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ISBN : 978-2-226-38660-1
Introduction
Elle est l’une des femmes du Moyen Âge dont on connaît le mieux la
vie : non seulement nous disposons de quelques-unes de ses lettres, Scivias
et Le Livre des œuvres divines qui rendent compte de ses visions, mais elle a
également un biographe en la personne de Thierry d’Echternach, même si
celui-ci ne l’a pas connue directement et qu’il opte pour une part pour
l’hagiographie. Il n’en demeure pas moins qu’il s’appuie sur des sources
reconnues, issues des proches d’Hildegarde : Guibert de Gembloux et
Geoffroy pour écrire l’ouvrage qui lui a été commandé par les abbés
Gottfried et Ludwig. Dans cette Vie 5, il est surtout question de ses visions et
des miracles qu’elle a réalisés. On a également un écho de sa vie dans le
retable de Rochuskapelle de Bingen.
Hildegarde n’a pas voulu faire œuvre littéraire, elle n’a pas écrit non
plus de traité, ni de commentaire de l’Écriture, pas plus qu’elle n’a présenté
d’autobiographie. Elle n’aurait certainement jamais rédigé d’ouvrage si, à
l’âge de quarante-deux ans et sept mois, une voix ne lui avait enjoint de
mettre par écrit ses visions. Sans doute est-ce relativement tard dans sa vie,
en 1141, qu’elle entend cette voix, mais comme elle vit jusqu’en 1179, elle
a le temps d’écrire d’autres ouvrages en l’espace des trente-huit années
suivantes. Elle y est aidée, en particulier, par son secrétaire, le moine
Volmar, du monastère voisin du Disibodenberg. La diffusion de son œuvre
est facilitée car l’authenticité de ses visions a été reconnue au synode de
Trèves, en 1148. De plus, elle a une certaine liberté d’action, étant abbesse à
Bingen, elle est directement rattachée à l’archevêque de Mayence et est en
relation épistolaire avec les grandes figures de son temps, dont l’empereur
Frédéric Barberousse.
Son œuvre se subdivise en plusieurs parties. Il y a tout d’abord le grand
triptyque visionnaire constitué par le Scivias, publié en 1151, le Livre des
mérites de la vie, datant de 1163, Le Livre des œuvres divines, publié en
1174 ; c’est là son apport spécifique, la présentation et l’interprétation de
ses visions.
Se rapportent à ce volet théologique de son œuvre la Vie de saint
Disibode et celle de saint Rupert, les deux fondateurs des monastères où
elle a vécu, ainsi que l’Explication de la Règle de saint Benoît, qu’elle a
suivie tout au long de sa vie, et l’Explication du « Symbole » de saint
Athanase, qu’elle récitait quotidiennement et qui revient fréquemment dans
le récit de ses visions ; autant dire que ce sont des ouvrages
d’approfondissement qui ont l’intérêt de pénétrer le contexte où elle vivait
et de mieux apprécier l’originalité de son propos. D’autres ouvrages
s’inscrivent également dans cette partie théologique de son œuvre : le Traité
du sacrement de l’autel, expliquant l’eucharistie, qui a une place
fondamentale dans ses visions du Scivias, un opuscule intitulé Solutions aux
questions du 30 octobre, ainsi que cinquante-huit Homélies sur l’Évangile.
Il peut sembler étonnant de trouver des homélies dans l’œuvre
d’Hildegarde, mais l’abbesse de Bingen a prêché, exhorté les populations à
vivre davantage l’Évangile lors de ses différents voyages, qui étaient autant
de petites croisades.
S’y ajoutent quelque quatre cents Lettres qui sont parvenues jusqu’à
nous, et qui permettent de mieux comprendre sa personnalité ainsi que le
rôle politique qui fut le sien.
Une autre composante importante de son œuvre est son apport médical,
avec un ouvrage dit « de médecine complexe », intitulé Des causes et des
soins et un autre, dit « de médecine simple », ayant pour titre Physique, ou
Neuf livres des subtilités des diverses créatures de la nature. En tant
qu’abbesse et comme le monastère vivait en autarcie, Hildegarde devait y
avoir une pharmacie, un jardin de plantes médicinales pour soigner ses
moniales, d’où la réflexion médicale qu’elle propose à partir de là, avec
l’esquisse d’une médecine psychosomatique en raison de l’unité de l’être
humain qu’elle a comprise dans ses visions.
Il y a également un livre atypique ayant pour titre Langue inconnue
avec traduction latine. Hildegarde a, en effet, inventé une langue dont cet
ouvrage se fait l’écho. Le langage dont elle disposait n’était-il pas apte à
rendre compte de ses visions ou a-t-elle voulu créer une langue universelle
ou encore un moyen de communication avec ses moniales ? On ne sait.
Reste toute la partie musicale de son œuvre. En tant que moniale puis
abbesse, la musique liturgique et en particulier le chant ont une grande
place dans sa vie. Ainsi Hildegarde compose-t-elle hymnes, antiennes,
chants liturgiques qu’elle regroupe sous le titre Symphonie de l’harmonie
des révélations célestes. Elle écrit également un drame liturgique pour
l’inauguration du monastère du Rupertsberg, l’Ordo virtutum, qui reprend et
prolonge la dernière vision du Scivias 6.
Le triptyque visionnaire
Le Scivias
Le triptyque visionnaire 7 d’Hildegarde, constitué par le Scivias, le Livre
des mérites de la vie et Le Livre des œuvres divines, résulte de ce que
Bernard Gorceix appelle les « trois tempêtes visionnaires de 1141, de 1159
et de 1163 8 », qui ont véritablement terrassé Hildegarde, mais qui l’ont
amenée à transmettre une œuvre grandiose, dont le fleuron est Le Livre des
œuvres divines, avec les magnifiques reproductions de ses visions.
Ces visions, Hildegarde les consigne tout d’abord dans le Scivias, dont
le titre signifie « Connais les voies » ou encore « Sache quelles sont les
voies du Seigneur », voies qui lui ont été révélées lors de ses visions. Cet
ouvrage est en quelque sorte la porte d’entrée de son œuvre.
Avec le Scivias, un tournant, une libération se réalisent pour Hildegarde.
Enfin, elle peut parler ouvertement de ses visions qu’elle a depuis l’âge de
trois ans et qui ne cesseront pendant soixante-dix-huit ans. Ainsi rapporte-t-
elle dans sa Vie : « À l’âge de trois ans, je vis une si grande lumière que
mon âme en fut tout effrayée ; mais en raison de l’impuissance due à l’âge,
je ne pus rien en manifester. Plus tard, je demandai à ma nourrice si elle
voyait quelque chose de semblable. Elle ne répondit pas, parce qu’elle ne
voyait rien 9. » Presque toujours, elle est confrontée à de telles
incompréhensions. Seuls Jutta de Spanheim, Richardis de Stade et le moine
Volmar, qui l’accompagnent, comprennent qu’elle vit quelque chose hors du
commun. Lui ont-ils demandé de mettre par écrit le contenu de ses visions
ou l’ont-ils fait d’eux-mêmes à partir du récit qu’elle en donnait ? On ne
sait.
Dans son triptyque visionnaire, Hildegarde ne se raconte pas, elle ne
parle pas d’elle-même, elle répond à la voix qui lui dit : « Écris ce que je te
dis. » De plus, ses visions ont un intérêt pour les autres, car elles
comportent un message pour son époque et pour l’humanité en général,
d’où le titre de « prophétesse » attribué à Hildegarde. Elle s’en explique en
ces termes, au début du Scivias : « J’avais beau voir et entendre cela,
néanmoins, comme je doutais et me méfiais de moi-même, et comme je
voyais l’hostilité des paroles des hommes, j’ai longtemps refusé d’écrire
non par entêtement, mais par pratique de l’humilité, jusqu’au jour où […] je
me suis mise à écrire. Et, pendant que je le faisais, j’ai pris conscience,
comme je l’ai dit, de l’extrême profondeur de ces livres 10. »
14
Hildegarde, « trompette de Dieu »
Mais la publication du Scivias ne fut pas aussi aisée qu’on pourrait le
penser. Il fallut tout d’abord un long temps pour qu’Hildegarde le rédige,
quelque dix années. Il lui fallait élaborer un texte à partir des images qui lui
étaient apparues. Maura Zatonyi, dans Vidi et intellexi, explique
qu’Hildegarde propose une sorte de commentaire de l’Écriture à travers le
récit et l’explication de ses visions 15. Aussi se donne-t-elle pour but de
préciser le rapport entre vision et compréhension de l’Écriture à partir d’une
recherche sur l’herméneutique hildegardienne de l’Écriture dans son
triptyque visionnaire 16. Elle la présente comme étant essentiellement un ars
interpretandi, en faisant ressortir qu’Hildegarde connaît les règles
médiévales d’interprétation de l’Écriture, qu’elle les met en œuvre et
comprend l’Écriture comme source de salut.
