pour le paiement intégral de ce chèque. C’est un précepte moral :
paye tes dettes avant d’en souscrire une nouvelle. Si le tireur verse des sommes sur son compte après le
retour du chèque impayé, il devra d’abord rembourser ce 1e chèque impayé.
Processus du certificat de non-paiement :
- Le banquier tiré remet gratuitement au banquier présentation une attestation de rejet du chèque.
- Le tireur a 30 jours pour constituer la provision et régulariser la situation.
- Au terme du délai, le chèque est présenté au paiement une 2nde fois.
- Si cette présentation est à nouveau infructueuse, le porteur demande au tiré un certification de non
paiement, signifiable par huissier au tireur. Cette signification au tireur vaut commandement de payer.

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- Si le paiement n’intervient toujours pas dans les 15 jours suivant la signification, l’huissier peut délivrer
un titre exécutoire, sans besoin d’un recours au juge, qui permet la saisie des biens du tireur.
Ce certificat est utilisé. Ca permet de se faire rembourser sans besoin de recours en justice. Les frais
exposés sont à la charge du tireur.

LECON 9 : Les instruments de paiement autres que le chèque

D’autres instruments de paiement ont émergé : apparition de la piste magnétique sur la CB dans les
60’s, cartes à puce dans les 80’s. Toutes ces évolutions technologiques sont des instruments qui permettent
des paiements dématérialisés. Or longtemps, c’est la JP qui a dû dégager des solutions et l’origine de ces
instruments de paiement. Même lors de la création du CMF, ces instruments n’ont pas été dotés d’un régime
précis. Jusqu’en 2009, le CMF n’envisageait que 5 instruments : le chèque, la CB, le virement, la LDC et le
billet à ordre (pour les 2 derniers, renvoi au Ccom). C’est le juge qui a dû dégager un régime avec l’aide de
la doctrine.
Ce qui caractérise ajd la période actuelle, est que le paiement ne se traduit plus par la remise d’un
papier, mais par un ordre donné par le client à son banquier de transférer des fonds à son créancier : c’est
l’ADN des paiements dématérialisés, sur ordre.
L’Europe s’est intéressée à cette Q° au fur et à mesure de l’établissement de la monnaie unique. Le
législateur € avait déjà formulé des recommandations aux banques dans les 90’s-2000’s, mais elles n’ont pas
vraiment été observées. C’est pourquoi l’Europe est intervenue à nouveau avec une volonté d’harmonisation
€ : le droit de l’UE s’est saisi de ces paiements dématérialisés par la directive SEPA de 2007 (ou directive
DSP1). Cet Espace unique de paiement en € a été initié dès 2002. Les banques ont souhaité que les
paiements dans l’UE & EEE soient harmonisés, et que des techniques € de paiement soient reconnus,
notamment pour les paiements d’un pays d’Europe vers un autre. L’objectif qui a donné naissance à cette
directive DSP1, c’est de réduire les coûts, de simplifier les procédures, et donc de construire un marché
unique des paiements en €.
Si ce sont des établissements bancaires qui ont été à l’origine de ce projet, le législateur € a repris
cette idée, mais a considérablement ouvert l’émission et la gestion des moyens de paiement à des opérateurs
non bancaires. C’est l’objet de cette directive, transposée par une ordonnance Services de paiement de
2009, qui s’applique à toutes les opérations de paiement effectuées depuis le 1e novembre 2009, même si les
comptes en Q° ont été ouverts antérieurement.
La directive a libéralisé le secteur et totalement ouvert la fourniture de services non bancaires de
paiement à des établissements de paiement. C’est un objet de l’ordonnance, qui porte création des
établissements de paiement. Alors que l’émission et la gestion des opérations de paiement relevaient
auparavant du monopole des EDC, ajd les SBP ne concernent plus que le chèque, mais les services non
bancaires de paiement ne sont plus l’apanage des EDC. Les EDC peuvent les pratiquer, mais ils sont en
duopole avec les établissements de paiement sur ce point.
Cette directive SEPA est d’inspiration consumériste : elle tend à une harmonisation maximale. Les
Etats membres sont liés par la directive, et ne peuvent ni accroitre, ni diminuer la protection des
consommateurs p/r à ce que prévoit cette directive.
Mais elle a été remplacée par une directive SEPA 2 de 2015 (ou directive DSP2). Cette directive a
abrogé la DSP1 mais en a repris toute la substance, en même temps qu’elle a ajouté certaines nouveautés.
Elle a été transposée en droit français par une ordonnance de 2017. Cette ordonnance de transposition
entrera en vigueur le 13 janvier 2018. Son objectif est de consolider la DSP1. Une de ses nouveautés est de
consacrer 2 nouveaux types de prestations de paiement : l’initiation du paiement & l’agrégation des
comptes. De plus, elle renforce les obligations de sécurité des prestataires des services de paiement. Elle
essaye aussi de renforcer la protection des données personnelles des clients. Elle permet également, à
certaines conditions, que le commerçant propose à son client un prix réduit ou augmenté en fonction du type
d’instrument de paiement choisi par ce dernier.

SECTION 1 : Le droit commun des instruments de paiement non bancaires

Il y a 3 traits qui distinguent ces instruments du chèque :


- Ce sont des services de paiement qui ne sont plus spécifiquement bancaires.

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- Ce sont des ordres de paiement dématérialisés.


- Ce sont des instruments de paiement régis de façon harmonisés dans toute l’UE (le chèque, lui, procède
de la Convention internationale de Genève de 1931).
Il y a certains textes rares communs à tous les instruments de paiement, bancaires ou non : ils
viennent du droit pénal. L163-3 CMF, par ex, incrimine comme délit la contrefaçon et falsification de tout
instrument de paiement.
Le droit commun ne s’applique pas à la monnaie électronique, qui a une réglementation propre :
directive Monnaie électronique 2 de 2009, transposée par une loi de 2013. La monnaie électronique est
différente de la monnaie scripturale en ce qu’elle tend à singer les espèces : c’est pourquoi le législateur
assimile parfois les 2, quitte à arrêter par ex un plafond spécifique pour l’utilisation des monnaies
électroniques p/r aux plafonds des paiements en espèce. La monnaie électronique est régie par L315-1 à
L315-9 CMF. Elle fonctionne en étant portée par un porte-monnaie électronique, qui peut prendre des
formes diverses : il peut être logé dans la mémoire d’un ordinateur, ou dans le microprocesseur rechargeable
d’une carte. Elle a une nature différente de la monnaie scripturale > L315-1 CMF : c’est une valeur
monétaire stockée sous forme électronique et qui représente une créance sur l’émetteur. Ce qui la
caractérise, c’est que les unités de monnaie électronique sont dites « unités de valeur », et que chacune
représente une créance incorporée dans un titre. On remarquera toutefois que la notion de créance incorporée
dans un titre est une vieille notion de droit commercial. On ne distingue pas la créance du titre, son support.

