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Pédiatrie - Neurologie

B 233

Épilepsie de l’enfant
Étiologie, diagnostic, évolution, pronostic, traitement
Pr Louis VALLÉE 1, Dr Joseph VAMECQ 2
1. Service des maladies infectieuses et neurologie infantiles, (Pr J.P. Nuyts), CHRU de Lille, 59037 Lille Cedex
2. INSERM - CHRU Lille, Certia, 59651 Villeneuve-d’Ascq

Points Forts à comprendre niques et paracliniques pour faire suspecter une lésion céré-
brale de façon quasi certaine alors que l’on ne parvient pas
à mettre en évidence ces lésions. Ce concept par les tech-
• Tout âge confondu, on évalue l’incidence annuelle niques d’imagerie sous-entend que les crises n’ont fait que
de l’épilepsie à 50 cas pour 100 000 révéler une lésion cérébrale préexistante.
et la prévalence chez l’enfant de 4,4 à 9/1 000.
• Le risque d’apparition d’une épilepsie
est maximal durant l’enfance, 50 % des épilepsies
apparaissant avant 10 ans et 75 % avant 20 ans.
L’incidence de l’épilepsie à la période préscolaire Classification des syndromes
est estimée à 84/100 000 et de 42,2/100 000 à l’âge épileptiques de l’enfant
scolaire.
• Les crises épileptiques doivent être différenciées 1. Épilepsies partielles
en fonction de plusieurs critères : leur type • Idiopathiques :
(toniques, cloniques, tonico-cloniques, – épilepsie à paroxysmes rolandiques ou centrotempo-
myocloniques, atoniques, absences, spasmes) ; rales
leur durée (l’état de mal correspondant – épilepsie à paroxysmes occipitaux
– épilepsie à symptomatologie affective
à des crises durant plus de 30 minutes) ;
• Cryptogéniques ou symptomatiques :
la localisation (partielle ou généralisée).
– épilepsie partielle continue progressive
• La classification internationale des épilepsies – épilepsie du lobe frontal
de 1989 est étiologique et syndromique. – épilepsie du lobe temporal
• L’intérêt du regroupement syndromique – épilepsie du lobe pariétal
des épilepsies permet de comparer des groupes – épilepsie du lobe occipital
de malades homogènes et donc de définir 2. Épilepsies généralisées
une stratégie thérapeutique cohérente, • Idiopathiques :
et une recherche étiopathogénique pertinente. – épilepsie absence
– épilepsie généralisée tonico-clonique
• Cryptogénique ou symptomatique :
– syndrome de Lennox-Gastaut
– épilepsie myoclono-astatique
– épilepsie avec absence myoclonique
Classification étiologique – épilepsies myocloniques progressives
La classification des épilepsies est fonction de leur étiolo- 3. Épilepsie dont la localisation partielle
ou généralisée ne peut être déterminée
gie. On différenciera ainsi :
– Pointes-ondes continues du sommeil
• L’épilepsie idiopathique, du grec ιδιοδ : « propre, per- – Syndrome de Landau-Kleffner
sonnel, non précédé ou secondaire à ». Par définition, cette
épilepsie n’a aucune cause sous-jacente. Il s’agit donc de
manifestations épileptiques qui évoluent pour elles-mêmes.
Les épilepsies idiopathiques sont fortement liées à l’âge, Épilepsies partielles
ce qui sous-entend une origine génétique probable.
