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TITRE 1

LE CYCLE RÉVOLUTIONNAIRE (1789 – 1799)

CHAPITRE 1

LA PREMIERE MONARCHIE CONSTITUTIONNELLE


HISTOIRE D’UN ECHEC
(17 JUIN 1789 – 21 SEPT 1792)

SECTION 1

LE TIERS ETAT MOTEUR DU PROCESSUS REVOLUTIONNAIRE


(5 mai – 14 juillet 1789)

A - La Révolution politique :
des Etats Généraux à l’Assemblée Nationale Constituante

§1 – Le coup d’Etat du Tiers (17 juin 1789)

§ 2 - Les suites du 17 juin

B - La révolution populaire : la prise de la Bastille

SECTION 2

L’ŒUVRE DE L’ASSEMBLÉE CONSTITUANTE : UN ORDRE NOUVEAU


(9 JUILL 1789 – 30 SEPT 1791)

A - Un texte fondateur de l’ordre nouveau : la Déclaration des Droits de l’Homme


et du Citoyen

§1 – Le préambule : portée du texte et fondements philosophiques

§2 – Le corps du texte : contenu politique et juridique

1° / Principes d’organisation politique


2° / Les droits naturels de l’Homme
a- La liberté
b- L’égalité

b - L’égalité

Art. 1er : « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits ».


Consécration de l’égalité civile, égalité devant la loi. Petite phrase qui scelle officiellement la
disparition de la société d’ordres et des privilèges juridiques qui y étaient attachés.

La loi est désormais la même pour tous (quelle que soit l’origine, la naissance), dans tous
les domaines du droit.

→ Exemple : Il n’y a plus de privilèges judiciaires (égalité devant la justice, les


tribunaux, la procédure, qui sont les mêmes pour tous)

La Déclaration traite certains cas particuliers particulièrement sensibles :

Il n’y a plus de privilèges fiscaux :

- égalité devant l’impôt désormais payé par tous mais répartition de l’impôt « en raison
de leurs facultés » (en fonction des revenus)
- l’impôt étant librement consenti par les représentants de la Nation) → art. 13 et 14

Elle consacre expressément l’égalité dans l’accès aux emplois publics, aux charges de
l’Etat. Elles ne sont plus vénales, c’est-à-dire monnayables, et donc réservées à ceux
qui peuvent en payer le prix. Tous les citoyens peuvent y accéder « selon leur capacité,
et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents ». → art. 6

Il convient toutefois de nuancer le principe d’égalité, car il comporte des limites

1 - L’égalité civile n’est pas l’égalité sociale et économique

La DDH n’envisage pas l’égalité sociale et économique dans le sens d’une redistribution des
richesses (prendre aux riches pour donner aux pauvres)
En 1789, les constituants sont libéraux mais possédants : la condition sociale reste déterminée
par la fortune, la profession, l’intelligence, le talent. Il n’y a donc pas d’égalité (ni de principe
d’égalisation) des conditions sociales.
→ pas d’égalité matérielle, pas d’égalitarisme

On peut dès lors s’interroger sur la place de la propriété dans cette nouvelle charte sociale.
Le droit de propriété figure parmi les « droits naturels et imprescriptibles de l’homme » (art.
2). L’art. 17 précise même que la propriété est « un droit inviolable et sacré ».

Pourtant la réalité sociale contredit cette consécration. La propriété est loin d’être un droit
« universel ». Il y a les possédants – dont la propriété est reconnue et protégée – et les autres
(qui ne sont pas propriétaires).

Reconnaître et protéger la propriété ne veut pas dire « égaliser » l’accès au droit de propriété.
Tout le monde n’est pas propriétaire et les rédacteurs du texte (députés des classes
possédantes) ont négligé cette donnée.
Pour être cohérent, il aurait fallu reconnaître la propriété comme un droit naturel et, sur ce
fondement, se donner les moyens de la rendre accessible à tous.

→ limite
2 - La question de l’égalité politique

Egalité politique = droit pour tous les citoyens de participer à la vie politique (droit de vote /
suffrage universel)

Le principe est reconnu par la DDH. L’art. 6 implique le suffrage universel et le référendum.
(J. Godechot, Les constitutions de la France depuis 1789, Paris 1970, p 27)

« Tous les citoyens ont droit de concourir personnellement (référendum) ou par leurs
représentants (élus par tous) à la formation de la loi »

Pourtant le principe va être remis en cause par la Constituant lors des débats sur le mode de
suffrage (octobre 1789). Les députés sont divisés sur la question.