§1. Définitions

A. Définition des prestataires de services de paiement

L’ordonnance de 2009, quand elle a créé les établissements de paiement, a créé une catégorie
juridique nouvelle, celle des PSP. C’est une catégorie qui regroupe 2 types d’établissements : les EDC
(opérateurs bancaires classiques dans la gestion et l’émission des moyens de paiement, mais qui ont perdu
leur monopole sur la Q°) et les nouveaux établissements de paiement (qui peuvent ouvrir les services de
paiement à leur clientèle).
Les établissements de paiement sont des nouveaux acteurs des services de paiement, qui rognent
l’ancien monopole des EDC. Les établissements de paiement doivent aussi par la case ACPR : ils doivent
être agréés en tant qu’établissements de paiement. Les banques et les établissements de paiement sont donc
en concurrence sur ce marché nouveau et libéralisé. Etre établissement de paiement est beaucoup plus facile
qu’être EDC : les conditions sont plus faciles, car l’établissement de paiement n’a pas la capacité juridique
d’un EDC. Un compte de paiement n’a pas l’ampleur, l’intensité d’un compte de dépôt ou d’un compte
courant.
L314-1, I CMF : un compte de paiement est un compte détenu par une P aux fins de l’exécution
d’opérations de paiement. Ce compte de paiement peut être un compte bancaire, mais l’inverse n’est pas
vrai : le compte de paiement est le compte qui peut être tenu par un établissement de paiement, mais un
établissement de paiement ne peut tenir un compte bancaire de dépôt. Le compte de paiement ne permet pas
à l’établissement de paiement teneur de compte de disposer des sommes pour son propre compte.

B. Définition des instruments de paiement

Il y a l’idée de neutralité technologique : le législateur € a compris que les évolutions technologiques


se font à grande vitesse, et que si on définit techniquement un instrument de paiement, cette définition va
devenir rapidement désuète. Le législateur a donc choisi de ne pas se référer à telle ou telle technique, mais à
des fonctions. Il propose des définitions générique, abstraites des cadres, ce qui permet de se prémunir
contre une évolution des technologies. Donc L133-4 CMF : un instrument de paiement s’entend de tout
dispositif et de l’ensemble des procédures auxquelles un utilisateur a recours pour donner un ordre de
paiement.

C. Définition des opérations de paiement

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L133-3, I CMF : une opération de paiement est une action consistant à verser, transférer ou retirer
des fonds, indépendamment de toute obligation sous-jacente entre le payeur et le bénéficiaire, ordonnée par
le payeur ou le bénéficiaire. On remarque que l’opération de paiement consiste à verser, transférer ou retirer
des fonds : ce sont les 3 modèles des opérations de paiement. De plus, l’opération de paiement est envisagée
avec une totale autonomie p/r à l’obligation sous-jacente, généralement contractuelle.
Puisque le législateur € a fait le choix d’une définition abstraite et générale, qui ne s’embarrasse pas
de qualification juridique, on ne dit pas que c’est un mandat, ou un dépôt : on décrit fonctionnellement.
Donc si le juge français est saisi, il va continuer à raisonner p/r à sa culture juridique. Il va raisonner en
termes de mandat, de dépôt, de contrat de prestation de service. En cas de conflit, c’est la CJUE qui
l’emportera sur les réflexes nationaux.

D. Définition des acteurs

1. Le payeur

C’est le plus souvent le débiteur. L’ordonnance ne définit pas cette notion, ne se réfère pas à la notion
de débiteur, car ne s’intéresse pas au rapport fondamental. Il faut se reporter à la DSP1 : le payeur est une P
physique ou morale, titulaire d’un compte de paiement, et qui autorise un ordre de paiement à partir de ce
compte.

2. Le bénéficiaire

Il n’est pas non plus défini. C’est généralement un créancier, mais là encore on peut se reporter à la
DSP1 : le bénéficiaire est une P physique ou morale qui est le destinataire prévu de fonds ayant fait l’objet
d’une opération de paiement.

3. L’utilisateur de services de paiement

Cette notion est générique : elle peut concerner, selon le cas, le payeur, le bénéficiaire ou les 2 pris
ensemble.

4. L’incidence de la qualité professionnelle de l’utilisateur

La directive SEPA porte une législation d’inspiration consumériste. C’est une législation d’OP en ce
qui concerne les opérations de paiement venant de P physiques n’agissant pas pour des besoins
professionnels. Or, quand on n’est pas en présence d’une telle P (donc en présence soit d’une P physique
professionnelle, soit d’une P morale), le D€ s’ouvre à la liberté contractuelle : L133-2 CMF permet des
dérogations à certaines dispositions :
- La forme et la rétractation du consentement.
- Les cas, conditions et la durée de révocation de l’ordre de paiement.
- La répartition des pertes liées à l’utilisation frauduleuse d’un système de sécurité.
- La validité des causes exonératoires de R.
- Le renversement de la charge de la preuve en cas d’opération irrégulière.
Avec la réforme du droit des obligations, les clauses abusives sont réputées non écrites dans les
contrats d’adhésion, de sorte que si ces dérogations, même entre professionnels, devaient aboutir à ce que
l’utilisateur adhère à un contrat du PSP contenant des clauses abusives, elles seraient quand même réputées
non écrites.

§2. La volonté de payer

C’est une Q° essentielle : même si le terme n’apparaît pas dans la législation, c’est ce qu’on souhaite
protéger.

SEMAINE 11 (vendredi 1h)

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A. L’ordre de paiement

L’article de référence est L133-3, II CMF, qui distingue 3 espèces d’opérations de paiement sur
ordre :
- L’ordre peut être donné par le payeur directement à son PSP (ordre de paiement direct). C’est le cas du
virement de compte à compte.
- L’ordre peut être donné par le payeur, par l’intermédiaire du bénéficiaire (ordre de paiement indirect). Le
bénéficiaire va recueillir l’ordre de paiement du payeur et le transmettre par ses soins au PSP du payeur.
C’est le cas du paiement par CB, ordonné par le payeur, mais qui transite par le commerçant, le
bénéficiaire.
- L’ordre peut enfin émaner du bénéficiaire, qui va adresser son ordre au PSP du payeur, mais en vertu du
consentement antérieurement donné par ce payeur à ce bénéficiaire (ordre de paiement indirect). C’est le
cas du prélèvement SEPA. On est également en présence d’un ordre de paiement indirect, car il transite
là encore à travers le bénéficiaire, même si de manière différente.
Donc l’ordre n’est pas nécessairement émis par le payeur lui-même : ce n’est qu’en cas de virement.

B. Le consentement du payeur

Le consentement du payeur est toujours nécessaire, même si l’ordre de paiement peut être adressé par
le bénéficiaire : rien ne doit permettre de se passer du consentement du payeur. Sans ça, l’opération n’a pas
été voulue. Ne paye que celui qui le veut bien. L133-7 CMF : est réputée non autorisée « l’opération
effectuée en l’absence de consentement du payeur ou alors que le payeur a retiré son consentement ».
La distinction entre le consentement au paiement et l’émission de l’ordre de paiement passe au
second plan toutes les fois que le payeur est aussi le donneur d’ordres. L’ordre émane alors du payeur. Mais
toutes les fois que l’ordre n’est pas émis par le payeur, la distinction a son importance. Dans ce cas, on a un
bénéficiaire ordonnateur.
Le déclenchement de l’opération de paiement suppose donc à la fois l’émission par le payeur de son
consentement, et que celui-ci n’ait pas été retiré.

