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Produits dérivés

« Les stratégies de couverture par les contrats futures»

Cycle d’Ingénieur : Ingénierie en Finance & Actuariat


Module : Instruments Financiers (Projet 3)

Encadré par : Pr. Youssef EL BOUKFAOUI

Réalisé par :
TRAORE Mahadi Moussa Gaoussou
MAGASSOUBA Nanamoudou
Introduction
De nombreux intervenants sur les marchés de futures sont des opérateurs en
couverture (hedgers). Leur objectif est d'utiliser les contrats futures pour réduire Ie
risque auquel ils sont confrontés. Ce risque peut être Iié au prix du pétrole, au cours
d'une devise, à Ia valeur d'un indice, etc. Une couverture est dite parfaite si elle
permet d'éliminer complètement le risque. De fait, il est rarement possible d'obtenir
ce type de protection sur les marchés, et l'analyse des méthodes de couverture
consiste à définir les principes permettant la construction de stratégies dont les
résultats sont aussi proches que possible de ceux d'une couverture parfaite.
Dans ce chapitre, nous étudions les différentes possibilités d'utilisation des contrats
futures dans Ie but de couvrir une position. Quand faut-il retenir une position longue
ou courte ? Quelle quantité de contrats permet Ia meilleure réduction du risque ? A
ce stade, nous nous focalisons sur les stratégies statiques, c'est-à-dire que nous
n'envisageons pas la possibilité d'ajustement de Ia position pendant Ia période de
couverture. Au chapitre 15, nous aborderons les stratégies dynamiques dans
lesquelles Ia position est sous constante surveillance et peut subir des ajustements.
Dans l'ensemble de ce chapitre, nous identifions contrats forward et contrats
futures. Cela signifie en particulier que nous ne nous préoccupons pas de
l'actualisation car tous les flux surviennent à la date à laquelle Ia position est
dénouée.

Les principes
Quand un individu ou une entreprise prennent une position de couverture sur un
marché de futures, il s'agit en général d'éliminer, ou du moins de réduire
considérablement, un risque. Supposons qu'une entreprise sache qu'e1le peut
perdre 10 000 € pour chaque baisse d'un cent du prix d'une matière première dans
les prochains mois. Pour se couvrir contre cette éventualité, le trésorier peut
prendre une position courte sur un futures sur cette matière première. La position
doit être construite de façon que le contrat futures gagne 10 000 € quand le prix
baisse d'un cent. Bien sûr, si le prix augmente au lieu de baisser, le gain sur la
matière première est compensé par une perte sur le contrat futures.

Les positions courtes :


Une couverture courte (short hedge), telle que celle qui vient d'être décrite, est
appropriée quand Ie hedger détient l'actif sous-jacent au contrat et prévoit de le
vendre dans un avenir plus ou moins proche. Par exemple, un agriculteur qui cultive
du maïs et qui se prépare à vendre sa récolte dans deux mois peut choisir une
couverture de ce type. Mais elle peut aussi être utile lorsqu'on ne détient pas encore
I’actif, mais qu'on doit le recevoir dans les mois à venir. Un exportateur français qui
doit recevoir des USD dans trois mois peut avoir un manque à gagner si, d'ici là,
I'USD se déprécie par rapport à I’euro. Une position courte sur un contrat futures sur
USD peut assurer un taux de change pour 1a conversion future des dollars en euros.
Pour préciser ces mécanismes, considérons un producteur de pétrole qui, Ie 15 mai,
vient de conclure un contrat pour Ia livraison d'un million de barils Ie 15 août. Il est
alors dans une position analogue à celle que nous venons de décrire, puisque chaque
baisse d'un cent du baril lui fait perdre 10 000 USD. Supposons que le prix spot du
pétrole soit de 19 USD Ie baril le 15 mai et que le prix futures à 3 mois coté sur le
New York Mercantile Exchange (NYMEX) soit de 18,75 USD le baril. Sachant que
chaque contrat porte sur 1 000 barils, 1e producteur peut couvrir sa position en
vendant 1 000 contrats échéance août. Si la position est dénouée Ie 15 août, l'effet
du contrat sera d'assurer un prix de vente du brut proche de 18,75 USD le baril.
Pour illustrer ce qui peut survenir, imaginons que le prix du brut soit à 17,5 USD Ie 15
août. La firme reçoit 17,5 millions de la vente du pétrole, mais comme le 15 août se
situe dans le mois de livraison du contrat, Ie prix futures sera à ce moment très
proche de 17,5 USD. L'entreprise gagne approximativement 18,75 USD - 17,5 USD
=1,25 USD par baril, soit 1,25 million pour les 1 000 contrats. La position totale aura
donc engendré un flux d'environ 17.5 + 1,25 =18,75 millions de dollars, soit 18,75
USD par baril.
Si Ie prix du brut se situait à 19,5 USD le 15 août, la firme recevrait 19,5 millions de la
vente du produit mais perdrait 19,5 - 18,75 = 0,75 million sur les contrats futures, ce
qui, ici encore, donnerait un flux total de 19,5 - 0,75 = 18,75 millions de dollars. Dans
tous les cas, le flux final est de 18,75 millions du fait de la couverture par les futures.

Les positions longues :


