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Les interconnexions

entre Unités d’Activité


Stratégiques Photo : Presidencia PERU/Flickr/Creative commons
peppertt.com

de Michael PORTER

Passage sur la notion de la Strategic Business Unit, By Maryam


M. Rahou de la diversification Page 1 sur 41 RAHOU
et des niveaux de la stratégie
Les interconnexions entre Unités d’Activité Stratégiques de Michael PORTER

Quant à Michael PORTER… -3-

Préambule : A propos de la Strategic Business Unit, de la diversification et -4-


des niveaux de la stratégie
 La Strategic Business Unit ……………………………………………………………………………………………………….. -4-
& Segmentation stratégique
 La diversification ……………………………………………………………………………………………………………………… -8-
& Notion de « métier »
 Les niveaux de la stratégie ……………………………………………………………………………………………………… - 11 -
& Stratégie horizontale

Pourquoi parler des interconnexions… ? - 17 -


 Face au contexte de la décentralisation et d’enthousiasme pour la synergie ……………………. - 18 -
& Introduction du concept d’« organisation horizontale »
 Pour une mise en perspective de l’analyse de portefeuille ………………………………………………….. - 21 -
& Mise en relief d’un management stratégique suivant les liaisons entre SBU

Les interconnexions entre Unités d’Activité Stratégiques - 26 -


 Les interconnexions tangibles ………………………………………………………………………………………………….. - 28 -
Ou le partage des activités
 Les interconnexions intangibles ………………………………………………………………………………………………. - 32 -
Ou le transfert de compétences

Conclusion - 36 -

Bibliographie - 39 -
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Quant à Michael PORTER…

Titulaire d’un PhD en économie et d’un MBA en stratégie de la HBS.


Dans ses recherches sur les contextes concurrentiels, il a identifié
Ingénieur en mécanique aéronautique et diplômé de l’Université de
cinq forces à prendre en compte pour l’élaboration d’une stratégie
Princeton. Michael Porter est professeur de stratégie depuis 1973 à la
efficace dans n’importe quel secteur : concurrents, offreurs des
HBS et également professeur Honoris Causa au Groupe HEC.
produits de substitution, nouveaux entrants, pouvoir de négociation
Consultant en stratégie auprès de multinationales, Porter intervient des clients et pouvoir de négociation des fournisseurs.
comme formateur auprès des décideurs économiques et politiques.
Principales publications
Il a créé le groupe « Compétitivité et stratégie » de la HBS, ainsi que
les ateliers CEO pour les dirigeants des grandes entreprises.  Competitive Strategy, Mc Millan Publishing, 1980, traduction :
Choix Stratégiques et concurrence, Economica, 1982 ;
Au milieu des années quatre-vingt, il est nommé par Ronald Reagan
à la commission sur la compétitivité industrielle pour étudier les  Competitive Advantage, Free Press, 1985, traduction : L’Avantage
techniques de concurrence. Il a ainsi obtenu de nombreux prix pour concurrentiel, Dunod, 2003, InterEditions, 1986 (1ère Edition) ;
récompenser ses recherches et publications.
 Competitive Advantage of Nations, Harvard Business School
Press, 1990, traduction : L’Avantage concurrentiel des nations,
Domaines de recherche
InterEditions, 1993 ;
Michael Porter est spécialiste de la stratégie concurrentielle et de la
 Avec L. Fahey et R. Randall Robert, Les paramètres essentiels
compétitivité internationale. Dans son ouvrage clé "Competitive
de la gestion stratégique des entreprises, Maxima, 1997 ;
Strategy", il présente des techniques d’analyse qui permettent de
cerner un secteur d’activité et de prévoir le comportement des  Avec Hirotaka Takeuchi, Marico Sakakibara, Can Japan Compete
concurrents. M. Porter a défini trois stratégies concurrentielles à ?, McMillan Press, 2000.
exercer au niveau d’un domaine d’activité, appelées « stratégies
génériques » qui sont : (i) la différenciation, (ii) la domination par les
Source : DURAND R., (2005), Strategor, Dunod, 4ème Edition, pp. 844-845
coûts et (iii) la focalisation.
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Préambule : A propos de la Strategic Business Unit, de la


diversification et des niveaux de la stratégie

L’objectif ici est d’aborder les définitions des concepts clés et


également les relations possibles entre eux dans le but d’apporter  « Un domaine d’activité stratégique (DAS) – ou strategic
un éclairage et de faire progresser les connaissances autour de la business unit (SBU) – est une sous-partie de l’organisation à
notion de Strategic Business Unit (SBU), de la diversification et laquelle il est possible d’allouer ou retirer des ressources de
des niveaux de la stratégie. manière indépendante et qui correspond à une combinaison
spécifique de facteurs clés de succès.2 » ;

La Strategic Business Unit  « DAS (Domaine d’Activité Stratégique) (strategic business


unit) : ensemble d’activités d’une entreprise où les facteurs clés
& Segmentation stratégique de succès sont semblables et reposent sur des ressources ou des
savoir-faire communs.3 ».

La notion de Strategic Business Unit (SBU) est la traduction


En fait, la notion de Strategic Business Unit est plus qu’une simple
anglaise de celle d’Unité d’Affaire Stratégique ou encore d’Unité
segmentation stratégique, c'est-à-dire un découpage de l’activité de
d’Activité Stratégique (UAS)1. Néanmoins, il arrive que certains
l’organisation en DAS (business) car une SBU, à la différence d’un
ouvrages en matière de stratégie relient, à tort, la notion de SBU
DAS, dispose la particularité d’être assimilée à une quasi-entreprise,
avec ce qu’on appelle un Domaine d’Activité Stratégique (DAS).
voire une subdivision autonome de l’organisation « Unit » définie
Pour illustrer cette interférence existante entre les deux notions, les
autour d’un DAS et pour laquelle il est utile de formuler une
deux définitions ci-après ont été sélectionnées :
stratégie concurrentielle distincte : une « business strategy4 ».