1. L’émission du consentement du payeur

a) L’existence du consentement

Le CMF parle d’opération autorisée ou non autorisée. Sous ce vocable d’autorisation, c’est le
consentement qu’il faut rechercher. L133-6, I CMF formule 2 propositions :
- La proposition principale : « une opération de paiement est autorisée si le payeur a donné son
consentement à son exécution » (principe cardinal, qui est aussi un principe du droit des obligations).
Une opération de paiement a été consentie que si le payeur a donné son consentement. Ainsi :
o Pour un paiement isolé : il faut une autorisation préalable.
o Pour une série d’opérations : le consentement doit être donné pour la série
d’opérations.
- La proposition secondaire : « toutefois, le payeur et son PSP peuvent convenir que le payeur pourra
donner son consentement à l’opération de paiement après la réalisation de cette dernière ». C’est une
souplesse, pourvu que cela ait été prévu entre le payeur et PSP. C’est une possibilité de ratification, qui a
pour objectif de régler des cas accidentels dans lesquels le consentement n’a pas pu être donné avant
l’opération ou, s’il a été donné, ne l’a pas été dans les formes convenues.

b) La forme du consentement

Le consentement doit être éclairé. L633-7 al. 1 CMF : « le consentement est donné sous la forme
convenue entre le payeur et son PSP ». L’enjeu du respect de ces conditions de forme est important : si cette
forme convenue n’a pas été respectée, l’opération sera réputée non autorisée.
Formalisme ad probationem ou ad validitatem ? compte tenu de ce que les parties elles-mêmes fixent
les conditions, l’absence de consentement signifie la nullité, donc exigence de validité.
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Il y a une grande souplesse et une grande abstraction dans les formules du législateur € transposées
par l’ordonnance de 2009 : ces formes peuvent être très variées (forme orale, LRAR, biométrie…). Cette
forme requise sera prévue par la convention cadre de compte, qui constitue le cadre privilégié de la relation
banquier-client.

2. Le retrait du consentement

L133-7 al. 3 CMF : « le consentement peut être retiré par le payeur tant que l’ordre de paiement n’a
pas acquis un caractère d’irrévocabilité ». Ainsi le consentement peut être retiré tant que l’ordre est
révocable. Si ce retrait concerne une série d’opérations, lorsqu’il est possible, il n’affecte que les opérations
à venir.
L133-8 CMF précise à quel moment l’irrévocabilité de l’ordre est acquise, donc à partir de quel
moment il devient impossible de retirer son consentement (pour la doctrine, cette révocation de l’ordre de
paiement fait songer à une révocation de mandat). 3 propositions :
- Un ordre de paiement devient irrévocable à partir de sa réception par le PSP du payeur (L133-8, I CMF).
Autrement dit, le donneur d’ordre ne peut plus révoquer l’ordre émis 1x qu’il a été reçu par sa banque.
Cela peut considérablement tempérer la possibilité de retirer son consentement : lorsqu’un ordre est
donné par voie électronique, il est immédiatement reçu par le PSP. Un courrier laisse plus de temps.
Mais tempérament : ajd, quand on fait un ordre de virement par voie électronique, la banque indique un
délai durant lequel elle reconnaît le droit de révoquer l’ordre de paiement.
- Par exception, en matière de CB, l’ordre de paiement donné par le bénéficiaire ou par le payeur via le
bénéficiaire ne peut être révoqué qu’avant d’avoir été transmis au bénéficiaire (L133-8, II CMF). On ne
peut plus révoquer le paiement par CB 1x le paiement fait chez un commerçant.
- En cas de prélèvement automatique intervenant à échéances fixes, la révocation peut être faite jusqu’à J-
1.

§3. Les obligations des parties à l’opération de paiement

A. Les obligations des prestataires de services de paiement

1. Les obligations tenant à la sécurité des instruments de paiement

L133-15 CMF : le PSP veille à l’efficacité des dispositifs de sécurité personnalisés correspondant aux
instruments de paiement qu’il délivre à ses clients. Il doit s’assurer que ces dispositifs ne sont pas
accessibles à d’autres P.
De même, un PSP ne doit pas envoyer par la Poste des instruments de paiement, sauf pour remplacer
un instrument de paiement antérieur. S’il envoie par courrier un instrument de paiement ou un code
confidentiel, il supporte le risque lié à cet envoi.
Il a aussi l’obligation de mettre en place des moyens d’opposition à la disposition de ses clients, et en
ce cas il doit bloquer sans délai l’utilisation de l’instrument de paiement concerné.
L’ordonnance de 2017 renforce les exigences d’authentification, et distingue entre l’authentification
classique et l’authentification forte, qui est recommandée. Elle permet de s’assurer que l’auteur de l’ordre de
paiement est bien le porteur de la carte d’identité. L133-4 f CMF : l’authentification est forte quand on a au
moins 2 des 3 types d’authentification mises en place :
- La connaissance : qqc que seul l’utilisateur connaît.
- La possession : qqc que l’utilisateur possède (ex : carte à puce, smartphone).
- L’inhérence : qqc que l’utilisateur est, son essence (biométrie : empreinte, voix, rétine…)

2. Les obligations tenant à la célérité de l’exécution des ordres de paiement

Cette célérité se trouve dans L133-13 & 133-14 CMF. Il y a une exigence de célérité d’abord du PSP
du payeur, qui va transférer les fonds au PSP du bénéficiaire.
Exigence temporelle : « au plus tard à la fin du 1e jour ouvrable suivant le moment de réception de
l’ordre de paiement » (J+1). 1x que le PSP du bénéficiaire s’est fait créditer l’argent, il lui met le montant à

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disposition immédiatement après que son propre compte ait été crédité. L133-14 CMF : « la date de valeur
d’une somme portée au crédit du compte du bénéficiaire ne peut être postérieure à celle du jour ouvrable au
cours duquel le montant de l'opération de paiement est crédité sur le compte du prestataire de services de
paiement du bénéficiaire ». Idem pour le débit.

B. Les obligations des utilisateurs des services de paiement

1. Les obligations tenant à la sécurité des instruments de paiement

L133-16 CMF : « dès qu’il reçoit un instrument de paiement, l'utilisateur de services de paiement
prend toute mesure raisonnable pour préserver la sécurité de ses dispositifs de sécurité personnalisés ».
Donc le client doit veiller à la sécurité de ses instruments de paiement dès qu’il les reçoit. Si c’est une CB, il
doit tenir le code séparé de la carte, et en garder le secret.

2. Les obligations tenant à l’information du PSP aux fins de blocage de l’instrument de paiement

On retrouve les cas d’opposition à la CB qui existaient en droit français. L133-17 CMF ne parle pas
d’opposition mais c’est le cas : « l’utilisateur doit sans tarder informer aux fins de blocage de son
instrument son PSP » > en cas de vol ou du détournement de la carte ou des données de l’instrument.
Le II du même article parle de l’opposition également en cas de PC afin d’éviter que l’actif ne soit
appréhendé par les créanciers.
L’opposition bloque les opérations futures, mais pas les opérations passées.

