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Geste de base

Abord de l’œsophage cervical


A. Valverde
Service de Chirurgie Digestive et Générale, Centre Hospitalier Victor Dupouy – Argenteuil.
e-mail : alain.valverde@ch-argenteuil.fr

Correspondance : A. Valverde, Service de Chirurgie Digestive et Générale, Centre Hospitalier


Victor Dupouy, F 95100 Argenteuil.

Introduction

L’abord de l’œsophage cervical est indiqué dans plusieurs circonstances, œsopha-


gectomie sans thoracotomie ou, plus rarement par triple abord, rétablissement
de continuité par œsophagoplastie anastomosée au cou, œsophagostomie cervi-
cale, diverticule de Zencker. Dans tous les cas les principes d’exposition et de
dissection sont les mêmes.
L’œsophage cervical est l’élément le plus postérieur de la filière cervicale, barré
par un axe trachéo-thyroïdien peu mobilisable en avant, et légèrement décalé à
gauche par rapport à la ligne médiane. Pour ces raisons anatomiques, l’œsophage
cervical s’aborde par le côté et par la gauche.
L’abord de l’œsophage est relativement aisé quelles que soient les conditions ana-
tomiques, si l’on intègre les principes suivants : l’œsophage est sans doute la der-
nière chose que l’on voit au cours de la dissection et ne constitue en rien un
repère, les vrais repères sont l’axe vasculaire jugulocarotidien en dehors et le plan
rigide prévertébral en arrière.
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Mots-clés : Œsophage. Geste de base. Abord cervical.

Les erreurs à ne pas commettre


– Chercher à voir ou à palper l’œsophage dès l’incision du peaucier ;
– Cheminer trop en avant sur l’axe trachéal ou trop haut (risque de dissection inutile
de la thyroïde et de blessure du nerf laryngé inférieur), alors qu’il faut plutôt aller
en arrière et en bas ;
– Section incomplète des muscles sous-hyoïdiens ;
– Réclinaison de la trachée par un écarteur type Farabeuf qui pourrait blesser le
nerf laryngé inférieur ;
– Dissection insuffisante de l’espace postérieur œsophagien en avant du plan verté-
bral ;
– Contournement à l’aveugle de l’œsophage, contournement de l’œsophage trop
proche de la bouche œsophagienne.

J Chir 2003,140, N°4 • © Masson, Paris, 2003


Abord de l’œsophage cervical A. Valverde

a b

1 Le patient est en décubitus dorsal, les deux bras le long du corps, pour permettre aux opérateurs de travailler à hauteur des
épaules. Un billot transversal soulève les épaules et la tête est maintenue en extension tournée à droite sur une têtière. On
veillera à ne pas exagérer l’hyperextension cervicale, source de douleurs postopératoires parfois très invalidantes. Le champ opé-
ratoire doit dégager l’axe trachéal médian, le manubrium sternal, l’ensemble thoracoabdominal antérieur, en cas de voies d’abord
combinées, et affleurer le bord supérieur du lobe de l’oreille en haut.
L’incision cutanée est de type présterno-cleïdo-mastoïdienne gauche, légèrement en avant du relief de ce muscle. Elle ne remonte
pas nécessairement très haut. L’extrémité inférieure de l’incision peut soit mordre sur le manubrium sternal (utile si l’on envisage
238 un abord de la voie rétrosternale pour ascension d’une plastie -a-), soit devenir légèrement transversale (elle est dans l’axe de l’in-
cision d’une éventuelle trachéotomie postopératoire -b-).

2 Après incision de la peau et du muscle peaucier, on pas-


se juste en avant du relief du muscle sterno-cléïdo-mas-
toïdien que l’on récline vers la gauche. Cette manœuvre dégage
alors la « cravate » musculaire cervicale constituée des muscles
sous-hyoïdiens en bas et du muscle omo-hyoïdien latérale-
ment, qui barre l’axe vasculaire. Tous ces muscles doivent être
sectionnés (pointillés) en soignant leur hémostase.
J Chir 2003,140, N°4 • © Masson, Paris, 2003
Geste de base

3 La gouttière latérale gauche étant pleinement exposée, il faut plonger sur la face postérieure osseuse. La dissection est tou-
jours plus facile en bas et en arrière de la filière cervicale. On ne cherche toujours pas à voir l’œsophage. On chemine en
avant du paquet jugulocarotidien (attention à ne pas comprimer trop la carotide au risque de briser une plaque chez un malade
athéromateux). L’aide récline vers la ligne médiane l’axe trachéal, avec la main ; jamais avec un écarteur métallique qui pourrait
étirer et blesser le nerf laryngé inférieur. Le doigt de l’opérateur repère très facilement le plan osseux prévertébral sur lequel il faut
se diriger. Cette progression ne nécessite que quelques interruptions vasculaires : souvent une veine thyroïdienne moyenne, parfois
une artère thyroïdienne moyenne inconstante. 239
Lorsque le plan vertébral est atteint, il est utile de bien le dégager vers le bas (ce qui prépare la dissection médiastinale ultérieure),
mais aussi vers le haut, en arrière presque de l’hypopharynx (ce qui facilite les manœuvres de contournement de l’œsophage). Lors-
que l’on palpe le plan osseux prévertébral avec l’index, on a la certitude d’avoir en avant du doigt l’œsophage cervical. Ce n’est qu’à
ce temps de la dissection que l’on se préoccupe de voir l’œsophage et de le palper, en s’aidant éventuellement de la sonde gastrique
passée en transœsophagien.

4 On peut alors, et seulement alors, entamer la dissection


proprement dite de l’œsophage. Celui-ci est noyé dans
un tissu celluloganglionnaire, qui le masque au premier abord.
On libère dans l’ordre : la face postérieure, le bord latéral gau-
che, puis la face antérieure. Pour trouver la face antérieure, il
faut trouver l’espace intertrachéo-œsophagien, sans blesser le
nerf laryngé inférieur. Ce dernier n’a pas besoin d’être vu et
doit être laissé au contact de la trachée. On doit donc cheminer
au ras de l’œsophage depuis le bord gauche, en cheminant pro-
gressivement sur la face antérieure (attention à ne pas s’égarer
dans la musculeuse œsophagienne, la séreuse étant inexistante).
Les manœuvres de réclinaison de la trachée doivent être dou-
ces, permettant ainsi de dégager au mieux la face antérieure
œsophagienne puis d’atteindre le bord droit.
Il reste la manœuvre un peu délicate de contournement de l’œsophage. Le risque n’est pas tant une perforation de la membraneuse
trachéale que, surtout, une perforation de l’œsophage s’il a été incomplètement chargé sur le dissecteur. Cette manœuvre doit être
préparée et réalisée sous contrôle de la vue, libération maximale de l’espace intertrachéo-œsophagien, libération du bord droit de
l’œsophage sur au moins un cm, contournement par un dissecteur peu traumatisant, plutôt en insérant cet instrument en avant de
l’œsophage pour ne pas blesser la trachée ; contournement à faire assez bas sur l’œsophage car la jonction pharyngo-œsophagienne
rend l’espace intertrachéo-œsophagien étroit.
On peut alors passer un lacs et terminer sans difficulté la dissection de tout l’œsophage cervical en s’aidant des manœuvres de trac-
tion sur le lacs.

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