Les couvertures qui supposent de prendre une position longue peuvent être
illustrées par l'exemple symétrique du précédent. Imaginons, le 15 janvier, une
entreprise qui doit acheter 100 000 livres de cuivre le 15 mai pour son processus de
production. Le prix spot du cuivre est de 140 cents la livre, et le prix futures du
contrat échéance mai est de 120 cents par livre. Le fabricant peut couvrir sa position
par des contrats sur Ie cuivre cotés sur le COMEX. Chaque contrat porte sur 25 000
livres, il faut donc prendre une position longue sur quatre contrats. Cette stratégie a
pour effet de fixer le prix d'achat futur à 120 cents. Si le prix spot Ie 15 mai est de
125 cents, l'industriel doit payer 125 000 USD pour acheter le cuivre, mais il gagne 5
cents par livre sur le contrat, soit 5 000 USD sur Ia totalité des quatre contrats
puisque :
4 x 25 000 x (1,25 - 1,2) =5 000 USD
Si le prix du cuivre est à 105, le coût d'achat est seulement de 105 000 USD, mais 15
cents par livre sont perdus sur la position futures, soit un total de 15 000 USD,
ramenant le décaissement total à 120 000 USD. Remarquons qu'ici il vaut mieux
acheter Ie cuivre à terme par l’intermédiaire d'un futures que de I'acheter au
comptant en janvier, puisque le prix spot est de 140 cents, auxquels il convient
d'ajouter le coût de stockage jusqu'en mai et les intérêts à payer, liés au financement
de I'achat. Toutefois, pour une entreprise qui utilise de manière habituelle le cuivre
dans son processus de production, le prix spot plus élevé est compensé par
l'avantage consistant à détenir le produit physique plutôt que le future. En effet, elle
pourrait très bien en avoir besoin plus tôt et ne craint pas une quelconque pénurie.
Bien sûr, si la firme est sûre de ne pas avoir besoin de ce cuivre avant le 15 mai, le
rendement d'opportunité n'a pas de valeur et une position sur le contrat future est
alors plus intéressante que l'achat immédiat du cuivre.
Prendre une position longue peut aussi être justifié par la volonté d'annuler une
position courte prise précédemment. Lorsqu'un investisseur a vendu à découvert
une action (voir la section 5.2 pour une discussion sur Ia vente à découvert), une
partie de son risque est constituée par l'évolution de l’indice de marché du fait du
lien entre cet indice et l'action considérée. L'investisseur peut alors avoir intérêt à
couvrir cette partie du risque en prenant une position longue sur un future sur
indice. Ce type de stratégie sera analysé plus loin dans ce chapitre.
Ces divers exemples supposent que la position est dénouée pendant Ie mois de
livraison du contrat. La couverture a donc le même effet que si la livraison associée
au contrat était réellement réalisée. Mais en général ce n'est pas le cas car Ia
livraison est coûteuse. Le plus souvent, les hedgers en position longue évitent cette
livraison en dénouant leur position sur le contrat avant la période de livraison. Bien
que nous ayons identifié prix forward et prix futures, il faut noter que la
performance d'une couverture est peu affectée par la distinction. Comme nous
l'avons expliqué au chapitre 2, la position sur les futures engendre des flux
quotidiens, alors qu'une position sur un contrat forward donne lieu à un seul flux
terminal.

Les arguments pour et contre la


couverture
Les arguments en faveur de la couverture sont évidents à la lecture des exemples
précédents. La plupart des entreprises industrielles n'ont aucune compétence
particulière pour prévoir Ia valeur de telle ou telle variable économique dans trois ou
six mois. Par conséquent, la couverture des risques associés à la variation de ces
variables paraît judicieuse. Les entreprises couvertes peuvent alors se concentrer sur
ce qu'elles savent faire, produire et gérer des risques industriels.
En pratique, il reste cependant de nombreux risques résiduels qui ne sont pas
couverts en prenant une position comme celles que nous venons d'exposer. Le reste
de cette section en expose les raisons.

La couverture et les actionnaires


Un des arguments souvent évoqué à I'encontre de la couverture stipule que les
actionnaires peuvent, s'ils Ie souhaitent, se couvrir eux-mêmes. Ils n'ont pas besoin
que l'entreprise le fasse. Cet argument pose quand même un problème. II suppose
implicitement que les actionnaires ont la même information que les managers sur les
risques encourus. Le plus souvent, ce n'est pas le cas. Cet argument ignore aussi les
imperfections de marché comme les coûts de transaction. Ceux-ci sont
proportionnellement moindres sur les transactions importantes. La couverture est
donc susceptible d'être moins coûteuse pour la firme que pour les investisseurs
individuels. De plus, la taille des contrats sur les marchés organisés rend le plus
souvent impossible la couverture par un actionnaire individuel.
Les actionnaires peuvent, par contre, facilement diversifier leur portefeuille. Un
investisseur détenant un portefeuille bien diversifié peut ainsi éviter de nombreux
risques auxquels sont soumises les entreprises. Par exemple, un individu peut
détenir des actions d'une entreprise utilisatrice de cuivre mais aussi celles d'un
producteur de cuivre, de façon que l'exposition au risque de prix du cuivre soit
minime. Si les firmes agissent dans I ‘intérêt d'actionnaires détenant des
portefeuilles bien diversifiés, on peut mettre en doute la nécessité, pour les
entreprises, de se couvrir. Cependant, savoir si un argument de ce type est de nature
à influencer les managers est une question ouverte.

Couverture et concurrence
Si, dans un certain secteur, la couverture n'est pas la norme, il peut ne pas être
judicieux pour une entreprise de se distinguer de ses concurrents. La concurrence
dans Ie secteur peut en effet conduire les prix de vente des produits à s'ajuster aux
variations des coûts supportés (prix des matières premières, taux d'intérêt, taux de
change, etc.) par les sociétés. Par conséquent, une compagnie qui ne se couvre pas
peut espérer garder un taux de marge constant. Par contre, une firme qui se couvre
aura un taux de marge beaucoup plus volatil.
Considérons par exemple deux entreprises fabriquant des bijoux en or, appelées
Orsur et Orisk; dans ce secteur, les entreprises ne se couvrent généralement pas
contre les variations de prix de leur matière première principale et Orisk ne fait pas
exception. Par contre, Orsur a décidé d'agir différemment en couvrant ses achats des
18 prochains mois par une position longue sur des contrats futures.
La compagnie Orsur réduit-elle son risque en agissant ainsi ? Si le prix de l'or
augmente, le prix des bijoux suivra et le taux de marge d'Orisk ne sera pas modifié,
alors que celui d'Orsur augmentera. Si, par contre, le prix de l'or baisse, le prix des
bijoux diminuera et Ie taux de marge d'Orsur fera de même, alors que celui d'Orisk
restera constant. On peut même imaginer que le taux de marge d'Orsur devienne
négatif comme la conséquence de la décision de couverture. Les différentes
situations sont résumées dans le tableau 3.1.
Tableau 3.1 : Les dangers de la couverture quand les concurrents ne se couvrent pas
On peut en conclure que tous les effets des variations de prix sur Ia profitabilité de
l'entreprise doivent être pris en compte dans I’élaboration d'une stratégie de
couverture.

