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Séquence poésie

LOUISE LABE, Sonnets (1555)


Sonnet 19 « Diane étant en l’épaisseur d’un bois… »

Table des matières


Introduction............................................................................................................................................. 1
Paraphrase........................................................................................................................................... 1
Quelques remarques & « bizarreries » ................................................................................................... 2
5 hypothèses ........................................................................................................................................... 2
1. Diane fonde son dialogue avec la poétesse sur une erreur (v.6) ................................................ 2
2. Louise Labé : une identité changeante........................................................................................ 2
3. Comment croire quelqu’un qui hallucine ? ................................................................................. 3
4. L’arc & les flèches mentionnés à répétition ................................................................................ 3
5. Tout ça pour ça ? Pourquoi un récit complexe pour une histoire simple ? ................................ 4
CONCLUSION GENERALE ......................................................................................................................... 5
BILAN ................................................................................................................................................... 5
OUVERTURE ......................................................................................................................................... 5

Introduction
Paraphrase
Louise Labé poétesse raconte une anecdote
Où elle se voit rétrospectivement dans la forêt
Tombant sur la déesse Diane (chasse, nuit) (elle-même porte un arc pour chasser)
Diane se trompe et la prend pour une de ses nymphes qui aurait été dépossédée de son
propre attirail (arc, flèches) = méprise, quiproquo
Louise Labé lui raconte qu’elle était tombée sur un jeune homme qu’elle avait cru
conquérir et finalement c’est lui qui l’a désarmée et l’a conquise = retournement de situation
Quelques remarques & « bizarreries »
1. Glissement d’identité méprise Louise Labé prise pour une nymphe de Diane = histoire
fondée sur une erreur
2. Plusieurs glissements d’identité de la locutrice-protagoniste : Louise Labé rêveuse,
promeneuse, prise pour une nymphe, conquérante, la conquise
3. Comment croire le récit de celle qui admet rêver (« maintes fois ») : paradoxe de
Zénon !
4. Dernier problème : plusieurs sens au mot « flèches »
5. La morale finale (« je me suis fait avoir en amour ») a été recouverte par un dispositif
complexe : 3 récits enchevêtrés
Louise Labé => lecteurs
Dialogue Louise Labé-Diane
Louise Labé confrontée au jeune homme = récit à tiroirs (procédé très employé
au 18e s)
Pourquoi ce récit tortueux au lecteur pour une intrigue somme toute assez simple : tel est pris
qui croyait prendre ?

5 hypothèses

1. Diane fonde son dialogue avec la poétesse sur une erreur (v.6)
Confusion Louise Labé / nymphe
Louise étonnée
➢ Lien avec les flèches de la chasse puis de l’amour
➢ Erreur de Diane écho /annonce l’erreur finale de Louise Labé
➢ Echo aussi à l’erreur d’appréciation qui s’est mépris sur la portée philosophique de ce
texte (réflexion sur la vérité des sentiments et des destins)
➢ La fin du texte prouve que Louise Labé n’était pas la nymphe ; Louise deux fois
victime (et de la méprise de Diane et de l’opportunisme de l’homme qui profite du
manque de dextérité de Louise) => double pitié pour Louise => rapprochement
lecteur/Louise Labé
8/10

2. Louise Labé : une identité changeante


Successivement, Louise Labé est
- Poétesse
- Promeneuse (verbe de mouvement « J’allais »)
- Rêveuse habituelle, confirmée
- Nymphe
- Conquérante
- Objet de la conquête (après renversement de la situation) => victime
6 identités successives
➢ Instabilité identitaire qui va de pair avec la déstabilisation du personnage ou l’état
onirique de la locutrice (manque de repères spatio-temporels) = désorientation à tous
les niveaux, rarement sujet des verbes
➢ Louise Labé prise pour une nymphe (à tort) ne fait non plus pour démentir : elle abuse
en quelque sorte Diane en la laissant croire,
➢ et pour se faire croire qu’elle est importante = sujet de sa propre histoire
➢ Louise Labé se donne le beau rôle, endossant plusieurs rôles à la fois => penser les
histoires ou les rôles qu’on aurait pu vivre = penser son destin ou ses destins possibles
(si on avait su utiliser l’arc…)
➢ Tout le poème ne serait-il qu’un fantasme ? Une histoire héroïque (à partir de
« rêvant », vers 4 ?) => ce qui reste de vrai, présent, concret = « cent et cent brèches »
(13 vers ½ fictifs ?!)
10/10

3. Comment croire quelqu’un qui hallucine ?


(v.4) « j’allais en rêvant, comme fais maintes fois »
➢ Elle rêve : tournures passives « nymphe étonna », objet (« qui m’appela », « en me
voyant »)
Contexte mythologique (« Diane », « nymphe » x2) => fiction jolie => effet d’entraînant
Mais on la croit
➢ « J’ouïs », « qui m’appela » indices physiques
➢ « une voix » => suspens grâce à l’indéfini
➢ Interpellation insistante : suite de pronoms interrogatifs
➢ Anaphores pour retenir l’interlocuteur, des phrases de + en + longues, techniques de
séduction
➢ C’est le rêve qui est attrayant
10/10

