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Pour les étudiants de deuxième Graduat Droit

Baudouin WIKHA TSHIBINDA

professeur associe
ANNEE ACADEMIQUE 2013-2014

INTRODUCTION GENERALE

• INTITULE DU COURS

Le programme de cours issus de la dernière réforme de la table


ronde des universités du Congo de 2004 a maintenu le cours de droit, les
structures et les institutions traditionnelles africaines, parfois on parle des
structures et les institutions politiques de l’Afrique traditionnelle. Ce cours est
d’une importance non négligeable dans la formation des juristes.

En effet, les structures et institutions politiques actuelles sont le


reflet des institutions passées. Ces dernières nous permettent de comprendre la
genèse, l’organisation et le fonctionnement des institutions actuelles.
L’institution politique contemporaine la plus achevée demeure un idéal, l’Etat
nous l’espérions, qui consiste dans l’intégration ou le processeur de la
constitution des Unions politiques demeure l’institution nouvelle qui prendra le
dessus sur l’unanimité quasi – totale recueilli par l’institution étatique durant des
siècles.

La République Démocratique du Congo est un Etat, une institution


d’abord héritée de l’Etat indépendant du Congo en 1885, lors du partage de
l’Afrique (Conférence de Berlin). Il est devenu, par la suite le Congo – Belge
(1908). Enfin, l’Etat congolais sera adopté après l’indépendance à partir du 30
juin 1960 à nos jours.

Les deux premières phases, l’Etat fut imposé par les relations
internationales fondées sur la domination européenne.

La dernière phase a comme quant à elle, le mimétisme


institutionnel que des tentatives infructueuses des créations des modèles « siu
generis » d’organisation politique en vue de justifier la personnalité du pouvoir au
tour d’un guide.

Gérard Conac note « la rapidité et l’ampleur du phénomène sont un


premier sujet d’étonnement, mais il est encore accru par le fait que tous les Etats
se sont dotés des constitutions au moment de leur accession à l’indépendance.
La multiplication des textes constitutionnels, qui résultent du besoin
qu’éprouvent les Etats de se donner des textes organisant les conditions
d’exercices du pouvoir politique ().

Devenus Etats indépendants et souverains, les anciens territoires


se dotèrent d’institutions politiques semblables si pas conformes à celles des
pays développés autrefois. Les études portant exclusivement sur les
constitutions et institutions politiques des Etats montrent l’existence de facteurs
propres aux sociétés africaines. (Structure sociale, culture politique,
environnement économique, etc.)
Le regard diachronique sur l’histoire politique de tous ces pays
découvre curieusement un schéma commun d’un double processus, celui de la
libération et celui de la gestion de l’indépendance.

La première étape du schéma concerne la lutte pour


l’indépendance : elle se révèle d’abord lointaine, sous forme d’agitations
spontanées ou mouvements de révolte non organisés pour résister à la
colonisation. Ensuite, vers les années cinquante surtout, elle s’organise de
manière concertée, soit collectivement, soit autour d’une ou diverses
personnalités (nationaliste modéré ou radical) pour réclamer l’indépendance du
pays : syndicats, des associations tribales, des partis politiques voire la guérilla
rurale ou urbaine tout cela est mis à profit pour atteindre l’objectif.

Deuxième étape est l’acquisition de l’indépendance. Proclamée par


l’ancien maître ou par le combattant, peu importe, elle est là, elle existe. Un
événement très important, psychologiquement et socialement intense. Mais, tout
de suite un trouble intérieure se ressent parce qu’il faut donner une forme à
cette indépendance. C’est la problématique de la gestion de l’indépendance, un
nouveau processus de transformation, la transformation du rêve en réalité : vivre
la liberté effective, sur tous les plans, pour l’épanouissement à la fois individuel
et collectif

Troisième étape, au lieu de conduire ce nouveau processus à la


quête de la libération, elle se transforme paradoxalement en un retour à la case
de départ. La décolonisation en Afrique a dramatiquement souffert des coups
d’État militaires, des conflits tribaux, des injustices sociales, des créations des
parties uniques ou partis-Etats, des assassinats et des injonctions de l’Occident.

En effet, l’influence de nos sociétés traditionnelles est non


négligeable. La majorité de la population africaine en général et congolaise en
particulier habite les milieux coutumiers, ruraux ou traditionnels. Ils vivent sous
l’emprise des coutumes ou traditions congolaises, de droit, structures et
institutions traditionnelles. Elles sont constituées d’un élément matériel à savoir
la répétition d’un comportement mais aussi d’un élément psychologique, la
croyance en son caractère obligatoire ou « l’opigno juris ». La coutume devient
juridique à partir de son caractère normatif. Cette situation ambigüe découle du
fait que, dans les zones rurales, et à un moindre degré dans les centres urbains,
les populations persistent, encore aujourd’hui, à recourir à leur système
ancestral d’organisation sociale.

Pour Sohier, la coutume est un usage ancien et généralement


pratiqué qu’il en est devenu obligatoire. Malgré le modernisme, l’impact de la
coutume () ou du traditionnel n’est pas visible seulement dans les villages,
campagnes ou les milieux ruraux. Les habitants des villes et centre urbains,
milieux considérés comme fief de la modernité, du développement et de la
technologie n’échappent pas à l’emprise de la tradition ou de la coutume.

On le remarque généralement lors des cérémonies de fiançailles, de


mariage, de deuil, de divorce, etc. Les habitants des villes recourent à leurs
coutumes respectives. Parfois lorsque les autorités politiques administratives
sont en « visiting » dans les chefferies et groupement traditionnelles ceux – ci se
laissent conduire par le modèle coutumier ou traditionnel. L’on remarque aussi la
population qu’elle soit de la ville ou de milieu rural se confiait aux fétiches, aux
médicaments traditionnels, aux esprits ou aux mânes des ancêtres, à la
sorcellerie, à la magie, à la superstition, à la divination,…

Exemple : dans la plupart d’équipes de football ; il existe un comité


de recherche ; dans la vie pour réussir certains vont voir les devins. Les militaires
avant d’aller au front passent par les fétiches, le mouvement maï – maï pour être
invulnérable passe par le « bizaba ».

La ville et le village vivent leurs traditions et leurs coutumes, la


modernité et la tradition cohabitent. Le cours de droit, structures et institutions
traditionnelles étudie la tradition et la modernité, car de nos jours les deux
systèmes connaissent une influence mutuelle. Les sociétés congolaises
connaissent un changement coutumier. Les sociétés traditionnelles et modernes
cohabitent, vivent en synergie et sont complémentaires.

Nkumisongo Vavi parle des certains aspects importants des


sociétés négro – africaine et congolaise, les traditions et les coutumes sont les
aspects de l’autorité ou du pouvoir politique et administratif, des aspects
juridiques, la culture et le social, etc. Ce sont autant des droits, des structures et
d’institutions négro – africains traditionnels et modernes à la fois. Plus
particulièrement de l’aspect de l’autorité et du pouvoir au niveau traditionnel et
moderne, le pouvoir politique est sacré et prépondérant chez les africains et les
congolais, et à un impact capital sur la vie des africains et congolais tant des
milieux ruraux que urbains ().

L’article 207 de la constitution du 18 février 2006 dispose


« l’autorité coutumière est reconnue ». Les autorités coutumières sont dans les
chefferies, les secteurs, les groupements et les terres, ils fonctionnent sous
l’emprise du droit coutumier avec des structures et institutions politiques
traditionnelles. Cependant devenue agents de l’Administration publique leur
mode de gestion connait une transformation considérable. Ceux – ci prêtent
serment de loyauté et de fidélité à la constitution au respect de lois de la
République. Les structures et institutions politiques traditionnelles doivent
fonctionner au strict respect de la constitution.
A ce sujet Nkumisongo Vavi évoque la discussion qui oppose les
tenants de l’opportunité ou de la pertinence ou non des chefs coutumiers dans
l’administration territoriale moderne de l’Afrique et de la RDC.

Pour Isango Idi Wanzila, la présence des chefs coutumiers dans l’administration
territoriale de la RDC n’est plus indispensable si l’on réfère au mobile qui avait
poussé le colonisateur à se servir d’eux. Militer en leur faveur ou à leur maintien,
c’est favoriser le maintien de la dualité administrative traditionnelle coutumière
et moderne.

Mwamba Sinonda par contre pense que les chefs coutumiers demeurent des
personnages incontournables pour les africains. Ils sont des agents de
développement et non de sous-développement ().

La tendance de Mwanda Sinonda répond la mieux aux réalités de


notre pays. Ils constituent des agents sur lesquels notre administration doit
s’appuyer pour le développement et le changement. Car eux – mêmes se situent
entre la tradition et la modernité. C’est ici qu’il faut préciser que le « concept
recours à l’authenticité » devrait être exploité à bon escient pour le changement,
la modernisation de nos sociétés traditionnelles pour les rendre aptes à la
mondialisation.

Le cours de droit, structures et institutions politiques traditionnelles


africaines doivent être pensé sous une approche plus réaliste de changement
social qui marque les mutations de nos sociétés traditionnelles. La dualité
institutionnelle d’une part les institutions modernes et les institutions
coutumières d’autre part, amène les citoyens à obéir l’Etat et les autorités
coutumières. Un système parfois parallèle issu de son histoire. Cette dualité
constitue la problématique majeure de ce cours.
• OBJECTIF DU COURS

Dans le cadre de cet enseignement, il est question d’étudier le droit,


les structures fondamentales et les institutions socio – politiques du passé de la
RDC. Cette étude circonscrite au continent africain en général et à la République
Démocratique du Congo en particulier révèle un intérêt capital qui est à la fois
théorique et pratique.

Du point de vue théorique, des nombreuses recherches se sont


tournées autour de la création de l’Etat de droit et la conceptualisation des
projets de société démocratique adaptée aux réalités africaines. Les
controverses doctrinales se résument soit par la reconnaissance d’un modèle
universel, bien entendu inspiré des institutions occidentales, soit par la rupture
avec ledit modèle en vue de recourir à nos propres structures et institutions pour
accoucher un modèle « Sui generis »(), les deux thèses n’ont pas suffi pour
expliquer l’inadaptation des Etats africains postcolonial d’une manière générale
et celle de la République Démocratique du Congo de manière particulière.

Du point de vue pratique, il s’agit d’une part de connaître les


institutions du passé africain pour mieux cerner l’influence qu’elles peuvent
exercer sur les institutions actuelles et d’autres part avec cette connaissance,
pouvoir distinguer les tentatives de récupération politique dues aux manœuvres
déviationnistes par rapport à la nature réelle de structure et institution
africaines.()

Ce cours permettra aux étudiants de deuxième année de graduat en


droit :

• Comprendre que le pouvoir traditionnel en Afrique traverse comme dans


les monarchies traditionnelles, le champ de la citoyenneté car la même
personne assujettie à l’Etat et en même temps sujet du régime traditionnel
encore en vigueur dans nos milieux ruraux ;

• Rechercher la légitimité traditionnelle auprès des chefs d’organisation


politique traditionnelle par les autorités étatiques et vice – versa conforte
l’inféodation réciproque. A titre d’exemple, l’investiture du chef de l’Etat
après les élections de 2011, les différentes missions des autorités
politico-administratives dans les milieux traditionnels;

• Revaloriser les coutumes et traditions rejetées par l’occident pour la


création d’un langage en vue de se comprendre et défendre les idéologies,
valeurs et croyances ; rendre les institutions traditionnelles souples,
capables de répondre à la modernité et à la mondialisation ;

• Maitriser les changements socioculturels, les structures, les institutions


politiques dans notre pays et leur incidence sur la vie sociale dans tous les
aspects de la vie des sociétés négro – africaines et congolaise ;

• Rechercher l’authenticité véritable et l’identité de l’Afrique en général et du


Congo en particulier sur le plan traditionnel et moderne pour contribuer au
développement du Congo ;

• Déterminer le dépositaire du pouvoir d’édicter les normes obligatoires, ce


qui revient à observer et connaître le titulaire de l’utilisation de la violence
ou du moins du recours à la contrainte. L’abandon de la justice privée au
profit de la régulation sociale « ubi sociéta ibi jus », le pouvoir d’édicter
des normes obligatoires sanctionnées par l’autorité publique et de les
faire respecter exige un monopôle de la contrainte susceptible d’être
exercé sur les membres de la société politique.

Les structures et institutions traditionnelles jouent ce rôle mettant


fin à la justice privée, ce rôle s’est vu atténuer au profit de l’Etat qui détient le
monopole de la contrainte légitime et légale. Il résulte que l’administration
d’autorité doit se transformer en administration de communication, d’échange et
d’impulsion, bref de participation, pour devenir une administration de
développement.

• METHODE D’APPROCHE

La démarche retenue est pluridisciplinaire. En effet, plusieurs


disciplines aux matières sont concernées ainsi, la complémentarité de leurs
approches est souhaitable. Le droit se sert de plusieurs méthodes qui va
permettre de rendre cet explosé démontrable et vérifiable. Une méthode
documentaire et exégétique auxquelles nous associons des techniques
d’observation directe, indirecte ou participante. L’interview et le questionnaire
nous permettrons d’entrer en contact avec nos interlocuteurs.

Ce cours embrasse aussi une zone mixte constituée des échanges


qui s’effectuent respectivement dans les sciences économiques et la sociologie.
Les recherches dans ce domaine seront orientées pour compléter notre
enseignement.

• PLAN DU COURS

Ce cours va s’articuler autour des axes suivants :

• Les généralités sur les cadres terminologiques et théoriques ;

• Les structures et institutions de l’Afrique précoloniale ;

• Les structures et institutions de la société coloniale ;


• L’Etat post – colonial ;

• La structure et l’Administration rurales ;

• L’étude de cas.

CHAPITRE I : GÉNÉRALITÉ SUR LE CADRE CONCEPTUEL ET


THÉORIQUE

• SECTION 1. DÉFINITION DES CONCEPTS FONDAMENTAUX

Paragraphe 1. Droit ou règle


Qu’est-ce que le droit ? On pense en premier lieu à l’existence de
règles régissant l’activité des hommes en société. Le droit serait l’ensemble des
règles de conduite humaine, édictées et sanctionnées par l’Etat, c’est-à-dire par
l’autorité publique, et destinées à faire régner dans les relations sociales
l’autorité et la liberté. Pour Jean Gicquel, le droit évoque la recherche d’un
compromis entre l’instinct de socialité qui pousse l’individu à vivre au milieu de
ses semblables dans un but de sécurité et le besoin de liberté qui incite cet
individu à s’émanciper de ses semblables. Reflet de la puissance publique, la
règle de droit ou norme juridique possède une force contraignante, à laquelle, en
principe, aucune personne ne peut se soustraire. La règle de droit est escortée
par la force publique.

Plus profondément, définit le droit, tenter d’en donner un concept


clair et distinct, c’est déjà prendre une position philosophique. Cerner le critère de
juridicité d’un acte ou d’un fait est une tache proprement philosophique. Il relève
de l’introduction au droit de montrer en quoi le droit se distingue des autres
sciences normatives, notamment de la religion et de la morale, par certains
caractères spécifiques. En réalité, le mot droit recouvre des sens différents qu’il
convient de préciser. En outre, le droit s’

Cuvillier définit le droit comme un ensemble de règles, normes en


vertu desquelles, dans un Etat, s’exerce la contrainte ( ) les statuts sociaux
sanctionnés par la contrainte publique constituent seuls le droit. L’Etat est le
souverain détenteur de cette contrainte » ().

Cette définition suppose une société organisée, hiérarchisée, avec une puissance
politique bien déterminée qui a le monopole de la contrainte. Celle – ci permet de
faire respecter la norme légale.

Gray parle du droit d’un Etat ou de toute société d’êtres humains


organisés, se composent des règles que les tribunaux c'est-à-dire les organes de
cette société énoncent pour déterminer les droits et devoirs légaux ().En réalité,
le mot droit recouvre des sens différents

L’analyse de la définition de cet auteur apporte trois caractéristiques : une


structure étatique, des tribunaux et l’emploi de la force. Ces trois caractéristiques
ne permettent pas qu’on parle du droit dans les sociétés archaïques.

Hoebel () revenant sur la sanction, estime que ce qui constitue


l’autorité, ce n’est pas son caractère absolu ou institutionnalisé mais c’est le fait
qu’elle dispose d’une influence suffisante sur le groupe et les parties en litige
pour que ses décisions soient appliquées. Autrement dit c’est plus sur le
consensus du groupe que repose l’autorité, dans les sociétés primitives que sur
la puissance de son pouvoir comme cela peut être le cas dans bon nombre de
sociétés plus civilisées.

Henri Levy Bruhl souligne que la société globale est généralement


la seule à posséder un appareil judiciaire mais nous avons vu que d’autres
groupes sociaux supérieurs ou inférieurs à l’Etat, élaboraient, eux aussi des
règles de droit lesquelles ne peuvent, par définition même, être homologuées par
les tribunaux (). Les sociétés africaines précoloniales, des sociétés étatiques,
d’une part, et des sociétés dites à céphaliques, anarchiques ou à étatique de
l’autre, on se trouve à tracer une frontière entre groupes ethniques qui possèdent
les critères de droit déjà mentionnés (autorité politique supérieure, les tribunaux)
et ceux que l’on a considéré à tort, comme sans loi. On trouve à une extrémité
des groupes ne bénéficiant d’aucunes formes de pouvoir central et de l’autre, des
communautés fortement hiérarchisées et formant des royaumes (Bemba, Round,
Kuba, Kongo…)

Lorsqu’on parle de société sans Etat cela n’exclut pas toute


modalité d’organisation politique. Toute collectivité connait des formes
d’autorités. Dès qu’une personne intentionnellement ou pas provoque un
déséquilibre par la violation d’un tabou, d’un interdit, par recours à la magie. Dès
qu’il y a un différend entre deux individus qui appartiennent à la même famille, au
même village ou des segments d’une tribu, les rapports sociaux sont mis en
danger et il importe de rétablir l’équilibre pour éviter l’éclatement d’entités
sociales.

Là où il n’y a pas d’autorité statutaire, on fera appel à une autorité


informelle pour ramener la paix et l’ordre dans la communauté. C’est souvent là
où les personnes qui disposant d’un leadership reconnu, que lui confère l’âge, la
sagesse, la puissance, le prestige, le sens de la justice, la capacité d’intervention
en matière sacré. Le rôle de cette autorité est de neutraliser l’influence néfaste,
les puissances occultes, d’apaiser la colère des divinités ou des ancêtres ou de
ramener la paix entre les familles en litiges en proposant une solution équitable,
apte à redresser les torts, et accepter l’ensemble de la population.

En ce qui a trait aux sociétés africaines plus complexes, elle sont


dotées d’une structure politique plus hiérarchisée et en conséquence, elles
disposent d’un système juridique beaucoup plus institutionnalisé comportant les
tribunaux qui se situent à chaque échelon de la pyramide sociale, la famille, le
quartier, village, canton, tribu dont le chef ou le roi représente l’autorité politique
et judiciaire suprême.

Les sociétés africaines traditionnelles qu’elles soient étatiques ou


anarchiques, on retrouve des normes de contrainte qui sont des normes légales
parce qu’elles sont appliquées par une autorité qu’elle soit institutionnelle ou pas,
admise et soutenue par le corps social. Dans les sociétés primitives, la principale
source du droit est la coutume. Les règles juridiques sont alors par essence,
fondées sur les usages anciens qui se substituent grâce au consentement
continuel des populations qui s’y soumettent. Le caractère de l’intention
répétitive ou d’application universelle se trouve ainsi sous – jacent à tout droit
coutumier.

Le concept « droit » revêt un triple sens. Il s’agit du droit au sens objectif et du


droit au sens subjectif.

• Droit au sens subjectif

Le premier sens, le droit est une prérogative, une faculté, naturelle


ou légale, reconnue à un individu ou à un groupe d’individus et dont ceux-ci
peuvent se prévaloir vis-à-vis des choses ou dans leurs relations avec les autres.
Cette prérogative permet à son titulaire de jouir d’une chose, d’une valeur (droit
réel), ou d’exiger d’une autre personne une prestation ou une abstention (droit
personnel) ou d’accomplir certaines actions, tel le droit de vote. Le titulaire du
droit, l’attributaire d’une prérogative est traditionnellement appelé le sujet de
droit. D’où l’expression de droits subjectifs par laquelle on désigne les droits
ainsi entendus. Les droits subjectifs sont des intérêts légitimes juridiquement
protégés. Ainsi par exemple, les droits fondamentaux et les libertés publiques.

Le droit au sens subjectif peut être définit comme un ensemble des


prérogatives reconnu par le droit objectif aux personnes physiques et morales
(droit privé ou public), ces prérogatives peuvent être appliquées à l’ensemble de
la communauté (droit absolu) ou à une partie de la société (droit relatif).

Dans ce cadre la loi a pour objectif de régler les manquements aux


prérogatives individuelles. Le droit égal à une faculté, une prérogative reconnue à
une personne et lui permet d’accomplir des actes juridiques déterminés.

Exemple : droit au travail est conditionné par l’âge, droit au mariage, droit à la
propriété, droit à l’instruction, droit de vote, etc. Les divers droits contenus dans
la déclaration universelle des droits de l’homme prennent le sens du mot droit
subjectif. Aujourd’hui on les retrouve dans plusieurs constitutions des Etats.

Ghestin et Gouvaux propose une définition complète de droit


subjectif comme étant « une restriction légitime ».

Droit : ce mot présente plusieurs sens entre les quels il faudra choisir,
l’étymologie ne sera ici que de peu de secours.

Le mot « droit » en français (comme en anglais Right en Allemand Rechi, en


Italien Diritto, etc.) se rattache à une métaphore ou une figure géométrique, il a
pris un sens moral, puis juridique, le droit, c’est la ligne droite qui s’oppose à la
courbe ou l’oblique ce qui s’apparente aux notions de rectitude, de franchise, de
droiture, d’exactitude, de loyauté dans le rapport humain.
On voit immédiatement qu’une telle acceptation ne nous fournit
qu’une idée très approximative du concept, il faut mieux examiner l’emploi qui en
est fait.

De la liberté d’autrui établie par la norme objective en faveur du sujet qui


bénéficie ainsi d’un domaine réservé pour exercer ses pouvoirs dans le cas
particulier du droit de la créance, il s’y ajoute une certaine emprise sur la
personne de débiteur, en vue d’adapter, de maintenir ou de rétablir l’éligible des
situations respectives du créancier et du débiteur ».

A partir de ses définitions, trois caractéristiques essentielles du


droit subjectif semblent se dégager :

• Individuel : c’est au droit réservé à un seul titulaire, celle le propriétaire


d’un titre de propriété peut revendiquer son droit (droit de propriété) ;

• Exclusif : c’est un droit qui exclut les autres, celle le propriétaire peut user,
jouir et abuser de ses droits. Lui seul peut disposer et circuler sur sa
propriété, au contraire les tiers doivent y être invités ;

• Légitime c’est un droit qui légitime l’inégalité par la reconnaissance de la


restriction des libertés d’autrui au profit du titulaire, la restriction de la
liberté d’autrui d’aller et venir sur terrain du propriétaire et justifié par ses
droits reconnus comme légitime.

• Le droit au sens objectif

Le mot droit peut être entendu de diverses manières. Dans ce


deuxième sens, le droit est définit comme un ensemble de règles de conduite
qui, dans une société donnée et plus ou moins organisée, régissent les rapports
entre les hommes et dont le respect (ou la violation) est sanctionné par la
puissance (l’autorité) publique. Le droit correspond alors à l’ordre ou
l’ordonnancement juridique de la société considérée. Cet ensemble de règles est
appelé droit objectif.

Le droit objectif est définit comme l’ensemble des règles régissant


la vie dans la société est sanctionné par la puissance publique. Ces règles sont
établies par l’Etat ou par les communautés des Etats avec comme objectif
principal le maintien de l’ordre et de la sécurité nationale. Ces règles ont un
caractère général, impersonnel et obligatoire ; ils ne peuvent être remis en cause
que par la voie légale et démocratique.

Par droit objectif, on entend l’ensemble des règles s’appliquant à


des individus (ou à des collectivités), et doivent être observées sous peine d’en
courir une sanction. Le droit objectif se compose des règles de droit privé et droit
public.

Ces règles sont spécifiques en raison de leur caractère obligatoire


(commandement, normativité), de leur source dans la volonté de l’autorité
publique (Etat, puissance publique ou une autre autorité dans le groupe) et en
raison de la sanction qu’entraine leur violation, ce qui traduit le caractère coercitif
du droit. La règle de droit est escortée de la force. Cette force explique la
sanction exercée par la puissance publique qui détient le monopole légal de la
contrainte légitime.

Le caractère général, impersonnel et abstrait permet de distinguer


la loi et le règlement d’une part de l’acte individuel d’autre part. La règle de droit
impose des comportements, énonce des interdictions et des obligations,
accorde des autorisations et définit des modes de vie en société. Le droit est un
garde-fou, une technique d’encadrement des comportements humains, un
phénomène de régulation des conduites humaines.

D’un point de vue philosophique, on peut limiter le droit objectif aux seules
normes édictées (posées) volontairement par l’autorité. On se situe alors dans ce
que l’appelle le droit positif qui s’inspire du positivisme juridique et volontariste.
Si l’autorité de référence est étatique, on parlera de positivisme étatique, tandis
que si l’on englobe les règles issues des comportements sociaux, on parle de
positivisme sociologique. Ce qui amène à distinguer les coutumes de droit et
celle qui ne sont pas de droit. Une coutume est juridique quand son application
peut être exigé par l’autorité ou quand le particulier peut recourir à dite autorité
pour ramener les tiers à la respecter.

Son respect est assuré d’office par une requête adressée à une autorité établie et
reconnue.

Exemple : la propriété sur le champ, un bétail, une case, etc.

Ainsi on parle du droit coutumier ou de la coutume. Le droit coutumier est


l’ensemble des règles qui résulte des coutumes d’une communauté. Il nait d’un
long et constant usage par les individus d’une communauté et qui est devenu
ensuite obligatoire. Le droit coutumier est porté par les mœurs il est non écrit, il
précède le droit écrit et en a été la base.

Exemple : l’article 388 du code civil livre II.

Les terres occupées par les communautés locales sont celles que
les communautés habitent, cultivent, ou exploitent d’une manière quelconque,
individuelle ou collective, conformément aux coutumes et usages locaux.

En RD Congo, la coutume a une force obligatoire au tant que la loi, pour autant
qu’elle soit conforme à la loi, à l’ordre public et aux bonnes mœurs. La coutume
pour autant qu’elle n’est soit pas contraire à l’ordre public et aux bonnes mœurs
pour être une source de la légalité.

Mais au-delà des normes expressément posées par les hommes,


on peut inclure dans le droit positif des normes naturelles préexistantes et
considérées comme supérieures aux normes humaines. Il y a alors moyen
d’évoquer le droit naturel, soutenu par une courant doctrinal appelé
jusnaturalisme.

Le droit objectif se subdivise en deux branches, le droit public et le droit privé.


Chacune de ces branches comportent à son tour une série des droits qui s’y
rattachent.

• Le droit public
Le droit public interne désigne un ensemble des règles visant
l’organisation. Il a pour principale fonction de régir les rapports entre la
puissance publique, en terme générique qui désigne l’administration, l’Etat, les
collectivités locales et les particuliers. Le droit public définit les règles juridiques
qui organisent d’une part les pouvoirs de l’Etat et les institutions publiques et
d’autres part des rapports, entre ceux – ci et les citoyens au sein d’une société,
d’une nation. L’Etat peut se structurer au tour d’un pouvoir centralisé comme au
tour d’un pouvoir non centralisé segmentaire lignageaire ou segmentaire non
lignageaire. Au sein du pouvoir traditionnel, les populations étaient divisées en
Etats pour suivre des destinées communes

Cette dualité explique les subdivisions du droit public.

• Droit constitutionnel

Prélo définit le droit constitutionnel comme l’ensemble des règles


juridiques relatives aux « institutions grâce auxquelles l’autorité s’est établie, se
transmet ou s’exerce dans l’Etat. Autrement dit il s’agit d’expliquer les
mécanismes et les fonctionnements des institutions politiques des sociétés
traditionnelles (chefferie, secteur, groupement, terre, conseil des notables, chefs
coutumiers, etc.)

Le droit constitutionnel des sociétés traditionnelles regorgent un


certain nombre des règles juridiques essentielles pour le fonctionnement ou
l’exercice du pouvoir politique. Ces règles se trouvent définit en dehors d’un texte
écrit. Ainsi, une bonne partie de ces dispositions devient coutumière. C'est-à-dire
non écrite. Le droit constitutionnel coutumier se réfère à la conception dite
matérielle qui définit celui – ci par référence non à une catégorie des textes mais
à un groupe des matières. Ainsi le droit constitutionnel coutumier serait
« l’ensemble des règles qui constituent la société politique et son expression
juridique qui organise le statut et les fonctions des gouvernants.

• Droit administratif

Il regroupe l’ensemble des règles qui s’appliquent à l’administration


et à la fois dans la gestion des services publics mais aussi dans ses rapports
avec les particuliers. Au sein des sociétés traditionnelles, il existe des règles
d’administration et des gestions des entités sous gestion coutumière.

• Droit fiscal

Il renvoie aux règles relatives aux impôts. Le droit fiscal coutumier


renvoie à des contributions exigées aux individus ou aux particuliers pour
supporter les charges de la collectivité. Ces contributions permettent d’assurer la
survie et accroître le pouvoir économique (l’exploitation des forêts, saline,
élevage, pêche, chasse, produits agricoles, dot payer pour la fille à marier etc.)

• Droit privé
Le droit privé tente d’apporter des réponses aux diverses situations
rencontrées par les particuliers dans leurs vies quotidiennes allant des troubles
du voisinage en passant par l’achat d’une chose, la rédaction d’un contrat entre
également dans cette catégorie, les relations juridiques entre l’administration et
les particuliers lorsqu’elles ne sont pas exorbitantes du droit commun.

Le droit privé coutumier repose essentiellement sur le droit civil


auquel s’ajoutent diverses branches du droit. Celles – ci sont faites des
spécialisations fondées sur les professions des individus qui se sont
progressivement dégagées du droit civil notamment le droit commercial, le droit
du travail, le droit pénal.

Comme pour le droit public, le droit privé comporte plusieurs divisions.

• Droit civil

Il règle les relations des particuliers entre eux survenant au cours


de leur vie quotidienne. Il regroupe le droit de la famille, des biens des personnes,
des contrats de la propriété. Le droit privé coutumier pose le problème du statut
personnel en tant que sujet de droit, de droit qui est reconnu à la personne pour
protéger sa personnalité physique et morale, sa position familiale et sociale
(droit au mariage, droit à l’alliance, droit au divorce, le droit à la progéniture).Les
droits patrimoniaux concernent les droits subjectifs des personnes a possédé
des biens en propre ou en commun. Le droit civil coutumier reconnaissez 4
modes d’acquisitions de la propriété individuelle (achat, l’échange ou troc,
l’occupation et travail).