De plus, la publication du Scivias a fait difficulté. Aussi a-t-il été
demandé à Bernard de Clairvaux de se prononcer sur l’authenticité des
visions d’Hildegarde et comme il conclut qu’il ne fallait « point permettre
que fût occultée par le silence une lampe aussi remarquable, mais qu’il
fallait confirmer de son autorité cette grande grâce que le Seigneur voulait
manifester en son temps 17 », le synode de Trèves, puis le pape Innocent III
reconnurent la réalité des visions d’Hildegarde. À partir de là, elle pouvait
continuer à rédiger le Scivias, qu’elle termina en 1151.
C’est un livre magistral, à la fois original et classique, tout entier
articulé autour du rapport de la création et du salut et scandé en trois
étapes : la bonté de la création, puis la chute, le rapport entre l’homme et le
cosmos (les six premières visions) ; l’intervention du Sauveur et les
chemins du salut que sont les sacrements (les sept visions suivantes) ; et
finalement le développement de l’histoire du salut jusqu’aujourd’hui (les
treize dernières visions) 18. De manière pédagogique, Hildegarde propose le
récit de ses visions puis donne l’explication qu’elle en a reçue avant qu’en
soit présentée l’expression iconographique. Elle a partiellement supervisé
l’illustration de ses visions consignées dans le Scivias 19.
Dans le prologue au Livre des œuvres divines, Hildegarde se dit inculte.
Sans doute est-ce là une preuve d’humilité et une manière de montrer qu’il
lui est donné de transmettre le message de ses visions. Ainsi rapporte-t-elle
qu’une voix lui a dit : « Écris-le en te fondant non pas sur le langage de
l’homme, non pas sur l’intelligence de l’invention humaine, non pas sur la
volonté humaine d’organisation, mais en te fondant sur le fait que tu vois et
entends cela d’en haut, dans le ciel, dans les merveilles de Dieu 20. »
La Trinité
La Trinité
La liberté
Mais il n’en est pas moins difficile pour Hildegarde de transcrire ses
visions, comme elle le dit dès le prologue de l’ouvrage. Pour en rendre
compte ici, on la voit au bas de la miniature (fig. 2), recevant, du ciel, le feu
de l’Esprit Saint, regardant la vision et essayant d’en faire le récit sur des
tablettes de cire, en étant aidée par son secrétaire Volmar et par sa fille
spirituelle Richardis de Stade. Elle se situe dans un « cadre qui redouble
l’architecture du couvent et qui est accolé à celui de la représentation
principale, technique qui est reprise dans les septième, huitième et dixième
visions. Dans les autres cas, la figure de l’auteur s’inscrit à l’intérieur d’un
cadre unique, celui de la vision 20 ». Y a-t-il là une signification ? L’auteur
de la miniature entend-il montrer par là que la vision échappe à la
visionnaire, qu’elle la dépasse ? Y a-t-il une force particulière des visions
pour lesquelles Hildegarde est placée dans un cadre extérieur ? Il le semble.
Ici, en tout cas, on voit le rôle effectif de Volmar dans la transcription de ses
visions. Est-ce aussi pour lui rendre hommage, car il est mort avant que
l’ouvrage ne soit terminé ? C’est possible. Hildegarde a aussi une taille plus
grande que Volmar et Richardis, afin de faire ressortir que c’est bel et bien
elle la visionnaire.
DEUXIÈME VISION
Les vents
Macrocosme et microcosme
L’homme et le monde
Dans cette quatrième vision (fig. 7), dont le récit est le plus long de
l’ouvrage, mais aussi le moins unifié, c’est le développement de la vie sur
terre, le travail de l’homme et plus précisément les travaux des champs aux
différentes saisons qui sont retenus sur la miniature, ce qui fait un peu
difficulté dans la mesure où ce passage est relativement bref et marginal
dans le texte du Livre des œuvres divines, alors que l’essentiel de la vision
est consacré à l’influence du cosmos sur l’être humain. À propos des
travaux et des saisons, il est seulement dit à Hildegarde : « Dieu a consigné
dans l’homme toutes les créatures. Il a aussi reproduit en lui l’ordre des
différents moments de l’année. L’été correspond à l’homme éveillé, l’hiver
à l’homme qui dort. L’hiver renferme en lui ce que l’été profère dans la joie.
Le sommeil réconforte le dormeur, pour qu’il soit rapidement apte à
certaines œuvres, quand ses énergies s’éveillent. Il a donc distingué en lui
les mois, discernant les qualités et les vertus […]. L’homme est terrestre de
par sa chair, céleste par son âme, conformément aux créatures inférieures et
aux créatures supérieures, respectivement. L’homme connaît l’évolution du
temps, qui scande le mouvement et la vie universels […]. C’est que
l’homme est la totalité de l’œuvre divine, et Dieu est connu par l’homme,
puisque Dieu a créé pour lui toutes les créatures 40. »
Sans doute est-il difficile de représenter l’âme, mais il ressort ici que
l’enlumineur a laissé libre cours à son imagination, ou qu’il s’est inspiré de
modèles existants 41, issus des Bucoliques de Virgile ou Des travaux et des
jours d’Hésiode, pour rendre compte des quatre saisons, ce qui sera ensuite
systématisé dans les Très Riches Heures du Duc de Berry, par exemple,
mais aussi sur les vitraux ou sur les tympans d’églises, comme celle
d’Autun. L’originalité ici consiste à situer les quatre saisons à l’intérieur du
cercle où était inscrit l’être humain, ce qui reprend la facture des plans de
villes ou des cartes du monde de l’époque.
En fait, la structure de l’enluminure est la même que dans les deux
visions précédentes, avec les six cercles concentriques, les douze vents, ce
qui cette fois correspond au texte d’Hildegarde, mais la Trinité a disparu, il
ne reste que le cercle rouge qui l’évoque, et la main de Dieu tenant le
phylactère qu’elle présente à Hildegarde, ce qui implique que le contexte
est le même : la création est l’œuvre de la Trinité. L’homme, qui est en le
microcosme, est l’expression de l’œuvre divine. D’ailleurs, Dieu l’a créé à
son image et à sa ressemblance (cf. § 100 du Livre des œuvres divines). De
plus, à l’intérieur de la création, l’être humain coopère à l’agir divin par son
action aux différentes saisons de l’année. Il n’est plus au centre du cercle, à
la place de Dieu, mais sur le côté du deuxième cercle central, divisé en
quatre parties, de couleurs différentes, ce qui est sa place habituelle.
Macrocosme et microcosme
Les vents
S’y ajoute la conception des vents de son temps, qui reprend et prolonge
les deux visions précédentes. Sur la miniature, ils sont situés de nouveau
aux quatre points cardinaux et ils ne sont pas sans influence sur l’être
humain. Cette fois, les animaux qui les représentent n’envoient plus leur
souffle vers l’extérieur, mais vers l’être humain, et ils ont une influence sur
lui. Ainsi Hildegarde explique-t-elle qu’« aux quatre vents principaux
correspondent quatre énergies au sein de l’homme, la pensée, la parole,
l’intention et la vie affective » 45, ce qui est leur donner une grande
importance.
Il ressort finalement de cette quatrième vision que l’être humain est le
microcosme de la création, qu’il y a en lui une influence réciproque de
l’âme et du corps, ce qui oriente vers une médecine psychosomatique, telle
qu’on la trouve dans Des causes et des soins.
Créé par Dieu, l’homme est appelé au salut par le Dieu vivant qui s’est
incarné, comme l’explique la fin de la vision, en une relecture du Prologue
de saint Jean. Un parallèle intervient entre cette vision et la sixième de la
première partie du Scivias, où il est donné à Hildegarde de percevoir la
hiérarchie de la création humaine et angélique. Cette fois, la hiérarchie
disparaît et tout est centré sur l’être humain.
