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CHAPITRE 2 : L’EVALUATION PAR LES FLUX

I. Les principes généraux


En achetant des actions, un investisseur apporte un capital à la société qui les a émises et
lui permet de financer l’acquisition d’actifs. L’investisseur possède ainsi un droit de
propriété sur la société qui possède les actifs : hormis l’endettement, la valeur d’une action
est donc fonction de la valeur des actifs détenus par la société qui a émis ces actions. Le
capital qu’un investisseur est prêt à investir (la valeur des actions que nous recherchons)
dépend alors :
∙ des flux générés grâce aux actifs achetés par l’entreprise (et dont il recevra tout ou
partie) ;
∙ du taux de rentabilité qu’il attend.
Nous étudierons dans les chapitres suivants les trois méthodes qui découlent de
l’approche par les flux : l’actualisation des flux de trésorerie disponibles pour
l’entreprise ou revenant aux actionnaires et le dividende actualisé.

II. L’actualisation des FTDE (flux de trésorerie disponibles pour l’entreprise)


L’évaluation des capitaux propres par l’actualisation des flux de trésorerie (Discounted
CashFlow : DCF) peut être réalisée selon deux approches. Nous commençons parla
méthode des FTDE (flux de trésorerie disponibles pour l’entreprise). L’expression « pour
l’entreprise » signifie que les flux de trésorerie sont calculés avant la rémunération des
apporteurs de fonds, c’est-à-dire les actionnaires et les prêteurs. Cette rémunération sera
prise en compte par l’intermédiaire du taux d’actualisation.
La valeur de marché des capitaux propres est alors calculée de manière indirecte selon la
formule suivante :

Valeur de marché des capitaux propres (VCP)


= Valeur de marché des actifs d’exploitation (VGE)
+ Valeur de marché des actifs hors exploitation
+ Valeur de marché des immobilisations financières
– Valeur de marché des dettes financières (VDF)
– Provisions pour risques et charges non récurrentes
– Valeur de marché des intérêts minoritaires

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A. LE CALCUL DE LA VALEUR GLOBALE DE L’ENTREPRISE

1. La démarche générale
La valeur de marché des actifs d’exploitation (VGE) est égale à la somme des flux de
trésorerie actualisés au coût du capital16 (Rc) générés par ces mêmes actifs. Le calcul se
déroule en trois étapes avec :
L’évaluation des FTDE dégagés chaque année de 1 à n. Cette période est qualifiée de
période explicite et selon le contexte, n varie généralement de 3 à 6 ;
Le calcul de la valeur terminale (VT) ou valeur résiduelle. Cette dernière représente la
valeur actualisée à la fin de l’année n des flux de trésorerie qui seront dégagés entre n 1 et
l’infini ;
∙ l’actualisation de l’ensemble de ces flux de trésorerie à la date de l’évaluation.
Si n est la durée pendant laquelle la prévision des flux de trésorerie disponibles (FTDE) a
été faite, la valeur globale de l’entreprise est alors égale à :

EXERCICE
Les travaux concernant la valeur des actifs d’une entreprise ont permis d’obtenir en milliers
d’euros :

∙ les flux de trésorerie disponibles entre les années 1 à 3 :


Années 1 2 3
FTDE 500 500 500

∙ la valeur terminale exprimée en année 3 qui ressort à 5 000 kF.


TRAVAIL A FAIRE
En supposant un coût du capital de 10 %, calculez la valeur globale de l’entreprise par
actualisation des FTDE.

2. La détermination des FTDE sur une période de prévision explicite


Les FTDE (appelés aussi Free Cash Flow) représentent les flux de
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trésorerie générés par les activités d’exploitation après prise en compte
des investissements nets de cessions. Ils se déterminent comme suit :

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CAF d’exploitation
Variation du besoin en fonds de
roulement d’exploitation
Investissements nets de cessions
Flux de trésorerie disponibles pour l’entreprise
On pourrait s’étonner de l’absence de prise en compte des postes liés à l’endettement
financier. En fait, dans une prochaine étape du calcul, le solde des emprunts restant à
rembourser viendra bien en déduction de la valeur des actifs ; quant aux charges
d’intérêts, elles seront intégrées par le biais du taux d’actualisation.
Dans cette première étape, les flux étant décomposés avec le maximum de précision
possible, l’horizon du calcul est forcément limité et, le plus souvent, compris entre 3 et 6
ans. En revanche, le rythme de la prévision est annuel.
La CAF d’exploitation est calculée comme suit :
CAF d’exploitation (EBE – DADP) * (1 – tIBIC) - DADP

3. La détermination de la valeur terminale (VT)


La valeur terminale correspond à la somme des flux de trésorerie disponibles attendus au-
là de la période de prévision explicite, donc entre n 1 et l’infini. Le plus souvent, elle représente
une part très importante de la valeur globale de l’entreprise. Dans nos travaux, le calcul de cette
valeur terminale nécessite deux types d’hypothèses :

✓ Les flux de trésorerie sont-ils constants ou croissants au taux g ?