1
L’expression d’Unité d’Activité Stratégique (UAS) a été puisée de l’ouvrage de
2
Michael Porter "L’avantage concurrentiel". Il convient à mentionner que nous FRERY F. et al., (2005), Stratégique, Pearson Education, 7ème Edition, p. 284.
3
utiliserons ici indifféremment l’expression de SBU, d’UAS, d’unité d’activité ou DURAND R., (2005), Op. Cit., p. 850.
4
seulement d’unité par souci de simplification. Cf. p. 15 de ce document.
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Une SBU est dirigée de façon autonome avec des objectifs par un
manager qui est responsable de son fonctionnement. Elle dispose, à La segmentation stratégique qui évoque l’action de découpage,
ce titre, de ses propres ressources/compétences, son propre marché cherche à découper les activités d’une organisation (et non du
et correspond à une combinaison de FCS5. En effet, un DAS est une marché qui renvoie à la notion de segmentation marketing8) en des
sous-partie d’une organisation du point de vue de la prise de sous-ensembles homogènes mais mutuellement distincts appelés
décision stratégique, mais il ne constitue pas nécessairement une chacun un DAS pour lequel il est possible de formuler une stratégie
division du point de vue structurel6 : « unité ou unit ». particulière (business strategy) qui n’est pas nécessairement la
même pour tous les DAS.
Figure n°1 : Corrélation entre un DAS et une SBU
Pratiquement parlant, la segmentation stratégique vise à identifier
SBU DAS + Unité au sein de l’activité globale de l’entreprise _qui se présente la
Source : Conception de l’auteur plupart du temps comme un ensemble confus de produits,
marchés, technologies, outils de production, etc._ les ensembles
Il convient à noter que sur un plan d’ordre terminologique, certains
pertinents, homogènes du point de vue de la formulation de la
auteurs américains utilisent à côté de la notion de SBU celle de la
stratégie et donc de l’allocation des ressources, à partir desquels les
Strategic Business Area (SBA) qui signifie la zone géographique
dirigeants pourront construire la réflexion stratégique. On parle
dans laquelle l’organisation va agir à travers son DAS7.
dans ce cas d’une segmentation par découpage dans laquelle on
Un DAS étant le résultat d’une segmentation stratégique et vu part du sommet pour identifier les grands secteurs d’activités, puis
l’interdépendance entre la notion de DAS et celle de SBU, on juge les branches qui correspondent aux segments9.
utile le fait d’expliciter, même de la manière la plus concise que
Ainsi, dans un groupe chimique, on peut identifier les grands
possible, qu’est-ce que c’est la segmentation stratégique fondée sur
secteurs suivants (métiers) : fibres, colorants, peintures. Ce dernier,
l’identification des DAS et ayant pour objectif principal de fournir
en l’occurrence le secteur de peintures, regroupe des DAS (segments
au dirigeant une représentation du champ de bataille approprié sur
lequel il va opérer. 8
La segmentation marketing repose sur la segmentation de la clientèle afin de
définir des couples produits/clients ce qui permet d’obtenir des segments de
5
Les Facteurs Clés de Succès (FCS) constituent les éléments stratégiques que marché. De ce fait, la segmentation marketing, à la différence de la segmentation
l’organisation doit maitriser en vue de surpasser la concurrence (FRERY F. et al., stratégique, concerne un seul secteur d’activité de l’organisation et s’inscrit dans
(2005), Op. Cit., p. 717). une perspective de court terme qui peut être remise en question au quotidien
6
Idem, p. 288. (FRERY F. et al., (2005), Op. Cit., pp. 284-285).
7 9
KESSAB E., (2010), Cours de « Management stratégique » (prise de note), ENCG – DURAND R., (2005), Op. Cit., pp. 13 et 264. Il est à préciser ici qu’un "segment"
Oujda. dit aussi "segment stratégique" est similaire à un DAS (Cf. Idem, p. 854).
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stratégiques) tels que : bâtiment, industrie, réparation automobile, Figure n°2 : Les modalités de la segmentation stratégique
construction automobile, grand public, marine. Chaque segment Le découpage Le regroupement
stratégique contient de sa part des segments de marché10 auxquels
est associée une politique fonctionnelle de marketing.

L’autre option là-dessus consiste à procéder par regroupement,


c'est-à-dire partir des produits et/ou services commercialisés par Source : GODELIER E., (2006), Op. Cit., p. 19
l’entreprise pour les regrouper en segments stratégiques aussi
homogènes que possibles. Appartiendront au même segment des En fait, l’embarrât dans lequel se trouvent les organisations pour
produits/services ayant les trois caractéristiques suivantes : opérer une segmentation stratégique a amené certains praticiens à
préconiser un certain nombre de critères de segmentation ventilés
1. Ils correspondent à une combinaison cohérente de FCS ;
en critères internes et externes permettant de se prononcer sur le
2. Ils appartiennent à la même chaine de valeur et ont une
fait qu’on a affaire à un même DAS ou à des DAS différents12. Il
structure de coûts semblables ; s’agit alors de critères de regroupement.
3. Ils font face aux mêmes concurrents.

Partant, appartiennent au même DAS deux sous parties d’une


Selon la même référence, ces trois critères se recoupent en général ;
organisation (deux divisions, deux implantations géographiques,
les produits et services considérés sur le premier critère se
deux unités opérationnelles, voire deux lignes de produits ou de
regroupent le plus souvent sur les deux autres caractéristiques
services, etc.) qui partagent les critères suivants13 :
également. A mentionner qu’il est souvent intéressant de mener
successivement les 2 démarches de segmentation, par découpage et 1. Même clientèle ;
par regroupement, pour voir comment elles convergent. De surcroit, 2. Même marché pertinent ;
on note que les trois critères de segmentation présentés ci-dessus 3. Même réseaux de distribution ;
entant que critères de regroupement peuvent être utilisés 4. Même concurrents ;
pareillement comme des critères de découpage11. 5. Même technologies ;
6. Même compétences ;
10
GODELIER E., (2006), « Modèles et pratiques de la stratégie d’entreprise », p. 18.
12
http://crg.polytechnique.fr/fichiers/crg/perso/fichiers/godelier_482_Mod_les_str KESSAB E., (2010), Op. Cit.
13
at_giques__2006_.pdf Pour plus de détails au sujet des critères, Cf. FRERY F. et al., (2005), Op. Cit., pp.
11
DURAND R., (2005), Op. Cit., p. 265. 286-288.
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7. Synergies ;
8. Coûts partagés prépondérants (coûts de structure). La dernière étape de la segmentation stratégique consiste à analyser
les interconnexions entre DAS (ou UAS) : les partages de ressources,
Dans le prolongement des critères de segmentation, certains auteurs les transferts de compétences (connaissances, savoir-faire, etc.) et
avancent deux critères clés qui doivent permettre de valider ou les synergies actuelles et/ou potentielles entre les DAS définis, et ce,
d’invalider une segmentation en DAS à priori14 : afin de les regrouper en bases stratégiques (BS).

1. Le premier indicateur concerne la répercussion de la La notion de BS attire l’attention sur les liens de dépendance qui
segmentation stratégique retenue en termes d’allocations de existent entre certains DAS17. Elle se définit comme un « Ensemble
ressources et son homogénéité avec le type d’avantage de domaines d’activités stratégiques entre lesquels il existe des
concurrentiel recherché pour chaque DAS ; partages de ressources et de compétences, ou des complémentarités
2. Le deuxième indicateur fait référence aux FCS dans la mesure de gamme, ou des cessions internes, réels ou potentiel.18 ».
où les environnements concurrentiels de deux DAS ne doivent
pas partager la même combinaison de facteurs clés de succès Entre les DAS d’une même base, il existe des liens qui font que l’on
et nécessiter donc la même capacité stratégique15. ne peut pas prendre de décision sur un DAS sans affecter un autre
DAS appartenant à cette base. Par définition, il ne doit exister
Lorsqu’on effectue une segmentation stratégique, les confusions aucun lien significatif entre deux BS d’une entreprise, sauf19 :
sont fréquemment liées au fait que les divisions qui composent les
organisations ne sont pas nécessairement définies en fonction des 1. Coût de la direction générale et des services financiers ;
DAS. Un domaine d’activité stratégique est une subdivision d’une 2. Partage du cash-flow pour lequel les BS sont en concurrence.
organisation du point de vue de la prise de décision stratégique,
mais il ne constitue pas nécessairement une division structurelle. Clairement, la notion de base stratégique trouve sa place en matière
Cela explique en partie pourquoi les grands groupes se réorganisent des niveaux de segmentation (stratégique et marketing) qui s’articulent
très fréquemment : ils ne font que suivre, ou parfois anticiper, comme suit20 :
l’évolution nécessaire mouvante de leurs activités16.
17
BARON-GAY. MESSIER. et SIMARD., (2005), « La segmentation stratégique », p. 10.
14
FRERY F. et al., (2005), Op. Cit., p. 289. http://managementworld.a.m.f.unblog.fr/files/2008/06/segmentationstrat.ppt
15 18
La capacité stratégique d’une organisation vient de l’aptitude de ses ressources Idem, p. 4.
19
et compétences à lui permettre de survivre et de prospérer (Idem, p. 715). Idem.
16 20
Idem, p. 13. Idem, p. 5.
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1. Base stratégique, à laquelle une stratégie horizontale21 est