Considérations diverses
IL est important de garder à l'esprit qu'une stratégie de couverture par des contrats
futures peut aussi bien améliorer les profits que les diminuer par rapport à une
situation sans couverture. Dans l'exemple du producteur de pétrole considéré
précédemment. si le prix du pétrole baisse, la société perd de l'argent sur ses ventes
et la position sur les contrats futures permet de compenser cette perte. La situation
est donc meilleure avec la couverture et les supérieurs hiérarchiques du trésorier
apprécieront. Symétriquement, si le prix du pétrole monte, le résultat des ventes
augmente mais cette augmentation est compensée par les pertes sur les contrats
futures et le résultat est inférieur à celui qui aurait été obtenu sans couverture.
Quoique la décision de couvrir ait été parfaitement logique, il se peut que le
trésorier ait quelques difficultés à la justifier a posteriori. Si le prix est de 21,75 USD
Ie baril à la fin de la période de couverture, Ia perte sur les contrats futures est de 3
millions de dollars. On peut imaginer la conversation entre le PDG et le trésorier.
Le PDG : C'est terrible. Nous avons perdu 3 millions de dollars sur Ie marché à terme
en quelques mois. Comment est-ce possible ? J'exige une explication.
Le trésorier : L'objet des contrats futures n'était pas de faire des profits mais de nous
couvrir contre les variations de prix. N'oubliez pas que nous avons augmenté notre
résultat de 3 millions sur les ventes de pétrole à cause de l'augmentation du prix.
Le PDG : Quel rapport ! C'est comme si vous disiez qu'il ne faut pas s'inquiéter de la
baisse des ventes en Californie sous prétexte que celles de New York sont en
hausse !
Le trésorier : Si le prix du baril avait baissé...
Le PDG : Peu m'importe de savoir ce qui se serait passé si le prix avait baissé. Le fait
est qu'il a monté ! Je ne vois vraiment pas ce qui vous a pris de jouer sur ces
marchés. Nos actionnaires vont attendre d'excellents résultats ce trimestre et je vais
devoir leur expliquer que vos initiatives ont réduit nos profits de 3 millions. J'ai peur
que vous ne perdiez vos primes pour cette année.
Le trésorier : Ce n'est pas juste. Je. ..
Le PDG : Pas juste ! Vous avez même de la chance de ne pas être viré. Vous avez
perdu 3 millions.
Le trésorier : Tout dépend de la façon dont on voit le problème.
Cette petite conversation permet de comprendre pourquoi tant de trésoriers sont
réticents face aux opérations de couverture. Celles-ci réduisent le risque de
l'entreprise, mais elles peuvent mettre le trésorier dans une position délicate si les
autres décideurs ne comprennent pas parfaitement les tenants et aboutissants de
cette démarche. La seule solution est que la politique de couverture soit expliquée à
l'ensemble des décideurs de façon que chacun saisisse bien les enjeux et Les
résultats possibles. L'idéal est que cette politique soit établie par la Direction
générale et clairement communiquée à I’ensemble des directions et aux actionnaires
(voir l'encadré 3.1 pour une discussion sur la politique de couverture des mines d'or).

La stratégie de couverture des


compagnies minières (sur l'or)
Il est assez naturel pour une entreprise qui exploite des mines d'or de chercher à se
couvrir contre les variations de prix de I’or. Il se passe en général plusieurs années
avant qu'une mine soit épuisée. Par conséquent, quand une entreprise décide
d'entreprendre l'exploitation, elle s’expose pour longtemps aux variations de prix de
ce métal précieux. De ce fait, un projet qui peut paraître profitable peut devenir
largement déficitaire si le prix de l'or chute.
C'est pourquoi les mines d'or prennent en général la précaution de présenter de
manière détaillée leurs stratégies de couverture aux actionnaires potentiels. Il reste
néanmoins des exploitants qui décident de ne pas se couvrir. Dans ce cas, les
investisseurs qui achètent les actions de ces sociétés veulent pleinement profiter de
la hausse si elle survient, quitte à prendre Ie risque d'une perte qui peut être
conséquente en cas de chute des cours.
Celles qui, en revanche décident de se couvrir estiment la production future et
prennent des positions courtes sur des contrats futures ou forward, de façon à
assurer un prix de revente fixé à leur production.
Imaginez que vous soyez Goldman Sachs et que vous veniez de prendre position
(longue) sur un forward avec pour contrepartie une compagnie minière. Comment
pouvez-vous couvrir votre propre risque ? La réponse est la suivante : vous allez
emprunter de l'or à la banque centrale et Ie revendre ensuite au prix du marché (les
banques centrales disposent en général de grandes quantités d'or). À l'échéance du
contrat, vous allez acheter l'or à Ia compagnie minière, au prix prévu dans le contrat
fonward, et vous rendrez cet or à la banque centrale qui vous I’a prêté. Vous aurez
simplement payé un intérêt à la banque centrale (de l'ordre de 1,5 % annuel) pour Ie
prêt de l'or.
Le risque de base
Les exemples donnés dans la section précédente sont presque trop beaux pour être
vrais. Le hedger était capable d'identifier la date précise à laquelle I’actif sous-jacent
devait être acheté ou vendu. IL pouvait utiliser des contrats futures qui permettaient
d'éliminer entièrement le risque de variation de prix. En pratique, c'est
généralement moins simple, pour les raisons suivantes :
1. L'actif dont les variations de prix doivent être couvertes n'est pas forcément Ie
même que le sous-jacent du contrat futures.
2. Le hedger peut ne pas connaître avec exactitude la date à laquelle il devra acheter
ou vendre l'actif.
3. La stratégie de couverture peut éventuellement imposer de dénouer la position
sur les contrats futures bien avant leur échéance.
Ces différents éléments donnent naissance au risque de base.

