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Cyphoses pathologiques
C. Garreau de Loubresse, R. Vialle, S. Wolff

La cyphose se définit comme une courbure rachidienne à concavité antérieure. Le rachis présente
normalement dans le plan sagittal une succession de courbures harmonieuses de sens inverse : lordose
lombaire, cyphose thoracique, lordose cervicale. Ces courbures se constituent au cours de la croissance et
leurs amplitudes varient d’un individu à l’autre. Pour chaque individu, l’équilibre sagittal du rachis est une
combinaison compensée aboutissant à une posture « économique » dite physiologique. Les variabilités
sont grandes dans la population pour aboutir à cet équilibre sagittal et de multiples facteurs d’ordre
psychologique, social ou historique sont susceptibles de venir interférer. Il est nécessaire de tenir compte
de cette grande variabilité dans l’équilibre sagittal du rachis avant de qualifier telle ou telle courbure de
« pathologique ». Les cyphoses pathologiques se répartissent en deux grands groupes. Les cyphoses
régulières sont étendues de manière harmonieuse sur plusieurs vertèbres. Leur caractère « pathologique »
repose sur l’importance de la courbure, sa raideur, son évolutivité ou sa localisation sur un segment
rachidien habituellement en lordose. Les cyphoses angulaires sont constituées sur un petit nombre de
vertèbres. Il s’agit de déformations souvent importantes et raides dont le caractère « pathologique » est
incontestable. De multiples causes, congénitales ou acquises, sont responsables du développement d’une
cyphose rachidienne pathologique. L’analyse de la déformation et la connaissance de son histoire
naturelle sont le préalable indispensable à tout projet thérapeutique. Les principales étapes diagnostiques
et thérapeutiques sont résumées et analysées de manière didactique pour chacune des causes les plus
fréquentes de cyphose rachidienne pathologique.
© 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Cyphose rachidienne ; Déformation du rachis ; Cyphose congénitale ; Neurofibromatose ;


Cyphose iatrogène

Plan situation optimale correspondant à une situation « économi-


que » en position debout. De grandes variabilités existent entre
¶ Introduction 1
les individus dans l’équilibre sagittal physiologique [1] et il
convient d’en tenir compte avant d’interpréter comme patho-
¶ Courbures sagittales du rachis 1 logique une courbure rachidienne un peu prononcée.
Développement des courbures 1 Les cyphoses « pathologiques » se répartissent en deux grands
Analyse clinique du profil rachidien 2
groupes. Les cyphoses « régulières » résultent de l’accentuation
Analyse radiologique du profil rachidien 2
harmonieuse de la courbure sagittale cyphotique. Leur caractère
¶ Formes étiologiques 3 pathologique relève de la raideur, de son évolutivité et d’une
Cyphoses « posturales » 3 éventuelle extension à un segment rachidien lombaire ou
Maladie de Scheuermann 3 cervical habituellement en lordose. Les cyphoses « angulaires »
Cyphoses congénitales 6 sont des cyphoses courtes et souvent très importantes. Elles
Cyphoses par atteinte des lignées tissulaires mésenchymateuses 12 prennent le plus souvent l’aspect d’une zone de jonction
Cyphose et neurofibromatose 16 « brutale » entre deux segments rachidiens adjacents en lordose.
Cyphoses d’origine infectieuse 19
Cyphoses d’origine tumorale 21
Cyphoses post-traumatiques 22
Cyphoses iatrogènes 25 ■ Courbures sagittales du rachis

■ Introduction Développement des courbures


La cyphose se définit comme une courbure rachidienne à La position érigée et la nécessité d’un équilibre économique
concavité antérieure. Le rachis présente normalement, dans le ont conduit à la forme de la colonne vertébrale. Le nouveau-né
plan sagittal, une série de courbures harmonieuses de sens et le nourrisson ne présentent qu’une seule courbure sagittale
inverse : lordose lombaire, cyphose thoracique, lordose cervi- concave vers l’avant. Plus tard l’enfant, qui commence à relever
cale, qui se constituent au cours de la croissance. Leur impor- sa tête et à s’asseoir, développe une lordose cervicale. Avec la
tance est variable selon les individus mais chacune présente une marche, la lordose lombaire apparaît pour donner la forme

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Figure 1. La mesure Figure 2. L’examen du


des « flèches » à l’aide du profil rachidien en posi-
fil à plomb reste le moyen tion assise peut permettre
clinique le plus utile pour de mettre en évidence un
apprécier l’équilibre sagit- profil en « inversion de
tal du rachis. Ici, chez un courbure » avec comme
patient présentant une ici apparition d’une lor-
cyphose thoracique, le fil dose thoracique et d’une
à plomb n’est plus en cyphose lombaire.
contact avec le sacrum.

définitive du rachis. [2] Le développement de ces courbures L’approche du contexte social ou professionnel ainsi qu’une
adjacentes compensées donne au rachis une solidité et une évaluation psychologique sont des compléments indispensables,
stabilité très supérieures à une structure rectiligne. Néanmoins, tant pour faire la part de leur rôle dans l’attitude posturale du
les zones « transitionnelles » situées à l’union de deux courbures patient que pour la détermination de l’attitude thérapeutique à
de sens contraires sont les plus exposées mécaniquement, ce qui adopter.
explique par exemple la survenue plus fréquente des fractures à
la jonction thoracolombaire. Durant la période de croissance Analyse radiologique du profil rachidien
rapide du rachis, à l’adolescence, la croissance des corps
vertébraux semble être plus importante que la croissance des Courbures sagittales
éléments postérieurs du rachis. [3] Ce déséquilibre « physiologi-
que » tend à limiter le développement de la cyphose thoracique. La cyphose thoracique supérieure est souvent mal visualisée
De multiples circonstances pathologiques vont aboutir au en raison de la superposition des extrémités proximales des
phénomène inverse et à la constitution d’une cyphose membres supérieurs. Les clichés sont pris sur des cassettes
rachidienne. « grand format » (30 cm × 90 cm) afin de visualiser l’ensemble
du rachis, du tragus au tiers proximal des fémurs. Les bras sont
placés sur un support avec une angulation des bras de 45° par
rapport à l’horizontale. [4, 5] Les mesures angulaires sont réalisées
Analyse clinique du profil rachidien entre les vertèbres les plus inclinées par rapport à l’horizontale.
La cyphose thoracique moyenne, mesurée entre T4 et L1 est
La mesure des flèches au fil à plomb reste un moyen simple
de 37°. La plupart des auteurs fixent entre 45 et 52° la limite
d’appréciation des courbures sagittales. Le bassin équilibré dans
entre le physiologique et le pathologique. [6] La lordose lombaire
le plan frontal, le patient se tient de dos, genoux en extension,
adjacente mesurée entre L1 et L4 est de 40°. Toutefois, les
pendant que l’examinateur mesure la distance séparant le fil à
variations individuelles sont importantes et peuvent atteindre
plomb des épineuses cervicales, thoraciques, lombaires et sacrées
plus ou moins 10° dans chaque courbure sagittale.
(Fig. 1). Généralement, le fil à plomb est tangent au rachis
Les radiographies centrées pratiquées au niveau de la zone
thoracique moyen et au sacrum. D’importantes variations
cyphotique permettent de mieux analyser les modifications de
interindividuelles existent mais la tangence thoracique et sacrée
morphologie vertébrale et permettent par ailleurs d’étudier le
traduit un bon équilibre sagittal global du rachis.
stade de maturation vertébrale que complète également l’étude
L’étude des autres positions, particulièrement la position
de l’âge osseux et l’index de Risser.
assise, est importante. La position assise peut révéler une
La réductibilité de la cyphose est mesurée radiologiquement
modification importante des courbures rachidiennes, notam-
sur un cliché de profil réalisé en décubitus dorsal avec un billot
ment au niveau lombaire avec disparition de la lombaire et
placé sous le sommet de la cyphose.
apparition d’une cyphose (Fig. 2).
L’étude posturale est complétée par l’étude dynamique. En
position debout, la flexion antérieure permet d’apprécier la Équilibre sagittal spinopelvien
mobilité et la souplesse de la lordose lombaire compensatrice. La forme de la colonne vertébrale est liée à l’anatomie du
En décubitus ventral, le redressement actif permet d’apprécier la bassin, elle est liée également à l’état des articulations des
mobilité et la souplesse de la cyphose thoracique. membres inférieurs : un flessum de hanche entraîne le bassin
L’évaluation posturale est complétée par un bilan clinique vers l’avant et donc une lordose lombaire importante. Le bassin
général, particulièrement neurologique. Chez l’enfant, en possède un grand axe vertical. Il est surmonté par une alter-
période de croissance, on cherche les critères physiques de nance de courbures peu prononcées proches d’un axe vertical :
maturation et le stade pubertaire afin d’évaluer la croissance la ligne de gravité. Cette ligne de gravité unit le centre des
résiduelle du rachis. masses segmentaires supportées par chaque étage vertébral.

2 Appareil locomoteur

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Figure 4. L’incidence pelvienne (IP) est un paramètre anatomique de


l’équilibre sagittal spinopelvien. Elle correspond à l’angle formé entre la
perpendiculaire au centre du plateau crânial de S1 et la droite unissant le
centre du plateau crânial de S1 et le centre géométrique des têtes
fémorales.

L’anatomie du bassin, le rapport entre l’orientation des ailes


iliaques et l’orientation du sacrum influent directement sur la
Figure 3. La ligne de gravité passe, en situation physiologique, en avant forme de la colonne vertébrale. Ainsi, lorsque l’incidence
des corps vertébraux thoraciques, en arrière des corps vertébraux lom- pelvienne est élevée, le bassin, toujours vertical, s’accompagne
baires et légèrement en arrière des têtes fémorales. d’une lordose lombaire et d’une cyphose thoracique importan-
tes. De même, une faible incidence pelvienne se retrouve chez
les patients à faible courbure lombaire et thoracique.
La technique de barycentrométrie développée par l’équipe de
Mme Duval-Beaupère a permis de diviser le corps en « tranches
corporelles » et de mesurer la masse supportée par chaque étage
■ Formes étiologiques
vertébral en identifiant son centre. [7] La ligne de gravité qui
unit tous les centres de masse segmentaire est une ligne
Cyphoses « posturales »
verticale qui descend depuis le bord postérieur de l’odontoïde À l’opposé des cyphoses « pathologiques » caractérisées par
en avant du rachis thoracique puis en arrière du rachis lombaire leur raideur, leur évolutivité et parfois leur localisation en zone
et un peu en arrière des têtes fémorales (Fig. 3). Cette ligne de habituellement lordotique, les « attitudes cyphotiques » ou
gravité se confond avec une ligne verticale passant par le centre cyphoses « posturales » sont entièrement correctibles, aussi bien
du polygone de sustentation représenté par la projection au sol activement que passivement.
des limites du corps. Elles peuvent être considérées comme des variations postura-
L’équilibre est dit économique si, au repos ou lors d’un effort les de l’équilibre sagittal physiologique. [8] Elles sont fréquem-
habituel (marche), les muscles fournissent un effort minimal ment diagnostiquées chez l’adolescent en période de croissance.
pour garder la tête droite, le regard horizontal et le corps proche Les facteurs sociaux et psychologiques jouent habituellement un
de la ligne de gravité à l’intérieur du polygone de sustentation. rôle important dans la survenue et dans l’entretien de la
Deux circonstances principales entraînent une rupture de cet déformation.
équilibre économique : L’approche thérapeutique doit tenir compte des larges
• lorsque les patients présentent une déformation en cyphose variations individuelles et psychosociales qu’il convient de
qui conduit à une activité musculaire importante et doulou- respecter plutôt que d’imposer des traitements aussi inappro-
reuse pour garder un équilibre minimal ; priés qu’inefficaces et mal tolérés. Les attitudes asthéniques
• lorsqu’un déficit musculaire ne permet plus de conserver la nécessitent un encouragement aux activités sportives, qui ont
stabilité rachidienne (myopathie, camptocormie par plus un effet global et social qu’une action objective sur la
exemple). déformation, plutôt que des séances de rééducation. En période
L’incidence pelvienne (IP) mesure l’angle entre le grand axe de croissance, une surveillance périodique tous les six mois
du bassin et le sacrum, il s’agit d’un paramètre anatomique fixe permet de s’assurer de la souplesse et de l’absence d’évolutivité
pour chaque sujet (Fig. 4). de la déformation.
Par approximation, le grand axe du bassin est assimilé à la
ligne qui unit le centre du plateau sacré au centre des têtes Maladie de Scheuermann
fémorales. Cette ligne peut être facilement repérée sur un cliché
habituel du rachis de profil. L’angle entre cette droite et le Étiopathogénie
grand axe du sacrum représente l’incidence pelvienne. L’inci- La cyphose de Scheuermann est une cause fréquente de
dence est en moyenne de 52° avec une grande variabilité allant cyphose de l’adolescent. Cette cyphose survient lors de l’adoles-
de 33 à 77°. [7] cence, essentiellement chez le garçon. Elle est également appelée

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Figure 6. Aspect typique irrégulier et « feuilleté » des plateaux verté-


braux dans le cadre d’une maladie de Scheuermann.

On note également la taille, les signes pubertaires pour


apprécier le stade de la croissance.

