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CLASSIFICATION ET DIAGNOSTIC DES EPILPEPSIES

INTRODUCTION

L’épilepsie est une maladie cérébrale chronique caractérisée par une prédisposition
durable à générer des crises, mais également par des conséquences neurobiologiques,
neuropsychologiques, sociales et psychiatriques.
C’est un véritable problème de santé publique, car l’épilepsie est très fréquente et mal connue,
et est l’objet de nombreux préjugés.
Les causes de l’épilepsie sont très variées. Elle touche des personnes de toute condition.
Ainsi, des célébrités comme l’empereur romain Jules César, et français Napoléon Bonaparte,
le chimiste Alfred Nobel et l’écrivain Van Gogh, sont cités.

OBJECTIFS
1-Définir une crise d’épilepsie et une épilepsie
2- Enumérer les principales étiologies des épilepsies
3- Citer les principaux types de crises focales
4- Citer les principaux types de crises généralisées
5- Citer les principaux syndromes épileptiques
6- Enumérer les étapes du diagnostic positif de la crise d’épilepsie

PLAN
Introduction
I-Généralités
II- Classification
III-Diagnostic
Conclusion

I- GENERALITES

1- Définitions:

Crise d’épilepsie : Ensemble de manifestations cliniques paroxystiques (début et fin


soudains), résultant de l'hyperactivité paroxystique d'un réseau de neurones corticaux ou
cortico-sous-corticaux et de son éventuelle propagation.

Une crise peut être symptomatique: survient dans une situation favorisante occasionnelle
(déséquilibre ionique, sevrage en benzodipine) ou survenir dans le cadre d’une maladie
chronique épileptique

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BAS

Fig 1: Cerveau schématisation des crises généralisées et des crises focales (1)

-Crise généralisée: la décharge intéresse à la fois les 2 hémisphères cérébraux.


Elle s’accompagne en général de troubles de la conscience.

-Crise focale (partielle) : résulte d’une décharge localisée de neurones d’une partie
plus ou moins importante d’un hémisphère cérébral.

La crise focale, peut se propager et devenir secondairement


généralisée.

Les épilepsies : maladies cérébrales chroniques caractérisées par une prédisposition durable
à générer des crises, mais également par des conséquences, neurobiologiques,
neuropsychologiques, sociales et psychiatriques.
D'un point de vue pratique, cette prédisposition cérébrale durable à générer des crises
est établie par
 la survenue d'au moins 2 crises épileptiques cliniquement avérées non
provoquées, espacées d'au moins 24 heures
 la survenue d'une crise épileptique cliniquement avérée non provoquée, et un
risque estimé de récidive supérieur à 60 % dans les 10 ans, soit au moins un
élément pathologique retrouvé :
- présence d'anomalies paroxystiques à l'EEG
- lésion cérébrale préexistante épileptogène à l'imagerie cérébrale
- trouble neurodévelopemental préexistant

2- Epidémiologie

Distribution : L’épilepsie est une maladie ubiquitaire, connue depuis l’antiquité.


Dans nombreuses civilisations, elle est comparée à une possession démoniaque : « mal sacré »
pour Hippocrate, 400 ans avant Jésus Christ, « djinn » ou « maladie de l’oiseau » en Côte
d’Ivoire. Ceci s’explique par le caractère spectaculaire de la crise tonicoclonique généralisée,
à début brusque, et se terminant par un état de mort apparente.

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La prévalence et l’incidence sont très variables.
 La prévalence est de 0,5 à 0,8% de la population générale, soit, 5/1000 habitants. Dans
les pays en développement, elle atteint 30/1000 habitants. En Côte d’Ivoire ce taux a
été estimé à 7,8/1000 habitants.
 L’incidence varie de 17,3 à 136/100 000 habitants/an. Elle est plus faible dans les pays
développés que dans les pays sous développés soit 2-3%. En Afrique Sub-saharienne,
le taux est 2 à 3 fois plus élevé que dans les pays développés.
L’âge de survenue : Tous les âges sont concernés, avec cependant 2 pics : moins de 10 ans
(75 à 250/100 000/an), et plus de 65 ans (82 à 151/100 000/an).

3-Les étiologies: Elles sont très variées

 Des facteurs génétiques sont suspectés dans certaines épilepsies.


Elles sont dites épilepsies idiopathiques.
C’est le cas des pathologies des canaux membranaires ou canalopathies

 Les facteurs acquis : très variés :


- Causes obstétricales, pré et périnatales,
- Les maladies infectieuses et inflammatoires : méningites et méningo-encéphalites,
abcès
- Les traumatismes crâniens : précoces, ou tardifs (dits épilepsies post-traumatiques,
survenant après plusieurs mois), ils posent des problèmes médico-légaux
- Les tumeurs cérébrales
- Les causes vasculaires : les crises sont précoces (dans les 3 semaines qui suivent
l’accident vasculaire cérébral), ou tardives (réelles épilepsies vasculaires)
- Les causes toxiques : alcool, médicaments, cocaïne, …….
- Les causes métaboliques (encéphalopathie hyper ou hypoglycémique,
encéphalopathie rénale, hépatique, les troubles ioniques.