Les quatre premières visions du Livre des œuvres divines ont une grande
unité et montrent à quel point la Trinité est créatrice. Elles prolongent, en
un cycle unifié, les visions de la création qu’Hildegarde rapporte, en ordre
dispersé, dans le Scivias. De plus, à la différence des enluminures de ce
dernier, qui évoquent non seulement la création mais aussi la chute et le
salut, celles du Livre des œuvres divines sont beaucoup plus unifiées et plus
sereines : c’est l’homme accompli en harmonie avec la vie trinitaire qu’elles
présentent, il n’y a pas de drame cosmique. Les quatre premières visions
d’Hildegarde sont comme la dilatation de la première : la Trinité créatrice
crée le monde, avec l’homme en son centre, elle le maintient dans l’être tout
en lui étant distincte, comme le montre la planche suivante, où Hildegarde
met l’accent sur la responsabilité de chacun.
C’est toute une cosmologie et une anthropologie qui se déploient à
travers ces quatre premières visions d’Hildegarde, qui ne sont pas sans
analogie avec la vision que saint Benoît a eue du monde ramassé en un
rayon de lumière 46.
DEUXIÈME PARTIE
CINQUIÈME VISION
Avec cette cinquième vision (fig. 8), nous passons à la deuxième partie
du Livre des œuvres divines, et à la totalité de cette seconde tempête
visionnaire. Si la première partie est toute d’harmonie, célébrant cette
œuvre divine qu’est la création de l’homme, microcosme et sommet de la
création, en revanche la deuxième partie fait ressortir la responsabilité qui
revient à l’être humain et le jugement de Dieu qui s’ensuit. Elle constitue un
tournant dans l’ouvrage, elle en est, en quelque sorte, le point d’inflexion,
mais sans être en rupture avec ce qui précède. L’expression picturale qui en
est donnée change également. La figure dominante reste le cercle, mais il
est cette fois en mouvement, pris entre la protection de Dieu et le risque de
chute dans l’abîme, en fonction du choix réalisé par l’être humain. À
considérer la structure de l’image qui en est faite, force est de constater
qu’elle part d’un centre de rayonnement, à la manière d’un point de fuite
qui se situe entre les deux ailes entourant la roue, ces deux ailes qui ne sont
pas sans analogie avec celles de la première vision. La ligne partant de ce
centre rejoint directement la main d’où sort le phylactère en haut de
l’image, l’autre ligne qui lui correspond passe sous la tablette que tient
Hildegarde et qui renvoie à la fois au livre des Écritures et à la tablette de
cire où elle consignait ses visions. Leur importance est ainsi visuellement
soulignée, comme elle l’est, d’une autre manière, dans l’explication de la
vision.
Comme les précédentes et même davantage, cette vision est faite de
symboles. Pour permettre de les comprendre, la démarche pédagogique du
Scivias est reprise, avec successivement le récit de la vision et son
explication. Intervient en finale une reprise des six jours de la création.
Hildegarde explique tout d’abord qu’elle aperçut le « cercle terrestre
partagé en cinq secteurs : l’un à l’est [à gauche sur l’enluminure], l’autre à
l’ouest, le troisième et le quatrième au sud et au nord [au bas de l’image] et
le cinquième au centre. Les zones est et ouest avaient la même surface et
l’aspect d’un arc tendu […]. Les deux parties sud et nord étaient divisées en
trois branches : les parties médianes avaient même forme et même mesure
[…]. Le secteur est resplendissait d’une même clarté, la ténèbre recouvrait
partiellement l’ouest 1 ». Entre eux se répartissaient les êtres humains, plus
ou moins heureux, dont on n’aperçoit que les têtes sur la gravure. « En
direction de l’est, j’aperçus, au-dessus de la courbure terrestre et à une
certaine altitude, une boule rouge, entourée d’un cercle de la couleur d’un
saphir. Deux ailes sortaient de la gauche et de la droite de cette boule, elles
s’élevaient des deux côtés, puis elles se recourbaient, elles se faisaient face,
elles se prolongeaient jusqu’à la moitié de la circonférence terrestre qu’elles
encerclaient et qu’elles recouvraient à l’exclusion du firmament. De ces
limites partait, en forme d’arc, un cercle rouge […]. Sur la courbure, en
direction de l’est, et à la jointure des deux ailes, se dressait une sorte de
bâtiment qui s’élevait jusqu’à toucher la boule. De la boule partait jusqu’au
milieu des deux ailes une route, au-dessus de laquelle scintillait une étoile
lumineuse [on la voit difficilement sur l’image]. De plus, l’on voyait entre
les pointes des ailes une boule de feu, qui projetait ses feux dans toutes les
directions […]. Entre le coin ouest et nord bâillaient comme une gueule
affreuse deux autres zones ténébreuses : la gueule béait, prête à
engloutir 2. » C’est une sorte de géographie spirituelle qui se dessine.
Du bon usage des cinq sens
La protection divine
Quant aux « ailes qui s’élèvent et qui se recourbent, elles montrent que
la protection divine s’exerce dans la prospérité et dans l’adversité, par une
douce inspiration ou par une dure saisie […]. Quant à celles qui enserrent la
Terre et qui descendent jusqu’au milieu du globe, elles montrent que la
défense suprême ne protège pas seulement les habitants des cieux, mais
aussi les créatures inférieures […]. Le cercle rouge en forme d’arc qui, à
l’exception de quelques zones, enserre toute la partie occidentale extrême
évoque le point que voici : avec la même perfection qu’il met à protéger
dans sa miséricorde ses zélateurs, Dieu, par le feu de son zèle, par sa juste
et vengeresse extension, frappe de sa justice tous ceux qui abandonnent la
fréquentation des bonnes actions et du domaine de la vraie foi absolue » 12.
Ces ailes ainsi que « celles qui enserrent la Terre 13 » et ce cercle rouge qui
restaient énigmatiques symbolisent en fait la présence de Dieu à son œuvre.
Les ailes sont synonymes de protection, de défense, alors que le cercle
rouge renvoie à la justice divine qui peut s’exercer à l’encontre de ceux qui
s’opposent à l’œuvre de Dieu. À la différence des premières visions, le
châtiment est cette fois évoqué.
La cité de Dieu
La gueule béante
Le salut à l’œuvre :
vers la cité de Dieu
Avec cette sixième vision (fig. 9), nous passons à la troisième partie du
Livre des œuvres divines, partie comprenant cinq visions alors que la
deuxième n’en compte qu’une, longue il est vrai.
Un nouveau changement intervient, tant par rapport à la forme qu’au
fond : on passe de la figure du cercle, qui symbolise la perfection, à celle du
carré, qui renvoie au cosmos 1. On va aussi de la création à la cité, voire à la
cité de Dieu, mais la réalité de la création reste en arrière-fond. Cette
nouvelle série de visions procède à la manière d’une symphonie qui
annonce à plusieurs reprises le thème principal avant que celui-ci ne prenne
toute son ampleur.
Si la cité a une place centrale sur l’enluminure, comme dans la
troisième partie du Livre des œuvres divines et qu’on la retrouve, à quelques
différences près, identique dans la traduction picturale des cinq dernières
visions, avec six bâtiments, dont une église à double chœur qui est peut-être
la cathédrale de Mayence ; si cette cité a la forme d’un carré entouré d’une
bordure blanc et noir et si elle a l’aspect de la Jérusalem céleste (Ez 40-48),
ou encore d’un sceau de ville, tel qu’on le faisait à l’époque ; si elle a une
telle importance pour Hildegarde dans la mesure où la Jérusalem céleste est
évoquée par le monastère, en revanche elle n’a pas toujours une place aussi
décisive dans la vision. Elle est mentionnée comme « ornée de collines et
de figures 2 » qui n’apparaissent pas sur l’image dans la sixième vision,
mais elle ne l’est plus guère dans les visions suivantes, et ce sont souvent
les motifs qui l’entourent qui sont importants, ce qui se vérifie pour les cinq
dernières visions. Une nouvelle fois, il est davantage question de la bonté
de la création et de la responsabilité de l’être humain.
Tout d’abord, Hildegarde fait le récit de sa vision : « J’aperçus comme
une grande cité, en forme de carré, ceinte d’un mur à la fois de splendeur et
de ténèbres […]. Sur le côté est de la cité se dressait une grande et haute
montagne, d’une pierre blanche et dure, qui ressemblait à un volcan. À son
sommet resplendissait un miroir, dont la clarté et la pureté paraissaient
même dépasser celles du soleil. Une colombe apparut dans ce miroir, les
ailes écartées, prête à prendre son vol. Ledit miroir, qui était le lieu de
merveilles cachées, projetait un éclat qui s’élevait et s’étendait, et au sein
duquel se manifestaient de nombreux mystères, et plusieurs formes et
figures. En cette splendeur et en direction du midi apparaissait un nuage,
blanc dans sa partie supérieure, noir dans sa partie inférieure. Au-dessus de
ce nuage resplendissait toute une cohorte angélique. Les uns rayonnaient
comme le feu, les autres étaient toute clarté, les troisièmes scintillaient
comme des étoiles. Tous étaient agités par le souffle d’un vent, telles des
lanternes allumées 3. » Avec ce récit de la vision, le décor est planté : il y a
la cité, la montagne qui doit avoir une signification symbolique, le miroir
avec la colombe, le nuage et la cohorte angélique, le vent.