Examen radiologique
L’examen radiologique est essentiel pour établir le diagnostic.
On demande un grand cliché de face et de profil prenant toute
la colonne vertébrale.
Figure 5. Aspect clinique typique d’une cyphose thoracique dans la Sur ce cliché, le bassin et les têtes fémorales doivent être
maladie de Scheuermann (vue de trois quarts postérieure). visibles. Ce cliché permet de faire le diagnostic, de quantifier la
déformation, d’apprécier l’équilibre général de la colonne
vertébrale de face et de profil ainsi que l’équilibre spinopelvien
« dystrophie rachidienne de croissance » et sa première descrip- (cf. chapitre « Équilibre sagittal spinopelvien).
tion par Scheuermann, un médecin allemand, remonte à
1920. [9] Ultérieurement, il suffira d’un cliché de profil pour suivre
La cause et la physiopathologie exacte de cette affection sont l’évolution.
inconnues. Des études histologiques ont montré que les pla- La maladie est caractérisée par plusieurs signes radiologiques :
teaux vertébraux avaient une pauvreté relative en collagène. [10] ceux-ci sont présents d’une manière diverse. Très souvent, on
Cela pourrait expliquer la déformation progressive des vertèbres constate chez l’adolescent une irrégularité des plateaux verté-
et la constitution d’une cyphose. braux qui prennent un aspect un peu feuilleté (Fig. 6). Les
hernies intraspongieuses, les hernies rétromarginales s’associent
La fréquence de la forme familiale suggère une transmission
à la cunéiformisation des corps vertébraux dans la forme
génétique sur un mode autosomique dominant. [11] Certains
typique. En 1964, Sorenson a décrit des critères pour établir le
facteurs sont associés à l’affection sans que leurs rôles exacts
diagnostic de Scheuermann : atteinte de trois vertèbres adjacen-
soient connus, il s’agit de l’obésité et de la grande taille.
tes avec cunéiformisation supérieure à cinq degrés pour chacune
Certains facteurs tels que l’activité sportive et les microtrauma-
d’entre elles. [12] Bradford [8] propose l’association de plusieurs
tismes sont plus discutés.
critères : un aspect irrégulier des plateaux vertébraux, une perte
de hauteur discale, la cunéiformisation d’au moins un corps
Examen clinique vertébral et la présence d’une cyphose supérieure à 40°.
La cyphose de Scheuermann est, dans sa forme typique, une Outre les formes typiques qui respectent ces critères, il existe
cyphose douloureuse de l’adolescent. Elle atteint nettement plus de nombreuses formes discrètes qui n’ont par exemple qu’un
fréquemment les garçons que les filles (Fig. 5). aspect un peu feuilleté des plateaux vertébraux. [13]
Les motifs de consultation sont : La plupart des auteurs fixent à 50° la limite au-dessus de
• la déformation qui tarde à être remarquée chez des adoles- laquelle une cyphose thoracique est considérée comme
cents qui n’aiment guère se dévêtir ; « pathologique ». [14]
• les douleurs souvent modérées qui peuvent être absentes. Les formes thoracolombaires se rapprochent des formes
thoraciques dans leur expression clinique et radiologique. Pour
Les formes de découverte systématique ne sont pas rares.
un même angle, elles entraînent plus de gêne esthétique et
La cyphose peut également être remarquée après la fin de
fonctionnelle. Les formes lombaires s’accompagnent de peu de
croissance ou lors des premières manifestations douloureuses
déformation tandis que les signes intéressent la partie antérieure
dans la vie d’adulte. Contrairement aux cyphoses posturales,
des plateaux vertébraux (Fig. 7). Au niveau lombaire, l’altération
l’adolescent ne peut corriger sa déformation entièrement et
des plateaux vertébraux peut paraître importante mais elle
durablement. évolue le plus souvent favorablement.
L’examen clinique permet de mesurer la déformation à l’aide
d’un fil à plomb et de vérifier la normalité de l’examen neuro-
Diagnostic différentiel
logique. Une gibbosité peut être associée mais elle reste toujours
de faible importance. L’examen du patient, lorsque celui-ci est Le premier diagnostic différentiel est la cyphose posturale de
couché sur le dos puis sur le ventre, permet d’avoir une idée de l’adolescent (cf. chapitre « Cyphoses posturales »). Elle est
la réductibilité de la courbure. observée chez des adolescents souvent peu sportifs et peu

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retentissement fonctionnel modéré de la cyphose. En dessous de


90°, les douleurs sont modérées et la gêne esthétique n’est pas
ressentie comme majeure. Les patients atteints de Scheuermann
ont toutefois des métiers plus sédentaires et ont des douleurs
dorsales et lombaires plus fréquentes. Cette gêne fonctionnelle
assez modérée doit être connue lorsque l’on discute du traite-
ment d’une cyphose de Scheuermann. Néanmoins, les études
épidémiologiques sont finalement assez peu nombreuses, et
certains patients sont manifestement très gênés d’un point de
vue esthétique et fonctionnel.
Au-delà de 90°, la gêne fonctionnelle est bien différente : à la
gêne esthétique s’associe un syndrome restrictif respiratoire.

Complications
Des complications neurologiques ont été rapportées. La
survenue d’une hernie discale thoracique dans la zone dystro-
phique est bien connue. [19] D’autres complications neurologi-
ques ont été décrites : des compressions médullaires de
Figure 7. Aspect typique, à l’emporte-pièce, d’une atteinte des corps
vertébraux dans la localisation lombaire de la maladie de Scheuermann. mécanismes mal précisés survenant sur des cyphoses régulières.
Ces dernières complications paraissent exceptionnelles.

Traitement
Rééducation et hygiène de vie
La rééducation est souvent proposée chez les patients présen-
tant une cyphose. Dans les formes sévères, au début du traite-
ment orthopédique, la préparation par rééducation en
augmentant l’amplitude de mouvements du tronc permet
certainement une meilleure correction. Elle permet également
une bonne adaptation au traitement par corset. Pour la préven-
tion de l’aggravation, ou pour les améliorations de la déforma-
tion, son rôle est plus discutable.
Les conseils de vie quotidienne : l’influence du sport sur
l’affection reste à discuter. Il paraît inutile d’arrêter les activités
sportives. Traditionnellement, on conseille un sport en exten-
sion qui renforce la musculature rachidienne postérieure et évite
des postures en cyphose.
Traitements orthopédiques
Les traitements orthopédiques sont basés sur l’utilisation d’un
corset. Celui-ci impose une posture en extension du rachis
Figure 8. Aspect radiologique d’une forme localisée de maladie de thoracique qui permet peu à peu le remodelage de la vertèbre
Scheuermann pouvant faire évoquer une pathologie infectieuse du rachis. déformée. Le traitement est le plus souvent réalisé en externe
mais certaines formes sévères peuvent bénéficier d’un traitement
en centre de rééducation. On peut faire précéder la mise en
place du corset d’une période d’assouplissements de traction, de
musclés. La cyphose est réductible et reste modérée. Les
rééducation. On peut également faire une série de plâtres
radiographies ne montrent pas de signe de dystrophie. Il existe
réducteurs. Habituellement, on utilise un corset anticyphose.
probablement des formes de passage évoluant vers une authen-
Celui-ci est basé sur un système trois points : le bassin, un appui
tique dystrophie rachidienne de croissance. C’est pourquoi,
au sommet de la déformation postérieure et un appui antérieur
même en cas de cyphose posturale, il est nécessaire de pratiquer
au niveau de la ceinture scapulaire (Fig. 9). Lorsque la déforma-
une surveillance régulière au cours de la croissance.
tion est thoracique haute, il faut choisir un corset de type
Certaines formes de Scheuermann avec des remaniements
Milwaukee. Le traitement orthopédique a comme résultat
importants des plateaux vertébraux peuvent faire discuter une
habituel de stabiliser la déformation et, plus rarement, de la
spondylodiscite (Fig. 8). Le contexte clinique, le caractère étagé
diminuer [20] (Fig. 10).
des lésions permettent de faire le diagnostic de dystrophie
rachidienne de croissance. Chirurgie
Certaines dystrophies vertébrales peuvent prêter à confusion :
la dysplasie spondyloépiphysaire de révélation tardive, [15] des L’arthrodèse vertébrale permet de corriger définitivement la
blocs congénitaux progressifs [16] (la fusion progressive des corps déformation rachidienne. Comme pour les scolioses, la tech-
vertébraux au cours de la croissance permet d’établir formelle- nique a bénéficié de l’essor des instrumentations type
ment le diagnostic). Cotrel-Dubousset.
Pendant la période de croissance, on peut se contenter d’une
arthrodèse postérieure en attendant le remodelage des corps
Évolution et histoire naturelle
vertébraux. Cela est possible lorsque les vertèbres ne sont pas
Pendant la phase de croissance, les vertèbres des formes trop déformées. Dans le cas contraire, et chez l’adulte, on
sévères vont progressivement se déformer. L’examen clinique et associe à l’abord postérieur une arthrodèse thoracique anté-
surtout les radiographies permettent de dépister ces aggravations rieure. La succession des temps est dictée par la raideur. En cas
anatomiques. Après la fin de croissance, la cyphose cesse de déformation peu mobile, on commence par le temps anté-
d’évoluer, la forme des vertèbres reste stable. rieur pour redonner de la flexibilité. On termine l’intervention
Il existe quelques études qui rapportent l’état fonctionnel des par le temps postérieur d’arthrodèse (Fig. 11). La greffe anté-
patients à l’âge adulte. Ces études [17, 18] semblent montrer un rieure peut être faite par thoracoscopie. [21]

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Figure 9. Corset anti-


cyphose en plastique
thermoformé.
A. Vue de face.
B. Vue de profil,
C. Vue de dos.

conditions, des cyphoses jonctionnelles supérieures ont été


observées, obérant le résultat. Certains ont attribué ces cyphoses
jonctionnelles à une correction excessive de la déformation. Des
spondylolisthésis ont également été décrits en dessous de ces
greffes.

Cyphoses congénitales
Introduction
Les déformations congénitales du rachis dans le plan sagittal
résultent d’anomalies congénitales des vertèbres. Elles sont
responsables de déformations immédiates lorsqu’un élément
rachidien est manquant ou de déformations progressives au
cours de la croissance lorsque la croissance du rachis est
perturbée par l’anomalie de départ. Toute perturbation de la
croissance des corps vertébraux, alors que se poursuit normale-
ment la croissance des arcs postérieurs, aboutit à une cyphose
pure si l’atteinte est symétrique. La plupart du temps, la
déformation n’est pas purement sagittale mais intervient dans
les trois plans de l’espace. Les lésions asymétriques, comme les
hémivertèbres, aboutissant à des déformations dans les trois
plans de l’espace, ne sont pas étudiées de manière complète
dans ce chapitre. Toutefois, il est nécessaire de comprendre de
manière globale ces troubles de croissance du rachis afin de
pouvoir appliquer les stratégies thérapeutiques les mieux
adaptées tout au long de la croissance.
Figure 10. Bon résultat d’un traitement orthopédique d’une maladie
de Scheuermann responsable d’une cyphose régulière thoracique.
Anatomie pathologique, mécanisme
A. Aspect avant traitement. et histoire naturelle
B. Aspect après traitement à l’âge adulte. Anomalies tissulaires
Les anomalies osseuses et articulaires surviennent très
Dans notre expérience, ces arthrodèses ont toujours permis précocement au cours de la formation vertébrale ou de la
une bonne correction. Dans notre série, [22] sur 30 patients, segmentation des pièces rachidiennes. Des travaux expérimen-
nous n’avons pas eu de complications postopératoires précoces taux [23] ont montré que ces anomalies étaient présentes dès la
et la consolidation a toujours été obtenue. Les problèmes phase mésenchymateuse du développement embryonnaire entre
rencontrés étaient une cyphose jonctionnelle dans cinq cas et le 20e et le 30e jour du développement. Le plus souvent, ces
des lombalgies résiduelles également dans cinq cas. anomalies sont dues à un défaut de fonctionnement de la
La déformation jonctionnelle du rachis cervicodorsal avec notochorde. Bien des anomalies du système nerveux, urinaire
une projection antérieure de la région cervicale est une compli- ou cardiaque surviennent également à cette période, ce qui
cation tardive fréquemment décrite. Il est recommandé d’éten- explique certaines associations et doit faire pratiquer, à la
dre le montage à tout le rachis thoracique. Même dans ces naissance, un bilan global.

6 Appareil locomoteur

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Figure 12. Le défaut de formation uniquement antérieur et parfaite-


ment symétrique est rare. Il est responsable d’une déformation rachi-
dienne centrée sur le canal rachidien, ce qui explique que l’alignement de
celui-ci soit conservé.