✓ Le flux de trésorerie de l’année n 1 est-il déduit de celui de l’année n ou est-il fixé
différemment ?
En fonction de ces hypothèses, la valeur terminale est obtenue à l’aide des
formules suivantes :

FTDEn+1 FTDEn+1
VT = ouVT =
Rc Rc − g

EXERCICE
La valeur terminale annoncée dans l’exercice précédent a été obtenue à partir d’un flux de trésorerie
constant égal au flux de l’année 3.
TRAVAIL A FAIRE
En supposant un coût du capital de 10 % :
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1. Posez le calcul de la valeur terminale (5 000 kF) ;
2. Recalculez cette valeur terminale si l’on retient un taux de croissance des flux de 1 % par an au-
delà de la 3e année ;
3. Recalculez cette valeur terminale si le flux de trésorerie est supposé constant et égal à 80 % de
celui de la 3e année.

4. La fixation du taux d’actualisation


Les flux de trésorerie que nous venons de présenter ne tiennent pas compte de la rémunération
des apporteurs de fonds. Ils le sont par le biais du taux d’actualisation qui dès lors doit être égal au
coût du capital.
On peut exprimer les choses autrement en disant que le taux d’actualisation d’un revenu est
égal au taux de rentabilité auquel peuvent prétendre ceux qui vont percevoir ce revenu. Le
revenu étant égal ici aux FTDE qui servent à rémunérer l’ensemble des apporteurs de fonds,
il est logique de les actualiser au coût du capital.
B. LA VALORISATION DES CAPITAUX PROPRES
La valeur de marché des capitaux propres est obtenue en retranchant la valeur de marché de
l’endettement de la valeur globale de l’entreprise et en prenant en compte divers éléments de
valorisation.
1. La valeur de la dette financière
Si la trésorerie active n’est pas nécessaire à l’exploitation, elle gonfle artificiellement les actifs de
l’entreprise. Aussi, sauf indication contraire, l’endettement financier est retenu pour sa valeur
nette : endettement financier brut – trésorerie active.
Par ailleurs, l’endettement doit être apprécié à sa valeur de marché. Celle-ci est égale à la somme
actualisée au taux du marché des décaissements générés par l’emprunt. Il faut néan- moins
remarquer que le plus souvent, les textes des sujets considèrent la valeur de marché de
l’endettement comme égale à sa valeur comptable.
2. Les autres éléments de valorisation des capitaux propres
Pour terminer le calcul de la valeur de marché des capitaux propres, il est nécessaire d’opé- rer
d’ultimes corrections et prendre en compte certains éléments de valorisation (actifs et provisions)
si les produits et les charges y afférant n’ont pas été inclus dans les prévisions des FTDE. Ainsi :
∙les actifs hors exploitation et les immobilisations financières doivent être ajoutés ; en général, les
provisions non récurrentes n’ont pas été inscrites en charges d’exploitation et elles ne figurent
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donc pas dans les FTDE (comme les indemnités de départ à la retraite, dont le provisionnement
n’est d’ailleurs pas obligatoire) ; elles doivent donc être déduites de la valeur globale de
l’entreprise.
Par ailleurs, en présence d’actionnaires minoritaires, la totalité des capitaux propres ne revient pas
entièrement aux actionnaires de la société-mère. En effet, les FTDE sont calculés avec la totalité
des résultats d’exploitation des filiales consolidées par intégration globale alors même qu’elles ne
sont pas contrôlées à 100 %. Il est donc nécessaire de déduire le montant des intérêts minoritaires
de la VGE obtenue.
EXERCICE
On souhaite estimer au 31/12/N, la valeur de marché des capitaux propres d’une société
A par la méthode des FTDE. Ces derniers ont été résumés dans le tableau ci-après (en kF) :

N 1 N 2 N 3 N 4
FTDE (hors valeur terminale) 8 000 8 000 10 000 10 000

Par ailleurs, la valeur terminale sera calculée sur la base d’un flux N 5 égal à 12 000 kF,
en augmentation de 1 % par an les années suivantes.
L’endettement financier mesuré à la valeur comptable ressort à 27 000 kF (contracté avec
un taux d’intérêt de 3 %, remboursement in fine dans 4 ans ; le taux de marché actuel est de
1,5 %).
Une provision pour engagement de retraite a été estimée à 526 kF.
Le coût des capitaux propres est égal à 10 % et le coût du capital à 6 %.