§4. Les incidents de paiement

A. Le refus d’exécution de l’ordre par le PSP

L133-10 CMF : le PSP peut refuser d’exécuter un ordre de paiement. Mais il doit alors notifier à
l’utilisateur ce refus, et si possible le motiver. « Si possible » car il est des cas où un refus de paiement relève
d’une décision du TRACFIN. Sous cette réserve, il doit motiver au plus tard à J+1.
Le texte ne précise pas les cas dans lesquels le refus est possible. Mais on sait que les motifs suivants
sont admissibles :
- L’erreur matérielle du donneur d’ordres (ex : code secret erroné, IBAN erroné). La banque doit inviter le
client à corriger son erreur.
- Les termes de la convention entre client et PSP (ex : dépassement des limites de paiement par CB).
- Le défaut de solde créditeur suffisant. La banque n’est pas tenue de payer si le compte n’est pas
provisionné.
Mais si le PSP refuse pour un motif autre, il faut s’interroger sur la justification et l’éventuelle R du
PSP.

B. La contestation d’une opération de paiement

1. Le droit commun de la contestation

a) Le délai

Dans le droit antérieur à 2009, un porteur de CB avait 70 jours pour contester (pouvait être étendu à
120 jours).
Ajd, l’utilisateur du service de paiement doit signaler sans tarder toute opération de paiement non
autorisée ou mal exécutée, et ce au plus tard dans les 13 mois de la date du débit à peine de forclusion. C’est
plus favorable au client. Si le client est un consommateur qui n’agit pas à des fins professionnels, ce délai est
d’OP. Si c’est un professionnel ou une P morale, ce délai peut être réduit.

b) La charge de la preuve

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L133-23 CMF : la charge de la preuve d’une opération non autorisée ou dont la mauvaise exécution
est alléguée pèse toujours sur le PSP. C’est donc au PSP qu’il incombe de prouver que l’opération a été
consentie ou exécutée correctement. Le seul fait que le code confidentiel, les codes secrets ou les MDP du
client ont été utilisés, ne suffit pas à prouver que l’opération a été autorisée. Il est donc très difficile pour le
PSP de prouver le consentement.
SEMAINE 12
En vertu de cet article, il est prévu que quand bien même l’utilisation de l’instrument de paiement a
été faite tel que cela a été convenu avec le PSP, quand bien ême un système sécurisé avec code confidentiel
aurait été déjoué par un escroc, le seul fait que le code confidentiel ait été rentré de façon satisfaisante ne
suffit pas à faire peser la charge de la preuve sur le client.
Une dérogation à la charge de la preuve serait possible si l’utilisateur était un professionnel, car c’est
un domaine ouvert à la liberté contractuelle. Dans le cas contraire, il suffit à l’utilisateur de montrer que
l’opération a été effectuée sans son ordre ou a été mal effectuée, pour que la preuve pèse sur le PSP.

2. La contestation tenant au défaut de consentement

C’est la Q° de l’absence d’autorisation. Le CMF établit des règles précises venant du D€ sur la
répartition des risques, frais, supportés par le PSP du payeur.

a) La responsabilité de plein droit du PSP du payeur

L133-18 CMF : en cas d’opération de paiement non autorisée, le PSP du payeur lui rembourse
immédiatement le montant de l’opération non autorisée. La position € est protectrice du payeur.
Le PSP doit, le cas échéant, rétablir le compte débité dans l’état où il se serait trouvé si l’opération
non autorisée n’avait pas eu lieu = restitution des agios.

b) Les cas particuliers

Il y a des tempéraments qui viennent alléger ou aggraver la R du PSP. L’idée générale résulte de
L113-19 CMF (à compter de 2018, 2 § supplémentaires) : ajd, les paiements sont les faits d’instruments
présentant un dispositif de sécurité personnalisé. Il faut distinguer selon qu’il y a eu ou non opposition :
- Après opposition : le payeur ne supporte aucune conséquence financière. 1x qu’il a signalé à son PSP
aux fins de blocage de son instrument de paiement, il ne supporte aucune conséquence financière sauf
fraude de sa part.
- Avant opposition (L133-19 CMF) : s’il y a eu vol ou perte de l’instrument de paiement, celui-ci va être à
l’origine d’un partage de R, des frais, qui était jusqu’à l’ordonnance de 2017 de 150€ max. au-delà, les
frais incombaient au seul PSP. Ce plafond a été abaissé à 50€ suite à l’ordonnance (entrera en vigueur en
2018). Donc ajd, avant même l’opposition, des opérations non autorisées ne conduisent le payeur à
supporter des pertes qu’à concurrence de 50€. On n’est plus dans un partage de R comme avant.
Il y a 5 exceptions, dans lesquelles l’utilisateur ne supportera aucun frais :
- Les opérations de paiement non autorisées ont été effectuées sans instrument de paiement présentant un
dispositif de sécurité personnalisé.
- Les opérations ont été effectuées à la faveur d’un détournement de l’instrument de paiement ou de ses
données (ex : un préposé détourne une CB professionnelle).
- Il y a eu contrefaçon de l’instrument de paiement : le payeur n’a aucune raison de faire opposition car
l’instrument de paiement n’est ni volé ni perdu.
- Le PSP n’a pas fourni de moyen au client de faire opposition.
- Nouveau cas de l’ordonnance de 2017 : ajd, il est nécessaire d’instituer un système de sécurité forte, qui
implique au moins 2 des 3 éléments que sont la connaissance, la possession et l’inhérence. Donc
nouveau cas : l’opération de paiement a été effectuée sans que le PSP n’exige une authentification forte.
Pour ces 5 exceptions, exonération totale de R du payeur.

A l’inverse, il y a des hypothèses où le payeur paye la totalité des frais :

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- L’agissement frauduleux du payeur.


- La négligence grave à ses obligations > nécessaire interprétation de la JP, qui auparavant se référait à la
négligence constitutive d’une faute lourde. Ici, la négligence grave est le fait par ex de ne pas faire
opposition dans un délai raisonnable. Si on se réfère au droit antérieur, qui se référait à la faute lourde de
l’utilisateur, on devrait considérer que la JP correspondante vaut encore ajd. Cass. com. 2 octobre 2007 :
(revoir) pour savoir si un client qui a perdu sa CB avait été négligent faute lourde : la circonstance que la
CB a été utilisée par un tiers avec composition du code confidentiel ne suffit pas à caractériser faute
lourde. Cass. com. 8 octobre 2012 : un individu s’est fait voler sa carte, qu’il avait laissé comme
d’habitude dans son véhicule sur un parking public avec son code à côté de la carte : il a agi avec
imprudence = faute lourde qui le prive du partage de R.