Figure 13. La constitution progressive de la cyphose entraîne l’étire-


ment de la moelle épinière qui est bien visible sur cette myélographie.
Figure 11. Traitement chirurgical d’une cyphose thoracique dans la
maladie de Scheuermann.
A. Aspect préopératoire.
B. Aspect postopératoire après correction, arthrodèse et ostéosynthèse Défaut partiel de formation avec alignement conservé du
par voie postérieure. canal rachidien (Fig. 12). Le défaut de formation uniquement
antérieur et parfaitement symétrique est rare et est responsable
d’une cyphose d’évolution habituellement lente lorsque les arcs
Bien que l’imagerie par résonance magnétique (IRM) et le postérieurs sont conservés. Il est difficile de conclure a priori sur
scanner permettent aujourd’hui une analyse fine des malforma- la nature histologique du tissu présent au niveau de la dysplasie
tions congénitales du rachis, [24] le potentiel de croissance des antérieure et donc sur son potentiel de croissance (cf. « Anoma-
zones tissulaires non ossifiées reste encore difficile à apprécier. lies tissulaires »). La différence de potentiel de croissance entre
La différence entre une maquette cartilagineuse fertile et un les éléments antérieurs et postérieurs est responsable de la
fibrocartilage dénué de potentiel de croissance est difficile à constitution progressive de la cyphose et de l’étirement de la
mettre en évidence par l’imagerie. Le plus souvent, la sur- moelle épinière (Fig. 13). La déformation progresse souvent
veillance clinique et radiologique permet de conclure sur la rapidement lors du pic de croissance pubertaire. C’est notam-
nature histologique réelle de chaque zone de la malformation et ment le cas lorsqu’il existe un défaut de formation asymétrique
de se prononcer sur son potentiel évolutif. comme une vertèbre binucléée asymétrique (Fig. 14) où l’un des
pédicules peut être absent. Il en résulte une évolutivité impor-
Défauts de formation des vertèbres
tante pouvant atteindre 10° en une année. Cette situation est
Ces défauts de formation sont responsables d’une absence retrouvée principalement dans le secteur thoracique ou thora-
complète ou partielle d’un ou de plusieurs corps vertébraux. Les colombaire et peut aboutir à l’apparition ou à l’aggravation de
anomalies associées des arcs postérieurs déterminent la plus ou troubles neurologiques à l’adolescence.
moins grande instabilité de la malformation. Plusieurs situations Défaut partiel de formation avec dislocation du canal
peuvent être rencontrées en fonction de l’étendue du défaut de rachidien (Fig. 15). Cette situation équivaut à une réelle
formation et de son retentissement sur l’alignement du canal « dislocation congénitale du rachis ». [25] Le défaut de formation
rachidien. de la partie antérieure des vertèbres est constamment associé à

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Figure 14. Exemple d’un défaut de formation asymétrique (vertèbre binucléée asymétrique) responsable d’une déformation évolutive de face et de profil.
Aspect de face (A) et de profil (B) à l’âge de 8 ans et à l’âge de 14 ans (C et D).

une anomalie des arcs postérieurs responsable de l’instabilité du Absence totale de formation des corps vertébraux. La
rachis. Cette instabilité peut être cliniquement évidente mais malformation peut comporter l’agénésie complète d’un, de deux
parfois, elle doit être recherchée à plusieurs reprises par la ou même de trois corps vertébraux associée ou non à l’agénésie
réalisation prudente de clichés dynamiques. Le tableau clinique des arcs postérieurs. Cela survient le plus souvent dans le
est souvent dramatique avec une paraplégie, parfois anténatale secteur lombaire (Fig. 16). Le tableau clinique est le plus
ou de survenue rapide pour un traumatisme mineur. Le dia- souvent une paraplégie spastique ou flasque avec troubles
gnostic anténatal est généralement fait lors des examens sphinctériens. [26] Curieusement, la sensibilité est souvent
échographiques durant la grossesse. Toutefois, le pronostic conservée aux membres inférieurs. Les malformations lombaires
fonctionnel et neurologique, bien que réservé, est difficile à de ce type peuvent être associées à des agénésies partielles ou
établir. Des malformations médullaires sont fréquemment complètes du sacrum, responsables, dans certains cas, d’un
associées c’est pourquoi il est nécessaire de pratiquer un bilan syndrome de régression caudale.
neurologique complet chez ces patients chez lesquels les
troubles neurologiques peuvent être secondaires à une lésion
médullaire traumatique ou à une malformation préexistante. Défauts de segmentation des vertèbres
Une aggravation importante de la déformation est constamment
observée durant la croissance, ce qui peut conduire à une Barre congénitale antérieure ou antérolatérale (Fig. 17).
majoration ou à l’apparition des troubles neurologiques. Cette absence de segmentation peut toucher isolément deux

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Cyphoses pathologiques ¶ 15-869-A-10

Figure 15. Dans les cas de « dislocation congénitale du rachis » le


défaut de formation de la partie antérieure des vertèbres est constamment
associé à une anomalie des arcs postérieurs responsable de l’instabilité du
rachis et d’une déformation en « baïonnette » du canal rachidien.

Figure 17. Tomographie du rachis thoracique de profil mettant en


évidence une barre congénitale antérieure responsable d’une fusion an-
térieure de trois corps vertébraux et d’une cyphose thoracique.

distinguer ce tableau de celui de l’épiphysite vertébrale de


croissance décrite par Scheuermann tant le tableau clinique et
radiologique initial est parfois similaire. [16] Avec la poursuite de
la croissance, le diagnostic est souvent évident devant l’appari-
tion d’une barre osseuse à la partie antérieure du rachis
(Fig. 18). L’ossification débute généralement vers l’âge de 8 à
10 ans mais peut commencer beaucoup plus tôt ou au contraire
n’être complète qu’une fois la croissance terminée. L’évolutivité
peut être considérable et aboutir, en l’absence de traitement, à
une déformation importante. Il existe une forte connotation
génétique pour ce type de malformation puisque plusieurs cas
sont généralement retrouvés au sein de la même famille.

Retentissement sur la croissance des segments rachidiens


adjacents
Les zones de croissance des vertèbres normales sus- et sous-
jacentes sont mal orientées du fait de la cyphose localisée. Elles
vont automatiquement avoir tendance à augmenter la flèche de
la déformation même si l’angle ne varie pas. Plus la flèche
Figure 16. Exemple d’une agénésie complète de plusieurs corps verté- grandit, plus la résistance mécanique est sollicitée et plus la
braux lombaires chez un nouveau-né. fragilité est grande. À l’inverse, ces zones de croissance de ces
vertèbres normales vont avoir tendance à compenser le défaut
cyphotique en augmentant la hauteur antérieure des vertèbres
vertèbres adjacentes ou au contraire plusieurs segments rachi-
sus- et sous-jacentes si, par un moyen ou un autre, on peut
diens discontinus. Lorsque la barre est située à la partie la plus
arrêter la croissance des éléments postérieurs.
antérieure des corps vertébraux, elle est responsable d’une
cyphose pure. Lorsqu’elle est située sur la face antérolatérale des
vertèbres, elle est responsable d’une déformation tridimension- Évolutivité et pronostic
nelle en raison de la poursuite de la croissance des éléments
postérieurs du rachis. La cyphose ainsi induite est généralement Sur le plan évolutif, elles sont soit progressives avec la
régulière et l’absence d’angulation brutale du canal rachidien croissance, s’il existe une asymétrie entre l’avant et l’arrière qui
explique le faible risque neurologique de ce type de se stabilise alors en fin de maturation, soit rapidement évoluti-
malformation. ves avec dislocations ou luxations, soit rarement complètement
Barre antérieure à fusion retardée. Ce défaut de segmenta- stables pendant toute la vie. [27] L’aggravation angulaire peut ne
tion est souvent méconnu et de diagnostic difficile. Il est devenir évidente que lors de l’aggravation rapide due au pic de
secondaire à la fusion, durant la croissance, d’une partie ou de croissance pubertaire du rachis. C’est pourquoi beaucoup de cas
la totalité d’un espace intersomatique discal. Il est nécessaire de ne sont découverts qu’à la puberté.

Appareil locomoteur 9
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15-869-A-10 ¶ Cyphoses pathologiques

du canal rachidien à l’aide de l’IRM. [24, 28] Le secteur thoracique


est particulièrement menacé car la moelle est relativement à
l’étroit. Les cyphoses avec instabilité postérieure et aggravation
rapide s’accompagnent presque toujours de troubles neurologi-
ques à type de paraplégie précoce, parfois anténatale, souvent à
début brutal à l’occasion d’un traumatisme d’apparence
minime. Les cyphoses évolutives sans instabilité risquent
d’aboutir à des paraplégies progressives à début précoce,
quelquefois même tardif chez l’adulte. Les cyphoses stables et
non évolutives exposent rarement à des troubles neurologiques.

Retentissement respiratoire
La fonction respiratoire est perturbée par les angulations
thoraciques sévères. [29] L’évaluation immédiate de la capacité
vitale et une nouvelle mesure après quelques jours de rééduca-
tion seront les données les plus utiles. Les spirographies doivent
être interprétées : les pourcentages sont fallacieux si le sujet a
perdu plus de 10 cm de sa taille théorique. Dans les cyphoses
angulaires, l’altération ventilatoire est la conséquence d’un
thorax globuleux rigide avec blocage de la mécanique costale,
d’un diaphragme oblique sans coupole et d’un plancher abdo-
minal déprimé. L’espace mort est augmenté, l’oxygénation
diminue, le rythme respiratoire s’accélère. On amorce un cercle
vicieux car le sujet consomme de plus en plus d’oxygène pour
le seul travail respiratoire. Les gaz du sang sont perturbés. Des
examens cardiaques sont nécessaires pouvant mettre en évi-
dence un retentissement sur le cœur droit. La comparaison de
ce bilan initial avec le bilan de fin d’élongation fait apprécier les
gains fonctionnels qui permettent d’envisager les traitements
chirurgicaux avec moins de risques.

Traitement
Principes thérapeutiques

Le traitement des cyphoses congénitales est exclusivement


chirurgical. Les traitements conservateurs ne peuvent que
ralentir l’évolution de la déformation et prévenir d’éventuelles
déformations compensatoires de part et d’autre de la malforma-
tion rachidienne.
Le bilan préthérapeutique est un temps fondamental qui doit
être orienté vers la recherche de malformations associées,
particulièrement au système nerveux central. L’IRM est devenue
indispensable, permettant de diagnostiquer les anomalies du
filum terminal, du cordon médullaire ou de la fosse cérébrale
postérieure.
Le principe de ce traitement chirurgical est de limiter l’évo-
lution de la déformation en pratiquant une épiphysiodèse
localisée. [30] Chez le jeune enfant, la fusion doit être aussi
courte que possible. Toutefois, des gestes d’épiphysiodèse,
localisés aux segments adjacents à la malformation, peuvent
effectuer une correction notable de la déformation résiduelle au
cours de la croissance (Fig. 19,20). Chez l’adolescent mature ou
l’adulte, l’ensemble de la malformation rachidienne doit être
Figure 18. Exemple d’une barre congénitale antérieure dont l’appari- pris en compte. Si la déformation est modérée, une arthrodèse
tion a été progressive entre l’âge de 9 ans (A) et l’âge de 15 ans (B). postérieure seule peut être réalisée. En revanche, si la déforma-
L’aspect initial avait, dans un premier temps, fait évoquer le diagnostic tion est importante, une arthrodèse circonférentielle doit être
d’épiphysite vertébrale. pratiquée. [31] Il est parfois nécessaire de pratiquer une correc-
tion de la déviation rachidienne lorsque l’équilibre frontal et
sagittal du rachis est trop perturbé. L’étude de la réductibilité de
Retentissement neurologique la déformation est donc indispensable, de face comme de profil,
afin d’envisager les limites de la fusion et de l’ostéosynthèse.
La composante cyphotique est toujours un élément péjoratif
qui favorise la compression médullaire sur le chevalet osseux Cas d’instabilité rachidienne avérée
formé par le mur postérieur des corps vertébraux. Il faut y
ajouter, à l’âge adulte, la possibilité d’agents compressifs Le risque d’apparition ou d’aggravation de troubles neurolo-
d’origine discale ou arthrosique. Dans le cadre des malforma- giques est majeur. La priorité thérapeutique doit alors être
tions, le risque de compression mécanique est aggravé par la donnée à la stabilisation du rachis. Chez le petit enfant,
grande fréquence des malformations médullaires associées. Cette l’immobilisation par un plâtre permet de traiter l’instabilité et
éventualité, qu’il faut reconnaître avant tout traitement de la une arthrodèse postérieure isolée est alors pratiquée. Malgré les
déformation rachidienne, justifie l’étude attentive du contenu anomalies souvent importantes des arcs postérieurs, une zone

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Cyphoses pathologiques ¶ 15-869-A-10

1 C

Défaut de formation
Étendue de l'épiphysiodèse
2

Figure 21. Schéma préopératoire en vue d’une épiphysiodèse pour


défaut de formation antérieur isolé (schéma en coupe axiale).

Figure 19. Exemple de stratégie opératoire de correction dans le cas


d’une hémivertèbre latérale (schéma dans le plan frontal). L’épiphysio-
dèse circonférentielle localisée au niveau de la malformation, (1) associée
à une épiphysiodèse partielle convexe respectant les zones de croissance
concaves (2) des vertèbres adjacentes permet une correction de la défor-
mation durant la croissance dans la zone intéressée (zone C).

Hémivertèbre
2 Étendue de l'épiphysiodèse

Figure 22. Schéma préopératoire en vue d’une épiphysiodèse pour


hémivertèbre postérieure isolée (schéma en coupe axiale).

