Vous êtes sur la page 1sur 6

SYNDROME DE LA FENTE SPHENOÏDALE

I- Généralités
I-1- Définition
Le syndrome de la fente sphénoïdale encore appelé syndrome de Rochon-
Duvigneaud est l’ensemble des signes traduisant une atteinte des éléments qui
traversent la fente sphénoïdale. Il associe de façon complète ou partielle
l’atteinte des nerfs oculomoteurs (II, IV, VI) et du nerf ophtalmique V1.

I-2- Intérêt
Anatomique : une bonne connaissance de l’anatomie de la fente sphénoïdale
permet une meilleure compréhension de la symptomatologie.
Clinique : permet de faire le diagnostic topographique et d’évaluer la gravité des
affections causales.
Diagnostique : importance de l’imagerie médicale.
Thérapeutique : nécessite une prise en charge multidisciplinaire.

I-3- Rappel anatomo-physiologique


La fissure orbitaire supérieure (anciennement fente sphénoïdale) est une
déhiscence osseuse entre les ailes du sphénoïde (petite aile en haut, grande aile
en bas), en forme de virgule, à grosse extrémité inféro-médiale, oblique en haut,
en avant et en haut. Longue de 2cm, large de 9 mm dans sa partie médiale, elle
fait communiquer l'orbite avec l'étage moyen de la base du crâne.

1. Canal optique
2. Fissure orbitaire supérieure (ou fente
sphénoïdale)
3. Fissure orbitaire inférieure (ou fente
sphénomaxillaire)
4. Sillon infraorbitaire
5. Foramen ethmoïdal antérieur
6. Foramen ethmoïdal postérieur
7. Echancrure supraorbitarire
8. Incisure frontale
9. Orifice supérieur du canal lacrymonasal
10. Foramen zygomatico-orbitaire
11. Foramen infraorbitaire
12. Crête lacrymale antérieure
13. Crête lacrymale postérieure

Figure : Orifices de l’orbite


Elle livre passage aux éléments suivants : le nerf oculomoteur et son contingent
parasympathique (III) ; le nerf trochléaire (IV) ; les branches nasales,
trochléaires et frontales du nerf ophtalmique (V1) ; le nerf abducens (VI) et les
veines ophtalmiques.
1. Fissure orbitaire supérieure
8. Nerf lacrymal (br du V1)
9. Nerf frontal (br du V1)
10. Nerf IV
17. Veine ophtalmique supérieure
2. Anneau de Zinn , avec:
11. Nerf VI
12. Branche supérieure du III
13. Branche inférieure du III
14. Nerf nasociliaire (br du V1)
15. Racine sympathique du ggl ciliaire
16. Veine ophtalmique moyenne
3. Muscle droit supérieur
4. Muscle droit latéral
5. Muscle droit médial
6. Muscle droit inférieur
7. Tendon de Zinn
18. Nerf optique
19. Artère ophtalmique
20. Canal optique

Figure : Fissure orbitaire supérieure

Le III innerve les muscles droits supérieur, inférieur et interne, le muscle petit
oblique et le releveur de la paupière supérieure. Le III régule le réflexe
accommodatif de convergence et est responsable du myosis.
Le IV innerve le muscle grand oblique.
Le VI innerve le muscle droit externe.
Le V1 donne naissance à trois autres nerfs :
- le nerf lacrymal responsable de la sensibilité du tiers latéral de la paupière
supérieure
- le nerf frontal responsable de la sensibilité de la partie externe de la paupière
supérieure.
- le nerf nasociliaire qui innerve la région canthale médiale et le sac lacrymal.

Schématiquement, les champs d’action sont pour chacun des muscles


oculomoteurs :
- Le droit médial : en dedans,
- Le droit latéral : en dehors,
- Le droit supérieur : en haut et en dehors,
- Le droit inférieur : en bas et en dehors,
- L’oblique supérieur : en bas et en dedans,
- L’oblique inférieur : en haut et en dedans.

II- Signes
II-1- Type de description : syndrome de la fente sphénoïdale dans sa forme
complète.
II-1-1- Clinique
Il s’agit d’un tableau d’ophtalmoplégie totale, associant :
- un ptosis par atteinte neurogène du releveur de la paupière supérieure,
- une paralysie de l’adduction, de l’abaissement et de l’élévation,
- une paralysie de l’abduction,
- une mydriase peu réflexique,
- une anesthésie de la paupière supérieure,
- une anesthésie cornéenne souvent responsable de kératite,
- une exophtalmie légère par compression de la veine ophtalmique.

Nous remarquerons que des signes tels que les strabismes divergent et
convergent, les diplopies et les attitudes vicieuses de la tête ne sont pas présents
dans cette forme du fait de l’absence de dominance de muscles antagonistes.

II-1-2- Examens paracliniques


Ils sont à visée diagnostique et permettent de faire un bilan d’extension.
Il s’agit de :
- radiographies standards : incidences de Caldwell et de Hartmann.
- l’échographie oculaire,
- le scanner et l’IRM cérébrale,
- le test de Lancaster qui mettra en évidence un déficit des muscles
oculomoteurs,
- le bilan orthoptique.