associée, précisant les liens entre les domaines d’activité qui la
composent ;
La diversification
2. Domaine d’activités stratégiques, auquel est associée une & Notion de « métier »
stratégie d’affaire ou business strategy ayant pour rôle de
préciser le positionnement adopté ; La diversification veut dire le « développement de l’entreprise dans
3. Segment de marché, auquel une stratégie fonctionnelle de des domaines autres que son métier de base. (...) Précisons en outre
marketing est associée ; que la diversification est définie strictement comme la décision d’une
4. Micro-segment, auquel est associée une stratégie client en entreprise d’entrer dans un nouveau domaine d’activité. Une
vue d’affiner chaque relation client-fournisseur de l’entreprise. entreprise diversifiée est donc une entreprise présente dans au moins
deux domaines d’activités (ou « businesses ») différents. Par entrée
Enfin, une dernière idée concerne la resegmentation stratégique, dans un nouveau domaine d’activité nous entendons un ajout au
dans le sens qu’une segmentation stratégique de départ n’est jamais portefeuille d’activités d’un nouveau métier correspondant à une
définitive notamment avec les turbulences de l’environnement ou à chaine de valeur spécifique, et non pas simplement une extension de
la suite d’une stratégie délibérée. Ainsi, plusieurs DAS peuvent être la gamme des produits ou des services offerts par l’entreprise alors
regroupés en un seul, dans le même esprit, on peut imaginer qu’un qu’elle reste en fait dans son industrie d’appartenance.23 ».
DAS unique peut être divisé et fragmenté en plusieurs DAS
autonomes par la suite22. Dès lors, la diversification24 consiste pour une organisation à s’engager
sur des domaines d’activité où elle n’est pas encore présente, tant en
Pour conclure, la Strategic Business Unit peut être définie comme termes d’offres que de marchés.
une départementalisation basée sur la segmentation stratégique.
Par ailleurs, dès qu’une organisation opère dans au moins deux
23
Strategic Business Units, elle est qualifiée comme étant diversifiée DURAND R., (2005), Op. Cit., pp. 257 et 260. La logique adoptée par Strategor
fait du métier un élément spécifique à chaque DAS. Néanmoins, on note que des
sachant bien qu’une diversification requiert une identification et
auteurs tels que Christophe Boisseau (Cf. BOISSEAU C., (2003/2004), « Marketing
gestion des liaisons (interconnexions) entre les différentes unités 1 : Stratégie et politique générale d’entreprise », p. 10) et Eric Godelier (Cf.
d’activité qui en ressortent. GODELIER E., (2006), Op. Cit., p. 18) raisonnent selon une autre logique qui fait
qu’un métier peut contenir plusieurs DAS.
24
Il convient à noter que certains auteurs parlent de diversification géographique
21
On a consacré un titre sur les niveaux de la stratégie (Cf. pp. 11-16 de ce (internationalisation) et de diversification verticale (intégration verticale) outre
document) y compris la stratégie horizontale. celle de métier. Il est donc à préciser que nous retiendrons ici la notion de
22
FRERY F. et al., (2005), Op. Cit., p. 289. diversification dans le sens de diversification de métier/DAS.
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On ne peut pas parler de diversification sans évoquer la notion de


synergie. L’idée selon laquelle la combinaison d’activités différentes Une autre définition de la diversification qui ne se voit pas lointe de la
mais voisines peut créer une valeur par synergie a été très répandue première (d’ailleurs tirée de la même référence que celle précédente)
et a servi à justifier le vaste mouvement de diversification qui a s’énonce comme suit : « la diversification correspond aux mouvements
prévalu dans les années 60 et début des années 7025. En effet, toute stratégiques qui se concrétisent par un changement de domaine
stratégie de diversification exploite plus ou moins des éléments de d’activité, c'est-à-dire par la prise en compte d’un nouvel ensemble de
synergie tirés de l’activité principale de l’entreprise. De fait, si la facteurs clés de succès. Ces mouvements peuvent se traduire
combinaison de FCS diffère d’un segment stratégique à l’autre, il est subjectivement, soit par l’élargissement du métier de l’entreprise,
des facteurs qui entrent dans la composition de plusieurs DAS soit par la coexistence de plusieurs métiers.27 ». Cette deuxième
différents. En s’appuyant sur ces facteurs/compétences communes, définition attire l’attention sur le rôle que peut jouer l’aspect subjectif
l’entreprise, dans le cadre de sa nouvelle activité, tirera un avantage dans l’appréhension du métier de l’organisation et par conséquence
concurrentiel de par son expérience acquise dans son activité de ses mouvements stratégiques, en l’occurrence sa diversification.
traditionnelle. Dans de nombreux cas, la diversification procède En fait, alors que le terme du DAS possède une connotation objective,
d’une évolution progressive, fondée sur l’utilisation la plus pertinente celui du métier dispose d’un caractère subjectif et renvoie à la
possible d’éventuelles synergies de compétences, comme étant de « perception que l’on a à l’intérieur de l’entreprise de ce que l’on sait
pivots ouvrant de nouveaux champs d’activité26. et pense pouvoir faire.28 ».

Figure n°3 : Synergies et diversification Partant, et par rapport à ce caractère subjectif, la notion de métier
peut conduire une organisation à s’aventurer dans des voies de
diversification non appropriées d’où l’intérêt de son identification.
Or, il n’est pas toujours simple de reconnaitre le métier d’une
entreprise même pour ceux qui y bossent ; pour Anis BOUAYAD,
l’auteur de l’ouvrage "Stratégie et métier de l'entreprise : Pourquoi et
comment définir le métier de votre entreprise", plusieurs dirigeants
ne sont pas en mesure de répondre instantanément à la question :
"Quel est mon métier ?" et de nombreux sont ceux qui devraient se
Source : DURAND R., (2005), Op. Cit., p. 207
la poser, ou prendre le temps d'y réfléchir. Il y a alors de fortes
25
PORTER M., (1999), L’avantage concurrentiel : Comment devancer ses concurrents
27
et maintenir son avance, Edition Dunod, pp. 381-382. Idem, p. 205.
26 28
DURAND R., (2005), Op. Cit., pp. 205-206. Idem, p. 399.
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chances qu'ils constatent que la définition de son métier « s'avère  Elles distinguent l’organisation de ses concurrents ;
une tâche aussi nécessaire que complexe, voire périlleuse.29 ».  Elles interviennent au niveau de l’architecture, c'est-à-dire de
la structure d’organisation et de ses principes d’organisation.
Pratiquement parlant, on entend par métier, au niveau de l’analyse
stratégique, une combinaison de compétences et de savoir-faire qui Par suite, ce sont ces compétences-là dites stratégiques qui définissent
se trouvent réunis dans une organisation et qui confèrent à celle-ci le métier d’une organisation. Voilà pourquoi, une analyse interne
un aspect particulier. L’identification du métier se fait à ce titre en fondée sur les ressources et compétences31 s’avère d’une importance
cherchant les compétences « cœurs » (core competencies) ou indéniable lorsqu’il s’agit pour une organisation de définir son métier.
stratégiques qui permettent de créer un avantage concurrentiel par Toutefois, des auteurs préconise pour cette affaire d’associer de
ce qu’ils présentent un critère d’originalité et sont l’apanage de manière interactive l’analyse interne et celle externe permettant de
ceux qui travaillent dans l’organisation. On regroupe par la suite se rendre compte des forces environnementales essentielles pour
ces compétences stratégiques en un ou plusieurs métiers. l’organisation ainsi que des facteurs clés de succès de son secteur et
ses activités. Pour eux, seule une telle approche permettra d’éviter le
De sa part, une compétence est une aptitude VRIST (Valorisable, dépérissement, la disparition ou la diversification hasardeuse, car
Rare, Inimitable, Non-Substituable, Non-Transférable). Soulignant elle donne son sens et sa cohérence aux choix stratégiques.
qu’une aptitude se conçoit comme étant la capacité d’associer et de
combiner un ensemble particulier de ressources qui caractérisent Néanmoins et particulièrement avec les turbulences assistées par
une organisation. L’organisation se définit de la sorte comme un l’environnement, actuellement, l’approche par les ressources et les
ensemble de compétences, et, parmi toutes ses compétences, elle en compétences se voit préférable, solide et avantageuse en matière
détache certaines qu’elle juge fondamentales, appelées compétences d’identification du métier en comparaison avec la méthode fondée
« cœur » ou compétences stratégiques, car permettant de créer un sur l’analyse externe car un métier « ce n’est pas seulement le
avantage concurrentiel en combinant trois aspects30 : résultat d’une étude détaillée du contexte concurrentiel. Un métier,
cela se vit. C’est la pratique quotidienne de milliers d’individus de
 Elles correspondent à ce que l’organisation sait et peut mieux toutes compétences qui ont la même activité. La spécificité d’un
faire que ses compétiteurs (le filtre VRIST) ; métier est donc directement liée à la façon dont l’entreprise le vit et
l’agence en interne.32 ».
29
BOUAYAD A., (2000), Stratégie et métier de l'entreprise : Pourquoi et comment
définir le métier de votre entreprise, Dunod. Cité par :
31
http://www.amazon.fr/Strat%C3%A9gie-lentreprise-Pourquoi-comment- Pour plus d’informations là-dessus, s’initier en matière du courant de la Ressource-
entreprise/dp/2100051539 Based View (RBV) et celui de la Competence-Based View (CBV).
30 32
DURAND R., (2005), Op. Cit., p. 98. Idem, p. 402.
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Effectivement, le mot « stratégie » et le qualificatif « stratégique »