1
A C

Hémivertèbre
Figure 20. Exemple de stratégie opératoire de correction dans le cas
Étendue de l'épiphysiodèse
d’une hémivertèbre postérieure (schéma dans le plan sagittal). L’épiphy-
siodèse circonférentielle localisée au niveau de la malformation (1) asso-
ciée à une arthrodèse postérieure (A) respectant les zones de croissance Figure 23. Schéma préopératoire en vue d’une épiphysiodèse pour
antérieures des vertèbres adjacentes (2) permet une correction de la hémivertèbre postérolatérale (schéma en coupe axiale).
déformation durant la croissance dans la zone intéressée (zone C).
vertèbres au sein d’une malformation congénitale du rachis, les
zones où l’épiphysiodèse est nécessaire afin de rétablir une
de fusion postérieure peut le plus souvent être obtenue, parfois croissance harmonieuse peuvent ainsi être matérialisées sur un
grâce à des greffes osseuses itératives. L’arthrodèse antérieure schéma préopératoire de chaque vertèbre en vues axiale et
sagittale (Fig. 21–25). L’épiphysiodèse doit ainsi prévenir
complémentaire est généralement associée.
l’aggravation de la déformation mais également préserver une
Chez l’enfant plus âgé, la même technique peut être
éventuelle zone de croissance résiduelle permettant une correc-
employée, mais l’association d’une instrumentation à l’arthro- tion notable de la déformation au cours de la croissance. Dans
dèse, le plus souvent circonférentielle, est également le cas, par exemple, d’une cyphose pure par hémivertèbre
proposée. [32] symétrique postérieure, l’épiphysiodèse courte postérieure
permet, chez l’enfant immature, une correction notable de la
Traitement des malformations durant la période cyphose en quelques années du fait de la croissance en avant
de croissance [26] des corps vertébraux. La situation est plus complexe en cas
d’hémivertèbre asymétrique postérolatérale. L’épiphysiodèse
La stratégie thérapeutique doit prendre en compte le poten- asymétrique, du côté de l’hémivertèbre, doit être antérieure et
tiel de croissance de chaque vertèbre impliquée dans la malfor- postérieure. Il est par conséquent possible, par la même voie
mation. Chaque vertèbre peut ainsi être divisée en quatre d’abord chirurgicale, antérieure et postérieure, de pratiquer
quadrants ayant un potentiel de croissance équivalent. Lorsqu’il l’excision de la totalité de l’hémivertèbre et l’arthodèse cir-
existe une croissance dysharmonieuse d’une ou de plusieurs conférentielle. Ce geste permet d’obtenir la correction de la

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15-869-A-10 ¶ Cyphoses pathologiques

réellement liés à une aggravation progressive de la déforma-


tion. [34] Ils peuvent être constatés notamment au cours de la
croissance du rachis en période pubertaire, où la moelle est
progressivement étirée dans le canal médullaire au niveau de la
zone de déformation maximale. [27] Cette situation est une
urgence thérapeutique. Si la déformation est réductible, ce qui
est le cas le plus fréquent, une période de correction progressive
par traction continue au moyen d’un halo crânien permet la
récupération du statut neurologique antérieur. L’arthrodèse
circonférentielle peut alors être pratiquée sans nécessité d’asso-
cier un geste de décompression médullaire.
Barre congénitale Dans les cas où les troubles neurologiques persistent, il est
Étendue de l'épiphysiodèse nécessaire d’associer un temps de libération médullaire à
l’arthrodèse circonférentielle. La libération médullaire au niveau
de la zone apicale de compression peut être pratiquée par voie
Figure 24. Schéma préopératoire en vue d’une épiphysiodèse pour antérolatérale lorsque la cyphose est pure et par voie postérola-
barre congénitale postérieure isolée (schéma en coupe axiale). térale au moyen d’une costotransversectomie lorqu’une compo-
sante rotatoire est associée à la cyphose rachidienne. La
résection progressive, à la fraise motorisée, de la partie posté-
rieure des corps vertébraux de la région apicale (Fig. 29), permet
d’obtenir une décompression médullaire et une amélioration
des troubles neurologiques dans environ la moitié des cas. Ce
geste n’est cependant pas dénué de risques, particulièrement
neurologiques, et l’aggravation des troubles peut survenir
malgré les précautions prises lors du geste de décompression.

Barre congénitale
“ Point fort
Étendue de l'épiphysiodèse • De nombreuses malformations congénitales du rachis
entraînent une déformation en cyphose. L’analyse
Figure 25. Schéma préopératoire en vue d’une épiphysiodèse pour rigoureuse de la malformation et de son potentiel évolutif
barre congénitale postérolatérale (schéma en coupe axiale). au cours de la croissance est le temps essentiel qui
conditionne toute la prise en charge. À l’exception de
déformation dans le plan frontal et sagittal au moyen d’une quelques malformations particulièrement instables, le
courte instrumentation postérieure en compression (Fig. 26). risque neurologique situé au premier plan doit être pris en
compte dans la discussion de chaque étape du traitement.
Traitement des malformations à l’adolescence • Un traitement précoce de ces malformations
et à l’âge adulte vertébrales permet bien souvent de stabiliser la
Lorsque la croissance du rachis est achevée ou que le poten- déformation et même de la corriger grâce au potentiel de
tiel résiduel de croissance est minime, l’arthrodèse circonféren- croissance résiduelle du rachis. Il est préférable, par des
tielle, associée ou non à une réduction de la déformation, doit gestes pratiqués précocement, de prévenir l’aggravation
être pratiquée. de la déformation plutôt que de chercher plus tard à la
Dans les cas où la déformation en cyphose est partiellement
corriger, au prix d’interventions chirurgicales toujours plus
réductible, une période préalable de traction continue, au moyen
d’un halo crânien, permet un étirement progressif de la région lourdes et de risques neurologiques toujours plus
apicale de la cyphose (Fig. 27). L’examen neurologique doit être importants.
répété quotidiennement durant cette période afin de détecter
toute souffrance médullaire. [33] L’arthrodèse circonférentielle peut
alors être réalisée. Il est préférable de débuter par le temps
antérieur afin de ne pas risquer de déstabiliser complètement le Cyphoses par atteinte des lignées tissulaires
rachis par d’éventuelles résections osseuses préalables par voie mésenchymateuses
postérieure. L’idéal est de pouvoir réaliser un « étai » antérieur
solide, par exemple au moyen de greffons tibiaux afin de péren- Parmi les feuillets embryonnaires primitifs, le mésoderme
niser la correction obtenue par la traction préopératoire (Fig. 28). aboutit à l’édification de la plus grande partie de l’organisme en
Lorsque la cyphose est particulièrement rigide, il nous semble formant notamment l’appareil locomoteur, musculaire et
dangereux de chercher à tout prix une correction maximale de squelettique. Les condensations mésenchymateuses issues du
la déformation au moyen d’ostéotomies vertébrales. La traction mésoderme forment la plupart des pièces osseuses après un
continue préopératoire au moyen d’un halo crânien peut être stade intermédiaire de modèle cartilagineux.
utile en permettant une meilleure ampliation de la cage Les mutations des gènes régulant la croissance cartilagineuse,
thoracique et une bonne préparation pulmonaire. [33] La fusion la structure des protéines cartilagineuses ou osseuses ou la
doit être antérieure et postérieure, selon la même technique que formation d’enzymes indispensables sont à l’origine de syndro-
pour les cyphoses réductibles. Le geste peut toutefois être mes graves.
étendu afin d’obtenir une correction partielle de la déformation Le terme de dysplasie mésenchymateuse regroupe toutes les
dans les disques intervertébraux adjacents à la zone de affections de développement du tissu osseux, cartilagineux, et
malformation. conjonctif de l’appareil locomoteur.

Détérioration progressive du tableau neurologique Achondroplasie


Il faut être prudent dans l’analyse du tableau clinique et bien L’achondroplasie est la plus fréquente des chondrodystrophies
différencier les éventuels troubles neurologiques préexistants, et survient dans 1/30 000 naissances. Sa transmission est
secondaires à une malformation neurologique associée, et ceux autosomique dominante, mais apparaît spontanément dans

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Cyphoses pathologiques ¶ 15-869-A-10

T11

L1

A
B C
D
Figure 26. Stratégie chirurgicale de correction d’une déformation par hémivertèbre postérolatérale gauche. L’excision de l’hémivertèbre (A et B) est réalisée
par voie antérieure (rouge) et postérieure (vert). L’arthrodèse est circonférentielle par apport de greffons intersomatiques par voie antérieure et arthrodèse
postérieure (en grisé) instrumentée par un dispositif en compression (C et D).

Figure 28. Vue peropératoire après réalisation d’une greffe antérieure


en « étai » au moyen de greffons fibulaires dans l’apex de la déformation
rachidienne.

magnum est presque constante. Elle peut être responsable de


troubles respiratoires (apnées du sommeil) et d’hypotonie.
Une cyphose thoracolombaire apparaît dès les premiers mois
de la vie et se majore avec l’acquisition de la position assise
(Fig. 30). Cette cyphose est facilitée par l’hypotonie des muscles
érecteurs du tronc, secondaire à la sténose du foramen mag-
num, du volume de la tête et de la laxité ligamentaire. L’hypo-
tonie peut être traitée par décompression chirurgicale du
foramen magnum. La prise en charge précoce de la cyphose par
des méthodes orthopédiques obtient une réduction progressive
et une correction définitive (Fig. 31). Négligée, la cyphose se
Figure 27. La traction continue, au moyen d’un halo crânien, permet structuralise par la déformation de T12 ou de L1 puis devient
un étirement progressif de la région apicale de la cyphose. évolutive avec la croissance.
La sténose du canal vertébral est extrêmement fréquente. Les
symptômes apparaissent habituellement en fin d’adolescence ou
70 % des cas par mutation d’une protéine induisant un effet à l’âge adulte. Les phénomènes dégénératifs (arthrose, hernies
inhibiteur sur les cellules de la zone proliférative des cartilages discales) peuvent accentuer et révéler cette étroitesse canalaire
neurocentraux (FGFR-3 : fibroblast growth factor receptor avec les troubles médullaires ou radiculaires correspondants.
protein-3). [35]
L’aspect clinique est très évocateur. Le nanisme est dyshar- Ostéogenèse imparfaite
monieux avec des membres courts (la portion proximale est L’ostéogenèse imparfaite est secondaire à des anomalies du
plus courte que la partie distale). Le périmètre crânien est élevé collagène de type I sous la dépendance de loci du chromosome
avec une ensellure nasale. Le rachis a une longueur normale 17 et 7. La classification clinique de Sillence est la plus fré-
soulignant la brièveté des membres. Une sténose du foramen quemment utilisée et comprend quatre types. [36]

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15-869-A-10 ¶ Cyphoses pathologiques

Figure 30. Vue clinique de profil d’un enfant de 3 ans présentant une
cyphose dans le cadre d’une achondroplasie. L’examen en position assise
(B) permet de mettre en évidence la déformation rachidienne, masquée
par une hyperlordose lombosacrée en position debout (A).

D l’association de fractures multiples et répétées et d’une hyper-


laxité ligamentaire. Un spondylolisthésis de la charnière
lombosacrée est fréquemment rencontré. Le glissement est de
faible grade et peu symptomatique dans sa forme habituelle.
Le traitement orthopédique ou chirurgical des déformations
rachidiennes est délicat et expose à diverses complications.