La cité
La montagne
La colombe
Elle lui est expliquée en ces termes : « La colombe qui apparaît dans le
miroir et qui est prête à prendre son vol signifie que cette même prescience
est le lieu dans lequel s’épanche l’ordonnance divine, dans lequel elle tend à
se manifester. Si cette colombe, perchée au-dessus de la montagne, réfléchit
sur la direction à prendre, si elle a besoin de deux ailes pour voler, c’est que
l’ordonnance divine possède elle aussi deux ailes, les anges et les hommes
[…]. De même l’homme, dans le silence, ordonnance ses volontés. En
l’assurant de la protection des anges, Dieu lui a donné en quelque sorte
deux ailes : la volonté et le désir d’agir 6. » De nouveau, c’est la prévenance
du Créateur pour sa création qui est manifestée à Hildegarde, avec un appel
à la responsabilité personnelle. Une influence est à noter ici sur Hildegarde,
non plus tant celle d’Augustin que celle d’Anselme de Canterbury, un
bénédictin du XIe siècle, dont elle devait connaître les œuvres et qui
introduit la notion de rectitudo ou encore qui lie la miséricorde de Dieu à
son ordonnance.
De nouveau, de manière très augustinienne, Hildegarde se fait l’écho de
ce qu’elle entend : « Celui qui vole vers Dieu en disant : “Je m’élèverai vers
toi, car c’est toi qui m’as créé, et mon âme s’accroche à toi !”, il est prêt à le
protéger de sa droite et à l’accueillir, en lui attribuant bien des
ornements 7. » Dieu donne son accomplissement à celui qui réalise le projet
qu’il a sur lui.
La suite de l’explication de la vision va dans le même sens, en
envisageant cette fois l’Incarnation qui fait l’admiration des anges et qui est
décisive pour l’être humain. Ainsi est-il dit à Hildegarde : « Aucun homme
n’est capable de réaliser son œuvre sans l’Incarnation du Verbe de Dieu. Par
ce même habit, il sanctifia les hommes afin qu’ils levassent les yeux vers
lui, afin que, les ailes écartées, ils volassent avec lui vers les désirs
suprêmes 8. » C’est tout le thème de l’admirable échange de la divinité et de
l’humanité qui est alors sous-jacent, afin de montrer à quel point le Fils
nous donne le chemin pour aller vers le Père, ce qui n’est pas sans analogie
avec le thème de la patrie et de la voie chez Augustin.
Le miroir
Le miroir
« Le nuage blanc et noir qui s’élève vers le midi montre qu’en cette
ostension de l’ardente justice de Dieu seront mises à nu l’intention des
esprits bienheureux, digne de louange, et celle des esprits déchus, odieuse.
Au-dessus du nuage resplendit une grande cohorte angélique, les uns tel un
feu, les autres toute clarté, les troisièmes telles des étoiles. Les anges de feu
recèlent les énergies les plus vives, rien ne peut les ébranler ; Dieu a désiré
en effet qu’ils contemplent sans cesse son visage. Les anges qui sont toute
clarté sont, eux, ébranlés par le service des œuvres humaines, qui sont aussi
œuvres de Dieu […]. Quant aux anges qui ressemblent à des étoiles, ils
souffrent avec la nature humaine, ils la présentent à Dieu comme un livre.
Ils sont les compagnons des hommes, ils leur adressent des paroles de
raison, selon la volonté de Dieu. Si tous sont agités par un vent, comme des
lampes allumées, c’est que l’esprit de Dieu qui vit, et qui brûle de vérité,
incite les esprits angéliques à se dresser contre leurs ennemis. C’est alors un
concert de voix qui ressemble au bruit de la mer […]. S’il envoie un feu
vers le nuage noir, et si ce nuage se consume sans flammes, c’est que les
esprits bienheureux qui voient les entreprises des anges déchus servent
l’honneur de Dieu 10. » Cette fois, on passe dans le domaine de
l’eschatologie. Sans doute Hildegarde est-elle marquée par la hiérarchie
angélique de Denys l’Aréopagite, mais elle la réinterprète et précise la place
des anges dans la vie humaine.
Elle semble également influencée par saint Augustin qui, dans le De
Genesi ad litteram par exemple, présente la création angélique comme le
prototype de la création humaine. En effet, elle en vient à des accents
augustiniens quand elle écrit : « Chaque créature qui vit doit lever ses
regards vers son Créateur, et elle ne doit pas tirer gloire d’elle-même.
L’homme en effet ne peut puiser en soi la joie pleine de son utilité
particulière : il faut qu’il la reçoive de quelqu’un d’autre. Quand cet autre
lui aura permis de comprendre cette joie, ce sera en son cœur une grande
exaltation. Alors seulement l’âme se souvient que c’est Dieu qui l’a créée,
elle lève les yeux vers lui, pleine de foi 11. » C’est, à la suite de saint
Augustin, une profonde méditation sur la bonté de la création et sur le
rapport entre le Créateur et l’être créé qu’Hildegarde propose ici.
Le vent
La porte du salut
Il est précisé à l’abbesse : « Les deux figures que tu aperçois près des
limites orientales signifient que, lorsque les origines de la justice,
préfigurées en Adam, se mirent à vaciller, Dieu décida de deux époques
voisines, de mœurs différentes, l’une englobant le temps qui précède le
Déluge, où la Loi était absente, l’autre après le Déluge, le temps de la Loi.
La première figure a une tête et une poitrine de léopard, des bras d’homme
et des pieds qui ressemblent à des pattes d’ours, parce que le temps qui
précède le Déluge manifesta dans les mœurs des hommes la puissance et la
force, les différentes natures bestiales […]. Si leur tunique est de pierre,
immobile, si la figure tourne son regard vers le nord, c’est que les hommes
de ce temps s’enfermèrent dans la rudesse et dans la lourdeur de leurs
péchés 19. » Après le motif de la création, c’est l’histoire du salut qui est
envisagée, à travers ces deux figures, avec deux moments distincts : avant
et après le Déluge, sans ou avec la Loi. Le peintre a ajouté, en haut à gauche
de l’enluminure, les tables de la Loi qui envoient leur rayonnement sur les
prophètes et à partir desquels le rouleau des Écritures se déroule.
Mais l’explication de la vision se poursuit. Il est dit à Hildegarde : « La
seconde figure, plus proche de l’angle que nous avons décrit, qui a les
mains pliées, un visage d’homme, mais les pieds d’un faucon, désigne le
temps qui suit le Déluge, le temps de la Loi qui réglemente les mœurs […].
Si la tunique de cette figure est de bois, c’est que ce temps se fixa pour
règle l’Ancienne Loi, qui néglige les fruits spirituels. La couleur blanche,
qui va du sommet de la tête jusqu’au nombril, c’est le temps qui précède
Noé, Noé qui connut son Créateur, qui se sut homme, qui ébaucha le
premier édifice de sainteté, et qui apporta des offrandes à Dieu. Ce temps
dura jusqu’à la venue d’Abraham […]. Du nombril aux reins, la figure est
rougeâtre : c’est le temps qui va d’Abraham à Moïse […]. Des reins aux
genoux, la couleur grisâtre montre que le temps qui s’étend du Législateur
Moïse à l’exil de Babylone est un temps de dureté, de règne de la Loi […].
Des genoux aux pieds, la couleur trouble évoque l’époque qui va de l’exil à
Babylone à la ruine de la Loi, avant que ne vienne le Fils de Dieu pour
accomplir en lui-même ladite Loi dans sa totalité 20. » Cette fois, ce sont les
âges du monde, bien connus à l’époque d’Hildegarde, qui sont envisagés 21.
Les Pères de l’Église les faisaient correspondre aux six jours de la création.
