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Les trois alliances globales entre compagnies aériennes

Confrontées à une rentabilité économique faible, des besoins d’investissement élevés, une fragmentation
excessive du marché et une mondialisation galopante, l’industrie du transport aérien devrait se concentrer.
C’est ce qu’elle a fini par faire, à son corps défendant, via les faillites en chaine qui ont émaillé son histoire
récente, notamment aux Etats-Unis. Mais la consolidation reste insuffisante pour rétablir la rentabilité
économique.
Comme les fusions internationales sont rendues impossibles par les règlements et les politiques nationales
qui limitent l’entrée des capitaux étrangers dans les compagnies aériennes, les entreprises ont formé de
larges coalitions internationales. L’industrie du transport aérien est ainsi devenue le théâtre d’un
affrontement entre alliances, plutôt que celui d’une concurrence directe entre entreprises autonomes.

Une concurrence mondiale structurée autour de trois alliances


Au niveau mondial, plus de soixante compagnies aériennes, et notamment les plus grandes, appartiennent
à l’une des trois coalitions qui structurent le secteur : Star Alliance, Oneworld et SkyTeam. Au total, ces trois
alliances concentrent plus de 70% du trafic aérien mondial.
La première coalition, Star Alliance, lancée en 1997, regroupe aujourd’hui 28 compagnies dont Lufthansa,
United Airlines, Air Canada, Singapore Airlines, Air India, Egyptair et SASA. Elle a été suivie en 1999 par
Oneworld, créée par British Airways et American Airlines, qui comprend maintenant 15 membres (dont
Cathay Pacific, Iberia, Japan Airlines, Qatar Airways, Quantas, Royal Air Maroc). En 2000, Air France-KLM et
Delta ripostaient avec Skyteam, qui a maintenant 19 adhérents (dont Aeroflot, Alitalia, China Eastern, China
Airlines, Korean Air, Saudia).
Ces trois alliances se livrent une concurrence sans merci. En 2018, Skyteam a ravi la première place à Star
Alliance avec 730 millions de passagers contre 728. Oneworld restait troisième avec 528 millions de
passagers.
Les grandes compagnies aériennes utilisent ces alliances pour s’internationaliser sans fusionner. Si les
fusions entre compagnies d’un même continent sont autorisées _comme c’est le cas d’Air France KLM_ les
mariages transcontinentaux se heurtent à l’opposition des Etats et à la rigidité du cadre réglementaire. Tant
que ces contraintes subsisteront, c’est-à-dire, tant qu’Air France, par exemple, ne pourra pas créer une filiale
en Asie ou racheter un transporteur asiatique, les compagnies aériennes devront recourir aux alliances pour
mondialiser leur réseau et leur offre de service.

Le fonctionnement des alliances globales


Face à la demande des entreprises et des hommes d’affaires pour un service aérien continu desservant
toutes les destinations du monde, les compagnies alliées créent une offre globale en combinant les réseaux
des différents partenaires via leurs hubs (aéroports principaux où les grandes compagnies concentrent leur
trafic et leurs connexions, comme Roissy pour Air France ou Heathrow pour British Airways).
En pratique, chaque membre de l’alliance peut utiliser les vols d’un autre pour élargir son offre. Pour ce faire,
il recourt au code share, c’est-à-dire à la possibilité que lui donne l’alliance de mettre un numéro de vol qui
lui est propre sur une liaison opérée par le partenaire. Ainsi, le même vol est offert sous plusieurs codes
correspondant à des compagnies différentes. Chacun peut donc vendre à ses clients des sièges sur des
destinations qu’il ne dessert pas, sans aucun investissement supplémentaire. En agrémentant l’offre de
quelques éléments marketing (mise en équivalence des programmes de fidélité, accès réciproque aux salons
dans les aéroports, etc.), chaque coalition fidélise sa clientèle affaires et évite qu’elle ne s’échappe vers la
concurrence. L’effet global est donc de limiter la concurrence dans l’industrie : chaque passager peut faire
tous ses déplacements n’importe où dans le monde en restant client d’une seule et même coalition.

Des alliances dans l’alliance


Au sein de chaque coalition, certaines compagnies poussent plus loin la coopération. Elles se mettent
d’accord sur un plan de vol commun sur certaines destinations et en partagent intégralement les revenus et
coûts, donc les profits, tout en procédant à une harmonisation des forces commerciales et des prix. Ces
alliances sont qualifiées de joint-ventures par les compagnies aériennes, car tout se passe comme si les
activités concernées étaient gérées par une co-entreprise. En réalité cependant, ces alliances ne
s’accompagnent pas de la création de filiales communes. Air France-KLM a créé un tel joint-venture en 2008
avec Delta Airlines sur les lignes transatlantiques. Ce joint-venture a été élargi en 2010 à Alitalia (dont Air
France détenait 25%) puis à Virgin Atlantic (dont Delta détient 49% et Air France-KLM 31%) en 2018.
Les pseudo-joint-venture se sont multipliés dans les trois coalitions. Ainsi, dès 2008, Lufthansa, United et
d’autres membres de Star Alliance ont emboité le pas à l’alliance Air France-Delta en adoptant le même type
d’arrangement sur l’atlantique Nord, puis l’ont reproduit sur l’axe transpacifique avec Nippon Airways.

Questions
1. Pourquoi les alliances entre compagnies aériennes sont-elles multilatérales ?
2. Quels sont leurs effets sur la concurrence et leurs conséquences pour les clients ?
3. Pensez-vous qu’elles conduiront à des fusions en bonne et due forme ?
4. À quels types appartiennent les alliances décrites dans cette étude de cas ? En quoi cela permet-il de
prédire leur évolution ?

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