• Droit commercial

Il concerne l’ensemble des règles applicables au commerçant dans


l’exercice de leurs activités professionnelles cela passe par les règles relatives à
leurs activités commerciales jusqu’à leur droit en qualité de commerçant (achat,
vente, création de société).

• Droit pénal

Il regroupe les règles qui sanctionnent des infractions


(contraventions, délits et crimes). Le droit pénal coutumier se manifeste à
travers les actions « justicières » mues dans le cadre des procédures privées ou
des procédures judiciaires. Celle – ci mettent en branche des juridictions
coutumières agissant selon des procédures privées ou publiques spécifiques
poursuivant des infractions diverses et appliquant des peines particulières
suivant des règles de participation criminelle assez singulières. Le droit pénal
coutumier se manifeste également des procédés magico – religieux, sacrés et
mystiques.

Il est reproché à notre droit pénal d’être le copiage pour la


séduction des civilisations ou des sociétés dites développés. Le droit pénal
congolais puiserait dans son patrimoine culturel et normatif traditionnel pour
construire un ordonnancement régulateur.

Exemple : la sorcellerie qui n’est pas érigée en infraction en droit pénal congolais.

L’évolution du droit aujourd’hui classe le droit pénal à cheval entre le droit privé et
le droit public. Il est devenu un droit mixte.

c) Droit au sens de la connaissance

Le mot droit renferme une troisième acception qui renvoie à l’étude et à la


connaissance des normes. Il signifie dans ce cas, la science des lois, la science
des normes, de leur contenu, de leurs rapports réciproques, des modalités de
leur formation et des conditions de leur validité, des conséquences de leur
violation et s’interroge sur leur finalité. La science juridique s’intéresse donc aux
différentes branches du droit, mais aussi aux sciences auxiliaires comme la
philosophie du droit, l’anthropologie juridique, la sociologie, l’histoire du droit,
etc. C’est dans ce sens qu’on parle d’étudiants en droit ou de faculté de droit.
Comme science des normes et ensemble de règles, le droit a une incidence
sociale et politique incontestable.

• d) La dimension sociale et politique du Droit


Le droit est imprégné d’une forte dimension sociale parce qu’il régit les
rapports sociaux. Mais en même temps a aussi une dimension politique parce
qu’il se rattache à la relation d’autorité et à l’exercice du pouvoir.

• La dimension sociale du droit

Le droit est indissociable de la société humaine. Eric Weil écrit : Droit, loi,
justice sont des termes qui n’ont de sens qu’à l’intérieur d’une communauté. D’où
le vieil adage « Ubi societas, ibi jus ». E. Durkheim constatait dans la division du
travail social, « la vie sociale partout où elle existe de façon durable, tend
inévitablement à prendre une forme définie et à s’organiser, et le droit n’est autre
chose que cette organisation même dans ce qu’elle a de plus stable et de plus
précis ».

D’abord, le droit est une production sociale, il est créé par un groupe organisé
au sein de quel le droit remplit certaines fonctions. Ces fonctions sociales du
droit sont multiples et variées : régir les conduites, régler les litiges et les conflits,
sanctionner les infractions et ainsi assurer l’harmonie du groupe.

Les hommes sont des animaux sociaux. Depuis leur origine lointaine, ils ont
vécu en groupe, en société. D’abord en groupes restreints (familiaux) et primitifs,
puis en collectivités organisées et complexes. Dans cette société découlent les
rapports interindividuels, des rapports collectifs et des rapports entre les
individus et les groupes. Ce sont ces rapports sociaux qui génèrent les règles de
droit. En effet, ces rapports ne sont pas toujours harmonieux et pacifiques. Toute
société est une société chaude : elle connait des conflits, des tensions, des
antagonismes suscités par des rivalités de comportements et par la divergence
d’intérêts. En effet, l’individu renferme n lui-même le combat entre la volonté
générale qu’il partage avec le reste des membres de la société et sa volonté
personnelle animée par la poursuite des intérêts particuliers. De plus, lorsque
cette dernière risque d’emporter sur la première, la société est chargée d’assurer
que l’individu se soumette à la volonté générale, ce qui signifie, pour reprendre la
formule de JJ. Rousseau, « que quiconque refusera d’obéir à la volonté générale
y sera contraint par tout le corps : ce qui signifie autre chose sinon qu’on le
forcera à être libre ».

Si les conflits peuvent traduire la vitalité d’une société, il faut néanmoins


éviter qu’ils détruisent la société. D’où l’importance du phénomène juridique, du
droit comme moyen indispensable d’organiser la société en soumettant les
rapports et les comportements sociaux à une discipline sociale, faite
simultanément d’obligations et d’interdictions. Ainsi le droit joue un rôle de
régulateur de la vie sociale. Son objectif est de faire régner l’harmonie et la paix
sociales.

Lorsque les conflits surgissent, le recours au droit suppose l’abandon de la


solution de force et la renonciation à l’usage de la violence privée. Ainsi, le droit
restreint la violence qui caractérise l’individualité naturelle en lui substituant un
mode social de règlement des conflits. Le droit permet de trouver des solutions
aux litiges sans faire intervenir la force, préservant de ce fait la paix
sociale. « L’acte juridique essentiel, note Alain, un philosophe français, consiste
en ceci qu’on renonce solennellement à soutenir son droit par la force…L’ordre du
droit suppose la déclaration préalable de la paix avant l’arbitrage, pendant
l’arbitrage et après l’arbitrage, et que l’on soit content ou non. Le droit substitue
au seul triomphe de la force le jugement qui ne résulte pas des forces mais du
libre débat devant le juge, l’arbitre qui n’a point d’intérêt dans le jeu.

Par ailleurs, le droit permet de sanctionner les comportements répréhensibles


et donc de garantir la sécurité des biens et des personnes en assurant la
réparation des droits lésés ou le rétablissement de l’ordre public par la
répression des infractions pénales.

La dimension politique du droit

Sur le plan politique, le droit permet aux gouvernants de conforter leur pouvoir
et leur donne les moyens d’atteindre leur objectif de conquête du pouvoir et le
progrès de l’ensemble de la société. Le droit est un outil qui se trouve entre les
mains des détenteurs du pouvoir pour mener à bien leur action (programme de
société ou programme politique ou encore projet de société) en vue de réaliser
ce qu’ils qualifient d’intérêt général ou bien commun. Il devient un facteur de
légitimation du pouvoir politique. Mais, en même temps, une fois produit, le droit
s’applique aux gouvernants pour limiter leurs prérogatives et soumettre à la
contrainte juridique. Le droit joue la fonction de limitation du pouvoir. La
dimension sociale du droit se double d’une portée hautement politique.

Dans les diverses fonctions sociales, le droit est censé fournir les critères
objectifs de conduites compatibles avec les fins que se fixe la société, appuyés
par une force publique capable de faire suivre ses ordres. Il est appelé à fournir le
support capable de canaliser les forces particulières vers une fin commune qui
est celle de la conservation de la société car, en définitive, la survie individuelle
en dépend. Il s’agit de faire en sorte que les antagonismes que provoque la
politique ne débouche pas sur le chaos et la destruction, mais soient gérés d’une
façon à ne pas dégénérer jusqu’à mettre en péril l’existence même de la société.
C’est à ce niveau que le droit se subdivise en différentes branches qui illustrent la
diversité de son champ d’intervention et de la vie sociale dans laquelle il s’insère.

Paragraphe 2 : Structures

La structure est entendue comme la façon dont les différentes


parties d’un ensemble concret ou abstrait sont disposées entre elles et sont
solidaires et ne prennent sens que par rapport à l’ensemble de sa structure. La
notion ou le concept de structure relève de plusieurs disciplines dont la
linguistique ou l’on parle de la structure grammaticale, la chimie, on parle de
structure moléculaire, la biologie, on parle de structure cellulaire, la sociologie, on
parle de structure sociale.

Mbaya Ngang considère que dans une structure, chaque partie


remplit une fonction dans un tout disposé de manière que la disparition de l’une
des parties rompe l’harmonie. La structure est donc un ensemble des parties qui
forment un tout par rapport à leurs fonctions. En d’autres termes, la structure
n’est pas une simple combinaison d’éléments, elle est un tout formé de
phénomènes solidaires qui dépendent les uns des autres.

Chaque phénomène ne peut être ce qu’il est que dans et par ses
relations avec les autres. S’agissant de la structure sociale, l’élément de base
reste l’individu. Par conséquent une structure sociale. L’homme est un objet réel
non construit. Il est un être de chair et d’os, une réalité biologique, psychologique
et sociale. Le juriste, bien que devant appréhender toutes ces caractéristiques
doit saisir l’être homme sous les aspects juridiques.

Donc, la structure comprise sous cet angle est un arrangement de


personnes ayant entre elles des relations institutionnellement contrôlées et
définies telles que les relations du gouvernant et du gouverné ou celles du mari
et de la femme (). Cette approche juridique est complétée par les disciplines des
sciences sociales. Ainsi, une structure peut être envisagée et saisie comme un
ensemble de relations sociales dans une société à un moment donné. Ce qui a
amené Brown à définir une structure sociale comme étant un réseau permanent
des relations sociales au sein d’une société ().

Le concept structure ne rencontre pas unanimité entre les


différents auteurs ou chercheurs. Chaque auteur parle de son propre langage ().
Dans l’ensemble nous pouvons retenir la définition de quelques auteurs ci –
dessous :

Selon P. Virton, le terme « structure » provient du latin « strucre » qui signifie


construire, est d’abord un terme d’architecture qui évoque la manière dont est
bâti un édifice, par extension, il désigne l’édifice lui – même. Par analogie, il
signifie la manière dont les parties d’un tout sont agencées entre elles, enfin par
extension de ces analogies, il signifie l’ordre, l’arrangement, la disposition ().

Paul Robert quant à lui définit le terme structure comme «ensemble », système
formé de phénomènes solidaires, tels que chacun des autres ne peut être ce
qu’il est que dans et par sa relation avec eux ().

D’abord un ensemble organisé des rapports et dans ce sens on


parlera de structures mathématiques, des structures psychiques ou des
structures sociales et en linguistique, ce terme de structure signifie un
arrangement interne des unités qui forment un système linguistique.

Ensuite, manière dont un ensemble concret spatial, est envisagée


dans ses parties, dans son organisation, forme observable et analysable. Que
présentent les éléments d’un objet.

• Dans son cours de « structure et institution sociale, Ngoma définit le


terme « structure » comme un arrangement de tous les éléments pour en
faire un ensemble cohérent ». ce tant M. Diverger, Ngoma écrit : « pour
qu’il y ait une structure, il faut un ensemble stable et cohérent, un
phénomène à contours limité » () ;

• Dans son ouvrage intitulé « introduction à la science politique »,


Mulumbati Ngasha écrit qu’une structure est « un ensemble des positions,
de rôles, de groupes stratifiés, les uns aux autres suivant des rapports
fonctionnels, dans un équilibre constamment refait » ().

• Structure sociale en sciences sociales

• Mais le concept de structure sociale est un de ceux qui


ont déchiré les auteurs et les ont rangés en deux catégories,
respectivement représentées par G. Gurvitch et Claude Levi – Strass le
premier dit notamment :
« L’heure présente, le concept de structure sociale manifeste plus d’attirance et
remporte plus des succès qu’aucun autre dans le domaine sociologique. Ceci est
vrai qu’il s’agisse de la théorie, de la recherche empirique ou des deux à la fois,
interprétées et s’enrichissant réciproquement, comme il devrait.

Cependant, il faut le proclamer bien haut, le concept reste le moins


clarifiés pour ne pas dire plus ambigu et il provoque les plus grandes confusions
dans la littérature sociologique » ().

Développement ou chapitre IV du même ouvrage et dans son traité, le concept


structure sociale, il le définit de la manière suivante :²

« Toute structure sociale est un équilibre précaire, sans cesse à


faire par un effort renouvelé, entre une multiplicité des hiérarchies au sein d’un
phénomène social total de caractère macrosociologique, dont elle ne représente
qu’un substitut approche : équilibre entre des hiérarchies spécifiques des paliers
en profondeurs, des manifestations de sociaux, des colorations du mental, des
modes de vision du travail et d’accumulation, et le cas échéant, des groupements
fonctionnels, des classes et des leurs organisations, cet équilibre des hiérarchies
multiples est armés et cimenté en particulier par les modèles : signes, symboles,
rôles sociaux réguliers et habitudes, valeurs et idées, en bref par les œuvres de
civilisations qui sont propre à ces structures, et si elles sont globales, par une
civilisation entière qui les dérobe, à laquelle elles participent à la fois comme
producteurs et comme bénéficiaires ».

Et les points saillants d’une structure sociale. Selon cette


conception de Gurvitch sont :
• « des hiérarchies multiples, le plus souvent en tension, sinon en
concurrence ;

• « leur équilibre manifeste et en même temps précaire, demandent des


efforts, des actes toujours renouvelés ;

• « la conscience collective nette de ces hiérarchies multiples et de leur


équilibre précaire ;

• « l’armature cimentant cet équilibre afin de combattre sa précarité pour


ainsi dire constitutive ;

• « le mouvement des structurations, restructurations ou éclatement liant la


structure avec la société en acte ».

L’idée à retenir de cette idée longue définition, c’est que G. Gurvitch


pense que la structure sociale est une réalité empirique, que l’on peut observer à
travers la base morphologique, les modèles techniques et économiques ainsi
que les conduites régulières par exemple. Il entraine ainsi dans son camp
Radeliffe Brown qui déclare employer le terme de structure socialiste pour
indiquer un réseau (net – work) de structure sociale existant, leur unification
dans un réseau possédant une continuité ou entrainaient des positions et des
rôles sociaux.

Levis – Strauss dégage les concepts de la structure et celle des


relations sociales, il dit : « le principe fondamental, écrit – il, est que la notion de
structure sociale ne se rapporte pas à la réalité empirique, mais aux modèles
construits d’après celle – ci. Ainsi apparait la différence entre deux notions
voisines qu’on les a souvent confondus, je veux dire celle de structure sociale et
celle des relations sociales. Les relations sociales sont la matière première
employée pour la constitution des modèles qui rendent manifeste de structure
sociale elle – même. En aucun cas, celle – ci ne serait donc être ramenée à
l’ensemble des relations sociales observables dans une société donné » ().

Les divergences de vue des différents auteurs montrent que le


terme « structure n’a pas le même sens. Il dépend du sens explicite qu’on lui
donne préalablement. Le terme a gardé son sens étymologique (structure
construite) et désigne, « la manière dont un édifice est bâti, pour bientôt séduire
avec Fontenelle, les anatomistes, avec Fongelas les grammairiens, et s’étendre
ensuite à toutes les spécialistes, sciences de la nature ou science de l’homme
(….) avec Spencer de la biologie à la sociologie : la notion de structure y subit
l’influence de celle d’organisme, permettant à Radcliffe – Brown de conclure à
l’analogie de la structure organise et de la structure sociale ».

• Structure politique

Ce concept renvoie à un autre qui lui est plus fondamental, celui de


système, pour dépasser la vision fonctionnaliste. Cette vision pousse à envisager
le concept de structure socio – politique dans le cadre de la société globale ou la
notion « politique » renvoie à ce phénomène fondamental observé par Léon
Duguit et qu’il appelle la distinction des « gouvernants » et des « gouvernés ».

Le mot, « politique » est donc fondamentalement constituées de


ces phénomènes de relations inégalitaires entrainant avec les uns prennent des
ordres et les autres s’y plient, tout naturellement avec plus au moins leurs
accord. Le mot politique est entendu comme science du gouvernement des Etats
ou encore une manière de gouverner (exemple : politique libérale, autoritaire,
réactionnaire etc. elle peut aussi s’entendre comme l’ensemble des affaires
publiques (politique intérieure, politique extérieure) (). En droit public, ce concept
de structure est incontournable dans les analyses institutionnelles. Autrement
dit, il s’agit de déterminer du point de vue organique, la genèse, l’organisation et
le fonctionnement d’une institution par rapport à ses éléments constitutifs.

• SECTION 2 : INSTITUTION

Pour le doyen M. Hauriou, initiateur de la théorie de l’institution,


l’institution est une idée d’œuvre ou d’entreprise qui se réalise et dure
juridiquement dans un milieu social ; pour la réalisation de cette idée, s’organise
un pouvoir qui lui procure des organes ; d’autre part, entre les membres du
groupe social intéressé à la réalisation de l’idée, il se produit des manifestations
de communion dirigés par des organes du pouvoir et réglées par des procédures.

Au sens large, l’institution renvoie à un ensemble de structures,


d’idées, de croyances, de mécanismes et d’usages formant un tout coordonné et
organisé. Les institutions sont, en ce sens, des formes et des structures
fondamentales d’organisation social telles qu’elles sont établies par les lois et
coutumes d’un groupe humain. L’institution se distingue de ce qui est naturel,
c’est ce qui institué par les hommes.

Au sens courant ce terme s’emploie fréquent pour désigner des


réalités assez variées, mais caractérisées par l’idée d’une manifestation
créatrice, de la volonté humaine. On distingue habituellement :

• Les institutions – organes : Ce sont les organismes créés par l’homme


pour œuvrer en vue d’une entreprise commune, qui sont les organes dont
le statut et le fonctionnement sont régis par le droit. Ainsi, le Parlement, la
famille, le Gouvernement, le syndicat, le parti politique, etc.

• Les institutions – mécanismes : qui sont des faisceaux de règles


régissant une certaine institution – organe ou une situation juridique
donnée. Ce sont des techniques, des procédés (procédure) qui permettent
aux individus et aux organisations d’agir et d’établir des relations. Ces
mécanismes juridiques (ensemble des règles) servent à encadrer les
comportements au sein de la société.

Exemple : les règles sur le droit de dissolution, les règles sur le mariage, les
règles sur la responsabilité civile, le contrat, les élections, le réferendum.

Au sens fondamental, le doyen Hauriou parle de l’institution comme


une théorie juridique, il définit « l’institution » comme une organisation sociale,
créée par un pouvoir dont l’autorité et la durée sont fondées sur l’acceptation par
la majorité des membres du groupe de l’idée fondamentale qu’elle réalise, et qui
repose sur un équilibre de forces ou une séparation des pouvoirs. En assurant
une expression ordonnée des intérêts adverses en présence, elle assure un état
de paix social qui est la contrepartie de la contrainte qu’elle fait peser sur ses
membres. L’institution, dans cette perspective correspond à une partie des
institutions organes.

L’institution désigne d’abord ce qui est établi par l’homme. C’est la


différence avec les phénomènes naturels. Elle est un ensemble d’organes ou
d’actions ou encore de pratiques organisées de façon stable. Elle a vocation à
survivre à son créateur.

Max Weber lie l’institution à l’idée d’association pour la définir comme « un


groupement dont les règles statutaires sont octroyés avec un succès relatif à
l’intérieur d’une zone d’action délimitable à tous ceux qui agissent d’une façon
définissable selon les critères déterminés ().C’est dans cette perspective que la
sociologie politique a cherché à rendre opérationnel ledit concept,
essentiellement défini par sa fonction régulatrice des rapports sociaux dans une
communauté.

Pour sa part Eisenstadt, précise l’institution comme une entité dont


le principe régulateur organise la plupart des activités de ses membres dans une
société ou une collective et selon le modèle organisationnel définit qui est
étroitement lié soit aux problèmes fondamentaux, soit aux besoins de cette
société, de ce groupe ou de cette collectivité, ou à quelques-uns de ses buts ().

Fichier définit l’institution comme étant « une structure relativement permanente


de modèle sociaux, de rôles et des relations réalisés par des gens de certaines
façons sanctionnées et unifiées afin de satisfaire aux besoins sociaux de base ().

Parsons propose que l’on parle d’institution comme un corps de


règles qui gouvernent l’action en vue de poursuivre des fins immédiates dans la
mesure où elles exercent une autorité morale dérivée d’un système commun de
valeur ().

Malinowski, quand à lui, propose la définition suivante : le « concept d’institution


implique un accord (agreement) sur une série de valeurs traditionnelles pour
lesquelles les êtres humains sont unanimes ().

Le concept en cour d’examen a le sens d’un ensemble


d’organisation (institutions – organes) et des normes établies, en règle générale,
en vue de la satisfaction d’intérêts collectifs (institution – mécanismes). C’est le
sens organique que nous allons retenir tout le long de ce cours pour faire le
rapprochement avec l’étude des structures.

Ainsi, le concept d’institution sert à l’analyse des institutions internationales ou


des institutions étatiques : en science politique, on parle d’institutions politiques
et en sociologie institution classique.

Pour M. Hauriou, l’institution définit les structures fondamentales


qui permettent d’identifier un régime politique, et qui se distinguent des effets
contractuels interindividuels de la simple volonté des acteurs sociaux. Cette
conception est à l’origine de la perspective institutionnaliste en science politique.
Elle vise à aborder les projets de l’analyse dans leurs fondements structurels et
leur modèle organisationnel en lieu et place de la prise en compte de leur rapport
à la société. C’est cette approche que nous allons retenir pour faire la symbiose
de l’intitulé de notre cours en rapprochant les structures fondamentales de la vie
institutionnelle elle – même ().

Paragraphe 1. Institution politique

Les institutions politiques s’opposent aux institutions


administratives et juridictionnelles, religieuses, économiques, éducatives et
familiales. Elles désignent classiquement les organes de l’Etat qui exercent des
fonctions dite souveraineté :

Exemple : élaborer la loi et l’exécuter ou faire respecter l’ordre public.

L’institution politique est une structure (organe) ou un mécanisme organisant


et encadrant l’exercice du pouvoir, les luttes que sa conquête, son contrôle et sa
défense suscitent. Les institutions politiques sont donc les institutions de l’Etat,
ou plus exactement les institutions relatives au pouvoir supérieur de l’Etat. Ce
sont les institutions qui concernent les gouvernants, leur pouvoir, les modalités
de leur désignation et leurs relations avec les gouvernés.

Les institutions sont constituées, d’une part, d’organes dits organes publics,
qui sont les autorités supérieures de l’Etat, celles qui déterminent sa politique, et
d’autre part, de mécanismes selon lesquels est dévolu et est exercé le pouvoir
des organes supérieurs de l’Etat.

Comme institution de base, elle a pour but de satisfaire aux besoins d’ordre
public et de réaliser les biens communs. Elle embrasse l’État, son pouvoir et ses
régions ; cette définition n’est pas claire. Son imprécision résulte du concept de
la souveraineté. Le parlement lui – même est désarmé, limité par le contrôle de
constitutionnalité. L’acceptation dominante de considérer les institutions
politiques comme celle directement issue de la compétition électorale trouve ses
limite dans les élections aux USA.

A l’inverse, un monarque constitutionnel demeure un organe


politique de l’Etat même s’il ne pas élu et que son rôle ce vu réduit, dans certain
cas à une simple représentation.

L’imprécision relative de ces concepts ne doit pas entraver son utilisation


courante quand on qualifie le président de la république que désigne t – on sinon
des individus engagés dans une compétition juridique réglée. Le langage courant,
lui, suggère l’existence d’une sorte acteur collectif.

Cette construction renforcée par la magie de la politique à ses


usages et l’illusion produit des effets de la réalité lorsque nous allons plus loin en
observant à qui cette notion correspond, dans ce cas la notion même
d’institution renvoie à une structure stabilisée d’interaction juridique et
culturellement reliées ().

Paragraphe 2 : Institution socio – politique

Ce qui est socio – politique intéresse la société définit en des


termes politiques, c'est-à-dire ce qui est relatif aux structures et institutions
sociales dans leurs relations avec le champ politique. Il y a lieu de dire tout ce qui
a trait au milieu social dans lequel la personne est intégrée politiquement.

Pierre Bourdieu définit la politique comme un champ, c'est-à-dire la scène


politique ; lieu et cadre où s’exerce l’activité politique. A notre époque dans la
société démocratique, elle serait la scène ou les individus, groupe d’individus
concourent à l’expression du suffrage et s’affrontent pour exercer des mandats
représentatifs.

Les acteurs politiques se mettent en compétition électorale ou non


en vue de contrôler l’Etat, les collectivités infra Etatique, Supra Etatique. Ce qui
nous rappelle le sens courant des expressions telles que « effectuer un choix
politique » ou « faire de la politique » par opposition à un choix technique.

La politique peut aussi revêtir un tout autre sens dans des expressions élaborées
comme « politique gouvernement ».

« La politique de santé, la politique agricole ou encore les politiques publiques…


», mise en œuvre par les autorités politico-administratives. Il est question
d’identifier un ensemble réputé cohérent d’intention et des décisions attribuables
à des dirigeants dans l’exercice de leur pouvoir. La politique est afin l’art de
gouverner les hommes en société. C’est le sens retenu en philosophie politique :
le passage d’état nature au contrat social, c’est la nécessité d’assurer la
coexistence : la vie politique des hommes en société. Qu’en est – il des
politiques ?

Les politiques, c’est plus que la scène politique, ils décrient le


champ de contradiction et d’agrégation d’intérêt, on peut entendre par des
demandes ou des aspirations, une manière de réguler par un pouvoir détenteur
de la coercition légitime. C’est le sens le plus proche de l’objet du cours. En effet,
le pouvoir politique tire sa justification dans l’existante des conflits réels ou
virtuels pouvant surgir entre les membres de la société. Une société
harmonieuse où il n’existerait pas de conflits entre fort et faible, entre oppresseur
et opprimé, hommes et femmes, employeurs et employés bref serait un paradis
céleste. Il serait difficile d’instaurer le pouvoir politique dans une telle société.
Seul peut être un pouvoir divin qui serait indispensable dans la cité de Dieu ou
celle de nos ancêtres. Dans la cité des hommes le juge, l’administrateur, le
policier, le militaire… sont utiles pour la fameuse distinction des gouvernants et
des gouvernés. C’est la substitution du gouvernement des hommes.

La présence des conflits au sein de la société exige la mise sur pied


d’un pouvoir politique dont la mission serait de réguler ou de prévenir les
antagonismes qui proviendrait d’un manque de consensus. L’homme
naturellement bon n’existant pas le pouvoir doit le façonner et le conditionner
par rapport à l’intérêt général ou commun parce que dans une société aucun
problème n’est intrinsèquement politique mais n’importe lequel peut le devenir.
Ce passage au politique implique un codage d’un type particulier d’acceptation
ou d’interdiction du débat conduisant à identifier les bénéficiaires ou les
victimes ou éventuellement les responsables ; présentation du problème
catégoriel ou de la revendication politique en termes d’intérêt général ;
focalisation de l’opposition à faire mieux est sous-estimation délibérée des
dimensions qui échappe à l’action gouvernementale de son impact sur
l’opération publique.

• SECTION 4 : AFRIQUE TRADITIONNELLE

La circonscription géographique continentale ne peut pas nous


empêcher à recourir au droit comparé dans les autres continents, principalement
l’Europe qui nous a imposé la domination coloniale ou la théorie de la
dépendance, un mimétisme dû au triomphe de l’Etat en tant qu’institution de
référence d’organisation politique ().

Paragraphie 1. Droit infra – national

Existe – t – il un droit infra – national, c'est-à-dire un droit élaboré


par des groupes inférieurs à la société politique ? Sans doute pour l’antiquité la
question est douteuse, car la coutume familiale dans la mesure, ou très faible,
nous pouvons le connaitre, à Rome, en Grèce, chez le Germain n’apporteraient
pas la preuve d’un droit proprement infra – étatique pour autant que le gens, le
gerios, la sippe… exerce l’absence presque complète d’un Etat organisé de
fonction politique ().

L’on peut se demander si le groupement secondaire pouvait à


l’instar de l’Etat élaborer la règle juridique, pour le moniste qui réserve le
monopole à l’Etat ; la réponse est négative. Cette affirmation suppose une
société organisée, hiérarchisée avec une puissance politique bien définie qui
monopolise l’exercice de la contrainte, celle-ci étant nécessaire pour faire
respecter les normes légales. Elle suppose également des mécanismes de
transmission entre le pouvoir et les justiciables. Ainsi l’administration de la
justice ne peut s’exercer que par l’entremise d’agences spéciales, les tribunaux,
qui sont à la fois sources de droit et garants de son application. Le droit d’un Etat
ou de toute société d’êtres humains organisés, se composent des règles que les
tribunaux c'est-à-dire les organes de cette société énoncent pour déterminer les
droits et devoirs légaux. Le droit est entendu comme le contrôle social exercé par
l’application systématique de la force dont dispose une société politiquement
organisée.

Cette thèse fut réfutée vers les années 1940 par Hoebel qui pour lui
la loi est prérogative exclusive des Etats politiques qui s’exerce par le truchement
des tribunaux. Les structures formalistes et la constance des pouvoirs politiques
ou judiciaire importe peu. L’autorité indispensable pour imposer le respect des
normes légales, ressort avant tout de la force que lui procure la délégation, par
les membres d’une collectivité concernée, d’un privilège spécial, celui de
sanctionner les transgressions, ce privilège pouvant être attribué à un individu ou
à un groupe. Il peut s’agir d’un arbitre, d’un citoyen que l’on choisit et auquel on
reconnaît temporairement ou épisodiquement la qualité ou le statut de juge, ou
encore plusieurs personnes qui constitueront une instance d’arbitrage et de
jugement dont le verdict sera considère par les justiciables. Hoebel ne voit pas le
caractère absolu ou institutionnalisé de l’autorité mais plutôt l’influence
suffisante sur le groupe et les parties en litige pour que ses décisions soient
appliquées. C’est plus sur le consensus du groupe que repose l’autorité dans les
sociétés traditionnelles, que sur la puissance de son pouvoir, comme cela peut
être dans bon nombre de sociétés plus civilisées.

Les pluralistes estiment que tout au moins, tout groupement à son droit. C’est
ainsi qu’on peut trouver certaines règles juridiques dans les chefferies de
Kaponda, Monongo, Mwant Yav, Mwasthisenge, Bayeke, Yambo,
Ngomamburo, Kateya, etc.Par tout groupement humain, on peut généraliser cette
théorie à un club sportif, une société de commerce, un syndicat, une église, un
village. Les groupes secondaire demeurera un cadre tracer par le droit commun
ou la coutume, ses décisions s’y conformément.

Les sociétés traditionnelles ne connaissant pas l’écriture vive


nécessairement sous le régime du droit coutumier. Les coutumes, elles sont
nombreuses et variées. Cependant on peut leur reconnaitre des caractères
communs. La centralisation de l’Etat renforce la rédaction d’un texte légal, a
réduit le caractère oral. La coutume pour être applicable doit se conformer à la
loi. Contrairement à l’Europe où les coutumes fussent rédigées officiellement par
écrit perdant le caractère oral pour être contenu dans un texte écrit.

Paragraphe 2. Concept « traditionnel »

Le terme traditionnel suggère - t - il la référence à la coutume ?


Cette terminologie a un sens bien précis en droit. Elle est constituée d’un
élément matériel à savoir la répétition d’un comportement mais aussi d’un
élément psychologique, la croyance à son caractère obligatoire ou opinio–juris.

