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Paludisme
Dr Khadim DIONGUE
Service de Parasitologie-Mycologie
FMPO/UCAD/HALD

Parasitologie/Chirurgie dentaire 13/11/2019


I. Généralités

1.1 Définition
§ Paludisme (ou malaria) est dû à des
hématozoaires du genre Plasmodium,
§ Transmis par des moustiques du genre
Anopheles
§ Maladie surtout importante pour les
populations vivant en zone d’endémie
§ Mais aussi pour les voyageurs
3 I. Généralités

1.2 Historique
§ 1630 : emploi de l’écorce de quinquina contre les « fièvre
des marais »
§ 1820 : découverte de la quinine (Pelletier et Caventou)
§ 1880 : découverte du parasite par Lavéran (Prix Nobel)
§ 1940 : découverte de la chloroquine (synthétique)
§ 1960 : apparition de la chlroroquino-résistance (Asie)
§ 1968 : L’OMS renonce à l’éradication
§ 1990 : extention de la chlroroquino-résistance en Afrique
§ 2002 : Recommandation des CTA (OMS)
4 I. Généralités

1.3 Intérêt
§ Première endémie parasitaire mondiale
§ 3,2 milliards de personnes exposées
§ Incidence mondiale (OMS, 2018)
• 219 millions de cas en 2017 (2016 : 217 millions)
• Afrique (92%), essentiellement au sud du Sahara
§ Mortalité mondiale (OMS, 2017)
• 435 000 décès dont 61% enfants de moins de 5
ans
§ PNLP Sénégal (2017): 395 706 cas et 284 décès
5 I. Généralités

1.3 Intérêt
§ Selon ce 11ème Rapport mondial

• Aucun progrès significatif vers une diminution du


nombre de cas selon les données 2015-2017

• 2 objectifs essentiels de la Stratégie technique


mondiale de lutte 2016-2030 ne seront pas
atteints
II. Epidémiologie
2.1 Agents pathogènes
2.1.1 Classification
§ Phylum: Apicomplexa
§ Classe: Haemosporidea
§ Famille: Plasmodiidae
§ Genre: Plasmodium
§ Espèces (plus de 140): P. falciparum (+++),
P. malariae, P. ovale, P. vivax et P. knowlesi
II. Epidémiologie
2.1 Agents pathogènes
ü P. falciparum
§ Omniprésente, à la zone intertropicale
(90% Sénégal)
§ Incubation de 7 à 12 jours
§ Longévité dépassant pas habituellement
2 mois mais peut faire 1 an
§ Agent de fièvre tierce maligne, formes
cliniques graves (neuropaludisme)
§ Evolue d’une seule tenue, sans rechutes
II. Epidémiologie
2.1 Agents pathogènes
ü P. malariae
§ Sévit sur 3 continents, de manière
beaucoup plus sporadique
§ 10 à 20% au Sénégal selon les régions
§ Incubation de 15 à 21 jours
§ Agent de fièvre quarte et de reviviscences
très tardives (jusqu’à 20 ans après le retour
de la zone d’endémie)
§ Capables d’entraîner des complications
rénales
9 II. Epidémiologie
2.1 Agents pathogènes
ü P. ovale
§ Sévit en Afrique intertropicale du Centre
et de l’Ouest (et dans certaines régions
du Pacifique)
§ Rare au Sénégal (< 0,1 %)
§ Incubation variable (15 jours à plusieurs
années)
§ Agent de fièvre tierce bénigne, rechutes
tardives (5 ans)

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10 II. Epidémiologie
2.1 Agents pathogènes
ü P. vivax
§ Très largement répandu en Amérique du
Sud et en Asie, plus rarement observé en
Afrique
§ Incubation de 11 à 13 jours
§ Possibilité de rechutes pendant 3 à 4 ans
§ Agent de fièvre tierce classiquement
bénigne
§ Possibles répercussions graves, notamment
par des anémies chez l’enfant

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11 II. Epidémiologie
2.1 Agents pathogènes
ü P. knowlesi
§ Jadis parasite simien en Asie du Sud-Est
§ Actuellement, il sévit en Asie du Sud-Est
avec des centaines de cas rapportés chez
l'homme
§ Il se différencie des autres espèces par un
cycle érythrocytaire de 24 h (fièvre
quotidienne)