• L’épilepsie symptomatique, du grec συν, πιπτειν : Épilepsies partielles idiopathiques
« ensemble, arriver ». Ces épilepsies sont toujours secon-
daires à une lésion cérébrale et correspondent le plus sou- 1. Épilepsie à paroxysmes rolandiques
vent à des formes graves d’épilepsie. ou épilepsie centrotemporale
• L’épilepsie cryptogénique, du grec κριτον : « caché ». Décrite en 1958, c'est la plus fréquente des épilepsies par-
Ces épilepsies présentent suffisamment de critères cli- tielles bénignes (20 % des épilepsies d’enfants en âge sco-

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ÉPILEPSIE DE L’ENFANT

laire) correspondant à la moitié des crises morphéiques et sensations visuelles élémentaires telles que des phosphènes
touchant préférentiellement le garçon (65 % des cas). L’âge occupant tout ou une partie du champ visuel. Les halluci-
de début est de 3 à 13 ans avec un pic entre 8 et 10 ans. nations visuelles complexes sont rares. La symptomatolo-
• Diagnostic : la sémiologie clinique est caractérisée clas- gie non visuelle survient habituellement après la sympto-
siquement par la survenue chez un enfant de 8-9 ans, sans matologie visuelle marquée par une crise hémiclonique dans
antécédent neurologique, une demi-heure après s’être cou- presque la moitié des cas. Il peut s’agir de crises partielles
ché, de manifestations critiques orofaciales : paresthésie uni- complexes ou de crises généralisées tonico-cloniques.
latérale intéressant la langue, les lèvres, la gencive ou l’in- • Électro-encéphalogramme : en période post-critique,
térieur des joues puis des convulsions unilatérales toniques, l’électro-encéphalogramme est caractérisé par des
cloniques ou tonico-cloniques à prédominance orofaciale décharges de pointe-ondes ou de pointes sur les deux lobes
puis un arrêt de la parole ou une anarthrie et secondairement occipitaux. Il s’agit de pointes survenant de façon ryth-
une sialorrhée avec toujours conservation de la conscience. mique de 1 à 3 cycles/seconde. L’activité de fond est nor-
Les crises peuvent durer plus d’une à deux minutes. Elles male. À l’ouverture des yeux, il y a une disparition quasi
sont parfois moins riches dans leur symptomatologie, elles complète des images paroxystiques ; l’hyperpnée n’est pas
peuvent être hémicorporelles, tonico-cloniques ou encore activante, ni la stimulation lumineuse intermittente.
secondairement généralisées. Dans trois quarts des cas, les • Diagnostic différentiel :
crises sont liées au sommeil. L’expression des crises paraît – les crises partielles simples secondaires à une lésion occi-
dépendre de l’âge ; chez l’enfant plus âgé, des crises hémi- pitale : il s’agit de cas rares chez l’enfant. Le bilan neuro-
faciales sont plus fréquentes alors que, chez l’enfant plus radiologique met dans ce cas en évidence une lésion occi-
jeune, ce sont des crises hémicorporelles. pitale ;
• Électro-encéphalogramme: le tracé intercritique enre- – épilepsies du lobe temporal : lorsque les crises partielles
gistre des pointes dans la région centrotemporale uni- ou complexes sont précédées par une aura visuelle qui peut
multifocales. Il s’agit de pointes diphasiques de haut vol- être hallucinatoire, on peut évoquer une épilepsie à
tage, isolées ou en bouffées. Le sommeil augmente leur paroxysmes occipitaux, mais l’analyse sémiologique avec
survenue et leur diffusion sur les deux hémisphères. Chez la crise partielle complexe secondaire permet de rétablir le
30 % des enfants, les pointes ne sont enregistrées que pen- diagnostic ainsi que l’électro-encéphalogramme ;
dant le sommeil. Un tracé de sommeil est donc nécessaire – la migraine basilaire : elle est exceptionnelle et ne s’as-
quand le diagnostic clinique est suspecté. socie pas à des pointes ou pointe-ondes à l’électro-encé-
• Diagnostic différentiel : vu la bénignité de l’affection, il phalogramme.
faut éviter les investigations paracliniques abusives. On • Traitement : le traitement par la carbamazépine (Tégré-
doit différencier cette épilepsie de l’épilepsie temporale, tol LP) ou la Dépakine peut être proposé.
de l’épilepsie bravais-jacksonnienne. L’épilepsie centro- • Évolution : dans 60 % des cas, le contrôle des crises est
temporale peut s’associer à une épilepsie bénigne à obtenu d’emblée en monothérapie. Les crises disparaissent
paroxysmes occipitaux. à la puberté.
