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Introduction générale : observations préliminaires

- Le terme « crime » vient du grec « crimen » qui signifie tout acte inadmissible / blâmable dans le cadre d’une
société.
- Le crime est un phénomène universel auquel sont confrontées toutes les sociétés. Sa connaissance s’impose,
vue son caractère énigmatique et problématique. Ainsi, c’est l’objet de la criminologie puisque, littéralement
parlant, c’est la science du crime (au sens simple) ou la science du phénomène criminel (au sens large). Donc
l’étude scientifique du phénomène criminel constitue l’objet de la criminologie. A l’égard de ce phénomène, il
est nécessaire de formuler 3 observations préliminaires :
1) Le crime est un phénomène humain : En ce sens qu’il est propre à l’être humain. Même l’animal le plus
féroce ne saurait commettre des actes criminels, puisqu’il est incapable de distinguer entre le bien et le mal (pas
de discernement) et, par conséquent, il ne pourra faire l’objet de responsabilité. Aussi la criminalité est
congénitale à l’humanité depuis sa présence sur terre. Le récit du meurtre d’Abel commis par son frère Caïn est
très significatif à cet égard.
2) Le crime est un phénomène social : En ce sens qu’on ne peut pas envisager d’action criminelle en dehors
de l’existence d’un groupement social. Peu importe la taille de ce groupement, il constitue une condition sine
qua non à l’expression du comportement criminel. A ce propos, le comportement criminel dans sa dimension
sociale est l'un des thèmes majeurs de la sociologie. D’ailleurs, Durkheim a estimé que : « le crime est un
phénomène de sociologie normal ».
3) Le crime est un phénomène culturel : En ce sens qu’il évolue avec l’évolution des sociétés et qu’il est
déterminé en fonction de la culture de chaque société. Le même acte peut être considéré comme criminel pour
une société, et non criminel pour une autre société. C’est dans ce sens, qu’on parle de la théorie de la relativité
du crime dans le temps et dans l'espace. Ainsi en fonction des valeurs et des normes de chaque société, le
même comportement peut constituer ou ne pas constituer une infraction punissable. Idem pour le temps.

Chapitre I : Criminologie et sciences criminelles


Section 1 : Émergence et caractéristiques de la criminologie
- En tant que science, la criminologie est d’apparition récente, elle remonte à la fin du 19e siècle. Cela ne
signifie pas l’absence de toute réflexion sur le comportement criminel de l’Homme. Il s’agissait auparavant
beaucoup plus d’idées philosophiques / littéraires / moralistes que d’une véritable approche scientifique. Le
début de l’approche scientifique a lieu avec ces trois italiens :
• En premier lieu, le médecin-légiste Cesare Lombroso, qui a publié en 1876, un ouvrage intitulé « L’Homme
criminel ». Il a réunit les conclusions de ses observations à partir d’autopsies pratiquées sur certains criminels.
C’est lui qui a forgé la théorie du criminel-né ou du criminel par naissance.
• En deuxième lieu, le juriste pénaliste et sociologue Enrico Ferri a publié en 1881 un ouvrage intitulé « La
Sociologie criminelle ». Dans cet ouvrage, il consacre certaines idées de Lombroso, mais il traite le
comportement criminel dans le cadre d’une analyse sociologique, c.-à-d. l’interaction entre le criminel et la
société. C’est lui qui a intégré des mesures de sûreté (mesures préventives) dans le système pénal.
• En troisième lieu, le pénaliste Rafaëlle Garofalo a publié en 1885 un ouvrage intitulé « Criminologie » où ce
terme apparaît pour la première fois dans le monde scientifique. C’est dans cet ouvrage que Garofalo a
distingué entre les infractions naturelles (incriminée dans toute société) et les infractions conventionnelles.
- Ces trois pionniers peuvent être considérés comme les fondateurs de la criminologie. Ils forment l’école
positiviste qui s’oppose à l’école pénale classique. En effet, selon l’école classique, l’homme est libre et donc
lorsqu’il commet une infraction il doit en assumer la sanction car il a un libre arbitre. Or, pour l’école
positiviste, l’homme commet un crime suite à certains facteurs. Il est donc complexe.
- Cette science de criminologie s’est développée par la suite grâce à l'organisation de congrès et à des formations
dispensées par des Instituts de Criminologie du monde occidental ainsi qu’à travers de nombreuses recherches,
publications scientifiques d’ouvrages et revues (RSC, criminologie), création d’associations (AICLF).
- Cette science qui s’intéresse au crime et au criminel, mais également à la victime se trouve au carrefour de
plusieurs disciplines.
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Pour le comportement de l’Homme dans sa dimension sociale, elle relève à la fois des sciences humaines et des
sciences sociales. Pour l’Homme dans sa dimension criminelle, elle relève de l’anthropologie criminelle.
L’anthropologie criminelle comprend la biologie et la psychologie criminelle (la sociologie criminelle est
étudiée par la suite).
En étudiant et en analysant le comportement criminel de l’humain, elle ferait donc partie des sciences
comportementales (Béhaviorisme).
- Le phénomène criminel peut être analysé et expliqué à travers plusieurs angles de vue, soit biologique (on
parle de biologie criminelle), soit psychologique (psychologie / psychiatrie criminelle), soit encore sociologique
(sociologie criminelle). Ainsi, différentes sciences sont mobilisées pour comprendre et expliquer les facteurs du
comportement criminel. C’est la raison pour laquelle on qualifie la criminologie de science de carrefour.
Mais quel que soit le terrain sur lequel on se place, chaque fois qu’on étudie les facteurs du comportement
criminel, on parle de l’étiologie criminelle, qui signifie la recherche de la causalité criminelle et des facteurs
qui ont conduit au comportement criminel.
PROCESSUS : En tant que science, la criminologie essaie d’étudier, d’analyser, de comprendre et d’expliquer
le phénomène criminel en faisant appel à plusieurs sciences afin de solutionner puis de prévenir.
Elle peut également être une source d’inspirat° pour le DT pénal, visant à prévenir et à combattre la criminalité
et à envisager un traitement spécifique pour chaque type de criminel. Aussi, l’étude criminologique s’intéresse :
au crime, au délinquant/criminel, et à la victime (on parle de victimologie qui étudie les syndromes post-
traumatiques).
- Cependant, la criminologie a sa propre particularité par rapport au droit pénal. D’abord la notion de crime
n’est pas entendue de la même manière.
Pour le droit pénal, le crime a un sens technique, c’est la catégorie la plus grave des infractions. Pour la
criminologie le terme crime a un sens large car il englobe les trois concepts que sont « crime, délit et
contravention ». La criminologie élargit davantage son terrain, en s’intéressant aussi à la délinquance et à la
déviance. La distinction entre criminalité et déviance : la criminalité englobe des actes incriminés et punis,
intervention du législateur pénal ; la déviance concerne des actes non incriminés mais qui dérogent, c.-à-d. des
incivilités.
Sur un autre plan, si le droit pénal s’intéresse aux actes incriminés et punis par la loi pénale, la criminologie
s’intéresse plutôt aux différents profils des personnalités criminelles, en érigeant des typologies criminelles,
c’est-à-dire des classifications des différents types de criminel. Dans ce sens, on peut affirmer que le droit pénal
a une approche objective, alors que la criminologie a une approche subjective.
Chaque criminologue a sa propre typologie criminelle. Par exemple, Enrico Ferri classe 5 catégories de
criminels : l’aliéné, le criminel-né, le passionnel, le criminel d’habitude et celui d’occasion.
- Malgré toutes ces différences, la criminologie est une source d’inspiration pour le droit pénal, qui en a intégré
certains apports. Ainsi sur la base du principe de l’individualisation de la sanction, (principe promu par
Raymond Saleilles dans son ouvrage, approche subjective qui s’intéresse à la personnalité du criminel, à ne pas
confondre avec celui de la personnalité de la peine) le droit pénal a intégré plusieurs mécanismes proposés par
la criminologie. Il en est ainsi :
• du minimum et du maximum, de la peine des mesures de sûreté, de la récidive ;
• de la correctionnalisat° : résultat d’une circonstance atténuante qui dégrade le fait et le fait passer de crime à délit ;
• des circonstances aggravantes (déterminées par le législateur) et atténuantes (laissées à l’appréciation du juge) ;
• du sursis (conditions : délinquant primaire, pour délit seulement, il est révocable en cas de récidive) ;
• de l’excuse absolutoire ou atténuante (excuses légales régies par les articles 143 à 145 du CP).
Excuse absolutoire : aucune sanction n’est appliquée, la personne est coupable mais n’est pas condamnée, il
faut être le premier à dénoncer.
Excuse atténuante : excuse qui diminue la sanction, à différencier des circonstances atténuantes qui sont
générales car elles concernent plusieurs infractions alors que cette excuse ne concerne que celles visées par la loi.
- Tous ces mécanismes essaient d’adapter la sanction en fonction de la dangerosité du criminel. En fait, la
dangerosité constitue un concept clef de la criminologie.
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Section 2 : Le bloc des sciences criminelles
A vrai dire, la criminologie n’est pas la seule science qui s’intéresse au criminel et au crime, d’autres sciences
s’intéressent aussi au crime et au criminel, mais de leur propre point de vue. En fait la criminologie n’est qu’une
discipline parmi d’autres dans le bloc des sciences criminelles. Ce bloc se compose de disciplines à caractère
normatif, c’est le cas pour le droit pénal général, le droit pénal spécial et d’autres matières relevant du champ
pénal. Ce bloc se compose aussi de disciplines explicatives, comme la criminologie ou la pénologie ou encore la
politique criminelle. Il se compose enfin de disciplines considérées comme auxiliaires, apportant leur concours à
la justice pénale, c’est le cas pour la criminalistique, la médecine légale ou encore la psychologie judiciaire.
Afin donc de distinguer le champ de ces disciplines par rapport à celui de la criminologie, il est nécessaire de
faire la connaissance de certaines disciplines.
I. La criminalistique et les sciences forensiques
La criminalistique est une discipline technique qui englobe dans la conception française uniquement la police
technique et la police scientifique. Dans cette conception, la médecine légale est considérée comme une science
à part. Par contre dans la conception anglo-saxonne, on utilise plutôt l’expression Forensic Sciences, traduite en
français à travers l’expression « Sciences forensiques » qui signifie sciences légales, ou sciences au service de
la loi. Contrairement à la criminalistique, la notion de sciences forensiques est beaucoup plus large que la
criminalistique. Elle englobe la police scientifique, la police technique, la médecine légale et toutes les
disciplines scientifiques qui peuvent apporter leur concours à la justice pénale.
Qu’il s’agisse de criminalistique ou de sciences forensiques, ce sont des disciplines ayant une vocation
probatoire (cherchant les preuves) pour la justice pénale dans la mesure où faisant usage de leurs
connaissances, elles permettent de fournir des preuves scientifiques à la justice criminelle. Ces disciplines
poursuivent généralement 4 objectifs :
1) Identifier la victime grâce à l’anthropologie judiciaire (= c’est l’identification du cadavre. Ce sont des
procédés scientifiques de reconnaissances des victimes. La reconnaissance de la victime aide à mener jusqu’au
criminel) # anthropologie criminelle (= façon d’expliquer la poussée criminelle).
2) Identifier l'agresseur : pour deux raisons car l’agresser laisse souvent ses traces sur la victime ou la scène du
crime, après on fait un ratissage de l’entourage de la victime car généralement l’agresseur connaît sa victime.
3) Identifier le procédé utilisé : cause de la mort par l’autopsie médico-légal. On appelle ça modus operandi : mode
de fonctionnement typique d'un criminel et ses façons d'agir.
4) Identifier la réalité du crime : savoir si on est face à un crime, mort naturel, suicide ou catastrophe naturelle…
afin d’aider la PJ ainsi que la justice pénale.
Afin de se faire une idée sur le contenu de ces disciplines, nous présenterons les principales d'entre elles à
savoir la police technique, la police scientifique, la médecine légale et la psychologie judiciaire.
1) La police technique
Elle peut avoir un sens organique ou un sens fonctionnel. Au sens organique, il s’agit d’une catégorie de
personnes (techniciens) qui relève de la police judiciaire.
Au sens fonctionnel, cette discipline s'occupe essentiellement de la collecte des traces et des indices sur la
scène de crime. Le travail de la police technique repose dans une grande partie sur l'exploitation du principe de
Locard. Ce principe se base sur l'échange actif entre les éléments provenant de l’extérieur et de l'intérieur. Dans
une scène de crime, cet échange s’accélère et devient plus intense étant donné la violence de l'action criminelle.
Ainsi le criminel va laisser un peu de lui même sur cette scène, et il va également emporter avec lui des choses
appartenant à cette scène.
La police technique accomplit sa mission en conformité avec certains standards internationaux (ceinturât de la
scène de crime, zonage). Pour que l'exploitation de traces et indices soit possible, il ne faut pas que la scène de
crime soit entamée par quelqu'un d'autre avant que le travail de la police technique ne soit achevé.
Malheureusement, au Maroc, et dans pas mal de situations, la sauvegarde de la scène de crime n'est pas
toujours respectée (pollution).
Différence entre indice et trace : la trace est un marquage, une impression. L’indice, lui, est un signe susceptible
d’interprétation. Ils ne constituent des preuves qu’après avoir été traités, interprétés et vérifiés.
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2) La police scientifique
Elle a aussi un sens organique et un sens fonctionnel. Cette police accomplit sa mission dans des laboratoires
relevant de la police judiciaire ou de la gendarmerie royale. Cette police utilise différentes connaissances
scientifiques telles que la chimie, la physique, la biologie, l'informatique, l'acoustique, etc. Elle analyse les traces
et les indices relevés par la police technique pour apporter la preuve matérielle et scientifique à la justice pénale.
La police scientifique se compose de plusieurs sections spécialisées, notamment la balistique (étude des
mouvements des projectiles), l'anthropologie judiciaire, la dactyloscopie (empreintes digitales dont 3
catégories : en boucle / en volute / en arc), l'analyse ADN (empreintes génétiques, 4 bases nucléiques : adénine
/ guanine / cytosine / thymine), la graphométrie (expertise de faux documents), l'entomologie (science des
insectes), informatique, etc.
3) La médecine légale
Le travail du médecin légiste est généralement lié à l'autopsie des cadavres afin de déterminer les causes et les
circonstances de la mort et la datation de la mort. Une bonne partie de la médecine légale est occupée par la
thanatologie, c'est-à-dire : science de la mort.
Mais le médecin légiste travaille aussi sur des vivants, dans la mesure où il peut délivrer des certificats en cas
de viol, en cas de sévices à enfants, ainsi que dans d'autres situations qui supposent que la victime examinée
soit encore en vie.
Outre la thanatologie et l'examen des violences subies par les vivants, la médecine légale se subdivise en
plusieurs branches, parmi lesquelles on trouve notamment : la toxicologie, l'odontologie médico-légale,
l'addictologie ou encore l'expertise médico-légale de la responsabilité pénale, la psychiatrie médico-légale. Le
médecin légiste est tenu par le secret médical.
4) La psychologie judiciaire
Cette discipline concerne l'usage des connaissances psychologiques dans l'enquête criminelle. Dans sa forme
élémentaire, il peut s'agir simplement d'un savoir faire acquis par l'expérience de l'enquêteur en matière
d'interrogatoire pour amener le coupable à récapituler psychiquement et à avouer son crime. Il cherche à
décoder les attitudes et réponses de l’accusé.
Dans sa forme élaborée, on parle de profiling / profilage permettant de donner un portrait robot psychique du
coupable. Il peut aussi s'agir de recours à certains procédés qui ne font pas l'unanimité. Parmi ces procédés, on
peut citer l'usage du polygraphe appelé également détecteur de mensonges. Cette machine utilisée aux États-
Unis d'Amérique mesure un certain nombre de réactions humaines à la suite de chaque question posée. On peut
citer également l'usage de l'hypnose ou de la narcoanalyse (sérum de vérité). Les démocraties européennes
rejettent ces différents procédés pour l'atteinte qu'ils constituent à la dignité humaine, à la présomption
d'innocence et aux droits de l'Homme, notamment le droit de la défense. Ils causent aussi un problème de
fiabilité étant donné que chacun réagit différemment face aux différentes situations.
II. La pénologie et la science pénitentiaire
La pénologie peut être définie comme la science des peines. Elle analyse les peines adoptées par un système
pénal déterminé, quant à leurs fonctions, leur adéquation et utilité pour prévenir et combattre efficacement la
criminalité. Elle se distingue du droit pénal qui est une discipline normative alors que la pénologie est
explicative. La science pénitentiaire constitue une grande branche de la pénologie, mais elle ne concerne que la
peine privative de liberté.
Afin d'illustrer la pénologie, on peut prendre à titre d'exemple la peine de mort qui partage non seulement les
pénologues, mais également l'opinion publique entre partisans de l'abolition et adeptes du maintien.
Arguments : - Abolition : violation des DH, du droit à la vie, erreur judiciaire, considérations religieuses,
souffrance morale.
- Maintien : violation des droits des victimes, souci de justice et de justesse, effet dissuasif, coût cher, la loi du
Talion.
Autre argument : dans l’édifice normatif marocain, il y a une contradict° entre la constitution et le droit pénal :
en effet, ce dernier prévoit des peines de mort pour certaines infract°, alors que la constitution consacre le droit à
la vie ; ainsi, l’accusé peut invoquer l’art 133 de la constitut° pour invoquer l’except° d’inconstitutionnalité.
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La controverse sur cette peine est posée avec acuité actuellement au Maroc. Du fait de la ratification par le
Maroc de certaines conventions internationales qui consacrent le droit à la vie, notamment le pacte de 1966 sur
les droits civils et politiques. Ainsi que par référence à la nouvelle constitution marocaine de 2011. Certains
militants des droits de l'Homme estiment que le Maroc se trouve dans l'obligation d'abroger la peine de mort.
Par contre, les défenseurs du maintien de la peine de mort estiment, au nom de la loi du talion, que cette peine
est utile dans la mesure où elle préserve le droit à la vie du côté des victimes et de leurs ayants droit.
Actuellement le Maroc adopte une position médiane, du fait que d'un côté il n'a pas procédé à l'abrogation de
cette peine, et d'un autre côté les peines qui sont prononcées par les tribunaux ne sont jamais mises à exécution
depuis pratiquement 1994.
Quant à la science pénitentiaire qui concerne tout spécialement la peine privative de liberté, du fait du recours
systématique des systèmes pénaux modernes à la prison, elle a fait l'objet d'un intérêt très particulier de la part
des pénologues.
Les aspects négatifs de cette peine l'emportent largement sur les aspects positifs. D'abord cette peine :
- remet en cause le principe de la personnalité de la peine, puisqu'elle a toujours des retombées sur la
famille (la femme peut voir son mari mais cette possibilité de rencontre n’est pas réglementée, elle est
laissée à la discrétion du directeur de l’établissement pénitentiaire).
- Ensuite, cette peine est accusée de priver le détenu, qui reste également un citoyen de plusieurs droits
de citoyenneté, notamment celui du vote et celui d'exercer un recours pour excès de pouvoir en cas de
sanctions disciplinaires.
- Par ailleurs, la PPL a une dimension criminogène : l'univers carcéral est considéré comme un univers
hautement criminogène qui favorise la récidive et l'apprentissage de la criminalité pour les détenus à de
courtes peines, ce qui va à l'encontre de l'idée de la réinsertion sociale.
- Enfin les peines privatives de liberté coûtent très cher à la communauté surtout en cas de surpopulation
carcérale à cause d’un taux anormalement élevé des détenus préventifs. (France : 24% de
surpopulation, Maroc : 202%).
Voici les types de PPL :
- Peines intra-muros : Réclusion criminelle ( > 5 ans, pour les crimes), l’emprisonnement ( délit ), et la
détention (contravention). A signaler que la garde à vue n’est pas une PPL car il n’y a pas de condamnation.
- Peines extra-muros : assignation à résidence (résidence forcée), bracelet électronique.
C'est la raison pour laquelle plusieurs spécialistes préconisent l'adoption des peines de substitution qui sont de
véritables alternatives à la peine privative de liberté.
Les peines de substitution = peines alternatives :
En cas délits mineurs, le Maroc ne les utilise pas encore, il y a seulement un avant-projet du Code pénal d’avril
2015 qui les a prévu dans les articles 35-01 à 35-15. Elles ont l’avantage de punir sans mettre en prison.
Il existe 3 catégories de peines alternatives :
• D’abord le travail d’intérêt général TIG : âge > à 15 ans, la peine principale ne doit pas dépasser 2 ans, la
durée totale est de 400 à 600 heures à raison de 2h/jour si cela dure un mois.
• Jour-amende : amende par jour fixée par le tribunal, les mineurs sont écartés de cette mesure, comprise entre
100 et 2000 DHS.
• Restrictions de certains droits ou soumission à certaines mesures : il s’agit de mesure de réhabilitation, de
contrôle (faire le pointage), de thérapie, bracelet électronique.
Condit° d’applicat° de ces peines : pas de récidive, s’applique uniquement aux délits de police (< 2 ans). La
personne doit accepter pour être dispensée de la peine classique.
III. La politique criminelle et la politique pénale
La politique criminelle peut être définie comme la politique suivie ou l’ensemble des moyens mobilisés par
l’État pour prévenir et combattre la criminalité (2 aspects : prévention et répression). Cette politique peut
reposer sur des mesures répressives, mais pour prévenir la criminalité, l’État a souvent recours à des politiques
sociales, comme c'est le cas pour l'Initiative Nationale pour le Développement Humain (INDH), la
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restructuration du champ religieux, la veille sécuritaire. Quant à la politique pénale, il s'agit de recours à des
textes juridiques de nature pénale se rapportant à telle ou telle situation criminelle qui seront adoptés par l’État.
La politique pénale fait partie de la politique criminelle, elle en constitue la partie majeure (elle repose sur
l’incrimination et la sanction). Mais la procédure pénale se distingue par le fait qu’elle n’utilise que
l’instrument pénal qui n’est qu’un outil parmi d’autres dans la politique criminelle.
Comment alors peut-on faire de la politique criminelle sans faire de la politique pénale ? En nous plaçant sur le
terrain de la prévention.
La politique pénale est toujours conduite par deux mouvements : le mouvement de pénalisation et le
mouvement de dépénalisation.
La dépénalisation : Ce mouvement consiste à incriminer des comportements qui n'étaient pas jusqu'à présent
incriminés. Pour le deuxième mouvement, il s'agit d'enlever à un comportement qui était déjà incriminé son
caractère pénal. Pour ce déclassement pénal, on peut citer, à titre d'exemple dans le droit français, la
dépénalisation en 1975 de l'interruption volontaire de grossesse (IVG), ou encore de l'adultère dans la même
année, ou encore la dépénalisation en 1983 de l'homosexualité.
La pénalisation : En ce qui concerne le Maroc, beaucoup de textes ont été adoptés ces derniers temps. On peut
citer, à titre d'exemple, la pénalisation en 2003 du terrorisme ou encore de la cybercriminalité qualifiée dans le
code pénal d'atteintes aux Systèmes de Traitement Automatisé des Données (STAD), ou encore du harcèlement
sexuel (art 503-1 du code pénal) et de la pédopornographie (art 503-2). On peut également faire mention de la
loi 43-05 relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux et qui a été promulguée par un dahir du 17 avril
2007.