Les niveaux de la stratégie sont parfois appliqués de façon abusive à différents domaines. Ils
sont ainsi souvent utilisés dans des situations où d'autres termes,
& Stratégie horizontale plus modestes et plus spécifiques, tels que politique, concept, idée,
plan, alliance ou tactique, seraient en fait plus appropriés34.

En matière de stratégie, les auteurs en distinguent souvent deux


La stratégie consiste à la définition d'actions cohérentes qui
niveaux phares : le niveau corporate (stratégie d’entreprise ou de
interviennent selon une logique séquentielle dans le but d’atteindre
groupe) et le niveau business (stratégie par domaine d’activité). Or,
des objectifs. Elle se traduit ensuite, au niveau opérationnel en
disent Frédéric Fréry et al, la stratégie intervient à plusieurs niveaux
plans ou programmes d'actions par fonctions.
dans une organisation et il est possible d’identifier au moins trois
niveaux distincts de la stratégie organisationnelle : la stratégie  Ensuite, dès qu’on franchi le stade de la business strategy, on se
d’entreprise, les stratégies de DAS et les stratégies opérationnelles33. positionne, littéralement parlant, au niveau tactique et non opérationnel,
en se référant, là-dessus, à la distinction fameuse entre les 3 niveaux
Puisqu’il est objet dans cette section d’aborder les niveaux de la de décision qui doivent être pris dans une organisation35 :
stratégie, on verra que ce troisième niveaux n’en fait pas parti.
D’ailleurs, l’appellation « stratégies opérationnelles » ne s’avère pas 1. Décisions stratégiques : ces décisions engagent l’entreprise
justifiée pour deux raisons : sur une longue période (> 5 ans) et sont prises par le plus haut
niveau hiérarchique, c’est-à-dire soit par la DG soit par l’État.
 D’abord, la première raison concerne le prédicat « stratégie » ; Elles sont uniques et occasionnelles ;
maladroitement appelées « stratégies opérationnelles » (ou même 2. Décisions tactiques : engagent l’entreprise à moyen terme (de
stratégies fonctionnelles), compte tenu de la dichotomie notoire 2 à 5 ans) et sont prises par les encadrements supérieurs. Ces
entre stade stratégique et celui opérationnel/fonctionnel, l’inclusion décisions sont peu fréquentes, peu prévisibles ;
de ces stratégies opérationnelles/fonctionnelles parmi les niveaux 3. Décisions opérationnelles : engagent l’entreprise à court terme
de la stratégie nuit au prestige de cette dernière entant que décision (< 2 ans). Les décisions sont prises par les exécutants. Elles
élaborée par le top management qu’engage le long terme et qui sont fréquentes, très prévisibles.
permet de gagner des avantages concurrentiels.
34
Stratégie,Wikipédia, dernière modification effectuée le 04/04/2015 à 04:56.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Strat%C3%A9gie
35
Prise de décision,Wikipédia, dernière modification effectuée le 15/05/2015 à 11:48.
33
FRERY F. et al., (2005), Op. Cit., p. 12. https://fr.wikipedia.org/wiki/Prise_de_d%C3%A9cision
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Ceci dit, les décisions que Frédéric Fréry et al appellent « stratégies En fonction donc des orientations stratégiques exprimées aux niveaux
opérationnelles » relèvent en réalité du niveau tactique, d’où la non corporate et business, l’entreprise définit sa politique financière
adéquation de l’adjectif « opérationnelles ». Le niveau tactique joue (ex : augmentation de capital ou endettement), de production (ex :
un rôle de relais entre les choix stratégiques en amont et leur intégration ou sous-traitance), de RH (ex : internalisation ou
traduction en action concrète en aval, ce qui renvoie au processus externalisation du recrutement : recourt aux cabinets de recrutement),
relevant du cycle de Contrôle de gestion. de marketing (ex : ciblage différencié ou indifférencié), etc. Dès
lors, lorsqu’on parlera des niveaux de la stratégie, on fera référence
En tout cas, qu’elles soient stratégies opérationnelles, fonctionnelles à la corporate et à la business strategy. On verra qu’il existe un
ou autres, il parait qu’il n’en est question que d’appellation car les niveau intermédiaire, celui de la stratégie horizontale (horizontal
auteurs se mettent d’accord que ce niveau n’est qu’une déclinaison strategy) inventée par M. Porter :
de la stratégie par fonction. Pour autant, le mieux consiste à parler
de « politiques fonctionnelles » (ou « politiques tactiques ») ou lieu  Le premier niveau est celui de la stratégie d’entreprise ou de
de « stratégies » afin de se démarquer du niveau stratégique. Dès groupe (corporate strategy). Elle concerne le dessin et le périmètre
lors, les politiques fonctionnelles se définissent de la sorte : de l’organisation dans sa globalité. Cela inclut le choix de couverture
géographique, de diversité de l’offre de produits et services et la
Bref, les politiques fonctionnelles déterminent comment chaque manière dont les ressources sont allouées entre les activités38.
fonction articule effectivement les stratégies définies au niveau Lorsqu’on est placé au niveau corporate, l’entreprise ou l’organisation
global, également au niveau des DAS36. Elles sont spécifiques à une est amenée à choisir entre :
fonction car les décisions n’engagent en général que cette dernière,
éventuellement au sein d’un domaine d’activité. Elles sont le plus  Une stratégie de spécialisation : un métier/DAS39 unique,
souvent prises par la DG et les cadres supérieurs en charge de la voire le choix du maintien dans un seul domaine d’activité et
fonction concernée. Les politiques fonctionnelles ont pour objectif l’exploitation de compétences bien maîtrisées (ex : Renault, Accor,
d’assurer la mise en œuvre effective des stratégies globales
(corporate strategies) et par domaine d’activité (business strategies). 38
FRERY F. et al., (2005), Op. Cit., p. 12.
39
De bons choix en matière des politiques fonctionnelles assurent la Comme on l’a déjà mentionné pour ce qui est de la diversification, lorsqu’on
parle de la stratégie de spécialisation, la distinction entre métier et DAS n’est pas
performance des stratégies des niveaux supérieurs37. tranchée entre auteurs ; certains raisonnent : métier = DAS, d’autres : un seul
métier peut donner lieu à plusieurs DAS,… chose qui marque les différences
36
FRERY F. et al., (2005), Op. Cit., p. 13. constatées au niveau des ouvrages lorsqu’il s’agit de définir les stratégies de
37
LECOCQ X. et al., (2009), Stratégie, Pearson Education France, p. 41. spécialisation et de diversification.
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Les interconnexions entre Unités d’Activité Stratégiques de Michael PORTER

