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Université Blida 1

Institut des Sciences Vétérinaires


Microbiologie Générale - Virologie (2e année) 2020 / /2021
Dr AKLOUL K.

Virologie La Multiplication virale


Le fait que les virus ne renferment qu’un seul type d’acide nucléique ; qu’ils soient
dépourvus de tout métabolisme et incapables de se multiplier sur milieu inerte et
qu’ils ne peuvent se reproduire qu’au sein d’une cellule vivante à partir de leur seul
matériel génétique implique un mode de multiplication particulier.
Le virion doit obligatoirement pénétrer dans une cellule vivante pour utiliser les
systèmes de synthèse de la cellule normale qu’il infecte. C’est la cellule qui va
produire les nouveaux virions selon un procédé de biosynthèse qu’on appelle la
réplication.
Du fait de leur parasitisme absolu les virus ne peuvent se multiplier qu’au sein d’une
cellule hôte. Il est donc nécessaire qu’il y ait interactions virus – cellules.

1. La multiplication d’un virus


La multiplication au sein des cellules est un processus de réplication et non une
division : la particule virale se décompose, puis est reconstruite en de multiples
exemplaires par l'auto-assemblage des différents composants que la cellule fabrique,
sous le contrôle du génome viral.

La multiplication virale regroupe tous les évènements qui vont de l’adsorption du


virus sur la cellule cible jusqu'à la libération des nouveaux virus. Elle s’accompagne
le plus souvent d’une inhibition cellulaire.

Le cycle de multiplication s'effectue en six étapes :


1.1. Attachement (Adsorption)
Entrée en contact de la surface virale sur la surface cellulaire. Il se fait donc par des
protéines de la capside pour les virus nus, par des glycoprotéines du péplos pour les
virus enveloppés. Ces protéines ou glycoprotéines s’attachent à des récepteurs situés
sur la membrane cytoplasmique de la cellule hôte.
Ce récepteur cellulaire n’est pas exprimé dans le but de favoriser l’infection par les
virus. Il joue généralement un rôle physiologique important pour la cellule en
question: interaction avec les cellules voisines, capture et transport de composés
extracellulaires....

Ce besoin de récepteurs cellulaires de la membrane cytoplasmique pour les virus


explique qu’un virus donné ne peut infecter qu’un nombre restreint d’espèces
animales (tropisme d’hôte) avec des tropismes tissulaires et cellulaires précis.
Ainsi, les poliovirus n’infectent que l’homme et, expérimentalement, les singes
supérieurs, mais pas les oiseaux, ni les poulets : c’est parce que les poliovirus ne
trouvent de récepteurs pour leur attachement que sur les cellules de primates et non
sur les cellules de poulet. Certaines molécules servant de récepteur sont très
répandues d’une espèce à l’autre. C’est le cas par exemple de l’acide sialique qui
constitue le récepteur des virus de la grippe en se liant à l’hémagglutinine
(glycoprotéine de surface) du virus.
La sensibilité d’une cellule à un virus donné est conditionnée par la présence d’un
récepteur à la surface cellulaire. Si le récepteur est absent, la cellule est naturellement
résistante à l'infection.
La permissivité d’une cellule à un virus donné est conditionnée par la présence de
facteurs cellulaires indispensables à la réplication virale. Il peut exister dans les
cellules d’une espèce animale donnée des facteurs inhibiteurs s’opposant à la
réplication de certains virus.

1.2. Pénétration
On peut considérer qu'il existe 3 voies possibles de pénétration du virus dans la
cellule hôte:
-Pénétration par translocation (consiste au passage direct de l'acide nucléique dans
le cytoplasme et ceci à travers un pore créé par une protéine virale dans la membrane
cytoplasmique). Concerne le plus souvent les virus nus.

-Pénétration par endocytose (différentes selon que le virus soit nu ou enveloppé)


Le virion pénètre dans le cytoplasme dans une vésicule d’endocytose appelée
endosome. L’acidification du contenu de la vésicule permettent la fusion entre
l‘enveloppe virale et la membrane vésiculaire (formée d’une protéine : la clathrine le
plus souvent). Le résultat est la libération de la nucléocapside dans le cytoplasme.