La base
La base est définie comme la différence entre le prix au comptant et Ie prix future. Si
I'actif à couvrir et le sous-jacent du contrat futures coïncident, Ia base sera nulle à
l'échéance du contrat. Mais avant cette date, elle peut être positive ou négative. Le
graphique 3.1 montre comment la base peut changer au cours du temps dans le cas
d'une base positive avant l'échéance. Pour examiner plus précisément le risque de
base, notons :
S1 le prix spot à Ia date t1
S2 Ie prix spot à la date t2
F1 le prix futures à la date t1
F2 Ie prix futures à Ia date t2
b1 Ia base à la date t1
b2 la base à la date t2
Graphique 3.1 : Variation de Ia base au cours du temps.
Supposons qu'une couverture soit mise en æuvre à Ia date t1 et dénouée à la date
t2; par exemple, considérons des prix spot et futures en t1 égaux à 2,5 € et 2,2 €, ces
mêmes prix en date t2 étant 2 € et 1,9 €. La définition de la base permet d'écrire :
b1 = S1 – F1
b2 = S2 – F2
Ce qui, dans notre exemple, se traduit par b1= 0,3 € et b2 = 0,1 €. Analysons tout
d'abord la situation d'un hedger qui prend une position courte en t1 car il sait qu'il
vendra le sous-jacent en t2. Le prix spot de I’actif sera S2 et le gain/perte sur le
contrat futures est égal à F1 - F2. Le prix effectivement obtenu pour une unité d'actif
vendue est donc :

S2 + F1 - F2 = F1 + b2

c'est-à-dire 2,3€. La valeur de F1 est connue dès la date t1, alors que celle de b2 sera
observée en t2, ce qui engendre le risque de base.
Le risque auquel est exposé un hedger provient parfois d'un actif qui n'est pas Ie
sous-jacent du contrat. Le risque de base est susceptible d'augmenter dans ce cas (il
s'agit en fait d'un risque de corrélation dans cette situation). Notons S2* Ie prix en
date t2 de l'actif à couvrir; le hedger s'assure, comme précédemment, un prix
d'achat ou de vente pour I'actif égal à :
S2 + F1 - F2 = F2 + b2
que I’on peut réécrire :
F1 + ( S2* - F2) + (S2 – S2* )
Les termes ( S2* - F2) et (S2 – S2* ) sont les deux composantes de Ia base. Le premier
est la base qui serait observée si I’ actif sous-jacent au contrat était Ie même que I'
actif négocié, alors que Ie second traduit la différence entre ces deux actifs. II est bon
de noter que le risque de base peut améliorer ou détériorer Ia position du hedger.
Dans le cas d'une couverture courte, Ia position s'améliore si la base s'élargit, alors
qu'elle se détériore si la base devient plus étroite. Pour une couverture longue, la
situation inverse est observée.

Le choix du contrat


Lorsqu'une couverture parfaite n'est pas disponible, deux décisions doivent être
prises.
1. Choisir I'actif sous-jacent du contrat parmi les contrats disponibles.
2. Choisir le mois de livraison.
Quand l'actif à couvrir est disponible comme support de contrat, Ia réponse à la
première interrogation est immédiate. Quand ce n'est pas Ie cas, il faut analyser
soigneusement l'offre de contrats pour sélectionner celui dont les prix futures sont le
plus corrélés avec I'actif à couvrir.
Le choix de I'échéance est influencé par plusieurs facteurs. Dans les exemples
précédents, nous avions retenu le mois de livraison contenant Ia date à laquelle
l'actif serait acheté ou vendu. Dans la pratique, c'est souvent un mois de livraison
ultérieur qui est retenu. II s'agit d'une simple précaution car les prix futures ont
parfois des comportements erratiques pendant le mois de livraison. De plus, quand
la période de livraison est le mois entier, un hedger avec une position longue peut se
voir obligé de prendre livraison s'il possède encore le contrat au début de cette
période, ce qui n'est pas forcément son objectif.
De manière générale, le risque de base augmente avec la durée de vie résiduelle du
contrat à la date de clôture de Ia position de couverture. Par conséquent, une règle
de bon sens consiste à choisir le mois de livraison le plus proche postérieur au mois
qui contient la date de clôture souhaitée de la position de couverture. Si, pour un
contrat donné, 1es échéances disponibles sont mars, juin, septembre et décembre,
on choisira le contrat mars pour des couvertures dont l'horizon se situe en
décembre, janvier février, on choisira juin pour des couvertures dont I’ horizon est
mars, avril, mai, et ainsi de suite. Bien sûr, cette règle suppose qu'il y a une liquidité
suffisante sur le marché des différents contrats. IL est courant que Ia liquidité soit
beaucoup plus forte sur I’ échéance la plus courte, ce qui dans certains cas peut
amener le hedger à choisir systématiquement I’ échéance la plus courte, et
éventuellement à renouveler sa position si nécessaire. Cette stratégie est abordée un
peu plus loin.
Exemple 3.1 :
Le 1er mars, une entreprise américaine s'attend à recevoir 50 millions de yens de
l'un de ses clients japonais à la fin du mois de juillet. Les mois de livraison des
contrats futures sur Ie yen (JPY) ont pour échéances les fins de trimestres civils, et
chaque contrat porte sur 12,5 millions de JPY. L'entreprise prend alors une position
courte sur quatre contrats échéance septembre. A Ia fin du mois de juillet, quand I’
encaissement arrive, la position de couverture est dénouée par le rachat de quatre
contrats. Le taux de change futures Ie 1er mars est de 0,7800 cents par yen, et fin
juillet, les prix spot et futures correspondants sont respectivement 0,7200 et 0,7250.
Le gain sur les contrats futures est 0,7800 - 0,7250 = 0,0550 cents par yen. La base
est, quant à elle, égale à 0,7200 - 0,7250 = 0,0050 cents quand la position est
dénouée. Le prix effectivement obtenu en cents pour 100 yens est :
0,7200 + 0,0550 =0,7750
qu’on peut encore écrire :
0,7800 - 0,0050 = 0,7750
Par conséquent, le montant total reçu, en dollars, est égal à 50 x 0,00775 millions de
dollars, soit 387 500 USD.