III. L’actualisation des FTDA (flux de trésorerie disponible pour l’actionnaire)


La méthode des FTDA est très proche de la précédente, mais cette fois, la démarche est directe et
permet d’obtenir la valeur de marché des capitaux propres sans avoir à retrancher les dettes
financières.
L’expression « pour les actionnaires » signifie que les flux de trésorerie sont calculés en tenant
compte de la rémunération des prêteurs ; dès lors le total des flux de trésorerie cal- culé
représente la trésorerie maximale qui pourrait servir à rémunérer les actionnaires.
La valeur de marché des capitaux propres est égale à la somme actualisée au coût des capi- taux
propres(Rcp) des flux de trésorerie disponibles pour l’actionnaire augmentée de la valeur
terminale, provisions non récurrentes déduites.

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La CAF est calculée à partir de l’ensemble du résultat net comptable (et pas seulement du
résultat d’exploitation) hors cessions (la valeur comptable des actifs cédés n’est pas un flux
de trésorerie et leur prix de cession est pris en compte plus loin dans le calcul).
Les emprunts contractés et remboursés sont détaillés pour chacune des années.
Ainsi, que ce soit par le biais des charges d’intérêt dans la CAF ou par les emprunts contrac-
tés et remboursés, cette méthode permet de tenir compte des évolutions de la structure
financière.
Les éléments constitutifs des FTDA sont synthétisés dans le tableau ci-après :
CAF : résultat net comptable (hors cessions) + DADP Variation
du besoin en fonds de roulement d’exploitation
Investissements nets de cessions
Emprunt contracté
Emprunt remboursé
= Flux de trésorerie disponibles pour l’actionnaire

Contrairement à la méthode précédente :


✓ les immobilisations financières et les actifs hors exploitation n’ont pas à être
déduits ou ajoutés puisque, normalement, les charges et produits
correspondants sont déjà pris en compte dans les flux de trésorerie ;
✓ les flux de trésorerie disponibles sont actualisés au coût des capitaux propres.
Les actualiser au coût du capital reviendrait à prendre en compte deux fois le
coût des emprunts, dans les flux de trésorerie et dans le taux d’actualisation.
Quant à la valeur terminale, elle se calcule comme dans la méthode précédente.

EXERCICE
Vous disposez des informations suivantes pour les 3 prochaines années sur la société X :

N+1 N+2 N+3


Résultat d’exploitation 150 000 180 000 200 000
BFRE 17 600 19 800 18 200
Investissements 90 000 – 195 000
DADP 30 000 20 000 65 000
BFRE 17 600 19 800 18 200

À la fin de l’exercice N, le BFRE ressort à 10 000 €.


Il est prévu de contracter un emprunt de 100 000 € en N+1 et 180 000 € en N+3. Les infor-
mations obtenues après un cumul des différents tableaux d’amortissement d’emprunt sont
résumées ci-après :

Échéances Dettes Intérêts Amortissements


N+1 120 000 3 600 30 000
N+2 90 000 4 200 35 000

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N+3 235 000 7 400 80 000

Par ailleurs, le coût des capitaux propres a été estimé à 10 % et la valeur terminale sera esti-
mée sur la base d’un flux de trésorerie constant égal à 100 000 €.

TRAVAIL À FAIRE
Enutilisantlaméthode des FTDA,estimezlavaleur demarchédes capitauxpropres dela société X
début N+1.

IV. IV. LES MODELES D’ACTUALISATION DES DIVIDENDES


Les méthodes d’évaluation basées sur les flux de dividendes
(modèle de Gordon et Shapiro) prolongent les approches en termes de
flux de trésorerie. Elles ont déjà été présentées dans le cours 1, chapitre
3, II, et nous en proposons un rappel à l’aide de l’exercice ci-après.

EXERCICE
Le 31/12/N, une entreprise a versé à ses actionnaires un dividende de 0,50 € par action. Elle
prévoit que ce DPA augmente de 5 % par an dès l’exercice N+1. Le coût des capitaux propres
et le coût du capital ressortent respectivement à 8 % et 6 %.

TRAVAIL À FAIRE
Calculez la valeur de l’action à la date du 31/12/N à l’aide du modèle de Gordon et Shapiro.
Renouvelez votre calcul dans les deux cas suivants :
de 5 par
an, mais à partir de l’exercice N+2.
0,50 € versé en N+1, N+2 et N+3 et en croissance de 5 par an au-delà.

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