3. La contestation tenant à l’exécution défectueuse de l’ordre de paiement

Il peut y avoir des anicroches lors d’une opération de paiement, qui font qu’elle est mal exécutée, ou
exécutée tardivement ou pas du tout.
- Si le client, lorsqu’il utilise le service de paiement, a fourni un mauvais identifiant, le PSP ne sera pas
responsable de la mauvaise exécution de l’opération de paiement (L133-21 CMF). Le PSP doit s’efforcer
dans les relations interbancaires de récupérer les fonds auprès du bénéficiaire. Le cas échéant, le client
subit les frais pour récupérer les fonds.
- Les ordres de paiement indirects : c’est celui qui est responsable de la bonne transmission de l’ordre de
paiement qui va voir sa R engagée. Le PSP du payeur va prendre l’argent et le remettre au PSP du
bénéficiaire, qui va le remettre au bénéficiaire. En cas de mauvaise exécution, principe : pour déterminer
le PSP responsable, on distingue en fonction du moment de survenance de la mauvaise exécution.
Chacun supporte sa part d’intervention dans le processus de paiement. Or si c’est le PSP du payeur qui
est responsable pour avoir trop viré ou pas assez, il devra restituer sans tarder le montant de l’opération à
son client, le payeur. Idem pour le PSP du bénéficiaire. A l’égard du bénéficiaire et son client, le PSP du
bénéficiaire a une R contractuelle ; à l’égard du client, il a une R délictuelle.

SECTION 2 : Les règles spéciales à certains instruments de paiement

§1. Le virement

C’est un instrument de paiement qui permet un transfert de monnaie scripturale par un jeu d’écritures
de compte à compte. Il est initié par un ordre donné par un donneur d’ordre à son banquier, de débiter son
compte d’une certaine somme et de créditer le compte du bénéficiaire de la même somme. C’est une
opération de compte à compte, qui peut être réalisée par une même P entre 2 comptes différents auprès d’une
même banque ; ou entre 2 comptes de titulaires différents, au sein de la même banque ou de banques
différentes.

Le virement reste en principe un contrat consensuel : le CMF n’exige pas plus ajd qu’hier de
solennités pour l’ordre de virement. Le virement, au plan du droit civil, suppose la combinaison d’un
mandat, et du dépôt. En revanche, ni la cession de créance ni la délégation ne permettent de qualifier
utilement le virement. Ce n’est pas une cession de créance, faute de consentement du cessionnaire. Et pas
non plus une délégation imparfaite, faute d’acceptation du délégataire. Ce n’est qu’au moment de
l’exécution du virement que les fonds seront transférés au bénéficiaire qui sera ainsi devenu créancier de son
propre banquier.

Différence avec le chèque : le virement ne suppose pas un titre, il est consensuel, et il n’opère aucun
transfert de la provision.
Le banquier n’est pas tenu de déférer à l’ordre de virement s’il n’a pas les fonds. Le virement est en
principe abstrait des rapports fondamentaux sous-jacents, et ce à raison du devoir de non immixtion qui le
caractérise.

§2. Le prélèvement

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On le nomme parfois avis de prélèvement, parfois autorisation de prélèvement. Il a été inventé par
EDF en 1956. C’est plus pratique pour des paiements qui doivent être payés à des dates régulières. L’intérêt
est la ponctualité du prélèvement : on peut oublier le chèque, mais le prélèvement intervient toujours au
même moment et permet au créancier une justesse et prévisibilité des flux.
Techniquement, le prélèvement recouvre un double mandat permanent :
- Un 1e mandat donné par le client à son créancier , de l’autoriser à initier des demandes de prélèvement à
son profit.
- Un 2nd mandat donné par le client payeur à sa banque, de l’autoriser à débiter ce compte sur la demande
ultérieure du créancier.
Dans le CMF, seul est stricto sensu requis le consentement donné par le payeur au bénéficiaire, car
ordre de paiement indirect.
Le prélèvement est révocable au plus tard la veille du jour convenu pour le débit des fonds.

§3. La carte bancaire

A. La genèse de la carte bancaire

Elle est apparue aux USA à la suite d’une nécessité : les grands magasins ne pouvaient, quand ils
avaient de +/+ de clients, les connaître tous pour savoir si on pouvait leur faire crédit ou non. Il fallait
identifier les bons clients. Pour ce faire, les grands magasins ont émis des « charga plates » à partir de 1928 :
sortes de cartes dorées qui permettaient d’identifier un client et de le laisser repartir avec la marchandise.
C’était juste un insigne, un moyen de reconnaître le client.
Puis les choses ont évolué post-WWII : on a imaginé la carte « charge it », qui permettait au client de
faire ses achats dans tous les magasins situés dans un quartier de Brooklyn.
En 1949, idée d’imaginer une carte pour acheter dans plusieurs magasins dans tous les USA. En 1 an,
35k P ont adhéré.
En 1950, American Express intervient, plusieurs opérateurs se mettent sur ce créneau.
Mais double problème : avoir suffisamment de P qui acceptent le paiement par carte + suffisamment
de cartes en circulation. Les magasins n’acceptaient de recevoir ces cartes en paiement que si beaucoup de
clients le demandaient. Pour diffuser et augmenter le nombre de cartes de paiement, en 1958 Bank America
a adressé à tous ses clients de la ville de Fresno une carte de paiement par courrier. Chaque carte avait une
limite de crédit de 500$.
Mais la banque a beaucoup souffert : elle a connu des pertes considérables d’escrocs qui ont volé les
cartes dans les BAL. Mais les banques ont absorbé ces pertes rapidement : fin 1960’s, +1M d’utilisateurs.

Ajd, on distingue 3 types de cartes :


- Les cartes privatives : ne permettent de réaliser un paiement qu’auprès d’un ou plusieurs établissements.
- Les cartes universelles : permettent d’effectuer des paiements auprès de tous les commerçants qui ont
adhéré au système, mais pas adossé à un compte bancaire (ex : American Express).
- Les cartes de paiement : également universelles mais adossées à un compte bancaire ou de paiement.
On peut aussi distinguer selon la fonction : cartes pour mineurs, carte de paiement/crédit, etc.

B. Le cadre contractuel de la carte bancaire

Il est en filigrane visé par L133-17, II CMF. Cette carte de paiement repose sur 2 contrats :
- Le contrat porteur : contrat qui lie l’émetteur de la carte (EDC ou EDP) & le porteur. Ce contrat est un
contrat d’adhésion, mais il est possible de discuter des options.
- Le contrat fournisseur : contrat qui lie l’émetteur de la carte & le commerçant. On peut rapprocher le
système de CB d’une délégation : le client, le délégant, délègue à sa banque, le délégué, au paiement du
commerçant, le délégataire. Là encore il s’agit d’un contrat d’adhésion : le fournisseur doit utiliser un
terminal de paiement électronique agréé par le groupement CB. Il doit s’assurer de l’acceptabilité de la
carte : il doit regarder en théorie la date de validité, regarder la présence d’un hologramme, de la
signature au verso, d’une puce, et doit demander une autorisation au-delà du plafond. Les avantages pour

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le commerçant sont nombreux : le groupement CB garantit le paiement au commerçant : le montant


minimal de garantie est de 100€ par carte, par jour et par point de vente : dans cette limite, engagement
irrévocable d’honorer les montants. Au-delà du montant garanti, le commerçant va interroger à distance
le centre d’autorisation des CB qui a mandat du banquier du payeur de dire si l’opération peut ou non
être autorisée. Si c’est le cas, la garantie de paiement jouera à plein également.