S’agit – il là encore des simples usages issus des différentes


normes de conduite en Afrique ? C’est qui sera un champ trop large pour être
reconnue dans le cadre de ce cours. En outre faut – il conclure cette étude dans
temps il s’agirait de déterminer jusqu’à quel point va être traditionnel d’une part
et, d’autre part commence le contemporain.

Sur le plan juridique « tradition » vient du : « traditio » mot latin qui


désigne la remise de la chose faisant l’objet d’un contrat. On dit également
« tradition » le terme ensuite « tradition réelle » fut remplacer par celle de
« remise de la chose » ainsi l’on pourrait dire dans un contrat de vente, (la
tradition de la chose) vendue.

En droit constitutionnel, on parle de la tradition républicaine que ne


peut être invoqué pour soutenir qu’une loi est contraire à la constitution que si
cette tradition a donné naissance à un principe fondamental reconnu par les lois
de la république avant le préambule de la constitution.

En religion « tradition » égale « doctrine » ou « pratique » (religieuse ou morale)


transmise de siècle en siècle originellement par la parole ou l’exemple mais
pouvant par la suite être consigné dans un texte écrit ().

Pour sa part J. Maquet voit dans le traditionnel le sens du passé. Il


ne fait même pas un équivalent de ce qui n’est pas venu d’ailleurs et qui a sa
racine en Afrique. Il y a lieu de préciser que restreindre le terme tradition à
l’Afrique serait abusif. Il s’agit là d’une restriction géographique. Il faut voir dans
le traditionnel ce qui est spécifique ou propre à chaque culture, continent ou
pays.
Exemple : la musique traditionnelle congolaise qui renvoie à la musique
folklorique de la République Démocratique du Congo. On peut aussi parler de la
tradition africaine ou américaine. En Europe par exemple à la fin de l’hiver, les
gens circulent dans toutes les rues avec des danses.

Le traditionnel prend parfois le sens du tribal et coutumier à la fois.


Kanyinda Lunsansa, renvoie l’expression « traditionnelle » aux institutions
étudiées chez « Baluba » du Sud Kasaï comme un ensemble tribal dont les
membres ont une même origine, une même histoire et un même territoire. Dans
cette étude sur la tradition orale il dit clairement que les traditions orales sont
tous les témoignages oraux et rapportés concernant le passé ().

S’inspirant de Georges Balandier, Louis Vincent Thomas et


Ferdinand Ngoma qui refusent de croire que le monde est divisé en deux camps,
l’un traditionnelle, qui embrassait alors le visage et les milieux ruraux, l’autre
moderne, qui engloberait les villes et les centres des productions industrielles.
Lorsque nous prenons l’exemple de la République Démocratique du Congo, les
deux milieux vivent en une certaine complémentarité. Ces réalités de la ville sont
dans les villages et celles des villages sont en ville.

Pour notre part, comprendre les institutions actuelles régies pour la


plupart par le droit positif. Il faut retracer l’évolution de ces institutions c’est le
champs du droit, des structures et des institutions traditionnelles qui dans
certains cas pose le sérieux problème de la dualité institutionnelle, telle que cela
ressort dans l’article 207 de la constitution du 06 février 2006.

« L’autorité coutumière est reconnue… »

• SECTION 4 : LES SOURCES DE LA RÈGLE DU DROIT

Terme générique, souvent employé, pour désigner l’ensemble des


règles juridiques applicables dans un Etat à un moment donné. Dans nos pays de
droit écrit, les principales sont des textes, tels que les traités internationaux, les
constitutions, les lois, les règlements ; mais d’autres, telles que la coutume, les
principes généraux du droit consacrés par la jurisprudence, parfois inspirée par la
doctrine des auteurs, jouent un rôle plus ou moins grand selon matière.

Paragraphe 1. Loi

Au sens strict dit aussi formel, la règle de droit écrite généralement


et permanente, adoptée par le parlement. Elle est une déclaration solennelle du
pouvoir compétent sur un objet de régime intérieur et d’intérêt commun. Elle est
obligatoire et exécutoire dans les limites du pouvoir dont elle donne. Il peut s’agir
d’une loi cadre, loi qui se borne à poser les principes généraux en laissant une loi
particulière ou un acte réglementaire émanant du pouvoir exécutif
(gouvernement) a déterminé les modalités d’application.

L’article 163 de code de l’ordonnance – loi n°82 – 020 du 31 mars


1982 portant organisation et de la compétence judiciaire disposait que les
tribunaux de police et les juridictions coutumières sont maintenus jusqu’à
l’installation des tribunaux de paix.

Paragraphe 2. Coutume

Règle qui n’est pas édictée en forme de commandement par les


pouvoirs publics, mais qui est issue d’un usage général et prolongé (répéitio) et
de la croyance en l’existence d’une sanction, à l’observation de cet usage (opinio
nécessitatis). Elle constitue une source de droit surtout dans nos sociétés
traditionnelles, elle détermine le mode d’organisation et de fonctionnement du
pouvoir.

La coutume s’adapte au progrès de changement de la vie sociale


parce qu’elle est un usage ou une habitude, elle est donc dynamique. Mais elle
est aussi incertaine ; variable, complexe et s’oppose parfois au changement. Il
s’agit là du des avantages dans ce sens qu’elle constitue un frein au
développement social. Elle dépend d’un clan, d’un tribut d’une ethnie ou encore
d’une province.

Paragraphe 3. Jurisprudence

Dans un sens ancien, science du droit. Au sens large, ensemble de


décisions de justice rendue pendant une certaine période dans un domaine du
droit ou dans l’ensemble du droit. Dans un sens strict, proposition contenue dans
les décisions rendues par les juridictions de rang supérieur, et présentant
l’apparence générale et abstraite. Dans sens plus restreint, ensemble des
décisions concordantes rendues par les juridictions sur les mêmes questions de
droit. En droit public, on parle volontiers des « jurisprudence prétorienne » pour
souligner le caractère créateur de la jurisprudence administrative et son rôle de
source très importante du droit administratif.

La jurisprudence peut se définir comme l’ensemble des décisions


suffisamment concordantes rendues par des juridictions sur une question de
droit. Elle n’est pas dotée d’une force obligatoire mais rêvée une importance
certaine par les éclaircissements apportés quant au domaine d’application d’un
texte juridique. Chaque affaire ou situation doit être considérée comme une
autre, même si les faits sont similaires ou très semblables.

Paragraphe 4. Doctrine

Elle est une opinion des auteurs qui écrivent dans le domaine du
droit. Par extension l’ensemble de ces auteurs. La doctrine se situe à la base des
sources du droit. Par extension l’ensemble des travaux de juristes (universitaires,
magistrats, praticien, conseil). Elle est dépourvue de la force obligatoire mais
contribue à l’évolution de la science juridique. Le rôle de la doctrine sera
d’importance inégale lorsqu’il s’agit d’articles de recherche, d’ouvrages généraux
au spécialisés. Cependant, de nombreux auteurs et praticiens s’accordent pour
reconnaitre à la doctrine deux rôles majeurs :

• Promouvoir une meilleure utilisation de textes existant par une vision


synthétique ou ordonnée du droit rendant cette discipline plus accessible ;

• Fournir un examen approfondi et critique du droit positif en mettant en


lumière la défaillance du système juridique et en proposant des solutions
d’amélioration.

Elle est une source du droit car elle étudie, examine, à la lumière de grands
principes juridiques, les lois et leur application dans la jurisprudence. Elle indique
leurs défauts, met en valeur leurs tendances, prépare la voie à des réformes et à
des améliorations éventuelles.

CHAPITRE II : STRUCTURES ET INSTITUTIONS DE L’AFRIQUE


PRÉCOLONIALE

• SECTION 1 : DIFFÉRENTES FORMES D’ORGANISATION SOCIO –


POLITIQUE DES SOCIÉTÉS PRÉCOLONIALES

Dans la société traditionnelle africaine, les relations sociales


s’établissaient autour des groupements des populations au détriment de
l’élément territorial qui a pourtant primé en Europe. Cet élément démographique
est considéré par de nombreux auteurs comme le plus déterminant des
conditions d’existence de la société politique en Afrique alors qu’en Europe, c’est
l’élément territoire qui l’emporte.

La prépondérance de l’élément population est l’origine de la


systématisation qu’on trouve auprès des premiers théoriciens de l’inexistence de
l’Etat en Afrique. Cette thèse repose sur le fait que certaines populations étaient
nomades alors que d’autres étaient sédentaires et établies de façon permanente.
Pour les populations nomades, il est rejeté automatiquement l’existence d’un
Etat qui ne pourra asseoir son monopole de contrainte sur les populations en
continuel mouvement car sans territoire fixe.

L’Afrique a été de tous temps traversée par des migrations de


peuples. Les raisons qui motivaient ces déplacements continus étaient
nombreuses : la terre cesse d’être fertile, on cherche des endroits plus viables,
des pâturages et des terrains à cultiver, la région cesse d’être giboyeuse, les
guerres, etc. Mais la désertification du Sahara, sa transformation lente de région
fertile et tempérée en désert qui a commencé vers 8.000 et qui s’est achevée peu
avant notre ère. La désertification demeure un facteur déterminant dans le
mouvement migratoire. Parmi les migrations africaines, celles des peuples bantu
révèlent un caractère particulier.

En prenant le peuplement primitif et les migrations africaines, les peuples


sont étudiés en tenant compte des différents courants migratoires que le
continent a connus depuis des siècles. Il sied de noter que parmi les populations
africaines, il existe celles sur lesquelles il est difficile d’établir l’existence d’un
quelconque mouvement migratoire. A titre illustratif, il y a des pygmées qui vivent
en petits ilots dans les forêts d’Afrique Equatoriale, au Cameroun,
au Gabon, en République Démocratique du Congo, au Centre Afrique, en
République Populaire du Congo et au Ruanda. Ils pratiquent essentiellement la
chasse et la pèche.

Paragraphe 1. Typologie générale des sociétés politiques

La société africaine a connu deux phases d’évolution, les sociétés


sans Etat et les sociétés étatiques.

• Les sociétés non étatiques

Par sociétés sans Etats, il faut entendre celles dont les structures
sont peu centralisées au sein desquelles la distribution politique dépasse
rarement le niveau du villageois. Elles sont fondées davantage sur la coopération
que sur la contrainte.

Le pouvoir dans les sociétés non étatiques, se caractérise par une


référence constante à la parenté. Dans ces sociétés sans écritures, l’expérience
est la seule garantie du savoir et de la sagesse. Le pouvoir est ainsi exercé par
l’ainé du groupe familial (ou clan). Dans ce système où règne le paternalisme des
vieux sur les jeunes qui s’appelle gérontocratie. Mais l’autorité du chef n’est pas
absolue, elle est limitée par les traditions et le conseil de famille. L’existence de
cette forme d’organisation introduit une forme de démocratie africaine.
• Les sociétés étatiques

Il s’agit des Etats constitués des monarchies constitutionnelles.


Dans ces monarchies on retrouve des fonctions étatiques telles la fiscalité, la
justice, le conseil et le roi.

La fiscalité : les impôts sont collectés en espèce ou en nature pour couvrir les
charges de la communauté.

La justice : la procédure est expéditive. Les peines sont très sévères à l’égard de
ceux qui rendent coupables des infractions prévues par la coutume (meurtre, vol,
adultère, sorcellerie, outrage contre l’autorité, etc.).

Le roi : considéré comme un souverain, un dieu et assimilé au soleil.

Les sociétés étatiques sont élaborées et présentent les clivages sociaux


suivants :

Les nobles jouissent de nombreux privilèges mais en contrepartie, ils assument


de lourdes responsabilités, combattre, entretenir la cour et jouer au mécène. La
noblesse ne s’achète pas, on nait noble et on meurt noble.

Les hommes libres qui constituaient les gros de la population et jouaient un


grand rôle dans les affaires d’Etats.

Les esclaves, cette catégorie était constituée des prisonniers de guerre ou de


condamnés. Ils jouissent d’un certain droit de propriété et sont très souvent
intégrés dans la famille dont ils sont la propriété collective.

Balandier propose une classification qui distingue les sociétés


africaines en sociétés à pouvoir minimal, celles à pouvoir diffus ainsi que les
sociétés sans Etat. Il s’agit pour cet auteur, d’accréditer la thèse selon laquelle en
Afrique, il existe ou a existé des sociétés sans État ().

• Les sociétés à pouvoir minimal

Ce sont des sociétés dites de subsistance, c'est-à-dire des sociétés


dans lesquelles l’homme est un être social obligé d’une part et doit remplir
certaines fonctions minimales de survie et d’autre part de respecter certaines
normes pour pouvoir vivre en société. A ce niveau, c’est le lien social qui marque
les rapports sociaux. Il fonde également le rattachement à la société politique.

• Les sociétés à pouvoir diffus

Pour Pierre Clastre et Jean William Lapierre, il s’agit des sociétés


systématisées, celles dans lesquelles le collectif l’emporte sur l’individuel. Le
pouvoir n’est pas encore très structuré et l’homme y est aliéné par rapport au
besoin collectif. C’est la soumission de l’homme à la société qui justifie le lien
politique.

• Les sociétés sans Etat

Dans les sociétés sans Etat, il existe une forme d’organisation


politique mais qui n’arrive pas au seuil de l’Etat parce que cette société ne
connait pas l’attribut de l’Etat : la souveraineté. Ce que Jean Bodin qualifie de
puissance souveraine.

Pour leur part E. Evans – Pritchard et M. Fortes classent les différents régimes
politiques de l’Afrique traditionnelle en deux grandes catégories : les régimes
politiques du groupe A et les régimes politiques du groupe B.

Ceux du groupe A sont formés des sociétés à l’Etat. Les sociétés à Etat sont
celles qui possèdent « une autorité centralisée : un appareil administratif et des
institutions judiciaires en un mot, on y retrouve le gouvernement, dans lesquels
les clivages de richesse, de privilège et de statut correspondant à la distinction
des pouvoirs et de l’autorité.

Les régimes politiques du groupe B sont des sociétés sans Etat. Ce


sont celles qui n’ont pas d’autorité centralisée, d’appareil administratif et
d’institutions judiciaires constitués, bref qui manquent un gouvernement, dans
lesquels, il n’y a pas de distinction tranchée de rang, statut et de richesse ().

Lucy Mair regroupe les différents régimes politiques en trois catégories : les
sociétés à gouvernement minimal, la société à gouvernement diffus et enfin la
société à gouvernement étatique.

Le gouvernement minimal est caractérisé par l’étroitesse de la communauté, la


faiblesse du pouvoir et de l’autorité.

Le gouvernement diffus est celui dans lequel les affaires publiques sont gérées
par l’ensemble de la population adulte en principe, mais dans cette société, en
fait, la gestion est assurée par quelques individus qui représentent l’ensemble de
la société.

Le gouvernement étatique est celui dans lequel le pouvoir politique est exercé
par des organes politiques différenciés.

Ensuite, selon certains français, comme Hubert Deschamps, il ne peut y avoir


plus que deux types d’organisations politiques, par exemple en insérant entre les
deux premières, les

chefferies, formes plus élaborées que les sociétés sans Etat. Il cite dans cette
catégorie des peuples comme Malinké du haut Niger, les Mende de Sierra –
léone, les Yoruba du Nigeria et les Bamileké du Cameroun.

Aussi, convient – il dans cette dernière catégorie d’organisation


politique, de relever l’exemple des sociétés politiques composées des
populations sédentaires qui vont se constituer en une chefferie, généralement en
application des considérations socio – économiques. La société sédentaire a
produit de ressources autour du chef. Ce dernier à la charge de redistribuer le
surplus tandis que les populations nomades ont des ressources essentiellement
produites par l’élevage ou du commerce. Ces ressources sont très souvent
personnalisées. Elles sont placées sous le contrôle d’un patriarche qui pourra
détenir un pouvoir politique au sein du groupe.

Par ailleurs, la plupart des populations nomades au nord du Sahara


ont une composante religieuse, le pouvoir du patriarche peut confondre avec
celui du Khalifat et jouir d’un pouvoir spirituel et temporel. Celle-ci se retrouve
dans certaines organisations politiques du sud du Sahara, soit au profit du chef,
soit en dualité avec une ligne familiale qui représente un tel savoir ; la plupart
des organisations politiques des peuples nomades sont de type guerrier car il
faut assurer la surveillance accrue pour protéger non seulement les populations
mais aussi la richesse principale : le bail.

De même de l’héritage précolonial, nous trouvons d’autres


institutions comme la parenté (la famille) et des institutions politiques du
règlement comme le dialogue et consensus. Dans la conception africaine, la
famille est une institution beaucoup plus large. Elle est créée et célèbre par le
mariage. C’est, en effet, autour de ce lien de sang et d’alliance que se constitue
la charpente de la forme d’organisation socio politique. Aussi bien par
rattachement progressif que par affinité familiale, il est constitué de clan, de la
tribu, de l’ethnie, etc.

Comme on peut le remarquer avec le Royaume Kongo entre XIVe et


XVe siècles qui s’était établi sur le plateau appelé Kongo. Le royaume atteignit
son apogée sous le règne d’Alphonso Ier 1506-1543. La réorganisation de la cour
congolaise était calquée sur le modèle portugais, Les chefs s’habillaient à la
portugaise. Le renforcement des relations entre le royaume du Kongo et Portugal
portait sur la religion, principalement le christianisme qui prit un grand essor, qui
se traduisit par la construction des églises et l’envoi des jeunes au Portugal pour
s’y instruire.

Malgré l’essor rapide du christianisme, l’action resta superficielle


dans le sens que la nouvelle foi n’y pénètre pas réellement. Les autochtones, en
effet, séduits par le rituel du culte et non par le dogme. La première
évangélisation du Kongo bien que prometteuse dès ses débuts et si riche en
développements ultérieurs, se termina ainsi tristement par un échec. Les raisons
qui expliquaient cet échec étaient nombreuses entre autres petit pays à faible
densité de population, le Portugal n’envoyait au Kongo qu’un nombre infime de
prêtres dont la plupart avaient un niveau intellectuel et moral très médiocre.
Ceux-ci étaient tentés par les possibilités commerciales qu’offrait le trafic des
esclaves. Tous y étaient plus ou moins compromis. Les prêtres envoyés au
Kongo n’étaient pas initiés à la problématique de l’inculturation du message
chrétien. Ils n’adaptaient pas leur enseignement au milieu culturel kongolais.

Ensuite l’enseignement, une école fut construite dans la capitale


pour la formation des fils de notables.

Le commerce ; il s’agit pour les portugais surtout du commerce des esclaves


vers Sao Thomé et le Brésil. Ce commerce fut organisé sur la base de monopole
de manière à éviter les intermédiaires.

Pour ce qui est de l’organisation politico-administrative, le royaume était


subdivisé en six provinces qui à leur tour en districts et ceux-ci en villages. A la
tête du royaume régnait le roi qui était choisi parmi les membres de la famille
royale selon la coutume matrilinéaire par un collège électoral de neuf à douze
membres, une monarchie élective et en même temps héréditaire.

Le royaume Kuba, les bakuba vivaient à la limite de la cuvette congolaise


entre le Sankuru au Nord, le Kassai à l’Ouest, la Lulua au Sud. L’histoire de ce
peuple remonte depuis XVe siècle au moins et du fait que l’art de la sculpture et
de la décoration. Comme dans la plupart des royaumes négro-africains, le roi
était de caractère divin, quoique disposant de pouvoirs étendus, il ne faisait pas
ce qu’il voulait. Son pouvoir était limité et contrôlé par un conseil d’Etat composé
de tous les gouverneurs de province. Le roi était considéré comme le possesseur
de tous les biens du royaume. Sa personne était sacrée et entourée d’un rituel
complexe. Le roi ne doit pas toucher le sol de ses pieds ni manger en présence
des femmes. Il n’a pas le droit de verser le sang, donc de commander ces
armées en guerre.

Le roi était secondé par un conseil du gouvernement comprenant six hauts


fonctionnaires entre autres le maitre de trésor, le premier ministre et juge
suprême. Les membres du conseil du gouvernement étaient choisis dans le clan,
mais les autres clans du royaume peuvent être également représentés.

La société comptait plusieurs classes : noblesse, hommes libres et


esclaves. La détention de la richesse n’est pas un facteur déterminant pour faire
partir d’un groupe donné, un esclave pouvait posséder des biens et
éventuellement parvenir à s’affranchir, de même certains nobles pouvaient être
plus pauvres que des gens de la classe des hommes libres.

Le roi était représenté à la tête de chaque province par un gouverneur. Les


gouverneurs étaient nommés par le roi dans les provinces du noyau central, dans
les autres provinces, la désignation se faisait suivant les coutumes propres de
chaque région, mais le choix devait être ratifié ou confirmé par le roi.

Les finances, la première et la plus importante des obligations des


gouverneurs envers le roi étaient de recueillir les impôts. Le trésor royal était
alimenté par les impôts que percevaient deux fois par an les gouverneurs de
province. Ces impôts consistaient en ivoire, esclaves, tissus de raphia, vivres,
chèvres, vaches, armes, nattes et peaux, etc. Des tributs imposés aux royaumes
vassaux, des taxes douanières et des revenus provenant de la vente de sel dont
l’extraction et la vente de sel faisaient l’objet d’un monopole royal. Les
coquillages servaient de monnaie et étaient également une propriété royale.

L’économie du royaume Kuba reposait sur l’agriculture dont les


principales ressources étaient le millet, les ignames, les haricots, les courges, les
bananes et les palmiers, l’élevage, celui du petit bétail : chèvres, porcs …, les
richesses minières dont le cuivre et l’or ainsi que la traite des esclaves, base du
commerce. Au XVIIIe siècle, les Bakuba intensifièrent leurs relations
commerciales avec les Lunda, les Tchokwe et les Ovimbundu de l’actuel Angola.

S’agissant de l’empire Lunda, celui-ci était constitué d’une confédération


des peuples et non une nation homogène. Le terme lunda signifie d’ailleurs
amitié et date du XVIe siècle. Chez le Lunda comme en bien d’autres royaumes
négro-africains, la personne du souverain est sacrée et entourée d’un respect
religieux. Il doit être choisi parmi les fils du roi défunt par un conseil restreint. La
capitale est établie à Musumba. En 1885, l’empire Lunda fut envahi par les
Tchokwe et sous l’occupation coloniale et fut partagé entre le Belgique,
l’Angleterre et le Portugal.

Le royaume Luba était compris entre le haut lomami et le haut lualaba, au


niveau du lac Kisale et Upemba. La création remonte au début du XVIe siècle par
un héros mythique appelé Kongolo. Ilunga Mbidi succéda à Kongolo et l’empire
s’étendit jusqu’au Maniema au nord, à l’Ouest jusqu’à Mbuji-Mayi, à l’Est jusqu’au
Tanganyika et au Sud jusqu’aux sources du Zambèze. Il sied de faire remarquer
que l’histoire des baluba était caractérisée par des luttes fratricides et des
assassinats. Le souverain Luba était un excellent administrateur. Il avait des
fonctionnaires hiérarchisés choisis parmi les membres de sa famille Balopwe.
Les plus importants étaient le premier conseiller, le ministre des finances et
chargé de maintenir la concorde à la cour.

Aujourd’hui à l’heure de la mondialisation tous les problèmes


d’organisations politiques que la République Démocratique du Congo connait,
amènent certaines études africaines à opposer l’Etat ethnie à l’Etat nation. Un
autre critère de séparation est d’ordre linguistique. Les études ont été menées
par J.Vansina, mais elles sont encore insatisfaisantes en matière d’ethnographie
congolaise. Son étude divise les cultures congolaises en quatre grands groupes :
les cultures de la savane septentrionales, les cultures de l’Afrique équatoriales,
les cultures de la savane méridionale et les cultures du graben africain. Le
référentiel linguistique constitue une unité fondamentale des cultures
congolaise.

Le critère linguistique par exemple, peut voiler l’histoire


traditionnelle de peuple comme dans les cas de Kwango Kasaï et de kaonde et
de Basanga. Ces deux derniers notamment, tout en entrant dans la sphère
linguistique luba, dérivent en réalité de la fusion d’émigrants d’Round et de
Baluba Shankadi et la part prise par les immigrants Around sur le plan
institutionnel.

Lorsque on parle de la typologie des institutions politique traditionnelle du


Congo on recourt à des nombreux critères de séparation tantôt, les facteurs
d’ordre linguistique, tantôt les facteurs d’ordres culturel, tantôt aux facteurs
d’ordres migratoires et d’ordre politique.

Paragraphe 2. Typologie fonctionnelle des sociétés politique africaines

Jacques Marquet rassemble les sociétés africaines en cinq


civilisations correspondant chacune à une aire géographique. Chacune de ces
civilisations se particularisent par son économie, sa culture. Par rapport à notre
enseignement ce qui nous intéresse est l’organisation sociale. La
classification de Jacques se présente de la manière suivante:

• La civilisation de l’arc qui s’appliquerait aux peuples chasseurs et


récolteurs ou cueillette tels que les pygmées et les bochimans. Les
bochimans ou bushmen habitent actuellement une région semi
désertique ;

• La civilisation de clairière qui regroupe les agricultures itinérantes de la


forêt humide ;

• La civilisation des guerriers engloberait les agriculteurs de la savane


méridionale ;

• La civilisation de la lance qui unit les pasteurs des hauts plateaux de l’Est
de l’Afrique ;

• La civilisation des cités que partagent les artisans et les marchands de


l’Afrique de l’Ouest.

Cette typologie parait déroutante du point de vue de la science


politique mais nous permet de mettre en évidence une véritable typologie des
modes d’organisation socio – politique. Certaines populations vivent en bandes
sans unité territoriale permanente. La coordination des comportements aux fins
de l’action collective se fait donc par les biais du groupe familial. La parenté
conditionne et détermine l’organisation politique et sociale. Les luttes fratricides
se résolvaient par le démembrement d’empires africains durant la période pré –
coloniale.

Seules, certaines monarchies qui établissaient clairement les règles


en matière de succession. Ces monarchies disposaient des structures et
institutions stables facilitant la dévolution du pouvoir, ont été également
préservées par leurs structures et institutions sociales.

Les fonctions sociales avant la colonisation étaient essentiellement


fondées en Afrique sur des rôles de parenté. Ils sont définis par la position que
l’on occupe au sein du groupe. Ce lien de rattachement est lui – même défini par
rapport à un ancêtre commun. Le groupe de parenté s’organise donc par filiation
en privilégiant le plus souvent, selon le cas soit, le système matrilinéaire soit
encore le système patrilinéaire. Avec le temps, l’organisation socio – politique
sera étroitement liée au mode de production.

Formellement, ces chefferies peuvent connaitre des grandes


variations dans leur étendue au cours de l’histoire. Cette organisation politique
de base en Afrique noire fonctionne sur un territoire isolé. Il est ainsi limité à un
ou quelques villages. D’autres, au contraire, se solidarisent sur un modèle de type
fédéral souvent consécutif à un processus de conquête. D’autres enfin s’unifient
pour s’apparenter à l’Etat.

Pour la civilisation de la lance, elle caractérise le peuple pasteur de


l’Afrique orientale et dont l’économie repose sur la détention du bétail. Sa
détention constitue une richesse économique qui doit être protégée d’autant plus
qu’elle est fragile. La détention d’un bétail exige les conditions de vie imposent,
pour garantir la survie du groupe, une forte ou des points d’eau. Pour sa
protection le groupe doit se doter des moyens pour faire face à toutes menaces
éventuelles ou agression extérieure.

Il en résulte la constitution des communautés fortement


homogènes et faiblement stratifiées. Les classes d’âge qui caractérisent
fréquemment ces sociétés participent, contrairement à ce que laisserait
supposer une analyse spontanée, à cette homogénéité en institutionnalisant la
finalité sociale. Loin d’être des groupes hermétiques se reproduisant pour eux –
mêmes, les classes d’âge officialisent la rotation dans les fonctions sociales
nécessaires à la société globale ().

La caractéristique fondamentale qui différencie la société


sédentaire de celle nomade, il n’est pas organisé une hiérarchie claire, il est
plutôt institué une rotation malgré les classes d’âge. Dans les autres civilisations,
chaque classe d’âge à sa fonction. Les membres des sociétés politiques
organisés autour de cette civilisation sont liés par un fort sentiment
d’appartenance et de solidarité. L’individu est simultanément en relation avec lui
– même et avec l’ensemble du groupe.

Basue Babu Kazadi donne un exemple de Kikuyu au Kenya, il est à


noter qu’au sein de cette société, il existe une stratification sociale :

• On accédait à l’initiation à l’âge de 18 ans ;

• On devenait guerrier pour protéger la société entre 18 – 40 ans ;

• On était considéré sage à plus de 40 ans. Ce qui ouvrait la voie à l’exercice


des fonctions de conseiller.
Les classes d’âge instituent une division fonctionnelle des tâches
auxquelles chacun avait accès au cours de sa vie. Certes, une telle harmonie,
également proposée par les philosophes grecs de l’antiquité, n’est pas
inébranlable. En effet, l’homme a ses appétits, quand bien même, la société tient
à le forger, il faut plutôt institutionnaliser le pouvoir, comme le voulait
Montesquieu, puisse arrêter le pouvoir ().

Quand l’histoire a mis en relation un peuple des pasteurs et celui


d’agriculteurs, cette fusion fait germer un système social hiérarchisé basé sur la
domination des pasteurs sur les agriculteurs, au point de donner naissance à un
régime quasi féodal principalement dans la région de grands lacs. Il ne s’agit pas
tellement de culture mais de pouvoir d’échange, de possession à telle enseigne
que cet équilibre n’étant pas automatique, elle peut être renversée à tout
moment. A cette considération, il s’ajoute le fait que la civilisation soit
contingente dans le temps et dans l’espace. Elle peut subjectivement être
intégrée par un membre d’une composante adverse.

La population des Grands Lacs, qu’on retrouve entre les lacs Albert,
Edouard, Kivu, Tanganyika à l’Ouest et le lac Victoria à l’Est, fut de bonne heure
une zone de fort peuplement à cause de la fertilité des pentes montagneuses, du
climat, d’absence de la mouche tsétsé. Les populations des Grands Lacs
comprennent les groupes suivants : les cultivateurs bantu, les Chamites et les
pygmées. Les pygmées furent les premiers à s’y installer, ensuite vinrent les
vagues successives des bantu cultivateurs et les chasseurs bahuu ou bahutu et
enfin arrivèrent du Nord-Est des pasteurs Chamites appelés Bahima ou Batutsi
qui parvinrent à subjuguer les deux premiers groupes et formèrent des royaumes
au XVIIe siècle (du Buganda, du Bunyoro, de Nkole, du Rwanda, du Burundi).

La civilisation de cité dispose, quant à elle, d’une économie fondée


sur l’exploitation des ressources naturelles ainsi que sur leur commercialisation
principalement vers l’extérieur. Ainsi, le royaume de Ghana créé vers l’an 300,
fondera sa prospérité sur la transformation et la détention de l’or. La plus
précieuse source des richesses qui faisait la réputation de cet empire était l’or.
Cet or était échangé contre le sel, les étoffes, le cuivre, les dattes et les figues.
Outre l’or, les maghrébins emportaient vers la méditerranée, de l’ivoire, de
l’ébène, des plumes d’Autriche et des esclaves à l’époque où la machine était
inconnue, étaient la source principale d’énergie.

