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Cryptococcose

Dr Isaac Akhénaton MANGA


Service Parasitologie-Mycologie
FMPO/UCAD
Introduction
1. Définition

• Cryptococcose = Mycose cosmopolite à évolution subaiguë ou chronique


due à Cryptococcus neoformans (champignon levuriforme encapsulé)
• Affection favorisée par immunodépression
• Manifestation la plus fréquente et la plus grave = Atteinte du système
nerveux central è Méningo-encéphalite

NB: Si levure dans prélèvement biologique è Rechercher d’autres


localisations et débuter traitement
Introduction
2. Intérêts
• Affection cosmopolite
• Regain d’intérêt avec VIH: 2-20%
personnes VIH
• Forme neuro-méningée +++++ Global burden of HIV-related cryptococcal meningi8s

• 1 million d’individus/an touchés et


625 000 décès
• Gravité = forme septicémique et
neurologique è Décès en
Causes of death in sub-Saharan Africa, excluding HIV/AIDS
l’absence de traitement
Adapted from BJ Park et al., AIDS 2009;23:525-530
I. Epidémiologie
A. Agent pathogène

1. Taxonomie
• Règne : Fungi
• Groupe : Eucaryotes
• Sous-groupe : Mycophytes
• Phylum : Basidiomycota

• Sous-phylum : Agaricomycota
• Classe : Tremellomycetes
I. Epidémiologie
A. Agent pathogène

1. Taxonomie

• Ordre : Tremellales

• Famille : Tremellaceae
• Genre : Filobasidiella/Cryptococcus

• Plus de 80 espèces dont grande majorité́ non pathogène


o Cryptococcus neoformans = seule espèce pathogène pour l’homme

o 4 autres espèces isolées de prélèvements d’origine humaine : C.


albidus, C. laurentii, C. terreus et C. uniguttulatus
I. Epidémiologie
A. Agent pathogène

1. Taxonomie
• Existence de différences phénotypiques et génotypiques è
regroupement de Cryptococcus dans 2 complexes d’espèces :
vComplexe d’espèces C. neoformans
vComplexe d’espèces C. gattii comprenant 7 espèces et 13
génotypes
I. Epidémiologie
A. Agent pathogène

2. Morphologie
• Cryptocoques = Microorganismes unicellulaires, réfringents

• Ronds sphériques ou ovoïdes (3-7µm en moyenne parfois 15-20µm suivant


milieux)

• Cytoplasme granuleux avec des vacuoles lipidiques

• Paroi épaisse

• Capsule mucilagineuse +/- épaisse selon souches, environnement in vivo, nature


du milieu de culture

• Habituellement pas de mycélium ni pseudo mycélium

• Multiplication par bourgeonnement généralement unique mais parfois multipolaire


A. Agent pathogène
2. Morphologie
• Capsule Cryptococcus de nature poly osidique avec 2 macromolécules :
o Galactoxylomannane (GalXM) : 12% des polyosides

o Glucuroxylomannane (GXM) : 88% du matériel osidique total è Spécificité́ antigénique


déterminant 5 stéréotypes

• Capsule poly osidique = Facteur de protection contre le milieu environnant et la


phagocytose et constitue surtout le facteur majeur de la virulence de la levure.
• Cryptococcus neoformans existe sous 3 formes :
o C. neoformans var. neoformans correspondant au sérotype D

o C. neoformans var. grubii correspondant au sérotype A

o Hybride des sérotypes A et D

o C. neoformans var gattii correspond aux sérotypes B et C


A. Agent pathogène
3. Biologie
• Habitat

• C. neoformans = Champignon +++ exosaprophyte parfois


endosaprophytique (dans jabot pigeon) è dissémination à partir des
fientes

• Développement à 27-37°C et Survie = 10 ans si conditions favorables

• C. neoformans = champignon pouvant résister dans :

o Sable pendant 16 mois

o Terre humide et ombragée pendant 2 ans


A. Agent pathogène
3. Biologie

• Reproduction :

o Asexuée par bourgeonnement multilatérale à partir d’une levure

o Formes parfaites de Filobasidiella neoformans (sérotypes A – D)

et Filobasidiella bacillispora (sérotypes B – C) résultent de la

reproduction sexuée
A. Agent pathogène
3. Biologie

• Caractères antigéniques
• Capsule polysaccharidique (Glucuronoxylomannane +
Galactotomannane + Nannoprotéines) =
o Facteur majeur de virulence
o Permet diagnostic rapide à l’examen direct à l’encre de Chine

o Présente également 11 facteurs antigéniques dont 8 è


Différentiation des sérotypes
A. Agent pathogène
3. Biologie

• Caractères antigéniques

NB: Sérums contre facteurs 2, 3 et 4 pas indispensables à la


détermination des sérotypes
A. Agent pathogène
4. Pathogénie

• Grâce à plusieurs facteurs


o Caractéristiques basiques nécessaires à la contamination de l’hôte, à la
survie et à la multiplication de la levure
o Virulence grâce à la capsule (Glucuronoxylomannane ayant effets
délétères sur mécanismes de défense de l’hôte)

• Effets =

o Invasion des tissus de l’hôte

o Tropisme pour le cerveau avec Induction d’un œdème cérébral et d’un


granulome inflammatoire fonction de l’état immunitaire du sujet.
B. Modes de contamination

• Voie respiratoire : inhalation d’air chargé de levures de C. neoformans


suite à une exposition fréquente.