Exemple 3.2 :
Le 8 juin, une entreprise sait qu'elle devra acheter 20 000 barils de pétrole brut en
octobre ou novembre. La taille des contrats traités sur le NYMEX est de 1 000 barils
par contrat. L'entreprise décide de prendre une position longue sur 20 contrats
échéance décembre à un prix futures de 18,00 USD le baril. L'achat du pétrole est
finalement réalisé le 10 novembre et Ia position sur les contrats est dénouée à cette
date, alors que les prix spot et futures sont respectivement 20,00 USD et 19,10 USD.
Le gain sur les contrats est 19,10 - 18,00 = 1,10 USD par baril. À la date de clôture de
la position, la base est de 20,00 - 19,10 = 0,90 USD. Le prix effectivement payé par
baril s'écrit comme la différence entre le prix spot et le gain sur les contrats: 20,00 -
1,10 = 18,90 USD ou encore comme le prix futures initiai plus Ia base, c'est-à-dire :
18,00 USD + 0,90 USD = 18,90 USD
Le prix total payé est donc 18,90 x 20 000 = 378 000 USD.

La couverture croisée


Le ratio de couverture est Ie rapport du volume de Ia position à prendre sur le
marché futures pour couvrir une position et du volume de Ia position sur I’ actif à
couvrir. Pour l’instant, nous avons toujours utilisé un ratio égal à 1. Dans l’exemple
3.2, I' exposition au risque concernait 20 000 barils de pétrole et Ia position sur les
futures correspondait exactement à cette quantité. Cependant, la minimisation du
risque par le hedger n'impose pas toujours de choisir cette valeur pour Ie ratio de
couverture.

Le ratio de couverture de variance


minimum
Nous utiliserons les notations suivantes :
∆S: variation du prix spot pendant la période de couverture
∆F : variation du prix futures pendant Ia période de couverture
σs : l’écart-type de ∆S
σF : écart-type de ∆F
ρ: corrélation entre ∆S et ∆F
h* : ratio de couverture qui minimise le risque de la position du hedger
Dans I’ annexe de ce chapitre, nous montrons que Ie ratio h* s'écrit :
σs
h*= ρ (3.1)
σF
Le ratio de couverture optimal est donc le produit de la corrélation des variations de
prix et du ratio des écarts-types de ∆S et ∆F. Le graphique 3.2 montre comment
évolue la variance de valeur de la position couverte en fonction du ratio retenu.
Lorsque Ia corrélation est parfaite, égale à 1, et que les variances sont égales, Ie ratio
est évidemment égal à 1. De manière générale, Ie ratio optimal sera la pente de la
droite de régression de ∆S sur ∆F, comme le montre Ie graphique 3.3.
Si ∆F est deux fois plus volatil que ∆S et si la corrélation est parfaite, le ratio sera égal
à 0,5, ce qui s'explique intuitivement puisque les variations de F sont deux fois plus
importantes que celles de S. L'efficacité de la couverture est mesurée par la part de
variance éliminée par la couverture, c'est-à-dire :

Les paramètres ρ, σs et σF de I’ équation (3.1) sont estimés à partir de données


historiques sur ∆S et ∆F. (l'hypothèse implicite est donc que Ia relation entre les
variations passées restera stable dans Ie futur). On mesure généralement les
variations de prix sur des intervalles de longueur constante. Dans I’ absolu, la
longueur des intervalles devrait être la même que Ia durée de Ia couverture, mais en
pratique, cela limite considérablement le nombre de données et des intervalles plus
courts sont retenus.

Le nombre optimal de contrats


Notons :
N A : taille de la position à couvrir (en unités)
Q F : taille d'un contrat futures (en unités)

N ¿ : nombre optimal de contrats futures pour la couverture

Graphique 3.2 : Relation entre la variance de valeur de la position et le ratio de


couverture.

Graphique 3.3 : Régression de prix spot sur la variation du prix futures.


Les contrats futures doivent avoir, en fonction des résultats précédents, une valeur
¿
nominale h N A Par conséquent, le nombre optimal de contrats est égal à :

Exemple 3.3 :
Une compagnie aérienne doit acheter deux millions de gallons de kérosène dans un
mois et décide de se couvrir par des contrats futures sur le fuel domestique. Le
tableau 3.2 donne, pour n = 15 mois consécutifs, les variations ∆S (kérosène) et ∆F
(fuel domestique) en USD par gallon. On notera x i et y i les variations respectives
de F et S pour le mois i. Le tableau 3.2 permet de calculer :

On peut alors, à l'aide des formules statistiques usuelles, estimer Ies écarts-types et
Ie coefficient de corrélation :

L'équation (3.1) nous indique que Ie ratio de variance minimum h* est donné par :
Chaque contrat sur fuel domestique porte sur 42 000 gallons; I’ équation (3.2) nous
donne alors le nombre de contrats :

En arrondissant à I’ entier voisin, le nombre de contrats est de 37.


Tableau 3.2 : Données pour calculer le ratio de variance minimum quand le contrat
sur le fuel domestique est utilisé pour couvrir l'achat de kérosène

Les futures sur indices


Nous allons maintenant analyser les futures sur indices et Ia façon dont ils sont
utilisés dans Ie cadre de stratégies de couverture.
Un indice d'actions représente un portefeuille hypothétique d'actions et l'évolution
de l’indice dans Ie temps retrace les variations du portefeuille qu'il représente. Le
poids de chaque action dans I’ indice est 1a proportion du portefeuille investie dans
cette action. L'accroissement relatif de I’ indice dans un intervalle de temps donné
correspond à la croissance (en pourcentage) de la valeur du portefeuille qu'il
représente au cours de cette période. Les dividendes payés par les titres ne sont pas)
en général, intégrés dans le calcul de l'indice. En conséquence, l'évolution de Ia
valeur d'un indice mesure plutôt les gains/pertes en capital sur Ie portefeuille
représentatif de I’ indice.
Même si la composition d'un indice reste inchangée, les poids des actions qui le
composent changent dans le temps en fonction des cotations de ces actions. Quand
le prix d'un titre augmente plus que les autres, son poids dans f indice va augmenter.
Certains indices sont construits sur I’ hypothèse d'un portefeuille contenant une
unité de chaque action. Dans ce cas le poids est proportionnel au cours coté et un
ajustement est réalisé lorsqu'une opération sur titres a lieu, comme une distribution
d'actions gratuites. D'autres indices accordent aux actions qui les composent un
poids proportionnel à leurs capitalisations boursières. Dans ce cas) I’ ajustement aux
opérations sur titres est automatique.