Il y a ceux qui sont pour le suffrage universel et ceux qui sont contre, lui préférant le
suffrage censitaire. Il n’y avait pas d’unanimité sur cette question

→ cf. fiche en ligne « Débats et controverses sur l’égalité politique » (dossier fiches
complémentaires) : à utiliser pour préparer le TD

C’est cette dernière conception qui va l’emporter dans la Constitution, une conception
inégalitaire de la vie politique fondée sur une distinction, imaginée par Sieyès, entre 2
catégories de citoyens :

- Les citoyens passifs qui jouissent de tous les droits naturels et


fondamentaux reconnus par la DDH
- Les citoyens actifs qui jouissent en plus des droits politiques (droit de
participer à la vie politique par le vote et l’éligibilité)

Les principes du suffrage censitaire (notion de citoyen actif, critères et justification de cette
discrimination) seront étudiés avec la Constitution de 1791 (C – Nouvel ordre politique)

Les débats sur l’égalité politique (postérieurs à la Déclaration) révèlent une contradiction
entre les principes posés par la Déclaration et le contenu de la Constitution (qui est censée les
mettre en œuvre).

→ limite

Tous les citoyens ne participeront donc pas à la vie politique (ne votent pas / ne sont pas
éligibles) ; il n’y a donc pas dans la constitution d’égalité politique. Cette égalité ne sera
consacrée qu’avec le suffrage universel.

3 - La question de la condition féminine : les droits civils et politiques des femmes

● droit à la protection des lois + garantie de leurs droits naturels et imprescriptibles

→ égalité civile ?
L’exemple du droit matrimonial (loi du 20 septembre 1792) et successoral
(plus égalitaires que dans l’ancien droit)

→ femmes exclues des fonctions publiques et de toute activité politique


(droit de vote / éligibilité) : elles ne sont donc pas citoyennes (attendre
1945)

Engagement de quelques figures révolutionnaires en faveur de l’égalité :

● Figures masculines : le Marquis de Condorcet


Il propose dans un article du Journal de la Société de 1789
d’accorder le droit de vote aux femmes (« Sur l’admission des
femmes au droit de cité », 3 juillet 1790)

● Figures féminines : Olympe de Gouges (Déclaration des droits de


la femme et de la citoyenne : cf. plaquette TD) et d’autres… :
conférence en ligne sur le sujet

Rôle actif et souvent crucial dans le processus révolutionnaire

Conclusion sur la DDH

Elle reconnaît l’individu en tant que tel, et non plus comme membre d’un corps, d’un ordre,
où il n’a de droit qu’en tant que membre de ce corps. Profondément individualiste, le texte nie
toute forme d’appartenance à un groupe, une collectivité (corporatismes divers).

Les principes d’égalité et de liberté sont consacrés, mais ils connaissent des limites.

Dès sa publication, elle a eu un grand retentissement dans le monde occidental grâce à son
caractère universel.
Elle devient le dogme de la Révolution (doctrine), le « credo1 du nouvel âge » (Michelet), le
fondement de nombreuses constitutions dans le monde, réalisant ainsi le vœu de ses
rédacteurs.

Le deuxième grand chantier entrepris par la Constituante concerne l’ordre religieux. La liberté
de conscience est désormais reconnue, mais il faut régler la question des rapports de l’Eglise
catholique et de l’Etat.
Quel statut pour l’Eglise, jusqu’alors omnipotente dans l’Etat monarchique ?

B - Un nouvel ordre religieux

On ne peut pas étudier l’histoire de la société sans évoquer les rapports de l’Eglise et de
l’Etat. Voyons d’abord ce qu’étaient ces rapports dans l’Ancien Régime avant de montrer ce
que la Révolution (l’Assemblée Constituante) a changé.

1
Credo : prière, profession de foi catholique.
§ 1 - Eglise et monarchie dans l’Ancien Régime

Il existe un soutien réciproque entre l’Eglise catholique et la monarchie (cf. chap.


préliminaire : l’alliance du Trône et de l’Autel). L’Eglise légitime le roi (roi de droit divin
qui tire sa légitimité de Dieu), le roi protège l’Eglise et se pose en défenseur de la foi.