• Traitement : il doit être guidé par le fait qu’il s’agit d’une 3. Épilepsies partielles bénignes
épilepsie bénigne, que les crises peuvent être rares et que le à symptomatologie affective
plus souvent, elles sont uniquement nocturnes. Pour cette Décrite en 1980, l’épilepsie partielle bénigne à sympto-
raison, certains auteurs proposent même l’abstention théra- matologie affective ou épilepsie psychomotrice bénigne
peutique. Si on décide d’un traitement, on fera appel au val- survient autant chez les garçons que chez les filles entre
proate de sodium (Dépakine chrono) (comprimé à 500 mg) 2 ans et 9 ans et demi.
à la posologie de 15 à 20 mg/kg/j. Le grand principe dans • Diagnostic : la sémiologie clinique est caractérisée par un
le traitement est d’éviter un excès dans les posologies et sentiment de peur ou de terreur soudaine qui s’exprime par
toutes polythérapies. des cris, des hurlements. L’enfant appelle sa mère, s’agrippe
• Évolution : cette épilepsie est bénigne. Cependant, dans à elle ou à quelqu’un de l’entourage. Il peut aller égale-
20 % des cas, les crises peuvent être fréquentes, persistantes ment dans un coin de la pièce en se cachant. Cette expres-
malgré le traitement mais sans influence sur le pronostic sion de terreur peut être associée à des mouvements de mas-
qui est toujours bon. tication ou de rire angoissé. Il y a un arrêt de la parole, des
gémissements et de la salivation. On peut observer une
2. Épilepsie à paroxysmes occipitaux pâleur, des épisodes sudoraux. L’enfant se plaint de dou-
L’épilepsie à paroxysmes occipitaux est caractérisée par leurs abdominales. Il n’y a pas de véritable perte de
des crises à sémiologie visuelle. Elle a été identifiée défi- conscience mais une modification de la perceptivité. Les
nitivement entre 1980 et 1982. Elle touche autant les gar- crises durent en moyenne une à deux minutes. Il n’y a pas
çons que les filles. Cette épilepsie débute à un âge moyen de déficit post-critique.
de 7 ans et demi avec des extrêmes entre 2 et 17 ans. Dans • Électro-encéphalogramme : l’activité de fond est nor-
un tiers des cas, on retrouve des antécédents familiaux et male. Les anomalies intercritiques sont caractérisées par
dans 16 % des cas la notion de migraines. des ondes lentes semblables aux pointes observées dans
• Diagnostic : la sémiologie clinique est constituée de signes l’épilepsie centrotemporale, localisées dans la région
visuels et non visuels. Les signes visuels surviennent au fronto-temporale ou pariéto-temporale, uni- ou bilatérale.
moment de la crise et sont marqués par une amaurose, des le sommeil augmente leur survenue.

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• Diagnostic différentiel : les crises partielles complexes trigine, Tiagabine…) ou commercialisé (Vigabatrin).
en rapport avec une épilepsie lésionnelle du lobe tempo-
ral. Habituellement, il s’y associe d’autres types de crises
ou des manifestations de terreur qui ne constituent qu’une Épilepsies généralisées
phase initiale d’une crise plus longue.
• Traitement : le traitement le plus efficace est la carba- Épilepsies idiopathiques
mazépine. 1. Épilepsie-absence
• Évolution : lorsque les crises sont fréquentes, on peut
observer des troubles du comportement chez l’enfant avec L’épilepsie-absence de l’enfant est la plus connue des épi-
retentissement sur les fonctions d’apprentissage. Sinon, lepsies de l’enfant mais n’est pas la plus fréquente des épi-
lorsque le diagnostic est posé, le traitement administré, lepsies généralisées idiopathiques (8 % des épilepsies chez
l’évolution est toujours bonne sans aucune séquelle intel- l’enfant d’âge scolaire). Elle est plus fréquente chez les
lectuelle. filles que chez les garçons (60 à 76 % des cas sont des
filles). Les antécédents familiaux d’épilepsie sont retrou-
Épilepsies partielles cryptogéniques vés dans 15 à 44 % des cas.