Les indices d'actions


Le tabieau 3.3 montre les prix futures de contrats portant sur un certain nombre
d'indices, tels qu'ils apparaissaient dans le WaIl Street Journal du 5 février 2004. Les
prix sont des prix de clôture de la veille, c'est-à-dire du 4 février 2004.

 L'indice DAX-30 allemand et l’indice CAC 40 français sont des indices


domestiques basés respectivement sur 30 et 40 titres. Le contrat DAX-30 est
coté sur l'Eurex, alors que le contrat CAC 40 est coté sur Euronext.LIFFE.
Les principaux indices américains sont :

 Le Dow Jones Industrial Average, basé sur 30 titres. Les poids sont
proportionnels aux prix des titres. Deux contrats futures sur cet indice, cotés
sur le Chicago Board of Trade (CBOT), portent respectivement sur 10 USD et 5
USD fois la vaieur de I'indice.
 Le Standard & Poors 500 (S&P500) est composé de 500 titres; les poids sont
proportionnels aux capitalisations boursières. Cet indice regroupe 80 % de Ia
capitalisation boursière du New York Stock Exchange (NYSE). Deux contrats
futures sur cet indice sont négociés sur Ie Chicago Mercantile Exchange
(CME). L'un porte sur 250 USD fois la vaieur de l’indice, et l'autre sur 50 USD
fois cette valeur.
 Le Nasdaq100 comporte 100 titres cotés par Ie National Association of
Securities Dealers Automatic Quotations Service. Le CME propose deux
contrats sur cet indice.
 Le principal indice britannique est le FTSE100, qui comporte 100 titres cotés
sur le London Stock Exchange (LSE).
 Le DJ Euro Stoxx 50 (pour la zone euro) et le DJ Stoxx 50 (pour I'Europe) sont
deux indices de 50 actions européennes importantes. Les contrats futures sur
cet indice sont cotés sur l’Eurex. Ils portent sur 10 € fois la valeur de I’ indice.
Tableau 3.2 : Prix futures des contrats sur indice publiés dans le Wall Street Journal
du 5 février 2004 : les colonnes montrent le mois, les prix d'ouverture, les plus haut
et plus bas journaliers, le prix de compensation. la variation journalière, les plus haut
et plus bas sur la durée de vie du contrat et la position ouverte.

La couverture d'un portefeuille d'actions


Les futures sur indices sont en général utilisés pour couvrir un portefeuille d'actions
contre les variations de prix. Notons P la valeur du portefeuille aujourd'hui et A la
valeur du portefeuille des titres composant I’ indice sous-jacent au contrat. Si 1e
portefeuille duplique exactement I’ indice, le ratio de couverture est égal à 1, et
l'équation (3.2) montre que le nombre optimal de contrats est simplement :
Considéron
s par exemple un portefeuille qui vaut 3 millions d'euros et qui duplique Ie CAC 40.
Le contrat futures CAC 40 coté sur Euronext.LIFFE porte sur 10 € fois f indice. Si
l’indice est à 3 000, on a P : 3 000 000 et A = 10 x 3 000; il faut donc prendre une
position courte sur 100 contrats pour couvrir la position. Quand le portefeuille ne
duplique pas exactement I’ indice, ce qui est Ie cas le plus courant, on peut utiliser le
β du portefeuille (donné par le modèle d'équilibre des actifs financiers) pour
déterminer la couverture optimale. β est la pente de la droite de régression des
rentabilités du portefeuille, en excès du taux sans risque, sur les rentabilités du
portefeuille de marché (l'indice est alors considéré comme un proxy de ce
portefeuille), toujours en excès du taux sans risque. Lorsque β est supérieur à 1, les
variations du portefeuille tendent à amplifier les variations de I’ indice, alors que si β
est plus petit que 1, Ies variations sont amorties par rapport à celles de l’indice.
Dans cette situation, le nombre optimal de contrats est défini, comme dans
l'équation (3.2), par :

Cette relation suppose que Ia maturité du contrat est proche de celle de la


couverture; elle ignore aussi le marking to market quotidien sur le contrat
Considérons l'exemple suivant :

 . Valeur du CAC 40 : 3000


 . Valeur du portefeuille : 1 600 000 €
 .Taux sans risque : 5 %
 . Rendement en dividende de I’indice : 2 %
 . Bêta du portefeuille : 1.5
Supposons que le contrat CAC 40 utilisé pour une couverture d'horizon 3 mois ait
une durée de vie de 4 mois. Le prix futures du contrat est supposé égal à 3030,15.
De l'équation (3.4) on déduit le nombre de contrats futures :

Une position courte sur 80 contrats doit donc être prise. Supposons que I’ indice
chute à 2 700 trois mois plus tard et que le prix futures soit de 2 706,75 (nous
verrons au chapitre 5 comment sont déterminés ces prix).
Le gain réalisé sur les futures s'écrit :
80 x (3 030,15 - 2 706,75) x 10 € = 265 181 €
La perte sur l'indice est de 10 % et le rendement en dividende de l'indice de 2 % par
an, soit 0,5 % sur trois mois. Par conséquent, Ia rentabilité est -9,5 %. De plus, le taux
sans risque annuel est 5 %, soit 1,25 % sur un trimestre. La relation du CAPM s'écrit :
Rentabilité espérée du portefeuille =Taux sans risque * Bêta x (Rentabilité de I'indice
- Taux sans risque)
C'est-à-dire :
1,25 + [1,5 x (-9,5 - 1,25)] = -14,875 %
La valeur espérée du portefeuille est donc : 1,6x (1- 0,14875) =1,362 millions d'euros
La valeur finale de la position s'écrit :
1362000 + 265181 =1627187 €
Le tableau 3.4 donne les résultats de cette couverture pour diverses valeurs de
l’indice. La valeur de la position est très stable, pratiquement indépendante de la
valeur de l’indice. Ce tableau suppose que Ie taux de dividende dans les trois mois
est connu, que le taux sans risque est constant et que la rentabilité du portefeuille
est parfaitement corrélée à celle de l'indice. Ces hypothèses ne sont pas vérifiées en
pratique et les résultats seront en général moins << parfaits >> que ceux illustrés ici.
Tableau 3.4 : Performance de la couverture par des contrats futures sur indices