On peut résumer ces rapports en 4 points :

1 - Le roi fait du clergé un ordre privilégié :

→ grâce aux privilèges fiscaux (exemptions + perception de la dîme, un impôt prélevé sur
la population d’une paroisse au profit des membres du clergé)

→ grâce aux revenus d’un énorme patrimoine foncier, immobilier, accumulé depuis le
moyen âge (les terres du clergé représentent environ 1/5 des terres françaises)
→ régime juridique spécifique, privilégié terres inaliénables et générant
d’importants revenus

2 - En contrepartie de ces richesses, le clergé assume des missions : l’administration du


culte et la charge de l’enseignement et de l’assistance publique

→ Le clergé a la charge du culte (il « administre » le culte) : mission spirituelle

→ Il a également une mission temporelle : la charge de l’enseignement (les


établissements d’enseignement sont sous la tutelle de l’Eglise) et de l’assistance
publique (assistance aux pauvres et aux malades dans les hospices, orphelinats,
hôpitaux).

L’Eglise dispose d’un important patrimoine, de richesses, bénéficie d’exemptions fiscales,


mais en contrepartie elle rend des services à la collectivité (mission spirituelle et temporelle).

3 - Le roi intervient dans la nomination des membres du clergé français

Il nomme les évêques qui nomment les curés. Le Pape (chef spirituel de l’Eglise) se contente
d’approuver ou de désapprouver les choix du roi (lorsqu’un accord est trouvé sur la personne,
il donne l’investiture spirituelle : il investit officiellement les clercs de leur charge au nom de
l’Eglise).
→ Spécificité de l’Eglise française qui dispose d’une forme d’indépendance vis-à-vis du Pape

4 - L’autorité du Pape est limitée par celle du roi sur les questions temporelles2

Lorsqu’elles sont susceptibles de toucher le clergé :

2
Les questions temporelles sont celles qui relèvent du domaine des choses matérielles (à opposer aux questions
spirituelles).
- Questions fiscales par exemple (la décision d’imposer le clergé français
appartient au roi).
- Le droit de l’Eglise (droit canonique) n’est reçu en France qu’avec
l’approbation du roi.

Les questions spirituelles relèvent en revanche de la seule autorité du Pape (en tant que chef
spirituel de l’Eglise romaine).

L’Eglise avait donc un statut particulier dans l’Etat français. La Révolution va mettre un
terme à cette organisation, en faisant de l’Eglise un « service public » (une « administration »)
comme les autres. Ce nouveau statut est à l’origine d’un schisme religieux et d’une rupture
des liens diplomatiques entre la France et le Vatican.

§ 2 - Le nouveau statut de l’Eglise

Ce sont les difficultés financières de l’Etat qui sont à l’origine de la réforme de l’Eglise.

Les constituants ont trouvé la solution pour réduire le déficit budgétaire : la confiscation des
biens du clergé (nationalisés) et leur mise en vente au profit de l’Etat → vente des biens
nationaux.

→ Le système présente 2 avantages

▪ rentrée d’argent pour combler le déficit

▪ favoriser l’accès à la propriété pour les non propriétaires (bien


morcelés, divisés et vendus par petits lots)

Ajoutons à cela l’abolition des privilèges (fin de l’exemption fiscale, suppression de la dîme),
le clergé n’a plus rien pour vivre.

Conséquence : c’est l’Etat qui prend en charge l’entretien du culte, c’est à dire la
rémunération du clergé qui continue d’assumer cette mission spirituelle.

Ce nouveau statut du clergé est prévu par un texte, voté par l’Assemblée le 12 juillet 1790, et
qui réorganise complètement l’Eglise de France : la Constitution civile du clergé.

Que prévoit ce texte ?

● Une rémunération (traitement) versée aux membres du clergé par le gouvernement,


ainsi qu’un logement (les prêtres deviennent « fonctionnaires » de l’Etat)

● Le texte prévoit aussi un nouveau mode de nomination puisque archevêques, évêques,


curés sont désormais élus par les citoyens (comme c’est le cas pour tous les membres
de l’administration).

Le Pape n’intervient plus, il peut seulement être informé de l’élection, l’investiture


spirituelle étant alors donnée par le supérieur immédiat dans la hiérarchie
ecclésiastique.
→ Conséquence : l’Eglise de France devient complètement indépendante.
Elle est détachée de Rome et du Pape.