Section 3 : Les méthodes de la criminologie


Les connaissances en matière de criminologie sont déduites à partir des méthodes utilisées par cette discipline.
Ces méthodes changent en fonction du type de criminologie. En fait, il faut distinguer 2 formes de criminologie :
- La criminologie générale ou théorique : dans le cadre de cette criminologie, on fait des études et des analyses
sur le phénomène criminel de manière générale et on formule des théories et des explications sur telle ou telle
forme de la criminalité.
- La criminologie clinique ou pratique : un criminel déterminé fait l'objet d'un examen spécifique de sa
personnalité par une équipe spécialisée afin de diagnostiquer sa dangerosité et proposer un traitement adéquat.
I. Les méthodes de la criminologie théorique
Cette forme de criminologie utilise généralement 2 procédés : les statistiques criminelles et l'enquête sociale.
1) Les statistiques criminelles
Elles se présentent comme une approche quantitative du phénomène criminel. Les statistiques criminelles
renseignent les criminologues sur l'évolution de la criminalité dans un pays déterminé et pour une période
déterminée. Elles permettent également de se faire une idée sur l'ampleur d'un crime particulier ou sur les
conditions de sa commission ou encore sur le profil des criminels ou des victimes. Le traitement des statistiques
criminelles prend en considération un certain nombre de paramètres tels que l'âge, le sexe, le niveau culturel, la
condition socio-économique, l’habitat.
Ces statistiques peuvent viser la criminalité en général ou un phénomène criminel particulier. L’objet de ces
statistiques est soit le profil du criminel ou celui de la victime. Elles sont très actives dans le domaine carcéral
Concernant leur nature, il faut distinguer les statistiques officielles, émanant d'administrations publiques ou
d'organisations internationales, des statistiques non officielles à savoir celles qui sont élaborées de manière
indépendante par des chercheurs.
• pour les statistiques officielles :
- Administration publique / organisations nationales : administration pénitentiaire, Haut Commissariat
au Plan, Ministère de la Justice, de l’Intérieur, DGSN,
- Gendarmerie Nationale, Douane
- Organisations internationales : Interpol, Europol, ONUDC
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• pour les statistiques non officielles : utilisée avec précaution
• Ces statistiques criminelles permettent une vision objective de la criminalité : en France, il y a l’Obs.Nat.de la
Délinq.et des Réponses pénales : c’est l’organisme qui observe de manière objective l’évolution de la
criminalité et produit un rapport chaque année. Au Maroc, il n’y a pas de tel organisme : les statistiques
criminelles sont souvent erronées, visant à protéger l’opinion publique ce qui empêche le Maroc d’avoir une
vision objective de la criminalité.
Les statistiques criminelles souffrent de l'existence du chiffre noir (dark number). Celui-ci constitue une
donnée incontournable dont le taux ne peut être déterminé avec certitude car il est toujours fluctuant. Il s’agit
de la partie de la criminalité qui échappe à la connaissance et qui n’est donc pas comptabilisée. Par rapport au
chiffre noir, il faut distinguer 3 niveaux de décalages :
- Le premier niveau est constitué par le décalage entre la criminalité réelle, c.-à-d. celle effectivement commise,
et la criminalité connue c.-à-d. celle qui arrive à la connaissance des autorités. Ce décalage peut résulter soit du
comportement de l'auteur de l'infraction, soit de la victime, soit du témoin ou à la nature de l’infraction :
- Auteur : professionnel ou non ;
- Victime : lorsqu’elle ne porte pas plainte, l’infraction n’est pas connue par les autorités ;
- Témoin : crainte de représailles, ou à cause de son individualisme, il ne témoigne pas ;
- Nature de l’infraction : certaines sont dénoncées systématiquement, d’autres sont difficiles à démasquer
(exemple : avortement).
- Le deuxième niveau est constitué par le décalage entre la criminalité connue et la criminalité apparente, c'est-
à-dire celle qui apparaît dans les statistiques des autorités de poursuite. Tout ce qui est connu n’est pas
forcément comptabilisé. Ce décalage peut trouver sa cause dans plusieurs raisons, notamment à travers :
- la corruption : infraction connue de l’agent mais ce dernier ne la communique pas aux autorités
publiques ;
- le principe de l'opportunité des poursuites dont dispose le parquet : lorsque le parquet reçoit une
plainte, il doit apprécier si elle doit être poursuivie ou non, celles qui ne le sont pas n’apparaissent donc
pas dans les statistiques ;
- Le classement sans suite : conséquence du principe précédent ;
- Le non lieu : si l’affaire parvient au juge de l’instruction en cas de manque de preuve, il peut prononcer
le non lieu. Donc il n’y a pas besoin d’envoyer l’affaire au juge de jugement.
- Le troisième niveau est constitué par le décalage entre la criminalité apparente et la criminalité officielle,
c'est-à-dire celle qui a fait l'objet de condamnation par les tribunaux. Tout ce qui est connu n’est pas forcement
condamné. Différentes raisons peuvent justifier ce décalage, notamment l'extinction de l'action publique pour
différentes causes dont principalement la prescription, la légitime défense, l'excuse absolutoire ou encore pour
l'absence de preuves.
Par rapport toujours à ce dernier niveau, il est nécessaire de souligner la subdivision concernant la criminalité
officielle entre les administrations pénitentiaires et les tribunaux. Il faut aussi remarquer le décalage qui existe
entre les statistiques des tribunaux et celles de l'administration pénitentiaire. Toutes les personnes condamnées
par les tribunaux ne sont pas forcément comptabilisées sur les registres des prisons, c'est le cas notamment des
personnes condamnées à l'amende, avec sursis ou encore par contumace (décision judiciaire prononcée en
l’absence du condamné qui est en fuite).
L’écart entre la réalité criminelle et l’apparence criminelle ne fait que se creuser en fonction de ces trois niveaux
du chiffre noir. Ainsi les statistiques criminelles ne donnent qu’une image approximative de la criminalité.
2) L'enquête sociale
Dans le cadre de l'enquête sociale, la criminologie utilise des méthodes relevant des sciences sociales et tout
spécialement deux procédés, à savoir :
- Le questionnaire : il repose sur l’insertion d'un certain nombre de questions sur un formulaire, auxquelles il
faut répondre par oui ou par non. Le questionnaire présente l'avantage d'être soumis à plusieurs catégories de
personnes, mais il a par contre l'inconvénient de ne pouvoir être soumis à des personnes analphabètes. En outre,
les réponses formulées ne sont pas toujours une source de fiabilité.
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- L'interview : ce procédé permet de s'adresser directement aux personnes interrogées sur un sujet déterminé. Il
peut concerner même des personnes analphabètes et n’est pas fermé, mais lui aussi présente un problème de
fiabilité. En outre, il faut obtenir l’autorisation de l’administration pénitentiaire pour interroger les détenus et
soumettre le formulaire pour approbation de l’administration. Le problème est que l’interviewer ne pourra pas
choisir lui-même les personnes à interviewer et n’a pas la liberté d’être seul avec l’interviewé.
Ces instruments sont toujours probabilistes sur la vérité ou la véracité des réponses.
II. Les méthodes de la criminologie clinique
La criminologie clinique ne s'occupe pas de formuler des théories générales, mais d'examiner une personnalité
criminelle déterminée afin de se prononcer sur sa dangerosité criminelle. Cet examen se fait par une équipe
criminologique qui se compose au moins de 4 spécialistes dont :
- un médecin généraliste : fait un examen physique et morphologique extrême (interne et externe) du corps de
la personne pour voir s’il y a des anomalies physiques (ex. : une déformation qui peut être due à un
dérèglement hormonal).
- un psychologue : examine les facultés mentales et psychiques (caractère, capacité, perception) et se fait par
des tests pour déterminer ces facultés dans le but de comprendre comment le criminel perçoit le monde extérieur.
- un psychiatre : s’assure de la santé mentale de la personne qui sera jugée, c’est-à-dire de la jouissance de ses
facultés mentales. Il ne faut pas confondre l’examen d’un psychiatre avec l’expertise médicale psychiatrique
sollicitée par le tribunal dans le cadre de détermination de la responsabilité et l’imputabilité.
- une assistante sociale : étudie l’environnement social de la personne. Elle va collecter toutes les informations
d’ordre social telles que l’enfance du criminel, son environnement, son éducation, son entourage, famille…
Cette étude se fait dans le cadre de ce qu'on qualifie de « Dossier de personnalité », en général c’est pour les
délinquants les plus dangereux. Celui-ci peut être commandé par différentes autorités judiciaires : procureur,
juge d'instruction, juge de jugement. Le dossier de personnalité vise à éclairer les autorités judiciaires sur le
profil du criminel à juger. Il s'agit d'apprécier l'état dangereux du criminel examiné et sa capacité future à nuire.
Cet éclairage se fait à travers le rapport général de l'équipe criminologique qui synthétise en quelque sorte les
différents examens opérés qui constituent le diagnostic de l’état dangereux. L'équipe criminologique donne
également son avis sur les risques de récidive ainsi que sur les chances de réinsertion, à travers un pronostic, et
dresse un programme de traitement qu'il propose aux autorités judiciaires. Pour que le programme soit mis en
application, il doit être accepté par le tribunal.
Cette équipe va discuter du diagnostic établi dont l’objectif est de détecter la dangerosité de la personne dans le
sens de la répétition et de l’évolution de ses actes. On va donc se prononcer sur la question de la récidive ou
une sorte d’accentuation du comportement criminel.
Il existe 4 types de dangerosité :
- dangerosité au sens pénal : risque élevé de récidive.
- dangerosité au sens psychiatrique : liée à certaines formes de maladies qui sont potentiellement dangereuses et
susceptibles de pousser la personne à commettre des crimes.
- dangerosité criminelle : elle va regrouper toutes les dangerosités vues antérieurement.
- dangerosité dans l’espace pénitentiaire (criminel et carcéral) : les personnes dans cette espace sont des
personnes à haut risque ayant plus de potentiel criminel. Les criminels ne sont pas traités de la même manière
selon le degré de dangerosité et d’agressivité du criminel dans l’espace carcéral.