Le Groupement des CB est un GIE = structure qui en principe ne doit pas faire de principe pour lui-
même mais seulement pour ses membres, qui ont une R indéfinie. Il a été créé en 1984. Il regroupe ajd 120
établissements bancaires PSP. C’est auprès de lui que toutes les règles techniques et de sécurité et les
innovations sont décidées.

§4. Chiffres-clés

Depuis 2001, en nombre de transactions, plus de paiements par CB que par chèque. Au plan du CA,
592MM€ par CB. 12MM de transactions. 66,5M de CB circulent en France en 2016.
Se développe de +/+ le paiement sans contact : en 2016, 605M d’opérations de paiement sans
contact. En 2017, le milliard est dépassé. Le plafond était de 20€ jusqu’en octobre ; pour toutes les cartes
émises depuis le 1e octobre 2017, le plafond est passé à 30€. Ajd, 43% de toutes les transactions dans les
magasins se font sans contact. On prédit que le volume des paiements sans contact va rapidement être de
60%.
Depuis 2009, 46% des fraudes à la CB sont consécutives à la perte ou au vol de celle-ci, mais 35%
sont consécutives à une usurpation des numéros.

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LECON 10 : Les effets de commerce

§1. Définition

Ils ne sont pas définis par la loi.

Selon le doyen Roblo, EC = tout titre reçu couramment en paiement dans les transactions
commerciales en lieu et place de la monnaie sans présenter pour autant les attributs de cette monnaie.
Autre définition de l’EC = tout titre qui constate ou crée des obligations commerciales et qui est reçu
en paiement comme s’il s’agissait de monnaie alors qu’il n’en a pas les attributs essentiels.

§2. Caractères et principes fondamentaux

A. Les caractères de l’effet de commerce

- L’EC n’est pas cessible mais négociable : susceptible de circuler facilement selon les techniques simples
du droit commercial que sont l’endossement et la tradition.
- L’EC donne droit au paiement d’une certaine somme d’argent.
- L’EC porte l’indication de sa valeur.
- L’EC incorpore la créance qu’il représente dans le titre. La créance en Q° est généralement à CT.
Toutefois, il y a des règles sur les délais maximum de paiement autorisés prévus par le Ccom : en
principe, 60 jours au plus tard à compter de l’émission de la facture.
- L’EC est soumis au formalisme cambiaire : il est léger, simple, et standardisé.
- L’EC est émis à l’occasion d’un rapport fondamental déterminé.

B. Les principes fondamentaux du droit des effets de commerce

Ils sont liés à la pluralité d’acteurs que l’on rencontre en matière d’EC.
Ce sont souvent des opérations à 3 P, mais parfois à 2 P. Dans tous les cas, les principes
cardinaux sont :
- Abstraction et inopposabilité : l’EC est coupé de sa cause. On va juxtaposer aux rapports fondamentaux
et contractuels préexistants (achat, vente, prêt…) de nouveaux rapports cambiaires qui ont des caractères
propres. Ces nouveaux rapports sont en principe détachés de la cause contractuelle, car l’objectif du droit
des EC est de favoriser leur circulation. Pour ce faire, on va le faire par l’abstraction de la cause : on va
aboutir à faire des EC une forme de monnaie d’échange entre commerçants. Dans la vision française, les
rapports cambiaires ne sont cependant pas tout à faire coupés des rapports contractuels > l’inopposabilité
des exceptions, principe cardinal, va céder dans 2 exceptions : quand le porteur a agi de MF & entre des
parties immédiates, liées par le rapport fondamental sous-jacent.
- Indépendance des signatures : la nullité d’une signature n’affecte pas les autres signatures. Si une
signature est nulle, fausse, contrefaite, on tient compte des seules signatures régulières indépendamment
de la nullité d’une autre, voire de la 1 e. Tout signataire est engagé par sa signature de l’effet, pourvu qu’il
soit d’apparence formelle, cambiaire, régulière.
- Solidarité cambiaire : tout signataire d’un EC, quelle que soit sa qualité, est garant solidaire du paiement
de l’EC à l’échéance. Le porteur, lui, choisira le débiteur cible sans avoir à respecter l’ordre des
signatures. Cette solidarité cambiaire ne joue qu’entre ceux qui ont valablement signé.

C. Utilisations et fonctions des effets de commerce

L’utilisation des EC s’est réduite singulièrement au cours de la 2e moitié du 19e s.


Mais l’EC, c’est la base : tu comprends ça, tu comprends tout.

Fonctions de l’EC : paiement, crédit.


Le chèque n’est pas un instrument de crédit, donc n’est pas un EC. En effet, l’EC peut circuler par
voie d’endossement jusqu’à son échéance, et peut être remis en paiement d’endosseur en endossataire.

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Les EC permettent l’opération d’escompte. Mais elle est tellement difficile à faire rentrer dans une
catégorie particulière, que c’est surement une opération sui generis, mais une ODC. Le banquier qui prend
un EC en paiement va régler immédiatement son client, sous déduction d’une déduction du temps restant
jusqu’à l’échéance = la « commission d’escompte ».
On distingue les EC commerçants des EC financières :
- Les EC commerciaux règlent des marchandises et fournitures. L’échéance est identique à la date de
paiement convenue pour le prix d’achat.
- Les EC financiers correspondent à des opérations de crédit, pas nécessairement liés à des échanges de
biens ou services.

SECTION 1 : La lettre de change

§1. Présentation de la lettre de change

A. Genèse et présentation

On trouve des traces de la LDC en Egypte, en Perse. 3 évolutions majeures :


- Au MA : c’est un instrument de transport de fonds et de change de devises. Un marchand vénitien qui va
à une foire de champagne n’emmène pas ses espèces avec lui. Il va voir son banquier, lui remet ses fonds
contre une « LDC sur un certain trajet » = une traite.
- Depuis le 16e s. : la LDC devient un instrument de paiement à travers 3 perfectionnements :
o Invention de la clause à ordre, et donc de l’endossement. Non seulement la lettre est
payable au bénéficiaire, mais à toute P à qui la bénéficiaire initial transmettra l’ordre
de payer en endossant la lettre à son profit.
o Invention de l’acceptation du tiré : offre la certitude du paiement au porteur et facilite
la circulation. On n’est pas toujours sûr a ou aura provision : l’acceptation du tiré offre
une sécurité au porteur de la LDC.
o Invention de l’inopposabilité des exceptions : on interdit aux signataires d’opposer au
porteur leurs moyens de défense.
La LDC a également servi à échapper à la prohibition du prêt à intérêt.
- Depuis le 19e s. : la LDC n’est plus utilisée pour le change, de -/- comme une monnaie de paiement, mais
de +/+ comme un instrument de crédit. Le banquier va jouer un rôle de refinanceur des créances de son
client.

