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Explication linéaire 8

Préparation
Montesquieu, Lettres persanes, lettre 161, 1721

Etape 1 > Découvrir le texte


Quels sentiments Roxane cherche-t-elle à susciter chez Usbek en lui écrivant cette lettre
?

Trouvez des adjectifs et expressions permettant de qualifier le geste de Roxane.

Etape 2 > Dégager la structure du texte


Donnez un titre à chaque mouvement du texte

1. Mouvement 1 > l.1-8 > Annonce de la mort de Roxane comme une victoire et une
libération
sous-mouvement > l.3-4 > Aveu
sous-mouvement > l.5-8 > Motif de son geste

2. Mouvement 2 > Mouvement 2 > l.9-21 > U est présenté comme un despote
sous-mouvement > l.9-13 > Roxane tourne U en ridicule
sous-mouvement > l.14-21 > Roxane montre son vrai visage

3. Mouvement 3 > > l.22-26 > Peinture d’une mort idéalisée


Etape 3 > Analyser l’écriture pour comprendre les enjeux littéraires
1er mouvement : Pour justifier le titre proposé pour le premier mouvement,
analysez les procédés littéraires :

Relevez les citations Analysez les procédés Interprétez les effets

Codes de la lettre Indication de la spécificité du txt


ROXANE À USBEK. destinateur /destinataire Montesquieu utilise détour de la
fiction et stratagème du roman
À Paris. Lieu où elle est épistolaire pour contourner
envoyée censure

Oui, je t’ai trompé Adverbe d’affirmation Provocation, Roxane dévoile ce


j’ai séduit qui sous-entend une Q qu’elle pense depuis le début sans
je me suis jouée auparavant retenue
j’ai su [...] faire Elle semble répondre à
l’interrogation d’Usbek, sans
détour

rythme ternaire

gradation >
propositions de + en +
longues

vbs d’action

je x4 ds 1ere phrase / Répétition P1 Jubilation de Roxane au moment


t’, tes eunuques, ta jalousie, Pronoms et où elle met en scène le
ton sérail / déterminants possessifs renversement de situation dont
P2 elle est l’autrice
Elle mise sur le dépit d’U en
apprenant la nouvelle

Affreux sérail /
lieu de délices et de plaisirs antithèse Passage au pl est révélateur >
passage du singulier au pour torturer Usbek
pluriel

je me suis jouée de ta allitération en [ʒ]= j Roxane manoeuvre, elle n’a pas


jalousie ; et j’ai su honte d’avoir pris le pouvoir
Ce son [ʒ] se rapproche de “je”
et de “jeu” > elle joue avec
Usbek
Je vais mourir trois évocations de la R met en sc sa mort
le poison va couler dans mes mort > hypotypose > et accuse U
veines description animée
Je meurs
gradation qui concourt
à l’hypotypose

3 vbs au pst > valeur de


futur proche x2
puis pst d’énonciation

car … puisque conj de coor + conj de Roxane se livre ici à un ex


sub d’argumentation > elle montre,
> connecteurs logiques par son raisonnement, qu’U est
responsable de son suicide

mais mon ombre s’envole personnification On comprend que R a déjà vengé


bien accompagnée la mort de son amant.

gardiens sacrilèges, sacrilège > Profanation de ce qui


oxymore est sacré (TLFi)
répandu le plus beau sang du expliquer contraste, paradoxe
monde. entre “gardiens” et "sacrilèges"

atténuation Mort de son amant trop affreuse


pour la dire
hyperbole “le plus beau Affront pour U > elle place son
sang” + superlatif amant bien au-dessus de lui

cf tableau qui suit montre séparation, combat entre


alternance pronoms les deux
P1/P2
+ une seule fois opposition
“nous” l. 20
Faites le bilan du premier mouvement :

Pour piquer la vanité d’Usbek, le récit de Roxane dramatise sa mort et donne comme dernière
image d'elle celle d'une femme libre, insoumise est puissante. Elle tire fierté de ses trahisons
qui lui ont permis de reconquérir la liberté dont la servitude du harem l'avait privée.
2eme mouvement : Pour justifier le titre proposé pour le deuxième mouvement,
analysez les procédés littéraires :

Relevez les citations Analysez les procédés Interprétez les effets

tu / je dans les quatre pronoms personnels Par la mise en scène d'un


paragraphes sujet P2 puis P1 dialogue conflictuel, Roxane
Comment … ? / Non Question rhétorique montre que le pouvoir d’Usbek
était illusoire

R dénonce l’arrogance d’U


Comment as-tu pensé / tes tournures péjoratives Elle révèle l’application qu’elle a
caprices / tu te permets tout / mise à entretenir ses illusions tout
tes lois en préservant sa liberté d’action.

ne … que négation restrictive

crédule / paraître lexique des apparences

tu te permets tout / affliger indéfini / totalité Roxane dénonce la contradiction


tous mes désirs entre le libertinage d’Usbek et sa
prétention à disposer de son
corps.

vivre dans la servitude // être antithèse Roxane réécrit le récit de son


libre mariage avec Usbek pour montrer
qu’elle n’était pas naïve comme il
être libre / tes lois le pensait.

l’indépendance ch lex liberté

les transports de l’amour / la antithèse


violence de la haine
Nous étions tous deux Ironie Phrase qui retire à Usbek ses
heureux illusions sur sa favorite : elle ne
l’aimait pas et n’était pas soumise
Tu me croyais trompée / je te Polyptote m. ou f. >
trompais employer un même mot
sous des formes
grammaticales
différentes

voix passive puis active

rythme binaire condition et conséquence > U est


encore désigné coupable
si tu m'avais bien connue, tu si + conditionnel à
y aurais trouvé toute la valeur de futur ds le Roxane relit le passé selon son
violence de la haine. passé point de vue à elle

redondance “violence pas de mots assez forts pour


de la haine” exprimer ce que lui inspire U

Faites le bilan du deuxième mouvement :


Avant de mourir, Roxane veut enlever à Usbek toutes ses illusions : elle n’était pas dominée
et elle insiste sur le fait qu’elle n’a jamais renoncé à sa liberté de penser.