-Pénétration par fusion/lyse (le virus fusionne sa membrane avec celle de la cellule
hôte et expulse à l'intérieur du cytoplasme cellulaire sa capside). Ce mécanisme
requiert l’intervention d’une glycoprotéine virale, appelée la protéine de fusion.
C’est la voie de pénétration majoritaire chez les virus enveloppés.
1.3. Décapsidation
La capside du virion est dégradée par l’intermédiaire d’enzymes (décapsidases). La
décapsidation libère alors l’acide nucléique viral (ainsi que les enzymes virales) dans
le cytoplasme. Il est nécessaire que la capside soit détruite pour que le génome,
décortiqué, puisse fonctionner, livrer son information génétique à la machinerie
cellulaire.
Elle peut avoir lieu dès l'entrée dans la cellule ou plus tardivement, elle peut être
totale ou partielle...

Une fois décapsidé, le virus cesse d’exister en tant que particule virale, il devient juste
un matériel génétique qui fait partie de la cellule. On ne voit plus de virus, il s’est
éclipsé. La phase d’éclipse correspond alors à la réplication du génome et à la
formation des protéines nécessaires à la construction de la capside de l’enveloppe.

1.4. Réplication
Le génome viral libéré prend la direction des synthèses, dans la cellule. Il se substitue
en totalité ou en partie au génome cellulaire qui jusqu’alors organisait les synthèses
cellulaires. Désormais, la cellule va produire des virus.
Plus précisément, elle va faire des copies (répliques) du génome viral, des répliques
de protéines virales, protéines de capside et glycoprotéines de péplos pour les virus à
enveloppés.
Le mécanisme de cette réplication virale varie selon que le génome est à ARN ou à
ADN. Mais dans tous les cas, c’est par des ARN messagers viraux que les génomes
viraux transmettent leur information, donnent leurs ordres à la machinerie cellulaire.
Dès que des ARN messagers viraux apparaissent dans la cellule, celle-ci lit sur les
ribosomes ces messagers viraux comme si c’était des messagers cellulaires et elle les
traduit en protéines virales.

Virus à ADN
Il faut nécessairement une transcription de l'ADN viral en ARN messager pour être
traduit en protéines virales. L'ADN viral sert d'autre part de matrice pour la synthèse
de nouvelles copies d'ADN. L'assemblage des nouvelles copies d'ADN et des
protéines virales néoformées aboutit à la production de nouveaux virus matures.
La réplication des virus à ADN est en général intra-nucléaire.
Virus à ARN
Leur réplication se déroule pour la plupart d'entre eux dans le cytoplasme cellulaire.
On distingue 3 types de virus à ARN :

Les Virus à ARN (+)


Leur génome est identique à un ARN messager et peut donc être directement traduit
en protéines par les ribosomes cellulaires.

Les Virus à ARN (-)


Leur génome nécessite d'être préalablement transcrit en ARN (+) pour sa réplication

Les Rétrovirus
Ce sont des virus à ARN qui doivent retrotranscrire leur génome en une copie d'ADN
qui sera intégrée dans l'ADN cellulaire (Provirus) et ceci par une transcriptase virale
dite inverse ou rétrotranscriptase.

*Principales polymérases
L'ADN polymérase ADN dépendante assure le maintien de l'information génétique,
en « recopiant » la molécule d'ADN matrice en une nouvelle, identique (ou presque à
cause des erreurs de réplication) qui pourra être transmise à la cellule fille.
L'ARN polymérase ADN dépendante synthétise une molécule d’ARN à partir de la
molécule matrice d'ADN.
L'ARN polymérase ARN dépendante synthétise une molécule d’ARN à partir d'une
autre molécule d’ARN (utile pour les virus à ARN).
La transcriptase inverse (ou rétrotranscriptase) est une ADN polymérase ARN
dépendante : elle synthétise une molécule d'ADN à partir d'une molécule matrice
d’ARN. C'est une enzyme utilisée par les rétrovirus. .

1.5. Assemblage
Les nouveaux génomes fabriqués par la cellule s’entourent de nouvelles protéines
virales fabriquées par la cellule. Cet emballage est l’encapsidation (l’inverse de la
décapsidation) des génomes qui aboutit à la formation de nouveaux virus.