Les importations de l’or et l’exportation du sel et du cuivre étaient


lourdement taxées. Les impôts payés par les provinces et les royaumes l’étaient
généralement en nature : mil, riz et le coton.

La société comprenait trois classes : les riches, les paysans libres et les
esclaves. La famille étendue était la cellule première, formaient des clans ayant
un ancêtre commun ou un même interdit ou tabou. La religion était animiste et
l’islam

L’empire du Mali quant à lui, augmentera sa puissance dans les


échanges commerciaux, grâce à sa position stratégique. L’empire du Mali devint
prospère grâce aux mines d’or du Bouré, de Bambouk et Galam, aux mines de sel
de Teghazza, aux mines de cuivre de Tadmekka et au grand commerce
transsaharien. Cette prospérité engendra l’essor des villes dont les principales
furent Oualata, Tombouctou, Djenné et Niani. Outre les richesses minières,
l’empire percevait des impôts directs (sur les récoltes et les bétails), des taxes
sur tous les produits importés et exportés, ainsi que les tributs des vassaux et
les butins de guerre. Plusieurs produits servaient de monnaie : l’or, le cuivre et les
cauris. La société avait peu changé dans ses structures sociales, la famille
étendue restait la base de l’organisation sociale. A côté de l’organisation tribale,
qui subsistait en campagne, une nouvelle classe aristocratique, composée de
grands dignitaires administratifs, politiques et militaires, des lettrés musulmans,
se dégageaient de la masse du peuple.

Les sociétés politiques sédentaires sont divisées en deux groupes.


Il découle de ce dualisme un clivage opposant les villages aux cités. Les villages
sont organisés autour des activités agricoles qui sont la principale source de
denrées diverses essentiellement alimentaires. Les villages assurent aussi la
main – d’œuvre pour la ville. Les paysans connaissent parfois la domination des
citadins qui sont majoritairement commerçants.

L’unification socio – politique ne se traduit pas nécessairement par


une intégration économique. En effet, l’intégration économique ne donne pas
toujours une intégration politique. Les identités paysannes et urbaines même
sous l’autorité d’un même souverain peuvent être largement dissociées. La zone
soudanaise présente une gradation des systèmes socio – politique reposant sur
une intégration poussée ou au contraire sur une indépendance affirmée des
composantes urbaines et paysannes, les unes par rapport aux autres. C’est en
définitif dans les cités de l’industrie ou celle de l’administration y compris l’armée
qui ont prévalu dans les cités modernes et ont configuré la stratification sociale
dans les jeunes Etats africains.

• SECTION 2 : LA RECHERCHE DE L’ETAT

La recherche de l’existence d’un Etat pendant la période pré –


coloniale a fait l’objet des analyses politiques et juridiques africanistes. C’est qui
a poussé des auteurs comme A. Southall à chercher pour l’Afrique des situations
intermédiaires où l’on retrouve certains traits définissant l’Etat et d’autres
rappelant les structures des sociétés sans Etat. Si l’on dichotomise, comme c’est
le cas pour les anthropologues, les sociétés africaines précoloniales en sociétés
étatiques, d’une part, et en sociétés dites acephaliques, anarchiques ou
a-etatiques, de l’autre, on se trouve à tracer une frontière entre les groupes
ethniques qui possèdent les critères de droit déjà mentionnés comme une
autorité politique supérieure et tribunaux, et ceux que l’on peut considérer, à tort,
comme sans loi. Il s’agit en fait d’une dichotomie sur laquelle on retrouve, à une
extrémité, des groupes ne bénéficiant d’aucune forme du pouvoir central et, à
l’autre, des communautés fortement hiérarchisées et formant des royaumes.

Paragraphe 1. L’Etat pré – coloniale

L’existence de l’Etat pendant la période pré – coloniale a pendant


longtemps partagé la doctrine entre les tenants et les détracteurs de cette
éventuelle existence. Ce sujet controversé est dû aux difficultés rencontrées
dans l’analyse qui sont dues essentiellement au triomphe et l’enracinement d’un
modèle d’Etat occidental. Les opposants de l’existence de l’Etat en Afrique
retiennent à charge des organisations politiques africaines d’abord l’absence des
traditions étatiques qui nourriraient le refus de la prise en compte de la
souveraineté comme attribut de l’Etat. Pour la plupart d’auteurs européens, la
perfection des institutions étatiques internes est l’élément principal permet de
distinguer l’Etat des autres collectivités politiques. En effet, dans la société
interne, il existe une distinction entre les gouvernants et les gouvernés.

L’existence des liens entre les peuples qui avaient des


caractéristiques ethniques ou linguistiques, des origines communes formaient
un même peuple. Ces populations étaient divisées en Etat. Une même tribu
pouvait être séparée en plusieurs Etats, malgré leurs affinités. Les gens des
races différentes, réunis par l’œuvre d’un conquérant pouvaient constituer un
seul Etat, suivre des destinés communes, les groupes soumis se sentant
patriotes de la nouvelle combinaison politique que leurs conquérants.
Une grande diversité régnait dans les formes de gouvernement de
ces Etats. La parentèle constituait la cellule sociale et le clan la cellule politique.
Ces groupements familiaux possédaient une grande cohésion, un esprit de corps
qui rendaient indestructibles la cohésion sociale et politique. Ils protégeaient
jalousement leurs prérogatives, et limitaient ainsi fortement la compétence du
gouvernement. L’autorité centrale devait respecter l’autonomie ou
l’indépendance des groupes. Dans cette organisation les clans ont su préserver
leur indépendance au point d’empêcher la naissance des nouvelles
souverainetés. Ils vivaient vaguement un régime fédéré, en régime communiste,
le gouvernement produit était issu du système clanique, une monarchie affaiblie
par la nature même de l’autorité.

Dans certains autres groupes, on y trouvait la nécessité de


coordonner les efforts, on écartait toute formule permettant au souverain
d’exercer personnellement une autorité forte. Cette forme de gouvernement
démocratique instituait des mesures de contrôle et des systèmes spéciaux de
transmission de pouvoir, une expression coutumière voisine de la république.
Enfin les conquêtes, les usurpations, l’appui de l’étranger, faisaient naitre des
souverainetés autoritaires.

L’organisation du pouvoir politique correspondait à quatre types de


gouvernement.

Le communisme

D’après Antoine Sohier, La forme de l’Etat en termes de


communisme caractérise une nation formée d’une juxtaposition de groupements
unis tout simplement par un lien fédératif plus ou moins vague et sans pouvoir
central. Contrairement à ce qu’on peut constater dans la forme de l’Etat
communiste, on y trouve au contraire un gouvernement autoritaire extrêmement
fort. D’après la doctrine léniniste, le passage du socialisme au communisme se
remarquera par un dépérissement de l’Etat, une théorie qui a été contredite par
l’évolution de l’histoire. Le communisme était le régime politique d’une grande
partie de la République Démocratique du Congo. Les clans qui constituaient une
organisation politique étaient constitués d’un groupement des parentèles qui
jouissaient de la plus grande indépendance réciproque. Chaque clan était sous
l’autorité de son ancien, et il n’existait aucune autorité supérieure au-dessus de
l’ancien.

Les groupes avaient la conscience de former un Etat dont le lien était la


communauté d’origine et d’intérêt, cette conscience commune était à la base de
leur fédération, confirmée par des accords plus précisés au cours des temps.
Cet Etat avait un seul organisme commun (gouvernement ou direction) qui se
réunissait périodiquement pour débattre des questions d’intérêt général et la
conciliation des intérêts divergents existant entre eux. Les réunions du conseil
des anciens se tenaient tantôt dans une localité, tantôt dans l’autre, par crainte
de transformer un siège permanant en capitale. Toute réunion exigeait un
président, on évitait de designer le même président plusieurs fois, de peur que
cette présidence ne se transforme en pouvoir durable, à vie ou héréditaire.

Le pouvoir du conseil des anciens était en théorie illimités, il concentrait


toutes les fonctions de l’Etat. Il décidait ou négociait la guerre, jugeait les
différends que les membres de la communauté lui soumettait. Il possédait un
pouvoir législatif qui consistait à prendre les décisions obligatoires pour tout le
peuple.

Sur le plan pratique l’autorité du conseil des anciens était limitée par le fait qu’il
ne disposait pas des organes nécessaires pour l’exercice du gouvernement, et
leurs membres veillaient avant tout à préserver l’autonomie du clan qu’il
représentait. L’unanimité était nécessaire pour qu’une loi s’impose à tous les
groupes puisqu’il n’existait pas de moyens de contrainte pour les dissidents
éventuels. Les luttes entre clans étaient fréquentes (la guerre restait le moyen
final de se faire justice).

Pour ce qui est du pouvoir judiciaire, il n’y avait pas un tribunal commun
supérieur. Chaque clan avait son tribunal et ses juges, qui jouaient surtout le rôle
de conciliateurs. Mais lorsque le litige opposait les gens de plusieurs clans, et
que la conciliation échouait, l’affaire était jugée par le tribunal du clan du
défendeur, mais on appelait à y siéger des juges de clans amis de deux parties.

Le danger que présente ce système politique est la fragilité du pouvoir,


qui pouvait être envahi par tout conquérant qui possédait une organisation
militaire et un véritable gouvernement. Mais il faut reconnaître quelle que fut
l’emprise de l’occupation, les clans et surtout les parentèles restaient
indestructibles parce qu’ils étaient unis par le lien de sang. C’est ainsi que la
colonisation par la tentative de nomination de chef de secteur sans l’appui du
conseil des anciens, sans réserver à ceux-ci leur large pouvoir législatif et
judiciaire, avait connu des tyrannies, des difficultés, des résistance de la part de
la population.

Les monarchies

Le souverain est considéré comme le père du groupe, ayant


recueilli la force du fondateur. Il est vénéré à ce titre. Son clan a une préséance
fondée sur le respect, et peut en arriver à former une véritable aristocratie. Mais
les autres clans se considèrent comme étant presque ses égaux, leurs anciens
sont des pères juridiques secondaires, et leur conception de la nation est celle
d’un Etat unifié qu’une fédération. Le pouvoir du souverain unique héréditaire
pouvait naître du régime clanique de plusieurs manières :

La première hypothèse, un Etat pouvait naitre du développement


d’une parentèle, étendue jusqu’à devenir un clan, qui lui-même prenant de
l’extension, se fragmente en sous-clans, puis en clans, jusqu’à devenir une tribu,
dont le chef est le successeur du fondateur. Dans cette expansion, elle a pu
s’augmenter en assimilant des voisins vaincus ou des clients. Dans cette
hypothèse le souverain est considéré naturellement comme le père de tout le
groupe.

La deuxième hypothèse, c’est le régime communiste fournit un


souverain, lorsque une personnalité plus forte, ayant rendu, notamment en cas de
guerre, des loyaux services ou des services spéciaux, parvient à se maintenir au
pouvoir, au sommet de l’Etat, et en associant son fils au pouvoir et à rendre le
pouvoir héréditaire. Mais bien que souverain, le conseil étant formé de ses pairs
qui siège auprès de lui, chefs d’autres clans, ceux-ci limitent singulièrement son
autorité.

La troisième hypothèse, un certain nombre de clans se séparent


d’un groupe sous la direction d’un ancien, un aîné et partent à la recherche de
nouvelles terres. Les causes peuvent être l’insuffisance de l’ancien territoire, le
mécontentement ou la dissidence. Le chef de la migration devient naturellement
souverain du nouvel Etat. Le chef ayant créé l’Etat nouveau, est le père, et ses
compagnons, anciens de clans aussi au même titre que lui, deviennent un conseil
où primus inter pares. Ses conseillers visent avant toute chose la protection de
l’autonomie de leurs clans.

La règle de la dévolution de la souveraineté se fait comme dans le


système de la parentèle. La succession est faite en ligne horizontale c'est-à-dire
de l’aîné au cadet avant de passer à ceux de la génération suivante. En principe
c’est les membres de la même génération qui accède tous au pouvoir, cette règle
de la dévolution n’est pas automatique, l’aîné n’est pas un héritier présomptif de
droit, les différents membres de la même génération sont des successeurs
potentiels au pouvoir. Le conseil des anciens choisit entre eux, celui qui est apte
qui réunit en lui certaines qualité d’un chef ou celui qui offre des gages d’une
politique qui leur soit favorable. C’est ainsi qu’un aîné pouvait être écarté au
profit d’un cadet considéré comme apte. On se trouve en face d’un pouvoir
aristo-monarchique pour emprunte l’expression de Grevisse qui se fonde à la fois
sur l’hérédité et sur l’élection.

Ce choix se fait généralement au décès du chef, souvent la


désignation est provisoire. Un stage est imposé au candidat. Les insignes de
souveraineté qui sont des marques distinctives de dignité ou d’une fonction, lui
sont remis deux ou trois ans après (hache, tambour, coquille, bracelet royal,
couteau royal à double tranchant, couronne royale, petits anneaux en fils, peau de
lion, éventail royal fait de la queue d’une espèce d’antilope, fauteuil royal, etc.).
Tant qu’il n’a pas encore reçus, un autre choix peut intervenir si le conseil des
anciens n’est pas satisfait de son gouvernement.

Il arrive aussi que le chef propose de son vivant un successeur


présomptif, il ne peut pas imposer le choix, il doit le designer parmi les
successibles et obtenir l’accord du conseil de anciens. Si celui-ci approuve, le
chef associe le successeur présomptif au pouvoir pour lui permettre d’être initié
à la gestion des affaires publiques et lui donner une autorité facile lors de la
succession.

On remarquera avec l’évolution des groupes, le clan s’est scindé en


sous-clans multiples, dont les frères juridiques du chef sont des anciens. A
chaque changement de règne le pouvoir se transmet généralement d’un clan à
l’autre. Le souverain est à la fois chef de l’Etat et chef de son propre clan. Celui-ci
ne peut que compter sur sa parentèle pour un dévouement à toute épreuve.

Une autre conséquence de la succession horizontale, après


plusieurs générations, il peut être difficile de déterminer le véritable successeur,
ayant droit de la souveraineté. Cette difficulté résulte de la polygamie suite au
concours entre les fils des différentes épouses du chef. Aussi, il se crée des
parentés fictives au tour du chef. Lorsque l’unanimité n’est pas produit pour le
choix parmi les successibles, les perdant et leurs partisans fomentent des
intrigues. Dans cette confusion surgissent parfois des simples chefs de
parentèle prétendant comme des véritables successeurs de l’ancêtre commun.
On assistait à des guerres interminables, les gens se dressant les uns contre les
autres les différents clans dans une même tribu.

Mais il arrivait aussi que le chef soit le plus puissant pour


consolider le pouvoir dans sa descendance, il faisait accepter la succession
verticale, en ligne directe qui passe du père au fils ou de l’oncle au neveu. Il
s’agissait d’une monarchie forte et stable, mais cela n’empêchait pas toujours
des intrigues, des contestations, des révoltes ou des assassinats.

Dans le régime monarchique le chef est considéré comme un


successeur de l’ancêtre commun, soit de tous les habitants, soit de l’aristocratie.
Il est vu comme celui qui a recueilli la force de cet ancêtre. Il est le père de tout le
peuple, celui qui lui transmet la puissance du fondateur, il renferme le caractère
sacré : il est le prêtre, le fécondateur du sol, le juge. Il concentre tous les pouvoirs
de façon illimitée, il peut disposer de tous ses sujets (enfants, femme, chose,
etc.). Cette conception philosophique se constate par des marques religieuses
de respect, de dévouement et de vénération. Cette conception a fait du
monarque de chef absolu au pouvoir personnel et droit divin.

Lorsqu’on analyse ce système, on remarque le pouvoir du souverain


lui vient par le haut et par le bas, par la naissance et par le choix ou la
reconnaissance par le conseil des représentants du peuple. La réunion de deux
éléments est nécessaire pour avoir une légitimité. Le pouvoir du monarque n’est
pas absolu, il est limité premièrement par la nature paternelle et deuxièmement
par une sorte de constitution non écrite qui lui fait l’obligation de respecter les
traditions fondamentales de la nation et les conditions de reconnaissance par les
anciens. Le pouvoir du souverain lui vient de la nation en passant par les
représentants et tous les clans ont à l’égard du souverain l’obligation de fidélité
et d’obéissance. Mais il faut reconnaitre que l’autonomie des groupes familiaux,
les pouvoirs héréditaires des chefs de clans, des dignitaires et des chefs de terre
qui sont des titulaires de certains démembrements de la souveraineté limite
aussi les prérogatives du gouvernement du monarque.

Les républiques

Dans certains groupes, le souverain n’est pas héréditaire, mais


choisi. Son mandat a une durée limitée. Ces régimes sont divers et leurs
constitutions sont assez compliquées. Le chef est élu librement par le conseil
des anciens. Le choix est limité aux membres de certaines familles (suffrage
indirect). Les fonctions sont plus ou moins héréditaires, à côté du chef et des
dignitaires sont placés des contrôleurs qui surveillent leurs actes. Ce système
est différent du système parlementaire par le fait que contrôleur ne peut en
aucun cas accéder aux charges lui-même, il n’a donc aucun intérêt de renverser
le titulaire. Les études menées sur ce système montrent qu’il est né du
communisme, ayant compris les faiblesses et désire un gouvernement moins
rudimentaire, mais l’empêchant de devenir trop tyrannique et de vinculer
l’autonomie des clans. Il constitue aussi une réaction démocratique contre un
gouvernement aristocratique trop fort et les anciens eux-mêmes.

Ce régime est démocratique parce qu’il limite les droits du


souverain comme constituant une réaction contre le pouvoir des conseils
héréditaires. L’autorité des souverains issus du régime clanique a toujours été
très restreinte, les chefs de clans, les grands seigneurs accaparaient le
commandement effectif. Les confréries substituent à cette oligarchie une classe
de gouvernants plus largement ouverte, basée sur la valeur effective. Les chefs
loin de s’opposer au régime nouveau, ils se sont les premiers membres de la
fraternité pour rechercher une protection eux-mêmes contre les anciens.

Les gouvernements issus des conquêtes

La conquête engendre généralement des gouvernements forts. Les


migrations armées étaient souvent pacifiques, résultant d’accords avec les
voisins. Une invasion pouvait avoir lieu par infiltrations à l’exemple des Baluba.
Un groupe pouvait marcher avec les armes en main pour s’implanter sur un
territoire déjà occupé. Il s’agissait d’une démarche qui associait la diplomatie et
la force. Cette démarche exigeait un commandement ferme, une cohésion et une
discipline. L’histoire montre qu’en dehors des Bantous, les autres peuples y
parvenaient grâce à leurs formations sociales ou leurs industries. C’est l’exemple
des peuples qui avaient l’art pastoral qui leur donnait ces aptitudes au
gouvernement.

Les conquérants se répartissaient sur le territoire et y maintenaient


leur domination, soit en conservant une formation militaire, soit en s’installant
aux principaux points stratégiques et en organisant une administration forte pour
maintenir la domination. Les guerres de conquête, comme en principe toute
guerre, se termine par un traité entre parties aux clauses très précises et très
développées. Souvent des otages étaient le gage de son exécution, des alliances
le signent pour le rétablissement de la paix, mais en général, c’est l’imposition du
droit du vainqueur.

Les conquérants ne visaient pas dans sa démarche d’uniformiser


les formes politiques et assimiler le territoire conquis, pour la bonne raison, ils se
heurtaient à la solidarité clanique, craignaient les esprits tutélaires des peuples
soumis à l’ordre social seraient mieux assurés par un climat de coopération. Ils
laissaient à leurs nouveaux sujets leurs chefs et leurs coutumes, se bornant à les
surveiller, leur imposer quelques règles, et assurer certains services par leurs
propres fonctionnaires, en exigeant surtout des tributs et des prestations. Bref, il
s’agissait d’une administration indirecte. L’Etat se trouvait ainsi divisé en deux
classes, le souverain et l’aristocratie dominante d’une part, les vassaux dominés
d’autre part. Le droit administratif des groupes vassaux est fortement influencé
par celui des dominateurs, le droit privé des conquérants assimile de
nombreuses règles des sujets, parfois c’est la langue des vaincus qui est
adoptée plus que celle-ci n’est modifiée par eux, parfois les nobles prennent les
femmes de vassaux mais eux refusent à leur tour de donner leurs filles ou leurs
sœurs à ceux-ci.

Goran Hyden () fait remarquer que dans les sociétés africaines, le


principe explicatif central de la politique en Afrique, à l’exception de l’Éthiopie,
l’existence des sociétés qui n’ont jamais développé par elles – mêmes des
systèmes étatiques élaborés. La principale raison d’après cet auteur est due à la
prépondérance du mode de production qui a limité les possibilités d’émergence
des véritables superstructures. Le royaume d’Axoum et la naissance de l’Ethiopie
remontent au Ve siècle avant J.C., date qui marque l’établissement par les
sabéens de leur domination politique, économique et culturelle sur le pays,
prouvée matériellement par l’apport des techniques comme l’irrigation, la
charrue, mais surtout leur langue ( le sabéen) et leur écriture ( le guèze).

Dans leurs convictions, ces auteurs rejettent la notion de l’Etat en


Afrique pour la bonne raison qu’à cette période le continent noir était encore au
stade du système de production paysanne. En Europe pourtant, la bourgeoisie
avait réussi à imposer sa domination sur les prolétaires, a créé l’Etat. Cette
hypothèse exclut la notion hypothétique de l’Etat en Afrique pré – coloniale.

Cette étude se trouve implicitement dans une tradition de


l’anthropologie politique. D’après une telle approche, le système politique pourrait
obéir à une typologie opposant les sociétés à Etat et les sociétés sans Etat. Cette
distinction dichotomique est ainsi précisée par Jean William Lapierre. Les
premières territorialement unifiés, sont placées sous la domination d’un
gouvernement central exerçant son pouvoir par la force armée et le contrôle des
sanctions. Elles connaissent une stratification par des inégalités des rangs et
privilèges de pouvoir. A l’opposé, les secondes caractérisent par une
segmentation structurelle entre des groupes de parenté ou des communautés
bénéficiant d’une très large autonomie. Les différents segments sont très liés
entre eux par tout réseau des droits et d’obligations sanctionné par le principe de
force entre les segments.

Aidam Southall parlant de l’Etat segmentaire, il note une


organisation politique qui réunit des critères de natures étatiques, mais
présentant en même temps un processus de segmentation territoriale, dans
lesquelles, les lignages se divisent régulièrement en une sorte de génération et
dans chaque génération, on y trouve deux groupements de même nature ().
Les conditions essentielles données par Aidam Southall pour un Etat
segmentaire sont:

• souveraineté territoriale reconnue mais limitée et relative s’appliquant à


une série de zones dans lesquelles l’autorité décroit au fur et à mesure
qu’on se l’éloigne du centre.

• Existence d’un gouvernement centralisé, bien qu’il y ait de nombreux


autres foyers d’administration dans la périphérie, sur lesquels le pouvoir
central n’exerce qu’une administration.

• On y retrouve une existence d’un personnel d’administration centrale qu’on


constate d’une façon peu développée dans les chefs – lieux
périphériques ;

• Dans un État segmentaire, il y a plusieurs niveaux d’autorité qui sont unis


par un système pyramidal de la dépendance au pouvoir central, ces
autorités étant partout de même forme et de même nature.

• Les Etats segmentaires présentent des formes fluctuantes par le fait


l’éloignement du centre, les autorités dépendantes les plus éloignées du
centre sont les plus susceptibles de s’en détacher.

Il est certes, vrai que certains espaces de l’Afrique subsaharienne


ont méconnu l’Etat. Il apparait excessif d’en faire une règle générale. La façon
dont les groupes humains de l’Afrique pré – colonial régulaient leurs activités,
instituaient un ordre interne fait appel à des techniques politiques assez variées.
Pris sous cet aspect, les modèles d’analyse érigés autour de la complexité
croissante du pouvoir semblent mieux fondés. Georges Balandier note que le
pouvoir ne constitue pas un attribut spécifique à certaines sociétés mais s’érige
au contraire comme une nécessité par laquelle toute société parvient à lutter
contre l’entropie qui la menace de désordre.

En effet, il est rare que des sociétés se pérennisent sans pour


autant que se manifeste à un moment donné le pouvoir et les individus chargés
de l’exercice. La présence du pouvoir se fait sentir dans certaines circonstances.
Le pouvoir investi donne compétence aux autorités de réguler les rapports
sociaux. L’instrument de régulation de ces rapports est essentiellement le
recours à la contrainte et à la coercition. Par conséquent, le problème majeur est
celui de la production des injonctions socialement légitimes pour maintenir la
société. L’Afrique subsaharienne offre donc une large panoplie des
configurations politiques dans le contexte pré – colonial. Certes un nombre pas
très bien défini des sociétés africaines était dépourvu de gouvernants au sens
strict. Ces sociétés ne disposaient pas d’individu dont la fonction exclusive serait
de coordonner l’activité des éléments constitutifs du groupe. Les analyses au
niveau du principe de fonctionnement des sociétés africaines tournent autour
des concepts du despotisme et de l’unanimisme ().

Louis Dumont pour sa part explique davantage que cette notion


d’Etat segmentaire est donc très difficile d’arriver à une classification unanime
qui met tout le territoire n’y apparait pas clairement et d’autorité du groupe qui
dirige sur les sujets, ne semblent pas être affirmée.

Mulumbati Ngasha parlant des systèmes politiques africains démontre la


difficulté en ce sens que les systèmes peuvent se subdiviser en une infinité des
systèmes de telle sorte qu’il devient plus pragmatique de les expliquer selon un
schéma qui peut s’appliquer à chacun d’eux pris isolement.

Paragraphe 2. Despotisme et l’unanimisme

Beaucoup d’études pré – coloniales insistent sur l’image d’une


société africaine sans contradiction, les dernières études vont jusqu’à qualifier le
chef de despote. Cette vision ne semble pas rejoindre la réalité. Pour le moins
que l’on puisse avancer, la structure du pouvoir politique traditionnel prévoyait
non seulement une hiérarchisation mais aussi un système de consultation
assorti parfois de l’avis conforme. Il s’agit souvent le cas lorsqu’il est institué un
conseil des sages ou un conseil spirituel ou occulte.

Oginga Odinga fait remarquer à propos de Luo du Kenya qu’un chef


ne donnait pas des ordres. Il écoutait les anciens, les rencontrait au cours de
consultations et quand il disait « telle est ma décision », il ne prononçait pas un
verdict personnel mais un point de vue déjà accepté. En substance le roi,
l’empereur rejoint le constat Lucy Mair, d’après lui, le chef n’était pas destiné à
décider, mais restituer le sens de la palabre. Il était le porte-parole de la
collectivité.

Dans le traitement des affaires traditionnelles, le consensus


prévaut dans l’élaboration de la décision. Il confère généralement le monopole du
processus décisionnel au groupe. Le chef ne peut échapper systématiquement
au contrôle collectif. Il est une espèce d’exécutif. Bien entendu, certains Empires
et royaumes avaient une certaine concentration des pouvoirs au profit de leur
souverain. Ainsi, il serait abusif d’en conclure que toute tension sociale trouve sa
solution par le recours au consensus.

Pour ce qui est des sociétés lignagères et claniques, il est habituel


que les techniques, les stratégies et les ambitions des acteurs socio – politiques
se traduisent par un mécanisme de fragmentation qui réaménage le découpage
de capitalisation des biens mais aussi le soutien dû à la parenté permettent
simultanément de capitaliser du prestige et de l’influence au sein de la société.
Ce qui favorise soit la consolidation de l’exercice du pouvoir dans le même
secteur soit évidemment, lorsque les intérêts personnels prennent le dessus, la
scission et l’émergence d’une nouvelle politique.

La domestication du pouvoir se retrouve également dans les


rapports qui existent dans les différents groupes qui constituent les sociétés
segmentaires. Le consensus fait alors place à une fragmentation et à une
subdivision du pouvoir. Au fur et à mesure que l’on s’élève dans le mécanisme
de la consultation ou de la coopération entre les différentes segmentations, les
compétences de l’autorité s’amenuisent d’avantage. Les sociétés africaines de
ce genre sont qualifiées de segmentaires et pyramidales. Ce qui fait dire Paul
Mercier que leur système politique est répétitif. Ce qui signifie qu’elles sont
constituées de plusieurs niveaux des foyers subordonnés à une autorité. Elles
s’organisent en pyramide par rapport à l’autorité centrale. Les autorités centrales
et périphériques reflètent le même modèle. C’est la théorie classique appliquée
au détenteur du pouvoir absolu qui est inversée. En effet, la société est divisée
pour se pérenniser, car une société divisée trouve l’équilibre entre ses
composantes. Ce qui peut rapprocher de nos jours, des autonomies régionales,
voire le fédéralisme pour avoir une viabilité ().

En conclusion, la logique sociale conduit mécaniquement à


l’institutionnalisation du pouvoir politique. Le pouvoir au lieu d’être personnalisé
doit plutôt être institutionnalisé. L’institutionnalisation du pouvoir politique
provoque un développement institutionnel et suscite simultanément la mise en
place des procédures de limitation. Il faut limiter dans l’organisation et le
fonctionnement de la société les éléments qui peuvent constituer un obstacle
dans le sens de la pérennité du pouvoir politique. Le pouvoir se révèle ainsi
comme une nécessité pour la gestion de la société mais aussi comme une
menace. La régulation sociale par l’échange et l’extériorisation des normes et
des valeurs constituent un moyen pour parvenir à l’émergence du pouvoir
politique libéral afin d’échapper au despotisme ().

L’analyse des empires et royaumes de l’Afrique précoloniale nous permet


d’affirmer que cette dernière n’est pas, comme l’ont prétendu certains auteurs, un
amalgame désordonné de petits clans sans passé. Elle a connu des grands
royaumes et empires (Monomotapa, Ghana, Mali, Kongo, Lunda…). Elle a eu
dans son histoire sa civilisation. La civilisation doit donc être entendue comme
une manière de vivre d’un peuple (la vie politique, économique, sociale,
intellectuelle et religieuse).

D’après la conception unitariste de la civilisation ou la conception


grecque reste la seule civilisation et universelle, la Grèce reste le berceau de la
civilisation occidentale. Cette conception divise le monde en deux camps : l’un
civilisé et l’autre non civilisé et barbare. Ainsi la colonisation est justifiée par les
européens comme le droit et le devoir qu’ont les peuples civilisés de transmettre
la dite civilisation à ceux qui en sont dépourvus.

La conception pluraliste de la civilisation ou européo-centrique quant à


elle opte pour une vision pluraliste, relativiste. La civilisation d’un peuple n’est
pas inférieure à celle d’un autre peuple, elle lui est seulement différente et
discontinue. Toutes les civilisations naissent, grandissent, puis déclinent, parfois
même disparaissent totalement. Aujourd’hui, on reconnait l’existence de
plusieurs civilisations, celles-ci se valent même si elles sont différentes les unes
des autres.