Boeing). La spécialisation se définit comme la « concentration,


mobilisation et renforcement constants des ressources d’une entreprise  Le deuxième niveau en matière de stratégie qu’on a qualifié
sur un domaine d’activité particulier pour y renforcer sa position.40 ». d’« intermédiaire » est celui de la stratégie horizontale. En effet,
M. Porter part du principe que la stratégie du groupe (corporate
La spécialisation peut prendre plusieurs formes : une spécialisation strategy) est constituée par la réponse fournie aux deux questions
en termes de produit (1 produit pour différents marchés, ex : suivantes47 :
Boiron), une spécialisation en termes de technologie (une seule
technologie particulière, ex : OLITEC Modem), ou encore une 1. Dans quel segment stratégique la firme doit-elle se diversifier ?
spécialisation géographique (ex : agences de voyage). Les formes de 2. Comment coordonner les stratégies des différentes unités
spécialisation dépendent de la phase de démarrage (first mover41) (SBU) qui la composent ?
aussi bien que de maturité du DAS, de la position concurrentielle
de l’entreprise (forte vs faible ?) et de la taille de l’entreprise (PME Clairement, la deuxième question ci-dessus fait référence à ce
vs grande entreprise ?)42. niveau intermédiaire. Sur le plan temporel, l’élaboration d’une
stratégie horizontale ne succède pas forcément le choix d’une
 Une stratégie de diversification : plusieurs métiers (ex : stratégie de diversification au niveau de la corporate strategy et
Lagardère, Vivendi, Mitsubishi). Pareillement pour ce qui est de la précède l’élaboration des business strategies, car on peut tout de
spécialisation, il n’existe pas une seule modalité de diversification. même imaginer que la stratégie horizontale intervient après avoir
On parle ainsi de diversification géographique43 (ex : Bombardier), arrêté les stratégies par domaines d’activité. Elle est cependant
diversification verticale44 (ex : Benetton) ou encore d’intégration préparée dans une logique corporate par le top management : selon
horizontale45 (ex : Air France)46. Porter, « la stratégie horizontale, et non la gestion de portefeuille, est
la véritable mission de la haute direction de l’entreprise.48 ».
40
BOJIN J. et SCOETTL JM., (2005), Les outils de la stratégie, Editions d’Organisation,
p. 400.
41
Le first mover est un anglicisme désignant le premier acteur se lançant sur un ou de produits intermédiaires), soit vers l’aval (distribution, commercialisation)
marché. (BOJIN J. et SCOETTL JM., (2005), Op. Cit., p. 391).
42 45
GODELIER E., (2006), Op. Cit., pp. 26-27. La diversification horizontale appelée également intégration horizontale est
43
La diversification géographique est l’implantation de l’entreprise dans des l’extension d’activités de l’entreprise à de nouveaux domaines, complémentaires
zones géographiques nouvelles pour elle et où les facteurs clés de succès ne sont du portefeuille d’activités existantes (BOJIN J. et SCOETTL JM., (2005), Op. Cit., p.
pas forcément les mêmes que ceux des zones actuelles (BOJIN J. et SCOETTL JM., 391).
46
(2005), Op. Cit., p. 391). GODELIER E., (2006), Op. Cit., pp. 26 et 32.
44 47
La diversification verticale ou encore l’intégration verticale est l’extension PORTER M., (1999), Op. Cit., p. 433.
48
des activités de l’entreprise, soit vers l’amont (production de matières premières Idem, p. 383.
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Les interconnexions entre Unités d’Activité Stratégiques de Michael PORTER

Par niveau intermédiaire, on ne raisonne donc pas en terme La stratégie horizontale s’appuie sur l’avantage concurrentiel et non
temporel mais, plutôt, en terme de l’étendu du champ couvert par sur des considérations financières ou boursières. Les stratégies
la stratégie. d’entreprise assises sur des motifs purement financiers n’offrent
qu’une justification illusoire de la diversification. De plus, les bienfaits
Les firmes diversifiées ont prêté beaucoup plus d’attention à la des stratégies financières sont souvent éphémères. Seule la stratégie
première qu’à la seconde question49 qui débouche sur la mise en horizontale justifie la diversification et fait de l’entreprise autre
place d’une stratégie horizontale et renvoie par occasion au test, chose qu’un fonds commun de placement amélioré. A ajouter qu’en
avancé par M. Porter50, de l’avantage apporté pour conduire une l’absence d’une stratégie horizontale qui exploite réellement les
diversification faisant en sorte que le groupe doit pouvoir fournir interconnexions, l’apparition d’une « pénalité de conglomérat52 »
un avantage concurrentiel significatif à l’unité acquise, tout comme est souvent justifiée53.
celle-ci doit apporter un bénéfice au groupe51.
On a annoncé auparavant que la dernière étape d’une segmentation
La stratégie horizontale est un ensemble d’objectifs et de mesures stratégique consiste à analyser les interconnexions actuelles et/ou
cordonnées entre des unités de l’entreprise distinctes mais reliées. potentielles entre les DAS définis afin de les regrouper en bases
Elle s’impose au niveau du groupe, du secteur et du siège d’une stratégiques54, alors qu’en fait, la mission de segmentation stratégique
firme diversifiée. Elle ne supprime pas la nécessité d’unités distinctes ne peut pas être couronnée en l’absence d’une stratégie horizontale
au sein de l’entreprise et ne remplace pas les stratégies propres à propre à chaque base stratégique. La dite stratégie a pour qualité de
ces unités. coiffer le processus de segmentation stratégique.

Cette stratégie assure plutôt une coordination explicite entre les D’après Porter, de nombreuses firmes diversifiées ont accordé peu
unités de la firme, qui fait de la stratégie du siège ou du groupe d’attention, voire aucune, à la coordination des stratégies des unités,
quelque chose de plus que la somme des stratégies propres aux dans le moment où il est de plus en plus important d’y veiller et
différentes unités. C’est le mécanisme par lequel une firme diversifiée d’entrer dans de nouveaux secteurs dont la contribution à l’avantage
renforce l’avantage concurrentiel de ses unités. concurrentiel soit claire au sein de l’entreprise55.