L'autorité judiciaire peut, à la lumière du dossier de personnalité, imposer une cure de désintoxication ou toute
autre forme de thérapie par le biais de l'injonction de soins. Il est à signaler que le droit français a institué
depuis la loi du 25 janvier 2008 la mesure de rétention de sûreté qui permet de retenir des criminels dangereux
même après avoir purgé leurs peines, si l'examen criminologique révèle la persistance de l'état dangereux et le
risque du passage à l'acte criminel.
Dans le droit pénal marocain, théoriquement le dossier de personnalité se trouve mentionné dans le CPP (art 87
et 88), mais malheureusement, sur le plan pratique, il est systématiquement ignoré par la justice pénale
8
marocaine. Pour des raisons économiques, ces procédures ne se font pas, bien que le droit marocain prévoit la
possibilité d’écarter la poursuite si le toxicomane accepte de se soumettre à des cures de désintoxication.
Le dossier de personnalité n’est pas systématique, plus l’état du criminel est dangereux, plus le dossier est
demandé.
Objectif du dossier : faire le diagnostic de l’état dangereux et de la capacité criminelle future du criminel pour
composer un programme de traitement.
Définitions :
- Anthropologie criminelle : étude de l’être humain dans sa dimens° criminelle à travers son aspect biologique et
psychique/psychologique. Elle relève de la criminologie.
- Anthropologie judiciaire : étude du corps humain pour l’identification judiciaire spécialement des victimes.
Elle relève de la criminalistique.
- Intérêts des peines alternatives : c’est pour éviter la surpopulation carcérale, la détention préventive, les
aspects négatifs des PPL.
- A quoi sert l’expertise psychiatrique dans le cadre médico-légal ? : elle permet d’établir et de vérifier si la
personne est irresponsable pénalement (en cas d’aliénation mentale), c’est une application de la médecine
légale.
- Qu’est ce qu’une preuve scientifique ? : preuve établie par la police scientifique au profit de la justice pénale
ou par la médecine légale.

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Chapitre II : Le courant biologique
Section 1 : La théorie de Lombroso sur le criminel-né
Le médecin italien Cesare Lombroso (1835 - 1909) est bien connu par sa théorie sur le criminel par naissance
ou criminel-né. Ce qui le place au cœur de l'école constitutionnaliste, expliquant le phénomène criminel par
rapport à la constitution physique ou psychique du délinquant. Le darwinisme, le positivisme (observation puis
théorisation) et la phrénologie (étude du crâne, de l’influence de sa forme sur le comportement) ont largement
guidé la pensée de Lombroso. De par son expérience en tant que médecin légiste pour l'armée et
l'administration pénitentiaire italienne et à travers les autopsies qu'il avait pratiquées, il a eu la conviction que la
criminalité n'est pas acquise mais qu'elle est inhérente à certaines personnes de par leur naissance.
Cette hypothèse basée sur la constitution physique du délinquant a été construite à partir des nombreuses
observations sur les corps des criminels qui ont été autopsiés par lui. En constatant certains signes sur leurs
corps, il a estimé qu'il s'agit là de stigmates d'atavisme et de dégénérescence, c'est-à-dire en quelque sorte d'une
régression vers l'homme primitif et d'une résurgence de l'homme des cavernes.
Pour Lombroso, le type criminel est un individu atavique et anormal commettant des forfaits (= crimes commis
avec audace) par nécessité biologique. Il présente certains traits anatomiques (forte mâchoire, arcades
sourcilières proéminentes), psychologiques (insensibilité à la douleur…) et sociaux (tatouages, argot…) qui le
rapprochent du sauvage. Ils ont donc considéré qu’il y avait une approche de l’homme avec les singes et qui
pourrait porter ces stigmates de sauvagerie. Il faut dire que Lombroso a essayé de comprendre le comportement
criminel à l’aide de sa formation de médecin. Il considère que les signes d’atavisme et de dégénérescence sont
en quelque sorte les symptômes de la pathologie d’un criminel.
Cette théorie, qui relève d'une criminologie qualifiée de corporelle expliquant le comportement criminel par la
constitution physique ou psychique du criminel, a soulevé plusieurs critiques que ce soit sur le plan du droit
pénal ou sur le plan de la criminologie.
Ainsi, sur le plan du droit pénal, on estime que la théorie de Lombroso a un caractère foncièrement
déterministe. Ce caractère heurte, d'une part, le principe du libre-arbitre sur lequel se trouve fondée la
responsabilité pénale, c’est-à-dire qu’on tranche déjà que telle ou telle personne est criminelle sans qu’il n’y ait
la présence de l’élément moral, et peut, d'autre part, entraîner une intervention ante-delictum de la part de la
société à l’encontre du criminel potentiel, c’est-à-dire que la personne se trouve condamnée avant même la
commission du crime sans présence de l’élément matériel.
Sur le plan de la criminologie, en ce qui concerne le fond, on observe que les études de Lombroso se sont
limitées aux hommes et abstraction a été faite aux cas féminins. On observe également l'absence d'une prise en
considération des facteurs découlant du milieu social. Et enfin, l’homme primitif n’est sauvage que parce qu’il
se trouve dans un milieu hostile. Mais une personne peut bien être criminelle sachant qu’elle est civilisée et vit
dans environnement civilisé.
En ce qui concerne la forme, on a reproché à Lombroso l’absence de recours aux groupes de comparaison : on
a relevé que les signes invoqués par Lombroso, en ce qui concerne les criminels, peuvent également être
constatés sur des non-criminels. En effet, la forme ne répond pas au phénomène criminel puisqu’une étude sur
des étudiants d’Oxford a démontré que ces même étudiants avaient les même formes que des criminels.
Par conséquent, la théorie du criminel-né n'est pas défendable scientifiquement parlant, mais Lombroso a eu le
mérite -au moins- d'attirer l'attention sur la possibilité d'aborder la criminalité sous un angle scientifique. La
théorie n’a donc qu’une valeur historique et non une valeur scientifique.

Section 2 : Les hypothèses génétiques


Des explications ont été avancées par certains criminologues sur la base des gènes qui composent le tissu
cellulaire. Il s'agit essentiellement de deux hypothèses.
I. L'hypothèse de la corrélation entre l’hérédité et la criminalité
Dans le domaine de l'hérédité, les travaux de Grégoire Mendel (1822 - 1884) font référence en matière de
botanique. Celui-ci est bien célèbre à travers ses expériences d'hybridation sur différentes plantes et spécialement
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les petits pois. A partir de ces hybridations, Mendel a dégagé les principes s’imposant dans le domaine de
l’hérédité, notamment les proportions de présence du caractère récessif et du caractère dominant. Aujourd’hui,
les lois de Mendel s'imposent à la communauté scientifique car non seulement elles sont valables en matière de
botanique, mais elles étaient transposées également dans le domaine de l'hérédité animale et humaine.
Si aujourd'hui ces règles sont indiscutables sur le plan génétique, il n'en va pas de même en ce qui concerne
l'hérédité en matière de caractère. Car certains criminologues ont été tentés de transposer les règles de Mendel
en ce qui concerne la transmission de la criminalité des parents aux enfants. Seulement, il faut observer que ce
qui est valable sur le plan génétique peut ne pas être valable sur le plan comportemental. C'est pourquoi
plusieurs tentatives de certains criminologues ont été vouées à l'échec.
Aujourd'hui, en ce qui concerne la question de l'hérédité dans sa corrélation avec la criminalité, on se réfère
essentiellement à deux pistes :
- La première piste est celle de l'arbre généalogique où certains criminologues ont essayé de recenser sur
plusieurs générations la descendance d'un criminel notoire déterminé (Kalikak par exemple), pour dégager le
nombre plus ou moins grand de descendants qui ont révélé un penchant criminel. On voulait affirmer que “tel
parent, tel enfant”, sachant qu’il y a beaucoup de paramètres qui entrent en jeu en criminalité du terrain
familial, du cadre social et environnemental.
- La deuxième piste est celle des jumeaux, car quoi de mieux que les jumeaux pour démontrer l'influence de
l'hérédité sur la criminalité. Seulement, il y a deux types de jumeaux, les monozygotes qui proviennent d'un
même ovule, et les dizygotes qui sont issus de deux ovules. Or, la proportion de ressemblance et de
dissemblance n'est pas la même. Ainsi, la ressemblance peut atteindre jusqu'à 72 % dans les jumeaux
monozygotes, alors qu'elle ne dépasse pas les 38 % en ce qui concerne les dizygotes.
II. L'hypothèse des aberrations chromosomiques
La cellule humaine contient 46 chromosomes qui se présentent sous forme de couplet, ce qui donne 23 paires.
On distingue 22 paires qui sont qualifiées d'autosomes, elles sont responsables de la production des traits
génétiques des parents. Par contre la 23e paire est qualifiée de gonosome, elle détermine le sexe de l'enfant, s'il
est mâle sous forme (y) ou femelle sous forme de (x).
Toutes les cellules contiennent 46 chromosomes, à l'exception des gamètes (les cellules de reproduction), à
savoir les spermatozoïdes du côté des hommes et les ovules du côté des femmes. Ainsi, dans le processus de
reproduction, le fœtus reçoit 23 chromosomes du côté du père et 23 chromosomes du côté de la mère. C'est à ce
niveau qu'un accident génétique peut survenir et entraîner une aberration chromosomique.
On peut dire que les aberrations qui touchent les autosomes n'intéressent pas particulièrement les criminologues.
Le plus souvent on rencontre à ce niveau la trisomie 21 ou syndrome de Down, qui s'exprime à travers le
phénomène du mongolisme. Par contre, les aberrations qui touchent le gonosome, spécialement par excès
retiennent l'attention des criminologues. Deux formes particulières ont fait l'objet des études criminologiques :
1) L'aberration (xxy), elle a des retombées sur le plan physique et sur le plan psychique. Ainsi physiquement,
ces personnes sont déterminées génétiquement en tant que mâles, mais leurs corps tendent vers la féminité. On
remarque chez eux des hanches quasiment féminines, une absence de pilosité, ainsi que de la stérilité. Sur le
plan criminologique, les porteurs de cette aberration ont tendance à commettre des infractions à thématique
sexuelle telles que la pédophilie, l'homosexualité.
2) L'aberration (xyy), elle peut aussi avoir des répercussions sur le plan physique et sur le plan psychique.
Physiquement, il s'agit d'hommes mais avec un excès de masculinité. Ces personnes se distinguent par leur
grande taille et par une masculinité bien prononcée dans leur action. Sur le plan criminologique, les porteurs de
cette aberration ont tendance à commettre des infractions violentes exprimant une certaine agressivité, telles
que les coups et blessures, les homicides et les destructions.
Les aberrations chromosomiques permettent d'expliquer à partir de facteurs génétiques le comportement
criminel. Mais il faut prendre cette piste avec une certaine relativité, car tous ceux qui sont porteurs de ces
aberrations ne deviennent pas forcément des criminels. En outre, les porteurs de ces aberrations ne représentent
qu'une infime partie sur l'ensemble des criminels qui, dans leur majorité, ne présentent pas cette forme de tare
physique.
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Section 3 : L'hypothèse des troubles hormonaux
Les hormones sont des substances déversées dans le sang par ce qu'on appelle les glandes endocrines. Les
hormones sont un facteur important dans l'équilibre physique et psychique. Les glandes endocrines sont :
- l’hypophyse : est derrière le crâne et a une taille de pois chiche mais qui est très importante. Elle ne sécrète
pas moins de 16 hormones dont l’hormone de croissance ;
- la thyroïde : elles sont tout aussi vitale parce qu’elle participe à la croissance et est importante pour le système
nerveux et le métabolisme.
- les surrénales : les glandes qui sont sur les reins ;
- les îlots du Pancréas, les testicules et les ovaires.
Les troubles hormonaux peuvent résulter de certaines perturbations touchant le fonctionnement des glandes
endocrines en ce qui concerne les sécrétions hormonales.
Le déséquilibre hormonal peut s'exprimer sous forme d'hypersécrétion, c'est-à-dire un excès de sécrétion ou
bien sous forme d'hyposécrétion, c'est-à-dire un déficit de sécrétion. Si on prend, à titre d'exemple l'hypophyse,
l'hypersécrétion peut entraîner une croissance excessive de la taille, une certaine excitation et impulsivité. Par
contre en cas d'hyposécrétion, cela risque d'entraîner une insuffisance de la croissance de la taille et une
certaine apathie psychique concernant l'activité. De même, en cas de déséquilibre dans le fonctionnement des
testicules en ce qui concerne les sécrétions hormonales, notamment la testostérone, cela risque d'entraîner des
appétits sexuels quelque peu excessifs.
Sur un autre plan, les criminologues observent, en ce qui concerne la criminalité féminine, une certaine
corrélation entre le comportement criminel et les périodes de sécrétions hormonales entraînant des
modifications dans le corps et le psychisme féminin telles que la période de grossesse, des règles ou encore
celle de ménopause.
Ces troubles hormonaux pouvant être à l’origine de certains comportements criminels peuvent justifier, dans le
cadre d’un dossier de personnalité, un programme de traitement chimiothérapique, voire une castration
chimique en ce qui concerne, par exemple, des pédophiles multirécidivistes.
Donc le point commun entre hérédité, génétique, et troubles hormonaux : anormalité du criminel dans sa
constitution physique.