Globalement, l'assemblage des protéines de la capside se fait dans le noyau pour les
virus à ADN (sauf les poxvirus) et dans le cytoplasme pour les virus à ARN
(sauf les orthomyxovirus ).
Les protéines de l'enveloppe, quant à elles, empruntent une partie de la membrane
d'un organite (souvent le réticulum endoplasmique) ou de la cellule.

1.6. Libération
Etape finale de la multiplication au cours de laquelle les virions complets ainsi formés
sont libérés dans le milieu extérieur soit par lyse de la cellule-hôte, soit par
bourgeonnement (ou exocytose) à la surface cellulaire.
C’est lors du bourgeonnement que les virus à enveloppe reçoivent leur enveloppe qui
est une bicouche lipidique cellulaire hérissée de spicules glycoprotéiques. Une cellule
produit de l’ordre de 100 à 1000 virus.
Pour les virus nus, la sortie du virion se fait simplement par la lyse de la membrane
cytoplasmique. Chez les virus enveloppés, la nucléocapside sort de la cellule par
bourgeonnement cytoplasmique (ou nucléaire chez les Herpesvirus).

2. Conséquences de la multiplication virale pour la cellule infectée


Trois conséquences sont possibles :
2.1. Mort de la cellule
La cellule en meurt, les synthèses cellulaires ayant été gravement perturbées par les
virus. C’est l’INFECTION LYTIQUE.
C’est in vivo l’équivalent de l’effet cytopathique ou cytopathogene (ECP = altération
morphologique de la cellule infectée, visible en microscope optique) observé in vitro
en culture de cellules. Lors de l’infection lytique, l’accumulation dans la cellule
infectée de matériel viral désorganise les structures et les fonctions cellulaires.

2.2. Tolérance de l’infection


La cellule tolère l’infection. Le génome viral et le génome cellulaire se partagent le
potentiel de synthèse de la cellule et les deux métabolismes, cellulaire et viral,
coexistent, selon un « compromis » acceptable. C’est L’INFECTION TEMPÉRÉE.

2.3. Transformation cellulaire maligne


La cellule se multiplie de façon anarchique : c’est la TRANSFORMATION
CELLULAIRE MALIGNE, la cellule infectée acquérant des caractères
généralement attribués aux cellules cancéreuses.

3. Expression clinique de l’infection virale


3.1. Infections aiguës
1. On oppose INFECTIONS LOCALISÉES et INFECTIONS GÉNÉRALISÉES.
Dans les infections aiguës localisées, le virus se multiplie au niveau de la porte
d’entrée du virus dans l’organisme et s’y cantonne. Porte d’entrée et organe cible
(= organe dont l’infection donne les signes cliniques de la maladie) sont confondus,
d’où une incubation courte. L’exemple en est la grippe.
Dans les infections généralisées, après infection et multiplication du virus au niveau
de la porte d’entrée, l’infection gagne les organes cibles situés à distance, d’où
l’existence d’un trajet par voie sanguine, lymphatique ou neuronale selon les virus,
avec une incubation nécessairement longue, de l’ordre de deux semaines, si ce n’est
plus.

2. Une autre distinction essentielle oppose infection aiguë ASYMPTOMATIQUE et


infection aiguë CLINIQUEMENT MANIFESTE. Ainsi, dans l’infection à
poliovirus, on observe un cas d’infection manifeste avec paralysies pour 100 cas
d’infection asymptomatique.
Pour la rougeole, c’est l’inverse puisque toutes les infections donnent l’éruption
morbilleuse.
A l’extrême, l’infection par le virus de la rage est toujours symptomatique et toujours
mortelle.
3. ÉRADICATION versus LATENCE. Toujours dans le cadre des infections aiguës,
certaines évoluent non seulement vers la guérison mais, de plus, le virus se trouve
éliminé de l’organisme. C’est le cas d’infections plus ou moins graves initialement
comme la grippe, les oreillons, les infections à poliovirus, la variole, la fièvre jaune.
Dans d’autres cas, au-delà de l’infection initiale asymptomatique ou cliniquement
manifeste, malgré la guérison clinique, s’installe à vie dans l’organisme une infection
latente, non seulement asymptomatique mais sans multiplication virale.