Dysplasie spondyloépiphysaire
La dysplasie spondyloépiphysaire est secondaire à une
C anomalie du collagène de type II après mutation génique. Les
gènes concernés sont responsables d’une transmission autoso-
Figure 29. Libération médullaire à l’apex de la cyphose. L’abord est mique récessive ou portée par le chromosome X (et donc plus
postérolatéral, par réalisation d’une costotransversectomie (A). Après fréquente chez le garçon) selon les formes de la maladie. [37] La
laminectomie et ablation des pédicules, le cordon médullaire est progres- croissance anormale du rachis et des membres entraîne des
sivement dégagé sur sa face latérale (B). La résection progressive de la déformations. L’atteinte vertébrale se caractérise par une
partie postérieure des corps vertébraux (C) permet de compléter la platyspondylie, un aspect biconvexe, et, dans la jonction
libération et le déplacement du cordon médullaire vers l’avant (D). thoracolombaire, une allure cunéiforme.
Les scolioses et cyphoscolioses rencontrées sont le plus
souvent thoraciques ou thoracolombaires. Leur traitement est
Les types I et IV ont une transmission autosomique domi- orthopédique ou chirurgical suivant la gravité de la déforma-
nante, mais celle des types II et III est autosomique récessive. tion. Le bilan radiologique doit impérativement comprendre la
Ces affections sont caractérisées par une ostéopénie et une recherche, si besoin répétée au cours de la croissance, d’une
fragilité osseuse responsable de fractures multiples avec une instabilité atloïdoaxoïdienne.
consolidation possible mais un remodelage du cal incomplet.
Le type I peut apparaître à la naissance et chez le nourrisson Syndrome de Stickler
avec la survenue de fractures multiples, d’une surdité et de
sclérotiques bleues. Le syndrome de Stickler est une arthro-ophtalmopathie
Le type II est habituellement létal à la naissance avec des héréditaire autosomique dominante responsable d’une altération
fractures parfois observées avant la naissance et une micromélie. du collagène de type II. L’atteinte rachidienne est caractérisée
par la présence de cyphose, de scoliose, de blocs vertébraux et
Le type III est révélé à la période néonatale par des fractures
de diminution des hauteurs des espaces intersomatiques. Cette
et des déformations progressives sévères des membres et du
déviation s’associe à une myopie avec des risques de décolle-
tronc.
ment rétinien ainsi qu’une atteinte polyarticulaire précoce
Le type IV est le moins grave ; il se caractérise par des dégénérative.
fractures minimes et des sclérotiques normales.
L’atteinte rachidienne de l’ostéogenèse imparfaite intéresse les
Dysplasie diastrophique
différents étages. Une impression basilaire se voit dans les
formes graves, apparaît progressivement et se manifeste par des Cette affection décrite par Lamy et Maroteaux est responsable
signes neurologiques importants. Les déformations rachidiennes, d’un nanisme sévère à transmission autosomique récessive. Le
scoliose ou cyphose, sont d’autant plus importantes que la trouble génétique engendre un défaut de transport de sulfate à
forme d’ostéogenèse imparfaite est grave. Elles seraient dues à travers le cartilage indispensable pour les protéoglycans qui le

14 Appareil locomoteur

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Cyphoses pathologiques ¶ 15-869-A-10

Figure 31. Radiographie de profil du même enfant que la figure 30 mettant en évidence la cyphose thoracolombaire associée à l’hyperlordose lombosacrée
compensatrice (A). Le cliché réalisé sur billot (B) met en évidence une bonne réductibilité de la déformation.

constituent. Cliniquement, le nanisme est associé à des enrai- Dans le syndrome de Hurler ou mucopolysaccharidose de
dissements de multiples articulations, particulièrement des type I, les symptômes sont sévères et le décès des patients est
coudes, des hanches et des genoux. Les pieds sont en varus fréquent dans la première décennie. Là encore, il existe une
équin, les pouces en abduction (« pouce de l’auto-stoppeur ») et cyphose thoracolombaire de forte angulation associée à un
les oreilles sont déformées. retard mental et une instabilité du rachis cervical supérieur.
L’atteinte rachidienne est très fréquente, notamment une
cyphose à la jonction des deux courbures scoliotiques. La Syndrome de Marfan
déviation en cyphose touche habituellement le rachis cervical
inférieur souvent associé à un spina bifida occulta. [38] Le syndrome de Marfan est la plus fréquente des dystrophies
En revanche, l’instabilité atloïdoaxoïdienne est rare. L’évolu- du tissu conjonctif. La transmission est sous un mode autoso-
tion, parfois spontanément favorable avec la croissance, néces- mique dominant avec, dans un quart des cas, des mutations
site une simple surveillance. Dans le cas contraire, le traitement spontanées. Cette affection est secondaire à une altération de la
peut être orthopédique par corset de Milwaukee, voire chirurgi- formation de la fibrilline de type I sous la dépendance du gène
cal avec une arthrodèse postérieure. La décompression anté- porté par le chromosome 15. La fibrilline est un composant
rieure se justifie par la présence de troubles neurologiques et essentiel du tissu extracellulaire, ce qui explique les différentes
nécessite une arthrodèse circonférentielle. atteintes systémiques que l’on peut rencontrer.
L’atteinte du système cardiovasculaire peut mettre en jeu le
Mucopolysaccharidoses pronostic vital par la survenue d’un prolapsus de la valve
mitrale, d’une insuffisance de la valve aortique, d’un anévrisme
Les mucopolysaccharidoses regroupent des affections en ou d’une dissection aortique. Les troubles de la vision sont
relation avec un défaut de production d’enzymes indispensables secondaires à la survenue d’une ectopie du cristallin, d’une
pour le métabolisme des mucopolysaccharides. Les symptômes myopie ou d’un décollement rétinien. Les patients peuvent
cliniques apparaissent dans la petite enfance après l’accumula- également présenter des signes pulmonaires (pneumothorax) et
tion progressive des mucopolysaccharides. Plusieurs types sont des signes cutanés (vergetures).
décrits et possèdent en commun la petite taille des patients, une Les anomalies du système musculosquelettique incluent une
organomégalie, une dysplasie épiphysaire et une instabilité taille élevée, une augmentation de l’envergure des membres
atloïdoaxoïdienne secondaire à une hypoplasie odontoïdienne supérieurs, une hyperlaxité ligamentaire, des déformations du
et à une laxité ligamentaire. thorax en entonnoir ou en carène, des protrusions acétabulaires
La maladie de Morquio ou mucopolysaccharidose de type IV et des pieds plats valgus. L’atteinte rachidienne comprend la
touche habituellement le rachis et déforme les vertèbres. [39] Les possibilité de scoliose dans 60 % des cas, de lordoses thoraci-
radiographies révèlent une platyspondylie avec un aspect en ques, d’une cyphose thoracolombaire et parfois de spondylolis-
languettes. Une cyphose sévère et évolutive est secondaire à une thésis de la charnière lombosacrée. [40] Les radiographies du
hypoplasie antérieure des vertèbres de la charnière thoracolom- rachis révèlent, en dehors des troubles de la statique de face ou
baire (Fig. 32). de profil, la présence d’amincissements ou d’érosions du mur

Appareil locomoteur 15
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15-869-A-10 ¶ Cyphoses pathologiques

Figure 32. Cyphose thoracolombaire (A) dans le cadre d’une mucopolysaccharidose (syndrome de Morquio). La déformation est partiellement réductible
sur le cliché sur billot (B). On note également l’allure dystrophique de la partie antérieure des corps vertébraux.

postérieur vertébral et des éléments de l’arc postérieur secondai- ou thoracolombaire apparaît et s’accentue progressivement dans
res à l’ectasie durale. La tomodensitométrie osseuse ou l’IRM un contexte douloureux. Les radiographies révèlent des tasse-
sont les meilleurs moyens pour évaluer cette atteinte qui siège ments vertébraux étagés dans la zone cyphotique. Les vertèbres
préférentiellement sur la charnière lombosacrée. peuvent prendre un aspect biconcave, voire de vertebra
Selon la classification morphologique décrite par Sponseller, plana. [41]
deux types de profil rachidiens sont identifiés dans le syndrome Le traitement repose sur la prise de 1-25 dihydroxy-vitamine
de Marfan avec cinq sous-groupes. Dans le type I, la vertèbre D et le port d’un corset.
transitionnelle entre la cyphose et la lordose est localisée à la L’ostéoporose juvénile idiopathique évolue favorablement à la
deuxième lombaire ou sur un niveau supérieur. Le sous-type I puberté et disparaît totalement à l’âge adulte.
A comporte une cyphose et une lordose normale, le sous-type I
B est constitué d’une cyphose de moins de 20° et le sous-type
C possède une cyphose thoracique de plus de 50°. Le rachis de
Cyphose et neurofibromatose
type II présente une vertèbre transitionnelle sous le niveau de
la deuxième lombaire. Le sous-type II A est caractérisé par une Généralités
cyphose étendue comprenant la charnière thoracolombaire et le La neurofibromatose est une maladie héréditaire touchant les
sous-type II B est fait d’inversions de courbures avec une lordose tissus dérivés des trois lignées embryologiques que sont le
thoracique, une cyphose thoracolombaire et une lordose neurectoderme, l’endoderme et le mésoderme. Les manifesta-
lombaire basse. tions cliniques sont par conséquent très variables et peuvent
Le traitement des déviations rachidiennes dans le syndrome intéresser la peau, le système nerveux, le squelette et les tissus
de Marfan est rendu difficile par la présence d’érosions verté- mous. [42] Le désordre embryologique initial touche les crêtes
brales secondaires aux ectasies durales ainsi que des pathologies neurales, ce qui explique le retentissement sur les trois contin-
associées notamment du système cardiovasculaire. gents mésenchymateux embryonnaires. La neurofibromatose a
été récemment décrite selon deux types. Le type I également
Dystrophie du tissu conjonctif : appelé neurofibromatose « périphérique » est le plus fréquent.
syndrome d’Ehlers-Danlos Les critères du diagnostic clinique sont la présence de taches
cutanées « café au lait », de neurofibromes, de gliomes du nerf
Le syndrome d’Ehlers-Danlos regroupe plusieurs affections du
optique, d’hamartomes iriens et d’anomalies du système
tissu conjonctif caractérisées par une hyperlaxité ligamentaire,
musculosquelettique. Au total, 60 % des patients porteurs d’une
cutanée et une faiblesse des tissus. Parmi les neuf groupes
identifiés, le type VI a pour spécificité une déviation rachi- neurofibromatose de type I présentent une déformation rachi-
dienne. Une cyphose est soit isolée, soit associée à une scoliose dienne. [43] Les déformations du rachis sont associées ou non à
notamment dans les formes à double courbure, les plus fré- une dystrophie osseuse des vertèbres. Cette composante dystro-
quentes. Ces courbures sévères et évolutives nécessitent un phique peut être accompagnée d’anomalies du canal médullaire
traitement chirurgical difficile en raison de la possibilité de secondaires à une malformation médullaire. Les déformations
survenue de complications locales et générales. les plus souvent rencontrées sont des scolioses qui surviennent
chez 2 à 36 % des patients porteurs d’une neurofibromatose de
type I (NF1). [44] Ces déformations sont le plus souvent courtes
Cas particulier : ostéoporose juvénile idiopathique
et anguleuses, survenant précocement durant l’enfance (Fig. 33).
L’ostéoporose juvénile idiopathique doit être un diagnostic Les cyphoses pures sont rares et il s’agit bien souvent de
d’élimination. Au cours de l’enfance, une cyphose thoracique cyphoscolioses. [45]

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Cyphoses pathologiques ¶ 15-869-A-10

Figure 33. Vue de profil (A) et de dos (B) d’une patiente présentant une cyphose angulaire thoracique dans le cadre d’une neurofibromatose. On note les
innombrables lésions cutanées caractéristiques de cette pathologie.

Analyse de la déformation patients peuvent présenter une dislocation atloïdoaxoïdienne,


généralement secondaire au développement local d’un neurofi-
Cliniquement, l’examen de la déformation ne présente pas de brome. Il s’agit d’une éventualité rare, mais qui doit être
particularités. L’examen clinique s’attache à rechercher d’autres
recherchée en raison du risque neurologique qu’elle comporte.
manifestations cliniques de la maladie, en particulier cutanées.
Les déformations en cyphose du rachis cervical, même
Les radiographies standards permettent d’analyser la défor-
importantes, sont souvent asymptomatiques en raison de la
mation même si cela est parfois difficile lorsque l’angulation est
largeur importante du canal rachidien à ce niveau. Il est ainsi
très importante. Elles sont particulièrement utiles pour analyser
l’équilibre rachidien dans le plan sagittal. fréquent de découvrir des lésions passées inaperçues jusqu’à un
Le scanner a apporté une véritable révolution dans l’analyse stade avancé. Le diagnostic et le traitement doivent pourtant
de ces déformations particulièrement dans les formes les plus intervenir précocement en raison de la tendance inéluctable à
sévères. Il a, à juste titre, largement supplanté les tomographies l’aggravation et au risque de survenue de troubles neurologi-
pratiquées autrefois dans cette indication. Il permet l’étude ques. [50, 51] Les patients sont parfois amenés à consulter en
complète de chaque vertèbre dystrophique et des contours du raison d’un torticolis ou d’une dysphagie. Dans ces deux cas, la
canal médullaire. Les reconstructions tridimensionnelles symptomatologie peut être en rapport avec le développement de
permettent une analyse morphologique fine dans les trois plans neurofibromes cervicaux, soit extrarachidiens, soit intrarachi-
de l’espace. [46] diens. Dans ce cas, la réalisation d’une IRM est impérative, à la
L’IRM permet l’étude de la moelle. Il est ainsi possible de recherche d’une compression de la moelle cervicale.
visualiser des zones de souffrance médullaire ou d’éventuelles Des radiographies standards du rachis cervical de face et de
malformations médullaires associées. [47] Elle permet également profil doivent être réalisées lors du bilan rachidien initial de
de rechercher la présence d’ectasies durales parfois responsables tout patient présentant une neurofibromatose. Si une dystrophie
d’un érodement progressif des corps vertébraux et de déstabili- de la trame osseuse est présente, les clichés de trois quarts
sation du rachis [48] (phénomène du « scalloping ») (Fig. 34). peuvent être demandés à la recherche d’un éventuel élargisse-
ment du foramen intervertébral consécutif au développement
Prise en charge en fonction du type d’un neurofibrome à ce niveau (neurofibrome dit en « sablier »)
de déformation d’une névrite hypertrophique ou d’une méningocèle. [51] Dans
ces trois éventualités, l’IRM est l’examen d’imagerie de référence
Cyphoses cervicales et doit être pratiquée.
L’atteinte rachidienne cervicale dans la neurofibromatose est Avant toute intervention chirurgicale, il est nécessaire de
généralement une cyphose pure. La majorité des patients est dépister, par des clichés dynamiques du rachis cervical, une
fort heureusement asymptomatique et la déformation est éventuelle instabilité rachidienne pouvant poser des problèmes
cliniquement souvent peu apparente. Les atteintes cervicales lors de l’intubation. Le traitement chirurgical vise à pratiquer
sont plus fréquemment associées à des dysplasies vertébrales que l’excision des neurofibromes et à stabiliser de manière durable
lors d’une atteinte thoracique ou lombaire. Les atteintes le rachis. L’excision tumorale doit être la plus complète possible
rachidiennes multiples sont fréquentes, ainsi Crawford [49] et implique bien souvent d’importantes résections osseuses et
retrouve une cyphose cervicale chez 44 % des patients présen- l’instabilité engendrée impose la réalisation d’une arthro-
tant une scoliose ou une cyphose thoracique (Fig. 35). Certains dèse. [52] Celle-ci peut être réalisée par voie postérieure isolée si

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15-869-A-10 ¶ Cyphoses pathologiques

Figure 34. Érosion progressive de la partie postérieure des corps verté-


braux lombaires par les ectasies durales (phénomène du « scalloping »).

les résections osseuses postérieures n’ont pas été trop importan-


tes. Le plus souvent, il est nécessaire de recourir à une arthro-
dèse circonférentielle. L’ostéosynthèse est adaptée au type de
correction et de fusion souhaité. Il n’est pas rare de recourir à
une arthrodèse occipitocervicale, soit instrumentée, soit proté-
gée par un dispositif de halo-corset.