L’étude menée au XIXe siècle sur les peuples dits primitifs ou barbares
a révélé que ceux-ci possédaient chacun une civilisation qui se caractérisait par
des institutions politiques, économiques, ses règles juridiques, un système de
valeurs etc. Les recherches archéologiques ont montré l’existence d’autres
civilisations que celles de l’Antiquité classique (Mayas, Incas, Aztèques…). Ainsi,
la civilisation occidentale ne peut pas être considérée comme un critère de
jugement, mais une civilisation parmi tant d’autres. Il est donc absurde d’établir
une hiérarchie et une comparaison entre les groupes humains puisqu’il n’a pas
de groupes inférieurs. Et donc la distinction entre les peuples primitifs ou
barbares et les peuples civilisés ne se conçoit pas. L’anthropologue Jousse en
1935 avait écrit l’homme est égal à l’homme. Il n’a pas de sauvages, il n’a pas de
civilisés, il n’a que des Etats ethniques différentiels. D’où l’égalité de l’homme
face à l’homme.

Cependant quatre éléments sont nécessaires pour que l’on parle d’une
civilisation malgré les disparités des civilisations au sein de tout groupement
humain, il s’agit : du type d’Economie, de la forme de société, de l’organisation
politique et du système des valeurs.

• L’organisation économique

L’organisation économique des sociétés negro-africaines était


caractérisée par une économie de subsistance ou fermée. Dans chaque
communauté forgerons, potiers, tisserands, artisans du bois ou du cuir, paysans
pourvoient aux besoins locaux. Cette économie est basée sur :

• la chasse, la pèche et la cueillette.

• La chasse était une activité pratiquée par tous les peuples d’Afrique et
spécialement les pygmées de la forêt équatoriale et les bochimans du
Sud-Ouest africain. Parmi les techniques utilisées nous avons des flèches
empoisonnées, des filets, des pièges, des collets, des trappes, des fosses,
de longues enceintes palissadées, du feu de brousse, etc.
• La pèche était pratiquée dans toutes les régions environnant les rivières et
les lacs aux époques de morte-saison ou de basses eaux c.-à-d. pendant
la saison sèche. Les engins utilisés sont notamment les pirogues, les
filets, les nasses, les épines, les arpents et les écopages. Certaines tribus
ont le monopole c’est notamment le Bozo et somono du Niger, les Tofi du
Sud du Benin et les acrobatiques Wagenia et les Lokolé du Haut-Congo.

• La cueillette était pratiquée par tous les peuples d’Afrique (champignons,


chenilles, fruits, etc.). Chez les pygmées cette activité était réservée aux
femmes.

• L’élevage

L’élevage était subdivisé en élevage du petit bétail qui était pratiqué


dans toute l’Afrique noire et l’élevage du gros bétail pratiqué par certains peuples
spécialisés. Tels sont les Peul, les Massai et les Tutsi. Pour les peuples africains,
le bétail constituait un bien de prestige, il est un signe de richesse sociale au lieu
d’être un instrument de production dans le sens que le troupeau n’offrait qu’un
faible intérêt économique. La viande était consommée rarement, sauf les jours
de fêtes familiales et religieuses. Les laitages constituaient pour les éleveurs un
principal produit du troupeau.

• L’agriculture

Les sociétés africaines médiévales étaient des sociétés rurales


caractérisées par une civilisation agraire. L’agriculture demeurait l’occupation
prédominante. Les techniques utilisées étaient l’agriculture itinérante sur brulis,
jachère, irrigation artificielle au moyen des canaux, des digues et d’écluses ou
l’aménagement des terrasses. Les instruments utilisés étaient la houe, la bèche,
les faucilles, etc. Ces instruments ont peu évolué depuis des siècles.
Du point de vue juridique, la terre est une propriété collective. Cette
notion s’explique par le fait que l’économie traditionnelle demeurait une
économie de subsistance et par la solidarité clanique et familiale. Le travail de la
terre se faisait de manière collective.

• L’industrie

Les techniques artisanales étaient diversifiées dans plusieurs


domaines notamment la céramique, la métallurgie, la vannerie, le tissage, la
maroquinerie, les brasseries, les huileries et les savonneries

• La métallurgie

Des hauts fourneaux utilisant le bois comme source énergétique,


servent pour la fonte des minerais comme le cuivre au Niger et au Katanga,
l’étain et le bronze au Nigeria et le fer à Méroé du Soudan. Les forgerons
fabriquaient toutes sortes d’outils et d’armes. Dans certaines régions, des
verriers formaient des corporations et fabriquaient des bracelets, des perles en
verre coloré, dans de véritables manufactures.

• La céramique

C’était une activité à l’apanage des femmes, celles-ci fabriquaient à


partir de l’argile malléable et cuite séchée, des lampes à huile, des cuves pour la
fermentation de l’alcool, des tasses, des plats, les cuvettes et les canaris qui
servent de batterie de cuisine en même temps que les calebasses joliment
pyrogravées.

• La vannerie

La vannerie permettait la fabrication des paniers.


• Le tissage

Les fibres de palmier, les fils de coton et de laine ou les fils soyeux
tirés du coton d’un parasite du tamarinier étaient utilisés dans certaines régions.
L’apprêt et la coloration des tissus étaient faits soigneusement (pote du riz, cire
chaude, boue ou détersif puissant).

• La maroquinerie

La préparation et la commercialisation du cuir sont très appréciées


par les peuples pasteurs pour les harnachements, les fourreaux, les boucliers. Le
cuir est utilisé aussi pour la fabrication des chapeaux, des étuis et les sacs
d’épaule.

• Les brasseries

Dans les régions non islamisées, elles étaient nombreuses,


généralement tenues par les femmes. Des boissons fermentées à partir du levain
et d’ingrédients divers sont tirées du maïs ou du riz (le lutuku, le tshibuku), du
miel, de la banane, du palmier (lumayimayi ou masanga ya mbila), de la canne à
sucre et du mil.

• Les huileries

Il s’agit des huileries autochtones traitant divers oléagineux. On y


trouve par exemple les noix de Karité dans la savane. Le Karité est l’arbre de
l’Afrique tropicale dont les graines fournissent une matière grasse d’usage
culinaire et cosmétique. Il y a également les noix de palme.

• Les savonneries

La fabrication du savon était une affaire des familles, un mélange


obtenu à partir de matière grasses et d’un alcali qui sert à nettoyer, à blanchir et à
dégraisser.

• Le commerce

Depuis la haute Antiquité, l’Afrique traditionnelle était ouverte aux


relations commerciales. Ainsi on distinguait deux zones privilégiées de
commerce :

La première zone était constituée de la rive méridionale du Sahara, cette zone


connaissait un échange commercial très intense entre le Nord et le Sud. Ensuite
la deuxième zone était composée de la côte orientale qui connaissait elle aussi
toutes sortes d’influences étrangères dont le moteur fut le commerce arabe.

• Le système des valeurs

Il constitue l’âme d’une population, elle referme les croyances


religieuses, morales et philosophiques. Ces croyances sont manifestées à
travers les pratiques animistes, les œuvres artistiques et des expressions
imagées.

• Les langues africaines

Les langues africaines sont à la fois riches et pauvres

• La langue riche

La richesse d’une langue se manifeste dans le vocabulaire. Sur le


plan grammatical, cette richesse se traduit par une grande complexité de formes.
Ainsi, une phrase peut être rendue en plusieurs façons en tenant compte des
pronoms. Certaines de ces différences de sens sont marquées dans les langues
bantu par la tonalité.
• La langue pauvre

Les mots techniques font défaut dans les langues pauvres.


Cependant l’affirmation selon laquelle les langues africaines ne permettent pas
d’exprimer des notions abstraites est inexacte. Nous pouvons prendre l’exemple
de la langue ewe, les mots français jus, lait, larmes, le vin, bouillon, pus sont
traduits par un seul mot tsi, signifie eau et auquel on ajoute un déterminant, en
ewe on est abstrait des réalités désignées par ces six mots français, un
caractère commun et l’on parle de l’eau des fruits, l’eau de seins, l’eau des yeux,
l’eau de palmier, l’eau de viande et l’eau des plaies.

• La littérature africaine

• La littérature écrite

Elle s’est développée, très brillamment dans certaines villes


africaines comme Tombouctou, Djenné et Bornou. Les œuvres sont des poésies,
des chroniques, des traités de morale, de philosophie et de théologie. Mais cette
littérature n’est cultivée que par une élite de lettrés et n’est pas à la portée du
peuple.

• La littérature orale

Une littérature populaire caractérisait par l’oralité. Les sociétés


africaines possèdent un riche patrimoine littéraire dont les contes, les fables, les
proverbes, le théâtre, la poésie épique. La littérature orale africaine est avant tout
une littérature utilitaire, son but est d’éduquer les jeunes, de les amener à éviter
l’avarice, l’envie, la vantardise et d’exalter la ruse, la pitié, la franchise, la
reconnaissance, la générosité et la bravoure ; de les rendre sages et de les
distraire. Ce patrimoine est détenu par une catégorie d’âge, ainsi dit-on lorsqu’un
vieillard meurt s’est toute une bibliothèque qui se perd.
• La religion traditionnelle africaine

L’animisme est par excellence la religion des Noirs africains. Les


animistes reconnaissent l’existence d’un Dieu Suprême infiniment bon et
puissant, mais ils le trouvent trop haut et inaccessible pour s’occuper du monde.
Dieu agit par des intermédiaires qui peuplent la nature. Ce sont des génies, des
esprits bienfaisants ou malfaisants, les ames des aïeux etc. que l’on peut
consulter à tout moment et à chaque circonstance.

• L’art africain

Le continent africain avait connu un épanouissement artistique au Moyen-Age


surtout dans les pays du Benin- Yoruba.

Voici quelques caractères de l’art nègre :

L’art nègre est un art fonctionnel, vécu et engagé : l’objet d’art n’est pas
seulement exécuté pour la contemplation esthétique, mais il a une utilité pratique
(siège, porte-pipe, masque, outil).

Il est dense et synthétique : l’idée essentielle est poursuivie. D’où l’exagération de


certaines parties. Les seins démesurés signifient la fécondité, la maternité ; une
barbe très longue symbolise le caractère vénérable du vieillard, la calvitie
implique la sagesse.

Un art en général non naturaliste : l’artiste noir ne vise pas à copier la réalité, il
cherche plutôt à inculquer dans la matière son idée, son message. Pour ce faire,
il va puiser son inspiration dans les représentations, dans les aspirations du
peuple qui, seul, en définitive est créateur.

Il est anonyme : l’artiste cache son identité, il ne signe pas ses œuvres surtout
lorsque les pièces sont d’usages religieux.
L’art nègre est varié : il embrasse l’architecture africaines, la sculpture nègre, la
peinture et utilise toute sorte de matériaux notamment le bois, les pierres, les
ivoires, les os, l’argile, le métal, etc.

L’art nègre est caractérisé par sa grande richesse en images, en rythme : la


danse et la musique apparaissent comme des instruments ; instruments à
cordes et à vent (flutes, harpes, luths, cors, etc.

Dans la musique traditionnelle, le rythme l’emporte sur la mélodie. C’est même la


caractéristique essentielle de la musique africaine, laquelle est rarement séparée
de la danse exécutée, selon les circonstances. Ce sont les cérémonies
religieuses, les cérémonies avant et après la chasse, avant et après la victoire, la
danse des funérailles, la danse pour les circoncis.

CHAPITRE III : LES STRUCTURES ET INSTITUTIONS DE LA SOCIÉTÉ


COLONIALE

En Afrique noire, la colonisation a représenté, à maints égards


comme une sorte de cataclysme, une déflagellation culturelle qui, en s’étendant
de proche en proche, a fortement ébranlé les cosmogonies primitives et à par le
fait même miné, sapé et érodé les équilibres des sociétés traditionnelles.
L’arrivée et la domination de l’homme blanc ont plongé l’Africain dans le profond
désarroi. Ce dernier s’est retrouvé désemparé par la découverte soudaine et par
l’emprise d’un autre monde qui, par le seul fait d’exister, lui révélait l’extrême
vulnérabilité de son propre monde.

Les causes de l’expansion européenne au XVe siècle sont


économiques, religieuses, scientifiques et techniques ainsi que la traite des
noirs. Economiques qui sont d’ailleurs plus importantes, le désir de découvrir les
métaux précieux (or, diamant, argent). Religieuses, la reconquête achevée,
Portugais et Espagnols entendent poursuivre la lutte contre l’islam, pour y
parvenir, ils vont conclure des traités avec le mystérieux souverain chrétien
d’Ethiopie. Les causes scientifiques et techniques, l’amélioration des techniques
nautiques notamment le perfectionnement de la boussole, l’invention du
gouvernail d’étambot, la mise au point d’un nouveau type de bateau.

Ce sont les portugais et les espagnols qui ont jouaient un rôle plus
important en raison de la situation géographique. Le roi du Portugal, Henri le
navigateur, envoie plusieurs expéditions vers le Sud chargées d’explorer les
côtes africaines et de découvrir la nouvelle route vers les indes, successivement,
ils découvrent en 1444 le Cap vert, de 1446-1457 le Sénégal, 1462 la
Sierra-Leone, en 1472 le Golfe de Guinée, en 1483 l’embouchure du Congo
jusqu’atteindre les indes en 1498. Les espagnols de leur part s’intéressent plus à
l’Amérique et à l’Afrique, ils s’installent aux iles de canaries. A la fin du XVIe
siècle (1570), les espagnols et les portugais perdent la maitrise des mers ; les
Hollandais, les Anglais, Français se lancent à leur tour dans la grande navigation.

En Afrique centrale c’est la personne du Léopold II, qui voulait


fournir à son pays des débouchés et matières premières. Il faut reconnaitre que
la manière dont il parvient à se tailler au cœur de l’Afrique, un vaste territoire,
constitue un chef d’œuvre de stratégie politique. L’administration coloniale belge
au Congo fut la plus dense d’Afrique, tant en ce qui concerne les villes qu’en ce
qui concerne le milieu rural où son extension, sa présence et son organisation
étaient des plus frappantes. Cela fait qu’il n’était pas possible au congolais de
ville ou de la campagne de ne pas s’apercevoir qu’il était administré. Les
structures de l’administration locale qu’elle soit urbaine ou rurale, sont
demeurées rudimentaires et l’éducation politique des populations n’a pu se faire
que vers la fin de l’ère coloniale belge.

Dans le système colonial, le principe est qu’il faut diviser pour


mieux régner. Tandis que dans le système politique traditionnel africain, il faut
diviser pour mieux pérenniser. En réalité, la société a besoin de la stratification
sociale pour se maintenir. Pour trouver l’équilibre harmonieux, la société est
divisée en plusieurs composantes. Ainsi le chef est à la tête des instances
superposées. Avant de prendre une décision, le chef prendra soin de la faire
gravir à tous les échelons du pouvoir en commençant par le bas. La palabre
africaine est l’institution de règlement des conflits et d’adoption des décisions
majeures. Cette forme de prise de décisions peut être rapprochée de nos jours à
la technique de référendum.

Certains Etats occidentaux par l’action de leurs leaders comme le


cas de Léopold II, l’Église par celle de ses missionnaires blancs et certaines
compagnies commerciales par celles des spoliateurs ont fait connaitre au
continent africain un malencontreux tournant dès la fin du XIXème siècle. Ce
triangle colonial : administration, Clergé et Affaires, va fausser les équilibres
alors que les relations instituées au départ, le Royaume du Portugal entretenait
des relations diplomatiques avec le Royaume Kongo, pouvaient fonder la
coopération entre les peuples de deux continents voisins. Le contact des
portugais avec les tshokwe avait permis à ces peuples d’avoir une arme à feu. Le
triangle colonial n’est pas à confondre avec le commerce triangulaire, un
ensemble des échanges entre l’Europe, l’Afrique et l’Amérique,

Mais, la colonisation par la théorie de trois C (Coloniser,


Christianiser, civiliser) à favoriser les idées de haine et d’une supposée
supériorité qui ont été consolidées par les pseudo–sciences humaines vouées à
la justification de la domination. Celles – ci vont l’emporter sur le bon sens. Cette
idéologie ignoble va trouver son paroxysme dans le système esclavagiste.

• SECTION 1 : VERS L’ETAT COLONIAL

En vue d’asseoir la domination, la conférence de Berlin traduit


juridiquement la transformation de l’Afrique en enjeu politique pour les grandes
puissances. C’est l’apogée contemporain de la politique impérialiste. A cet effet,
l’Afrique apparait comme le terrain privilégié d’affrontement des rivalités des
puissances occidentales. L’épisode de Fachoda en 1898 constitue un exemple
aigu des dites convoitises. Ici, en effet, c’étaient affronté des troupes
britanniques et françaises. Sous d’autres cieux, s’affrontaient les troupes
américaines et espagnoles.

Les convoitises des puissances coloniales ne vont épargner aucune


parcelle du territoire en deçà du Sahara, à l’exception de l’Éthiopie et de la
doyenne république africaine du Liberia. Cet Etat fut créé en 1847 pour assurer le
retour de la diaspora venue des USA sans la moindre consultation des
populations autochtones de ce pays. Ce qui aura pour inconvénient, l’émergence
d’une fracture populaire mal résolue avec la liquidation violente du régime de
Samuel Doe. Toutes les autres zones du continent seront soumises à une
restructuration qui s’accompagne, soit de la création, soit de la gestation des
nouvelles formes du pouvoir ().

Paragraphe 1. Partage de l’Afrique par les puissances occidentales

Le point de départ historique le plus important en rapport avec les


institutions africaines de la période coloniale demeure sans aucune contestation
la conférence de Berlin de 1885. Politiquement, il était question pour les
puissances coloniales de se partager intentionnellement l’Afrique qualifiée alors
de territoire sans Etat, territoire sans maitre (terra nuluis). La politique de
puissance qui s’en est suivie a profité à la France et à la Grande Bretagne au
détriment de l’Allemagne elle – même, néanmoins, vu attribuer quelques colonies
non moins importantes mais qui lui furent retirées à la suite de ses entreprises
belliqueuses : la guerre mondiale qui a fait perdre à l’Allemagne, le Rwanda –
Urundi, le Togo,… il en est de même de l’Italie avec la corne de l’Afrique. Mais la
Conférence de Berlin n’avait pas fixé avec précisions la question des frontières,
c’est ainsi que malgré la reconnaissance de l’Etat Indépendant du Congo,
Léopold II devait s’employer à régler les problèmes frontaliers. C’est ainsi que par
des accords, protocoles et traités, la délimitation de l’E.I.C. va être dégagée.

Certaines puissances moyennes comme le Portugal avec l’Angola,


le Mozambique et la Guinée ensuite l’Espagne avec le Sahara Occidental, le Nord
du Maroc et la Guinée Équatoriale, en dépit de leur capacité maritime, étaient
plus concentrées en Amérique Latine. Le découpage territorial de l’Afrique
subsaharienne procède des choix effectifs des puissances coloniales. Ce qui
implique le remodelage ou la recomposition du paysage politique africain. Par
conséquent, le continent connaitra un effacement des institutions traditionnelles
africaines au profit d’un nouveau modèle imposé de l’extérieur, la métropole. Il
s’agit donc d’un système politique nouveau, un modèle exogène.

Crawford Yang () fait remarquer que la classe dirigeante


européenne avait une haute idée de ses qualités culturelles, biologiques et
technologiques qui s’accompagnait d’une vision systématiquement négative des
africains. C’est le complexe de supériorité qui nourrissait l’auto estime de
l’homme blanc et lui permettait d’éviter les remords d’une personne normale.
Non seulement il se considérait biologiquement fort mais aussi culturellement
supérieur en donnant une valeur ajoutée à sa culture mais aussi, il se disait
investi de la mission de civiliser les noirs et les autres races. Certes, aujourd’hui,
cette conception commence à être relativisée.

La question de la supériorité technologique est à ces jours


indiscutables pour la création des conditions de vie acceptable. Les conclusions
d’accords inégaux et les contrats léonins signés avec les chefs coutumiers dans
des conditions de validité très discutables. L’Europe de nos jours connait une
forte décadence culturelle. Il est difficile de soutenir que la civilisation ou la
culture européenne est supérieure à celle de peuples africains. La culture est
relative, c’est un complexe essentiellement éducationnel que l’homme conserve
à la suite d’un filtre subjectif. Elle est contingente dans l’espace et dans le temps.

La relativité culturelle ne peut pas se construire sur des éléments :


structures et institutions mêmes traditionnelles jugées universellement ou
majoritairement négatives. Il s’agit à titre d’illustration, de problème de genre.
Ainsi, dans le statut de la femme, des innovations comme la parité ont été
présentées quoique la compétence doive être prise en compte à la source.
Certaines pratiques comme l’ablation sont des aberrations qui doivent donner
lieu à la mise en examen de leurs auteurs.

La culture universelle doit être fondée sur le respect des droits de


l’homme en vue de favoriser l’éclosion d’un comportement social ayant pour
fondement la protection de la dignité humaine de chaque être humain.
L’instauration des droits de l’homme progressivement partout à travers le monde
devra être un impératif pour la prétention d’une culture universelle.

Paragraphe 2 : Modalités de la réorganisation de l’Afrique

La réorganisation de l’Afrique reposait sur une délimitation


frontalière entre les zones d’influence des grandes puissances occidentales et
sur une délimitation frontalière interne à chaque zone :

Premièrement, le calcul des exploitations, les marchandages


diplomatico-militaires devaient contribuer à faire de l’Afrique au sud du Sahara un
ensemble découpé en fonction des rapports de force entre les européens et sur
l’évolution de ces rapports. Ce rapport de force permettait au plus fort d’acquérir
le territoire et au faible de le perdre ;

Deuxièmement, les délimitations obéissaient à des considérations


politico-bureaucratiques. En effet, l’affectation des territoires aux différentes
puissances se fait dans l’arbitraire total. L’analyse critique de la carte d’Afrique
démontre que toutes les lignes droites ignorent les organisations
socio-politiques pré-coloniales.

Le partage ainsi opéré, divisait l’Afrique en zone. En Afrique


française, il existe l’Afrique occidentale française (AOF) et l’Afrique équatoriale
française (AEF) qui, faut-il le souligner, n’a de rationalité géographique que
partielle car le partage est bureaucratique. Le mode de fonctionnement est
administratif. Même si le territoire dépend de plusieurs zones, c’est qui compte
c’est l’effectivité de l’administration. Seuls quelques territoires dotés d’une
identité affirmée furent maintenus dans leur intégrité. C’est le cas de
Madagascar, du Swaziland et le Lesotho ().

Le découpage territorial en entité politique ne respectait aucune


identité, la règle d’une recomposition territoriale et donc l’espace politique va
prévaloir. Cette situation a été à la base de la perte de l’autorité politique
traditionnelle d’une bonne partie de son territoire. Le découpage en
circonscription de certaines entités politiques traditionnelles se fait par
l’implantation des administrations différentes, parfois entre puissances
coloniales différentes. A titre d’exemple, le Maroc, sera divisé en trois
circonscriptions : le Maroc utile pour la France, le Nord et le Sud pour l’Espagne.

Il en est de même en Afrique centrale, les espaces, voire les


communautés qui vont être recoupés, morcelés comme le démontre le sort de
l’empire Lunda subdivisé en trois composantes relevant de la compétence du
Congo – Belge, de l’Angola et de la Zambie. C’est le cas aussi du royaume Kongo
subdivisé entre le Congo français, le Congo – Belge et l’Angola. Simultanément,
la réorganisation des territoires s’accompagne de l’instauration des nouvelles
institutions politiques dans la mesure où il est mis un terme à la correspondance
entre les territoires sur lesquelles s’étaient développés les systèmes politiques
pré – coloniales et les territoires conçus par les colonisateurs.

Pour sa part, Georges Balandier constate que cette réorganisation


politique et institutionnelle a précipité le processus de dénaturation des unités
politiques traditionnelles. L’imposition des pouvoirs publics nouveaux va
emprunter pour l’essentiel deux voies. Il s’agit d’une part du gouvernement direct
et d’autre part du gouvernement indirect qui, dans la pratique, évolueront vers
une gestion administrative des territoires colonisés.

Le cas de la France, qui elle a pratiqué le système de gouvernement


direct qui dans sa phase humanitaire consistait également à l’assimilation des
populations dites indigènes. L’assimilation conduit à faire des colonies une
France d’outre-mer. Ce qui revient à mépriser et à détruire tout élément de
culture nationale au profit d’une culture française tronquée et adaptée. C’est ainsi
que dans toutes les écoles c’est la langue française qui était enseignée au
détriment des langues traditionnelles. Le droit de vote accordé à certaines
portions des territoires africains, les élus allèrent siéger directement au
parlement français au lieu de constituer des assemblées parlementaires locales.
L’assimilation supposait l’annihilation de la personnalité autochtone et à la
longue l’égalité des droits avec les européens. Cette démarche s’avérait
impossible à cause de l’hostilité de certains colons et certains administrateurs à
toute identité entre eux et les autochtones.

L’assimilation était une théorie de l’association entre la métropole


et les territoires africains. Il s’agit d’associer les autochtones à la gestion de la
Res Publica. Ce système implique le respect des coutumes africaines.

La Grande Bretagne, quant à elle appliquait le système de


gouvernement indirect dans toutes les colonies Britanniques. L’Angleterre se
montra particulièrement soucieuse de respecter les lois et coutumes locales. Ce
système consistait à laisser sous une apparence intacte les institutions
traditionnelles africaines dénaturées dans leur substance en vue de les intégrer
au sein de l’administration coloniale pour devenir un instrument d’action. Les
anciens souverains africains furent maintenus à l’exemple de l’empereur Sokoto
au Nigeria, l’administration leur fut abandonnée. Les administrateurs
britanniques se limitaient à la haute direction des affaires (la politique étrangère,
les finances et la défense de la colonie).

La Belgique pour sa part appliquait le système du type régime


paternaliste. Le paternalisme consiste à exiger des autorités coloniales plus
d’attention aux besoins de leurs administrés, à donner peu d’initiative aux
autochtones et ne guère se préoccuper de les former. Ce système faisait de
l’africain un perpétuel inférieur.

Le Portugal quant à lui pratiquait une véritable politique


d’assimilation, car de tous les colonisateurs, les portugais furent les seuls à
abandonner le racisme et à appliquer des lois et règlements valables aussi bien
pour les colonisés que pour les colonisateurs. L’assimilation chez les portugais
fut plus de vrais Noirs ni de vrais Blancs.

Les systèmes politiques coloniaux évacuèrent progressivement de


la société traditionnelle politique son fondement du pouvoir par la recherche
d’une légitimité auprès des populations africaines pour privilégier leur rôle
instrumental au profit de la métropole. C’est la recherche de la légitimité externe
qui sera primordiale dès cet instant pour les dirigeants politiques africains
inféodés aux puissances occidentales. La légitimité interne sera bafouée.

Dans son analyse des phénomènes d’autorité dans le savant et le


politique, et dans Economie et société ce que M. Weber estime qu’il existe trois
raisons internes qui justifient la domination ( le pouvoir de commandement) et,
par conséquent trois fondements de la légitimité, selon que le pouvoir est
traditionnel, charismatique ou rationnel ( les variantes suivantes : la légitimité
traditionnelle, la légitimité légale – rationnelle ainsi que la légitimité
charismatique).

• Légitime traditionnelle

Est celle que le roi ou le chef tire de l’histoire, de la tradition d’être


chef. Il s’agit généralement d’un mécanisme héréditaire et dévolutif qui permet
au chef d’asseoir son pouvoir. C’est donc une légitime stable. La légitimité
traditionnelle trouve le fondement du pouvoir et l’obéissance dans la tradition
d’un groupe social, c’est-à-dire dans les coutumes, consacrées par la validité
immémoriale et par l’habitude enracinée dans le corps social de les respecter. Ce
type de légitimité aboutit généralement à un pouvoir monarchique et
théocratique. On affirme que les gouvernants ont été choisis par Dieu qui leur a
délégué un pouvoir dont ils sont les véritables titulaires. Dieu est la source du
pouvoir et il a désigné un homme ou une famille pour l’exercer en son nom et
comme il l’entend. En obéissant aux gouvernants, c’est à Dieu qu’on obéit. Le
pouvoir, le droit divin, est la légitimé seulement par le mode de désignation de
ceux qui l’exercent.

• Légitimité légale – rationnelle

Elle fait reposer l’autorité des gouvernants sur des règles


rationnelles que la société politique estime valides. Tel est généralement
aujourd’hui le cas des autorités politiques dans les Etats modernes. Elle fait que
nous puissions obéir à celui qui en bénéficie parce que, légalement,
constitutionnellement et donc rationnellement, nous l’avons mis au pouvoir. Il y a
un aspect légal ou rationnel duquel le gouvernant tire son pouvoir. Le pouvoir
découle d’un corps de règles qui s’imposent aux gouvernants eux-mêmes. Ici, la
légitimité est proche de la notion de l’Etat de droit. L’autorité s’exerce suivant des
règles préétablies et l’obéissance ne peut porter sur ce qui n’est pas prévu par la
loi. En tant que légitimité légale, elle s’exerce à travers des organes
(administratifs) ou des « bureaux », on la qualifie aussi de légitimité
bureaucratique, sans que le terme soit ici péjoratif. Aujourd’hui, la source du
pouvoir c’est le peuple. Ce dernier doit choisir librement ses dirigeants. C’est le
droit de vote qui est reconnu à tout citoyen. Ce droit peut être direct ou indirect.

• Légitimité charismatique

Est celle dont dispose une personne qui a des qualités


personnelles, intrinsèques à sa personnalité, qui font qu’elle ne soit pas
contestée mais plutôt acceptée unanimement comme un chef. Il exerce une
sorte de leadership naturel sur la population. L’autorité et le devoir d’obéissance
se fondent sur les qualités, la grâce, le prestige personnels et extraordinaires,
bref sur le charisme d’un chef. Ce type d’autorité se caractérise par le
dévouement des gouvernés envers ce chef charismatique auquel la société
politique fait confiance.

Dans les trois cas, la légitimité apparait comme l’expression d’une


qualification : l’autorité légitime est qualifiée pour l’exercice du pouvoir de
commandement, de la fonction gouvernementale.

Dans la deuxième acception, la légitimité se rapproche de la légalité


en tant que pouvoir est dévolu et exercé selon des règles juridiques préétablies.
Toutefois, la légalité et la légitimité restent radicalement différentes. Si la légalité,
en tant qu’effet contraignant qui s’attache à l’ordre juridique, est une notion
juridique, la légitimité est avant tout une notion sociologique et politique qui
renvoie à un sentiment populaire bénéficiant d’un large consensus. En tant que
telle, elle joue un rôle dans l’assise du pouvoir politique.

Actuellement, les trois légitimités peuvent se retrouver en une autorité mais, à


défaut, la légitimité légale – rationnelle prime. La rationalité a servi de critère
dans la projection de l’administration pour assurer la verticale des sociétés
africaines récompensées.

