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CJCE, 12 DECEMBRE 1972, INTERNATIONAL FRUIT COMPANY NV C/

PRODUKTSCHAP VOOR GROENTEN EN FRUIT

Contenu résumé de l'arrêt


- La compétence de la Cour, prévue par l'article 177 du traité CEE, de statuer sur la validité des
actes pris par les institutions de la Communauté, ne comporte aucune limite quant aux causes
sur la base desquelles la validité de ces actes pourrait être contestée. Elle s'étend donc à
l'ensemble des motifs d'invalidité susceptibles d'entacher lesdits actes.

- Pour que l'incompatibilité d'un acte communautaire avec une disposition de droit international
puisse affecter la validité de cet acte, la Communauté doit d'abord être liée par cette
disposition.

- Dans le cas ou l'invalidité est invoquée devant une juridiction nationale, il faut en outre que
cette disposition soit de nature à engendrer pour les justiciables de la Communauté le droit de
s'en prévaloir en justice.

- Dans toute la mesure où, en vertu du traité CEE, la Communauté a assumé des compétences
précédemment exercées par les États membres dans le domaine d'application de l'Accord
général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT), les dispositions de cet accord ont pour
effet de lier la Communauté.

- L'article XI de l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) n'est pas de
nature à engendrer, pour les justiciables de la Communauté, le droit de s'en prévaloir en
justice.

Analyse de l'arrêt
A titre préjudiciel, le juge néerlandais interroge la Cour pour savoir si l’article 177 du traité CEE, qui
dispose que « la Cour de justice est compétence pour statuer, à titre préjudiciel (…) sur les validité
(…) des actes pris par les institutions de la Communauté » vise également leur validité au regard du
droit international.
La Cour juge que sa compétence à titre préjudiciel « ne comporte aucune limite quant aux causes sur
la base desquelles la validité de ces actes pourrait être contestée ». Le juge apprécie donc leur validité
au regard des règles du droit international à deux conditions :
- la Communauté doit être liée par la disposition du droit international
- cette disposition du droit international doit être de nature à engendrer pour le justiciable de la
Communauté le droit de s’en prévaloir en justice.

L’arrêt amorce une série de décisions sur les effets du GATT et plus largement, des accords de
l’OMC.
I- Les effets du GATT
La Cour juge qu’il résulte de l’esprit, de l’économie et des termes de l’Accord général que l’article XI-
interdiction des prohibitions et restrictions aux échanges autres que les droits de douane, taxes ou
autres impositions- « n’est pas de nature à engendrer pour les justiciables de la Communauté, le droit
de s’en prévaloir en justice » (§27). En conséquence, la validité des règlements en cause ne saurait être
affecté par ces dispositions.
Toutefois, on ne saurait en déduire que les justiciables ne peuvent invoquer devant la CJCE les
dispositions du GATT, notamment pour faire vérifier si un comportement constitue une pratique
commerciale illicite au sens du droit dérivé : les dispositions du GATT faisant partie des règles du
droit international auxquelles renvoie ce droit dérivé. Sans invoquer l’effet direct, il est donc possible
de mettre en cause la validité d’un règlement de façon incidente, en invoquant un des moyens du
contrôle de légalité mentionné à l’article 1973 du traité CEE, à savoir la violation de ce traité ou de
tout règle relative à son application.

II- Les effets des accords de l’OMC

- Accord instituant l’OMC : Par sa décision CJCE, 23 novembre 1999, Portugal c/ Conseil, la
Cour juge que « compte tenu de leur nature et de leur économie, les accords OMC ne figurent
pas en principe parmi les normes au regard desquelles la Cour contrôle la légalité des actes des
institutions communautaires ».

- Accords sur les accords internationaux sur la protection des droits intellectuels
(ADPIC) : la Cour s’est d’abord estimée compétente pour interpréter l’Accord sur les ADPIC
(CJCE, 1986, Hermès International) avant de considérer que les dispositions de cet accord
étaient dépourvues d’effet direct (CJCE, 2000, Christian Dior). Néanmoins dans son arrêt
CJCE, 2007, Merck Genéricos, la Cour fixe une ligne de partage entre les domaines dans
lesquels la Communauté n’a pas encore légiféré, qui relèvent donc de la compétence des
Etats-membres et les domaines où une réglementation européenne existe. Dans ce cas, le droit
communautaire s’applique « ce qui implique l’obligation, dans la mesure du possible, d’opérer
une interprétation conforme à l’accord ADPIC, sans toutefois qu’un effet direct puisse être
accordé ». En modifiant la répartition des compétences entre l’Union et les Etats membres,
l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne a conduit la Cour à revoir le raisonnement suivi dans
les décisions Hermès et Christian Dior et Merck Genéricos. Dès lors, l’effet direct des
dispositions de l’Accord sur les ADPIC que jusqu’ici le droit de l’Union ne commandait ni
n’excluait au sein des ordres juridiques des Etats membres, dans la limite de leur compétence,
paraît même compromis.

- Règlement des différends : la Cour a précisé qu’avant la date d’expiration du délai de 15


mois fixé à la Communauté pour mettre en œuvre les recommandations d’un rapport par
l’ORD, et ainsi exécuter ses obligations OMC, le juge ne saurait, sous peine de priver d’effet
l’octroi d’un délai raisonnable pour se conformer aux recommandations ou décisions de
l’ORD de l’OMC, exercer un contrôle juridictionnel de la légalité des actes communautaires
au regard des règles OMC.

- La responsabilité non contractuelle de la Communauté est subordonnée à la démonstration


de 3 conditions : illégalité du comportement reproché aux institutions communautaires, la
réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement fautif et le
préjudice allégué. Les accords de l’OMC ne figurant pas parmi les normes desquelles le juge
contrôle la légalité des actes communautaires la condition tirée de l’illégalité du
comportement fait défaut : la responsabilité de la Communauté est donc exclue.

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