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Chapitre III Le courant psychiatrique
Le courant psychiatrique s'exprime à travers une branche particulière qui s'appelle la psychiatrie criminelle.
Celle-ci s'intéresse, en premier lieu, à la relation qui existe entre certaines formes de maladies mentales et le
comportement criminel. En deuxième lieu, elle permet de déterminer le degré de responsabilité de certains
criminels en fonction de la nature de leurs maladies. En troisième lieu, elle permet de donner un aperçu sur la
classification des maladies mentales et de donner aux magistrats un minimum de connaissances psychiatriques
afin d'éviter un dialogue de sourds entre le psychiatre et le juge, du fait que le premier utilise un jargon
difficilement accessible au second.
Les questions inhérentes à l’aliénation mentale et à ses conséquences sur la responsabilité pénale et sur la
sanction sont traitées dans les articles 134, 135 et 136 du code pénal, ainsi que dans les articles 76, 77, 78 et 79
(mesures de sûreté) du même code.
A propos de la classification des maladies mentales, on peut partir d'un distinguo fondamental de deux grandes
catégories, à savoir : les Maladies Mentales Organiques et les Maladies Mentales Fonctionnelles.
3 hypothèses : articles 134, 135, 136
- 1re hypothèse : l’article 134 : troubles mentaux au moment de l’acte criminel, donc pas de discernement.
L’individu est totalement irresponsable.
- 2e hypothèse : l’article 135 : affaiblissement des facultés mentales, le discernement n’est pas absent mais il est
imparfait. L’individu est donc partiellement irresponsable. Il sera puni mais en prenant compte sa situation
(mesure de sûreté : internement dans un hôpital psychiatrique (HP).
Cet article comprend deux sous hypothèses :
• soit la personne n’est plus malade mentalement le jour du jugement, on prononce donc la peine.
• soit elle est encore malade, donc avant d’exécuter la peine, on l’interne dans un HP.
- 3e hypothèse : l’article 136 : au moment de l’acte, après expertise psychiatrique, la personne est normale et a
donc le discernement. Pour la juridiction, elle est donc totalement responsable. Mais si au moment du jugement,
elle devient malade mentale, la juridiction doit surseoir à statuer, donc reporter le jugement car la personne ne
peut pas se défendre elle sera donc internée dans un HP pour être traitée. Une fois traitée, on prononce la peine.
- 4e hypothèse : l’art. 137 : la personne sous l’état d'ivresse, d’états passionnels ou émotifs ou ceux résultant de
l'emploi volontaire de substances stupéfiantes ne peuvent, en aucun cas, exclure ou diminuer sa responsabilité.
Ceci en théorie, en pratique pour les personnes irresponsables pénalement, faute de place dans les HP, elles sont
mises en prison.
Rappelons que les psychiatres se réfèrent aux DSM pour déterminer les maladies mentales.

Section 1: Les maladies mentales organiques (MMO)


Les MMO, sont des maladies qui affectent l’organe par une atteinte physique déterminée. Il y a, à la base, une
lésion du cerveau ou du système nerveux. La lésion est palpable physiologiquement parlant.
A l’intérieur des MMO, on peut distinguer entre autres deux types de maladies qui illustrent cette catégorie. On
fera la connaissance dans un premier temps des arriérations mentales et, dans un second temps, on traitera de la
démence au sens médical.
I. Les arriérations mentales : DIC
Elles résultent essentiellement de facteurs congénitaux qui affaiblissent les capacités intellectuelles de
l’individu qui se trouve atteint de Déficit Intellectuel Congénital, appelé également Oligophrénie.
Cette personne aurait souffert, durant la grossesse, d'une perturbation dans le processus du développement
cérébral qui peut être causée par plusieurs facteurs. Le rôle de la mère est déterminant en cas d’absorption de
certains médicaments, de l’alcool ou du tabac, ou du fait de son exposition aux rayons X, ou du fait qu’elle soit
porteuse de maladies sexuellement transmissibles, telles que la rubéole, la syphilis ou le sida.
Les arriérations mentales sont mesurées au moyen du quotient d’intelligence (QI) qui établit la relation entre
l’âge physique et l’âge mental grâce aux différents tests psychologiques.
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Les différents degrés d’arriération mentale sont exprimés par le tableau suivant :
Catégories d’arriération Âge mental Quotient d’intelligence
Idiot Jusqu’à 2 ans De 0 à 19
Imbécile De 3 à 6 ans De 20 à 49
Débile De 7 à 10 ans De 50 à 69
Faible d’esprit De 11 à 12 ans De 70 à 89
Normal Au-delà de 12 ans 90 et plus

Du point de vue criminologique et pénal, l’arriéré mental atteint d’idiotie à un âge mental qui correspond à
celui d’un enfant de 2 ans. L’idiot est incapable de comprendre la signification de l’interdit pénal et son
irresponsabilité ne fait pas de doute.
L’imbécile ayant l’âge mental d’un enfant de 3 à 6 ans n’est capable de comprendre que certains interdits
graves tel que l’homicide.
Quant au débile et au simple d’esprit, ils peuvent saisir la plupart des interdits pénaux. Mais étant donné que
leur âge mental ne dépasse pas 12 ans, ce qui correspond à l'âge de minorité pénale où la loi institue une
présomption irréfragable d'irresponsabilité, il serait peu probable qu'ils soient responsabilisés.
Mais il faut signaler que l’arriération mentale n’est pas en soi un facteur criminogène. Par contre des
instigateurs qui jouissent parfaitement de leurs capacités mentales peuvent inciter ces personnes souffrant
d'arriération mentale pour commettre certains crimes. Il faut noter que si l'attardé mental échappe à la
responsabilité, il n'en est pas de même pour l'instigateur. L'article 131 du code pénal est clair à cet égard,
lorsqu'il affirme « Celui qui a déterminé une personne non punissable en raison d'une condition ou d'une
qualité personnelle, à commettre une infraction, est passible des peines réprimant l'infraction commise par
cette personne ».
II. La démence au sens médical
Deux formes s’expriment dans cette démence :
- La première forme de démence ne correspond pas à un âge déterminé et les sujets atteints de cette maladie
peuvent se recruter dans les différentes tranches d’âge. Une lésion cérébrale ou un traumatisme crânien peuvent
être à l’origine de cette maladie.
Les symptômes de la maladie se manifestent par des troubles de caractère, un affaiblissement psychique
progressif caractérisé par une altération des fonctions intellectuelles, morales et affectives et par une
perturbation des conduites sociales. Le sujet est turbulent, impulsif et présente des stéréotypies (notamment des
tics).
Ne jouissant pas de discernement et manquant de perception des interdits légaux, le dément peut être conduit à
commettre un crime étrange, par exemple incendier la maison. L’action de la personne atteinte de démence
reste en principe imprévisible.
- La deuxième forme qualifiée démence sénile, est due à la dégénérescence cérébrale et se manifeste, en
général, après 70 ans. Généralement, on observe une accentuation des signes du vieillissement, diminution des
possibilités d’adaptation du sujet aux situations nouvelles, grande fatigabilité intellectuelle... Le sujet avec une
humeur changeante se montre tantôt irritable tantôt dépressif et parfois même agressif.
Sur le plan criminologique, on signale la relation de cette forme de démence avec des infractions sexuelles
telles que l’exhibitionnisme et la pédophilie. La maladie d’Alzheimer est considérée également comme une
variante de la démence. Elle se caractérise essentiellement par une dégradation de la mémoire et une perte du
sens de l’orientation.
Section 2: Les maladies mentales fonctionnelles (MMF)
Les MMF sont celles qui révèlent une perturbation au niveau du fonctionnement du psychisme, c’est-à-dire un
certain dysfonctionnement. Elles regroupent trois grandes catégories : les psychoses, les névroses et les
psychopathies.

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I. Les psychoses
Les psychoses sont des maladies mentales caractérisées par une atteinte profonde de la personnalité, se
manifestant notamment par des troubles de la sphère cognitive et de la sphère affective. Dans les psychoses, le
sujet n’a pas conscience de sa morbidité (c’est-à-dire sa maladie) et ne peut plus s’adapter à la vie sociale et à la
réalité en général.
Les psychoses perturbent l’aspect professionnel, familial et personnel à un tel point que l’hospitalisation de
celui-ci devient nécessaire, du fait que ses réactions deviennent dangereuses pour lui-même et l’entourage.
C’est ce qu’on appelle le caractère invalidant. Il est à noter que dans sa vie relationnelle, dans ses propos et ses
sentiments, le psychotique reste incompris de son entourage.
Il faut enfin signaler 5 caractéristiques qui ont valeur de symptômes pour les psychotiques. Ainsi, on relève
chez ces patients :
a) des troubles de langage et de la pensée : la personne n’exprime pas sa pensée de manière cohérente (sphère
cognitive) ;
b) des troubles d’affectivité : démesurée ou inadaptée, la réaction de la personne est inattendue. Elle ne cadre
pas avec la situation ou l’événement (ex. : pleurer ou éclater de rire…) ;
c) le retrait social : ensemble d’attitudes qui peuvent prendre différentes formes (ex. : se claquemurer, ne pas
aller au travail…). La personne se réfugie dans un univers hermétique, incommunicable et incompréhensible.
Elle peut même être dans une régression au stade de l’enfance ou avoir un comportement d’enfant.
d) les délires : idées auxquelles s’accroche une personne et croyant que c’est la vérité (ex. : idée délirante). Les
délires se manifestent très fréquemment chez les paranoïas.
e) les hallucinations : Le psychotique a des hallucinations visuelles et/ou auditives. C’est difficile pour lui de
montrer que ses hallucinations ne sont pas une réalité. C’est l’imaginaire maladie du psychotique.
Nous faisons ici l'étude de 3 maladies très représentatives des psychoses, qui sont respectivement : la psychose
maniaco-dépressive, la schizophrénie et la paranoïa.
1) La psychose maniaco-dépressive
Dans cette forme de maladie, le sujet est l’objet d’une alternance d’états psychiques contradictoires, allant de la
mélancolie et de la dépression, à la manie et la surexcitation. Les psychoses maniaco-dépressives ou troubles
bipolaire ont pour terrain la cyclothymie (alternance des cycles) sur laquelle se greffent des excès d’excitation
et de dépression. Les premiers sont bien gênants pour l’entourage (coups et blessures) et les seconds peuvent
exposer au risque de suicide ou d’homicide (ex. : une mère qui égorge ses enfants à cause de la mélancolie et qui croit
qu’il faut mettre fin à leur ainsi qu’à la sienne).
Sur le plan criminologique, cette catégorie de patients, lorsqu’elle ne commet pas des actes de suicide, peut se
trouver impliquée dans un meurtre des membres les plus proches de la famille.
2) La schizophrénie : c’est la psychose par excellence (schizo : diviser ; phrénie : état d’esprit)
La schizophrénie appelée également démence précoce, puisqu’elle fait son apparition en général entre 18 et 25
ans. La schizophrénie peut être définie comme un état pathologique caractérisé par une déstructuration ou
dissociation de la personnalité, qui est responsable d’une perte de contact avec le réel et d’une inadaptation
progressive au milieu.
Tous les symptômes des psychoses se vérifient chez le schizophrène qui s’enferme dans un univers
hermétique, incompréhensible et incommunicable, à côté des délires et des hallucinations mal systématisées.
Le sujet peut manifester des impulsions auto-agressives ou hétéro-agressives, ainsi que de gros troubles
psychomoteurs.
Sur le plan criminologique, les schizophrènes présentent un grand potentiel de dangerosité. Des psychiatres
estiment que 40 % des psychotiques meurtriers sont des schizophrènes qui commettent le plus souvent des
meurtres apparemment immotivés. Les schizophrènes sont irresponsables pénalement pour manque de
discernement.

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3) La paranoïa
Elle peut être définie comme une psychose chronique caractérisée par un délire systématisé, hallucinatoire et
interprétatif. Le sujet paranoïaque démontre un accord précaire avec la réalité, ses relations avec autrui sont
gravement altérées à cause de sa méfiance, sa susceptibilité, ses erreurs de jugement, sa mégalomanie ou à
cause d’un sentiment de persécution à peu près constant. Aujourd’hui, la paranoïa est considérée comme une
forme de schizophrénie appelée « schizophrénie paranoïde » reflétant aussi le comportement paranoïaque.
Selon Kraeplin, le paranoïaque raisonne et n’a pas de troubles de langages et de la pensée, c’est une sorte de
folie raisonnante dont la forme la plus ridicule est la mégalomanie (la folie des grandeurs). Elle se caractérise
par une multitude de délires et les psychiatres distinguent en général 4 formes de paranoïa :
a) délires passionnels : peut se manifester par de la jalousie extrême, aiguë ou par l’érotomanie.
b) délires de revendication : croît qu’il a un des droits et qu’il est dépossédé de ses droits. Il est donc accusateur
et intente des actions en justice alors qu’il n’a aucun droit.
c) délires d’interprétation
d) délires de persécution : la personne se croit persécutée (ex. : les gens ne m’aiment pas, m'ensorcellent, etc.). Tout
cela rend le paranoïaque interprétatif. Il a des rapports conflictuels et ça se termine souvent par des drames.
C’est le délire le plus dangereux de la paranoïa.
Sur le plan criminologique, ce type de psychose a un grand potentiel criminel. Il faut craindre, de la part des
paranoïaques, surtout des crimes justiciers ou des actes de terrorisme.
II. Les névroses
A l’inverse des psychoses, les névroses sont des troubles mentaux dont le sujet a douloureusement conscience
en percevant le caractère pathologique mais qu’il ne peut maîtriser. La maladie du névrosé n’entraîne pas un
désordre dans ses opinions intellectuelles mais perturbe plutôt la personnalité. C’est pour ça qu’on qualifie les
névroses de maladies subjectives car il y a une anomalie dans le comportement qui peut être grandement affecté
sans provoquer un désordre mental comme les psychoses. La personnalité n’est pas désorganisée, chez le
névrosé toujours.
1) Les phobies
La phobie constitue la principale forme des névroses d’angoisse et peut être définie comme une affection
mentale caractérisée par une peur intense, irraisonnée et tenace éprouvée à l’égard de certaines choses ou de
certaines situations qui ne justifient pas par elles-mêmes une telle réaction. C’est au centre de cette phobie qu’il
y a la peur qui deviendra une maladie ou aura un caractère morbide.
Ces craintes morbides sont extrêmement variées, les psychiatres distinguent entre autres :
a) les phobies de situation : la claustrophobie (peur des endroits fermés) ; l’agoraphobie (peur des grands
espaces ouverts) ; l’acrophobie (peur des hauteurs) ;
b) les phobies des moyens de transport : aviophobie (peur de monter l’avion) ; la cyclophobie (peur des deux
roues) ;
c) les phobies de certains animaux ou de certains insectes (zoophobies) ;
d) les phobies limites : peur du sang…
La phobie est une manifestation de la névrose d’angoisse.
2) La névrose scrupuleuse-obsessionnelle
C’est une affection mentale caractérisée par l’apparition dans le champ de la conscience de pensées, de
sentiments ou de conduites qui tendent à s’imposer au sujet, malgré tous ses efforts pour les chasser. Le terme
obsession met l’accent sur le caractère insistant des pensées qui occupent la conscience du sujet, et que celui-ci
reconnaît comme absurdes et anormales. Il s’agit en fait d’un trouble obsessionnel compulsif (TOC).
L’élément parasite peut être un doute, un scrupule ou le désir d’accomplir un acte ridicule, agressif ou sacrilège
ou la peur d’une action ou d’un objet présent non pas matériellement, comme dans les phobies, mais en
pensées. Le sujet, pour apaiser sa tension, peut avoir recours à des stratagèmes conjuratoires et/ou dérisoires.
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3) L’hystérie
L’hystérie est une névrose d’expression aux manifestations très variées traduisant en symptômes corporels des
idées, des représentations ou des sentiments inconscients. Elle se présente sous forme d'une expression
psychosomatique. Cliniquement, l’hystérie se traduit par des manifestations psychosomatiques relativement
durables :
a) troubles moteurs : touchent la motricité du corps, une forme de blocage (ex. : choc du décès de toute sa famille
dans un accident de route ).
b) troubles sensoriels : touchent les 5 sens (ex. : mutisme volontaire, cécité hystérique…).
c) troubles neuro-végétatifs : interaction entre système nerveux et végétation ce qui affecte le fonctionnement
de l’estomac de l’évacuation (ex. : personne énervée qui perd l’appétit ou déprimée qui mange excessivement).
d) troubles mentaux : amnésie hystérique, somnambulisme, dédoublement de la personnalité.
III. Les psychopathies
On désigne sous cette appellation « toute forme d’organisation de la personnalité, se traduisant par un
mauvais contrôle émotionnel des impulsions et par des conduites asociales (non intégrées à la société) ou
antisociales (contre la société) dues à un besoin irrésistible de satisfaire immédiatement ses désirs ».
Il s’agit de la maladie mentale qui intéresse le plus la criminologie. Et si le psychopathe est un inadapté social,
la réciproque n’est pas vraie. Le psychopathe est quelqu’un qui ne domine pas ses passions et se laisse entraîner
par elles et ses désirs. Trois formes de psychopathie intéressent notre étude : la délinquance chronique, la
toxicomanie et les perversions sexuelles.
1) La délinquance chronique
Au sens de la psychiatrie criminelle, on entend par délinquance chronique « des formes de récidive où la
conduite criminelle se fait à cause de l’impulsion psychopathique ». Le comportement du criminel est dû à une
incapacité de contrôler ses impulsions, ce qui cause la répétition d’actes criminels (récidive). Ici, la délinquance
chronique est dictée par une pathologie.
Par contre, au sens du droit pénal, la délinquance chronique est le choix d’être criminel sans être atteint de
pathologie. Dans ce sens pénal du terme, on retrouve de façon générale quelques constantes, tel que
l’intolérance à la frustration, l’impulsivité et la facilité du passage à l’acte criminel. L’agressivité et la tendance
aux comportements antisociaux et, enfin, l’insensibilité à la répression qui favorise la répétition des conduites
antisociales.
Dans cette catégorie, on peut rencontrer des criminels appartenant le plus souvent à la frange de la criminalité
organisée : bande de malfaiteurs, trafiquants de drogue, trafiquants d'armes ou d'êtres humains et proxénètes. Il
s'agit de délinquants chroniques professionnels qui ont choisi d'adopter un mode de vie criminel. C'est le
modèle de délinquant chronique professionnel. Ce modèle ne peut pas être considéré comme relevant de la
psychopathie, mais plutôt de la criminalité organisée.
Sur le plan individuel, la criminologie s'intéresse à une autre catégorie de délinquants chroniques, à savoir le
modèle délinquant chronique pathologique. Cette catégorie est attirée, en fonction des cas, vers une forme
déterminée de comportement criminel. Les impulsions qui guident le comportement criminel d'un délinquant
chronique psychopathe révèlent son déséquilibre psychique et sa dangerosité criminelle. C’est dans cette
catégorie qu’on range les tueurs en série, les pyromanes, les cleptomanes et les mythomanes.
a) Les tueurs en série (définition, déséquilibre - mise à mort – jouissance sexuelle – narcisso-
sexuel – modus operandi – programme - centre)
Les tueurs en série représentent par excellence le modèle pathologique de la délinquance chronique. Ce sont
des tueurs spéciaux qui ne tuent ni par vengeance ni par passion. Ils ont un fantasme, leur psychologie est assez
spéciale et sont très intelligent. Ces tueurs renvoient une image d’une personne normale vivant en famille. Un
tueur en série tue des profils ou une catégorie spécifique (le plus souvent des femmes ou des enfants). Il cible des
victimes avec qui il n’a aucun lien, puis développe un rituel de mise à mort par un modus operandi, prenant
forme de signature, adopté avec toutes les victimes. Il peut pousser les choses dans les limites de l’abominable
allant jusqu’au cannibalisme, mise en scène ou mutilation du cadavre. En agissant ainsi, cela lui procure une
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satisfaction interne. Par conséquent, la psychologie du tueur en série a un auteur qui est le fantasme pouvant
s’agir de deux paramètres : la jouissance sexuelle (terroriser la victime procure de la jouissance au tueur) et la
domination (prendre du pouvoir sur la victime). Ces assassins tuent passionnément avec des raffinements
macabres, en général, sous l’empire de pulsions sexuelles.
Il en existe deux types de tueurs en série : les tueurs organisées et les tuers désorganisés. On fait intervenir des
psychiatres afin de faire du profilage à partir de la scène de crime afin de trouver le criminel.
Le tueur en série peut également être qualifié de tueur narcisso-sexuel : processus de valorisation de soi à
travers la souffrance de sa victime.
Du fait de l’absence de mobiles ou de liens avec leurs victimes, ils échappent parfois pour plusieurs années à la
police. Et étant donné que 75 % des meurtres en série se trouvent commis aux États-Unis, le FBI a créé le
Centre National d'Analyse de la Criminalité Violente, le N.C.A.V.C composé d’enquêteurs et qui a mit en place
le V.C.A.P (Violent Criminal Apprehension Programme), qui consiste en un système informatique destiné à
collecter et analyser les crimes violents commis sur le territoire américain.
Procédure : en cas de crime de sang, l’enquêteur en fait un rapport détaillé qu’il transmet au centre. Le centre
saisit ces données sur le système. Si elles correspondent à un modus operandi, cela signifie que c’est le même
tueur en série.
Les études de ce centre ont permis de distinguer 3 types de meurtriers à victimes multiples :
Tueur de masse (Mass murderer) - (forme de psychose et non de psychopathie)
C’est le meurtrier qui tue à visage découvert plus de 4 victimes dans un même endroit et lors d’un même
événement dans un laps de temps très court. C’est généralement quelqu’un qui utilise des armes à feu. Ce n’est
donc pas un tueur en série qui tue une seule personne et à des événements et temps séparés et pour des raisons
différentes d’une victime à une autre. Le tueur de masse est donc quelqu’un qui, à un moment donné, a
disjoncté et s’est lancé dans une tuerie en tuant des victimes au hasard et non ciblées. Le tueur de masse est un
psychotique (dossier médical) et non pas un psychopathe. Il est donc irresponsable pénalement alors que le
tueur en série est un psychopathe conscient de ses actes et est donc responsable pénalement car tout est calculé.
i. Tueur compulsif (Spree killer)
Le tueur compulsif, dit également tueur par éclat, commet des meurtres multiples à des endroits différents dans
un laps de temps très court (30 min à 2h). Mais il diffère du tueur en masse par le fait qu’il cible ses victimes et
ne se cache pas. On l’appelle aussi tueur par éclat car il accumule de la colère en lui puis l’éclate de manière
brutale. Ces personnes ont aussi un dossier médical (psychotique).