ou symptomatiques • Diagnostic : les absences ont une durée courte, le plus
souvent 5 à 10 secondes. Elles peuvent être plus brèves
1. Épilepsie partielle continue progressive
mais aussi plus longues, jusqu’à 2 minutes. Le début et la
Cette épilepsie est rare. Elle débute entre 8 mois et 10 ans. fin de l’absence sont brusques : l’absence est caractérisée
Deux groupes électro-cliniques ont été individualisés : par une perte de la perceptivité, de la réactivité avec arrêt
• Le syndrome de Kojewnikow de type I est caractérisé par des activités en cours. L’enfant s’arrête de parler, de man-
des crises convulsives généralisées ou unilatérales débu- ger ; il reste figé, les yeux vagues regardant devant lui ou
tant en moyenne vers 6 ans ; des états de mal fréquents pré- en l’air. Le rythme respiratoire peut se ralentir surtout
cèdent l’apparition du syndrome de Kojewnikow. Les crises lorsque les absences sont prolongées. La conscience peut
surviennent en moyenne une fois par jour et sont résistantes être altérée à différents degrés, certains enfants vont
aux traitements antiépileptiques. L’enfant a souvent un défi- entendre ce qui se passe mais ne pourront répondre. Une
cit moteur homolatéral préexistant. Il n’y a pas d’évoluti- activité motrice élémentaire peut persister.
vité des lésions cérébrales. Il n’y a pas d’atteinte mentale. Dans la classification des crises épileptiques, on différen-
• Le syndrome de Rasmussen, ou syndrome de Kojewni- cie 6 types d’absence, suivant qu’elles sont isolées ou asso-
kow de type II, comporte un début des crises vers l’âge de ciées à d’autres manifestations. Un même enfant peut avoir
5 ans chez un enfant sans antécédent. Les crises partielles plusieurs types d’absences. Leur nombre est le plus sou-
cloniques sont très fréquentes (1 à 20 par jour) avec appa- vent sous-estimé par l’entourage. Le facteur déclenchant
rition précoce de crises myocloniques associées à une principal est l’hyperpnée ou l’hyperventilation. Le dia-
dégradation de l’état neurologique. Le pronostic est donc gnostic d’épilepsie-absences doit être reconsidéré si l’ab-
sévère du fait de l’extension progressive du processus sence n’est pas déclenchée après 2 minutes d’hyperpnée.
lésionnel. Vu la résistance aux traitements antiépileptiques, • Électro-encéphalogramme : il est caractérisé par une
on discute chez ces patients un traitement neurochirurgi- décharge de pointes-ondes rythmiques bilatérales, symé-
cal. Un traitement par bolus de corticoïdes a été proposé triques, synchrones. Le début et la fin de ces décharges
par certains auteurs. sont brusques, la fréquence des pointes-ondes est de 3 Hz
mais peut se ralentir en fin de décharge à 2,5 voire 2 Hz.
2. Épilepsie selon la localisation cérébrale L’activité de fond (rythme de base) reste normale entre
du foyer les décharges. Le sommeil lent active le nombre de
Le diagnostic de chaque épilepsie est basé sur la corréla- décharges.
tion existant entre la sémiologie clinique propre à chaque • Diagnostic différentiel : l’épilepsie-absence doit être dif-
topographie lésionnelle du cortex et l’enregistrement élec- férenciée de :
tro-encéphalographique. On distinguera ainsi : – l’épilepsie-absence de l’adolescent, dont l’âge d’appari-
– les épilepsies du lobe frontal : épilepsie de l’aire motrice tion se situe autour de la puberté ; à l’électro-encéphalo-
supplémentaire, du gyrus cingulaire, fronto-polaire, orbito- gramme, il existe des bouffées de pointes-ondes à plus
frontale, dorso-latérale, operculaire et de la frontale ascen- de 3 Hz ;
dante ; – l’absence de l’épilepsie myoclonique juvénile : des
– les épilepsies du lobe temporal : épilepsie hypocampique absences peuvent survenir dans près d’un quart des cas chez
et temporale postérieure ; les enfants ayant une épilepsie myoclonique juvénile mais
– les épilepsies du lobe pariétal ; il faut savoir qu’elles peuvent aussi précéder l’épilepsie
– les épilepsies du lobe occipital. myoclonique juvénile ;
Le traitement fera appel avant tout à la monothérapie et en – l’absence révélatrice de lésions cérébrales : une épilep-
première intention à la carbamazépine. Le choix du médi- sie-absence peut être en fait une épilepsie symptomatique
cament sera fonction du type de crise. De nombreux médi- liée à une lésion cérébrale. Il est important de souligner
caments nouveaux sont en cours d’étude chez l’enfant de l’association absences et lésions frontales.
