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Intoduction :
Cette scène prolonge la scène précédente. Après sa belle-sœur Catherine, c’est Suzanne qui se replonge
dans le passé. C’est l’extrait de l’une des plus longues prises de parole de la pièce : celle de Suzanne qui
s’adresse à son frère qu’elle ne connaît pas, puisqu’elle est partie alors qu’elle était encore « petite ». Elle
fait comme un bilan de sa relation avec lui : elle lui fait des reproches sur son départ et le peu de lien tissé
avec sa famille.
Plus encore que dans d’autres tirades, elle cherche ses mots, et reformule sans cesse ce qu’elle cherche à
exprimer.
Projet de lecture : Comment Suzanne parvient-elle à exprimer la complexité de son rapport à Louis ?
« de petits mots, juste Gradation descendante Effet déceptif du procédé qui exprime
des petits mots, une + l’amertume de Suzanne quant au peu de
ou deux phrases, Hyperbole (« rien ») communication et de lien entre elle et son frère.
Rien » Elle va même jusqu’à considérer qu’elle est
inexistante, sans valeur aucune avec l’hyperbole
« rien ».
« Elliptiques » * Répétition + mis en valeur Adjectif plutôt érudit, comme si Suzanne voulait
car à la ligne s’adapter à son frère (« comment est-ce qu’on
* Qui comporte des dit ? »).
ellipses, c’est-à-dire Souligne le vide laissé par Louis dans la maison
des omissions, des vide qui s’est traduit aussi par les blancs de ses
vides. lettres.
Bilan à Suzanne est à la fois solennelle et ironique, proche et lointaine vis-à-vis de Louis. Son discours
tâtonnant oscille entre marques de distance et volonté de nouer un dialogue. On sent que la
communication n’est pas aisée et qu’elle chercher avant tout à communiquer ses propres tourments
plutôt que de se lier à son frère.
« Je pensais/ (ce que Parenthèse Elle reformule pour elle-même sa pensée, qui se
j’ai pensé lorsque tu construit au fil de son discours- regrets de la
es parti) » jeune femme qui, enfant, entretenait toute sorte
d’illusions sur son frère. Là encore, le discours de
Suzanne est très ancré dans le passé, nostalgique.
Partie entre tirets Digression / parenthèse Remarque positive de Suzanne pour exprimer
l’admiration éprouvée par la famille à l’égard de
Louis
« nous éprouvons » Retour de la première Suzanne se fait émissaire de la famille, elle parle
personne du pluriel en son nom.
Intéressant de noter que le « nous » n’inclut pas
Louis.
« Une certaine forme Modalisation du propos Certitude de Suzanne > Expression de
d’admiration, c’est le l’admiration de tous. Elle ne semble pas hésiter
terme exact, une ici.
certaine forme
d’admiration »
« à cause de ça » Admiration due au fait que Louis soit écrivain,
dans une famille ouvrière : différenciation sociale.
Si tu en avais la Anaphore « si » Anaphore qui sert à reformuler la pensée de
nécessité Propositions Suzanne ; la question est moins la capacité à
Si tu en éprouvais la subordonnées écrire que son désir de le faire.
nécessité circonstancielle exprimant
Si tu en avais soudain la condition Louis pouvait employer son don d’écriture par
l’obligation ou le désir plaisir (« désir ») ou pour survivre (« obligation »).
C’est un don qui le rend totalement indépendant,
il n’a besoin de personne.
« te servir de ça pour L’écriture se voit chargée par Suzanne d’une
te sortir d’un mauvais puissance magique, consolatrice et salvatrice. A
pas ou avancer plus ses yeux, il s’agit d’une pratique bourgeoise
encore » fascinante, qui, lorsqu’elle est maîtrisée, permet
l’indépendance, la capacité à prendre soin de sa
vie.
ð dans cette partie Suzanne abandonne un temps les reproches pour montrer à Louis qu’il est
admiré et que sa famille s’intéresse à lui. Il s’agit pour Suzanne de ne pas noyer Louis sous les
reproches.
Conclusion :
Suzanne fait sentir dans sa tirade toute la complexité du lien affectif qui la lie à son frère. Elle s’exprime de
manière solennelle, en cherchant ses mots, afin de se faire comprendre de ce frère qu’elle connaît si peu et
dont elle se fait une image d’intellectuel. Elle parvient à exprimer à la fois l’admiration et la rancœur. Pour
cela elle insiste sur le traumatisme et la souffrance qu’ont provoqué le départ puis le silence de Louis. Celui-
ci, fidèle à lui-même et à ses « lettres elliptiques », n’intervient pas dans le discours de sa soeur, qui se
transforme donc en un soliloque.