Le point commun entre ces catégories est qu’ils relèvent des maladies fonctionnelles et qu’ils font plusieurs
victimes.
Le tueur en masse n’est pas un délinquant chronique car il ne tue qu’une seule fois (pas de récidive) alors que le
tueur en série et le tueur compulsif le sont.
Point commun entre tueur de masse et tueur compulsif : Maladies fonctionnelles, plusieurs victimes,
psychotiques, dossier médical, en principe ne sont pas responsables.

Tueur terroriste
Ces tueurs commettent des crimes pour des motifs idéologiques et non pas par dérapage psychique. Ils ne
souffrent donc d’aucun trouble psychique ou mental.
b) Les pyromanes
Ce sont des incendiaires et il existe plusieurs variantes d’incendiaires :
1) Suicide par le feu : la personne qui s’immole par le feu le fait pour des contestations politiques.
2) Homicide par le feu : ils allument le feu sur les biens ou autrui par plaisir et non pas par vengeance.
3) Incendie des propriétés par vengeance : la personne allume le feu dans une maison, usine… une seule fois
pour régler un compte suite à un geste qu’elle considère injuste.
4) Incendie des biens suite à une impulsion pathologique : la personne allume le feu par plaisir et non par
vengeance, cela lui procure un plaisir interne. C’est un profil qui relève de la psychiatrie.
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C’est à l’égard de ce dernier type qu’on parle de pyromanie. Les pyromanes sont attirés par le feu qu’ils
allument par passion. Il s’agit d’un véritable délinquant chronique car son geste répétitif (récidive) qui a un
dossier de personnalité. Le pyromane peut être seul, introverti, vit dans la solitude et souffre d’une certaine
pauvreté dans le relationnel avec les autres, échec de situation familiale et professionnelle, il peut aussi avoir
une amnésie simulée ou réelle. Il essaie de remplacer cette froideur affective avec les flames (ex. : incendie
forêt). Il ne cherche pas forcément à donner la mort mais seulement d’allumer le feu car il y a une tension
interne qui le pousse à allumer ce feu. C’est une sorte de fascination qui provoque une certaine jouissance
interne à la personne allumant le feu.
c) Les cleptomanes : vol pathologique pour des raisons non utilitaires
La cleptomanie est souvent définie comme « le désir irrationnel de voler pour des raisons non utilitaires et
reliées à l’inconscient chez un individu dont les autres aspects de la personnalité sont par ailleurs intactes ».
Elle s’exprime à travers l’impossibilité de résister aux impulsions psychologiques de vol d’objets n’ayant ni
utilité immédiate ni grande valeur monétaire, avec une tension psychique croissante avant de commettre l’acte
et une grande satisfaction et soulagement après sa réalisation. Les cleptomanes souffrent souvent d’angoisse et
de dépression et cherchent à s’en débarrasser par le vol.
L’acte du cleptomane s’accomplit le plus souvent en public, avec le risque d’être pris en flagrant délit, ce qui
augmente l’excitation et montre une recherche inconsciente de la punition pour se déculpabiliser. Les cleptomanes
sont responsables pénalement mais leur situation peut être prise en compte pour une atténuation de la peine.
d) Les mythomanes
La mythomanie peut être définie « comme un mensonge pathologique répétitif exprimé par certains
psychopathes ». 3 catégories :
i. Les profiteurs
Cette catégorie regroupe une grande variété de cas de bovarysme. Le mensonge a des visées utilitaires et
lucratives (escroc, faux médecin, faux mari, faux héritier, sorcier…).
ii. Les vengeurs
Regroupant des mythomanes qui agissent pour régler un compte ou qui visent à nuire à des personnes
déterminées (fausse accusation de vol, de viol, de maltraitance, anonymo-graphie…).
iii. Les ludiques : mentent par amusement
C’est un esprit de jeu, fabriquer un mensonge et faire des prétentions. Les ludiques pervers regroupent une
diversité de typologies :
- Don Juanisme : ce sont des prétentions de séduction. C’est le fait de passer pour un séducteur et raconter ses
relations à son entourage.
- Pathomimie : c’est une simulation de la maladie pour attirer l’attention des autres, la pitié, la compassion,
l’intérêt des autres…
- Colporteurs de rumeurs : ce sont ceux qui lancent et diffusent des mensonges sur personnes politiques, pour
perturber un marché…
- Chefs de sectes : ce sont des personnes qui organisent un mensonge autour d’une idéologie avec un lavage de
cerveau (ex. : en promettant un bonheur plus tard) et qui peut se terminer par des drames.
2) La toxicomanie
Elle peut être définie comme une addiction à certaines substances nocives, qui entraîne une intoxication de
l'organisme. Toutes les addictions ne sont pas des toxicomanies. Les psychiatres ont aussi relevé des addictions
comportementales (ex. : effets similaires aux substances toxiques tels que les jeux de hasard, l’internet, les écrans, le
sexe, les achats compulsifs…). Pour la toxicomanie, il s'agit essentiellement de l'alcoolisme et du mauvais usage
de stupéfiants.
a) L’alcoolisme
L’alcoolisme est le fait de s’imprégner d’alcool dans le cadre d’une dépendance physique et psychique, qui
conditionne à la fois le corps et l'esprit.
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Q : L’alcool est-il un facteur de comportement criminel ? R : Il faut distinguer deux cas :
- L’alcoolique criminel : à cause de son alcoolisme, il bascule vers un comportement criminel. L’alcoolisme le
prédispose à commettre un acte criminel sachant qu’il n’est pas un criminel. L’alcoolisme est donc la cause de
criminalité.
- Le criminel alcoolique : la personne est au départ criminelle et accompagne sa criminalité par l’alcoolisme. Ce
dernier va même l’aider à franchir certains seuils de criminalité.
Dans les deux cas, il y a corrélation entre toxicomanie par alcoolisme et criminalité. Mais c’est le
comportement de l’alcoolique criminel qu’on essaie de comprendre en criminologie.
L’alcoolisme est donc un facteur criminogène (injures, de coups et blessures ou d’homicides, de maltraitance
infantiles, de violence conjugale, d’inceste, d’agressions sexuelles, d’actes incendiaires et de délits d’imprudence) mais
aussi un facteur victimogène (perte de contrôle des émotions, du raisonnement, de sa vision…) car l’alcoolique peut
être victime lui-même. Il est d’abord victime de sa propre intempérance, il peut se faire du mal et commettre un
acte auto-agressif, comme il peut être agressé par autrui : vol, coups et blessures sur sa personne, rixe entre des
buveurs, etc.
L’alcoolique reste responsable pénalement car l’alcoolisme n’est pas une excuse d’irresponsabilité pénale (art
137) mais la sanction pénale doit être accompagnée d’une mesure de sûreté, c.-à-d. le placement judiciaire dans
un établissement thérapeutique pour une cure de désintoxication.
L’ivresse n’est pas considérée comme une circonstance aggravante dans le code pénal mais on elle l’est dans le
code de route. Rappelons que le décret royal de 1967 réprime l’ivresse publique en général en dehors de toute
infraction. Ce décret autorise de suspendre les poursuites si la personne accepte de suivre une cure de
désintoxication. et que la discipline relative aux addictions s’appelle l’addictologie.
b) Le mauvais usage de stupéfiants : consommation de drogues ou de psychotropes
- Les psychotropes sont tout produit naturel ou synthétique capable de modifier le comportement de celui qui le
consomme et d’engendrer une dépendance physique et psychique. La non-consommation entraîne une situation
de tension appelée les symptômes d’abstinence (= s’abstenir de consommer).
La dépendance psychique se traduit chez le toxicomane par le désir de renouveler la consommation de la
substance, tandis que la dépendance physique entraîne une adaptation de l’organisme avec comme conséquence
l’apparition de troubles physiques intenses lorsque le produit n’est plus consommé. Le dahir portant loi de 1974
traite les drogues ; la drogue est un grand facteur criminogène plus qu’un facteur victimogène.
Les spécialistes ont relevé 3 liens entre les drogues et le comportement criminel :
- liens pharmacologiques : ici, le produit est en lui-même un générateur du comportement violent. composition
chimique de la substance stupéfiante, qui entraîne une base de violence et poussée d’agressivité
- liens économiques : la dépendance conduit l’usager à recourir à la criminalité pour se procurer de l'argent afin
de consommer de la drogue.
- liens sociologiques : les criminels ayant choisi ce mode de vie partagent des chose communes dont la
consommation de la drogue. Ils considèrent le partage de la drogue comme un lien social ou communautarisme
entre ces personnes (ex. : on fume un joint ensemble).
Les effets des drogues sur les individus susceptibles d’engendrer des comportements criminels se manifestent
essentiellement à travers 3 types d’effet :
- effet confusionnel : perte de lucidité ; la consommation va entraîner une confusion dans les idées à ne plus
distinguer ce qui est permis de ce qui ne l’est pas.
- effet paranoïde : la personne peut tout faire car elle se sent dans une situation de mégalomanie et sent une
grande force pour commettre l’acte criminel (ex. : une personne qui s’attaque avec un couteau à des policiers armés).
- effet désinhibiteur : l’individu n’ose pas commettre des actes pour des raisons morales, religieuses… mais en
consommant ces substances, il se sent libéré avec une absence totale de censure et de contrôle sur son
comportement. C’est une sorte d’anesthésie au sens moral ou de la sensation physique (automutilation).
Là aussi, il faut une mesure de sûreté : placement judiciaire dans un établissement thérapeutique, la
responsabilité pénale n’est pas exclue.
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3) Les perversions / déviances sexuelles
On appelle généralem. perversions sexuelles, les pratiques érotiques dont certaines personnes ont
impérativement et exclusivement besoin pour accéder au plaisir sexuel. Cette thématique relève d'une discipline
qualifiée de sexologie. Elis, Ebing et Freud comptent parmi les spécialistes qui ont des travaux qui font référence
en la matière.
Les perversions sexuelles ne sont pas à confondre avec les infractions sexuelles dans la mesure où l’infraction
sexuelle est une notion pénale nécessitant incrimination et sanction, alors que la perversion sexuelle relève du
champ de la psychiatrie et de la criminologie et ne tombe pas forcément sous le coup de la répression pénale.
En matière de P.S : le comportement sexuel est tracé par la société, il doit être conforme aux standards sociaux.
S’il déroge à ces standards, il y a anticonformisme et donc perversion ou déviance sexuelle, ce qui cause une
désapprobation sociale et donc une stigmatisation sociale.
Les perversions varient selon le contexte culturel et social. pour l’homosexualité par exemple n’est plus
considérée comme étant une perversion selon la société occidentale.
a) Perversions par modification du but sexuel (P.M.B.S)
Dans cette catégorie, le pervers modifie le but ordinaire de la sexualité, à savoir la rencontre homme/femme, en
substituant l’une des pratiques qu'il privilégie. Ici, la déviance sexuelle se manifeste par une pulsion anormale
et irrésistible qui cause un scénario anormal.
i. L’exhibitionnisme
L’exhibitionnisme est une perversion sexuelle obsédante et impulsive, caractérisée par le besoin d’étaler en
public et en général, avec une certaine fixité d’heures et de lieux, ses organes génitaux à l’état flasque ou en
érection. L’exhibitionniste réalise sa jouissance rien qu’en exhibant son organe à un public déterminé. Il se
focalise spécialement sur la réaction psychique démontrée par le public cible suite à la surprise du spectacle.
Sur le plan pénal, ce comportement est appréhendé sous la qualification d'outrage public à la pudeur (art 483).
ii. Le voyeurisme
C’est la pratique qui consiste à épier autrui, souvent à son insu, dans son intimité quotidienne. le voyeur ne
s’affiche pas et peut utiliser du matériel pour guetter l’autre (ex. : des caméras, des télescopes, faire des trous dans
les toilettes, les cabines d’essayage…). Le voyeur trouve dans sa pratique l’essentiel de sa satisfaction car sa vision
est érotisée. Ceux qui regardent les films pornographiques ne sont pas considérés comme des voyeurs.
iii. Le fétichisme
On parle de perversion de fétichisme dans tous les cas où un sujet ne peut accéder à la jouissance sexuelle sans
la présence effective d’un objet sexuel auquel il attribue un pouvoir magique mystérieux. L’objet sur lequel se
fixe l’imaginaire sexuel du fétichiste peut être soit une partie du corps de l’autre sexe, soit un objet qui lui
appartient (ex. : combinaison, ceinture, fourrure, cuir, chaussures, soutien-gorge, perruque, etc.). Il peut jouir
seulement en caressant l’objet par exemple. Le fétichiste n’est pas responsable pénalement car il n’y a pas
d’atteinte à l’ordre public puisque la pratique du fétichiste se fait chez soi. Mais si le fétichiste le fait en public,
cela est un outrage public car ça atteint une autre personne ou la société.
iv. Le sadisme et le masochisme
Le sadisme et le masochisme constituent deux perversions complémentaires. Le sadisme peut être entendu
comme la jouissance sexuelle de la souffrance infligée à autrui. Le masochisme est entendu comme la
jouissance sexuelle de sa propre souffrance infligée par autrui. Dans le couple sado-maso, l'un des sujets va
éprouver l’une de ces deux perversions, tandis que l’autre perversion sera assumée par le partenaire.
Les pratiques diffèrent en fonction de chaque pervers et la souffrance peut être physique (coups, violences
physiques, torture…) ou morale (insultes, humiliation…) qui sont des conditions sine qua none à l’obtention de la
satisfaction sexuelle chez le sadique ou le masochiste. Un couple sado-maso n’est pas une infraction car les
deux partenaires sont consentants. Mais si l’un des partenaires n’est pas consentant, ce sont alors des coups et
blessures selon les dispositions du code pénal (art 400-404).
La perversion du sadisme est forgée du nom du célèbre Marquis de Sade, tandis que le masochisme est à relier
au nom du romancier autrichien Léopold Zacher Masoch.
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b) Perversions par modification de l’objet sexuel (P.M.O.S)
Dans cette catégorie, le pervers change l’objet sexuel, c'est-à-dire modifie le partenaire ordinaire dans une
relation sexuelle normale.
i. L’homosexualité = paraphilie, Freud la qualifie d’inversion
Considérée comme un acte contre nature par les trois religions, l’homosexualité est l’une des perversions
sexuelles les plus controversées actuellement dans le monde occidental, étant donné la montée du discours
légitimant l’homosexualité, la réclamation du droit à la tolérance de cette minorité, ce qui a entraîné une vague
de dépénalisation de l'homosexualité dans une partie des pays occidentaux avec la formation de l’ILGA et
même d’une communauté LGBT.
L’homosexualité est définie comme l’attirance sexuelle permanente ou passagère qu’un individu homme ou
femme éprouve pour la personne du même sexe. Ainsi, l’homosexualité masculine est qualifiée de
pédérastie/sodomie, alors que l’homosexualité féminine est qualifiée de lesbianisme/saphisme/gomorrhéenne.
ii. La pédophilie
Il s’agit de l’attirance sexuelle envers les enfants qui peut être homosexuelle ou hétérosexuelle. Le terme