52
Un conglomérat est un groupe qui possède des activités dans des domaines
49
Idem, p. 433. fort différents et non liés tels que le BTP, la finance ou l'électricité. A titre
50
En fait, en plus du test de l’avantage apporté, Porter parle de deux autres tests d’exemple, General Electric est un conglomérat.
53
essentiels pour la création de valeur dans une diversification. Il s’agit du test de PORTER M., (1999), Op. Cit., pp. 382-383.
54
l’attrait et du coût à l’entrée (BOJIN J. et SCOETTL JM., (2005), Op. Cit., p. 304). Cf. p. 7 de ce document.
51 55
Idem, p. 303. Idem, p. 433.
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Les interconnexions entre Unités d’Activité Stratégiques de Michael PORTER

dont ils ont besoin de manière plus efficace et/ou efficiente que ses
 Le deuxième niveau est celui des stratégies par domaine d’activité concurrents via une approche difficilement imitable par ces derniers.
(business strategy). La notion de « business strategy », ou stratégie Pratiquement, le choix d’une stratégie générique revient à se
concurrentielle, est la stratégie mise en œuvre par une organisation positionner en termes de coût (stratégie de domination par les coûts),
dans un domaine d’activité donné afin de maximiser sa performance de valeur (stratégie de différenciation) ou de marché (stratégie de
dans ce DAS. Elle ne doit pas être confondue avec celle de la niche)60.
« corporate strategy » qui concerne la stratégie de l’organisation
dans son ensemble axée sur la question de diversification et Bien entendu, la construction par l’organisation d’un avantage
d’identification des domaines d’activités dans lesquels l’organisation concurrentiel doit s’appuyer sur l’éventail des ressources et
doit investir et se développer56. compétences spécifiques dont elle dispose. Ces compétences
distinctives pourront, selon les cas, être davantage cohérentes avec
La business strategy revient généralement à définir comment un la mise en œuvre d’une stratégie de coût61, de valeur ou de marché.
avantage peut être obtenu par rapport aux concurrents et quels De l’autre côté, il doit nécessairement exister un lien entre les
nouveaux marchés peuvent être identifiés ou construits57. Ceci dit, stratégies par domaine d’activité et la stratégie de l’entreprise dans
pour chacun des domaines d’activités considérés, et compte tenu son ensemble, car la seconde alimente et contraint les premières62.
des résultats de l’analyse concurrentielle58, une stratégie appropriée
permettant à l’entreprise de se créer un avantage compétitif durable En guise de conclusion, le traitement des niveaux de la stratégie se
doit être mise en œuvre59. recoupe avec la démarche générale de l’analyse stratégique :

Les différentes options offertes en la matière forment ce qu’on Tableau n°1 : la démarche générale de l’analyse stratégique

appelle les 3 stratégies génériques de Michael Porter, c'est-à-dire les 1ère étape Définition des domaines d’activités de l’entreprise.
approches qui permettent d’établir un avantage concurrentiel au 2ème étape Analyse concurrentielle de chacun de ces domaines d’activité.
niveau d’un DAS. La discussion sur les stratégies génériques part du 3ème étape Choix d’une stratégie générique pour chaque domaine identifié.
4ème étape Détermination des voies de développement stratégique vers de
postulat qui fait qu’une organisation construit un avantage
nouvelles activités.
concurrentiel en proposant à ses clients ce qu’ils demandent ou ce 5ème étape Management du portefeuille d’activités et mise en place d’une
stratégie horizontale.
56
DURAND R., (2005), Op. Cit., p.259. Source : DURAND R., (2005), Op. Cit., p. 15 (Avec adaptation)
57
FRERY F. et al., (2005), Op. Cit., p. 12.
58 60
L’analyse concurrentielle convient à analyser pour chaque DAS (DURAND R., FRERY F. et al., (2005), Op. Cit., pp. 290, 291, 295 et 304.
61
(2005), Op. Cit., p. 13). DURAND R., (2005), Op. Cit., p. 14.
59 62
Idem, p. 13. FRERY F. et al., (2005), Op. Cit., p. 13.
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Les interconnexions entre Unités d’Activité Stratégiques de Michael PORTER

La première étape dans cette démarche permet de passer du niveau


corporate au niveau business. Les deuxième et troisième étapes sont
exclusivement consacrées à la business strategy. La quatrième étape
permet de revenir au niveau corporate qui est également la perspective
adoptée dans la cinquième étape63.

Effectivement, le raisonnement stratégique est de nature complexe ;


il ne découle pas d'un raisonnement linéaire mais d’un va et vient
entre le niveau corporate et celui business.

63
DURAND R., (2005), Op. Cit., p. 15.
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Les interconnexions entre Unités d’Activité Stratégiques de Michael PORTER

Pourquoi parler des interconnexions… ?

Les évolutions observées par Michael Porter l’ont conduit à bâtir un


cadre conceptuel qui agence les interconnexions actuelles et/ou 2. En outre, la croissance ayant sensiblement ralenti dans le
potentielles entre unités d’activité stratégiques. monde occidental, la priorité est donnée aux résultats, et par
conséquent à l’avantage concurrentiel qu’à la croissance. Alors
M. Porter stipule au niveau de l’avantage concurrentiel : « Plusieurs que jadis des unités très autonomes ont pu être le vecteur de
forces considérables, apparues notamment dans les années 70, vont la croissance, le dur environnement des années 80 les a obligés
contraindre les firmes à reconsidérer leur attitude à l’égard de la à mieux coordonner leurs stratégies en vue d’exploiter les
synergie. Les développements économiques, technologiques ainsi que interconnexions ;
des pressions concurrentielles accrues renforcent l’avantage que peut
prendre une firme qui sait identifier et exploiter les interconnexions 3. Ensuite, l’exploitation des interconnexions, auparavant trop
entre des activités distinctes mais voisines.64 ». complexe et couteuse, devient désormais possible grâce au
progrès technologique qui facilite la communication et réduit
Pour appuyer son raisonnement, l’auteur se base sur 4 points, qu’il les coûts de coordination entre unités. La sophistication croissante
a appelé « forces puissantes », ayant joué irrésistiblement dans les des SI ouvre des perspectives d’interconnexions car elle brise
années quatre-vingt et quatre-vingt-dix en faveur d’une exploitation les barrières entre secteurs et tend à les rapprocher ;
des interconnexions65 :
4. Enfin, comme conséquence aux trois forces précédentes, une
1. Les années quatre-vingt ont vu une transformation du mode concurrence multipolaire s’est développée. Les concurrents
de diversification ; l’accent est mis sur la diversification dans multipolaires sont des firmes qui luttent les unes contre les
des domaines connexes chose qui explique d’autre part la vogue autres non pas au niveau d’une seule unité, mais de plusieurs
de la gestion de portefeuille ; unités connexes à la fois. Conformément, seule la stratégie
horizontale, qui s’applique justement à de telles unités
64
connexes voire interconnectées, offre la perspective globale
PORTER M., (1999), Op. Cit., p. 382.
65
Idem, pp. 384-387. pour faire face à des concurrents multipolaires.
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Les interconnexions entre Unités d’Activité Stratégiques de Michael PORTER