3eme mouvement : Pour justifier le titre proposé pour le troisième mouvement,


analysez les procédés littéraires :

Relevez les citations Analysez les procédés Interprétez les effets

sans doute modalisateur Roxanne se moque d'Usbek


ironie
Serait-il possible qu’après conditionnel Roxane s’interroge sur les effets
t’avoir accablé de douleurs, de son discours sur Usbek
je te forçasse… subjonctif imparfait On voit l’étendue possible de sa
victoire sur lui
prétérition > figure de
style qui consiste à dire
qu’on va passer sous
silence qqch dont on
parle en fait

Dernière phrase Gradation + Elle s’abandonne à la mort, la


hypotypose représente avec douceur, comme
une libération.

rythme saccadé

mais conjonction de opposition puis rythme haché, le


coordination poison a fait son travail

je me meurs registre tragique Roxane n'a plus de souffle et de


pst force pour tenir la plume, c'est la
fin de la lettre

Faites le bilan du troisième mouvement :

Roxane triomphe une dernière fois de la vanité d’Usbek, réduit au silence par le jeu de
la correspondance et s'abandonne, sous les yeux de son lecteur, à une mort douce et
choisie.

Etape 4 > Préciser le projet de lecture

En quoi cette lettre est-elle un geste de défi vers la liberté et une sortie puissante ?
Etape 5 >Préparez votre introduction en vous aidant de la méthode

Etape 6 > Préparez votre conclusion en suivant les étapes de la méthode


Ouverture possible :

Entrée dans le monde dans le temps où, fille encore, j'étais vouée par état au silence et à
l'inaction, j'ai su en profiter pour observer et réfléchir. Tandis qu'on me croyait étourdie ou
distraite, écoutant peu à la vérité les discours qu'on s'empressait à me tenir, je recueillais avec
soin ceux qu'on cherchait à me cacher.
Cette utile curiosité, en servant à m'instruire, m'apprit encore à dissimuler : forcée souvent de
cacher les objets de mon attention aux yeux de ceux qui m'entouraient, j'essayai de guider les
miens à mon gré ; j'obtins dès lors de prendre à volonté ce regard distrait que vous avez loué
si souvent. Encouragée par ce premier succès, je tâchai de régler de même les divers
mouvements de ma figure. Ressentais−je quelque chagrin, je m'étudiais à prendre l'air de la
sérénité, même celui de la joie ; j'ai porté le zèle jusqu'à me causer des douleurs volontaires,
pour chercher pendant ce temps l'expression du plaisir. Je me suis travaillée avec le même
soin et plus de peine, pour réprimer les symptômes d'une joie inattendue. C'est ainsi que j'ai
su prendre sur ma physionomie cette puissance dont je vous ai vu quelquefois si étonné.
J'étais bien jeune encore, et presque sans intérêt : mais je n'avais à moi que ma pensée, et je
m'indignais qu'on pût me la ravir ou me la surprendre contre ma volonté. Munie de ces
premières armes, j'en essayai l'usage : non contente de ne plus me laisser pénétrer, je
m'amusais à me montrer sous des formes différentes ; sûre de mes gestes, j'observais mes
discours ; je réglai les uns et les autres, suivant les circonstances, ou même seulement suivant
mes fantaisies : dès ce moment, ma façon de penser fut pour moi seule, et je ne montrai plus
que celle qu'il m'était utile de laisser voir. Ce travail sur moi−même avait fixé mon attention
sur l'expression des figures et le caractère des physionomies ; et j'y gagnai ce coup d'oeil
pénétrant, auquel l'expérience m'a pourtant appris à ne pas me fier entièrement ; mais qui, en
tout, m'a rarement trompée. Je n'avais pas quinze ans, je possédais déjà les talents auxquels la
plus grande partie de nos Politiques doivent leur réputation, et je ne me trouvais encore
qu'aux premiers éléments de la science que je voulais acquérir. Vous jugez bien que, comme
toutes les jeunes filles, je cherchais à deviner l'amour et ses plaisirs : mais n'ayant jamais été
au Couvent, n'ayant point de bonne amie, et surveillée par une mère vigilante, je n'avais que
des idées vagues et que je ne pouvais fixer ; la nature même, dont assurément je n'ai eu qu'à
me louer depuis, ne me donnait encore aucun indice. On eût dit qu'elle travaillait en silence à
perfectionner son ouvrage. Ma tête seule fermentait ; je ne désirais pas de jouir, je voulais
savoir ; le désir de m'instruire m'en suggéra les moyens. Je sentis que le seul homme avec qui
je pouvais parler sur cet objet, sans me compromettre, était mon Confesseur. Aussitôt je pris
mon parti ; je surmontai ma petite honte ; et me vantant d'une faute que je n'avais pas
commise, je m'accusai d'avoir fait tout ce que font les femmes. Ce fut mon expression ; mais
en parlant ainsi je ne savais en vérité quelle idée j'exprimais. Mon espoir ne fut ni tout à fait
trompé, ni entièrement rempli, la crainte de me trahir m'empêchait de m'éclairer : mais le bon
Père me fit le mal si grand que j'en conclus que le plaisir devait être extrême ; et au désir de le
connaître succéda celui de le goûter.”
Choderlos de Laclos, Les Liaisons dangereuses, 1782, lettre LXXXI

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