Les deux figures représentent les deux principaux âges du monde : celui
d’Adam et de sa descendance, puis celui de la Loi, avant la venue du Fils de
Dieu. La distinction proposée par la vision d’Hildegarde est originale, elle
s’articule autour de la Loi, au lieu de reprendre, comme d’autres, la
distinction entre les patriarches et les prophètes par exemple. Le glaive que
le personnage porte à la ceinture est un « rappel de la pureté de la justice
divine 22 ».
Ici Hildegarde se réfère en fait implicitement à la prophétie. Elle
explique même qu’elle réalise le passage de la création à la création
nouvelle. En effet, les différents âges sont autant de « signes prémonitoires.
Dieu montra l’arche à Noé, il donna à Abraham la circoncision, il enseigna
à Moïse la Loi […]. Trois signes devancèrent le Fils de Dieu : les sacrifices
d’animaux, la circoncision et la Loi […]. Mais seul le Fils de Dieu
manifesta ce qui était caché dans les secrets de Dieu 23 ». C’est toute
l’économie du salut qui est évoquée ici. La vision d’Hildegarde la présente,
comme chez Irénée de Lyon, pareille au déploiement de la pédagogie divine
qui permet à l’être humain de progresser pour reconnaître le Fils de Dieu.
L’harmonie céleste
La vision qui lui est donnée ensuite de l’harmonie céleste (fig. 11) lui
est également expliquée. Il lui est dit : « La foule d’hommes que tu aperçois
au midi, comme un nuage, signifie que la foule des croyants qui ont imité et
qui imitent le Fils de Dieu dans l’ardeur de leur justice, en élevant leur
esprit vers ce qui appartient aux cieux, montent et monteront de vertu en
vertu. Si certains portent des couronnes, c’est qu’ils exaltent leur esprit et
qu’ils donnent à leur âme, dans la justice et la sainteté de leur désir,
l’ornement des récompenses suprêmes : les bons désirs, c’est le
commencement des commencements. Les palmes que certains tiennent
rappellent que ces croyants montreront dans leurs œuvres la victoire du bon
combat. Les cithares évoquent les récompenses d’une voie dure et étroite
qui conduit à la vie ; les orgues, la multiplicité des vertus qui se révèlent
dans le cœur de ceux dont la louange tend vers Dieu. Le concert de ces
instruments résonne comme un doux tonnerre : de même les louanges qui
résonnent dans la dignité et dans les fruits desdites vertus, dans le cœur de
ceux qui œuvrent en ces vertus avec tout le mérite souhaitable, s’accordent
avec les esprits de ceux qui s’élèvent vers les cieux 24. »
À une époque où il y avait une distinction entre l’Église pérégrinante et
l’Église triomphante, c’est une vision originale de l’Église triomphante qui
est donnée à Hildegarde, vision qui correspondrait davantage à l’appel
universel à la sainteté, mis en lumière par Vatican II 25, à la communion des
saints. En effet, différentes figures de sainteté sont représentées, en une
harmonie céleste : ceux qui portent une couronne ont vécu l’épectase, un
progrès spirituel continu, ceux qui portent des palmes sont vainqueurs dans
le combat spirituel, d’une certaine manière comme ceux qui portent des
cithares ; ceux qui ont des flûtes sont les messagers de la Parole ; quant aux
orgues, elles renvoient à la multiplicité des vertus, autant dire que
l’harmonie céleste est complète. Elle est symbolisée par un nuage pour
montrer que « le désir de l’âme […] ne sera jamais saturé » 26. Nous
sommes du côté de l’infini de Dieu, du progrès continuel, qui n’est pas sans
rappeler Grégoire de Nysse dans la Vie de Moïse.
Création et salut
La fontaine de vie
Une voix lui donne le sens des trois figures : « Dieu a réalisé toutes ses
œuvres dans l’amour, dans l’humilité et dans la paix, afin que l’homme
appréciât l’amour, recherchât l’humilité, saisît également la paix […]. Les
trois figures que tu aperçois, dans la disposition décrite, ce sont, dans la
force d’une ardente justice, au nom de la sainte Trinité, ces trois vertus,
amour, humilité et paix. L’amour et l’humilité sont ancrés dans la divinité la
plus pure, ils sont les sources des fleuves de la béatitude […]. Ces vertus ne
sont pas plus séparées de la divinité que la racine de l’arbre : Dieu, qui est
amour, conserve son humilité dans toutes ses œuvres et dans tous ses
jugements. Amour et humilité descendirent sur terre avec ce même Fils de
Dieu, et c’est eux qui l’accompagnèrent, quand il rejoignit le ciel 34. » On
peut noter une originalité dans la référence aux trois vertus qui se
substituent aux trois vertus théologales : la foi, l’espérance et la charité.
Vivant à une époque de chrétienté, la foi et l’espérance ont moins
d’importance pour Hildegarde que l’humilité qui est le véritable chemin de
foi et de vie. Quant à la paix, elle rend la vie possible et concrétise déjà
pour une part l’espérance.
L’humilité
Elle n’en oublie pas pour autant la place de l’amour, mais à la limite,
celle-ci va de soi, comme lui dit la voix : « En moi qui suis l’amour, toutes
les créatures ont resplendi. Ma splendeur a révélé leur forme, de même que
l’ombre traduit la forme. Dans l’humilité, mon soutien, la création
s’épanouit sur l’ordre de Dieu, en cette même humilité 39. » Apparemment,
l’amour est du côté de Dieu et l’humilité du côté de la créature. À la limite,
les choses sont plus complexes, car Hildegarde comprend, une nouvelle fois
à partir de là, le sens de la création, comme elle l’explique : « C’est que
l’homme est totalement l’œuvre de Dieu. Il regarde le ciel et il terrasse la
terre qu’il domine 40. » Il vit de l’amour de Dieu, il est microcosme de la
création, mais en tant que créature, il est distinct de Dieu et bien inférieur,
l’humilité lui donne sa juste place, d’où le lien indissociable entre amour et
humilité.
L’Incarnation du Fils, qui de Dieu s’est fait homme pour permettre à
l’homme d’être introduit dans la vie même de Dieu, en est l’expression. La
nuée des saints qui domine la miniature en témoigne, comme l’explique
Hildegarde : « Ils montrent que l’on acquiert la gloire des sommets par
l’amour et l’humilité : les esprits des fidèles montent comme les nuées de
vertu en vertu 41. » Ceux qui ont vécu pleinement l’amour et l’humilité
vivent déjà dans la gloire de Dieu. C’est d’une certaine manière
l’expression de la communion des saints, concernant tous les états de vie,
qui intervient dans cette vision d’Hildegarde.
La paix
La Sagesse et la toute-puissance
de Dieu
La Sagesse
La toute-puissance de Dieu
L’autre figure est énigmatique. La voix lui dit qu’elle « désigne le Dieu
tout-puissant qui s’oppose à la force et au jugement inique de l’antique
serpent, invisible, en sa majesté, merveilleux de par ses énergies, parce que
personne ne peut achever la profondeur de ses mystères. Au sommet de la
figure, à l’endroit de la tête, si la clarté est foudroyante en son rayonnement
au point de t’éblouir, c’est qu’aucun vivant, tant que l’alourdit le corps
mortel, ne peut voir l’excellence de la divinité, qui illumine tout 48 ». C’est
une manifestation du Dieu tout-puissant qu’il lui est donné de percevoir à
travers cette étonnante figure. Comme pour la Sagesse, sa tête est pur
rayonnement, ce qui n’est pas sans faire penser à l’Esprit Saint.
La tête d’homme qui se trouve au milieu de la figure « rappelle la
présence, dans la perfection des œuvres divines, de l’antique projet du salut
de l’homme […]. Si la tête est une tête d’homme, c’est que Dieu créa
l’homme à son image et à sa ressemblance, c’est qu’il lui donna pouvoir
d’opérer le bien, tant qu’il en serait capable, de célébrer son Créateur, de ne
pas l’oublier. Mais, personne n’est semblable à Dieu, personne ne peut être
Dieu 49 ». C’est de nouveau la bonté de Dieu et sa prévenance pour l’être
humain qui sont évoquées par cette tête, renvoyant au salut de l’être
humain. À considérer cette tête, force est de constater qu’elle est analogue à
la tête du Père qu’on trouve sur la planche correspondant à la première
vision.
« Quant aux griffes de lion, elles rappellent que Dieu cache aux
hommes mortels sa divinité, mais qu’il leur montre un grand nombre de
biens par ses préceptes, par ses lois, dans les autres créatures. Toute sa
création, il l’attirera à lui par son Fils comme des griffes de lion 50 », le lion
étant une image du Christ dans l’Apocalypse (5, 5), reprise dans le
Physiologus par exemple. Cette fois, ce n’est plus le rayonnement mais ce
sont les griffes qui traduisent le mystère de Dieu.