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12 II. Epidémiologie
2.1 Agents pathogènes
2.1.2 Cycle évolutif
§ Chez l’homme et chez l’anophèle
§ Chez l’homme cycle en 2 phases :
• Phase hépatique ou pré-érythrocytaire (= exo-
érythrocytaire) ó phase d’incubation,
cliniquement asymptomatique
• Phase sanguine ou érythrocytaire : elle
correspond à la phase clinique de la maladie

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13 II. Epidémiologie
2.1 Agents pathogènes
2.1.2 Cycle évolutif
ü Chez l’homme
§ Sporozoïtes inoculés restent pendant une ½h max
dans la peau, → la lymphe et le sang
§ Transformation dans les hépatocytes en schizontes
pré-érythrocytaires ou «corps bleus»
§ Après quelques jours de maturation, éclat et libération
de milliers de mérozoïtes dans sang
§ P. vivax et P. ovale, hypnozoïtes → rechutes

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14 II. Epidémiologie
2.1 Agents pathogènes
2.1.2 Cycle évolutif
ü Chez l’homme
§ Mérozoïtes pénètrent les globules rouges
§ Maturation en trophozoïte puis en schizonte prend
24, 48 ou 72H
§ Après quelques cycles, certains mérozoïtes subissent
une maturation d’une dizaine de jours, accompagnée
d’une différenciation sexuée
§ => gamétocytes mâles et femelles

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15 II. Epidémiologie
2.1 Agents pathogènes
2.1.2 Cycle évolutif
ü Chez l’Anophèle
§ Les gamètes => œuf mobile, ookinète
§ Fixation ensuite à la paroi externe de l’estomac et
transformation en oocyste
§ Les parasites se multiplient à l’intérieur de cet
oocyste, produisant des centaine de sporozoïtes
§ Migration ensuite vers les glandes salivaires du
moustique

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17 II. Epidémiologie

2.2 Vecteur
§ Instecte, moustique du genre Anopheles,
§ Seule la femelle est hématophage
§ Durée de vie de l’ordre de 30 jours
§ Ponte des oeufs dans les collections d’eau
stagnantes
§ Développement et longévité température
dépendant avec un optimum entre 20 et
30°C

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18 Femelle du genre Anopheles
se gorgeant

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II. Epidémiologie

2.2 Vecteur
§ Pique soir et nuit (23h-06h)
§ Endophile et exophile
§ Anthropophile et zoophile
§ Distance de vol 1500 m
II. Epidémiologie

2.2 Vecteur
§ Facteurs attirant le vecteur
• Formes et mouvements
• Couleurs foncées (bleu)
• Odeur
• Acide Lactique (sueur)
• Gaz carbonique (respiration)
II. Epidémiologie

2.3 Réservoir de parasites (RP)


§ L’homme : principal RP
§ Réservoir animal évoqué avec P. malariae (singe)
§ P. knowlesi a été découvert chez le singe
§ Intensité de l’endémie palustre dans une zone
mesurée par les indices paludométriques
§ Indice gamétique (IG)
§ Indice plasmodique (IP)
§ Indice splénique (IS)
II. Epidémiologie

2.4 Modalités de transmission


§ Essentiellement par piqure d’anophèle ♀
Infesté,
§ Exceptionnellement, par transfusion sanguine
è post-transfusionnel
§ Possible par voie transplacentaire de la mère
au fœtus è paludisme congénital
§ Mais la persistance des anticorps maternels
chez le nouveau-né explique la rareté à cet
âge
II. Epidémiologie

2.5 Homme réceptif


ü Immunité naturelle
§ Pas d’immunité naturelle vis-à-vis du paludisme
§ Jeunes enfants semblent + réceptifs que adultes
§ Relative résistance possible avec
• Présence d’hémoglobine S
• Absence de l’antigène Duffy (résistance naturelle
aux infections à P. vivax)
II. Epidémiologie

2.5 Homme réceptif


ü Immunité acquise
´ Adultes vivant longtemps dans les zones
d’endémie
´ Réduisant le risque de paludisme grave
´ L’immunité disparaît au bout de 2 ans (cas
des travailleurs émigrés) sans l’exposition
II. Epidémiologie