« pédophilie » n’existe pas dans le code pénal et est qualifiée d’attentat à la pudeur ou de viol contre une
personne mineure. La minorité de la victime constitue une circonstance aggravante selon les articles 484, 485 et
486 du code pénal. Il y a une différence entre :
- Viol : art 486 : c’est l’acte par lequel l’homme a des relations sexuelles avec une femme contre le gré de celle-
ci, il s’agit d’un crime. Attention, le viol ne concerne que les femmes (pour les hommes, c’est l’attentat à la
pudeur). Si le viol concerne une mineure ou incapable, elle est une circonstance aggravante.
- Attentat à la pudeur : art 484 - 485 : sans violences (sur mineur ou incapable), avec violences (pas nécessaire
que ce soit un mineur ou un incapable, ce sont des circonstances aggravantes, c’est un crime).
- Outrage public à la pudeur : art 483 : suppose un acte impudique et public sans atteinte à l’intégrité physique
ou sexuelle d’une personne.
En droit français, on utilise le terme agression sexuelle et non attentat à la pudeur. Un nouvel article est aussi
introduit au CP en 2003 : l’art 503-02 qui incrimine la pédopornographie.
iii. L'inceste
Il s’agit de relations sexuelles intra-familiales entre des membres qui sont interdits légalement à avoir une
relation sexuelle. Là aussi, il s'agit d'un acte contre nature. On distingue l’inceste verticale (ex. père-fille, mère-
fils…) de l’inceste horizontale (ex. : frère-soeur). La plus prédominante est la relation père-fille (mineure), ce qui
croise l’inceste à la pédophilie. C’est cette dernière qui reste la plus fréquente et ces affaires sont généralement
étouffées dans les tribunaux car ça devient scandaleux. Il n’y a pas d’incrimination d’inceste dans le code pénal
marocain. Par contre, le viol d’un ascendant/tuteur est considéré comme une circonstance aggravante l’article
487. L’inceste ici est donc évoqué indirectement « si le coupable est l’ascendant/tuteur… » selon les cas (viol,
attentat à la pudeur, outrage public à la pudeur).
iv. La gérontophilie
A l'inverse de la pédophilie, la gérontophilie exprime une attirance sexuelle envers les personnes âgées. Il s'agit
d'une autre anomalie dans le choix du partenaire sexuel assez réprouvée socialement.
v. La zoophilie= bestialité
Le zoophile préfère avoir des relat° sexuelles avec l’animal déterminé, ce qui suppose un penchant maladif vers
cet animal précis. La personne descend donc au seuil de l’animalisme en faisant cette pratique. Il est à préciser
que les personnes qui n’ont pas accès à un partenaire et ont des relations sexuelles avec un animal ne sont pas
considérées comme des zoophiles car la zoophilie reste une attirance sexuelle pathologique envers les animaux.
vi. La nécrophilie
La nécrophilie peut être définie comme une perversion sexuelle caractérisée par une attirance sexuelle morbide
pour les cadavres. Le sujet peut se contenter de contempler le cadavre, le caresser et l’embrasser ou aller jusqu'à
pratiquer une relation sexuelle. Il s’agit d’une attirance pathologique.
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Les psychiatres voient dans la nécrophilie une tentative d’identification avec le cadavre qui cache un grand
attachement avec le parent décédé. D’autres voient une résurgence du culte des morts. Et d’autres la
considèrent comme une atteinte à la personnalité du cadavre telle que la pratique sexuelle avec ce dernier.
Le viol post-mortem pratiquée par un tueur en série sur sa victime révèle ostensiblement, chez lui, un certain
penchant nécrophile.
c) Perversions par modification de l’identité sexuelle (P.M.I.S)
Dans cette catégorie, le sujet manifestant le travestisme ou la transsexualité exprime un refus de son identité
sexuelle et un penchant pour l’identité du sexe opposé.
La transsexualité, transsexualisme
Le transsexuel se distingue d’abord de l’hermaphrodite.
- L’hermaphrodite est une personne qui, suite à un accident génétique à la base, se trouve à la fois avec les
attributs physiques masculins et féminins. Il s’agit d’un bisexuel, physiquement parlant, ou un transgenre.
- Le transsexuel n’est pas hermaphrodite et est très différent de lui. Il est défini, physiquement parlant, comme
homme ou femme, mais il a le psychique et le comportement du sexe opposé. Il a donc une opposition entre
l’identité physique et psychique (‫)الجنسية المعاكسة‬. La personne n’est pas satisfaite de son sexe et prétend ne pas
trouver son confort dans son corps, c’est pourquoi elle va demander un changement de sexe par une
intervention chirurgicale. Cela doit aussi être suivi sur les registres d’état civil (ex. : modifier le nom de rachid par
rachida).
i. Le travestisme
Le travestisme est une perversion sexuelle qui se rencontre aussi bien chez l’homme que chez la femme. Le
travesti peut être défini comme quelqu’un qui ne peut atteindre son plaisir sexuel qu’à la condition de porter des
vêtements du sexe opposé soit de manière ostentatoire, soit de manière discrète. Cela peut s’exprimer dans le
quotidien du travesti ou dans ses relations avec les autres. Mais ce comportement n’est pervers que s’il a une
relation sexuelle avec ce travestisme.
Il existe 3 variantes du travesti :
- le fétichiste travesti qui s’habille et se comporte comme une femme lors d’une relation sexuelle ;
- l’homosexuel qui s’habille en femme pour séduire les hommes. Cette variante correspond généralement aux
homosexuels qui s’adonnent à la prostitution ;
- le transsexuel travesti est un travesti en apparence car il se considère et s’habille comme une femme
prétendant que c’est sa vraie nature.
Attention : le transsexuel et le travesti appartiennent physiquement à un sexe déterminé, contrairement à
l’hermaphrodite.
Plus :
- psychopathologie : ensemble des maladies organiques et fonctionnelles.
- le psychopathe, quelle que soit la forme de sa psychopathie, est toujours conscient et donc responsable
pénalement.
- l’hystérie est une névrose d’expression car il y a manifestation psychosomatique du conflit psychique.

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Chapitre IV : Le courant psychologique
Le courant psychologique présente des hypothèses qui essaient d'expliquer le comportement criminel sur la
base de facteurs psychologiques. Elles sont d'une grande diversité, mais dans leur grande majorité, elles puisent
leurs matériaux dans la doctrine freudienne.
I. La psychologie freudienne et le comportement criminel
Sigmund FREUD (1856-1939) neuropsychiatre autrichien est considéré comme le fondateur de la
psychanalyse, et comme le père de toute une école qui a révolutionné la psychologie et la pratique médicale
psychiatrique au 19ème siècle.
Beaucoup de psychologues et de criminologues se sont inspirés de ses théories relatives à l’agressivité et aux
perversions. Il est donc essentiel de passer en revue les trois bases de la psychologie freudienne.
1) Les éléments de l’appareil psychique
Freud estime que l’appareil psychique humain se divise en trois éléments ou zones à savoir, le « Ça », le « Moi
» et le « Surmoi ». Il y a une interaction entre ces trois composants qui jouent leur rôle dans la formation
normale ou anormale de la personnalité.
Pris à part, chacun de ces éléments assume une fonction spéciale nécessaire dans la vie interne de l’individu.
Le «Ça» est la zone la plus ancienne, il correspond à la sphère des instincts et du végétatif. Il est par nature
rebelle à la réalité et aux conventions sociales, il se trouve par contre soumis au principe du plaisir.
Le «Surmoi» exprime les exigences de la vie sociale et les interdits légaux et moraux, il est acquis tout au long
de l’éducation et joue un grand rôle dans la formation de la personnalité équilibrée.
Le «Moi» constitue un élément de synthèse et une liaison entre le «Ça» et le «Surmoi», il assure la fonction
synthétique de la personnalité et cherche un équilibre entre les exigences sociales et les désirs personnels.
2) La distinction entre le Conscient et l’Inconscient
La psychanalyse pratiquée par Freud pour le traitement des névroses, prend pour base essentielle la distinction
entre le conscient et l’inconscient. Il est difficile de définir la conscience parce que c’est une pure subjectivité,
mais on peut tout de même dire que c’est la connaissance qui accompagne nos sentiments et nos actions.
A coté de ce qui est conscient, existe une sphère qui conditionne certains de nos actes et de nos comportements et
qui reste dans l’obscurité, c’est l’inconscient. Celui-ci désigne l’ensemble des faits psychiques dont nous n’avons
pas conscience. Ce sont toutes nos acquisitions personnelles, nos expériences, nos pensées, nos souvenirs perdus
qui peuvent resurgir lorsque l’occasion est propice. C’est le passé enfoui, qui commande le présent et le futur.
Pour FREUD, l’inconscient est soumis essentiellement à deux grandes impulsions, l’Éros et le Thanatos.
3) L’évolution psycho-sexuelle chez l’enfant
FREUD part du postulat que la sexualité ne commence pas avec la puberté, mais bien avant. C'est-à-dire
immédiatement après la naissance. Pour défendre cette vision, Freud distingue d’abord ce qui est sexuel de ce
qui est génital, en mettant l’accent sur les zones érogènes. Contestant ainsi l’innocence des enfants, il expose
quatre stades dans le déploiement de la sexualité infantile.
a) Le stade buccal
Il commence après la naissance, et la bouche se détermine, à ce stade, comme zone érogène capable de
satisfaction auto érotique. Pour FREUD, la bouche en plus de sa fonction nutritive, remplit une fonction érotique.
b) Le stade anal-sadique
Il se prolonge entre 18 mois et trois ans, la satisfaction érotique commence à se déplacer au niveau des
sécrétions de l’enfant. Pour FREUD, ces sécrétions ont un rôle érogène et c’est à ce stade également que
commence à s’exprimer l’agressivité chez l’enfant.
c) Le stade phallique-œdipien
Il s'étale entre 3 et 7 ans, le plaisir érotique commence à se déplacer sur l’organe génital. C’est à ce stade que le
garçon traverse le complexe œdipien, où symboliquement il désire posséder sa mère et essaie de se débarrasser
de son père. L’équivalent du complexe d’œdipe chez la fille est appelé complexe d’Electre.
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d) Le stade de latence
Il s'étale de 7 ans à la puberté. A ce stade l’éducation et les exigences sociales inculquées à l’enfant détournent
provisoirement sa libido sous forme de sublimation et de pudeur.
FREUD estime que la sexualité entre en léthargie, dans un état de latence, en attendant la puberté pour donner à
l’érotisme sa véritable expression, où le sexuel rejoint le génital. C’est durant ce stade que l’enfant surmonte et
résout son complexe qui se révèle incompatible avec la vie sociale.
II. Les poste-freudiens et l’étiologie criminelle
L’étiologie criminelle chez les poste-freudiens s’articule, en ce qui concerne le criminel, essentiellement autour
de trois concepts:
- la perturbation du processus de socialisation;
- la mentalité criminelle ou dissociable et ;
- la constitution psychique perverse chez le criminel.
Parmi les poste- freudiens qui ont puisé dans le bagage conceptuel freudien on peut citer: Marie Bonaparte,
Aichhorn ou encore Kate Friedlander.
La principale hypothèse poste-freudienne est avancée par Daniel LAGACHE (psychologue français), qui tout
en partant de la primitivité du «surmoi», pour expliquer la constitution psychique perverse chez le criminel,
nous présente un processus en deux phases:
1- la phase de retrait ou le refus de l’identification au groupe social
2- la phase de restitution ou la tentative d’ajustement de la sociabilité
Ces deux phases constituent les deux faces d’une même médaille qui repose sur la désintégration psychique
chez le délinquant et son désengagement moral vis-à-vis de la société. Le désengagement social est remplacé
par l’adhésion au groupe des délinquants. Ainsi le délinquant va retrouver dans le groupe criminel le reflet de
son image et une dimension sociale qu'il a perdue par rapport à la société globale.
III. La personnalité criminelle et le passage à l’acte
1) La psycho-crimino-genèse d’Étienne De GREEFF
Le criminologue belge Étienne De GREEFF (1898-1961) est considéré comme l’un des grands piliers de la
pensée criminologique européenne. Sa vision de la personnalité criminelle et du passage à l'acte se présente
comme suit:
a) La conception globale du criminel
L’originalité de la pensée du maître de Louvain provient d’abord de sa conception globale du modèle criminel.
De GREEFF ne perçoit pas le criminel comme quelqu’un qui souffre nécessairement d’un dérèglement
psychique ou physique, ce qui le rend différent de l’homme ordinaire.
Pour lui, il part d'une conception objective et réaliste, en excluant d’abord les criminels malades du champ de la
recherche criminologique et en s’interrogeant ensuite sur les criminels vrais, c'est-à-dire ceux qui sont
normalement constitués.
Pour lui, la question capitale est celle de savoir comment des êtres normaux parviennent à commettre des actes
anormaux. En d’autres termes, il s’agit de savoir comment l’homme peut-il devenir criminel.
La question étant posée en ces termes, ne peut que conduire à rechercher si les clés de la délinquance ne se
trouvent pas plutôt dans les profondeurs du psychisme et de la personnalité propre à chacun de nous, le
dérèglement est donc inhérent à la nature humaine.
b) La dynamique de la psycho-crimino-genèse
Partant du postulat que nous sommes tous des délinquants virtuels et inconscients du fait des incitations à
l’agressivité qui nous sont transmises par notre système neurophysiologique, De GREEFF distingue un
«psychisme de base» extrêmement dangereux et un «psychisme supérieur» assumant l’auto régulation.
Le psychisme de base est essentiellement commandé par les réactions du mésencéphale (cerveau basal). Il est
soumis par ailleurs à deux types de fonctions:
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- les fonctions instinctives: se composent des instincts de défense et des instincts de sympathie. Les premiers
tendent à la conservation du «moi», les seconds tendent à la conservation de l’espèce. L’opposition entre les
deux peut engendrer une certaine agressivité.
- les fonctions incorruptibles: échappent complètement à la volonté, elles sont aveugles et indifférentes au
bien et au mal. Dans certaines conditions déterminées, elles jouent sous l’impulsion de l’instinct de défense
avec un automatisme terrifiant.
Ces mouvements instinctifs de la vie psychique de base, qui peuvent recevoir une traduction mécanique dans la
réalité, ne peuvent être déjoués que par un psychisme supérieur, capable d’échafauder une défense contre les
mauvais tours du mésencéphale. C’est par un système de valeur tourné vers autrui et réactivant nos instincts de
sympathie et de sociabilité, qu’on peut faire face aux réactions du psychisme de base, ce qui suppose
nécessairement un élargissement de la zone de tolérance.
c) Le processus du passage à l’acte
Dans la criminalité passionnelle, le crime est souvent le résultat d’une morne application et d’une maturation
criminelle, qui met en jeu des sentiments d’injustice subie et d’atteinte à la dignité, en déclenchant les réactions
des fonctions incorruptibles.
Ainsi, le processus du passage à l’acte criminel chez les criminels passionnels se déroule en quatre phases.