Les six ailes, elles, renvoient aux six jours de la création : « Les deux
ailes ascendantes qui se rejoignent pour protéger la clarté désignent l’amour
de Dieu et du prochain […]. Dieu les a placées près de son visage, il a fait
d’elles les miroirs de ses merveilles […]. Les deux ailes qui partent des
épaules et qui passent derrière la nuque, ce sont l’Ancien et le Nouveau
Testaments : dans l’Ancien, les prophètes annoncèrent le Fils de Dieu que
les fils de l’Église, dans le Nouveau, accueillirent par le sacrifice de leur
foi. Ainsi toute cette figure proclame la puissance de Dieu qui peut créer,
agir comme il le veut […]. Quant aux ailes inférieures, elles désignent le
présent et le futur 51. » Implicitement, les six ailes renvoient aux séraphins
qui contemplent la gloire de Dieu, qui, dans la Hiérarchie céleste de Denys
l’Aréopagite représentent le premier chœur des anges, celui qui est le plus
près de Dieu. Hildegarde ne le dit pas, mais s’y réfère implicitement, tout
en précisant de manière originale le sens de chaque paire d’ailes.
Ce qui est étonnant en revanche, c’est le corps de cette figure, car ni
Dieu ni les anges n’ont de corps, mais le sens en est expliqué en ces termes
à Hildegarde : « Si le corps est recouvert d’écailles comme un poisson et
non de plumes comme un oiseau, en voici la raison : de même que nous
ignorons comment naissent les poissons et comment ils se développent,
comment ils sont entraînés par les eaux courantes, de même le Fils de Dieu
est né dans sa sainteté parfaite en une nature étrange […]. Ainsi le Dieu
vivant offrit son Fils, lui donna une apparence semblable à celle d’Adam,
pour qu’il rachetât l’homme par le vêtement de son humanité 52. » La figure
prend ici tout son sens. Dieu, étant en lui-même invisible, n’est perçu que
par son rayonnement. En revanche, par l’Incarnation de son Fils, il vient
partager notre humanité et devient représentable. Mais là les choses sont un
peu plus complexes dans la mesure où c’est le mystère même de
l’Incarnation qui est évoqué dans cette vision. S’y ajoute le fait que, dans
les premiers siècles, l’ichthus (signifiant « Jésus-Christ, Fils de Dieu,
Sauveur ») est le signe de reconnaissance des chrétiens. Finalement, cette
étrange figure n’est pas sans faire penser à la Trinité 53 et présente une
certaine analogie avec celle de la première vision.
Le sens des miroirs est ensuite précisé : « Les deux ailes intermédiaires,
est-il dit, portent cinq miroirs : ainsi dans l’Ancien et le Nouveau
Testaments, nous voyons les luminaires des différentes époques. Ils sont au
nombre de cinq : Abel, Noé, Abraham, Moïse, puis le Fils de Dieu. Tous les
cinq éclairent tout ce qui sert l’homme sur le chemin de la vérité. Mais c’est
le Fils de Dieu qui, par sa Passion, a ouvert la clôture des joies célestes 54. »
Comme le deuxième personnage de la septième vision évoqué plus haut,
ces miroirs renvoient aux cinq âges du monde, largement développés par les
Pères et les médiévaux. Ils mettent en évidence la continuité de la
Révélation : depuis les mystères de Dieu jusqu’à l’Incarnation.
À considérer les deux figures, force est de constater qu’elles ne sont pas
sans renvoyer au Christ et à la Trinité, et qu’elles illustrent, à leur manière,
le verset 1 de Corinthiens 1, 24, disant que « le Christ est puissance et
sagesse de Dieu ».
Les ténèbres
La beauté de la création
La théophanie de la charité
La charité
L’anti-Christ
Épilogue
Le Livre des œuvres divines est considéré, à juste titre, comme le chef-
d’œuvre d’Hildegarde, c’est également son ouvrage le plus difficile, dans la
mesure où, par ses visions, elle est en quelque sorte plongée au cœur de
l’agir divin et s’en fait l’écho autant qu’elle le peut. L’iconographie qui est
jointe au livre et qui essaie de rendre compte au mieux de ses visions en
facilite l’accès et laisse parfois percevoir l’indicible par le jeu des couleurs
et des symboles.
Sans doute ce cycle d’illustrations, où la visionnaire est représentée sur
chacune des planches, avait-il pour but d’aboutir à sa canonisation, qui est
intervenue seulement huit siècles plus tard… Aussi a-t-il une dimension
pédagogique indéniable, tout en suivant le texte d’Hildegarde. Il déroule
toute une théologie en images qui fait comprendre que la Trinité est
créatrice, en la présentant sur la première enluminure, puis en montrant
comment elle procède à la création qui trouve son sommet dans l’homme,
avant de laisser ce dernier gérer la création, tout en lui prêtant son aide,
comme le montrent les planches suivantes. Ce sont également la bonté et la
beauté de la création qui se dégagent de ces représentations. Tout est calme
et beauté, induisant une théologie de la beauté et de la gloire, qui se situe
déjà dans l’éternité et qui constitue le point d’orgue de cette théologie au
tournant du XIIe et du XIIIe siècle.
Une esquisse de mouvement intervient dans l’iconographie de la
cinquième vision, où la liberté de l’être humain est engagée, mais où tout
semble apaisé, à la différence du Scivias, qui a une dimension plus
dramatique, plus apocalyptique dans sa représentation de la création et du
salut.
Les cinq dernières visions, qui déroulent le plan du salut, laissent
percevoir quelque chose de la vie divine, de la Jérusalem céleste. Elles sont
inhabituelles mais, par un habile jeu de couleurs, sur fond d’or, elles
évoquent l’accomplissement, l’œuvre du salut. Elles adoucissent le texte
d’Hildegarde, en faisant ressortir la continuité entre la création et le salut,
ce qui est aussi une prise de position, peut-être due à Volmar, à l’encontre
de la sotériologie d’Anselme de Cantorbéry, qui envisageait le salut en
termes de rachat, alors que pour la théologie de la création Hildegarde est
proche d’Anselme en tant qu’elle met en évidence l’action constante et
régulatrice du Créateur.
On peut également noter la perfection formelle de l’ouvrage qui induit à
penser qu’il est l’œuvre d’un atelier d’enlumineurs de métier, bien qu’il soit
encore difficile de déterminer lequel dans la mesure où on peut y distinguer
diverses mains avec des influences françaises : non seulement celle de
Nicolas de Verdun, mais aussi des influences strasbourgeoises, du fait que
les figures émergeant de la fontaine de vie ne sont pas sans faire penser à la
statue de l’église de la cathédrale de Strasbourg, par exemple 1… Il n’en est
pas moins possible que ces artistes soient venus au Rupertsberg ou aient été
en lien avec le monastère. À considérer la facture des miniatures, la
recherche géométrique qui y est mise en œuvre semble plutôt dater du
e 2e
XII siècle que du XIII , ce qui amène à penser qu’Hildegarde a pu jouer un
Introduction
1. Lucca, Biblioteca Statale, Codex Latinum 1942. Voir Hildegardis Bingensis, Liber
divinorum operum, A. Derolez et P. Dronke (éd.), Turnhout, Brepols, 1996, p. CIII-CVII.
2. Il existe une présentation générale du manuscrit par A. R. Calderoni Masetti, G. Dalli
Regoli, Sanctae Hildegardis Revelationes. Lucca, Biblioteca Statale, MS 1942, Lucca,
1973, ainsi qu’une étude ponctuelle de K. Suzuki, Bildgewordene Visionen oder
Visionserzählungen : Vergleichende Studie über die Visionsdarstellungen in der
Rupertsberger « Scivias »-Handschrift und im Luccheser « Liber divinorum operum »,
Bern, Peter Lang, 1998, et un article de référence de R. Otto, « Zu den gottischen
Miniaturen einer Hildegardhandschrift in Lucca », Mainzer Zeitschrift. Mittelrheinisches
Jahrbuch für Archäologie, Kunst und Geschichte, 71-72 (1976-1977), p. 110-126.
3. B. M. Kienzle, D. L. Stoudt, G. Ferzoco, A Companion to Hildegard of Bingen, Leiden,
Brill, 2014.