moins de 12 ans (Diacomit, Felbamate, Gabapentin, Lamo- • Traitement : le valproate de sodium (Dépakine) en mono-

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thérapie, associé si nécessaire à l’éthosuximide (Zarontin) clonies palpébrales. On observe une diminution progres-
sont les médicaments les plus actifs contre les absences. sive du tonus musculaire entraînant un affaissement pro-
Le valproate de sodium doit être prescrit en première inten- gressif de la tête puis du tronc.
tion ; s’il y a échec, on y adjoindra de l’éthosuximide, qui • Électro-encéphalogramme : il est caractérisé par un
peut cependant altérer les capacités d’apprentissage. De ralentissement du rythme de fond, survenue de pointes-
nouvelles molécules sont étudiées actuellement (lamotri- ondes lentes à 2-2,5 cycles/seconde, diffus sur les 2 hémi-
gène). sphères. L’électro-encéphalogramme de sommeil est carac-
• Évolution : elle se fait sur trois modes ; les absences dis- térisé par la survenue de décharges de pointes rythmiques
paraissent sous traitement adapté ; ou bien elles persistent diffuses, s’accompagnant ou non de crises toniques. Ces
après la puberté, ce qui est rare (6 %). Elles ne surviennent décharges sont caractéristiques du syndrome de Lennox-
que lors de circonstances favorisantes (manque de som- Gastaut et surviennent durant le sommeil lent.
meil, stress, etc.) ; ou bien surviennent les crises tonico-
cloniques généralisées qui sont le plus souvent bien contrô- • Diagnostic différentiel : les caractéristiques cliniques et
lées par le traitement. électro-encéphalographiques diurnes et nocturnes sont suf-
Dans tous les cas, le pronostic intellectuel est bon. Il faut fisamment spécifiques pour évoquer le diagnostic. La limite
retenir que les cas qui évolueront favorablement sont ceux entre syndrome de Lennox-Gastaut et l’épilepsie myo-
qui répondront rapidement au traitement. Les facteurs pré- clono-astatique est encore discutée.
disposant à la survenue de crises tonico-cloniques sont des • Traitement : il n’y a pas de protocole thérapeutique défini.
absences ayant commencé avant l’âge de 8 ans, une mau- La carbamazépine, le valproate de sodium, le Di-Hydan,
vaise réponse au traitement initial, un retard à la mise en ainsi que les benzodiazépines sont les médicaments les plus
route du traitement initial, une activité électro-encéphalo- utilisés. L’éthosuximide (Zarontin) est proposé pour contrô-
graphique de fond anormale, une photosensibilité. ler les absences atypiques. Des nouvelles molécules sont
actuellement à l’étude pour ce syndrome (Tiagabine, Dia-
2. Épilepsie avec crise généralisée tonico- comit, Felbamate, lamotrigène…). La place des corticoïdes
clonique (crise « grand mal ») est difficile à établir. La chirurgie de l’épilepsie (calloso-
tomie) peut être proposée lorsque les crises atoniques sont
Il s’agit d’une épilepsie débutant entre 3 et 11 ans, à pré- fréquentes, invalidantes, et résistantes au traitement médi-
dominance masculine (60 %). camenteux.