• Inoculation directe par traumatisme à partir de lésions cutanées


(Panaris, cellulite), responsable d’une cryptococcose cutanée primitive

• Dissémination par voie hématogène du champignon à partir d’un foyer


primitif.
C. Facteurs favorisants
• Ordre général +++ Profession :
• Pigeonniers
• Ouvriers (nettoyage et démolition vieilles constructions)
• Travailleurs dans grottes
• Ordre individuel +++ Terrain immunodéprimé :
• Déficits immunité cellulaire (VIH , Maladie de Hodgkin)
• Diabète
• Corticothérapie au long cours
• Traitements immunosuppresseurs…
D. Répartition géographique
II. Diagnostic biologique
A. Circonstances du diagnostic biologique/éléments d’orientation

Manifestations cliniques multiples et fonction du statut immunitaire (+++ neurologiques)

• Chez immunocompétent
• Primo-infection pulmonaire souvent asymptomatique de découverte fortuite

• Chez immunodéprimé (+++ PVVIH) :


• Atteinte pulmonaire avec :
• Dyspnée
• Toux avec expectorations minimes parfois hémoptoïques
• Douleurs thoraciques et fièvre
• Syndrome de détresse respiratoire
II. Diagnostic biologique
A. Circonstances du diagnostic biologique/éléments d’orientation

• Chez immunodéprimé (PVVIH) :


• Signes d’irritation méningée :
• Céphalées frontales, temporales ou rétro-orbitaires, résistantes aux
antalgiques
• Nausées
• Irritabilité́, vertiges, obnubilation voire coma
• Troubles comportement et caractère
• Fièvre rarement supérieure à 39°C
• Syndrome méningé́ franc avec raideur de la nuque
II. Diagnostic biologique
A. Circonstances du diagnostic biologique/éléments d’orientation

• Chez immunodéprimé (PVVIH) :


• Troubles visuels
• Lésions cutanées
o Papules
o Pustules ombiliquées
o Masses sous-cutanées
o Ulcérations à bords irréguliers prédominant à la face et au cuir
chevelu ou disséminées sur tout le corps et qui peuvent ressembler à
des lésions de Molluscum contagiosum
II. Diagnostic biologique
B. Modifications biologiques non spécifiques
• Hyperprotéinorachie
• Hypoglycorachie

C. Diagnostic mycologique
1. Prélèvements
• Prélèvements pulmonaires : LBA, expectorations, ponctions pleurales,
biopsies)
• Lésions cutanées : pus d’abcès ou de drainage, biopsies
• Lésions ganglionnaires, médullaires, osseuses
• +++ Liquide céphalorachidien
• Sang total ou sérum
• Biopsies d’organes
II. Diagnostic biologique
C. Diagnostic mycologique
2. Etapes du diagnostic mycologique

a. Examen direct

• Avec l’encre de Chine è Fond de la préparation en noir ; la capsule apparaît alors


comme une auréole blanche, très nette, régulière, de taille variable autour de la
levure.
C. Diagnostic mycologique
2. Etapes du diagnostic mycologique

b. Cultures
• Pour l’identification de l’espèce
• Ensemencement sur milieu Sabouraud chloramphenicol (SC) à partir
du culot de centrifugation
• Incubation à 30-37°C

• Après Pousse obtenue en 3 à 5 jours è colonies blanches


crémeuses, muqueuses avec un aspect brillant, coulant et se
colorant en ocre plus ou moins foncé avec le temps
C. Diagnostic mycologique
2. Etapes du diagnostic mycologique

b. Cultures
• Microscopie è Levures globuleuses (2-12µm) avec de rares
bourgeons multilatéraux
C. Diagnostic mycologique
2. Etapes du diagnostic mycologique

c. Diagnostic de genre

• Test de non fermentation des sucres

• Test à l’uréase
• Produit de culture dans milieu liquide tamponné contenant de l’urée et du rouge
phénol (milieu urée-indol)
• Incubation pendant 3 heures à 37°C
• Résultat positif = Virage du milieu vire au rose (témoin de la production d’une
uréase par la levure)
• NB : Toutes les souches ne produisent pas l’uréase
C. Diagnostic mycologique
2. Etapes du diagnostic mycologique

d. Diagnostic d’espèce

• Assimilation des sucres

• Absence de réduction des nitrites


• Réduction du Tétrazolium

• Sensibilité́ à l’Actidione
• Production de Phénoloxydase (sur milieu de Staib ou milieu de Pal pendant
2-3 jours entre 27-37°C) è Levure se colore en brun foncé à noir