Tous les clercs doivent prêter un serment de fidélité très symbolique « à la Nation, à la
Loi, au Roi » (dit serment civique) ; ce serment va consommer définitivement la
rupture avec Rome.

Quelles ont donc été les suites du texte ?

La Constitution civile du clergé est condamnée par le Pape Pie VI en 1791. Il ne


reconnaît pas les clercs français élus (donc le nouveau clergé français).

→ affaire des « brefs apostoliques »


→ rupture avec le Pape

Conséquence de cette condamnation : certains membres du clergé restent fidèles au Pape


et refusent de prêter serment, ce qui va entraîner un schisme (une division au sein de
l’Eglise).

Le clergé français se divise désormais en deux « clans » :

→ D’un côté les prêtres constitutionnels ou « jureurs » qui acceptent de


prêter le serment civique et adhèrent à leur nouveau statut : ce sont les seuls à
pouvoir célébrer officiellement le culte, et à percevoir une rémunération de
l’Etat.

→ De l’autre les prêtres réfractaires qui doivent se cacher, célébrer le culte


dans la clandestinité, sans aucune source de revenus. A partir de 1793
(gouvernement révolutionnaire, cf chapitre II) ils seront persécutés par le
pouvoir (mesures d’éloignement, de détention, d’élimination…)

Attitude de la population catholique : elle rejette, méprise l’Eglise dite constitutionnelle (en
n’assistant pas aux célébrations des prêtres constitutionnels) et reste fidèle à l’Eglise de Rome
(les prêtres réfractaires sont reconnus par le Pape), malgré les risques encourus, surtout après
1793.

Remarque : en 1793 et 1794, au moment de la Terreur (cf. chap. II), de nombreux prêtres
seront persécutés jusqu’à la mort, d’abord les réfractaires, puis ces mesures toucheront
l’ensemble du clergé – y compris les « jureurs » – parce que le culte catholique sera
condamné par les révolutionnaires les plus durs.

C’est tout le paradoxe de la Révolution qui reconnaît solennellement en 1789 la liberté de


conscience, la liberté de culte (tolérance religieuse), et qui, 4 ans plus tard, persécute le clergé
dans son ensemble, simplement parce qu’il pratique un culte que l’Etat (qui est devenu en
réalité une dictature) ne tolère plus.

Certains historiens voient même dans ce texte (la Constitution civile du clergé) un point de
départ : « le tournant essentiel de la Révolution et de l’histoire de France, un de ces
évènements très particuliers qui ont en eux le pouvoir de profondément bouleverser le
paysage historique » (T. Tackett, La Révolution, l’Eglise, la France, 1986).

En effet, la France en sort, et pour longtemps, profondément divisée (religieusement et


politiquement).

Conséquences religieuses

La Constitution civile du clergé de 1790 crée une Eglise nationale et met en place un clergé
« fonctionnarisé », un clergé asservi au nouveau régime, au nouvel ordre politique.

Marginalisation du clergé réfractaire, rejeté dans la clandestinité.

Conséquences politiques

Hostilité du roi qui provoquera – entre autres – la fuite du roi (en juin 1791), évènement
politique décisif.

Hostilité des fidèles : une partie de la population va grossir le contingent des adversaires de la
Révolution (les contre-révolutionnaires).

C - Un nouvel ordre politique : la constitution de 1791

§ 1- La souveraineté nationale

§ 2- La séparation des pouvoirs

1°- Le pouvoir législatif

a – Le système électoral : suffrage censitaire à deux degrés


b – L’exercice du pouvoir législatif

2°- Le pouvoir exécutif


a – Les pouvoir limités du roi
b – L’épineuse question du droit de veto

3°- Le pouvoir judiciaire

SECTION 3

L’ASSEMBLÉE LÉGISLATIVE OU LA MISE À L’ÉPREUVE DU NOUVEAU RÉGIME


(1er OCT 1791 – 21 SEPT 1792)

A - Les raisons constitutionnelles de l’échec

- séparation stricte et rigide des pouvoirs


- absence de moyens de communication et de pression entre le législatif et
l’exécutif

B - Les raisons politiques

§ 1 Le rôle politique de l’opinion publique

→ Rôle des clubs : Jacobins, Feuillants, Cordeliers (figure centrale du « sans-


culotte »)

§ 2 La chute de la royauté

1° - La fuite du roi (Varennes, 21 juin 1791)


2° - La guerre
3° - Le 10 août 1792

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