i. La phase de l’assentiment inefficace


Résulte d’un état souterrain chez le sujet qui lui fait entrevoir par un événement quelconque, la possibilité
souhaitée de se débarrasser de son partenaire.
ii. La phase de l’assentiment formulé
Tout en continuant à s’efforcer de penser que la disparition pourra s’accomplir sans son concours, le sujet
commence à se mettre lui-même en scène en tant qu’auteur de l’acte criminel. Mais la progression de ces
réflexions passe par des hauts et des bas, le travail de dévalorisation de la victime alterne avec l’examen des
inconvénients du crime.
iii. La phase de crise
Le sujet rentre dans une véritable agonie morale, essaie de se convaincre de la nécessité du passage à l’acte
criminel et de le justifier face à lui-même, en entamant un processus avilissant et réductionniste à l’égard de la
victime.
iv. La phase du dénouement
Le processus réductionniste consacré par le sentiment d’injustice subie et d’humiliation participe au
désengagement du sujet à l’égard de la victime. Et le dénouement de la lutte émotionnelle passe par la
commission de l’acte grave de meurtre.
Les réactions des criminels passionnels à la suite de leurs actes sont tout à fait variées et expriment la
personnalité criminelle soit par le remord, soit par l’indifférence, soit par le soulagement ou encore par le
cynisme.
2) Le noyau central de la personnalité criminelle chez Jean PINATEL
Pour Jean PINATEL, le passage à l’acte n’est que la réponse d’une personnalité à une situation et comme on
vient au crime par des chemins différents, le passage à l’acte en soi se révèle comme insuffisant pour
déterminer la personnalité criminelle.
Le dénominateur commun qui révèle cette personnalité serait alors le noyau central de la personnalité
criminelle.
PINATEL a pris le sens inverse de MAINOUVRIER, qui s’est interrogé à propos de ce qui empêche le non
délinquant de passer à l’acte.
MAINOUVRIER estime que le mouvement vers l’infraction est avorté à cause des freins psychologiques qui
ont joué. Ces freins sont très personnels, sentiment d’immoralité, crainte de la peine, pitié pour la victime…Etc.
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Quant à PINATEL, il estime que chez le délinquant qui est passé à l’acte, les freins d’ordre moral, pénal,
matériel ou affectif n’ont pas joué. N’est ce pas là le signe que le délinquant possède dans sa personnalité des
traits psychologiques qui sont en opposition avec ceux qui retiennent le non délinquant.
En effet, ces traits psychologiques constituent les composantes du noyau central de la personnalité criminelle,
elles sont au nombre de quatre:
i. L’égocentrisme
Le délinquant a tendance à se considérer comme le centre de l’univers et à surestimer ses exigences
personnelles. Ce qui le pousse à faire primer ses intérêts personnels.
ii. La labilité
Considérée comme une prédisposition psychique résultant d’une certaine incapacité d’être inhibé par la menace
de la sanction. Ce qui explique la facilité du passage à l'acte criminel.
iii. L’agressivité
Cette caractéristique permet au délinquant de renverser les obstacles de toute forme pour réaliser la satisfaction
personnelle et braver les interdits moraux et pénaux.
iv. L’indifférence affective
Constitue le résultat logique de l’égocentrisme et exprime le désengagement moral et social envers autrui. Le
criminel reste insensible aux supplications de ses victimes.
Ainsi malgré la grande diversité des personnalités criminelles, ces quatre traits constituent un dénominateur
commun, qu'on retrouve dans toute personnalité criminelle. Et c'est pour cette raison que PINATEL parle du
noyau central de la personnalité criminelle, qui permet aux délinquants une certaine aisance dans le passage à
l'acte criminel.

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Chapitre V : Le courant socio-culturel
A l’intérieur du courant socioculturel, on peut distinguer deux grandes orientations, une orientation européenne
classique axée sur l’influence du milieu social .Et en second lieu, une orientation américaine articulée sue les
aspects culturels.
I. L’étiologie criminelle européenne
Les criminologues européens ont concentré leurs efforts sur le rôle des facteurs sociaux dans l’apparition de la
criminalité .Différents facteurs sociaux ont été mis en exergue. C’est ainsi qu’on a étudié l’influence du milieu
familial et sa contribution dans le comportement criminel.
Souvent, une famille éclatée est responsable de la déviance de jeunes délinquants. Le milieu géographique a été
également étudié et à l’aide de statistiques, on arrive à brosser la différence entre la criminalité rurale et la
criminalité urbaine.
Le milieu économique a constitué de son coté un point d’intérêt pour les théories sociologiques, qui ont essayé
de trouver des corrélations entre la criminalité et la pauvreté, de démontrer l’influence de mouvements
économiques sur l’accroissement du mouvement criminel.
Les masses média ont été également étudiées dans leur rôle néfaste sur la criminalité.
Les criminologues européens qui ont essayé de mettre l’accent sur les facteurs extérieurs sont allés plus loin
dans des tentatives d’élaboration de pseudo lois sociologiques.
Dans ce sens, on peut citer la loi thermique de la délinquance de GUERRY et QUETELET, qui suppose que les
crimes contre les personnes font plus apparition dans le sud et en période de chaleur, et que les crimes contre
les biens se rencontrent beaucoup plus dans le nord où prédomine le climat froid.
Enrico FERRI a avancé pour sa part la loi de saturation criminelle dans son ouvrage sur la sociologie
criminelle, en vertu de laquelle, dans une société déterminée chaque année s'expriment un certain nombre
d'actes criminels bien précis, en fonction des conditions socio-économiques qui prévalent dans cette société.
II. L’étiologie criminelle américaine
La recherche criminologique se caractérise par son intérêt pour le concept de culture et sa relation avec les
concepts de personnalité et de société.
La culture étant un agent social qui conditionne la personnalité pour exprimer une civilisation déterminée. Mais
dans toute société existent des cultures marginales adoptées par certains groupes et qui peuvent se mettre en
opposition avec la culture prédominante.
1) La théorie d’Edwin SUTHERLAND
La théorie de SUTHERLAND est exprimée essentiellement à travers deux hypothèses :
a) L’hypothèse de l’association différentielle
L’idée maîtresse de cette hypothèse c’est que le comportement criminel est un comportement acquis et qui
s’apprend. On ne né pas criminels, mais on le devient par l’observation et par l’association à des modèles
criminels.
C’est cette association qui transmet au futur délinquant les techniques criminelles dont il a besoin, pour opérer
dans le domaine de la délinquance .En plus de cette formation délinquante, il y a un effort pour l’orientation des
mobiles criminels à travers les interprétations négatives des normes sociales.
Certains criminologues ont critiqué cette hypothèse avancée par SUTHERLAND qui a mis l’accent sur le
processus individuel de réception, en ignorant les données endogènes. On a fait observer, en outre, l’absence de
processus d’association différentielle chez les collaborateurs de la justice (policiers, magistrats, personnel de
prisons), vu leur contact permanent avec les modèles criminels.
b) L’hypothèse de la criminalité en col blanc
Il s’agit d’une innovation dans le domaine de la pensée criminologique. En effet, jusqu’à 1939, année où
SUTHERLAND avait exposé sa théorie sur la criminalité en col blanc, on croyait que la criminalité avait des
soubassement économiques, et qu’elle était l’apanage des classes pauvres et défavorisées. SUTHERLAND qui
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n’acceptait pas cette conception exclusive de la criminalité, a forgé le modèle inverse et lui a donné
l’appellation de criminalité en col blanc (White Colar Crime).
Ce modèle consacre le style criminel des hommes d’affaires qui restent loin des soupçons, mais qui ont une
criminalité essentiellement acquisitive liée à l’exercice de leur profession.
Le grand succès de l’hypothèse de SUTHERLAND dans le domaine de la criminalité d’affaires a poussé par la
suite certains criminologues, à inventer de nouvelles catégories criminologiques, tel que la criminalité en col
bleu (celle des ouvriers), ou la criminalité en blouse blanche (celle des médecins), ou la criminalité en veste
bleue (celle des policiers), ou encore le délit chevalier, invention allemande pour les infractions qui ne
soulèvent pas une véritable réprobation morale (comme la fraude fiscale).
2) La théorie des conflits de culture
Les conflits de culture désignent un ensemble de conditions sociales caractérisées par la divergence et
l’hétérogénéité des influences qui se font sentir sur les individus.
Cette théorie se rattache essentiellement au nom de Torsten SELLIN, elle a connu plusieurs applications.
a) Les cultures contradictoires
Un conflit de culture surgit lorsque les valeurs morales et les normes de conduites sanctionnées par le droit
pénal d’un pays déterminé, se trouvent en désaccord avec les valeurs et les normes adoptées par des groupes
d’individus, qui ont une conception différente de la vie social, peut être génératrice de conduite criminelle.
La criminalité engendrée par un conflit de culture peut particulièrement être illustrée à travers deux exemples
assez significatifs:
C’est ainsi que la naissance du conflit peut provenir du fait de la colonisation, celle-ci introduit en effet les
normes d’un groupe culturel sur le territoire d’un autre groupe, elle rend ainsi brusquement illégales les règles
de conduite qui étaient considérées comme traditionnelles.
La naissance de conflits peut également être constatée à travers le phénomène de l’immigration, les immigrants
peuvent conserver certaines façons de se conduire, qui sont en contradiction avec les normes du pays d’accueil.
La civilisation américaine avec le brassage des différents peuples immigrants sur son territoire, est
particulièrement propice pour produire des conflits de culture ainsi que des théories sur les conflits de culture.
b) Les sous cultures
La sous culture est définie comme une subdivis° d’une culture nationale composée d’une combinaison de situat°
sociales tel que la classe, le fondement ethnique, la résidence urbaine ou rurale et l’affiliation religieuse.
La sous culture se manifeste lorsqu’il y a interaction des personnes qui partagent et intériorisent dans leurs
croyances et leurs actions, le modèle culturel du sous groupe.
A partir d’une idée de localisation spatiale, les criminologues nous présentent deux formes de sous culture:
a- La première forme s’intéresse aux sous cultures urbaines
On a cherché à découvrir dans les grandes agglomérations, de véritables zones criminelles, qui sont qualifiées
d'aires de délinquance, des catégories entières de jeunes cherchent refuge dans la violence, la drogue et la
marginalité.
b- La deuxième forme s’intéresse aux sous cultures pénitentiaires
Présente un intérêt indéniable à plusieurs points de vue. La prison espace vital à coté de son rôle
criminologique sur les individus, s’avère un milieu culturel qui favorise l’entretien de relations spéciales entre
les détenus ou entre ceux-ci et les agents de l’administration pénitentiaire.
c) L’anomie
Le conflit de cultures revêt chez certains criminologues américains particulièrement Robert King MERTON,
l’aspect d’anomie. Celle-ci peut être définie comme un affaiblissement des normes sociales dans les
consciences individuelles.
Le concept d’anomie a été emprunté au sociologue français Émile DURKHEIM, qui soutient que tout
changement social trop accéléré, retentit sur la structure sociale et les normes qui régissent la solidarité au sein
de la société.
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Pour MERTON, l’anomie se ramène à une rupture entre les buts valorisés par une société de consommation et
les moyens légitimes proposés par la société à ses membres pour réaliser leur épanouissement.
Ainsi, dans l’échelle des valeurs de la société de consommation, l’argent est proposé comme un objectif
légitime de promotion sociale. Et face à ce processus d’exaltation des fins, les normes qui définissent les
moyens légitimes d’acquisition de l’argent ne se développent pas corrélativement. Et comme les mécanismes
économiques et sociaux ne permettent pas à tout le monde d’accéder légalement à la richesse, le phénomène de
déviance et d’anomie fait inéluctablement son apparition pour donner naissance à l’anticonformisme.
III. Les criminologies critiques
Les criminologies critiques consacrent une nouvelle forme de la réflexion criminologique dans l’approche de la
problématique criminelle. Ils ont fait leur apparition à partir des années 60 en s’érigeant contre les modèles de
la criminologie classique.
Les criminologies critiques proposent une nouvelle approche du modèle criminel en substituant à une
criminologie étiologique, une criminologie de la réaction sociale ou du contrôle social.
Deux théories représentant essentiellement ce courant : la criminologie interactionniste et la criminologie radicale.
1) La criminologie interactionniste
Elle est qualifiée également de théorie de la stigmatisation ou encore théorie de l’étiquetage (labelling theory).
Elle a occupé la scène criminologique à partir des années 60 avec l’apparition de deux ouvrages, le premier
d’Edwin LEMERT intitulé: «La pathologie sociale», le second d’Howard BECKER intitulé «Les déviants :
étude de la sociologie de la déviance».
Ainsi, contrairement au modèle classique qui voit dans la déviance la violation des règles sociales, l’école
interactionniste estime qu’il faut renverser le schéma, car la délinquance n’est qu’une création sociale.
De ce fait, la déviance n’apparaît pas comme une qualité intrinsèque à l’acte prohibé, mais comme le résultat
d’une stigmatisation sociale taxant certains individus comme déviants.
Ce renversement du schéma d’analyse apparaît dans:
a) Les positions critiques de l’école interactionniste
Ces positions critiques sont articulées autour de 3 points :
1/ On reproche aux théories classiques d’avoir passé sous silence le rôle du droit pénal dans la genèse
criminelle. Pour la théorie de l’étiquetage, on ne saurait négliger le rôle des institutions pénales dans la
fabrication de la déviance.
2/ L’école interactionniste reproche aux théories classiques, la distinction entre le criminel et le non criminel.
Pour l'école en question, cette distinction est non avenue du fait du chiffre noir responsable de la confusion
entre ces deux entités.
3/ l’école interactionniste fait grief aux théories classiques d’avoir construit des modèles explicatifs portant le
cachet du déterminisme.
b) L’acquisition du statut social par le déviant
Cette acquisition se fait à la fois sur le plan social et sur le plan individuel.
• Sur le plan social
L’école interactionniste cible deux aspects à savoir l’application des normes, ainsi que leur établissement.
Au niveau de l'établissement des normes, 3 remarques sont avancées:
1) les sociétés modernes ont tendance à faire du droit pénal, la forme prédominante du système de
contrôle social, ce qui est parfaitement illustré à travers le phénomène de la sur criminalisation.
2) le droit pénal moderne évolue vers la médicalisation de la délinquance et prend de plus en plus une
forme thérapeutique.
3) les valeurs protégées par la loi pénale coïncident le plus souvent avec les intérêts de la classe dominante.
Au niveau de l’application des normes :
L’école interactionniste considère que les mécanismes de recrutement des délinquants (enquête, poursuite,
jugement, sanction) ne sont pas des mécanismes objectifs et neutres, mais revêtent plutôt un caractère subjectif.
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Différentes considérations personnelles et sociales sont à l’origine des prises de décision, lesquelles taxent
certains comme déviants et anticonformistes, tandis que les autres gardent leur étiquette de conformistes.
• Sur le plan individuel
La déviance et l’étiquetage apparaissent comme étant l’œuvre des audiences sociales, la déviance n’est pas
inhérente à certaines formes de comportement, mais c’est une propriété attribuée à ces formes de comportement
par les audiences sociales qui se composent selon Kai ERIKSON de la société globale, des institutions de
contrôle social (police - tribunal - prison) et des petits groupes constituant l’entourage (famille – voisins –
amis).
Un processus interactionniste se trouve engagé entre les instances sociales et l’individu objet de la
stigmatisation et c’est à travers des appréciations négatives émanant des audiences sociales, que le stigmatisé
acquiert son statut et son rôle de déviant. Aux termes de ce processus d’interaction, l’individu suspecté et
stigmatisé a acquis le statut social de déviant et réorganisé sa personnalité en fonction du rôle social
correspondant qui lui a été assigné par la société. Cette redéfinition de soi comme déviant et l’adaptation à ce
nouveau statut, est désignée par LEMERT sous le vocable de «Déviance secondaire».
Dans cette perspective, le rôle criminogène de la société est mis en relief, c’est à la suite de l’incrimination et
du contrôle social que l’on devient délinquant, et au lieu de dire que la déviance conduit au contrôle social, il
faut plutôt dire que c’est le contrôle social qui conduit à la déviance.
2) La criminologie radicale
La criminologie radicale ou théorie néo-marxiste se rattache essentiellement à l’école de Berckeley ,
représentée dans une large mesure par les époux: SCHWENDINGER (Herman & Julia) et par Tony PLATT.
Mais cette théorie a débordé les frontières américaines, pour trouver un écho en Angleterre avec TAYLOR,
WALTON et YOUNG. La criminologie radicale a trouvé également des partisans dans les pays scandinaves
avec Niel CHRISTIE et CHRISTIENSEN, ainsi qu’en Hollande avec William BONGER.
Le dénominateur commun entre ces différentes pensées reste la position critique, prenant la forme d’une
conception néo-marxiste dans le domaine de l’explication criminologique.
Partant d’une interprétation économico-politique de la criminalité, la théorie radicale puise ses racines dans la
praxis marxiste. Dans cette perspective, deux dimensions s’imposent à nous, l’une explicative l’autre
pragmatique.
a) L’explication radicale de la criminalité
L’explication avancée par l’école radicale relativement à la criminalité se base sur une conception marxiste.
Dans cette optique, la déviance exprime la confrontation des délinquants avec les structures économico-
politique installés, et il faut y voir une forme de contestation de l’organisation sociale en place. L’appropriation
des moyens de production par les classes dominantes; les structures de la société capitaliste, débouchant sur une
distribution inégale des biens et de l’autorité, ne peuvent que donner lieu à la réaction criminelle.
L'État, organisme représentant et défendant les intérêts des classes dominantes économiquement et
politiquement, est un instrument qui n’est pas neutre, il est au service du pouvoir économique et ne fait que
consacrer la contradict° des intérêts .La domination de la classe puissante se maintient par les institut° pénales et
les lois répressives, qui ne sont que l’arme de cette classe pour garantir la soumission de la classe défavorisée.
La fausse neutralité de l’État et du pouvoir politico-économique apparaît non seulement sur le plan d’une
législation sélective des lois, mais également sur le plan d'une application sélective de ces lois. Ce qui est
considéré comme une conséquence logique de l’opposition des intérêts.
L'application de certains interdits légaux ne vise que certaines couches sociales, et la loi perd de sa généralité. Il
faut noter que la classe économiquement puissante plus elle participe à l’autorité et à la prise de décisions, plus
son immunité pénale devient grande.
D’ailleurs les radicaux n’hésitent pas à voir dans l’amende la meilleure forme de l’application sélective de la loi
pénale. C’est ainsi qu’à leur yeux, on transforme le châtiment pénal en une expression monétaire qui se trouve à
la portée des membres nantis de la société lorsqu’ils désirent transgresser les lois; d’où la célèbre expression
des néo-marxistes qualifiant l’amende comme une «taxe levée sur le privilège de violer la loi».
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b) Le produit criminel et son utilité pour l’État
Chez les criminologues radicaux, la démonstration de la fausse neutralité de l’État et la transformation de la
justice pénale en une justice de classe, est nécessairement accompagné par l’abandon et la réfutation de
l’étiologie criminelle comme modèle explicatif dans les théories classiques.
La criminalité ne peut plus être perçue comme un phénomène pathologique ou universel, mais elle est la
conséquence logique du système capitaliste qui consacre la domination de l’Homme par l’Homme, avec le
soutien de l’appareil étatique. Toute explication émanant des instances capitalistes a pour objectif la création
d’une fausse conscience chez la classe dominée, en vue de présenter la criminalité comme un danger qui
menace l’intérêt public, alors que la menace vise un intérêt assez spécial.
Les rouages capitalistes font inévitablement de l’État une institution favorisant la production de la criminalité.
Les néo-marxistes estiment qu’il serait assez nocif à l’Etat de ne point avoir de criminalité, car c’est cette
criminalité qui crée du travail pour la police, pour les juges, pour l’administration pénitentiaire, et on peut
encore allonger la liste avec le psychiatre, le réalisateur le journaliste et le professeur de droit criminel …etc.
Dans cette nouvelle conception criminologique, l’école radicale tout en rejetant le schéma bourgeois du
problème criminel, essaie de proposer une explication conforme à la vision marxiste des rapports sociaux. La
théorie radicale se veut, en plus, contestataire et militante en vue de dénoncer le vernis intellectuel et
idéologique qui masque le problème criminel dans le système capitaliste.
La théorie radicale a été critiquée et rejetée par la criminologie classique qui estime que la théorie radicale est
beaucoup plus une conception économique et politique qu'une théorie criminologique. La criminologie
classique estime également que la pratique de cette forme de criminologie tend à transformer le criminologue
en un malfaiteur intellectuel.