• Diagnostic : cette épilepsie est caractérisée par la surve- • Évolution : on observe un ralentissement du développe-
nue de crises généralisées tonico-cloniques. La fréquence ment des acquisitions motrices et intellectuelles, des
de survenue est habituellement rare, une crise ou moins par troubles du caractère, une instabilité psychomotrice.
an. L’état de mal généralisé tonico-clonique est rare. Le Lorsque l’enfant grandit, ce sont les troubles d’attention
retard intellectuel est rare. Il n’y a pas de déficit neurolo- qui sont prédominants avec une altération des fonctions
gique. Des antécédents familiaux d’épilepsie sont retrou- intellectuelles rendant l’apprentissage et la scolarisation
vés dans un tiers des cas. impossible. Enfin, on peut observer des troubles de la per-
• Électro-encéphalogramme : il montre des anomalies sonnalité associés.
caractéristiques sous forme de pointes-ondes généralisées
diffuses. 2. Épilepsie myoclono-astatique : il s’agit d’une
• Traitement : le traitement de première intention fera appel épilepsie rare (1 à 2 % de l’épilepsie de l’enfant) touchant
à la Dépakine. deux fois plus souvent les garçons que les filles. Dans un
• Évolution : la réponse au traitement est toujours de bonne tiers des cas, on retrouve des antécédents familiaux
qualité ; 95 % des traitements sont efficaces la première d’épilepsie avec une incidence plus élevée dans les fratries
année. (15 %) que chez les parents (6 %).
• Diagnostic : l’épilepsie myoclono-astatique associe
Épilepsie cryptogéniques d’une part, des secousses myocloniques symétriques des
ou symptomatiques épaules et des membres supérieurs accompagnées d’une
flexion de l’extrémité céphalique, pouvant entraîner la
1. Syndrome de Lennox-Gastaut chute, et d’autre part, des crises astatiques, forme de
Épilepsie débutant le plus souvent avant 8 ans avec un maxi- perte brutale du tonus musculaire responsable d’une
mum de fréquence entre 3 et 5 ans. Il semblerait exister une chute. Lorsque la résolution du tonus musculaire est
discrète prédominance masculine. moins intense, on peut observer simplement une flexion
• Diagnostic : ce syndrome est caractérisé par des crises de la tête avec un fléchissement des genoux. Les crises
toniques, diurnes et (ou) nocturnes. Il peut s’agir de crises myocloniques et astatiques peuvent s’associer, donnant
brèves pouvant passer inaperçues. Lorsqu’elles sont pro- des crises myoclono-astatiques. Des absences peuvent
longées, elles peuvent se terminer par des clonies extrê- être présentes dans la moitié des cas.
mement rapides. Le sommeil lent favorise la survenue de • Électro-encéphalogramme : à la phase d’état, il
ces crises toniques. S’y associent des absences atypiques enregistre des pointes-ondes et des polypointes-ondes en
avec un début et une fin progressive et parfois une perte de bouffées irrégulières à 2-3 cycles/seconde. Il existe une
connaissance qui paraît incomplète. L’enfant peut pour- sensibilité à la stimulation lumineuse intermittente.
suivre une certaine activité. Il peut s’y associer des myo- • Traitement : le valproate de sodium est le traitement de

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première intention. S’il y a échec, on pourra y associer de région fronto-temporale. Secondairement, apparition de
l’éthosuximide puis de la lamotrigène. pointes-ondes diffuses à 3 cycles/s en bouffée. Pendant le
• Évolution : elle peut être très variable. Dans près de sommeil apparaissent des pointes-ondes lentes, continues,
50 % des cas, il y a une disparition complète des crises. Le bilatérales et diffuses durant plus de 85 % du tracé.
pronostic est péjoratif s’il existe des crises généralisées • Traitement : les corticoïdes peuvent être efficaces sur ce
tonico-cloniques fréquentes, si l’on note la survenue d’un syndrome et améliorer les troubles du langage. Si les cor-
état de mal-absence au début de l’affection et s’il existe un ticoïdes sont utilisés, ils sont prescrits à forte dose ; d’autres
ralentissement du rythme de fond persistant à l’électro- auteurs ont proposé l’administration de clobazam (Urba-
encéphalogramme. nyl). Un protocole thérapeutique reste à déterminer.