 Dans certains cas, aucune étiologie n’est retrouvée : 10 à 15 %

4-Physiopathologie

L’épileptogénèse est plurifactoriellle: les facteurs acquis, génétiques et fonctionnels, peuvent


être associés.
L’épilepsie est due à un déséquilibre entre les systèmes excitateurs neuronaux et les systèmes
inhibiteurs, en rapport avec:

 Une baisse de l’inhibition gabaergique, soit par défaut de synthèse ou de libération du


GABA (acide gamma-amino-butyrique), soit par une pathologie du récepteur GABA,
soit par la non activation des interneurones gabaergiques, soit par l’augmentation de
l’inhibition gabaergique (effet d’inhibition de l’inhibition)

 Un renforcement de la transmission excitatrice, soit par la libération excessive de


glutamate, soit par une modification des récepteurs glutamatergiques, soit par le
développement de circuits récurrents excitateurs
3-Des anomalies des canaux ioniques sodium et calcium des membranes neuronales.

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Les bases de l’épileptogénèse : ce déséquilibre est à l’origine de l’hyperexcitabilité des
neurones avec une hypersynchronie (décharge de plusieurs neurones en même temps).

Traduction électrique : Ce déséquilibre électrique va se traduire par des graphoéléments


irritatifs paroxystiques, recueillis par l’électroencéphalogramme

Fig 2 : Grapho-éléments de l’épilepsie (1)

Application des données physiopathologiques: La découverte et la mise sur le marché de


nouveaux médicaments antiépileptiques visent,
 soit la baisse de la conductance des canaux ioniques (Na+ et Ca++),
 soit l’augmentation de l’inhibition gabaergique,
 soit la baisse de la neurotransmission excitatrice glutamatergique.

II- Classifications

Le diagnostic et la prise en charge des épilepsies reposaient avant 2017, principalement sur la
classification des crises établie en 1981 et celle des syndromes épileptiques de 1989.
Depuis 2017, une nouvelle classification a été établie par un groupe de travail de la Ligue
Internationale contre l’Epilepsie (LICE), à la suite d’une concertation internationale.

1-Classification des crises

A partir des données de la clinique et de l’électroencéphalogramme, on détermine le type de


crise

Départ focal Départ généralisé Départ inconnu

Avec Avec Moteur Moteur


altération altération Non moteur (absence) Non moteur
de l’état de de l’état de
conscience conscience

Moteur Non classifiée


Non moteur

Propagation bilatérale
tonico-clonique

Fig 3 : Classification des types de crises de 2017, selon la Ligue internationale contre
l’épilepsie (LICE) (version abrégée) (2)

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 Classification des crises focales :
o Focales sans altération de la conscience
o Focales avec altération de la conscience
On distingue, les crises focales :
- Motrices
- Non motrices
 avec signes somato-sensitifs
 avec signes sensoriels : olfactives, auditives, gustatives, visuelles
 avec signes végétatifs
 avec signes psychiques
- Tonico-cloniques focales à généralisées (propagation secondairement de
façon bilatérale, pour donner des crises tonico-cloniques)

 Classification des crises généralisées : (avec signes moteurs ou non moteurs)

- Motrices
o Tonicocloniques,
o Autres
 Toniques,
 Atoniques
 Cloniques
 Myocloniques
- Non motrices
o Absences (typiques, atypiques, avec symptômes particuliers)

 Les crises d’origine inconnue

Les données sont insuffisantes pour les classer en focales ou généralisées :

- Motrices
 Tonicocloniques
 Autres
- Non motrices
- Non classées

 Les spasmes et autres

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2- Classification des épilepsies
A partir du type de crises, de l’âge de leur survenue, des comorbidités (ex : paralysie
cérébrale), et de l’étiologie trouvée, on détermine le syndrome épileptique, dont va dépendre
le traitement et le pronostic.

Fig 4 : Principe de la classification des épilepsies selon la Ligue internationale


contre l’épilepsie (LICE) de 2017 (1) (4)

3- Classification des épilepsies et syndromes épileptiques généralisées

Un syndrome épileptique est défini par l’association constante et non fortuite de caractéristiques
cliniques et paracliniques telles que le type de crises, l’EEG et l’imagerie. Il tient compte de l'âge de
début et de rémission (le cas échéant), des facteurs favorisants les crises, de leur survenue variable en
fonction du cycle veille-sommeil et parfois le pronostic

1- Epilepsies et syndromes épileptiques idiopathiques,

Ils sont âge-dépendants, avec par ordre chronologique :


-Convulsions néonatales familiales bénignes
-Convulsions néonatales bénignes
-Epilepsie myoclonique bénigne du nourrisson
-Epilepsie-absence de l’enfant
-Epilepsie-absence de l’adolescent
-Epilepsie myoclonique juvénile
-Epilepsie avec crises grand mal du réveil
-Epilepsies avec crises caractérisées par un mode spécifique de provocation
(Epilepsie photosensible, ex: déclenchée par la vidéo)