Cyphoscolioses thoraciques

Ces déformations du rachis, dans le cadre de la neurofibro-


matose, sont caractérisées par la nette prédominance de la
déformation en cyphose par rapport à la déformation purement
scoliotique. Les corps vertébraux sont souvent si déformés qu’il
devient impossible de les analyser sur les radiographies stan-
dards. La dystrophie progressive des vertèbres apicales aboutit à
une cyphose parfois extrême avec subluxation des deux secteurs
adjacents (Fig. 36). « L’épingle à cheveux » ainsi formée est
responsable d’une déformation en baïonnette du canal rachi-
dien. [53] Cette déformation progressive est responsable d’un
étirement progressif de la moelle dans le canal rachidien et peut
alors être à l’origine de troubles neurologiques. [54]
Ces déformations sont également responsables d’insuffisances
respiratoires par déformation et incompétence de la cage
thoracique (Fig. 37). Figure 35. Exemple d’une atteinte cervicale avec une dystrophie verté-
L’arthrodèse circonférentielle associée à une immobilisation brale responsable d’une cyphose. La radiographie de profil (A) permet
prolongée donne les meilleurs résultats. Une période préalable d’étudier l’aspect de la dystrophie osseuse. L’imagerie par résonance
de traction rachidienne est souvent nécessaire afin d’obtenir magnétique (IRM) (B) montre bien, ici sur une séquence pondérée en T2,
une correction maximale et progressive, une récupération le retentissement sur l’axe médullaire.
éventuelle des troubles neurologiques et une meilleure prépara-
tion respiratoire. Un geste de libération médullaire antérieure
doit être réalisé en cas de retentissement neurologique de la généralement à l’aide de greffons autologues de type fibulaire
déformation. Cependant, la récupération reste aléatoire. (Fig. 38). Même lorsque cette arthrodèse est obtenue, une
Les gestes de fusion instrumentée par voie postérieure isolée récidive de la déformation peut être observée. Il s’agit le plus
sont généralement voués à l’échec et à la récidive de la défor- souvent d’une faillite secondaire de l’arthrodèse antérieure par
mation. [52] Il est nécessaire d’obtenir un étai antérieur solide, érosion progressive due au développement de nouveaux neuro-

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Cyphoses pathologiques ¶ 15-869-A-10

Figure 36. La dystrophie progressive des vertèbres apicales aboutit à


une cyphose parfois extrême en « épingle à cheveux ».

fibromes ou d’ectasies du sac dural. Il est nécessaire alors de


pratiquer une nouvelle arthrodèse antérieure selon la même
technique.
L’association fréquente de troubles neurologiques peut
conduire ces patients à être opérés en urgence par voie posté-
rieure avec réalisation d’une laminectomie. Il est indispensable
de ne pas se limiter à ce type de chirurgie et de pratiquer une
arthrodèse antérieure complémentaire dès que cela est possible.
En cas de persistance de troubles neurologiques, il est nécessaire
d’associer un geste de libération médullaire antérieure. [55]
Bien souvent l’ostéosynthèse postérieure est incapable de
garantir la rigidité suffisante propice à une fusion rachidienne Figure 37. La déformation en cyphose du rachis peut entraîner une
(Fig. 39) et il est nécessaire de recourir à un traitement ortho- insuffisance respiratoire par déformation et incompétence de la cage
pédique d’appoint. L’immobilisation, le plus souvent par un thoracique. Vue de face (A), de profil (B) de face en antéflexion du tronc
système de corset couplé à un halo crânien, doit être prolongée, (C) et de dos (D) d’un patient présentant une déformation particulière-
d’une durée totale de 6 mois à 1 an. ment sévère.

néanmoins à la différence de l’infection tuberculeuse, l’atteinte


Cyphoses d’origine infectieuse
discale est généralement rapide et il est rare de faire le diagnos-
Les infections « hématogènes » du rachis ont une localisation tic d’atteinte isolée du corps vertébral.
initiale dans le tissu osseux spongieux du corps vertébral et leur Comme beaucoup d’infections osseuses par voie hématogène,
propagation au disque intervertébral adjacent se fait par l’ostéomyélite vertébrale touche préférentiellement l’enfant et
contiguïté. Les infections postopératoires survenant après l’adulte jeune dont les zones de croissance du rachis constituent
curetage discal sont en revanche de localisation initialement une cible pour les bactéries. [56, 57] Chez le jeune enfant,
discale et se propagent éventuellement aux corps vertébraux. l’atteinte primitive du disque intervertébral est possible en
Dans les deux cas, la destruction osseuse et discale peut être raison de l’hypervascularisation physiologique du nucleus
responsable de cyphoses. Celles-ci sont, dans la très grande pulposus. Notons également le cas particulier des enfants
majorité des cas, heureusement modérées et rarement associées d’origine africaine et atteints de drépanocytose dans sa forme
à un déséquilibre dans le plan frontal en l’absence d’atteinte de homozygote. Ils présentent une sensibilité accrue aux infections
l’arc postérieur. rachidiennes par voie hématogène lorsque les corps vertébraux
sont le siège d’infarctus osseux secondaires à une crise vaso-
Infections non tuberculeuses occlusive [58, 59] (Fig. 40).
De nouvelles populations à risque sont désormais bien
Propagée par voie hématogène, l’atteinte initiale est osseuse identifiées. Il s’agit des personnes âgées, fréquemment immu-
et touche le corps vertébral. Il s’agit donc d’une ostéomyélite du nodéprimées, des patients présentant une affection sévère
corps vertébral. L’atteinte discale est habituellement secondaire, (traitement immunosuppresseur ou chimiothérapies, séjour

Appareil locomoteur 19
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15-869-A-10 ¶ Cyphoses pathologiques

prolongé en réanimation, infection par le virus de l’immunodé-


ficience humaine, etc.) et les consommateurs de drogues par
voie intraveineuse. [60, 61] Il est nécessaire d’évoquer et de
rechercher l’ostéomyélite vertébrale chez ces patients en cas de
syndrome septique inexpliqué ou d’apparition de troubles
neurologiques.
Le tableau clinique est parfois trompeur et source de mécon-
naissance du diagnostic durant plusieurs semaines, voire
plusieurs mois. Le symptôme le plus fréquemment retrouvé est
la douleur dans près de 90 % des cas. Dans 50 % des cas, les
patients vont présenter des troubles de la marche et dans 25 à
30 % des cas, des troubles neurologiques plus sévères à type de
paralysies sensorimotrices ou de troubles sphinctériens. Il s’agit
plus souvent de la compression des structures nerveuses par un
abcès épidural plutôt que de la survenue d’une cyphose sévère
(Fig. 41).
Le germe le plus fréquemment retrouvé est Staphylococcus
aureus dans 50 à 65 % des cas. Escherichia coli et d’autres
bactéries d’origine digestive représentent 20 % des cas. D’autres
bactéries sont plus rarement retrouvées (par exemple Propioni-
bacterium sp. ou Staphylococcus epidermidis) mais peuvent être à
l’origine d’infections plus torpides et parfois longtemps mécon-
nues. [60] Dans tous les cas, le bilan pratiqué doit s’attacher à
rechercher le germe en cause. Le plus souvent, il est nécessaire
de pratiquer une ponction-biopsie discovertébrale (soit chirurgi-
cale, soit sous contrôle radiologique ou tomodensitométrique)
pour identifier la bactérie.
Le siège de l’infection est fréquemment lombaire et l’atteinte
limitée à une ou deux vertèbres. La cyphose est par conséquent
Figure 38. Il est nécessaire d’obtenir un étai antérieur solide, géné-
habituellement modérée et le traitement est le plus souvent
ralement à l’aide de greffons autologues de type fibulaire. Ceux-ci
conservateur. Il associe une antibiothérapie adaptée et une
sont bien visibles au scanner, en reconstructions sagittales à l’apex
immobilisation par corset. [62, 63] En cas d’instabilité rachidienne
de la cyphose (A et B) ou en reconstructions tridimensionnelles
avérée ou de troubles neurologiques, il est parfois nécessaire de
(C et D).
recourir à un geste chirurgical d’excision et de stabilisation. [64]

Figure 39. L’ostéosynthèse postérieure est bien souvent inutile dans ces déformations « extrêmes ». Il est souvent nécessaire de recourir à une contention
orthopédique le temps d’aboutir à une arthrodèse antérieure solide. Exemple d’une patiente opérée par voie antérieure et postérieure. Radiographie de profil
(A) et de face (B) postopératoire. Le matériel postérieur mis en complément de la greffe antérieure n’a pas dispensé d’une contention par un dispositif de
halo-corset pendant une durée de 6 mois.

20 Appareil locomoteur

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Cyphoses pathologiques ¶ 15-869-A-10

Figure 40. Infarctus osseux des corps vertébraux thoraciques, lombaires et sacrés chez une jeune fille présentant une drépanocytose homozygote. Les lésions
sont bien visibles à l’imagerie par résonance magnétique (IRM) en séquence pondérée en T1 avec injection de gadolinium (A) et en séquence pondérée en T2
(B).

Chez l’enfant, l’atteinte de la colonne antérieure aboutit plus grave en raison d’une atteinte souvent multiple des corps
fréquemment à une fusion spontanée des corps vertébraux. Une vertébraux et de la survenue en cours de croissance d’une
cyphose évolutive peut alors survenir au cours de la croissance, cyphose évolutive secondaire à la destruction des zones de
plus sévère en cas d’atteinte thoracique. croissance des corps vertébraux. [70]
Le traitement est conservateur en cas de lésions peu étendues
avec une cyphose modérée. [71] Il est préférable de mettre en
Infections tuberculeuses évidence Mycobacterium tuberculosis avant tout traitement
L’atteinte tuberculeuse du rachis ou « mal de Pott » a repré- étiologique mais les prélèvements restent parfois négatifs.
senté pendant des décennies un chapitre majeur de l’orthopé- L’antibiothérapie est fréquemment prolongée pendant plus de
die, tant par sa fréquence que par les problèmes diagnostiques 18 mois.
et thérapeutiques qu’elle posait. Elle est désormais heureuse- Dans les formes sévères avec instabilité vertébrale et troubles
ment beaucoup plus rare dans les pays développés [65] mais de neurologiques, le traitement initial est chirurgical. [72-74] Il
nombreux cas sont encore diagnostiqués et traités chaque année associe le plus souvent une excision des tissus nécrotiques et la
en France, principalement dans la population défavorisée et réalisation d’une arthrodèse circonférentielle et d’une ostéosyn-
d’origine étrangère. thèse postérieure étendue [75-78] (Fig. 43). Ce geste chirurgical,
L’atteinte classique de l’adulte est vertébrale et discale et est souvent lourd, précède la mise en œuvre du traitement
relativement limitée. Elle est donc peu cyphosante. En revan- antibiotique.
che, des formes méconnues ou mal traitées peuvent évoluer vers
la destruction de plusieurs corps vertébraux adjacents et la
constitution de cyphoses angulaires. [66] Cyphoses d’origine tumorale
L’imagerie est souvent évocatrice. [67-69] L’IRM est l’examen de
choix. Elle montre l’atteinte des corps vertébraux avec une Qu’elles soient primitives ou secondaires, toutes les tumeurs
conservation souvent assez longue de la hauteur discale. Un du rachis peuvent conduire à un déséquilibre progressif en
aspect évocateur est la présence d’abcès et de plages de nécrose cyphose. [79] La destruction osseuse progressivement responsable
(nécrose dite « caséeuse ») au sein d’un tissu périrachidien d’une instabilité rachidienne en est la cause. Notons également
œdématié. Il existe fréquemment un épaississement méningé la possibilité de cyphoses secondaires à la radiothérapie et aux
avec un aspect d’arachnoïdite (Fig. 42). Cet épaississement de la laminectomies pratiquées pour traiter la lésion tumorale. Ces
dure-mère et de l’arachnoïde explique bon nombre de signes cyphoses iatrogènes sont traitées dans le chapitre « Cyphoses
neurologiques retrouvés chez ces patients même en cas de iatrogènes ».
déviation rachidienne modérée. L’apparition d’une cyphose est exceptionnellement le premier
Comme pour les infections à germes non tuberculeux, signe à l’origine du diagnostic de tumeur du rachis. Le plus
l’infection tuberculeuse du rachis de l’enfant est fréquemment souvent, les patients se plaignent de douleurs rachidiennes,