2.6 Facteurs favorisant


ü Facteurs généraux
§ Facteurs climatiques
• la température qui doit être > 22°C et l’humidité > 70
§ Facteurs saisonniers
• transmission en saison des pluie pour les zones de
savane
• permanente en zone équatoriale
§ Facteurs environnementaux
• inondation et irrigation notamment
II. Epidémiologie

2.6 Facteurs favorisant


ü Facteurs individuels
§ L’ âge
• les enfants de moins de 5 ans très réceptifs
§ Le sexe
• la femme enceinte à cause d’une baisse de
son immunité est exposée au formes graves
§ Profession: voyageurs non-immuns
II. Epidémiologie

2.7 Répartition géographique


§ Le paludisme sévit du 70° d’altitude nord au
40°
d’altitude sud
§ Afrique du nord où existe surtout P. vivax
§ Endémique en l’Afrique subtropicale où on
rencontre P. falciparum et plus rarement P.
malariae et P. ovale
§ En Amérique tropicale: surtout P. vivax
§ En Asie: P. falciparum et P. vivax, P. knowlesi
III. Clinique

3.1 Paludisme simple


3.1.1 Primo invasion à P. falciparum
§ Sujet neuf, non immunisé et les jeunes enfants
(zone d’endémie)
• la fièvre continue à 39°- 40°C,
• un embarras gastrique (douleurs abdominales,
nausées, vomissements et diarrhée),
• des céphalées, des courbatures et une asthénie
§ Guérison spontanée possible mais avec P.
falciparum, il y’a probabilité d’accès pernicieux
III. Clinique

3.1 Paludisme simple


3.1.2 Accès palustre à fièvre périodique
§ La triade classique de l’accès palustre :
« frissons, chaleur, sueurs » survenant tous les
24h (Pk), 48h (Pf, Po, Pv) ou 72h (Pm)
§ N’est observée de manière typique que dans les
infestations à P. vivax, P. ovale et P. malariae,
§ Suite à un accès de primoinvasion non traité,
§ Mais pouvant survenir longtemps après l’épisode
fébrile initial
III. Clinique
3.1 Paludisme simple
3.1.2 Accès palustre à fièvre périodique
a. Phase des frissons
§ Sensation de froid,
§ Claquement de dents,
§ Céphalées
§ Fièvre jusqu’à 39°C
§ Hypertrophie de la rate
§ TA abaissée
§ Dure 1h
III. Clinique
3.1 Paludisme simple
3.1.2 Accès palustre à fièvre périodique

b. Phase des chaleurs


§ Disparition des frissons
§ Peau brulante et sèche
§ Fièvre à 40 - 41°C
§ Régression de la rate
§ Elle dure 3 à 4h
III. Clinique
3.1 Paludisme simple
3.1.2 Accès palustre à fièvre périodique

b. Phase des sueurs


§ Due à une chute brutale de la température
§ TA remonte
§ Sensation soulagement et fatigue
§ Elle dure 2 à 4h
III. Clinique

3.2 Paludisme grave


§ Suite à un accès palustre non traité
§ Du à une multiplication de P. falciparum
dans les capillaires cérébraux
§ Frappe surtout les sujets neufs sans
immunité en particulier les enfants
§ Fièvre à 41°C, signes neurologiques
(convulsion, coma), anémie sévère et
hypoglycémie
IV. Diagnostic

§ Essentiellement direct par la recherche de


Plasmodium dans le sang
§ Critères d’orientation clinique
• Toute fièvre = paludisme jusqu’à preuve du
contraire
• Signes neurologiques
§ Critères d’orientation Biologique
• Thrombopénie avec ou sans leucopénie
• Anémie
IV. Diagnostic

ü Prélèvement
§ Simple recueil, sur une lame porte-objet de
microscope, d’1 ou 2 gouttes de sang
§ Par piqûre au doigt (face latérale de
l’annulaire), au lobe de l’oreille ou au talon
(chez l’enfant)
§ Confectionner immédiatement les
étalements: frottis minces (FM) et/ou goutte
épaisse (GE)
§ Tube de sang veineux sur EDTA
IV. Diagnostic

ü Techniques microscopique: GE/FM


§ La GE micro-concentration facilite détection
et quantification des parasites
§ Le FM permet le diagnostic de l'espèce,
l'étude de la morphologie du parasite et celle
de l'hématie parasitée
§ Il peut être négatif dans les formes
pauci-parasitaires
Confection goutte épaisse
(GE) et frottis mince (FM)