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2-Epilepsies non idiopathiques avec par ordre chronologique :

-Encéphalopathie myoclonique précoce


-Encéphalopathie épileptique précoce
-Syndrome de West ou spasmes en flexion
-Syndrome de Lennox-Gastaut
-Epilepsie avec crises myoclono-astatiques (syndrome de Doose)
-Epilepsie avec absences myocloniques
- Sans étiologie spécifique

Fig 5: Classification des syndromes épileptiques selon l’étiologie, le type de crise, l’âge début
CNB(F) : convulsions néonatales bénignes (familiales), EMP : épilepsies myocloniques progressives;
EEIP : encéphalopathie épileptique infantile précoce. (1)

III- Diagnostic
1-Le diagnostic positif
Le diagnostic positif repose sur l’identification d’au moins une crise épileptique non
provoquée, associée à des facteurs prédisposant d’une récidive de crises
Il est essentiellement clinique, basé sur :
 L’interrogatoire : à la recherche d'événements antérieurs suspects de crises passées
inaperçues (par exemple, myoclonies, absences, perte de connaissance itératives,
épisodes de morsures de langue ou de perte d'urines nocturnes…)
 Examen clinique : à la recherche de signes neurologiques en foyer, d’un retard
des acquisitions

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2-L’électroencéphalographie (EEG), recherche des signes irritatifs paroxystiques
épileptiques.
Leur présence permet d'affirmer de façon rétrospective l'origine épileptique d'une crise
suspectée cliniquement, et constitue également un facteur pronostique de récidive et un critère
essentiel pour le diagnostic syndromique.
L’EEG peut être complété par l’EEG de 24h, (EEG Holter) et la vidéo EEG pour corrélé les
anomalies à la clinique.
Sa normalité n’exclue pas le diagnostic.

3- Le diagnostic différentiel
 Chez l’adulte et le grand enfant, éliminer :
-une syncope : perte de connaissance brève, d’origine cardiovasculaire,
avec retour immédiat de la conscience à la normale.
-une lipothymie : ici le malade se sent faiblir mais il n’existe pas de chute,
car il a le temps de s’asseoir
-une crise d’hystérie : manifestations désordonnées, théatrales, survenant
dans un contexte psychosomatique chargé, d’origine non organique.

 Chez le nouveau-né (NNé) et le nourrisson :


-Trémulations du NNé (Mouvements sinusoïdaux oscillatoires autour d’un
point d’équilibre)
-Myoclonies néonatales bénignes du sommeil calme: avant J15 (myoclonies
amples, assez lentes, isolées ou en salves, non bloquées par la contention)
-Myoclonies d’endormissement anormalement intenses
-Myoclonus bénin de la première enfance : 3-6 mois
-Spasmes du sanglot (6 mois à 3 ans) accès hypertonique suivie ou non
d’hypotonie, survenant au cours d’une colère ou d’un accès de pleurs)

4- Diagnostic étiologique : En fonction du contexte, des antécédents, des données cliniques


 Bilan biologique :
- Bilan standard (urée, glycémie, ionogramme sanguin, bilan
hépatique, etc…)
- Bilan spécifique (PL, …)
 Neuro-imagerie: recherche d’une lésion cérébrale
Radiographie simple du crâne, tomodensitométrie (scanner) crânio-encéphalique,
imagerie par résonnance magnétique (IRM) fonctionnelle ou non, angiographie,
autres examens de pointes dans le bilan préopératoire d’une épilepsie pharmaco-
résistante telle que la tomographie par émission de positons.

CONCLUSION : Les crises et syndromes épileptiques sont très variés. De la parfaite


connaissance de leur physiopathologie, de la sémiologie des différentes crises, des principaux
syndromes épileptiques, dépend un diagnostic correcte en vue d’une bonne prise en charge
des patients.

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REFERENCES

1- Collège des Enseignants de neurologie, 2019


Epilepsie de l’enfant et de l’adulte
www.cen-neurologie.fr Consulté le 10/02/2020

2- Lebon S., Roulet-Perez E.


Pédiatrie. Nouvelle classification des crises épileptiques et des épilepsies
Rev Med Suisse 2018; volume 14. 74-75
3- Musée allemand de l’épilepsie
Qu’est ce que l’épilepsie exactement ?
www.epilepsiemuseum.de/alt/body_introfr.html Consulté le 10/02/2020

4- Scheffer I. E., Berkovic S., Capovilla G., Connolly M. B., French J., Guilhoto L., Hirsch
E., Jain Satish, Mathern Gary W., Moshe Solomon L., Nordli Douglas R., Perucca Emilio,
Tomson T., Wiebe S., Zhang Y-H, and Zuberi S. M.
La classification des épilepsies de la Ligue Internationale contre l’Epilepsie (ILAE):
Document établissant la position de la Commission ILAE pour la classification et la
terminologie
Epilepsia 2017; 1-10, doi : 10.1111/epi.13709

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