Pourquoi couvrir un portefeuille


d'actions
Le tableau 3.4 montre que la valeur finale du portefeuille est proche de 1,62 million
d'euros, montant qui serait obtenu en investissant la valeur du portefeuille au taux
sans risque sur trois mois. En effet, la couverture a justement pour objectif de faire
progresser la valeur du portefeuille au rythme du taux sans risque. Alors pourquoi se
couvrir de cette façon ? Il suffirait de liquider le portefeuille et d'investir la somme
obtenue au taux sans risque pendant trois mois.
Une des raisons de ce comportement est que le gérant du portefeuille peut être
persuadé que ses titres sont bien choisis, mais il n'a pas confiance dans l'évolution du
marché dans son ensemble. En se couvrant ainsi (après un ajustement en fonction
du bêta), il reste convaincu que son portefeuille fera mieux que I’ indice.
L'autre argument plus évident est que Ie gérant peut avoir, pour des raisons
diverses, un horizon d'investissement long mais souhaite une protection à court
terme. La stratégie alternative consistant à se débarrasser provisoirement du
portefeuille est très lourde en termes de coûts de transaction explicites et implicites
(liés à la liquidité du marché).

Changer le bêta d'un portefeuille


Dans l'exemple du tableau 3.4, le bêta de la position devient nul après la mise en
place de la couverture. Parfois, les contrats futures sont utilisés pour simplement
modifier le bêta d'une position sans forcément amener celui-ci à zéro. Dans I’
exemple précédent, si l’on souhaitait réduire le bêta de moitié, il faudrait prendre
une position courte sur deux fois moins de contrats, c'est-à-dire 40. Pour faire passer
le bêta de la position à 3, il faudrait prendre une position longue sur 80 contrats, et
ainsi de suite. De manière générale, pour faire passer Ie bêta d'une valeur β à une
valeur β ¿ où β >β ¿, il faut prendre une position courte sur un nombre de contrats
égal à :

Inversement, si β < β ¿, il faut une position longue sur un nombre de contrats égal à:

La couverture d'une action individuelle


La construction d'une couverture contre les variations de prix d'une action
individuelle repose sur les mêmes principes. Il n'existe pas toujours de contrats
futures sur actions; Euronext.LIFFE propose cependant depuis 2001 des contrats
futures sur actions européennes et américaines. Quand seuls les contrats sur indices
sont disponibles, le raisonnement en termes de bêta doit être reconduit. Il est
cependant important de garder à l'esprit qu'en dépit d'une méthode identique, le
résultat obtenu est nettement moins bon. En effet. la couverture protège contre les
mouvements de marché mais pas contre les variations spécifiques à I’ action. Une
couverture de ce type peut être envisagée par un investisseur optimiste sur l'action
mais pessimiste sur l'évolution du marché dans son ensemble.
Considérons un investisseur qui détient 20 000 titres IBM cotant 100 $. IL anticipe
une volatilité importante du marché dans les prochains mois mais pense que I’ action
IBM devrait surperformer le marché dans son ensemble. IL décide donc d'utiliser le
contrat S&P500 pour couvrir sa position pendant un mois. Le bêta de I’ action IBM
est égal à 1,1 et l’indice est à 900 alors que le prix futures est à 908. Chaque contrat
porte sur 250 $ fois Ia valeur de l’indice. Dans ce cas on a :
P=20000 x 100 =2 000 000
A = 900 x 250 =225 000
Le nombre de contrats à retenir est alors :

En arrondissant à I’ entier le plus proche, cela suppose de prendre une position


courte sur 10 contrats. Supposons qu'IBM cote 125 $ un mois plus tard alors que Ie
prix futures du contrat est de 1 080. L'investisseur gagne :
20 000 x (125 - 100) = 500 000 $
sur les actions et perd :
10 x 250 x (1080 - 908) = 430 000 $
sur le contrat.
Dans cet exemple, la couverture a éliminé en grande partie le gain sur les actions par
une perte sur les contrats. Cela peut paraître contre-productif. II faut encore insister
sur le fait que le but d'une couverture est de réduire le risque d'une position. Une
telle position tend à réduire les pertes quand l'évolution est défavorable sur le sous-
jacent mais réduit les gains quand l'évolution du sous-jacent est favorable.

La couverture glissante


Dans certaines situations, Ia durée de la couverture souhaitée dépasse la maturité
des contrats futures disponibles. Dans ce cas, le hedger doit faire
<< glisser> > sa couverture d'une échéance à I’ autre. Considérons une entreprise
qui doit recevoir, en date T, un certain montant pour une vente d'actifs et qui
souhaite se couvrir. EIle peut utiliser n contrats successifs avec des dates d'échéance
croissantes (certains de ces contrats n'étant pas encore négociés aujourd'hui) de la
manière suivante.

Date t 0 : position courte sur Ie contrat 1

Date t 1: dénouer la position sur le contrat 1

Position courte sur le contrat 2


.
.
.