En fait, ce qu’on vient de citer sont des facteurs que Porter les a Face au contexte de la décentralisation et
considérés jouer en faveur de l’exploitation des interconnexions
entre unités stratégiques.
d’enthousiasme pour la synergie
& Introduction du concept d’« organisation horizontale »
Cependant, on juge que la prise en conscience de la pertinence
d’analyse des interconnexions entre unités d’activité stratégiques et, Au cours des années 60 et au début des années 70, de nombreuses
subséquemment, des enjeux de leur exploitation, a été inspirée par entreprises s’étaient diversifiées en invoquant le prétexte de la
Michael Porter comme réaction à un certain nombre de pratiques synergie qui fait que la combinaison d’activités différentes mais
erronées qu’il a observé au cours des années soixante et début des voisines pouvait créer une valeur par synergie.
années soixante-dix.
Néanmoins, les entreprises semblaient se douter des bienfaits de la
On estime que l’essentiel de ces observations se résume de la sorte : synergie à partir de la fin des années soixante-dix, bien qu’en réalité,
« La décentralisation, combinée au désenchantement à l’égard de l’échec de la synergie vient de l’incapacité des firmes à la comprendre
la synergie, a renforcé l’idée selon laquelle la gestion de portefeuille et à la concrétiser dans la pratique par manque des outils d’analyse
est la principale tâche stratégique de la haute direction.66 ». Or, pour nécessaires, et ce, même lorsqu’une réelle possibilité de synergie
Michael Porter, « la stratégie horizontale, et non la gestion de existe68.
portefeuille, est la véritable mission de la haute direction de
l’entreprise.67 ». Pour ce faire, Porter s’est donné à cette problématique d’exploitation
de la synergie en faisant surtout comprendre le contenu de la
On explique… : synergie, d’ailleurs jadis obscure : « Le plus souvent, la synergie a été
comprise en termes d’interconnexions intangibles, c'est-à-dire le

1. Face au contexte de la décentralisation et d’enthousiasme pour transfert de compétences d’une unité à une autre. ». Avec cela, « Les
la synergie ; interconnexions intangibles furent au centre des débats sur la
2. Pour une mise en perspective de la gestion ou de l’analyse de synergie. Les difficultés de découvrir et d’exploiter les interconnexions
portefeuille… intangibles importantes expliquent pour une grande part la déception
que de nombreuses firmes ont ressentie à l’égard de la synergie. ».
Or, « La synergie ne correspond pas à une, mais à trois idées
66
Idem, p. 382.
67 68
Idem, p. 383. Idem, pp. 381-382.
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Les interconnexions entre Unités d’Activité Stratégiques de Michael PORTER

fondamentalement différentes (en l’occurrence, les interconnexions


tangibles, intangibles et de concurrence). Il n’est pas surprenant que En réalité, à la fin des années 70, la synergie, semblait-il, était une
la synergie ait été un concept aussi flou. »69. idée intéressante mais qui se concrétisait rarement dans la pratique.
En conséquence, l’enthousiasme pour la synergie s’était envolé en
Ceci dit, pour Porter, la notion de synergie est par là synonyme de ouvrant les portes pour un nouveau mode de gestion, celui de la
celle d’« interconnexions » comprises en termes d’interconnexions décentralisation des activités, voire une responsabilisation des
à la fois tangibles, intangibles et de concurrence. Partant de l’idée dirigeants des unités et leur récompensation en fonction des
de synergie, l’auteur développe alors le concept des interconnexions résultats.
peut être par ce que ce dernier apparait plus connu et admissible
que celui de la synergie. Toutefois, conformément à M. Porter, des mécanismes favorisant les
interconnexions devaient être mis en place dans les structures
La problématique de concrétisation de la synergie revient donc à décentralisées afin d’assurer le succès de la stratégie horizontale72.
l’exploitation des interconnexions entre unités pour l’obtention
d’un avantage concurrentiel. La dite problématique se résout peu à Il s’agit, en l’occurrence, de l’idée d’« organisation horizontale », que
peu lorsque Michael Porter identifie trois types d’interconnexions70, l’on qualifie dorénavant comme étant la thèse que l’auteur propose
qui peuvent d’ailleurs coexister : face à la problématique de mise en œuvre de la synergie.

1. Les interconnexions tangibles ; Certainement, la décentralisation reste une nécessité dans les firmes
2. Les interconnexions intangibles ; diversifiées, mais elle doit être recoupée par des mécanismes visant
3. Les interconnexions de concurrence. à assurer l’exploitation des interconnexions importantes.

D’après l’auteur, les interconnexions ne reposent pas sur l’idée Du point de vue organisationnel, l’avantage concurrentiel introduit
fameuse de « l’adéquation » qui sous-tend la plupart des discussions pour la première fois le concept d’« organisation transverse », qualifié
sur la synergie, mais sur des possibilités bien réelles de réduire les par l’auteur d’organisation horizontale, qui peut être défini comme
coûts et de renforcer la différenciation dans pratiquement toutes les le type d’organisation visant un optimum global, par opposition aux
activités de la chaine de valeur71. organisations qui ne peuvent obtenir que la somme des optimums
locaux.
69
Idem, pp. 390 et 420.
70
Cf. p. 27 de ce document.
71 72
Idem, p. 382. Idem, pp. 382-383.
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Les interconnexions entre Unités d’Activité Stratégiques de Michael PORTER

Porter introduit le concept comme étant le mode d’organisation semble suffisamment novatrice à l’auteur pour parler d’une nouvelle
permettant d’exploiter les interconnexions entre départements forme d’organisation75.
d’une même firme. Autrement dit, c’est l’ensemble des pratiques
d’organisation qui facilitent les interconnexions. L’organisation horizontale permet de surmonter des obstacles à
l’exploitation concrète des interconnexions entre unités même
L’organisation horizontale doit relier entre elles les unités de la lorsqu’une réelle possibilité de synergie existe76 car même des
structure verticale. Il faut trouver un équilibre entre les éléments interconnexions offrant un réel intérêt peuvent se révéler difficiles à
verticaux et ceux horizontaux d’une firme diversifiée pour libérer mettre en place. C’est le cas quand les avantages procurés ne sont
les potentialités des interconnexions73. Cette organisation repose pas (ou ne semblent pas) répartis de manière égale entre les unités
sur quatre éléments74 : d’activité stratégiques.

1. La structure horizontale correspond à un découpage transverse Les responsables de ces dernières peuvent aussi craindre une perte
dans certains domaines, au regroupement d’unités ou à une d’autonomie, surtout si la culture répandue dans l’entreprise jusqu’à
centralisation partielle ; présent a été une décentralisation poussée, avec une identité propre
2. Les systèmes horizontaux concernent la gestion transverse de à chaque division77.
la planification, du contrôle et du choix des investissements ;
3. Les pratiques horizontales des ressources humaines sont Aucun mécanisme unique cherchant à encourager la coopération
destinées à faciliter la coopération ; entre les unités ne suffit à garantir que toutes les interconnexions
4. Enfin, des structures horizontales de résolution des conflits stratégiquement souhaitables seront exploitées. Il faut recourir à
peuvent se révéler nécessaires. plusieurs pratiques qui se renforcent les unes les autres. Les dirigeants
du siège, à travers leur attitude, leur articulation des finalités de
La combinaison de ces éléments horizontaux et d’une structure
l’entreprise, leur volonté de créer des valeurs communes et une
verticale (sans correspondre pour autant à une structure matricielle)
identité d’entreprise forte, ont un rôle majeur à jouer pour développer
73 l’organisation horizontale78.
YAN H., (2000/2001), « Les fiches de lecture de la Chaire D.S.O – Michael Porter :
L’avantage concurrentiel ». http://mip-
ms.cnam.fr/servlet/com.univ.collaboratif.utils.LectureFichiergw?ID_FICHIER=12
95877017838
74 75
FLEURY H., (1998/1999), « L’avantage concurrentiel : Comment devancer ses Idem.
76
concurrents et maintenir son avance – Résumé de l’édition traduite de YAN H., (2000/2001), Op. Cit.
77
l’américain par Philippe de Lavergne », p. 9. FLEURY H., (1998/1999), Op. Cit, p. 9.
78
http://lverdon.free.fr/resumes/avantage.doc YAN H., (2000/2001), Op. Cit.
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Les interconnexions entre Unités d’Activité Stratégiques de Michael PORTER