4. L’arc & les flèches mentionnés à répétition


➢ Plusieurs mentions ou références de ces flèches & de ce carquois : « sans arc et sans
carquois » (de manière privative) = présence par l’absence (suggestion) pour
commencer ; « ton arc et flèches », « toutes mes flèches », « l’arc » jusqu’au résultat
physique et hyperbolique « cent et cent brèches » = intensification progressive de la
présence des flèches
➢ Dernier tercet : les flèches apparaissent aux trois vers du tercet (successivement
« toutes mes flèches » au vers 12, « et l’arc » vers 13 et « cent et cent brèches » v.14.
➢ Sens possibles de « flèche » : 1/ armes de chasse (avec « Diane ») 2/ flèches de l’amour
(« toutes mes flèches », celle de Cupidon) et 3/ flèches de la critique (« cent et cent
brèches » peuvent être comprises plus largement comme les critiques qui renvoient
aux erreurs de jugement de la locutrice) => le poème parle moins d’amour que des
changements de natures et d’enjeux = processus de métamorphose.
➢ Les flèches ont également pour vocation de confirmer le quiproquo entre Diane et
Louise Labé tout au long du poème => tout le poème sera passé de l’errance à l’erreur
➢ Allitération en [s] pour traduire le sifflement des flèches qui fendent l’air en défilant,
mais surtout dès le vers 8, allitération en [k] « sans arc et sans carquois » = dureté de
l’amour déjà dans les sonorités comme si le milieu du poème avertissait déjà des
écorchures potentielles de l’amour dont la poétesse ne prend conscience qu’à la fin
➢ Tonalité donneuse de leçon (didactique) du poème ? La poétesse n’a pas su détecter à
temps les signaux
07.5/10

5. Tout ça pour ça ? Pourquoi un récit complexe pour une histoire simple ?


➢ Histoire simple, récit plaisant (mythologie) à vocation pédagogique (cf. La Fontaine,
le monde à amuser « comme un enfant », dans la fable « Le pouvoir des fables »)
➢ Un récit brut sur la dangerosité de l’amour prendrait le risque de dissuader le lecteur
et de le dégoûter => tomber amoureux oui, mais de façon avertie, en connaissance
de cause (la souffrance que l’amour génère faisant partie du jeu)
➢ Premier mot du poème « Diane » => fin du poème morale avec une chute plus
brutale = processus initiatique du lecteur
➢ Lexique de la violence (« proie ») : l’amour n’est-il qu’un prétexte dans ce sonnet ?
➢ Récit tortueux pour montrer la complexité de l’amour, tout nuit à la compréhension
du lecteur
➢ Nombreuses ambiguïtés interprétatives (par ex. les flèches), on arrive à parler d’amour
sans jamais le nommer, ni désigner ni Vénus ni Cupidon ;
➢ Mouvements contradictoires : plus la poétesse est désarmée (sans flèches), mieux le
lecteur est armé face à l’amour et ses périls
➢ Récit à tiroirs, récit où on se perd : 1er quatrain Louise Labé narratrice d’un conte => 2e
quatrain aux allures de fable (personnification, mythologie, dialogue) => tercets
saynète théâtrale = métamorphose du texte = poème tortueux = labyrinthe où se perd
la poétesse et le lecteur chemine avec elle
➢ Récit avec des épreuves à surmonter. Louise Labé 3x perdante : perd son identité, perd
ses armes, perd sa supériorité en amour (elle qui croyait mener la danse) => mais c’est
pour informer et former le lecteur = Louise Labé en position de martyre comme St
Sébastien (couvert de flèches) = image de Louise Labé redorée, gagnante au plan
littéraire.
10/10

CONCLUSION GENERALE

BILAN
Le sonnet 19 semble un récit anecdotique et divertissant (la promenade dans une forêt avec
des éléments mythologiques) ; Peu à peu ce récit nous entraîne dans une configuration
complexe, avec des méprises, des erreurs de jugement et amène à une réflexion
philosophique sur la nature variable et déstabilisante de l’amour, pour se rendre compte que
notre poétesse moins victime qu’héroïque. Le sonnet aura été inattendu, utile et préventif.

OUVERTURE
[Proposition de Loan G.]

Diane et Cupidon, Pompeo BATTONI, 18e s. (MET)

Diane déesse de la chasse (voir à ses côtés le chien de chasse) et le jeune Cupidon qui semblent se
disputer l’arc : Cupidon semble, agenouillé, en position de réclamer et attendre tandis que Diane de
face, prenant plus la lumière et plus de place dans le tableau, semble avoir le beau rôle. Pourtant, est-
ce bien une relation hiérarchie entre les deux ? ne peut-on pas imaginer que les deux se complètent ?
Elle a la maitrise des armes, lui a les ailes et la capacité à tout moment de l’envol (la liberté) : elle peut
attaquer ou se défendre, et lui fuir. Elle a la pureté et la chasteté, lui le sens du jeu et la jeunesse. Elle
inspire le respect, lui la confiance.

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