4. R. Pernoud, Hildegarde de Bingen, la conscience inspirée du XIIe siècle, Paris, Le Livre de
poche, 1996.
5. La Vie de sainte Hildegarde et les actes de l’enquête en vue de sa canonisation, C. Munier
(éd.), Paris, Cerf, coll. « Sagesses chrétiennes », 2000.
6. Cf. G. Iversen, « Réaliser une vision. La dernière vision du Scivias et le drame Ordo
virtutum de Hildegarde de Bingen », Revue de musicologie, 86 (2000), p. 37-63.
7. Édité en un volume : Hildegardis Bingensis, Thesaurus, t. 1, Visiones, Brepols, Turnhout,
1998.
8. B. Gorceix, « Introduction », in Hildegarde de Bingen, Le Livre des œuvres divines, Paris,
Albin Michel, 1982, p. XXVI.
9. Vie, L, II, § 16.
10. Hildegarde de Bingen, Scivias, P. Monat (éd.), Paris, Cerf, coll. « Sagesses chrétiennes »,
1996, p. 28-29.
11. Élisabeth de Schönau, Visions, Paris, Cerf, coll. « Sagesses chrétiennes », 2009.
12. Vie, p. 135.
13. Saint Augustin, De Genesi ad litteram, XII, BA 49, p. 351.
14. S. Gouguenheim, La Sibylle du Rhin. Hildegarde de Bingen, abbesse et prophétesse
rhénane, Paris, Publications de la Sorbonne, 1996, p. 149.
15. M. Zatonyi, Vidi et intellexi. Die Schrifthermeneutik in der Visionstrilogie Hildegards von
Bingen, Münster, Aschendorff, 2012, p. 13-14.
16. Ibid., p. 14.
17. Vie, op. cit., I, 4, p. 118.
18. Cf. J.-C. Schmitt, « Quand la lune nourrissait le temps avec du lait. Le temps du cosmos et
des images chez Hildegarde de Bingen (1098-1179) », Images Re-vues, I (2008), p. 4.
19. Cf. L. E. Saurma-Jeltsch, Die Miniaturen im « Liber Scivias » der Hildegard von Bingen,
Wiesbaden, Reichert, 1998 ; « Die Rupertsberger Scivias-Handschrift. Überlegungen zu
ihrer Entstehung », in E. Forster (éd.), Hildegard von Bingen. Prophetin durch die Zeiten.
Zum 900. Geburtstag, Freiburg im Breisgau-Wien, Herder, 1997, p. 340-358.
20. Hildegarde de Bingen, Scivias, op. cit., p. 26.
21. Ibid., p. 136.
22. Ibid., p. 32.
23. Ibid., p. 33.
24. Ibid., p. 127.
25. Ibid., p. 162-163.
26. Ibid., p. 174.
27. Ibid., p. 534.
28. Hildegarde de Bingen, Livre des mérites de la vie, Saint-Benoît-du-Sault, Éditions
bénédictines, 2012, p. 6.
29. Ibid., p. 7.
30. Ibid., p. 55.
31. Ibid., p. 97.
32. Ibid., p. 139.
33. Ibid., p. 211-212.
34. H. Ostländer, « Dante und Hildegard », Dante Jahrbuch, 27 (1948), p. 159-170.
35. Hildegarde de Bingen, Le Livre des œuvres divines, op. cit., p. 3.
36. B. Gorceix, ibid., p. XXVII.
37. Cf. R. Berndt (éd.), Im Angesicht Gottes Suche der Mensch sich selbst : Hildegard von
Bingen, Berlin, Akademie Verlag, Erudiri Sapientia, 2, 2001.
38. Ibid., p. 190.
39. On dispose de cinq manuscrits de l’ouvrage : Ghent, Bibliothèque universitaire, MS 241 ;
Wiesbaden, Hessische Landesbibliothek MS 2 ; Riesenkodex qui regroupe l’ensemble de
l’œuvre d’Hildegarde, Troyes, Bibliothèque municipale, MS 683 ; Lucca, Biblioteca
Statale, MS 1942 ; Francfort, Bibliothèque municipale et universitaire, fragm. lat. I 95 ; et
de deux manuscrits tardifs : Trèves, Bibliothèque municipale, MS 722/277 et Londres,
British Library, Add. MS 15418.
40. A. R. Calderoni Masetti, G. Dalli Regoli, Sanctae Hildegardis Revelationes, op. cit., p. 22,
n. 1.
41. Cf. M. Schrader, A. Führkötter, Die Echtheit des Schriftums der heiligen Hildegard von
Bingen. Quellenkritische Untersuchungen, Köln, 1956, p. 80.
42. K. Suzuki, Bildgewordene Visionen oder Visionserzählungen, op. cit., p. 280-283.
43. A. Derolez, P. Dronke, in Hildegardis Bingensis, Liber divinorum operum, op. cit., p. CVII.
44. Ibid., p. CV.
45. K. Suzuki, Bildgewordene Visionen oder Visionserzählungen, op. cit., p. 278-279.
46. Cf. C. Meier, « Zum Verhältnis von Text und Illustration im überlieferten Werk Hildegards
von Bingen », in Hildegard von Bingen 1179-1979. Festschrift zum 800. Todestag der
Heiligen, Mainz, 1998, p. 159-169.
47. C’est le rôle de medium de l’image qui intervient alors. Cf R. Wetzel, F. Flückiger (éd.),
Au-delà de l’illustration. Texte et image au Moyen Âge. Approches méthodologiques et
pratiques, Zürich, Chronos Verlag, 2009, p. 7-18.
Première partie
1. Hildegarde de Bingen, Scivias, op. cit., p. 162-163.
2. Ibid., p. 534-535, 545.
3. J.-C. Schmitt, « Quand la lune nourrissait le temps avec du lait. Le temps du cosmos et des
images chez Hildegarde de Bingen (1098-1179) », art. cit., p. 7.
4. Hildegarde de Bingen, Le Livre des œuvres divines, op. cit., p. 121-122.
5. Cf. C. Meier, « Die Bedeutung der Farben im Werk Hildegards von Bingen »
Frühmittelalterliche Studien, 6 (1972), p. 245-355. Voir aussi R. Maisonneuve, « Le
symbolisme sacré des couleurs chez deux mystiques médiévales : Hildegarde de Bingen et
Julienne de Norwich », in Les Couleurs au Moyen Âge, Aix-en-Provence, Presses
universitaires de Provence, 1988, p. 253-272.
6. C. Meier, « Die Bedeutung der Farben im Werk Hildegards von Bingen », art. cit., p. 270.
7. Ibid., p. 266.
8. Antérieure au XVIIIe siècle, voir F. Boespflug, Dieu dans l’art, Paris, Cerf, 1984.
9. Hildegarde de Bingen, Le Livre des œuvres divines, op. cit., p. 123.
10. R. Otto, « Zu den gottischen Miniaturen einer Hildegardhandschrift in Lucca », art. cit.,
p. 112.
11. Ibid., p. 125.
12. A. Vauchez, La Spiritualité du Moyen Âge occidental VIIIe-XIIIe siècles, Paris, PUF, 1975.
13. Hildegarde de Bingen, Le Livre des œuvres divines, op. cit., p. 128.
14. Saint Benoît, Règle, ch. VII.
15. Le Livre des œuvres divines, op. cit., p. 129.
16. Ibid.
17. Cf. R. Otto, « Zu den gottischen Miniaturen einer Hildegardhandschrift in Lucca », art. cit.,
p. 113.
18. Evangeliar Bernward, Hildesheimer Domschatz, Ms 18, fol. 174v.
19. Bamberger Evangeliar, Bamberger Domschatz, Ms 94, fol. 154v.
20. D. Sansy, « Iconographie de la prophétie. L’image d’Hildegarde de Bingen dans le Liber
divinorum operum », Mélanges de l’École française de Rome, 102 (1990), p. 407-408.
21. J.-C. Schmitt, « Quand la lune nourrissait le temps avec du lait. Le temps du cosmos et des
images chez Hildegarde de Bingen (1098-1179) », art. cit. p. 8.
22. In Principio. Interprétations des premiers versets de la Genèse, Paris, Études
augustiniennes, 1973.
23. K. Suzuki, Bildgewordene Visionen oder Visionserzählungen, op. cit., p. 61.
24. Hildegarde de Bingen, Le Livre des œuvres divines, op. cit., p. 135-136.
25. Y. Congar, « Le thème de Dieu Créateur et les explications de l’hexaemeron dans la
tradition chrétienne », in L’Homme devant Dieu. Mélanges H. de Lubac, t. I, Paris, Aubier,
1963, p. 189-222.