Appareil locomoteur 21
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15-869-A-10 ¶ Cyphoses pathologiques

Figure 42. Atteinte vertébrale d’origine tuberculeuse. On note, sur


l’imagerie par résonance magnétique (IRM), la présence de multiples
abcès antérieurs caséeux (a) et d’une épidurite engainant le cordon
médullaire (flèche).

renforcer sa résistance, semblent prometteuses. [87] Elles permet-


tent un soulagement rapide des douleurs au prix d’un geste
thérapeutique peu invasif. Néanmoins, elles doivent être
utilisées avec prudence en cas de destruction importante du
corps vertébral afin de ne pas risquer l’issue du ciment dans le
Figure 41. Spondylodiscite à Staphylococcus aureus localisé aux vertè- canal médullaire.
bres T11 et T12, responsable d’une paraparésie avec troubles sphincté-
riens. La radiographie de profil (A) met en évidence une atteinte des corps Cyphoses post-traumatiques
vertébraux et du disque intersomatique. La destruction est bien visible en
imagerie par résonance magnétique (IRM) sur les séquences pondérées en
T1 (C) et en T2 (D). L’IRM met en évidence un abcès épidural responsable
Généralités
dans ce cas des troubles neurologiques. Le traitement chirurgical a com- La grande majorité des fractures du rachis aboutissent, en
porté un abord antérieur pour débridement et mise en place d’un greffon l’absence de traitement, à la constitution d’une cyphose
de crête iliaque, associé à une décompression et à une ostéosynthèse par d’autant moins bien supportée qu’elle est thoracolombaire ou
voie postérieure (B). lombaire. [88] Le traitement correct, orthopédique ou chirurgical
de ces fractures permet heureusement la consolidation avec le
minimum de cyphose résiduelle. [89]
particulièrement nocturnes, avant l’apparition de tout signe
d’instabilité vertébrale. Les troubles neurologiques sont fré- Cyphoses évolutives
quents en cas de tumeur maligne et sont retrouvés dans environ
25 % des cas. Il s’agit le plus souvent de l’extension intracana- Les seules cyphoses évolutives chez l’adulte sont celles des
laire de la tumeur (Fig. 44) et rarement de troubles secondaires fractures instables traitées chirurgicalement par une laminecto-
à la déformation du rachis en cyphose. mie isolée. [90] Elles peuvent aboutir à des cyphoses considéra-
bles, particulièrement à l’étage thoracolombaire avec parfois des
La prise en charge de ces patients ne peut être que multidis-
signes neurologiques. Le traitement est alors chirurgical,
ciplinaire. [80] Le bilan étiologique ne doit pas faire retarder la
associant un temps de libération médullaire antérieure associée
prise en charge thérapeutique en cas de signes neurologiques ou
à une greffe et un temps de correction par voie postérieure avec
d’une instabilité rachidienne patente. La prise en charge des
ostéosynthèse.
tumeurs rachidiennes primitives est le plus souvent chirurgi-
cale. [81, 82] La correction du déséquilibre sagittal fait partie le
plus souvent d’un programme lourd de résection tumorale et Cyphoses non évolutives
associe une reconstruction, une arthrodèse circonférentielle et Elles sont fréquentes dans les cas de fractures du rachis
une ostéosynthèse. [83] thoracolombaire traitées de manière inadéquate. Bien que la
Le traitement des métastases du rachis est une éventualité déformation soit le plus souvent modérée, elle est souvent
beaucoup plus fréquente. Lorsque la cyphose rachidienne est responsable de douleurs et parfois de signes d’irritation radicu-
importante, mal tolérée ou à l’origine de troubles neurologiques, laire. Un traitement chirurgical peut alors être proposé. [90] Le
le traitement chirurgical conserve une place de choix. Il associe bilan préopératoire permet de définir une stratégie de correc-
un geste de décompression des structures nerveuses et une tion, particulièrement grâce à l’analyse des clichés en réductibi-
ostéosynthèse [80, 84, 85] (Fig. 45). Cette dernière peut être lité sur billot. Lorsque la mobilité locale est très réduite, voire
étendue en cas de localisations vertébrales multiples. absente, il est nécessaire de pratiquer un geste sur la colonne
Le traitement conservateur est la règle en cas de cyphose antérieure, visant à redonner une mobilité au rachis afin de
modérée sans réelle instabilité potentielle. Il associe le traite- permettre une correction du profil rachidien [91] (Fig. 46). Si la
ment orthopédique par corset et le traitement de la maladie mobilité reste bonne à l’apex de la déformation, une arthrodèse
néoplasique (chimiothérapie). Les douleurs sont contrôlées par instrumentée par voie postérieure seule peut être suffisante. Dès
les antalgiques éventuellement associés à la radiothérapie. [86] lors que l’équilibre sagittal après correction reste médiocre ou
Les techniques de « cimentoplastie », qui consistent à injecter qu’il existe un élargissement important des espaces intersoma-
un ciment acrylique au sein du corps vertébral détruit afin de tiques impliqués dans la zone de fusion, il est prudent de

22 Appareil locomoteur

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Cyphoses pathologiques ¶ 15-869-A-10

Figure 43. Atteinte vertébrale d’origine tuberculeuse responsable d’une nécrose complète du corps vertébral de T12 et d’une atteinte de contiguïté de
T11 et de L1. On note à l’imagerie par résonance magnétique (IRM) pondérée en T1 (A) et en T2 (B) la conservation relative des disques T11-T12 et T12-L1,
ainsi que la présence d’un abcès à la partie antérieure du rachis et, à un moindre degré, dans le canal médullaire. Le traitement a comporté l’excision de la lésion
par voie antérieure permettant la mise en place d’un greffon de diaphyse fibulaire en étai, bien visible au scanner en coupe axiale (C). Un geste de
décompression et d’ostéosynthèse par voie postérieure a ensuite été réalisé (D).

procéder à une arthrodèse antérieure complémentaire. Les Néanmoins, les atteintes sévères des corps vertébraux dans
contraintes exercées sur la zone corrigée sont en effet responsa- certaines formes localisées peuvent prêter à confusion (cf.
bles de faillites mécaniques fréquentes en cas de geste postérieur chapitre « Maladie de Scheuermann »).
isolé. [88] Chez l’enfant, la grande souplesse du rachis explique la
fréquence des lésions isolées même sévères de la colonne
Chez l’enfant antérieure. Chez l’enfant immature, avant l’âge de 10 ans, le
Avant maturité, le traumatisme des zones de croissance du potentiel de croissance du rachis permet généralement une
corps vertébral responsables de synostoses antérieures secondai- bonne correction du déséquilibre sagittal initial. [92] Ainsi la
res évolue rarement vers une déformation importante en cyphose résiduelle en fin de croissance est généralement
cyphose en l’absence de laminectomie déstabilisatrice. [92] Il est corrigée et, même si la surveillance doit être attentive, le
néanmoins indispensable de surveiller régulièrement l’enfant traitement est généralement conservateur. En revanche, les
durant toute la période de croissance et de manière particuliè- déformations frontales se corrigent moins bien, malgré la
rement attentive au moment du pic de croissance pubertaire croissance asymétrique des corps vertébraux adjacents.
(Fig. 47). Les fractures en compression responsables d’une perte de
Chez l’enfant, le contexte traumatique est généralement hauteur de moins de 50 % du corps vertébral, sans lésions des
violent, néanmoins, des fractures, généralement de la partie éléments postérieurs engageant la stabilité du rachis et sans
antérieure du corps vertébral, peuvent être secondaires à des troubles neurologiques, nécessitent un traitement conservateur,
traumatismes peu importants (une chute d’un lit par exemple). fonctionnel ou orthopédique en fonction de la sévérité de
L’aspect radiologique fait évoquer une fracture mais les circons- l’atteinte du corps vertébral. L’évolution est généralement
tances de survenue doivent faire évoquer certains diagnostics favorable, sans majoration de la cyphose initiale. [93] En
différentiels. Une malformation congénitale à type d’hémiver- revanche, lorsque la hauteur du corps vertébral est diminuée de
tèbre peut en effet être diagnostiquée à cette occasion. Il en est plus de 50 % ou que les fractures de plusieurs corps vertébraux
de même pour une fracture pathologique sur une infection adjacents sont responsables d’une cyphose globale importante,
osseuse ou une lésion tumorale. Dans certaines maladies il est nécessaire de recourir à une correction instrumentée par
métaboliques, la trame osseuse fragilisée est responsable de voie postérieure. [94]
fractures du rachis secondaires à des traumatismes minimes (cf.
chapitre « Les cyphoses par atteinte des lignées tissulaires Cyphose post-traumatique et spondylarthrite
mésenchymateuses »). ankylosante
La maladie de Scheuermann présente, dans sa forme caracté-
ristique, suffisamment de spécificités pour ne pas être confon- La spondylarthrite ankylosante est une pathologie générale-
due avec une éventuelle atteinte traumatique du rachis. ment familiale, touchant principalement des individus de sexe

Appareil locomoteur 23
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15-869-A-10 ¶ Cyphoses pathologiques

Figure 44. Métastases rachidiennes de la charnière cervicothoracique chez une patiente présentant une récidive d’un cancer du sein. L’imagerie par
résonance magnétique (IRM) met en évidence l’atteinte des corps vertébraux et l’extension intracanalaire avec un aspect d’épidurite (A et B). Les vues axiales
montrent bien, en séquence pondérée en T1 (C) et T2 (D), la destruction des corps vertébraux responsable d’une cyphose et d’une compression médullaire.

Figure 45. Même patiente que la figure 44. La radiographie de profil de la charnière cervicothoracique (A) est plus difficile d’interprétation que l’imagerie par
résonance magnétique (IRM). Aspect postopératoire après réalisation d’une décompression, d’une correction et d’une ostéosynthèse par voie postérieure (B).

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Cyphoses pathologiques ¶ 15-869-A-10

Figure 46. Exemple de correction chirurgicale d’une cyphose lombaire secondaire à une fracture de la 4e vertèbre lombaire. Radiographie de profil
préopératoire en charge (A) et radiographie de profil 6 mois après la correction et l’arthrodèse circonférentielle par abord antérieur et postérieur (B).

le plus efficacement possible les fractures du rachis lorsqu’elles


surviennent dans ce contexte. Le recours au traitement chirur-
gical est bien souvent nécessaire. Tardivement, une pseudarth-
rose ou le traitement d’un cal vicieux en cyphose, responsable
d’un retentissement fonctionnel important malgré parfois une
faible valeur angulaire, impose de recourir à un programme
chirurgical lourd et risqué [96] (Fig. 49).

Cyphose post-traumatique d’origine neurologique


Il s’agit d’une entité très particulière également appelée
maladie de Charcot du rachis ou arthropathie neuropathique du
rachis. Le mécanisme est celui d’une atteinte destructrice
touchant le disque intervertébral et les corps vertébraux
adjacents. Il résulte d’une perte des mécanismes de protection
articulaire, généralement secondaire à une atteinte des voies de
la sensibilité profonde, et responsable d’une atteinte dégénéra-
tive rapide. La plupart des cas rapportés dans la littérature
concernent des rachis tabétiques, parfois des paraplégies post-
traumatiques ou des insensibilités congénitales à la douleur. [97,
98] Il s’agit le plus souvent d’une atteinte de la charnière

thoracolombaire. En effet, cette zone est particulièrement


sollicitée en position assise ou debout par les mouvements
Figure 47. Exemple d’une cyphose thoracique évolutive chez un enfant infimes et répétés permettant de maintenir à chaque instant
de 7 ans ayant présenté 18 mois auparavant une lésion traumatique des l’équilibre du tronc. Le diagnostic différentiel est parfois
6e, 7e et 8e corps vertébraux thoraciques. difficile. L’atteinte rachidienne progressive, associant une
destruction des corps vertébraux et une réaction des parties
molles adjacentes d’allure inflammatoire formant souvent une
masculin. Dans sa forme classique, elle est responsable d’un véritable « coque » autour de la lésion, fait bien souvent
enraidissement progressif du rachis dès l’âge de 25 à 30 ans. La suspecter en première intention une infection ou une tumeur
prévention de l’installation d’une cyphose globale lors de (Fig. 50). Le traitement de ces lésions, souvent responsables
l’enraidissement du rachis est primordiale. Elle repose sur un d’une destruction vertébrale et d’une instabilité importante, est
programme d’exercices réguliers et peut relever d’une correction le plus souvent chirurgical. Il est nécessaire d’obtenir une fusion
plâtrée. Lorsqu’un traumatisme du rachis est responsable d’une des vertèbres atteintes afin de supprimer les mouvements
fracture, celle-ci est fréquemment localisée au niveau de la responsables de la destruction progressive du rachis. Actuelle-
charnière cervicothoracique (Fig. 48) en raison des contraintes ment, la solution la plus appropriée pour traiter ces dislocations
exercées à l’union du rachis cervical entraîné par la masse du reste une arthrodèse antérieure et postérieure associée à une
crâne et de l’encéphale et du rachis thoracique, particulièrement ostéosynthèse le plus souvent postérieure par un matériel
rigide. Outre le risque initial de complications neurologiques, segmentaire (Fig. 51).
qui est majeur sur ce terrain pour ce type de lésion, [95] le
traitement inadéquat de ces fractures peut être responsable
d’une perte de l’horizontalité du regard. Du fait de la raideur Cyphoses iatrogènes
globale du rachis, la moindre cyphose surajoutée à l’occasion
d’une fracture est responsable d’une modification globale du
Introduction
profil rachidien puisque les segments adjacents ne peuvent De nombreux traitements et, parmi eux, bon nombre d’inter-
compenser la perte angulaire. Il est donc fondamental de traiter ventions chirurgicales peuvent conduire à un déséquilibre

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15-869-A-10 ¶ Cyphoses pathologiques

Figure 49. Stratégie préopératoire de correction d’une cyphose post-


traumatique dans le cadre d’une spondylarthrite ankylosante. Il s’agit du
même patient que la figure précédente. La cyphose post-traumatique est
responsable d’une perte de l’horizontalité du regard (flèche, figure A). Le
calque préopératoire permet d’espérer une correction notable après
réalisation d’une ostéotomie du rachis en région lombaire (B) de 25° au
niveau de L2.