• NB: Existence de souches non productrices de Phénoloxydase


D. Diagnostic immunologique spécifique
1. Détection de l’antigéne capsulaire
• +++ Agglutination particules de latex sensibilisées avec anticorps spécifiques
(monoclonaux, poly clonaux ou combinés)

• ELISA (PREMIER, Meridian)

• Tests immunochromatographiques (technique LFA ou Lateral Flow Assay)


D. Diagnostic immunologique spécifique
3. Détermination du sérotype

• Techniques biochimiques

• Immunofluorescence directe

• Techniques d’agglutination

• +++ PCR notamment multiplex pour amplification des gènes CAP64


et LAC1 codant respectivement pour protéine de la capsule et
mélanine è Différencier 5 sérotypes (A, B, C, D et AD)
E. Diagnostic anatomopathologique
• Pas de coloration de la capsule par les colorants histologiques habituels è
Halo clair autour de la levure
o Hématéine éosine (HE) è Cryptocoque rose pâle + capsule sous forme d’un halo
légèrement réfringent

o Méthode de Gomori Grocott (imprégnation argentique) è Levures noires et capsule


non visualisée

• Coloration possible de la capsule grâce


o Bleu alcian è capsule en bleu

o Mucicarmin ou P.A.S è capsule en rouge

NB: C. neoformans = Seule levure mucicarmin positive et bleu alcian positive


F. Diagnostic moléculaire
• Dans laboratoires spécialisés

• Intérêt +++ taxonomique surtout dans différenciation des sérotypes

• Techniques d’identification basées sur :

o Utilisation de sondes d’hybridation spécifiques

o Amplification génique (PCR) ou des techniques dérivées de la PCR


III. Principes thérapeutiques
A. But
• Stériliser le foyer infectieux
• Guérir le malade
• Prévenir les rechutes

B. Moyens

Essentiellement médicamenteux
• Amphotéricine B désoxycholate (Fungisone®)
• 5-fluorocytosine (Ancotil®)
• Triazolés : Fluconazole (Triflucan®), Itraconazole (Sporanox®),
Kétoconazole (Nizoral®)
III. Principes thérapeutiques
C. Indications/posologies

1. Cryptococcoses méningées

ØPhase d’induction (2 semaines)

Schémas alternatifs recommandés :


• FCZ (1200mg/j pour adultes, 12mg/kg/j pour enfants et adolescents)

• FCZ (1200mg/j pour adultes, 12mg/kg/j pour enfants et adolescents) +


flucytosine (100mg/kg /j)

• AMB (1mg/kg/j) + FCZ (1200mg/j pour adultes, 12mg/kg/j pour enfants


et adolescents avec maximum de 800mg/jour)
III. Principes thérapeutiques
C. Indications/posologies

1. Cryptococcoses méningées

ØPhase de Consolidation (8 semaines)


• FCZ (800mg/j pour les adultes, 6-12mg/kg/j pour les enfants et les
adolescents, maximum de 800mg par jour)

ØPhase de Maintenance (ou prophylaxie secondaire) après culture LCR


négative et restauration immunitaire stable sur plusieurs mois
• FCZ : 200mg/J pour les adultes, 6mg/kg /j pour les adolescents et
les enfants)
III. Principes thérapeutiques
C. Indications/posologies

2. Cryptococcoses extra-méningées

ØSujet immunodéprimé́ ou cryptococcose grave et/ou évolutive


• Traitement comme si localisation méningée

ØChez le sujet non immunodéprimé́ par le VIH (patient sous


immunosuppresseurs, ou des cancéreux)
• Forme asymptomatique : Fluconazole ou Itraconazole : 200-400mg/j pendant 3 à 6
mois
• Forme symptomatique peu grave : idem que forme asymptomatique
• Cryptococcose cutanée primitive consécutive à un traumatisme local : Antifongique
+/- Chirurgie
IV. Prophylaxie
A. But

• Eviter la contamination ou les rechutes

B. Moyens
• Prévention primaire = ARV systématiques chez les PVVIH
• Prévention secondaire = Fluconazole: 200-400mg/j jusqu’à la
restauration durable de l’immunité chez sidéen et immunodéprimé
Conclusion
• Cryptococcose = Maladie opportuniste grave +++ au cours de VIH/sida

• Diminution de son incidence grâce aux ARV

• Diagnostic facile cependant traitement difficile

• Pronostic fonction du terrain

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