26. F. Zöllner, Vitruvus Proportionsfigur. Quellenkritische Studien zur Kunstliteratur im XV.
und XVI. Jahrhundert, Worms, 1987.
27. Hildegarde de Bingen, Le Livre des œuvres divines, op. cit., p. 139.
28. Ibid., p. 149.
29. Saint Augustin l’avait déjà précisée dans la Lettre XVIII.
30. Cf. F. Saxl, « Macrocosm and Microcosm in Mediaeval Pictures », in Lectures, t. I,
London, Warburg Institute, 1957, p. 63 sq.
31. B. Obrist, « Les vents dans l’astronomie de Nemrod », in Astronomie et sciences humaines,
Publications de l’Observatoire de Strasbourg, 6/2 (1994), p. 57-76.
32. B. Obrist, « Wind diagrams and medieval cosmology », Speculum, 72 (1997), p. 76.
33. H. Meyer, R. Suntrup, Lexikon der mittelalterlichen Zahlenbedeuting, Münster, 1987.
34. Hildegarde de Bingen, Le Livre des œuvres divines, op. cit., p. 149-150.
35. Cf. B. Obrist, La Cosmologie médiévale, Florence, Sismel, 2004. Voir aussi Die
Kosmographie des Aethicus, O. Prinz (éd.), MGH, München, 1993.
36. Cf. B. Maurmann, Die Himmelsrichtungen im Weltbild des Mittelalters, Münche, 1976.
37. J.-C. Schmitt, « Quand la lune nourrissait le temps avec du lait. Le temps du cosmos et des
images chez Hildegarde de Bingen (1098-1179) », art. cit., p. 3.
38. Hildegarde de Bingen, Le Livre des œuvres divines, op. cit., p. 48-50.
39. Ibid., p. 50.
40. Ibid., p. 255-256.
41. Cf. J. C. Webster, The Labors of the Months in Antique and Mediaeval Art, Princeton,
1938.
42. Ibid., p. 197-199.
43. Ibid., p. 203.
44. Hildegarde de Bingen, Le Livre des œuvres divines, op. cit., p. 208, 212, 213-214.
45. Ibid., p. 230.
46. Grégoire le Grand, Dialogues, ch. XXXV.
Deuxième partie
1. Hildegarde de Bingen, Le Livre des œuvres divines, op. cit., p. 263-264.
2. Ibid., p. 264-265.
3. Ibid., p. 265-266.
4. En particulier Jean Cassien, Conférences, I.
5. Hildegarde de Bingen, Le Livre des œuvres divines, op. cit., p. 266.
6. Ibid.
7. Ibid.
8. Ibid., p. 267.
9. Ibid., p. 269.
10. Ibid.
11. Ibid., p. 277.
12. Ibid., p. 277-278.
13. Ibid., p. 278.
14. Ibid.
15. Ibid., p. 279.
16. Ibid.
17. Ibid., p. 280.
18. Ibid., p. 282.
19. Ibid., p. 283.
20. Cf. M.-T. D’Alverny, « Les anges et les jours », Cahiers archéologiques, 9 (1957), p. 271-
300.
Troisième partie
1. Lexikon der christlichen Ikonographie, tome II, Freiburg, Herder, 1968, p. 394.
2. Hildegarde de Bingen, Le Livre des œuvres divines, op. cit., p. 287.
3. Ibid.
4. Ibid., p. 288.
5. Ibid., p. 288-289.
6. Ibid.
7. Ibid., p. 290.
8. Ibid.
9. Ibid.
10. Ibid., p. 290-291.
11. Ibid., p. 294.
12. Cf. B. Obrist, « Wind diagrams… », op. cit., p. 77.
13. Ibid., p. 295.
14. Ibid., p. 296.
15. Ibid., p. 297-298.
16. Ibid., p. 298.
17. Hermas, « Similitude IX », § 79 (2), in Le Pasteur, Paris, Cerf, coll. « Foi vivante », 1990,
p. 461.
18. Hildegarde de Bingen, Le Livre des œuvres divines, op. cit., p. 299.
19. Ibid., p. 301-302.
20. Ibid., p. 306-307.
21. A. Luneau, L’Histoire du salut chez les Pères de l’Église. La doctrine des âges du monde,
Paris, Beauchesne, 1964.
22. Hildegarde de Bingen, Le Livre des œuvres divines, op. cit., p. 308.
23. Ibid., p. 310.
24. Ibid., p. 310-311.
25. Lumen gentium, ch. V.
26. Hildegarde de Bingen, Le Livre des œuvres divines, op. cit., p. 311.
27. Ibid.
28. Ibid., p. 315.
29. Ibid., p. 316.
30. Ibid., p. 317.
31. Ibid., p. 318.
32. Ibid., p. 318-319.
33. Ibid., p. 319-320.
34. Ibid., p. 321.
35. Ibid., p. 312.
36. Ibid., p. 322.
37. Ibid., p. 324.
38. Hildegarde de Bingen, Scivias, op. cit., p. 65.
39. Hildegarde de Bingen, Le Livre des œuvres divines, op. cit., p. 320.
40. Ibid.
41. Ibid., p. 322.
42. Ibid.
43. Ibid., p. 325-326.
44. Ibid., p. 326.
45. Ibid., p. 326-327.
46. Cf. I. Riedel, « Hildegards Sophia-Vision. Zu einer Miniatur aus dem Lucca-Kodex », in E.
Forster (éd.), Hildegard von Bingen. Prophetin durch die Zeiten, op. cit., p. 406-407.
47. Lexikon der christlichen Ikonographie, op. cit., Bd. IV, p. 42.
48. Hildegarde de Bingen, Le Livre des œuvres divines, op. cit., p. 328.
49. Ibid. p. 328-329.
50. Ibid., p. 329.
51. Ibid., p. 330.
52. Ibid., p. 331.
53. R. Otto, « Zu den gottischen Miniaturen einer Hildegardhandschrift in Lucca », art. cit.,
p. 122.
54. Hildegarde de Bingen, Le Livre des œuvres divines, op. cit., p. 332.
55. Ibid., p. 335.
56. Ibid., p. 336.
57. Ibid., p. 337-338.
58. Ibid., p. 339-340.
59. Cf. A.-O. Poilpré, « Majestas Domini ». Une image de l’Église en Occident (Ve-IXe siècles),
Paris, Cerf, 2005.
60. P. Dronke, Women Writers in the Middle Ages, Cambridge, Cambridge University Press,
1984, p. 171.
61. Cf. C. Meier, « Die Bedeutung der Farben im Werk Hildegards von Bingen », art. cit.,
p. 245-355.
62. Ibid., p. 341-343.
63. Hildegarde de Bingen, Le Livre des œuvres divines, op. cit., p. 343-344.
64. I. Riedel, « Hildegards Sophia-Vision. Zu einer Miniatur aus dem Luca-Kodex » art. cit.,
p. 409.
65. Hildegarde de Bingen, Le Livre des œuvres divines, op. cit., p. 344.
66. Ibid.
67. Ibid.
68. Ibid., p. 344-345.
69. Ibid., p. 346.
70. Ibid., p. 355-356.
Conclusion
1. Cf. R. Otto, « Zu den gottischen Miniaturen einer Hildegardhandschrift in Lucca », art. cit.,
p. 124.
2. Ibid.
Bibliographie
SOURCES
Textes
Traductions
ÉTUDES
Étude de référence
Autres études
Espaces libres
10. Henry Thoreau, l’Éveillé du Nouveau Monde, de Gilles Farcet.
28. Marie-Madeleine, un amour infini, de Jacqueline Kelen.
43. L’Absurde et la Grâce, de Jean-Yves Leloup.
75. L’Au-delà au fond de nous-mêmes, d’Alphonse et Rachel Goettmann.
80. Henri Le Saux, le passeur entre deux rives, de Marie-Madeleine Davy.
81. La Petite Sainte Thérèse, de Maxence Van der Meersch.
95. Nicolas Berdiaev ou la révolution de l’esprit, de Marie-Madeleine Davy.
147. Traversée en solitaire, de Marie-Madeleine Davy.
155. L’Homme intérieur et ses métamorphoses, de Marie-Madeleine Davy.
182. Lettres sur la méditation, de Laurence Freeman.
217. Le Chant des profondeurs, sous la direction de Nathalie Nabert.
243. La Presqu’île interdite. Initiation au mont Athos, d’Alain Durel.