Figure 48. Fracture de la jonction cervicothoracique chez un patient


jeune présentant une spondylarthrite ankylosante responsable d’une rai-
deur rachidienne globale. Sur la radiographie de profil initiale (A), il existe
un écart interfragmentaire modéré qui va être responsable d’une conso-
lidation avec une perte angulaire d’une vingtaine de degrés en cyphose.
Le cal osseux allongé est bien visible sur les reconstructions tomodensito-
métriques sagittales réalisées au 6e mois (B).

permanent du rachis en cyphose. Les causes chirurgicales les


plus fréquentes sont bien souvent à replacer dans un contexte
« historique » et témoignent parfois des difficultés rencontrées
par nos aînés. Ainsi l’arthrodèse du rachis lombaire instrumen-
tée par un matériel postérieur de Harrington en distraction était
une cause inéluctable de cyphose lombaire (Fig. 52). Les
arthrodèses antérieures instrumentées par le matériel peu rigide
de Zielke ou Dwyer étaient également à l’origine de mauvaises
corrections dans le plan sagittal [99] (Fig. 53). Figure 50. Patient présentant une arthropathie neuropathique du
Lors de traumatismes, certains gestes chirurgicaux de libéra- rachis responsable d’une cyphose thoracique. Le scanner met en évidence
tion postérieure à visée décompressive sont parfois également une destruction très importante des corps vertébraux entourée d’une
responsables de déstabilisations secondaires en cyphose. Enfin coque fibreuse.
chez l’enfant, la lésion iatrogène des zones de croissance des
corps vertébraux est responsable d’une cyphose évolutive.
Dans bien des cas, il est désormais possible d’éviter cette voie postérieure. L’insuffisance de lordose est fréquemment mal
évolution. L’analyse préopératoire du profil rachidien fixe les tolérée, particulièrement dans le secteur lombaire. Les patients
objectifs qu’il faut atteindre pour parvenir à un équilibre sagittal présentent des douleurs rachidiennes aggravées par le piétine-
économique, aussi proche que possible de l’équilibre physio- ment et l’effort. La station verticale est pénible et nécessite une
logique (cf. chapitre « Équilibre sagittal spinopelvien »). augmentation de la dépense musculaire. Les patients sont
Lorsqu’une cyphose est manifestement mal tolérée et, à plus obligés d’accentuer l’extension de la région cervicale, l’extension
forte raison, si elle évolue, il faut réaliser un geste chirurgical de des hanches et la flexion des genoux pour parvenir à trouver
correction pour parvenir à retrouver cet équilibre. une position debout « fonctionnellement acceptable ».
Parfois, ce déséquilibre est parfaitement fixé et arthrodésé,
Cyphoses après arthrodèses instrumentées parfois, il existe, au sein de la zone opérée, une ou plusieurs
pseudarthrodèses qui aggravent les phénomènes douloureux et
Elles sont également appelées un peu abusivement « dos plat le déséquilibre (Fig. 54).
postopératoire ». Il s’agit, dans tous les cas, d’une cyphose La discussion thérapeutique doit être menée au cas par cas
relative d’un secteur rachidien arthrodésé le plus souvent par chez ces patients parfois multiopérés et chez qui chaque

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Cyphoses pathologiques ¶ 15-869-A-10

Figure 51. Patient présentant une arthropathie neuropathique du rachis au niveau de la charnière thoracolombaire. Il existe une dislocation du rachis, aussi
bien de face (A) que de profil (B). L’ostéosynthèse a permis la stabilisation de la lésion (C). L’arthrodèse circonférentielle est bien visible sur l’imagerie par
résonance magnétique (IRM) pratiquée 6 mois après l’intervention (D).

nouvelle intervention chirurgicale comporte un risque et une Lorsque le geste de libération postérieure à visée décompressive
complexité croissants. [100] Il est le plus souvent nécessaire de est associé à une lésion rachidienne antérieure instable (cas le
recourir à des ostéotomies du rachis afin de retrouver un plus fréquent), il est indispensable de réaliser une ostéosynthèse.
équilibre sagittal satisfaisant (Fig. 55). L’arthrodèse doit être Les laminectomies cervicales pratiquées à visée décompressive
réalisée dans les meilleures conditions et il est fréquemment en cas de myélopathies cervicarthrosiques, sont parfois respon-
nécessaire de réaliser une arthrodèse antérieure complémentaire, sables de véritables cyphoses cervicales évolutives. Des études
particulièrement en cas de pseudarthrodèse préexistante. [101] biomécaniques [102, 103] ont montré l’importance des éléments
de l’arc vertébral postérieur dans la stabilité du rachis cervical.
Cyphoses après laminectomie Toute atteinte, même partielle, de cet arc postérieur peut ainsi
Rares chez l’adulte, les cyphoses évolutives après laminecto- être responsable d’une instabilité rachidienne en cyphose. Le
mies surviennent le plus souvent dans un contexte traumatique. risque de déstabilisation en cyphose est d’autant plus élevé que

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Figure 52. Exemple d’une patiente traitée pour une scoliose lombaire selon la technique de Harrington (A). Il existe une cyphose clinique (B) et radiologique
(C) mal tolérée du secteur lombaire et thoracolombaire.

Figure 53. Exemple d’une patiente traitée pour une scoliose thoracolombaire par instrumentation antérieure selon la technique de Dwyer associée à une
instrumentation postérieure de Harrington (A). Il existe une cyphose radiologique (B) et clinique (C) mal tolérée du secteur lombaire et thoracolombaire.

la résection osseuse postérieure est étendue, en particulier aux la moitié des cas. [105] La déformation la plus fréquemment
processus articulaires et que l’équilibre sagittal du rachis cervical rencontrée est une cyphose pure bien que des scolioses et des
était perturbé en préopératoire. [104] Toutefois, si les clichés dislocations rotatoires puissent être également rencontrées. [106]
dynamiques préopératoires n’ont pas révélé d’instabilité, et si la Ces déformations progressives en cyphose sont l’apanage des
décompression postérieure s’est limitée à une laminectomie enfants jeunes. Du fait de la laminectomie, la croissance du
respectant les massifs articulaires, il n’est pas nécessaire rachis est perturbée par une pression anormalement élevée sur
d’associer une arthrodèse. les zones de croissance des corps vertébraux (Fig. 56). L’ablation
des éléments postérieurs du rachis entraîne en effet un transfert
Troubles de croissance du rachis d’origine des contraintes sur la colonne antérieure. La déformation en
iatrogène cyphose est strictement localisée à la zone de laminectomie. Ce
mécanisme est particulièrement net au niveau du rachis thora-
Laminectomie chez l’enfant
cique. Les cyphoses lombaires sont par conséquent exception-
À la différence de l’adulte, la laminectomie est responsable nelles après laminectomie isolée. [107] La prévention de ces
chez l’enfant de troubles de croissance du rachis dans plus de troubles de croissance est possible ; l’arthrodèse postérieure

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Cyphoses pathologiques ¶ 15-869-A-10

Figure 54. Exemple d’une patiente traitée par voie postérieure pour
une cyphose régulière dans le cadre d’une épiphysite vertébrale. La
pseudarthrodèse de la charnière thoracolombaire est responsable de Figure 55. Correction chirurgicale d’une cyphose lombaire secondaire
douleurs et d’une rupture du matériel au bout de quelques années (A). La à une arthrodèse postérolatérale non instrumentée (A). Le programme
zone de pseudarthrodèse est bien visualisée et figure en pointillés sur la chirurgical a comporté la réalisation d’une ostéotomie transpédiculaire de
reconstruction tomodensitométrique sagittale (B). niveau L3 associée à une nouvelle arthrodèse elle-même associée à une
instrumentation par voie postérieure (B).
permet d’éviter que la transmission des contraintes ne se fasse
aux dépens de la colonne antérieure. Il est parfois utile d’asso- scoliose, 19 cas de cyphoscolioses et deux cyphoses isolées. La
cier une ostéosynthèse. Dans certains cas, chez les enfants les cause de la déformation rachidienne n’est pas toujours unique-
plus jeunes, il est préférable d’opter d’emblée pour une arthro- ment un trouble de croissance du corps vertébral. Les rétractions
dèse circonférentielle. [107] Dans tous les cas, la surveillance des parties molles, les séquelles du geste chirurgical et la
clinique et radiologique de ces patients doit être étroite, durant destruction du rachis par la tumeur elle-même peuvent être
toute la période de croissance. impliquées. [111] La surveillance clinique et radiologique de ces
Séquelles de la radiothérapie enfants doit être particulièrement attentive. En cas de déforma-
tion rachidienne évolutive, le traitement orthopédique, voire
Les corps vertébraux se développent au moyen d’une ossifi- chirurgical doit être discuté. L’arthrodèse circonférentielle reste
cation enchondrale, de la même manière que les épiphyses des le seul traitement efficace en cas de cyphose évolutive de plus
os longs. Le cartilage épiphysaire est un tissu radiosensible. de 35° (Fig. 57). Elle est souvent délicate en raison des antécé-
L’exposition aux rayonnements ionisants entraîne une désorga- dents chirurgicaux et de la mauvaise qualité de l’os irradié.
nisation des cellules du cartilage de croissance. L’inhibition de Certaines équipes préconisent de recourir à un greffon osseux
la croissance est fonction de l’âge de l’enfant et de la dose vascularisé de type fibulaire afin d’obtenir une arthrodèse
d’irradiation reçue. Plus l’enfant est jeune et plus la dose est antérieure de qualité. [112]
importante, plus grande est la déformation en fin de crois-
sance. [108] Les cas les plus fréquents sont les patients ayant été
traités pour un neuroblastome ou pour un néphroblastome.
L’irradiation du champ tumoral, lequel est généralement ■ Remerciements
contigu au rachis, est une source fréquente de déformation
rachidienne. Les déformations sont plus fréquentes chez les Nous remercions tout particulièrement les docteurs Michel
enfants les plus jeunes, généralement lorsque l’irradiation a été Guillaumat, Nicolas Levassor, Ludovic Rillardon et Pierre Guigui
réalisée avant l’âge de 4 ans. [109] Riseborough [110] retrouve, pour leur contribution à la documentation iconographique de ce
chez 81 patients irradiés pour un néphroblastome, 59 cas de travail.

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Figure 56. Cyphose thoracique évolutive chez un enfant ayant eu une laminectomie thoracique sur
quatre étages à l’âge de 4 ans. Aspect de profil à 7 ans (A), à 10 ans (B) après arthrodèse antérieure et
greffe en étai à l’âge de 12 ans (C) et à maturité osseuse à l’âge de 19 ans (D).

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Cyphoses pathologiques ¶ 15-869-A-10

Figure 57. Cyphose thoracolombaire chez une enfant ayant eu une radiothérapie pour tumeur rétropéritonéale.Les corps vertébraux ont été inclus dans le
champ d’irradiation. Il existe une déformation frontale modérée et un aspect atrophique des corps vertébraux de profil sur les clichés réalisés à l’âge de 5 ans,
2 ans après la fin de la radiothérapie (A et B). La déformation reste modérée à l’âge de 9 ans (C) mais on décide de réaliser une arthrodèse antérieure avant le
pic de croissance pubertaire (D).

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32 Appareil locomoteur

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C. Garreau de Loubresse, Professeur des Universités, praticien hospitalier (ch.garreau@rpc.ap-hop-paris.fr).


Service de chirurgie orthopédique, hôpital Raymond Poincaré, 104, boulevard Raymond-Poincaré, 92380 Garches, France.
R. Vialle, Interne des hôpitaux de Paris.
Service de chirurgie orthopédique, hôpital Beaujon, 100, boulevard du Général-Leclerc, 92110 Clichy, France.
S. Wolff, Chirurgien adjoint.
Fondation hôpital Saint-Joseph, 185, rue Raymond-Losserand, 75014 Paris, France.

Disponibles sur www.emc-consulte.com


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