Les LDC se sont informatisées avec une réforme de 1973. On distingue ajd :
- La LDC relevé papier : classique, mais son recouvrement est doublé d’un système informatique qui
permet sa compensation.
- La LDC relevé informatique (tout à fait dématérialisée, pas considérée comme EC parce qu’on ne peut y
apposer les mentions des EC).

B. Définition et distinction

Pour le prof, la LDC est l’ancêtre du chèque. La LDC est un titre par lequel le tireur invite le tiré à
payer le bénéficiaire ou porteur ou à l’ordre de cette dernière, une somme d’argent à une échéance assez
proche.
On retrouve le même vocabulaire que dans le chèque : tireur, tiré, bénéficiaire, provision. Comme le
chèque, la LDC incorpore la créance de provision dont elle permet la transmission simplifiée. La propriété
de la provision dans la LDC est transmise dès le dessaisissement de la LDC. En vertu de 511-7 Ccom, à
chaque fois qu’il y a un endossement translatif, la propriété de la provision est transférée à l’endossataire.
Mais différence : la LDC n’est pas un instrument bancaire. C’est un instrument ouvert à tous les
commerçants. Elle ne suppose pas un compte bancaire. De plus, le chèque est un instrument de paiement à
vue alors que la LDC est un instrument de paiement et/ou de crédit à terme.
Puisque la LDC ne s’insère pas nécessairement dans un contexte bancaire, la créance fondamentale a
en principe son fondement dans une opération économique classique de vente ou prestation de services.
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Cette créance fondamentale s’appelle la valeur fournie (contrepartie de l’émission de la LDC) = la créance
qu’a le bénéficiaire de l’effet sur le tireur. Il accepte la LDC en paiement parce que le tireur lui doit de
l’argent. Le porteur de l’effet (bénéficiaire) a fourni une valeur au tireur. Si le bénéficiaire initial de l’effet
utilise cette monnaie d’échange qu’est la LDC et la réendosse au profit d’un autre, ce sera au profit de son
propre créancier endossataire, car l’endossataire a une seconde créance de valeur fournie contre l’endosseur.

La provision est une créance de somme d’argent du tireur sur le tiré, visée par 511-1 al. 2 Ccom.
Avec le chèque, la provision est exigée à l’émission, pour la LDC qui est une forme de crédit à terme, la
provision doit exister à l’échéance. Il y a provision si, à l’échéance de la LDC, celui sur qui elle est fournie
est redevable au tireur ou à celui au compte de qui elle est tirée, d’une somme au moins égale à la LDC.
Pour le reste, le droit applicable à la LDC est internationalisée : il relève de la convention de Genève
de 1930 portant loi uniforme sur les LDC & billets à ordre. Cette convention a été transposée dans
l’ancien Ccom.

§2. L’émission de la lettre de change

A. Les conditions de fond

Le consentement du tireur : en principe, le consentement du tireur doit exister, doit être libre, et
reposer sur un contenu licite et certain. Mais ces exigences qui relèvent du droit commun, sont très
amoindries par la spécificité des rapports cambiaires. Concrètement, le tireur peut invoquer le défaut de son
consentement. Pour le reste, l’indépendance des signatures jouera : il y aura bien qqn qui pourra payer. En
revanche, le vice du consentement du tireur n’est en aucun cas opposable en principe à raison de
l’inopposabilité des exceptions.

La capacité du tireur : la LDC, contrairement au chèque qui n’a pas nature d’ADC par la forme, en
est un. Pour émettre une LDC, il faut avoir la capacité commerciale. Les mineurs ne peuvent valablement
signer de LDC, ni les majeurs protégés, ni les consommateurs. En cas d’incapacité, la sanction est la nullité
relative de l’ADC, invocable que par la partie protégée. Mais comme l’incapacité est un vice grave, elle peut
toujours être opposée, même au porteur de BF. 511-5 Ccom précise que, quoique l’engagement d’un des
signataires soit nul à raison de son incapacité, il y a indépendance des signatures.

B. Les conditions de forme

La LDC, c’est traditionnellement une institution qui suppose un papier. En pratique, la LDC est tirée
sur des formules préétablies. L’article clé est 511-1 Ccom qui énonce 8 mentions obligatoires :
- La dénomination de LDC.
- Le mandat pur et simple de payer une somme déterminée.
- Le nom du tiré (qui n’est pas nécessairement un EDC) et son RIB (une façon de lutter contre le BK).
- L’échéance de la LDC.
- Le lieu du paiement.
- Le nom du bénéficiaire (pas de LDC en blanc, pas de LDC au porteur).
- Les date et lieu de création de la LDC.
- La signature du tireur (manuscrite ou électronique).
En l’absence d’une seule mention, le titre ne vaut pas LDC. Mais des suppléances sont prévues : si la
LDC ne vaut pas comme LDC, peut-être que par conversion on pourra y voir un billet à ordre ou une
reconnaissance de dette.

§3. La circulation de la lettre de change

Elle circule le plus souvent par un endossement translatif, parfois de procuration, rarement pignoratif.
Les règles sont proches du chèque.
En théorie, le nombre d’endossements est illimité. En pratique, en matière de LDC, il y a
généralement un seul endossement au profit du banquier escompteur qui va prendre la lettre.

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L’endossement est présumé translatif, et cet endossement translatif produit 3 effets principaux :
- La transmission de tous les droits résultant de la LDC. Concrètement, l’endossataire est le nouveau
propriétaire de la lettre, càd de la créance. L’endossataire est le nouveau propriétaire de la créance. 511-7
al. 3 Ccom : l’endossement transfère la propriété de la provision à l’endossataire. C’est la même règle
qu’en matière de chèque.
- L’endosseur est, sauf clause contraire, garant de l’acceptation et du paiement. L’endossement rend tous
les endosseurs garants solidaires du paiement de la dette.
- L’inopposabilité des exceptions (511-12 Ccom) : « les P actionnées en vertu de la LDC ne peuvent pas
opposer au porteur les exceptions fondées sur leurs rapports personnels avec le tireur ou avec le
porteur ». Chaque transmission de l’effet renforce la valeur de celui-ci, alors que le principe en droit
civil est qu’on ne peut transférer à autrui plus de droits qu’on n’en a.

§4. Le paiement de la lettre de change

Il intervient à l’échéance : on va voir cette dualité entre les rapports cambiaires et fondamentaux.

A. Les recours cambiaires

Ces recours cambiaires sont rigoureux, mais se méritent. Ils sont enfermés dans des conditions
strictes.