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Chapitre VI : Le courant Victimologique
Le courant d’idées articulé autour de la victimologie est né comme une réaction contre les différentes théories
étiologiques, passant sous silence le rôle joué par la victime. Dans la triptyque criminelle : -crime – criminel –
victime. Cette dernière est restée totalement dans l’ombre des théories criminologiques qui focalisent toute
l’attention sur le criminel.
I. Le cadre conceptuel de la victimologie
Le point de départ de ce courant datait de 1948 avec l’apparition de l’ouvrage d’allemand Hans Von HENTG
intitulé: «Le criminel et sa victime».
Cet ouvrage a attiré pour la première fois l’attention sur cette relation latente qui existe entre le criminel et la
victime. L’étude de la relation intersubjective entre les deux pôles de l’action criminelle revêt un grand intérêt
pour les criminologues, ne serait-ce qu’au niveau de la compréhension des situations pré-criminelles et des
facteurs de la criminalité, sans bien sûr omettre l’intérêt pour la politique criminelle sur le plan de la prévention.
L’évolution du droit pénal a continué à ignorer la victime dans la dynamique criminelle, où on ne s’intéresse à
elle qu’en tant que partie civile. De même pour la criminologie étiologique, tout l’intérêt était porté sur la
personne du criminel.
Pour les victimologues, la relation dialectique entre le criminel et la victime doit être mise en relief; et cela
passe tout d’abord par l’abandon du schéma classique qui voit toujours le criminel dans l’image de Caïn et la
victime dans l’image d’Abel. La victimologie a été alimentée essentiellement par les écrits de grands
victimologues tel que: MENDELSOHN, ELLENBERGER et Ezzat ABDEL FATTAH.
Dans la culture victimologique, on doit distinguer aujourd’hui entre deux types de victimologie:
- la première appelée : victimologie générale, englobe toutes les catégories de victimes, même celle des
accidents et des catastrophes naturelles. Le but de cette victimologie est l’amélioration de la prise en charge de
la victime, ainsi que l’amélioration des voies d’indemnisation.
- la seconde appelée: victimologie pénale ou criminologique ne prend en considération que les victimes
d’infractions pénales, elle est étroitement liée à la criminologie.
Cette forme de victimologie s’intéresse scientifiquement à tout ce qui touche à la victime au sens pénal du
terme: sa personnalité, ses traits biologiques, psychologiques et moraux, ses caractéristiques socioculturelles,
ses relations avec le criminel et enfin son rôle et sa contribution à la genèse du crime.
II. Les situations de la victimité
La victime est un élément essentiel de la situation pré-criminelle. Le choix de la victime d’un acte criminel
n’est pas toujours dû au jeu du hasard, mail il existe de nombreux cas où cette détermination résulte de certains
types de rapports entre la victime et son criminel .D’autre part, certains paramètres rentrent en jeu dans le choix
par le criminel de sa victime.
Ainsi certains victimologues accordent une importance à la notion de cible victimale. Ils observent que le
risque du passage à l’acte criminel résulte de la mise en relation d’une cible attractive faiblement gardée avec
un criminel potentiel qui se sera, en général, livré à une analyse stratégique en termes de risques et profits.
D’une façon générale, la victime et l’auteur se connaissent, la criminalité est une affaire de proximité, c’est le
cas notamment de la majorité des viols, des homicides et des agressions. Il est à noter que la famille est une
grande pourvoyeuse de victimes (jalousie, humiliation, maltraitance, violences domestiques, agressions
sexuelles, homicides).
Parmi les facteurs de victimisation, les victimologues avancent l’âge comme facteur biologique, l’enfant et la
personne âgée sont exposés plus que d’autres à l’agression criminelle. La condition physique constitue
également un facteur biologique favorisant les attitudes criminelles, où la cible se trouve une femme ou une
personne malade ou handicapée, ou en état d’ébriété.
Dans les facteurs sociaux, d’une part les métiers à risques sont nombreux: chauffeurs de taxis, convoyeurs de
fonds, caissiers, policiers, prostituées, etc. Et d’autre part, le mode de vie, comme la fréquentat° de lieux à risques
(boites de nuit, quartiers dangereux) ou les relations avec les délinquants sont importantes à prendre en
considération.
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La condition socio-économique peut être à l’origine de l’acte criminel, l’habitat dans un quartier dangereux ou
a contrario, la richesse ostentatoire peut constituer une cible attractive (femme parée de bijoux, maison
bourgeoise isolée, touriste manipulant l’argent). L’isolement spatial facilite également la victimisation
(immigré, gardien, parking peu surveillé)
Ainsi les victimologues essayent de mettre en relief les différents facteurs facilitant la commission de l’acte
criminel à l’égard de tel ou tel type de victimes. Quant au droit pénal la prise en considération de la situation de
la victime est en relation soit avec les problèmes d’indemnisation, soit en relation avec l’aggravation ou
l’atténuation de la sanction.
III. Les typologies victimologiques
Les partisans du courant victimologique, dans leurs tentatives de systématisation ont essayé, à l’instar des
théories étiologiques, d’ériger des typologies victimologiques.
La classification victimologique des crimes repose sur cette idée que la victime n’occupe pas toujours la même
position dans la structure concrète des crimes; c’est ce qui a donné lieu à une classification de 4 types :
1) les crimes contre des victimes réelles, c'est-à-dire bieu ciblées et concrètes.
2) les crimes contre des victimes fictives, ici la victime est diffuse et générale (ordre public, santé publique…)
3) les crimes contre des victimes potentielles, c’est le cas de la conduite en état d’ivresse où il y a risque
d’homicide par imprudence.
4) les crimes sans victime, c’est le cas pour la prostitution ou l’usage des stupéfiants.
D’autres victimologues ont préféré dresser des typologies relativement à la personnalité de la victime, c’est le
cas par exemple pour S.SCHAFFER qui distingue :
1- la victime sans relation avec le criminel: ce sont tous les membres du corps social qui sont des victimes
potentielles.
2- la victime provocatrice: qui encouragerait l’agresseur et c’est le cas pour certaines agressions sexuelles.
3- la victime incitative, qui solliciterait par son attitude ou l’étalage de ses biens une agression.
4- la victime socialement vulnérable comme l’immigré, l’exclu, le membre d’une minorité.
5- l’auto-victime: comme le toxicomane, l’alcoolique, le joueur pathologique, le suicidaire.
6- la victime politique, sacrifié par un système idéologique.
La typologie victimologique présentée par SCHAFFER n’est pas la seule typologie articulée autour de la
personne de la victime. D’autres victimologues ont présenté des typologies soit à caractère juridique comme
c’est le cas pour MENDELSOHN, ou à caractère criminologique ou sociologique comme c’est le cas pour
ELLENBERGER.
En somme, la victimologie se veut un éclairage d’une perspective demeuré longtemps dans l’ombre. Il s’agit en
l’occurrence de la victime et de son rôle dans la genèse de l’acte criminel. Ce qui contrebalance une tendance
excessive de la criminologie étiologique à focaliser l’attention uniquement sur a personnalité du criminel et sur
sa constitution physique, psychique ou son milieu criminogène.
Mais l’apport incontestable de la victimologie en tant que nouvelle branche de la criminologie, ne doit pas
occulter l’origine idéologique de cette branche ayant apparu à la suite de la deuxième guerre mondiale, afin
d’attirer l’attention sur le rôle de victime joué par le peuple juif à travers l’histoire.
Aujourd’hui on constate que la victimologie s’est détachée de cette origine idéologique et s’est constituée en
branche autonome de la criminologie. Il apparaît même que la victimologie est en train de s’amplifier dans le
champ pénal. Le mouvement victimologique actuel s’expliquerait par l’impuissance des sociétés occidentales à
empêcher l’accroissement incessant de la délinquance au cours des 30 dernières années ; si bien que la seule
ressource serait de reporter l’action sur l’atténuation des effets du phénomène, en prenant en considération les
victimes, à défaut de pouvoir agir efficacement sur les causes.

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