3. Épilepsie avec absences myocloniques • Évolution : les crises peuvent disparaître avant la norma-
lisation de l’électro-encéphalogramme ou de façon conco-
Épilepsie rare, prédominante chez les garçons (69 %), mitante. Dans 15 à 20 % des cas, les crises persistent après
caractérisée par des absences et des myoclonies bilatérales. la disparition des pointes-ondes continues du sommeil lent.
Elle débute en moyenne à 7 ans ; il s’y associe un retard La gravité du diagnostic est surtout due aux conséquences
mental dans plus d’un tiers des cas. neuropsychologiques en rapport avec la longue durée des
• Diagnostic : l’enfant présente des myoclonies des racines décharges. On observe une baisse d’efficience intellectuelle
des membres supérieurs et des cuisses, responsables en et des troubles d’expression orale. Les troubles du com-
position debout d’un mouvement de vacillement. Parfois, portement sont souvent sévères avec instabilité psycho-
on observe aussi une composante tonique. Il s’y associe motrice, déficit attentionnel ; des états psychotiques ont
une altération de la conscience de degré variable. même été rapportés.
• Électro-encéphalogramme : l’activité de fond est nor-
male en intercritique. Durant les absences myocloniques, 2. Syndrome de Landau-Kleffner
on enregistre des bouffées de pointes-ondes à 3 Hz, bilaté- Il s’agit d’un syndrome rare : affection caractérisée par deux
rales, synchrones et symétriques et des myoclonies à symptômes cardinaux : une aphasie acquise et un tracé élec-
l’EMG. tro-encéphalographique caractéristique. Cette épilepsie
• Traitement : l’association valproate de sodium et étho- décrite par Landau et Kleffner en 1957, intéresse plus sou-
suximide semble la plus efficace. vent le garçon que la fille (62 % contre 38 %). L’âge de sur-
• Évolution : dans la moitié des cas, les crises persistent venue se situe principalement entre 3 et 8 ans, les extrêmes
quel que soit le traitement. entre 2 et 11 ans.
4. Épilepsie myoclonique progressive • Diagnostic : la sémiologie clinique associe une aphasie
qui débute dans 70 % des cas avant l’âge de 6 ans. Les
Il s’agit d’épilepsies rares, qui associent myoclonies, crises
troubles phasiques correspondent à une agnosie auditive
tonico-cloniques généralisées (inconstantes), détérioration
verbale : les patients sont incapables de comprendre les
mentale, et un syndrome neurologique où le syndrome céré-
signaux sonores reçus. Il s’y associe une réduction de l’ex-
belleux est constant. Les causes les plus fréquentes sont les
pression orale, la survenue de stéréotypies et de persévé-
céroïdes-lipofuscinoses, la maladie de Lafora, les épilep-
ration. Parfois, la parole peut totalement disparaître. Ces
sies myocloniques progressives dégénératives.
difficultés de compréhension peuvent aussi s’installer pro-
gressivement. Il s’y associe des troubles du comportement
avec hyperkinésie dans plus de la moitié des cas. Les capa-
Épilepsie dont la localisation partielle cités intellectuelles sont habituellement conservées.
ou généralisée ne peut être
Les crises comitiales surviennent dans trois quarts des cas ;
déterminée il peut s’agir soit de crise unique, soit d’un état de mal sur-
1. Épilepsie à pointes-ondes continues pendant venant au début de l’évolution. Leur sémiologie est hété-
rogène. Il n’y a pas de crise tonique.
le sommeil
• Électro-encéphalogramme : à l’état de veille, les ano-
Syndrome rare, décrit en 1971 sous le nom d’état de mal
malies électro-encéphalographiques sont constituées par
épileptique électro-encéphalographique caractérisé par la
des pointes et des pointes-ondes de grandes amplitudes
présente de pointes-ondes occupant 85 % de toute la durée
répétitives, de localisation variable dans le temps et dans
du sommeil lent. L’âge moyen de la première crise est de
l’espace. Ces foyers multifocaux peuvent prédominer dans
4 ans 7 mois avec des extrêmes entre 8 mois et 2 ans.
la région temporale (50 % des cas) ou pariéto-occipitale.