Paragraphe 3. Le rôle de la légitimité

La légitimité est radicalement différente de la notion de la légalité. Cette


dernière correspond à la conformité à l’ordre juridique en vigueur, auquel on doit
obéissance sous peine de sanction. La légitimité correspond à un ensemble
doctrines, de croyances qui ont pour objet de justifier le pouvoir politique dans
son fondement, dans ses formes et ses structures et dans son mode d’exercice.
La légitimité constitue l’infrastructure idéologique des systèmes politiques. Elle
joue le rôle de déterminant idéologique, le système politique et institutionnel
étant le déterminé. La légitimité joue le rôle de principe justificatif de
l’organisation socio-politique. La légitimité commande l’organisation
institutionnelle (institutions, techniques et mécanismes juridiques) du système
politique donné.

• L’approche subjective

Il s’agit d’une approche philosophique qui procède d’un point de vue idéaliste,
par référence à un système de valeurs auquel adhèrent les auteurs. La légitimité
sert alors à démontrer les qualités et la supériorité d’un type de gouvernement
sur les autres, à distinguer les bons et les mauvais systèmes politiques. Elle
porte sur un jugement de valeur.

Dans cette optique, la légitimité se réfère à un ensemble de valeurs


auxquelles on croit (personnellement, subjectivement). Sera légitime le pouvoir
qui s’organise et fonctionne en respectant et en défendant ces valeurs. Sera
légitime le pouvoir qui correspond à ce système de valeurs préétablies ou
définies a priori de façon abstraite.

Ainsi, par exemple, d’après Saint Thomas d’Aquin, seul le pouvoir capable
de promouvoir le bien commun, conçu, dans une perspective chrétienne, comme
le plein développement de toutes les facultés de l’homme, seul ce pouvoir est
légitime. Pour Thomas d’Aquin, seule la monarchie peut sauvegarder le bien
commun. En conséquence, seule la monarchie est un système politique légitime,
seule la monarchie mérite obéissance.

Pour les théoriciens du droit naturel, il existe un droit naturel, d’essence


plus ou moins divine, antérieur et supérieur à l’Etat et reposant sur l’idée de
justice. Cette idée de justice fonderait la légitimité du caractère obligatoire des
règles du droit positif. Dans ce contexte, sera légitime, le pouvoir qui s’exerce
selon cet idéal de justice. Sinon, les citoyens ont le droit, voire le devoir de
désobéir. Dans l’hypothèse d’un pouvoir illégitime, les citoyens ont le droit de se
débarrasser, même physiquement du tyran : la théorie du tyrannicide justifiée par
le droit de résistance à l’oppression.

Ces théories sont subjectives, car l’idée, le contenu du bien commun ou de


la justice sont des notions relatives et relèvent de la pure appréciation subjective
et a priori.

• L’approche objective

Le système légitime est déterminé par rapport à une situation objective,


éventuellement mesurable et non pas par rapport à une échelle de valeurs. Dans
ce cas, est légitime, le pouvoir qui correspond, par son fondement, ses formes,
ses structures et son exercice à l’ensemble des croyances ou des doctrines
recueillant la plus large adhésion de la part des gouvernés. La légitimité nait a
posteriori du consensus et elle est susceptible de variation et de changement de
camp : à un moment, elle peut correspondre à la monarchie, puis ultérieurement
à la République. En effet, dans un Etat donné à un moment donné, la grande
masse des citoyens se fait une idée plus ou moins claire de la forme que doit
revêtir le pouvoir pour mériter spontanément adhésion et obéissance. Sera alors
légitime le gouvernement qui correspond à cette idée commune par ses origines
et sa structure. Aussi, dire qu’un gouvernement est légitime ne veut pas dire qu’il
assure le bien commun ou qu’il est un bon Gouvernement, mais seulement que
la masse des gouvernés le considère comme légitime. Ici, l’approche de la
légitimité est sociologique.

Il en résulte que la légitimité est relative dans le temps et dans l’espace. Dans
le temps, parce que l’idée de pouvoir qui fonde la légitimité évolue en même
temps que les croyances et les doctrines, en même temps que les mentalités.
Dans la plupart des pays, la légitimité rationnelle a remplacé la légitimité
traditionnelle.

Dans l’espace, la légitimité varie en fonction des contextes sociaux et


culturels. Il n’existe pas de légitimité unique et universelle. Elle peut même être
différente à l’intérieur d’un même Etat (pouvoir et opposition) ; ce qui peut
engendrer une situation dangereuse, lorsque les gouvernés sont divisés en deux
blocs sensiblement, égaux. La différence risque de dégénérer en guerre civile.

Au départ sociologique, la légitimité tend aujourd’hui à se juridiciser. Suite à


un mouvement de contamination et aux transformations du communisme, la
légitimité découlent actuellement de la démocratie libérale et de l’Etat de droit.

• SECTION II : BUREAUCRATIE COLONIALE

Juridiquement et politiquement incapable, le colonisé est dépourvu


des moyens d’expression. Le choix collectif ne relève pas de sa compétence
mais d’un appareil administratif qui assure l’ordre public et procède à
l’élaboration et à la mise en œuvre des politiques publiques, quel que soit le
système, administration directe ou indirecte, le pouvoir politique traditionnelle va
soit être exclu du processus soit être associée pour les affaires rudimentaires.

Paragraphe 1. Autorité coloniale

Dans le régime démocratique, la souveraineté est en dernier ressort


une expression populaire a contrario dans le système colonial, cette volonté
populaire n’est pas exprimée mais plutôt confisquée. Ce fut le règne de
l’arbitraire pratiqué par l’administration coloniale, à l’exception du Portugal qui
rejetait le racisme et l’égalité devant la loi et le règlement.

Dans tous les cas, l’Afrique sera maintenue à l’extérieur du


processus décisionnel. Il sera gouverné par une simple rationalité
bureaucratique. Cette forme d’organisation bureaucratique dont le
soubassement sociologique est inexistante, exception faite d’une colonie
minoritaire des colons blancs, ne peut que s’appuyer sur un régime répressif
bulamatari. Le prétexte pour les Etats colonisateurs était d’être civilisateur ou
égalitaire. Ce qui importe pour les Etats occidentaux, c’est d’atteindre l’objectif :
la spoliation des richesses suite à la révolution industrielle, l’Europe a besoin
d’une Afrique stable et peuplée pour fournir des matières premières et servir des
débouchées aux produits manufacturés. Déjà des machines agricoles
commençaient à être utilisées dans des plantations.

L’autorité coloniale choisissait l’échelon local pour faire exercer le


pouvoir émanant de la population. La Charte coloniale s’agissant de la structure
administrative, distinguait le gouvernement central (dans la métropole) et le
gouvernement local (dans la colonie). Le souci de la formation ne se fait
remarquer que vers les indépendances. Dans les colonies françaises, une
loi-cadre de 1956 prévoyait une africanisation progressive des cadres. Le
colonisateur concrétisait son souhait et sa théorie de faire l’éducation politique
des responsables congolais à partir d’un contact direct avec ceux au nom
desquels ils allaient exercer l’autorité, contact qui permettrait à la population de
faire sentir à ses représentants toute leur responsabilité, en étant plongés dans
les problèmes pratiques routiniers de l’administration locale.

Les problèmes épineux sur lesquels le conflit fut passionné et se


perpétua pendant une dizaine d’années de préparation porta sur la structure à
adopter : fallait-il une municipalité unique et intégrée ou au contraire la ville
devait-elle être divisée en administration dédoublée ; une administration noire
d’une part et une administration blanche d’autre part, de façon à donner à
chacune des zones de la ville européenne et africaine sa structure autonome.
Les deux thèses étaient en compétition entre les blancs du Katanga, partisans de
la deuxième et les blancs de Léopoldville défenseurs de la première idée qui se
basait sur le principe de la représentation paritaire.

C’est donc un modèle à structure non politique qui ne s’affiche pas non
plus comme l’incarnation de l’idéal type bureaucratique wébérien. La
colonisation, écrit Georges Balandier, a transformé tout problème politique en un
problème technique, relevant de la compétence administrative. Idéologiquement,
le système colonial s’identifie à une structure non politique dont l’activité est
débarrassée des considérations d’intérêt général.

En réalité, le modèle est guidé par des principes politiques dictés


depuis la métropole. L’accord du pouvoir colonial, précise t – il, importe plus que
l’acquiescement des gouvernées. La colonisation s’appuie pour imposer sa
domination sur les autres causes socioculturelles d’altération du pouvoir
traditionnel. En effet, le système colonial implique une dépendance politique,
économique et culturelle. De toutes les manières, la situation est ressentie
partout en Afrique comme une domination quels que soient les bribes de liberté
reconnus aux colonisés.

Le système colonial a dépouillé l’aristocratie traditionnelle de ses


pouvoirs et privilèges. Elle a conditionné la société africaine à telle enseigne que
sa culture a été minée. A cet égard, on a même parlé, selon les hypothèses
envisagées, d’acculturation ou de métissage culturel. Cette politique produira un
changement socioculturel important qui va conduire dans certains milieux à un
relâchement ou à la disparition pure et simple des institutions ou des autorités
traditionnelles. C’est l’apogée de la dépendance politique vis-à-vis de la
résistance à l’oppression et des actions directes d’opposition en dépit de
l’assassinat ou la détention politique. Les mouvements de résistance au régime
colonial étaient réprimés, nous pouvons évoquer la résistance de Baluba du
Lomami conduite par le chef Kasongo Nyembo (1907-1917), l’insoumission des
populations des monts Mitumba (Sud Kivu) jusqu’en 1923, les mouvements
insurrectionnels (1919) dans les régions du Sankuru, de l’Equateur et du lac
Léopold II, enfin et surtout la révolte des Bapende de Gungu (1931).

Parmi les grands phénomènes de changement de situation, nous


examinerons les plus importants.

• Administration locale rurale

Depuis la période léopoldienne jusqu’à la fin du système colonial


belge, plusieurs mesures furent prises dans le domaine de l’administration
locale, au niveau rural. Elles ont concerné l’intégration des sociétés
traditionnelles dans le système administratif moderne. La création des chefferies
suivi de celle des secteurs et des centres extra-coutumiers ainsi l’organisation
de ces différentes circonscriptions indigènes. Ces entités territoriales jouissaient
de la personnalité morale depuis la création à l’époque du Roi Léopold II.

Le décret du 10 mai 1957 avait apporté un certain nombre


d’innovations notamment l’établissement d’un conseil avec un pouvoir délibératif,
le Chef de secteur au lieu d’être nommé serait élu par le conseil de cette
circonscription. Il devrait être secondé par un collège permanant calqué sur le
modèle d’échevinat belge, lequel serait composé de trois à sept membres. Outre
les notables qui l’entouraient, le Chef de circonscription serait assisté également
d’un embryon d’administration composée d’un secrétaire et d’un receveur réduits
parfois en une seule personne. Cette petite bureaucratie gérait les comptes, les
registres et d’autres pièces écrites. Notons qu’en 1957, la Colonie belge comptait
867 circonscriptions indigènes dont 523 étaient des secteurs.
Il faut reconnaître qu’il s’agissait d’une administration d’occupation
où la force était requise à la disposition de la domination et de l’exploitation,
nous devons à présent une administration de développement destinée à servir la
population et la croissance basée sur la participation.

• Altération progressive du pouvoir traditionnel

Négativement, la plupart d’autorités traditionnelles vont


généralement présenter aux colons des faux membres de la famille royale en vue
d’épargner la vie de lignées héréditaires. D’une manière perverse le pouvoir
colonial va confirmer les nouveaux dirigeants au détriment des aristocraties
traditionnelles. Les principes diviser pour régner va déterminer le traitement des
autorités traditionnelles coriaces et réfractaires à la pénétration coloniale. Le
traitement de faveur pour la survie politico – administrative sera réservé aux
seuls se réclamant de la légitimité coloniale. Ainsi, Kalamba chez les Lulua avait
utilisé l’astuce du rendez – vous avec nos ancêtres blancs qui allaient apparaitre
dans les maladies Makulu. Dans la même logique, il était placé à la tête des
groupements, entités coloniales nouvelles. Des personnes parfois d’une filiation
douteuse par rapport à la collectivité sur laquelle elles avaient désormais
l’obligation d’asseoir leur autorité. Très souvent, elles étaient revanchardes afin
d’altérer le pouvoir traditionnel marginalisé dans la société coloniale
d’administration directe.

Positivement, la colonisation a stoppé progressivement les


pratiques esclavagistes jugées à la longue incompatibles non seulement avec
civilisation occidentales mais surtout le maintien d’un certain ordre public
susceptible des favoriser l’exploitation maximale d’une autre nature que
directement humain. Il faut constater que l’existence d’une forme de servilité
d’assujettissement et d’aliénation fut de caractéristique des sociétés politiques
traditionnelles. Elles impliquent, en espèce, une hiérarchisation assortie d’une
catégorie important d’hommes serviles. Dans certains systèmes socio –
politiques, on retrouvait des individus rattachés au dirigeant politique. Ils
possédaient un statut hybride mi – libre.

• Confiscation des moyens de contraint légitime

L’intervention armée ou le recours à la coercition n’était plus


possible au sein des organisations politiques traditionnelles. Lorsqu’elle était
permise, elle tirait sa légitimité de l’autorisation du pouvoir colonial. Avec l’aide
de la force publique coloniale, les armées africaines ont été complètement
détruites laissant les autorités traditionnelles réinvesties dépourvues de tout
moyen propre de contrainte sur leur territoire. Seul le poids de la tradition ou la
collaboration avec l’autorité coloniale ont parmi de sauvegarder, à défaut de
révolte un semblant indépendance.

• Introduction des valeurs nouvelles

La présence coloniale imposera aux divers groupements sociaux le


régime de paix, à l’image de la pax romana, un nouveau système démographique
avec l’éclosion des centres extra – coutumiers et un nouvel écosystème avec
l’aide d’un nouveau système économique.

• Brassages d’hommes et de culture

Le jus sanguinis va perdre peu à peu sa place dans l’organisation


des entités socio – politiques traditionnelles. La tribu, par exemple va perdre le
rôle d’acteur de groupements clos, c'est-à-dire réservé à ses membres. En effet,
sur son territoire des immigrés étrangers seront installés pour de nécessités
dues à l’exploitation coloniale. De même, une partie de ses fils et filles seront
contraint à emprunter cette voie sous d’autres cieux. La condition de l’étranger
sera fonction de facilité coloniales liées à la circulation et à l’établissement des
étrangers qui sont parfois déportés sans oublier le régime de sanction.

Par conséquent, ce nouveau établissement fera basculer l’équilibre


rendu précaire du pouvoir traditionnelles car aussi bien les immigrés que les
émigrés vont progressivement échapper à l’autorité de leurs anciens
gouvernants allant jusqu’à créer des zones de libertés par rapport à ces derniers.
Seul le pouvoir de la métropole impose une certaine verticalité ou structuration à
la société par le monopole de la contrainte coloniale en coexistence et
métissage, exception faite de la sociologie de colonies portugaises comme dit
ci-haut qui avait établi une véritable politique d’assimilation. Pour les autres
colons, c’est la culture de la haine comprise dans l’acception machiavélique de
diviser pour mieux régner car seule la fin justifie les moyens, c’est le racisme. Ce
qui en termes socio – économique du travail administratif, militaire, économique
financier, voire d’évangélisation, ou le terme que plus d’intellectuels africains
récusent, la mission civilisatrice comme si la civilisation occidentale était la seule
véritable civilisation alors que les peuples africains ou barbares ont montré que
chaque peuple possède une civilisation. La civilisation occidentale n’est pas un
critère de jugement, comme pour paraphraser les auteurs du siècle des lumières,
JJ. Rousseau, Montesquieu, Voltaire et John Locke qui condamnèrent la traite au
nom de l’égalité de la nature humaine. Tous les hommes ont les mêmes droits
naturels et que la loi de la raison s’applique à tous, ce qui est immoral dans un
pays est condamnable partout. Le célèbre explorateur anglais David Livingstone
disait que les Blancs ne sont ni meilleurs ni pires que les hommes des autres
régions du globe donc Blancs comme noirs ont des qualités et des défauts
(parmi eux on pouvait y trouver les traitres, les voleurs, des poltrons…). On
remarquait un contraste entre le Blanc dans la colonie et en Europe.

• Pénétration des valeurs religieuses et des idéologies étrangères


La dualité de la conception sociale africaine imprégnée des
pratiques spirituelles résumées par l’animisme, la croyance au village des
ancêtres, renforçait la position du détenteur du pouvoir politique lorsque ce
dernier ne bénéficiait pas d’un dédoublement du pouvoir spirituel et temporel, il
négociait son statut ou l’exercice du pouvoir politique en terme du clientélisme
ou déficèle protecteur et serviteur de la tradition. En effet, le caractère magique
ou superstitieux ou encore religieux qui caractérisait l’autorité africaine par la
crainte et les remords qu’inspirait la sanction mystique contribuait au
renforcement du pouvoir traditionnel. Cette caractéristique était plus accentuée
dans les sociétés traditionnelles musulmanes. Le droit divin y consacrait le
dédoublement au profit du pouvoir en place.

Le cadre de l’exercice du pouvoir traditionnel était profondément


conditionné par le soutien spirituel d’un ancêtre d’un lignage déterminé, d’un
maitre de la terre ou de la pluie, d’un leader spirituel guerrier d’un imam influent.
En réalité, le chef était toujours considéré comme un intermédiaire entre les
hommes et les forces surnaturelles.

Il va de soi qu’avec l’évangélisation, autres piliers de la colonisation


a été diabolisé l’aspect spirituel de la conception du pouvoir. L’influence implicite
du christianisme a été déterminante dans le droit colonial, comme l’avait
d’ailleurs été dans la législation napoléonienne. La volonté explicite de Léopold II
avait été de s’appuyer sur la christianisation du Congo et principalement l’église
catholique qui envoyait des missionnaires en Afrique pour fonder son pouvoir
colonial. Les religions africaines ont clairement été considérées par les Belges
comme l’expression d’une mentalité « primitive », d’une culture mystique ou
« prélogique », n’ayant pas encore accédé à un degré suffisant de rationalisation.
En écartant principalement les valeurs mystiques ou les fétiches, le pouvoir
colonial a isolé le dirigeant traditionnel de la structure et des institutions non
seulement étatiques mais aussi traditionnelles ; il a été scié l’arbre sur lequel
était assis le pouvoir traditionnel africain. De même, l’introduction de
l’obéissance aveugle chrétienne à l’autorité va t – elle renforcer la soumission
des croyants au pouvoir colonial. Le secret confessionnel sera utilisé comme
système efficace d’intelligence pour déjouer toute revendication, même
simplement sociale, des autorités africaines réfractaires qui faisait l’objet d’une
répression policière ou d’un appauvrissement pour affaiblir davantage leur
pouvoir.

• Introduction du système monétaire et l’affaiblissement des autorités


traditionnelles
La domination coloniale, précédée ou non d’une conquête, a
démantelé tout le système économiques, politique et socioculturel de grands
empires, royaumes ou chefferies africains. La colonisation, estime Lord Lugard,
est devenue une affaire prospère et rentable.

D’où son inclination pour le système français pour lequel le fardeau colonial
devrait être aussi léger que possible, ce qui impliquait la mise à contribution des
populations. Le Congo belge constituait une illustration de colonie type rentable
et dirigé par une politique paternaliste. Jusqu’en 1945, le développement
économique fut quasi uniquement orienté vers l’exploitation des matières
premières : cuivre, étain, or, diamant, caoutchouc, huile de palme, café, coton et
le processus d’industrialisation et de développement local commenceront
progressivement.

En outres, la quasi – absence d’investissement initiale ne nécessité


aucun effort d’amortissement et ne dégage aucun autofinancement : l’objectif
est d’obtenir le gain maximum en gardant la possibilité de se retiré à tout
moment, des lors que la rentabilité devient très faible. L’économie de traite qui se
développa en Afrique occidentale française préfigure ce que Catherine Coquecy
– Vidrovitch appelle l’économie de pillage. Dans ce système, les sociétés privées
s’appuient sur l’Etat qui, parfois, fourni l’essentiel du capital que ces entreprises
doivent rétrocéder après avoir mis en valeur. Peu intéressée par les risques et les
faibles profits, une quarantaine de compagnies concessionnaires exploitent en
Afrique équatorial française les ressources naturelles comme la forêt, l’ivoire et
le caoutchouc. En RDC, l’exploitation minière est assurée par un conglomérat
d’intérêts dépassant le cadre des simples intérêts belges. Ce qui implique
l’internationalisation.

Avec l’implantation effective de la bureaucratie coloniale, la


situation économique des chefs traditionnels qui ne veulent pas coopérer de leur
gré va se détériorer sérieusement. En outre, la simple possession de substance
n’a plus de valeur dans le système économique moderne.

Par ailleurs, le régime agraire étant collectif, la production intensive


d’exportation fera l’affaire des économies extraverties dans lesquelles l’autorité
traditionnelle ne trouve pas son compte. C’est le cas de la culture du café, cacao,
etc. De même, les ressources humaines sont réservés aux services obligatoires
pour la mise en place des diverses infrastructures en vue d’assurer l’exploitation
au profit de la métropole. Il y a moyen d’évoquer les travaux de chemin de fer qui
débutèrent depuis 1890 jusqu’en 1898. La batail de rail Matadi-Léopoldville couta
la vie à 1800 africains et 132 européens à cause des difficultés du terrain et du
climat.

Par ailleurs, le pouvoir colonial s’est réservé le droit de battre la


monnaie. Le recours au troc n’est plus rentable car toutes les matières
précieuses sont confisquées par la métropole pour, entre autres, contrôler
l’organisation économique des sociétés politiques africaines. Ce qui dans ce
cadre était un puissant moyen d’affermissement du pouvoir politique. C’est ainsi
que chez les Alurs, la chefferie avait pour base économique la réciprocité des
biens et services au milieu de cet échange, le chef jouait le rôle central.
L’organisation économique traditionnelle qui renforçait l’autorité par la réception
des dons de tout genre (milambu ou le tshitadi), la nature du système fiscal que
le chef exécutait et contrôlait ainsi que la possibilité qu’avait le chef de contrôler
l’ensemble des revenus qui donnait au chef une position privilégiée, toute cette
architecture va être ébranlé. L’introduction d’une économie monétaire,
l’implantions d’industries et l’importation d’une technologie nouvelle furent les
principaux éléments qui échappèrent à cette boite de Pandore, que constituait la
civilisation occidentale, et qui furent cause de changements radicaux dans la
mesure où ces innovations suscitèrent un décloisonnement des entités
ethniques, une redéfinition des rapports sociaux et une réorganisations des
moyens de production et des échanges économiques et commerciaux.

Le développement ne peut donc, à l’heure actuelle se poursuivre


qu’en accélérant et qu’en précipitant les modifications profondes déjà amorcées
au niveau des structures et de l’organisation des communautés autochtones. Ce
processus de déstructuration sociale apparaît comme inévitable et irréversible
car ces institutions traditionnelles se montrent presque incapables d’évoluer et
de se transformer assez vite pour pouvoir s’adapter aux exigences et aux
impératifs de la vie moderne.

Dans les sociétés disposant d’un pouvoir central, l’organisation économique


traditionnelle renforçait l’autorité traditionnelle notamment par :

• La réception de dons de tout genre, Mulambu ou le prélèvement, tshitadi


sur les échanges symboliques des biens. Ces échanges permettaient aux
relations socio – politiques de se manifester d’une façon plus
systématique et personnelle ;

• La nature du système fiscal que le chef élaborait, exécutait et contrôlait ;

• La possibilité qu’avait le chef de contrôler l’ensemble des revenus. Cela


donnait au chef une position privilégiée par rapport à d’autres sujets. Or,
tous ces mécanismes d’accumulation des ressources avaient été
supprimés par le pouvoir colonial.

• Systèmes d’administration coloniale

Le mode de gouvernement colonial constitue un système centralisé


basé sur la politique tracée par le ministère des colonies ou colonial office dans
le cas anglais. Avec au départ la signature des nombreuses conventions dont la
finalité était de placer les autorités traditionnelles sous le contrôle des autorités
coloniales, on en est venu à provoquer, comme disait Mbaya Ngang l’érosion du
pouvoir traditionnel.

• Système français

Dans les sociétés politiques ou l’organisation politique était


différenciée comme dans les monarchies, le souverain et les dirigeants placés à
la tête des provinces étaient toujours subordonnés à l’autorité européenne. Celle
– ci était représentée dans chacune des circonscriptions coloniales. Cette
dépendance entrainant non seulement l’érosion de l’ensemble des pouvoirs
traditionnels mais aussi le contrôle étroit du fonctionnement de l’appareil
politique résiduel.

Le pouvoir traditionnel perdra sa légalité et son influence, cette


politique d’assimilation, de centralisation et d’européanisation appliquée dans les
colonies belges et françaises créa un fossé entre les dirigeants et les citoyens en
même temps qu’elle éloignait, aussi bien culturellement et géographiquement les
deux civilisations à cause de la distance entre les institutions et les populations.
Comme on peut le remarquer par exemple dans le domaine de la justice, on se
dispensa de suivre le modèle des administrateurs anglais qui consistait à
identifier les chefs des groupes ethniques en vue de leur déléguer certaines
responsabilités. Ce sont donc les fonctionnaires français et belges qui rendaient
la justice sans chercher à adapter leurs décisions aux coutumes et à la mentalité
des gens qu’ils avaient à juger.

Par ailleurs, le droit politique coutumier fut majoritairement abrogé


au profit du droit public européen. Dans certaines matières relatives aux droits
privés, une sélection était faite en matière de statut personnel en vue d’éviter le
respect des normes coutumières contraires à la mission civilisatrice judeo –
chrétienne. C’est la subordination du droit coutumier au droit colonial avec
comme conséquence la perte de l’initiative des lois qu’avait tout chef
traditionnel. Cette dépendance coloniale privera également les autorités
traditionnelles de l’indépendance de leur pouvoir judiciaire, qui constituait un
attribut important de la souveraineté politique.

Également, ce phénomène, constate dans les royautés ou empires,


se manifeste t – il également dans des petites chefferies sans armatures
administratives. La colonisation française introduira également la notion de
séparation des pouvoir chère à Montesquieu. Un terme sera donc mis à la
rependue confusion des pouvoirs, ce qui est de nature à limiter les droits, de
rendre justice, reconnu par le droit coutumier. Dans tous les cas, même si la
délégation subsiste dans certains domaines, les jugements rendus par les chefs
coutumiers sont toujours susceptibles d’appel devant l’autorité coloniale ().
• Système Britannique

Le pragmatisme du système se caractérisait par sa diversité. C’est


un système d’administration indirecte qui tient compte de la nécessité pour le
colonisateur de coopérer avec la faible administration traditionnelle au sein du
système coloniale. Les autorités indigènes sont reconnues par le gouvernement
indirect. Cette forme d’administration combine le maintien d’un contrôle exercé
par la puissance coloniale avec la participation des sociétés traditionnelles pré –
coloniales à la réalisation des objectifs coloniaux. Elles se voient ainsi, du moins
formellement, attribuées un certain nombre des compétences qu’elles exercent
sous le contrôle de l’administration coloniale.

Le modèle de l’administration indirecte était basé sur l’intégration


des autorités traditionnelles dans l’organisation politique de l’Etat colonial, ne
laisse que des compétences résiduelles à ces autorités en matière de statut
personnel et d’atteinte mineure à l’ordre public. Dans la pratique, la technique du
gouvernement indirect, ne se généralise pas à l’ensemble des systèmes
permettait d’asseoir l’autorité coloniale. Les Anglais, en plaçant la plupart des
responsabilités administratives dans les mains des chefs indigènes,
élargissaient, à moindre coût, l’étendue de leur gouvernement, car ils limitaient
les recours à des officiers coloniaux. En même temps, l’intégrité et l’autonomie
des tribus et des ethnies étaient maintenues. Mais elles étaient aussi contrôlées.
Trois raisons amenèrent les Anglais à opter pour cette politique qui faisait
dépendre les tribunaux de l’appareil administratif au lieu du système judiciaire :

• Les chefs traditionnels conservaient leurs pouvoirs exécutifs et leurs


pouvoirs judiciaires ;

• Ils étaient d’abord des administrateurs et, en second lieu, des juges ; en
conséquences, il était plus facile de surveiller leurs activités ;
• C’était une façon judicieuse d’utiliser les tribunaux traditionnels comme
des outils pour implanter les politiques coloniales.

Par la suite, les tribunaux locaux furent intégrés dans le système


légal unique de chaque pays, dans l’intérêt de l’administration de la justice et de
l’unité nationale, mais sans qu’ils soient totalement abolis. Si, dans certains
secteurs, les règles traditionnelles ou les préceptes musulmans pouvaient être
appliqués, c’était à la condition qu’ils n’entrent pas en conflit avec le droit
statutaire. Cette politique permettra au Kenya et à la Tanzanie d’unifier les lois en
recensant les règles coutumières, ce qui permit d’en incorporer dans la
législation nationale. En Tanzanie, les tribunaux locaux furent considères comme
cours de première instance. Au Ghana, le conseil traditionnel a le pouvoir de
conseiller le Gouvernement pour inclure des lois coutumières dans la législation
pourvu qu’elles ne répugnent pas aux lois du Ghana et ne soient pas contraires à
la justice naturelle.

La dénaturalisation des autorités pré – coloniales ou des modes de


régulation politique résulte également de l’intention d’instaurer un ordre politique
pas toujours respectueux des systèmes précoloniaux, consécutif à la mise en
œuvre d’une nouvelle légitimité engendrée par le régime colonial. Ce régime a
intégré les acteurs politiques africains à l’appareil administratif.

Exemple :

Au Sénégal, les marabouts ou les chefs religieux en échange de


maintien de leurs prérogatives se firent les agents zélés de l’administration,
allant jusqu’à former un rôle particulier dans l’adhésion du Sénégal à la colonie
française en 1958.

L’antagonisme entre le gouvernement indirect et direct peut se résumer en une


dichotomie juridique. Toutefois, elle simplifie une réalité socio – politique plus
complexe ou les modes de gestion politique se sont employés à trouver de relais
dans les systèmes pré – coloniaux qui a fini par les décrédibiliser.

CHAPITRE IV : ETAT POST – COLONIAL

L’Afrique a hérité un Etat à la suite de la décolonisation, un


processus qualifié d’Etat post colonial à l’exception de deux pays africains qui
avaient échappés aux grandes vagues de la colonisation systématique, l’Ethiopie
qui avait recouvré son indépendance en 1941 et le Liberia, constitué en Etat
indépendant en juillet 1947. Les causes de ce mouvement d’essor nationaliste
étaient l’influence exercée par les idées des encyclopédistes de la Révolution
française sur les élites africaines, ces derniers les rependirent dans leurs pays
d’origine et l’ébranlement de la seconde guerre mondiale et ses conséquences.