1. Les débiteurs cambiaires

Sont débiteurs cambiaires tous les signataires de la lettre : le tireur & l’endosseur.
Le tiré est dans un cas différent : il n’est pas partie à la LDC, il n’y a pas consenti. Mais s’il devient
tiré accepteur, alors il s’oblige à payer la LDC à l’échéance (511-19 Ccom). L’acceptation va faire du tiré un
débiteur cambiaire. Que faire pour qu’il devienne accepteur ? Le Ccom prévoit que la LDC peut être
présentée à l’acceptation à tout moment entre son émission et l’échéance. En général elle est présentée par le
tireur. S’il l’accepte, son acceptation se traduit par une mention sur la lettre avec sa signature manuscrite.
Cette acceptation du tiré doit être pure et simple, et non conditionnelle.
Les effets de l’acceptation sont ceux d’un engagement cambiaire unilatéral : le tiré va se constituer
débiteur cambiaire au profit des porteurs. Autre effet de l’acceptation : elle fait présumer irréfragablement
l’existence de la provision entre tireur et tiré.
Il faut également ajouter aux débiteurs cambiaires l’avaliste, qui se porte caution de l’engagement
cambiaire et en garantit le paiement.

2. Les porteurs diligents et négligents

Le porteur diligent est celui qui bénéficie de l’ensemble des recours cambiaires contre tous les
signataires et dans l’ordre de son choix. Pour être porteur diligent, il faut remplir 2 conditions :
- Présenter l’original de la lettre papier au paiement au domicile du tiré dans les 2 jours de l’échéance.
- Si refus, dresser protê dans les 2 jours ouvrables suivant l’échéance. Parfois, la LDC peut dispenser de
faire dresser protê.

Le porteur négligent est celui qui n’a pas rempli ces 2 conditions : il est déchu de ses recours
cambiaires, car il n’a pas été assez réactif. Mais 2 exceptions lui permettent de les conserver :
- Le porteur négligent n’est pas déchu s’il y a eu acceptation du tiré.
- Le porteur négligent conserve un recours lorsque le tireur n’a pas constitué provision.
En réalité, lorsque la LDC n’a pas circulé, le porteur va concrètement toujours bénéficier de ses
recours : contre le tiré accepteur ou le tireur qui n’a pas constitué provision.
Ces recours sont enfermés dans des délais rapides : l’action cambiaire contre le tiré accepteur se
prescrit par 3 ans à compter de l’échéance de la lettre. L’action contre le tireur se prescrit par un an.

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3. Le régime des recours cambiaires et la portée de l’inopposabilité des exceptions

511-12 Ccom : « les P actionnées en vertu de la LDC ne peuvent pas opposer au porteur les
exceptions fondées sur leurs rapports personnels avec le tireur ou avec les porteurs antérieurs, à moins que
le porteur, en acquérant la lettre, n'ait agi sciemment au détriment du débiteur ».

Il est certaines exceptions qui seront malgré tout opposables :


- Un vice de forme apparent du titre.
- L’absence de consentement ou l’incapacité cambiaire d’un signataire.
- Les exceptions sont opposables dans les rapports personnels directs entre parties immédiates . La LDC ne
substitue pas les rapports cambiaires aux rapports fondamentaux. En revanche, l’inopposabilité des
exceptions s’épanouit à l’égard de toutes les parties qui ne sont pas contractuelles immédiates : on ne va
pas faire subir à qqn d’autre des exceptions dont il n’est pas à l’origine et qu’il ne peut connaître.
- Les exceptions sont opposables en cas de MF du porteur = la situation dans laquelle, en acquérant la
LDC, le porteur a agi sciemment au détriment du débiteur. La BF est toujours présumée en droit
français : il appartient au tiré accepteur par exemple à qui on demande paiement de prouver la MF du
porteur, par tout moyen. Comme c’est souvent le banquier qui prend les EC en paiement, la Q° de la MF
du banquier s’est posée et a donné lieu à 5 arrêts Cass. 26 juin 1956 : la Ccass a défini la MF comme
« la conscience au moment de l’endossement à son profit du titre, de causer un dommage au débiteur
cambiaire en le mettant dans l’impossibilité de se prévaloir d’un moyen de défense issu de ses relations
avec le tireur ». Cette caractérisation s’est faite par plusieurs arrêts plus récents. Cass. 10 juin 1997 :
une LDC est tirée par la sté XTREM qui avait émis une facture auprès de X. Donc X est tiré accepteur
de la lettre. Or la sté XTREM n’avait pas rempli ses obligations à l’égard de X, mais a fait escompter
cette LDC. Le porteur de la lettre est la banque SDBO qui a pris la lettre à l’endossement : X a refusé de
payer. La CA dit que rien ne prouve la MF de la banque. L’arrêt est cassé : SDBO était pratiquement
l’unique banquier de la sté XTREM et a remarqué la dégradation constante de sa trésorerie, et le fait
qu’elle ne payait aucun EC tiré. La multiplicité des impayés et des découverts ne pouvait manquer
d’alerter la banque SDBO, qui ne pouvait ignorer la situation désespérée de la sté. la SDBO a agi
sciemment au détriment de la débitrice.

Les recours cambiaires relèvent du TC, qui ne peut accorder de délai de grâce. Il existe certains
dispositifs rapides qui peuvent être exercés par le porteur : injonction de payer, référé-provision, saisie
conservatoire.

B. Les recours fondamentaux

Les rapports contractuels subsistent tous lorsqu’une LDC est émise. Ils peuvent être très nombreux :
valeur fournie entre tireur & bénéficiaire ; valeur fournie entre bénéficiaire qui endosse et son endossataire ;
valeur fournie entre endossataire qui réendosse comme endosseur et 2nd endossateur et ainsi de suite ; et
provision du tireur sur le tiré. Tous ces rapports subsistent.
2 en particulier échappent à la prescription des rapports cambiaires :
- Le recours fondé sur la provision : le banquier qui a escompté l’effet est le propriétaire de la provision, et
a contre le tiré un recours fondé sur la créance de provision. Ce recours est le seul que le porteur peut
exercer si le tiré n’a pas accepté la LDC : le banquier escompteur ne peut qu’exercer ce recours
fondamental. Si le recours cambiaire contre le tiré accepteur est prescrit (3 ans), le recours fondé sur la
créance de provision est prescrit par la durée de droit commun de 5 ans. Mais il est donc fondé sur les
principes de droit commun : opposabilité des exceptions. Par conséquent, le tiré qui n’a pas accepté la
lettre peut opposer au porteur l’absence de provision.
- Tous les recours fondés sur la valeur fournie : ces recours sont contractuels de droit commun. Si c’est un
banquier escompteur qui a passé l’effet, il va le contrepasser et re-débiter le compte de son client.

SECTION 2 : Le billet à ordre

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C’est un EC à 2 P. Il fait l’objet de 512-1 s. Ccom. Billet à ordre = titre cambiaire par lequel un
souscripteur s’engage à payer une somme déterminée à un bénéficiaire ou à son ordre. Donc c’est une LDC
dans laquelle les qualités de tireur & tiré sont confondus en la même P. Par conséquent, 2 principes
cardinaux s’appliquent :
- On applique tout le droit des EC (inopposabilité, solidarité cambiaire, indépendance des signatures…).
512-3 Ccom renvoie à un nombre considérable d’articles sur la LDC.
- Parce que le billet à ordre met en présence un souscripteur qui s’engage comme débiteur cambiaire, on
enlève tout ce qui est incompatible avec la structure, tout ce qui concerne la théorie de la provision, tout
ce qui concerne l’acceptation.

EXAMEN : dissertation ou commentaire d’article(s)

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