(a)

(b)

(c)
IV. Diagnostic

v Autres techniques
§ Pour améliorer le diagnostic, il y a
d’autres techniques
• TDR (+++)
• QBC (++)
• PCR (Classique, Lamp)
• Anticorps anti-Plasmodium (don de sang)
IV. Diagnostic
Résumé comparatif des techniques
de diagnostic
V. Traitement

5.1 Traitement du paludisme simple


§ Quinine (Quinimax®, Palujet®)
§ Amino-4-quinoléine (Chloroquine®, Amodiaquine®)
§ Antifoloquines : Proquanil (Paludrine®), Pyriméthamine
(Malocide®)
§ Méfloquine (Lariam®) et Halofantrine (Halfan®)
§ Association pyriméthamine + sulfadoxine (Fansidar®).
§ Antibiotiques : doxycycline (Vibramycine®)
§ Quinghaosu plante chinoise : Artemisia annua (Armoise)
• Dérivés de l’artémisinine : artésunate (Arsumax), artéméther
(paluther).
V. Traitement

§ 1970 résistance de P. falciparum aux antipaludiques


§ OMS: Abandon de la monothérapie
§ 2001, OMS recommande l’utilisation des
combinaisons thérapeutiques à base d’Artémisinine
(C.T.A)
§ Au Sénégal recommandation de combinaisons de
traitement en 3 jours
• Arthémether + Luméfantrine (Coartem®)
• Artésunate + Amodiaquine (Coarsucam®)
• Artésunate + Pipéraquine (Darté-Q®)
V. Traitement

5.2 Traitement du paludisme grave


§ Quinine (Quinimax®): traitement de choix.
§ Forme injectable et sous forme de comprimés
§ D’abord administrée en perfusion (IV) pdt 3 jours
§ Relai avec la quinine par voie orale (7 jours)
§ Si l’administration par voie IV est impossible, on
peut utiliser la voie I.M. (3 injections / jour)
§ risque d’abcès local et d’atteinte du nerf
sciatique
V. Traitement

6-3 Traitement du paludisme chez la femme


enceinte :
§ La quinine est recommandée
§ En administration par voie I.V. lente toutes
les 8 heures / pendant 7 jours
VI. Prophylaxie

6.1 Prévention individuelle


a. La lutte contre les piqûres de moustiques
ü A l’extérieur des habitations
§ porter des vêtements longs le soir, si possible
imprégnés de répulsifs
§ mettre des répulsifs sur les parties découvertes
(attention au choix des produits chez l’enfant et la
femme enceinte)
§ utilisation possible de tortillons fumigènes
VI. Prophylaxie

6.1 Prévention individuelle


a. La lutte contre les piqûres de moustiques
ü A l’intérieur des habitations
§ installer des moustiquaires aux portes et aux fenêtres
§ dormir sous une moustiquaire imprégnée
d’insecticide ou à défaut de moustiquaire de lit
§ on peut, si on dispose d’une climatisation, associer
climatisation et insecticide
VI. Prophylaxie

6.1 Prévention individuelle


b. Chimio prophylaxie médicamenteuse
§ En zone d’endémie, non indiquée sauf femme
enceinte et plus rarement chez l’enfant
§ Mais primordiale pour sujet non immun se rendant en
zone d’endémie
§ Aucun schéma idéal, en fonction des critères sujet-
dépendant
VI. Prophylaxie

6.2 Prophylaxie collective


§ Difficile mais possible (PNLP)
§ Lutte antipaludique repose sur plusieurs axes
• Prévention population les plus exposées (enfants et
femmes enceintes)
• par une utilisation généralisée des moustiquaires
imprégnées
• et une prise en charge adaptée des accès palustres
§ La recherche d’un vaccin
VI. Prophylaxie

6.2 Prophylaxie collective


§ Lutte anti-larvaire : assainissement (mécanique)
§ Lutte chimique: épandage de mazout, Abate
§ Lutte biologique: poisson (Tilapia, Gambusia)
§ Lutte anti-adulte: piégeage, males stériles,
insecticides de contact
• organochlorés: DDT
• organophosphorés: téméphos,
• Carbamate: Propoxur (Baygon®)

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