En République Démocratique du Congo, la loi fondamentale sous


l’empire de laquelle a été organisée la souveraine nationale et internationale le 30
juin 1960. Cette loi d’inspiration belge inspirée par les recommandations de la
table ronde qui avait réuni les leaders congolais à Bruxelles. L’adéquation ou
l’adaptation de cet Etat à la société congolaise pour laquelle il ne fut pas conçu
est l’un des plus grands problèmes politiques et juridiques contemporains
communs à tous les Etats.

Dans une perspective historique générale inspirée en particulier de


l’expérience des nouveaux Etats issus de la décolonisation, on peut constater
que l’Etat a précédé la Nation ou inversement. Ce qui prouve que les deux
notions ne sont pas identiques ou homogènes. Comme on peut le voir, l’Etat est
une notion juridique, l’institutionnalisation du pouvoir politique, alors que la
Nation est une notion sociologique, qui peut exister indépendamment de la
personnalisation de l’Etat sous forme juridique. L’Etat est une personne morale,
alors que la Nation n’a pas de personnalité juridique.

L’exemple des Etats africains issus de la décolonisation est


révélateur. Ces Etats se sont formés dans les années 1960. L’administration
coloniale qui suivi la conférence de Berlin de 1885 a été remplacée par des Etats
jouissant de la personnalité juridique, et regroupant des populations très diverses
et hétérogènes, souvent issues d’anciens royaumes ou d’anciennes chefferies.
En sens inverse, des peuples unis par des éléments ethniques ou culturels se
trouvèrent brutalement scindés en plusieurs colonies. Des peuples sont écartelés
entre plusieurs Etats, en même temps que les Etats sont souvent multinationaux.
Il apparait donc dans ce cas que l’Etat a précédé la Nation.
On peut également se poser la question sur l’existence d’une Nation
belge en raison de l’existence parfois conflictuelle, de deux communautés
ethnolinguistique : les Wallons et les Flamands. En revanche, l’éclatement de
l’Ex-URSS à la fin des années 1980 et début 1990 et de l’Ex-Yougoslavie, a fait
surgir des Etats dont la Nation avait précédé l’Etat (exemple Croatie,
Bosnie-Herzégovine). On peut également penser aux palestiniens, aux Kurdes,
etc., qui faute de territoire, ne peuvent se constituer en Etats.

Si l’on considère que, juridiquement l’Etat suppose l’union des trois


éléments, une population, un territoire et un pouvoir politique, on s’aperçoit que la
Nation n’est qu’un élément de l’Etat. Pour identifier une Nation, certains auteurs
mettent à l’avant plan des éléments objectifs et d’autres sur l’élément subjectif
qui est une composante volontariste. Les deux approches sont complémentaires
et peuvent être tenues ensemble.

La conception objective de la Nation, développée surtout au XIXe


siècle par l’Ecole historique allemande (Fichte, Discours à la Nation allemande
1808), met l’accent sur les caractères objectifs communs aux individus qui
composent un groupe. Ces caractères peuvent être ethniques, culturels, religieux,
historiques. Ils assurent la spécificité d’une Nation par rapport à une autre : la
race, la langue, la religion, la géographie, les traditions, une culture et une histoire
communes. Ces caractéristiques communes, objectives parce qu’extérieures aux
individus, créent le sentiment d’appartenir à une même communauté, resserrent
les liens de solidarité entre les membres du groupe et renforcent la cohésion
sociale. La Nation est conçue comme une communauté naturelle.

Ces éléments sont d’ailleurs souvent repris, avec ou plus ou moins


de variantes, par les théoriciens du nationalisme et les revendications
nationalistes. On peut aussi penser que c’est sur cette base qu’a été reconnu, en
droit international, le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, bien que, pour
les Etats déjà formés, cette revendication est souvent écartée au profit de
l’exigence du respect des droits des minorités.

La conception subjective de la Nation s’est inspirée des théories du


contrat social. Elle met l’accent sur le désir ou la volonté de vivre ensemble qui
animerait les membres du groupe social. Il s’agit donc d’une conception
volontariste de la nation. La Nation serait le résultat d’une libre décision, d’un
choix volontaire d’individus de s’associer pour vivre ensemble, pour un destin
collectif commun. Au-delà de la diversité des groupes, c’est la volonté de vivre
ensemble. Cette volonté les constitue en peuple de l’Etat, domaine de validité
personnel de l’ordre juridique. La Nation ici est perçue comme une société
contractuelle.

La complémentarité des deux conceptions peut être dégagée dans


le rapprochement de deux conceptions. Du point de vue théorique ; les deux
conceptions sont incompatibles par le fait que l’une est inscrite dans la nature du
groupe et, l’autre surgit d’un acte volontaire. Mais des auteurs comme Ernst
Renan ont tenté de concilier les deux approches. Pour cet auteur, le Nation est un
principe spirituel, « le vouloir-vivre collectif », c’est-à-dire une volonté de vivre
ensemble, enracinée dans une histoire et dans les souvenirs communs. Une
Nation écrit Renan est une âme, un principe spirituel. Deux choses, qui, à vrai
dire, n’en font qu’une, constituent cette âme, ce principe spirituel. L’une est dans
le passé, l’autre dans le présent. L’une est la possession en commun d’un riche
legs de souvenirs, l’autre est le consentement actuel, le désir de vivre ensemble,
la volonté de continuer à faire valoir l’héritage qu’on a reçu indivis. A la suite de
Renan, beaucoup d’auteurs fondent la Nation à la fois sur des éléments objectifs
et sur des éléments volontaristes. La Nation trouve son origine dans le sentiment
d’une solidarité qui unit les individus dans leur volonté de vivre ensemble. Sans
doute les éléments déterminants de ce sentiment sont divers : la race, la langue,
la religion, les souvenirs communs, la culture.

• SECTION 1 : SOCIÉTÉ AFRICAINE ET L’ETAT POST COLONIAL

Les recherches autour de l’Etat en Afrique tournent au tour du


concept de patrimonialisme, en d’autres termes au tour de la conception
traditionnelle qui consiste à ne pas établir les frontières entre le patrimoine
personnel des dirigeants et celui de l’Etat. C’est une confusion voulue entre le
droit public et le droit privé. Ce phénomène est au tour des systèmes politiques
post coloniaux. En vertu du principe, chaque Etat peut se doter de l’organisation
politique, administrative, sociale et économique de son choix. C’est ainsi qu’on le
trouve dans le préambule de la Constitution, il est proclamé : « Réaffirmant notre
droit inaliénable et imprescriptible de nous organiser librement et de développer
notre vie politique, économique, sociale et culturelle selon notre génie propre ».

Paragraphe 1. Constitutionnalisme

Le constitutionalisme est apparu comme mode d’accréditation des


régimes africains vis-à-vis des leurs anciennes métropoles. Aussi sur le plan
international comme modèle de comportement qui égalerait les pays africains
industrialisés. La classe politique incapable de rédiger une constitution qui en
principe devait intégrer la vision du monde africain du droit et de la gestion du
pouvoir politique s’est vu obliger de recourir aux experts occidentaux pour la
rédaction du type de constitution moderne. Ce modèle de constitution n’a pas pu
intégrer la coutume dans le fonctionnement de futur Etat indépendant. Cette
difficulté des experts sur quel type de constitution associé à l’impréparation
des cadres n’ont pas tardé à plonger la plupart d’Etats africains dans le chaos.
A priori, le développement du constitutionnalisme n’était pas
directement la conséquence des traditions politiques de l’Afrique noire. Les
systèmes politiques traditionnels de l’Afrique noire ne reposaient pas sur le
constitutionnalisme. Qu’ils s’agissent des sociétés à Etat ou plus forte raison,
des sociétés an étatiques, le pouvoir avait un fondement légal et rationnel.

Le fait de se doter d’une constitution apparut une nécessité pour les


jeunes Etats indépendants pour montrer la capacité du fonctionnement des
institutions démocratiques. Les Etats se dotèrent des constitutions proposées
par la métropole. L’action exercée directement par l’ancienne puissance
coloniale est la forme plus nette de cette influence externe. L’adoption des textes
constitutionnels par les Etats francophone d’Afrique noire fut, tout d’abord,
directement commandée par l’ancienne puissance coloniale. Pour la République
Démocratique du Congo, le Roi des Belges promulgua la première constitution
élaborée par un comité qui regroupait les représentants de la Belgique et les
différents membres des partis politiques congolais.

Adopter une constitution était considéré comme la preuve que l’Etat


« méritait » l’indépendance qu’il avait acquise. Il manifestait sa « maturité
politique » et respectait les règles du savoir faire et savoir vivre international. Les
nouveaux gouvernants se montrèrent très rigides contre la coutume comme le
temps de l’administration coloniale. Ils étaient toujours en opposition avec les
pouvoirs traditionnels qui incarnaient cette forme de gouvernance africaine.

Le passage du régime parlementaire au régime présidentiel qui a


fini par être présidentialiste illustre le goût de beaucoup de chefs d’Etat africain
qui voulait la gestion politique du pouvoir en gestion coutumière. Le pouvoir
coutumier est héréditaire, le chef ne peut être remplacé de son vivant. Cette
culture avait façonné beaucoup de dirigeants africains qui n’ont pas voulu quitter
le pouvoir facilement.

Pour le cas de la République Démocratique du Congo, le régime


parlementaire avec une forte autonomie des provinces étaient le fruit de l’étude
des experts belges par rapport à des multiples agitations et conflits tribaux que
la République avait connu. L’intolérance, l’incompréhension, l’immaturité
conduiront le pays dans une cacophonie dans cette école d’apprentissage de la
démocratie. L’administration belge ne se préoccupait guère de préparer les
élites congolaises à prendre le pouvoir en mains. La Belgique pensait amener
lentement les populations à l’autonomie et n’envisageait l’indépendance que
dans un avenir très lointain c.-à-d. le plan de trente ans pour l’émancipation
politique de l’Afrique belge. Le Congo qui était parmi les meilleurs élèves de la
démocratie à commencer à sombrer dans l’inconstitutionnalité.

Dimitri Georges Lavroff dit « ainsi, durant les premières années de


leur indépendance, les Etats francophones d’Afrique noire ont paru vouloir
adopter un constitutionnalisme considéré comme modèle dominant de cette
moitié du XXe siècle. Leur comportement satisfaisait tout le monde. Les Etats
d’Afrique noire avaient le sentiment de donner ainsi la preuve de leur « maturité ».
Pourtant, les Etats africains commençaient à remettre en cause les modèles
constitutionnels suivis jusqu’alors. Le présidentialisme négro – africain et le
renforcement considérable des pouvoirs du chef de l’Etat dans les constitutions
qui relevaient du cadre parlementaire en illustration. La qualité africaine prévalait
sur la soumission à un modèle constitutionnel venu de l’extérieur. Ce phénomène
s’amplifia avec le déclin du constitutionnalisme qui se produit à partir de 1963 »
().

La République Démocratique du Congo, au moment de son


indépendance avait connu une vive tension entre les deux courants à savoir le
courant fédéraliste et le courant unitariste. Cette tendance avait inspiré la loi
fondamentale du 19 mai 1960. Qui en soit ne parlait pas du fédéralisme d’une
manière expresse. Ce fédéralisme tempéré voulait être un compromis régional
exprimé par les notables traditionnels et la Conakat de M. Tshombe.

Cette situation des tensions politiques perdura après


l’indépendance, créa des sécessions, des rebellions, des mutineries, des
discordes et des conflits politiques à travers la République. Probablement
l’alliance des chefs traditionnels à la Conakat avait pour objectif la restitution du
pouvoir aux chefs coutumiers qui voyaient leurs pouvoirs être confisqués pouvoir
non seulement le pouvoir coloniale mais aussi le pouvoir politique de l’après
indépendance. Les chefs traditionnels se voyaient jouer un rôle de simple agent
de l’administration alors que ceux – ci détenaient leurs pouvoirs de la coutume et
incarnaient toute une culture d’un peuple. La constitution du 1er août 1964 tentera
de résoudre cette question en consacrant le fédéralisme dans la constitution qui
malheureusement n’avait pas été expérimentée pour apprécier le résultat
probable.

Le Zaïre à également abandonné la structure fédérale adopté en


1960 et confirmée en 1964, le fédéralisme congolais prétendait concilier l’unité
d’un grand ensemble territorial avec une large autonomie reconnue aux provinces
qui constituaient des entités ethniques, culturelles et économiques (). Cet
abandon n’a pas été le fruit d’un consensus, mais un mouvement qui a pris
naissance dans la plupart de pays francophone. Les tensions politiques ont
commencé à diviser les pays, à détruire l’économie et le pluralisme politique
semblait être très mal exploité par les mouvements syndicaux. Ce contexte a
permis aux militaires de prendre le pouvoir dans beaucoup de pays
francophones. Lorsque les militaires prennent le pouvoir, le premier acte des
nouveaux gouvernants est d’abroger, les plus souvent, ou de suspendre sine die
l’ordre constitutionnel en vigueur jusqu’alors. L’abrogation ou la suspension des
textes constitutionnels parait être dans la logique du mouvement insurrectionnel
car elle marque la rupture avec l’ancienne organisation politique et enlève aux
autorités destituées les fondements de leur légitimité.

En général, la Constitution traduit la volonté intrinsèque de


l’ensemble de la population de vivre en unité, en communauté dans une société
organisée par des règles ou normes juridiques qui incarnent l’ensemble de
valeurs élaborées et reconnues par tous. Ces normes constituent les principes
fondamentaux auxquels tous les membres de la communauté se conforment
impérativement. La constitution forme un pacte social qui est une loi
fondamentale de tout Etat. Instrument du pouvoir, l’Etat est l’expression de la
volonté politique de la population d’un pays et l’ordre juridique mis en place doit
tenir compte des réalités d’un peuple.

Le système politique se définit à partir des rapports qui


s’établissent entre les organes de pouvoir, selon que l’on organise une séparation
ou une concentration des pouvoirs, le système politique est plus complexe. Le
système est un ensemble d’éléments interdépendants, en interconnexion et en
interaction dynamique, dans un tout structuré et organisé de sorte que toute
modification d’un élément affecte les autres.

Le système politique est ainsi un ensemble d’institutions, politiques


ou non, formelles, qui concourent à la conquête et l’exercice du pouvoir ou
influencent les modalités de cet exercice. Il prend en compte certes les organes
de pouvoir, mais aussi des phénomènes comme les partis politiques, et même
des structures ignorées du droit constitutionnel comme les groupes de pression,
les associations, les medias, la culture, l’économie, l’histoire. Le dynamisme
interne au système lui permet de s’adapter aux évolutions de son environnement
sans perdre, tout en conservant son identité intrinsèque.

Paragraphe 2. Le patrimonialisme

Le système patrimonial africain est caractérisé par une décadence,


que la plupart d’auteurs préfèrent utiliser le concept corruption. Certains ont
même ajouté celui de la violence. D’où la difficulté à expliquer la spécificité de
l’Etat en Afrique en fournissant une lecture pertinente d’un point de vu
comparatif.

Les variations autour du patrimonialisme, ce qui a donné lieu à une


inflation terminologique, à savoir le patronage, le clientélisme, le népotisme, etc.
Ceci témoigne de la pratique également en vigueur au sein des Etats occidentaux
où les scandales de pots de vin, voire le détournement des deniers publics sont
au jour le jour éclaboussés par la presse.

L’Etat lui – même a été qualité d’Etat bananier à chaque fois qu’on
pouvait y téléguider des coups d’Etat lorsque les intérêts des forces étrangers
n’étaient pas servis. D’où l’obsession pour les dirigeants africains surtout à
l’époque de la guerre froide de s’assurer de leur légitimité externe. Ensuite la
double capacité à gérer les affaires d’intérêt général qui oppose l’Etat – mou à
l’Eta – fort. Ce dernier atteint un degré appréciable d’institutionnalisation.

Jean François Bayart () préfère l’expression du concept plus


classique de patrimonialisme ou de clientélisme. L’auteur voit dans la corruption
qui traverse l’ensemble du continent africain et de leurs systèmes politiques, la
clé exploratoire de la politique africaine. Se refusant d’utiliser le concept de
corruption à cause de la connotation moralisante et occidentale, il envisage une
grille de lecture rigoureuse en termes explicatifs de symptômes et le
dysfonctionnement. L’objectif de cet auteur est d’offrir une interprétation globale
qui consiste à replacer l’Etat dans la société.

La généralisation du phénomène trouve son origine dans une réalité


consubstantielle aux sociétés africaines traditionnelles en vertu de laquelle le
pouvoir repose non seulement sur l’accumulation des biens matériels mais aussi
symbolique ().

• SECTION 2. ETAT NÉO PATRIMONIAL

Max Weber considère que le patrimonialisme repose sur une


confusion de la part du titulaire du pouvoir et entre la sphère du droit public et
celle du droit privé. Le patrimonialisme est donc inséparable du pouvoir
personnel. Les relations entre gouvernants et gouvernés sont fondées sur le lien
personnel, la loyauté personnelle au chef. Ce système se distingue de la
domination patriarcale. En effet, cette dernière renvoie à une domination sur des
personnes dépendantes en raison de leur lien de parenté avec le détenteur du
pouvoir.

Le concept Etat néo-patrimonial est vraiment typique des pays


africains et surtout subsahariens, sa généralisation et son élargissement à tous
les pays du Sud furent vivement critiqués. J.F. Bayart qualifie ce système de
politique de prébende. Dans ce répertoire se glisse une autre interprétation de
l’Etat. Les Etats subsahariens sont créés non pas pour réaliser l’intérêt général
mais plutôt pour l’enrichissement des gouvernants. Les comportements des
gouvernants vus sous le pillage des ressources nationales, donnent une nette
impression de réaliser la politique du ventre.

Paragraphe 1.Consolidation de l’Etat patrimonial

L’idéologie élaborée par le Président Mobutu a perverti le système


politique africain car le recours à l’authenticité c'est-à-dire recours logique à notre
passé a été orienté vers la recherche de solution pour se pérenniser au pouvoir.
Le mobutisme s’est inspiré du modèle traditionnelle pour légitimer le pouvoir.

Le leader incontesté était donc place au – dessus du système qu’il


modelait ou reformait à sa guise. A côté de cet aspect institutionnel, son
rayonnement atteignait le champ de représentation symbolique lorsque ce
dernier est quasi – déifié ou situe sur un piédestal, très au – dessus du commun
des mortels. Ce sont des expressions comme sauveur, guide, timonier, père de la
nation, père de la patrie, grand léopard, président fondateur, empruntées aux
idéologies fascistes ou totalitaires qui rendent compte de cette volonté affirmée.

La déformation du concept de chef traditionnel et sa récupération


dans le système politique sera la pierre angulaire au sommet de l’Etat néo –
patrimonial africain. Il en est de même en terre musulmane en matière de
restitution du pouvoir spirituel et la reconnaissance de sa primauté sur le pouvoir
temporel. Les autres pouvoirs étatiques s’analysent en termes de délégation
principalement dans le système monarchique.

La démocratisation devra être une dynamique politique autour de


l’Etat qui s’analyse en termes de forces de changement et de forces de
résistance au processus de démocratisation. Il convient pour la République
Démocratique du Congo que les enjeux militent en faveur du changement et
permettent par le recours à l’institution pour une société réellement
démocratique.

Paragraphe 2. Perspective de l’Etat post – colonial

Faut – il réadapter l’Etat aux réalités ou inventer un Etat pour


l’Afrique ? Les partisans de l’invention considèrent que la substance même de
l’Etat post – colonial ne peut qu’influer négativement sur une quelconque
tentative d’adaptation de l’Etat en Afrique. Ainsi, ils proposent la création d’un
Etat différent dans le but de faire correspondre sa base sociologique aux
attentes, structures et institutions de la collectivité étatique. L’Etat en Afrique,
ébranlé, depuis la colonisation jusqu’à aujourd’hui, par une crise institutionnelle
et politique, ne semble aucunement prendre la communauté de base vivant dans
les milieux traditionnels (village, groupement et chefferie), au mode de
production et à la culture politique conformes à la logique séculaire qui fonde
cette société. L’Etat post-colonial n’englobe que l’élite bureaucratique et
commerçante urbaine, en excluant le paysan c'est-à-dire les villages. L’africain
qu’il soit du monde urbain ou rural, est toujours guidé par certains points de
repère traditionnels fondés sur le modèle d’organisation et l’existence clanique
ou ethnique de l’ordre social. L’Etat post-colonial doit organiser les campagnes
en une mosaïque d’ethnies en interaction harmonieuse, il s’agira de divorcer avec
l’Afrique officielle avec ses Etats modernes pour une Afrique réelle avec sa
culture locale fondée sur les us et coutumes millénaires. Ce qui créera une
culture politique du terroir basée sur les réalités locales.

La solution de l’administration directe, la destruction de la culture


locale, préconisée par certains théoriciens institutionnalistes et
développementalistes, est qui existe depuis l’époque coloniale, copiée
grossièrement par l’élite depuis l’indépendance, a démontré ses insuffisances
pour contribuer au développement. L’Etat post-colonial s’est superposé sur la
structure de la société traditionnelle locale pour asseoir sa légitimité en
confisquant le système de gestion au modèle traditionnel.

Tshiyembe Mwayilapropose dans la forme de l’Etat l’innovation par


la républicanisation du pouvoir traditionnel. Certains chefs coutumiers ont joué
un rôle prépondérant à la décolonisation et ont bénéficié de fait d’un statut
dérogatoire sur lequel il faut construire pour rapprocher les gouvernés du
pouvoir. Cette légitimité traditionnelle est encore résiduelle, à ce jour, elle
provoque ainsi une dualité sociale et un dédoublement institutionnel qu’il
convient de résorber en bâtissant l’Etat autour de cette donne sociologique.

La démarche souhaitable serait de concilier le double héritage. Il


s’agit non seulement de la société pré – coloniale mais surtout la société
coloniale qui garde encore son influence. Le recours à nos structures et
institutions politiques est d’un grand secours notamment favoriser la conception
africaine de la famille a milité en faveur de la cohésion sociale au sein des
groupes réduits mais a également donné lieu à une autre fracture politique en
référence au statut privilégié accordé aux membres de la famille présidentielle
comme dans une monarchie.

Il convient de conjuguer cette forme universelle d’organisation


politique avec l’Etat de droit, celui qui limite le pouvoir par loi et impose un
respect impératif à cette limitation, les pouvoirs publics sont soumis de manière
effective au respect de la légalité par voie de contrôle juridictionnel, Un Etat de
justice pour tous, une séparation des pouvoirs et une institutionnalisation des
droits de l’homme. Ce nouvel Etat se caractérise par sa hiérarchie des normes, la
reconnaissance et le respect des droits fondamentaux. Certain contenu du droit
constitutionnel et l’imposition d’un contrôle politique via élection et juridictionnel
par le biais du contrôle de constitutionnalité. L’Etat moderne doit s’animer autour
d’un réel projet de société démocratique qui implique la légitimité de l’action
publique et l’obéissance spontanée des citoyens. Le modèle africain devra être
déterminant pour adapter toutes ses réalités à la mentalité africaine.
CHAPITRE V : LA STRUCTURE ET L’ADMINISTRATION RURALES

• SECTION 1 : LA NATURE JURIDIQUE ET LES CARACTÈRES


GÉNÉRAUX

Paragraphe 1 : L’historique

Les institutions administratives locales ont connu, depuis


l’indépendance, des bouleversements qui, comme le souligne Serge Vieux, les
ont laissées rapidement exsangues et désarticulées (). Ces bouleversements se
sont effectués sous des traits différents, dans l’ensemble, de ceux qui les
caractérisent sous la colonisation. En effet, depuis 2008, cinq réformes, à
l’exception de celle qui a été à la base de la rupture avec le passé (une réforme
radicale et brutale), les autres réformes ont en général, maintenu, tout en
essayant de les adapter aux réalités de la RD Congo.

Point n’est besoin de redire que la décentralisation de la République


Démocratique du Congo s’impose en raison de l’immensité du territoire, de
l’ultime nécessité de mobiliser et d’encadrer les masses à partir de la base et de
doter le pays d’une administration stable, compétente, engagée, responsable,
honnête et tournée vers le développement harmonieux, autocentré et intégral.
Pour leur part, les dirigeants du pays pensaient depuis bien 36 ans que le
développement par la base ne peut se réaliser mieux que dans un Etat unitaire
avec une décentralisation véritable et bien comprise.

• La décentralisation en République Démocratique du Congo

La première phase, la réforme du 12 mars 1969 s’est attaquée à


dépouiller le décret du 10 mai 1957 sur les circonscriptions indigènes, une
terminologie désuète datant de l’époque coloniale et dont l’emploi ne paraissait
plus convenable. Dans l’esprit et le souci de la centralisation, la réforme a eu
pour effet de supprimer les collèges permanents et d’attribuer au Ministre de
l’intérieur le pouvoir de nomination des chefs qui étaient exercés par le
Commissaire de District.

Le collège permanent était un organe qui devait servir de toile de


fond à un des principes mis à la base par la réforme du 10 mai 1957. En tant que
rouage de la circonscription, le collège devait jouer un double rôle : d’abord celui
de permettre une plus grande efficience du chef en lui faisant partager certaines
de ses attributions avec les éléments les plus qualifiés du Conseil, ensuite
susciter une participation plus poussé des meilleurs parmi les habitant de la
collectivité à la gestion de la chose publique.

Le transfert de la désignation du Chef de l’échelon local (CDD) au


pouvoir central, s’expliquait par le souci de la consolidation de l’unité nationale.
Cette ruée vers la centralisation est une indication que les autorités centrales
politiques semblaient perdre de vue que le succès d’une politique de
développement économique et social est conditionnée, en premier lieu, par leur
capacité de décentralisation.

La deuxième phase, avec la réforme du 05 janvier 1973 (), c’est la


suppression des entités locales qui est réalisée d’une façon radicale. Les
anciennes collectivités locales, entendez, la chefferie, le secteur et le centre
extra-coutumier perdent l’autonomie juridique qui leur avait été reconnue depuis
1891 et le pouvoir traditionnel est remis en cause. La perte de l’autonomie
juridique et financière privait les collectivités locales d’une partie substantielles
de leurs ressources comme les quotités additionnelles et les subsides d’équilibre
avec lesquelles elles parvenaient à des réalisations d’ordre économique telles les
coopératives, les paysannats, l’entretien du réseau routier. L’investiture
héréditaire des chefs coutumiers tombe et ceux-ci deviennent des fonctionnaires
comme les autres devant être mutés de leur collectivité locale d’origine à une
autre ().

La solution radicale proposée par la réforme de 1973 mettra fin à


un long processus et une longue histoire des efforts d’intégration du pouvoir
traditionnel au sein de l’organisation administrative de l’État. Il consiste en un
aboutissement d’un processus de centralisation qui s’est étendu
progressivement à tous les niveaux de la vie territoriale de la RD Congo.

La troisième phase, la réforme du 1er juillet 1977 réalisée suite au


discours du Président de la République du Zaïre, constatant la faillite du mode
d’administration du pays, il décidait la décentralisation de l’économie au niveau
territoriale et de la région. En effet, après douze ans de règne mobutiste, suite à
l’alerte de Kolwezi (guerre de 80 jours), le Président de la République décida la
démocratisation de la vie politique. Désormais, le peuple dont la voix la voix
longtemps étouffée risquait de se faire entendre trop tard, mais au détriment du
pouvoir en place, doit s’exprimer librement, choisir librement ses représentants,
et participer à la gestion des affaires qui le concerne. Il est important de signaler
qu’au cours de la période précédente, le Président Fondateur du Parti, Président
de la République, ou l’un ou l’autre des organes compétents du Parti-Etat se
réservait le pouvoir discrétionnaire de nommer les responsables et les
animateurs appelés à parler en lieu et place du peuple (gouvernement, parlement,
entité et services personnalisés).

Cette réforme se situe dans le contexte de la loi n° 78-008 du 20


janvier 1978 qui réhabilitait les collectivités locales en leur octroyant l’autonomie
qui ne fut suivie d’aucune mesure concrète d’application. Toutefois la réforme de
1977 fut partielle, car l’expérience du suffrage populaire se limitait seulement au
niveau des zones urbaines. Les dirigeants des zones rurales étaient nommés
demeurant du domaine de l’exécutif et l’autonomie financière qui est l’un des
piliers de la décentralisation resta une illusion.

En ce qui concerne le chef de collectivité, la réforme de 1977 voulait


rompre avec le passé en optant pour la démocratie et soumet celui-ci à l’élection.
Cette rupture avec les anciens modes de vie a entrainé des tensions sociales au
sein des collectivités locales.

La quatrième phase, c’est la réforme consacrée par l’ordonnance-loi


n°82-006 du 25 février 1982, organisant politiquement et administrativement le
territoire de la République. Par cette ordonnance, les autorités congolaises
matérialisaient leur volonté de rendre la décentralisation effective et l’étendre
même aux entités régionales et locales. Tout en poursuivant le mouvement
autonomiste amorcé par la réforme de 1977, la réforme de 1982 était la plus
profonde et la plus importante que la République Démocratique du Congo ait
connue sur le plan de la décentralisation. Cependant, il faut admette qu’elle se
caractérisait par un alourdissement de la structure de l’État en créant des
institutions supplémentaires et allonge la hiérarchie des échelons. Au niveau de
la collectivité locale, le bureau permanent qui fait penser à la députation
permanente du conseil de gouvernement de la période coloniale, une structure
qui risquait d’empiéter sur les droits des assemblées et devenir ainsi une source
de conflits.

L’ordonnance-loi n° 82/006 du 25 février 1982 était une véritable


révolution dont les particularités sont nombreuses et variées, pour des raisons
propres à notre enseignement, nous pouvons mettre en exergues les innovations
suivantes :

• L’instauration des assemblées délibérantes dans toutes les entités


décentralisées avec des bureaux permanents dont le président, élu par
ses pairs, diffère de l’autorité politico-administrative de la collectivité
territoriale, exception faite aux conseils de zone urbaine et de collectivité
présidés respectivement par le commissaire de Zone et le Chef de
Collectivité ;

• La création de nouvelles entités administratives centralisées comme la


cité, le quartier et le groupement avec la suppression des sous-régions et
collectivités urbaines ;
• Le remplacement de l’appellation «sous-région urbaine» par celle de ville
et extension de cette dernière dénomination aux autres agglomérations
démographiquement et stratégiquement importantes ;

• La distinction faite entre les collectivités-secteurs et les collectivités


chefferies ;

• La répartition des compétences entre le conseil Exécutif et les entités


décentralisées ;

• La dissolution des conseils institués et désinvestiture des autorités


locales des zones et des collectivités devenues centralisées ;

• La composition tripartite des organes des entités décentralisées avec une


réelle suprématie des organes du Parti, le M.P.R. sur les autres ;

• L’extension de la décentralisation même aux entités administratives


régionales.