Date t n : dénouer la position sur le contrat n-1

Position courte sur le contrat n


Date T : dénouer la position sur le contrat n
Dans cette stratégie, il y a n risques de base. À Ia date T, l'incertitude se traduit par la
différence entre Ie prix futures du contrat n et Ie prix spot de l'actif à couvrir. De
plus, à chaque date intermédiaire, il y a une incertitude sur la différence entre le prix
futures du contrat dénoué et celui du contrat sur lequel est prise la nouvelle
position; il s'agit d'une << base glissante >> (rollover basis). Bien sûr, le hedger
dispose d'une certaine marge de manœuvre concernant les dates auxquelles il passe
d'un contrat au contrat suivant et peut chercher à minimiser ce risque de base
glissante.
Supposons qu'en avril 2008 une entreprise sache qu'elle va vendre 100 000 barils de
pétrole en juin 2009 et décide, pour simplifier, de se couvrir avec un ratio de
couverture égal à 1. Le prix spot est de 19 USD le baril. Supposons que Ia liquidité
des contrats futures ne soit pas satisfaisante au-delà d'une maturité de six mois (des
contrats sont cependant négociés sur le NYMEX jusqu'à une maturité de six ans). La
société prend une position courte sur 100 contrats échéance octobre 2008. En
septembre 2008, elle roule sa position en dénouant la précédente et en prenant
position sur des contrats mars 2009. Enfin, en février 2009, elle renouvelle
l'opération en prenant cette fois position sur des contrats juillet 2009.
Un exemple des résultats possibles est donné dans le tableau 3.5. Le prix spot du
baril passe de 19 USD à 16 USD le baril entre avril 2008 et juin 2009, et en octobre
2008 l'entreprise dénoue sa première position à un prix de 17,40 USD pour prendre
la deuxième au prix de 18,20 USD, gagnant ainsi 0,8 USD par baril. Le contrat mars
2009 est vendu à 17 USD et dénoué à 16,5 USD, gagnant ainsi 0,5 USD par baril. Enfin
la dernière position est prise à un prix futures de 16,30 USD et dénouée à 15,90 USD
pour un profit de 0,4 USD par baril. Dans cette situation, la couverture a rapporté 1,7
USD par baril pour une variation du prix spot de 3 USD. La compensation quotidienne
des contrats futures peut conduire à des décalages temporels entre les cash-flows
associés à la position << physique >> et la position en contrats. En cas de couverture
glissante avec un horizon éloigné, ces décalages peuvent entraîner de sérieux
problèmes, comme le montre l'encadré 3.2.
Tableau 3.5 : Données de I' exemple sur Ia couverture glissante sur le pétrole

Encadré 3.2 : Metallgesellschaft : quand Ia


couverture tourne mal
La stratégie de couverture glissante conduit parfois à des situations de trésorerie
délicates. Ce problème fut illustré de manière frappante par l'entreprise allemande
Metallgesellschaft (MG) au début des années 1990. MG avait vendu à ses clients
une quantité considérable de fuel domestique et de gasoil à prix fixe, par des
contrats de 5 à 10 ans. 6 à 8 cents au-dessus du prix de marché. MG avait couvert ce
risque en roulant une position longue sur des contrats futures d'échéances proches.
Le prix du pétrole chuta et l'entreprise dut faire face à des appels de marge, ce qui
aboutit à une situation de trésorerie délicate. Ceux qui avaient décidé cette stratégie
arguaient que les cash-flows négatifs dus aux appels de marge seraient en fin de
compte compensés sur le long terme par les recettes des ventes. La Direction
générale et les banquiers de l'entreprise décidèrent finalement de dénouer la
couverture et trouvèrent un accord avec les clients pour abandonner le contrat
initial. MG perdit 1,33 milliard de dollars dans cette affaire.

Résumé
Dans ce chapitre, nous avons analysé les différentes façons dont une entreprise peut
utiliser les contrats futures pour couvrir un risque. Si la position de
I' entreprise entraîne un gain en cas de hausse de I' actif et une perte en cas de
baisse, une position courte est appropriée. Si Ia sensibilité est de sens opposé, une
position longue sur les contrats devra être adoptée.
La couverture est une méthode de réduction du risque. Elle devrait donc être
considérée positivement par les managers. En réalité, certaines raisons théoriques et
pratiques font qu'il n'en est pas toujours ainsi. D'un point de vue théorique, on peut
dire que 1es actionnaires, en détenant des portefeuilles diversifiés, peuvent éliminer
une grande partie des risques inhérents aux actions qu'ils possèdent. Il n'est donc
pas nécessaire que les entreprises se couvrent. Pour I’ entreprise, il n'est pas
forcément opportun de couvrir une position si ses concurrents ne le font pas. De
plus, un trésorier peut craindre de se voir reprocher une couverture de position si
l'entreprise a gagné sur l'actif sous-jacent et si ce gain est compensé par une perte
sur les contrats.
En matière de couverture, Ie risque de base est un concept fondamental. La base est
la différence entre Ie prix spot et Ie prix futures. Le risque de base a pour origine
I'incertitude quant à Ia valeur de la base à Ia date de clôture de la couverture.
Le ratio de couverture rapporte Ie volume de Ia position sur les contrats à celui de la
position sur l'actif à couvrir. IL n'est pas toujours optimal d'utiliser un ratio égal à 1.
Si Ie hedger veut minimiser la variance de la valeur de sa position, un ratio différent
de 1 peut être un meilleur choix. Le ratio optimal est dans ce cas la pente de la droite
de régression des variations du prix spot sur celles du prix futures.
Les contrats futures sur indices sont utilisés pour couvrir le risque systématique d'un
portefeuille d'actions. Le nombre de contrats nécessaires est alors le bêta du
portefeuille multiplié par Ie ratio de Ia valeur de la position sur celle d'un contrat. Les
futures sur indices peuvent aussi être utilisés pour modifier Ie bêta d'un portefeuille
sans changer la composition de celui-ci.
Quand il n'existe pas de contrat futures suffisamment liquide, dont Ia date
d'échéance soit postérieure à l'horizon de couverture, une stratégie appelée
couverture glissante peut être appropriée. Elle suppose de prendre des positions
successives sur des contrats à maturité plus courte. Quand le premier contrat
approche de I' échéance, Ia position est dénouée et une autre du même type est
prise sur l'échéance suivante, et ainsi de suite. Cette stratégie donne de bons
résultats tant qu'il existe une forte corrélation entre les variations des prix spot et
futures.

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