II-1-3- Evolution
Elle est fonction de l’étiologie et du délai de la prise en charge.

II-2- Formes cliniques


II-2-1- Syndrome de l’apex orbitaire
Encore appelé syndrome de Rollet, il associe un syndrome de la fente
sphénoïdale et une atteinte du nerf optique avec :
- une cécité ou un scotome central,
- une abolition du réflexe photomoteur,
- une conservation du réflexe consensuel
- une dyschromatopsie
- le fond d’œil est normal au début, puis objective une atrophie optique à bords
nets.
II-2-2- Formes partielles
Ces formes sont le fait d’atteintes d’un des éléments de la fente sphénoïdale. Ces
atteintes peuvent être isolées ou associées.

a- Atteinte isolée du III


L’atteinte extrinsèque du III se traduit par un ptôsis, une diplopie horizontale
croisée et verticale, un strabisme divergent, une paralysie de l’adduction, de
l’abaissement et de l’élévation.

L’atteinte intrinsèque se manifeste par une pupille en mydriase, un réflexe


photomoteur diminué voire aboli, un réflexe d’accommodation vergence aboli.

b- Atteinte isolée du VI
Elle se traduit par une diplopie horizontale, un strabisme convergent, une
attitude vicieuse de la tête qui est tournée du côté paralysé.

c- Atteinte isolée du IV
Elle se traduit par :
- une diplopie verticale,
- un strabisme vertical,
- une diminution du regard en bas et en dedans,
- une attitude vicieuse de la tête fléchie vers l’épaule controlatérale et tournée
vers le côté paralysé.

d- Atteinte isolée du V1
Elle se manifeste par des anesthésies des territoires de ce nerf notamment la
paupière supérieure, la racine du nez, la cornée, les conjonctives bulbaire et
palpébrale. Le réflexe photomoteur est aboli et le réflexe cornéen diminué.

III- Diagnostic
III-1- Diagnostic positif
Le diagnostic positif repose sur l’examen clinique et la paraclinique.

III-2- Diagnostic différentiel


III-2-1- Syndrome de Tolosa-Hunt
Il consiste en une ophtalmoplégie douloureuse, caractérisé par des douleurs
orbitaires unilatérales et une paralysie des nerfs oculomoteurs. Il est du à une
inflammation non spécifique du sinus caverneux ou de la fissure orbitaire
supérieure. Le diagnostic de Tolosa-Hunt est un diagnostic d’exclusion. Son
traitement consiste en une corticothérapie.

III-2-2- Syndrome de la partie postérieure du sinus caverneux


Avec atteinte des nerfs V et VI.
III-2-3- Syndrome de la partie moyenne du sinus caverneux
Avec atteinte des nerfs III, IV, V1, V2 et VI.

III-2-4- Syndrome de Garcin


Syndrome paralytique unilatéral entraînant une atteinte globale des nerfs
crâniens, en rapport avec une affection néoplasique de la base du crâne.

III-3- Diagnostic étiologique


III-3-1- Causes traumatiques
Il s’agit le plus souvent de fractures de l’orbite avec disjonction crânio-faciale,
de contusions cérébrales, d’hypertension intracrânienne, d’hémorragie méningée
avec collection dans la région mésencéphalique.

III-3-2- Causes tumorales


Tumeurs du tronc cérébral, de l’angle ponto-cérébelleux, de l’orbite.

III-3-3- Causes vasculaires


Fistules carotido-caverneuses, anévrysme de l'artère carotide interne intra-
caverneuse.

III-3-4- Causes malformatives


Syringobulbie, hydrocéphalie.

III-3-5- Myasthénie

III-3-6- Causes inflammatoires


Toujours penser à une sclérose en plaques.
Maladies de système (Lupus …)
Miller Fischer : Guillain Barré étendu au tronc cérébral avec ataxie et paralysie
oculomotrice totale.

III-3-7- Causes infectieuses


Encéphalites, maladie de Lyme, tétanos, botulisme, syphilis, Zona…
Cellulite orbitaire avec chémosis majeur et paralysie oculomotrice complète
douloureuse.
Ostéite de la pointe du rocher.

IV- Traitement
IV-1- Buts
- Traiter l’étiologie
- Prévenir et traiter les complications
IV-2- Moyens
- Médicaux : antalgiques, anti-inflammatoires, antibiotiques, cicatrisants.
- Chirurgicaux : tarsorraphie, blépharorraphie, orbitotomie.

IV-3- Indications
Les indications sont fonction de l’étiologie. Nécessité le plus souvent d’une
prise en charge multidisciplinaire.

V- Conclusion
Le syndrome de la fissure orbitaire supérieure doit être connu par
l'ophtalmologiste. Son diagnostic est clinique, aidé des examens d’imagerie. Ses
étiologies sont dominées par les causes traumatiques, tumorales, infectieuses,
inflammatoires et vasculaires. Sa prise en charge est multidisciplinaire.

Vous aimerez peut-être aussi