Il sied de noter que parmi les modifications apportées par cette loi,
il n’existait aucune qui corrige les imperfections qui révèlent la tendance des
autorités centrales à remettre en cause l’expérience de la décentralisation de la
République Démocratique du Congo. Ceci montre le penchant centraliste qui
caractérise le pouvoir politique de Kinshasa depuis l’avènement de la deuxième
République qui trouve la raison dans la «sauvegarde de l’unité nationale» en
octroyant le pouvoir discrétionnaire au Président de la République en matière de
nomination des commissaires de Zone Urbaine et leurs assistants qui ne doivent
plus être issus nécessairement des conseils de leur Zone et le retrait de la
personnalité juridique aux Zone rurales et aux collectivités de moindre
importance démographique (moins de 15.000 habitants ou jugées non viables,
lesquelles redeviennent de simples circonscriptions administratives
centralisées).

Malgré toutes les innovations au processus de la décentralisation, il


y a lieu de relever des contradictions et des faiblesses qui dénaturent
systématiquement la teneur du contenu même de la décentralisation et montre
la réticence des autorités à pouvoir mettre en œuvre des structures réellement
démocratique pour concrétiser cette décentralisation. Nous pouvons relever
entre autre :

• La nomination et la révocation implicite de toutes les autorités des entités


décentralisées par le pouvoir central ; ce qui réduit leur indépendance et
l’autonomie de gestion de collectivité. Cette situation créait un esprit
fonctionnaliste et d’irresponsabilité ;

• La notion du contrôle hiérarchique à côté du procède normal de tutelle, un


procède incompatible avec la notion de la décentralisation, situation qui a
plongé le pays dans le système de la déconcentration à la place d’une
véritable décentralisation ;

• La cacophonie crée par la présence à la tête des organes délibérants des


zones urbaines et des collectivités des autorités locales chargées
d’exécuter leurs décisions. Ce qui le place dans la position de juge et
partie en réduisant la force de contrôle de l’organe délibérant ;

• Le placement de l’autorité locale inferieure sous l’autorité hiérarchique de


l’autorité immédiatement supérieure qui engendre les conflits découlant
des chevauchements et des usurpations de compétences par l’autorité
supérieure contraire à l’esprit de la décentralisation.

Une autre analyse montre que plus le nombre d’échelons est élevé
comme c’est le cas de la réforme de 1982, plus le relais sont nombreux, plus
aussi les communications entre le sommet et la base sont lentes, plus le circuit
est allongé et plus sont augmentés les risques de déformation dans la
transmission des informations. L’institution des cités en milieu rural, de la
localité et l’intégration des groupements dans les rouages administratifs
constituent autant d’échelons dont l’organisation nécessite beaucoup de moyens
tant matériels qu’humains.

La réforme de 1982 visait la fonction du chef de


collectivité-chefferie pas en la démocratisant mais plutôt en la renvoyant à la
coutume. Dans le même ordre d’idée une confusion était créée au niveau de la
zone rurale et la collectivité, toutes deux des entités décentralisées dotées d’une
personnalité juridique et que le conseil de zone rurale et le conseil de collectivité
avaient tous deux la compétence pour régler tout ce qui était d’intérêt local. De
même, la zone et la collectivité étaient autorisées à créer des taxes pour se faire
des ressources sur la même assiette territoriale. La tutelle pouvait être sollicitée
à tout moment pour trancher sur les conflits ou le danger d’empiétement entre
les deux échelons.

Il aussi regrettable de constater la timidité de cette réforme à


organiser une véritable décentralisation octroyant aux collectivités locales une
large autonomie organique et financière. De manière que la collectivité aurait pu
être dotée de véritables pouvoirs et des ressources réelles pour participer au
développement de la République. Ces imperfections ont poussé le législateur
congolais a édicté une ordonnance-loi du 14 mars 1986 qui portait certaines
modifications à certaines dispositions de l’ordonnance-loi n° 82/006 du 25
février 1982.

La cinquième phase, la réforme de 2008 consacrée par la loi


n°08-016 du 07 octobre 2008 qui est une loi organique qui s’inscrit dans le
contexte de l’application de la Constitution du 18 février 2006 qui n’épuise pas le
vaste champ de la décentralisation qui comporte une série d’autres lois devant
régir les matières particulières, notamment les lois fixant les limites des
provinces ainsi que celles de la ville de Kinshasa, de celle portant subdivision
territoriale à l’intérieur des provinces et de celle relative aux modalités
d’organisation et de fonctionnement de la conférence des Gouverneurs de
province.

La réforme de 2008 s’inscrit dans un contexte particulier des


provinces qui passent de 13 à 26 avec la décentralisation comme mode de
gestion des entités territoriales de la République. Les autorités exécutives
locales représentent le pouvoir central dans leurs juridictions respectives. Elles
exécutent les lois, édits et règlements nationaux ou provinciaux et assurent le
maintien de l’ordre public avec notamment des forces de police nationale mis à
leur disposition.

Cette réforme crée le secteur et la chefferie en entités décentralisés


avec des organes tels le conseil du secteur ou de la chefferie et le collège
exécutif de secteur ou de chefferie. La loi énumère les matières d’intérêt local qui
sont de la compétence du conseil de secteur ou de chefferie et le collège
exécutif est l’organe de gestion et d’exécution des décisions du conseil. Encore
une fois de plus cette réforme n’a pas encore opéré une véritable
décentralisation au risque de voir quelques années plus tard procéder à une
autre réforme.

• Le découpage territorial

Le terme découpage territorial commence de plus en plus à prendre


place à celui de la décentralisation. Ce vocabulaire ne date pas d’aujourd’hui, déjà
depuis lors, une première démarche dont la base de travail était constituée des
directives du Président Fondateur et du Comité Central avait pour idéal de
démembrer le territoire national soit en 14, 16, 18 ou 20 régions plus la ville de
Kinshasa selon qu’il s’agirait respectivement de la première, la deuxième, la
troisième ou la quatrième hypothèse de travail. Toutes ces hypothèses devaient
prendre en compte les critères géographiques (une superficie de 50.000 à
200.000 Km2), démographique (800.000 à 2.500.000 habitants), économique
(une région doit être capable de financer son fonctionnement par ses ressources
propres) et de dénomination (qui doit se référer à l’hydrographie, à l’orographie
ou à tout aspect caractéristique de la géographie ou de l’histoire du Zaïre).

L’ordonnance-loi n° 82/006 du 25 février 1982 montre la réticence


des autorités congolaises à traduire la volonté à l’essor de la décentralisation en
rendant sélective et non globale. Lors d’une session en 1986, la majorité des
membres du Comité Central vont s’opposer au texte l’estimant rétrograde et
incompatible à l’esprit de la décentralisation. Au lieu d’améliorer le texte pour
l’adapter au processus de la décentralisation, les autorités congolaises vont se
lancer dans le découpage territorial. Les mobiles qui militent en faveur cette
nécessité comme ceux de la décentralisation, sont à la fois l’immensité du
territoire et les impératifs du développement politique et économique.

La République Démocratique du Congo, avec ses 2.345.000 km2.


Sa superficie couvre l’Europe Occidentale et Centrale. Classée à la deuxième
position après l’Algérie. Enclavée sur 9.375 Kms de frontière et disposant de 40
kms de côte sur l’océan Atlantique, la République Démocratique du Congo
partage ses frontières avec 9 pays : le Congo à l’Ouest, la RCA et le Soudan au
Nord, l’Ouganda, le Rwanda, le Burundi et la Tanzanie à l’Est, l’Angola et Zambie
au Sud.
La communauté qui constitue la nation congolaise, est constituée
des 450 tribus qui peuvent être réparties en cinq groupes principaux : le groupe
bantou, le groupe soudanais, le groupe pygmoïde, le groupe nilotique et le groupe
hamite. La diversité ethnique s’accompagne d’une multiplicité de langues. La
population parle environ 250 dialectes rattachés soit au groupe des langues
soudanaises, soit au groupe des langues bantoues.

Première hypothèse devrait faire l’objet du découpage des régions


non touchées par la restructuration de 1966-1967, c'est-à-dire la province de
l’équateur, la province orientale, le Kivu et le Katanga respectivement en trois,
quatre et deux nouvelles provinces. Cette nouvelle délimitation devrait tenir
compte du principe de l’intangibilité des limites des provinces et des districts
actuelles et l’érection en deux ou trois districts. Ainsi nous aurons :

N° Province Chefs-lieux
1 Bas-Congo (Bas-Zaïre) Matadi
2 Bandundu Bandundu
3 Equateur Mbandaka
4 Ubangi Lisala
5 Uéle Isiro
6 Province Orientale (Haut-Zaïre) Kisangani
7 Ituri Bunia
8 Virunga Goma
9 Kivu Bukavu
10 Maniema Kindu
11 Tanganyika Kalemie
12 Katanga (Shaba) Lubumbashi
13 Kasai Oriental(Mbuji-Mayi) Mbuji-Mayi
14 Kasaï Occidental (Kasaï) Kananga

Dans la deuxième hypothèse, outre les provinces non touchées par


la restructuration territoriale de 1966-1967, il était question d’envisager le
découpage de la province de Bandundu en trois provinces : Maï-Ndombe,
Kwango et Kwilu avec comme chefs-lieux respectivement Bandundu, Kenge et
Kikwit. Le nombre de provinces passe à 16.

Dans la troisième hypothèse, le nombre des provinces passe à 18,


plus la ville de Kinshasa, il est question d’appliquer les critères aux provinces du
Katanga et du Kasaï. A ce propos, il sera dérogé aux principes d’intangibilité des
limites des provinces et des districts actuels. Le Katanga sera divisé en trois
provinces : Tanganyika (actuel district de Tanganyika) avec comme chef-lieu
Kalemie ; Lualaba-Lomami et Haut-Lomami fusionnés avec comme chef-lieu
Kamina ou Kolwezi et le Katanga (Shaba) qui couvre l’actuel district du
Haut-Katanga avec comme chef-lieu Lubumbashi. Les deux Kasaï réunies
sortiront trois provinces : Le Kasaï, chef-lieu Kananga comprenant l’ensemble
des districts du Kasaï et Lulua amputés des territoires de Dekese et de Lwiza ;
Le Sankuru avec comme chef-lieu Lodja comprenant le district de Sankuru et le
territoire de Dekese ; La province de Lubilanji avec comme chef-lieu Mbuji-Mayi
comprenant l’ensemble des districts de Kabinda et de Tshilenge plus le territoire
de Lwiza. Il s’agit là de quelques variantes près de la configuration des trois
districts de l’ancienne province du Kasaï entre 1935 et 1958.

La quatrième hypothèse enfin qui ramenait le nombre de provinces


à 20 plus la ville de Kinshasa, La conséquence logique de l’application des
critères à la province du Katanga et aux deux Kasaï sera prise comme base de
travail. Il sera déroge au principe de l’intangibilité des limites des provinces et
des districts. Toutes provinces répondant aux critères devront être érigées en
province. A cet effet, le Katanga sera divisé en quatre : le Tanganyika (actuel
district de Tanganyika) avec comme chef-lieu Kalemie ; le Lomami (l’actuel
district de Haut-Lomami) avec comme chef-lieu Kamina ; le Lualaba (ancienne
province du Lualaba) avec comme chef-lieu Kolwezi et le Katanga (Shaba) qui
couvre l’actuel district du Haut-Katanga avec comme chef-lieu Lubumbashi. Le
Kasaï Occidental en deux provinces, à savoir : Le Kasaï (district du Kasaï amputé
du territoire de Dekese) avec comme chef-lieu Tshikapa et la Lulua (district de
Lulua) avec comme chef-lieu Kananga. Le Kasaï Oriental en deux provinces, à
savoir : La province de Lubilanji (comprenant les districts de Kabinda et de
Tshilenge fusionnés) avec comme chef-lieu Mbuji-Mayi et la province de
Sankuru (comprenant le district de Sankuru et le territoire de Dekese) avec
comme chef-lieu Lodja.

L’idée de la décentralisation patauge depuis trente-six ans pour des


raisons entre autres historiques, les partisantes de l’unitarisme d’une part et les
partisans du fédéralisme d’autre part. Celle du découpage essayée et rendue
effective avec le démembrement test de l’ancienne province du Kivu est devenue
effective pour le démembrement de tout le territoire national. Pourtant la
décentralisation devra marcher de pair avec le découpage territorial pour le
développement du pays. La réussite du découpage est tributaire de la
décentralisation. Autant que le découpage s’impose pour résoudre le problème
de l’immensité du territoire, autant la décentralisation s’impose pour résoudre les
problèmes créés par la centralisation qui a paralysé l’administration et
l’économie du pays.

Paragraphe 2 : La nature juridique

La collectivité locale (chefferie et secteur) doit se situer dans le


cadre général de la structure administrative et de déterminer sa nature juridique.
Il s’agira de définir les normes et les techniques administratives qui doivent la
régir et le mode de son intégration dans l’administration territoriale. Il est
indispensable de dégager son statut juridique en tant que circonscription
administrative. La chefferie ou secteur possède les différents services d’État
installés dans son territoire et veille au bon fonctionnement. De même elle
exerce sur le plan disciplinaire et le droit de regard et d’injonction sur les
services spécialisés (police nationale, les agents représentants les différents
départements ministériels.

Le rapport entre Secteur et Chefferie ne ressort pas toujours


clairement des textes. Tantôt il semble un rapport d’identité, tantôt une relation
de différenciation. Toutefois, semble prévaloir l’aspect de différenciation si l’on
considère que le chef de Secteur, autrefois nommé parmi les fonctionnaires de
l’Etat revêtus du grade d’attaché de bureau de première classe, est désormais élu
alors que et que le chef de Chefferie est désigné selon la coutume.

En ce qui concerne la déconcentration, le chef de Secteur ou le chef


de Chefferie est représentant du Gouvernement et autorité locale. Aussi, il est
responsable du bon fonctionnement des services de l’Etat dans le secteur et la
chefferie. Le Chef de collectivité exerce, pour le compte de l’État, les attributions
importantes comme la présidence du collège exécutif, il assume la
responsabilité du bon fonctionnement des services de l’État dans sa collectivité.
En tant qu’entité décentralisée, elle est dotée d’une personnalité morale distincte
de celle de l’État. La personnalité juridique implique une somme d’intérêts à
protéger qui consiste en l’affectation d’un patrimoine général du pouvoir
créateur. Les organes de gestion de la collectivité sont dotés d’un pouvoir propre
de décision opposable au pouvoir public créateur. Celui-ci exerce non pas un
pouvoir hiérarchique mais de contrôle de tutelle destiné à sauvegarder la légalité
et à harmoniser l’intérêt de la collectivité avec l’intérêt de la nation.

Il est pratiqué à l’endroit des collectivités une décentralisation


administrative territoriale. Elle est administrative, parce que l’autonomie est
accordée à ses services publics, en l’occurrence, la collectivité face au pouvoir
exécutif de l’État (). Elle est territoriale, parce qu’une compétence générale et
géographique est reconnue aux collectivités de pourvoir à la satisfaction des
besoins considérés comme spécifiquement distincts des intérêts généraux, les
intérêts de la collectivité ().Dans le cas l’autonomie des autorités locales doit
présenter également un caractère général par le fait qu’elle s’étend à la gestion
de tous les services publics appelés à satisfaire les intérêts locaux des habitants
de la collectivité.

L’autonomie est aussi organique et implique qu’à ces autorités soit


octroyé un pouvoir de décision qu’elles exercent non pas comme représentants
du gouvernement central, mais comme représentants des pouvoirs locaux, des
personnes publiques locales c.-à-d. de l’ensemble des intérêts locaux
individualisés. Les conséquences que comporte l’autonomie sont nombreuses :
d’abord les décisions des organes engagent la collectivité. Ensuite il ne peut y
avoir entre l’État et la collectivité décentralisée de lien hiérarchique, l’État ne peut
envoyer des ordres ou des injonctions impératives, ni reformer les décisions ou
se substituer aux collectivités d’office. Enfin le collège exécutif n’est pas placé
sous l’autorité de l’État, mais sous sa surveillance et sa tutelle.

Les Entités non décentralisées ou Entités déconcentrées sont


désormais régies par la loi organique n° 10/011 du 18 mai 2010 portant fixation
des subdivisions territoriales à l’intérieur des provinces. La transformation des
anciens Districts en provinces et de certaines cités en Villes ou en Communes
rurales fait désormais disparaitre le District et la Cité de la nouvelle organisation
administrative. Il s’agit du Territoire, du Quartier, auxquels s’ajoutent le
Groupement et le Village. Ces différentes entités sont dépourvues de la
personnalité juridique.

• SECTION 2 : LA STRUCTURE LOCALE

Paragraphe 1 : La chefferie et le secteur

La collectivité-chefferie regroupe un ensemble généralement


homogène de communautés traditionnelles organisées sur la base de la
coutume et ayant à sa tête un chef coutumier reconnu et investi par les pouvoirs
publics. Par contre la collectivité-secteur renferme un amalgame disparate de
petites communautés traditionnelles indépendantes organisées sur la base de la
coutume mais numériquement trop faibles pour se développer harmonieusement
dans tous les domaines. Ces définitions datent de la période coloniale.

La loi n° 08-016 définit la chefferie comme un ensemble


généralement homogène de communautés traditionnelles organisées sur la base
de la coutume et ayant à sa tête un chef désigné par la coutume, reconnu et
investi par les pouvoirs publics, la chefferie est administrée conformément aux
dispositions de la loi précitée et à la coutume pour autant que celle-ci ne soit pas
contraire ni aux lois, ni aux édits, ni à l’ordre public et aux bonnes mœurs (article
67). Le secteur est un ensemble généralement hétérogène de communautés
traditionnelles indépendantes, organisées sur la base de la coutume. Il a à sa
tête un chef élu et investi par les pouvoirs publics. Le secteur est administré
conformément aux dispositions de la loi précitée. Toutefois, les groupements
coutumiers qui le composent, conservent leur organisation coutumière dans les
limites et les conditions prévues par la loi précitée et la loi portant statut des
chefs coutumiers (article 66).
Le danger que comportent les collectivité-chefferie particulièrement
résulte du fait que les élites traditionnelles risquent de gérer les institutions à leur
propre profit. Pratiquement le volume du travail à accomplir pour moderniser les
sociétés rurales est encore énorme et l’on remarque que les dirigeants anciens
tiennent à maintenir leur position. On remarque sur le plan des techniques
administratives que concernant les collectivités-chefferies, c’est que le faitde
faire coïncider le découpage administratif avec les zones d’habitats des
différents groupes ethniques, linguistiques et culturels peut avoir comme
conséquence d’accentuer des particularismes, des tendances divergences ou
centrifuges peu compatibles avec l’intérêt national.

La loi n° 08-016 demeure silencieuse sur la création et suppression


des collectivités. La carence des dispositions légales réside dans le fait qu’elles
n’ont pas prévu le cas de la suppression d’une collectivité pour l’incorporée dans
une autre. Sans doute le souvenir amer de nombreux conflits frontaliers riches
en rebondissement à l’époque de la prolifération des provinces, mérite une
prudence. La question de la compétence des autorités de la collectivité mérite
d’être aussi préciser car elle s’exerce non seulement à l’égard des membres de la
collectivité domiciliés sur son territoire ou y résident, mais aussi jusqu’aux
limites de ce territoire, sur tous ceux qui y circulent.

La collectivité en tant qu’échelon décentralisée doit jouir d’une


garantie constitutionnelle. Il est souhaitable d’envisager la participation de la
collectivité dans les associations avec d’autres collectivités, avec une ville ou
avec l’État. Cette collaboration devra être définie et les modalités d’exécution.
Les organes de regroupement, qu’on peut appeler syndicats de collectivités,
prendraient en charge la gestion d’un ou plusieurs services intéressant un certain
nombre de collectivités ; elles trouveraient la possibilité, en étant ensemble, de
faire face à des tâches dont chacune isolée ne pourrait réussir.

Paragraphe 2 : Organes de la chefferie ou du secteur

• Conseil de collectivité

Le conseil de secteur ou de chefferie est l’organe délibérant du


secteur ou de la chefferie, ses membres sont appelés conseillers, ils sont élus au
suffrage universel direct et secret dans les conditions fixées par la loi électorale.
Les conseillers ont droit à une indemnité équitable qui lui assure l’indépendance
et la dignité (articles70 et 71).

La composition du Conseil de chefferie ou de secteur telle qu’elle


est donnée par la loi présente un danger quand au nombre de conseillers. La loi
reste aussi muette sur la résidence des conseillers, cette prudence fait bénéficier
la collectivité de l’apport et de l’expérience des éléments instruits et plus ouverts
à la modernisation qui ne résideraient pas dans la collectivité.

Au sujet de la nature du mandat et devoirs des conseillers, la loi est


encore muette. En principe les conseillers devraient remplir un mandat libre sans
référence directe aux personnes qui les ont élus. Dans ce cas, ils représentent
l’ensemble de la population nationale et non leurs électeurs pour permettre la
politique d’intégration nationale et la compénétration progressive de toutes les
chefferies et secteurs dans une seule entité nationale ().

• Les attributions

Le conseil de chefferie ou de secteur doit jouir des attributions


d’intérêt général et des attributions d’intérêt local. Le conseil devrait être
obligatoirement consulté sur tous les projets de développement, d’aménagement
ou de mise en valeur intéressant la chefferie ou le secteur. En effet, la
modernisation d’une société implique une restructuration des rapports entre le
gouvernement et le peuple de manière que les masses puissent exercer une
certaine influence sur les aspects de la politique nationale qui affectent leur vie
().

La loi détermine les matières d’intérêt local, notamment : son


règlement intérieur, la construction, l’aménagement et l’entretien des voies
d’intérêt local ; l’organisation des péages au profit de l’l’entité conformément à la
législation nationale, l’aménagement, l’organisation et la gestion des parking de
l’entité, l’organisation du service de cantonnage ; les mesures de police relatives
à la commodité de passage sur les voies d’intérêt local et sur les routes d’intérêt
général ; la police des spectacles et manifestations publiques ; l’organisation et
la gestion d’un service d’hygiène de l’entité ; le programme d’assainissement, la
campagne de vaccination de la population et la promotion de la lutte contre le
VIH/SIDA et les maladies endémiques ; la construction et l’entretien des
bâtiments publics du secteur ou de la chefferie, des complexes sportifs et des
aires de jeux de l’entité, l’organisation des décharges publiques et du service de
collecte et de traitement des déchets de l’entité, la construction, l’aménagement
et la gestion des salles de spectacle de l’entité ; la construction et l’exploitation
des mini-centrales pour la distribution de l’énergie électrique, l’installation des
panneaux solaires, l’aménagement des sources et forages de puits d’eau pour la
distribution ; l’initiative de création des crèches, des écoles maternelles,
primaires et secondaires, professionnelles et spéciales conformément aux
normes établies par le pouvoir central ; la construction, la réhabilitation des
bâtiments des crèches et écoles maternelles, la mise en place des structures et
l’exécution des programmes d’alphabétisation des adultes ; la création et la
gestion des centres sociaux, l’assistance aux personnes vulnérables et la
protection des personnes de troisième âge dans le ressort de l’entité ; la création
et la supervision des centres commerciaux et postes d’achat des produits
agricoles ; l’organisation des campagnes agricoles, la promotion de l’élevage et
de la pêche ; La création et la gestion des sites historiques d’intérêt local,
l’organisation du tourisme dans le ressort de l’entité ; la création et la gestion des
centres culturels et des bibliothèques ; l’organisation et la gestion des cimetières
de l’entité et l’organisation des pompes funèbres.

Le conseil du secteur élit le chef de secteur et le chef de secteur


adjoint dans les conditions fixées par la loi électorale. S’agissant du chef de
chefferie, celui-ci désigné selon la coutume et secondé par trois échevins de
chefferie.

Le conseil du secteur ou de la chefferie est dirigé par un bureau


composé d’un président, d’un vice-président et d’un rapporteur. Les membres du
bureau sont élu dans les conditions fixées par le Règlement intérieur en tenant
compte de la représentation de la femme.

• Le fonctionnement

Du point de vue de la participation, le système de réunions du


conseil de secteur ou de chefferie permet de réunir celui-ci chaque fois que
l’exige la participation aux affaires de l’entité. Cependant pour rapprocher le
conseil de la population, il devrait se réunir sur le lieu où se situe une affaire à
régler par lui. L’important serait de donner au conseil de secteur ou de chefferie,
sous certaines conditions, la possibilité de se réunir, dans des localités qui
composent le secteur ou la chefferie afin de régler les problèmes particuliers à
ces localités (succession ou conflit de terre).

Le président du bureau convoque le conseil et l’ordre du jour, il est à


propos d’indiquer certains éléments de la procédure tels pour la convocation des
sessions, la modalité de convocation, par écrit ou pas, le délai et la publicité à lui
donner, l’enregistrement de la convocation dans un registre et sa communication
à l’autorité supérieur. Le président du conseil exerce trois prérogatives
importantes qui sont le droit d’ouvrir et de clôturer les séances, la direction des
débats et enfin la police de l’assemblée. Il est important lorsque les pouvoirs
publics créent des organes, ils veillent à ce que ces organes poursuivent bien le
but que l’État leur a assigné.

• Le Collège exécutif

• Le Chef de collectivité

Le chef de secteur ou de chefferie est l’autorité de cette entité. Il


est le chef du collège exécutif de la chefferie ou du secteur.

Le chef de secteur assure la responsabilité de la bonne marche de


l’Administration de sa juridiction, il est l’officier de police judiciaire à compétence
générale ; il est l’officier de l’état civil ; il est l’ordonnateur principal du budget du
secteur ; il représente le secteur vis-à-vis de la justice ; il exécute les lois, les
édits, les règlements nationaux et provinciaux, les décisions et les règlements du
secteur ; il assure le maintien de l’ordre public dans sa juridiction, à cette fin, il
dispose des unités de la police nationale y affectées.

Le chef de secteur adjoint assiste le chef de secteur dans l’exercice


de ses fonctions et assume son intérim en cas d’absence ou d’empêchement. Il
s’occupe, sous l’autorité du chef de secteur, des taches spécifiques lui confiées
par l’arrêté portant organisation et fonctionnement du collège exécutif du
secteur.

Le chef de chefferie exerce l’autorité coutumière et définit les


orientations relatives à la bonne marche de sa juridiction, il est l’officier de police
judiciaire à compétence générale, il est l’officier de l’état civil, il représente la
chefferie en justice et vis-à-vis des tiers.

Le premier échevin assure la responsabilité du bon fonctionnement


de l’administration. Il est responsable devant le conseil, il est l’officier de police
judiciaire à compétence générale et de l’état civil par délégation. Il exécute les
lois, les édits, les règlements nationaux et provinciaux, les décisions et les
règlements de la chefferie. Il assure le maintien de l’ordre public dans sa
juridiction. A cette fin, il dispose des unités de la police nationale y affectées

Pour le chef de chefferie, le problème reste entier et posé étant donné le


caractère dualiste du chef. En effet, le chef de chefferie suspendu
administrativement pour une faute perd-il nécessairement la confiance
coutumière de sa population ?

Le chef de chefferie ne répond pas de ses actes devant le conseil de


chefferie. Aucun de ses actes ne peut produire d’effet s’il n’est contresigné par
un Échevin qui par cela, s’en rend seul responsable devant le conseil de chefferie.
En cas de décès, démission, empêchement définitif, incapacité permanente ou
condamnation irrévocable du chef de chefferie pour un fait portant atteinte à
l’honneur ou la dignité, les trois Échevins expédient collégialement les affaires
courantes en attendant la désignation du nouveau chef.

En cas d’urgence, le chef de chefferie ou de secteur peut, le collège


exécutif de secteur ou de chefferie entendu, prendre des règlements
d’administration et de police et en sanctionner les violations par des peines ne
dépassant pas sept jours de servitude pénale principale et 2500 francs congolais
d’amende ou par l’une de ces peines seulement. Il les communique
immédiatement en indiquant les raisons de l’urgence au conseil.

• Les attributions du Collège exécutif


Le Collège exécutif, sans préjudice d’autres attributions qui peuvent lui être
conférées par des textes particuliers, assure :

• L’encadrement des populations en vue de la réalisation du programme


agricole et économique de l’entité ;

• L’exécution des taches d’intérêt général lorsqu’il est requis spécialement


par l’autorité supérieure ou lorsque l’urgence s’impose ;

Veille à :

• L’amélioration de l’habitat ;

• La sauvegarde du patrimoine et, spécialement :

• L’entretien du réseau routier

• La gestion du domaine ;

• La protection :

• De la flore ;

• De la faune ;

• Des ouvrages d’art et des sites classés ;

• Des eaux, des cours d’eau et des rives ;

Paragraphe 3 : Les subdivisions de la chefferie ou du Secteur

• Le Groupement

Le Groupement est définit comme toute communauté traditionnelle


organisée sur la base de la coutume et érigée en circonscription administrative,
sous l’autorité d’un chef désigné conformément à la coutume, reconnu par le
pouvoir public, conformément à l’article 25 de la loi organique n°10/011. Lorsqu’il
est compris dans les limites d’une commune, on parle de Groupement incorporé,
il a le statut de Quartier, même s’il conserve son organisation traditionnelle. Le
Groupement est subdivisé en villages.

De nouveaux Groupements peuvent être érigés ou crées par Décret du Premier


Ministre, pris sur proposition du Ministre de l’intérieur, après délibération en
Conseil des Ministres et après consultation des populations concernées.
Reconnu par Arrêté du Ministre de l’intérieur, le Chef de Groupement est, selon la
situation de celui-ci, placé sous l’autorité de chef de secteur, du Chef de Chefferie
ou du Bourgmestre. Ces attributions sont identiques à celles du Chef de Quartier.

• Le Village

Le Village est une communauté traditionnelle organisée sur la base de la


coutume ou des usages locaux et dont l’unité et la cohésion interne sont fondées
essentiellement sur les liens de parenté et de solidarité. Il est dirigé par un Chef
du Village désigné suivant la coutume ou aux usages locaux. Ce Chef de Village
est reconnu par Décision de l’Administrateur de Territoire et installé par le Chef
de Groupement en présence du Chef de Secteur ou du Chef de Chefferie. Si le
Village se trouve au sein d’un Groupement incorporé, le Chef du Village est
reconnu par le Bourgmestre, mais son installation revient au Chef de
Groupement.

Placé sous l’autorité du Chef de Groupement, le Chef du Village est responsable


du recensement administratif de la population, de l’hygiène et de la salubrité
publique dans son Village. En outre, il veille aux déclarations de naissance et de
décès, ainsi qu’à l’enregistrement des mariages célébrés en famille.

Sur le plan financier, les dépenses de fonctionnement et d’investissement du


territoire, comme la rémunération de son personnel relèvent du budget de l’Etat.
Par contre celles du Groupement et du Village sont prises en charge par le
Secteur ou par la Chefferie, sauf le Chef de Groupement qui est rémunéré par la
Province.

Sur le plan administratif, les entités déconcentrées fonctionnent sous la


coordination et la supervision du Gouverneur de Province. Leurs actes sont
susceptibles à la fois d’un contrôle administratif et d’un contrôle juridictionnel.

BIBLIOGRAPHIE
• Textes légaux

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