• Diagnostic : la sémiologie débute soit par des crises géné- Le sommeil active les anomalies électro-encéphalogra-
ralisées tonico-cloniques, soit par des crises partielles phiques avec une diffusion des décharges de pointes et
motrices ; secondairement, le tableau clinique peut se com- pointes-ondes, principalement dans le sommeil lent.
pléter par des crises myocloniques, toniques, généralisées • Traitement : il n’y a pas de traitement spécifique démon-
ou partielles ; puis des absences. tré dans le syndrome de Landau-Kleffner. L’acide val-
• Électro-encéphalogramme : en veille, possibles proïque, les benzodiazépines ou l’éthosuximide ont des
décharges de pointes-ondes généralisées ou non, associées effets bénéfiques partiels ou éphémères sur le langage. La
inconstamment à des pointes ou des pointes lentes dans la corticothérapie semble apporter une amélioration plus

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importante et surtout plus prolongée.


• Évolution : l’aphasie persiste quelques mois après la nor- On pourra envisager un arrêt progressif
malisation de l’électro-encéphalogramme en veille et en du traitement antiépileptique dans la plupart des cas
sommeil. Dans 10 % des cas, des troubles phasiques impor- après au minimum 2 ans d’une épilepsie totalement
tants persistent ; dans 40 % des cas, on observe des diffi- contrôlée.
cultés du langage parlé ou écrit, des troubles du compor- • Seule l’identification rigoureuse des syndromes
tement ou des troubles d’apprentissage scolaire. Il s’en suit épileptiques permettra de progresser dans
des difficultés d’intégration dans le milieu socio-profes- la compréhension étiopathogénique de l’épilepsie
sionnel. ■ (des recherches en génétique par biologie
moléculaire, en épidémiologie, en biochimie),
et l’amélioration des stratégies thérapeutiques
et l’étude de nouveaux médicaments.

Points Forts à retenir SCHÉMA THÉRAPEUTIQUE


• Devant toute manifestation épileptique de l’enfant, La plupart des nouvelles molécules anti-épileptiques nécessitent
actuellement pour les enfants de moins de 12 ans, une autorisation
l’analyse sémiologique clinique reste l’élément temporaire d’utilisation (ATU). Ces molécules ont comme principe
principal de la démarche diagnostique. d’action d’agir soit sur les systèmes inhibiteurs, soit sur les sytèmes
La corrélation à la sémiologie électro- excitateurs du neurone ou de la tranmission synaptique. Pour cer-
encéphalographique et à d’éventuels autres examens taines molécules anti-épileptiques, le mécanisme d’action n’est pas
paracliniques permettra d’en identifier la nature connu. Parmi celles-ci, citons :
• le gabapentin (Neurontin) ;
syndromique. • la lamotrigine (Lamictal) ;
• À cette seule condition, un traitement adapté • le stiripentol (Diacomit) ;
pourra être proposé. La polythérapie doit être évitée • le tiagabine (Gabatril).
en sachant qu’elle n’est que l’apanage des formes
sévères, et relève d’équipes spécialisées.
À cette seule condition, on évitera les conséquences
neuropsychologiques sur les capacités POUR EN SAVOIR PLUS
d’apprentissage de l’enfant. La décision de mise en Roger J, Bureau M, Dravet C, Dreifuss FE, Pervet A, Wolf P. Les
route d’un traitement antiépileptique ne doit pas syndromes épileptiques de l’enfant et de l’adolescent ; 2e ed. Lon-
don, Paris : John Libbey, 1992.
induire la poursuite prolongée de ce traitement.

222 LA REVUE DU PRATICIEN (Paris) 1997, 47

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