3.2. Infections chroniques


Au-delà de l’infection initiale asymptomatique ou cliniquement manifeste, persiste
une infection chronique, plus ou moins symptomatique, mais active, avec risque de
transmission à d’autres sujets : c’est le cas de l’infection à HIV où, après la primo-
infection marquée par une multiplication virale intense, persiste une infection à bas
bruit, partiellement contrôlée par le système immunitaire jusqu’à l’effondrement
immunitaire final du SIDA marqué par, à nouveau, une multiplication finale intense.

4. Différents types d’interaction Virus-Cellule


Il existe 4 types d’interactions :
4.1. Interaction productive
La pénétration d’un virion ou d’une molécule d’acide nucléique viral dans la cellule
conduit à la formation et à la libération de nouveaux virions. Dans certains cas, la
cellule est lysée, c’est le cycle lytique. Dans d’autres cas (ex : rétrovirus), il y a
multiplication sans mort cellulaire ; c’est le cycle végétatif.

Les cellules-cibles doivent être permissives et les virus virulents. Le virus déclenche
des effets cytopathogènes (ECP) tels que :
- Inhibition de la synthèse cellulaire
- Fragmentation de la chromatine
- Accumulation de macromolécules virales
- Changement de structures : ballonnement, aspect réfringent, aspect "en dentelle
- Inclusions virales…

4.2. Interaction abortive


Dans certaines circonstances, l’infection d’une cellule par un virus n’aboutit pas à la
production de nouveaux virions ; le cycle est abortif. La cellule ne permet pas le
développement complet du cycle de multiplication : elle est dite non permissive.
Ce type d’interaction a souvent lieu quand le virus infecte un hôte non naturel
(barrière d’espèce).

Un cycle abortif peut survenir suite à un problème dans le cycle du virus : pas
d'adsorption (ex : cellule masquée), de pénétration (ex : mauvaise décapsidation), de
multiplication (ex : échec de réplication du génome), de morphogenèse (ex : échec
lors de l'assemblage des protéines virales) …

4.3. Interaction intégrative


L’interaction conduit à une liaison intégrative et stable du matériel génétique viral à
celui de la cellule. Dans ce cas, le virus persistera et sera transmis ou pas à toute la
descendance de la cellule.
L’intégration peut assurer l’expression permanente de certaines parties des gènes
viraux. La transformation maligne, chez l’animal, ou la conversion lysogénique, chez
la bactérie, en sont des exemples particulièrement connus.

4.4. Interaction persistante


Les tissus animaux sont fréquemment contaminés par des virus, comme le montrent
les cultures cellulaires. Ils n’en sont pas pour autant altérés. Dans les infections
chroniques, toutes les cellules infectées par un virus non cytolytique reproduisent
parfois le virus en grande quantité sans subir de dommages ; dans l’état de porteur,
une faible proportion de cellules est contaminée.
5. Interactions entre les virus
Les interactions entre virus se produit dans le cas d’infection multiple d’une même
cellule. Cela dépend du type de cellule ou du génome. Ces interactions entre virus
peuvent être différentes :

5.4.2.1. Interférence
C’est une résistance procurée par une infection virale à une surinfection par un second
virus (au niveau adsorption ou dans les autres étapes de multiplication).

5.4.2.2. Stimulation
L’entrée d’un virus permet la multiplication d’un autre virus (Herpesviridae – HIV)
On pense que le virus facilitant va abolir la production de la défense cellulaire,
(l’autre pourra se multiplier).

5.4.2.3. Recombinaison génétique


C’est l’intégration d’une partie du matériel génétique d’un virus dans un autre virus.
La fréquence de recombinaison dépend de la distance entre les fragments insérés.
Ex de crossing over : les provirus (acquisition de fonction = transformation).

5.4.2.4. Réassortiment génétique


Si on a 2 virus différents à génomes fragmentés, on peut avoir échange de fragments,
c’est le réassortiment (fréquence 10 -1 à 3.10-2). Ce brassage génétique ne survient que
pour les virus ayant des génomes segmentés (ex : Influenza virus)
Concerne essentiellement les virus à ARN (beaucoup plus instables que les virus à
ADN).

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