Pour une mise en perspective de l’analyse Les « modèles de portefeuille d’activités » ont pour finalité de

de portefeuille formaliser et de faciliter une telle gestion globale d’un ensemble


diversifié d’activités. Pour cela, ils concentrent l’analyse sur deux
& Mise en relief d’un management stratégique suivant les liaisons dimensions principales81 :
entre SBU
1. La valeur des domaines d’activité considérés ;
Dès lors qu’une entreprise s’est diversifiée, et est donc présente sur 2. La position concurrentielle de l’entreprise sur chacun de ces
plusieurs domaines d’activité différents, se pose le problème du domaines.
management intégré de l’ensemble de ces activités pour déterminer
si leur somme constitue un ensemble équilibré et cohérent. Si tel Au niveau stratégique, l’analyse de portefeuille constitue le
n’est pas le cas, l’entreprise est censée faire évoluer la composition fondement des décisions de développement, de diversification et de
de son portefeuille et formuler une véritable « stratégie de portefeuille désengagement. Ces décisions sont reprises ensuite par un processus
d’activités »79. formel différent, au niveau opérationnel, pour être traduites en
programmes et finalement en budgets82.
Les premiers modèles d’analyse stratégique sont venus des États-
Lorsqu’on parle des modèles d’analyse de portefeuille, la littérature
Unis, dans les années 60. Le plus connu est celui de la HBS proposé
fait référence en la matière à 3 matrices : la matrice croissance/part
pour la première fois dans un ouvrage devenu classique signé des
de marché relative, la matrice maturité/position concurrentielle et
professeurs Learned, Christensen, Andrews et Guth, et connu sous le
la matrice attraits/atouts83 :
nom LCAG, ou encore sous l’acronyme « SWOT » (Strengths,
Weaknesses, Opportunities, Threats).
1. La matrice croissance/part de marché relative : développée
par le Boston Consulting Group (BCG), cette matrice s’articule
Ce modèle apparait aujourd’hui dépassé et simpliste et il est avant
autour de 2 variables clés : (i) taux de croissance du segment
tout adapté à l’analyse des stratégies concurrentielles (business
stratégique (faible/fort) et (ii) part de marché relative de
strategies). L’analyse des stratégies de groupe (corporate strategies)
l’entreprise par rapport à son principal concurrent (faible/forte).
a été formalisée plus tardivement de façon très largement
C’est la plus ancienne et la plus élémentaire, voire simple. La
indépendante par des cabinets de conseil en stratégie80.
81
Idem, p. 14.
79 82
DURAND R., (2005), Op. Cit., pp. 14-15. Idem, p. 604.
80 83
Idem, pp.11- 13. BOJIN J. et SCOETTL JM., Op. Cit., p. 261.
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Les interconnexions entre Unités d’Activité Stratégiques de Michael PORTER

matrice BCG détermine 4 types d’activités (vedette, dilemme,


poids mort, vache à lait) et considère l’entreprise comme un 3. La matrice attraits/atouts : développée par le fameux cabinet
portefeuille de segments contribuant chacun à sa croissance McKinsey lors d’une importante étude concernant la stratégie
et sa rentabilité. Chaque position sur la matrice représente d’une des divisions de General Electric86, la matrice attraits/
une stratégie spécifique (maintient, rentabilisation, arrêt, atouts repose sur le principe que les facteurs à prendre en
reconversion,…), cependant une vision d’ensemble permet compte varient en fonction des industries ou des entreprises. La
d’envisager des transferts de ressources pour assurer l’avenir matrice McKinsey utilise également une analyse multicritères :
de l’entreprise de manière à ce qu’un équilibre global entre les elle croise 2 dimensions, l’attrait d’une activité pour l’entreprise
activités soit préservé84. (faible, moyen, élevé) et les atouts que celle-ci possède pour y
réussir (faible, moyen, élevé), chacune composée de plusieurs
2. La matrice maturité/position concurrentielle : développée critères. Les segments se situent donc dans une matrice à neuf
par Arthur D. Little, la matrice d’ADL est qualifiée parfois d’école cases. Trois grands types de stratégies de portefeuille s’en
« organique » pour la distinguer de l’école dite « mécanique » dégagent en fonction de la zone où se situe le segment, il
de la BCG. La matrice maturité/position concurrentielle part s’agit alors d’investir, de sélectionner ou de moissonner87.
d’une approche multicritère qui prend en compte (i) le degré
de maturité de l’activité divisée selon les quatre phases du L’analyse de portefeuille d’activités correspond à une étape dans
cycle de vie des segments (démarrage, croissance, maturité, l’analyse stratégique qui mérite d’être affinée et corrigée, voire
déclin) et (ii) la position compétitive qui mesure les forces dépassée.
relativement aux concurrents en déterminant les FCS de
l’activité envisagée (marginale, défavorable, favorable, forte, Outils éprouvés, les trois présentations matricielles de gestion de
dominante). De la sorte, les segments sont situés dans une portefeuille ci-dessus, d’ailleurs particulièrement utiles aux grands
matrice de 20 (45) cases. Par rapport à la matrice BCG, le groupes diversifiés, disposent d’avantages évidents mais aussi des
modèle d’ADL fournit des prescriptions stratégiques moins limites88. Le tableau ci-après dresse un panorama des apports et
tranchées : stratégie d’abandon, stratégie de développement, limites de l’analyse de portefeuille :
stratégie de développement sélectif. Pourtant, la matrice ADL
permet d’analyser les stratégies de chaque concurrent et de 86
A noter que la BCG travaillait à l’époque simultanément dans une autre
prévoir son avenir à plus ou moins LT85. division et appliquait sa matrice croissance/part de marché relative (Idem, p.
285).
84 87
Idem, pp. 262-265. Idem, pp. 284-291.
85 88
Idem, pp. 276-281. Idem, p. 295.
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Les interconnexions entre Unités d’Activité Stratégiques de Michael PORTER

Tableau n°2 : Apports et limites des analyses de portefeuille


Figure n°4 : Management stratégique suivant les liaisons entre SBU
 Apport d’orientations externes prenant en compte des variables que
les outils de gestion ou de planification d’entreprises négligent parfois
de prendre en considération.
 Fixation d’objectifs spécifiques à chaque activité qui donnent des
Apports
indicateurs sur la stratégie envisageable pour chacun des segments.
 Équilibrage de marges brutes d’autofinancement par l’identification
des zones qui nécessitent des investissements par rapport à celles qui
doivent les financer.
 Des conditions de validité restrictives : stabilité de la structure de
Source : BOJIN J. et SCOETTL JM., (2005), Op. Cit., p. 308
l’industrie, progression prévisible de la technologie, évolution lente
des besoins des clients, peu d’opportunités d’innovation.
 Structure des modèles fondés sur une méthode de segmentation Ainsi, l’approche portérienne souligne les limites de l’analyse de
pas toujours bien définie et des variables explicative réduites ou non portefeuille en proposant d’autres grilles qui insistent davantage
pertinentes (au moins dans la BCG).
Limites  Non prise en compte des synergies entre les segments. sur les relations entre les SBU. Partant, Michael Porter distingue
 Recommandations qui en découlent trop schématiques du type : quatre concepts clés pour conduire la stratégie d’un groupe
j’investis, je maintiens, je désinvestis. diversifié90 :
 Mise en œuvre qui en découle part d’une approche technocratique.
 Non prise en considération des aspects « soft » de l’entreprise.
 Absence de créativité stratégique : les conditions de la concurrence 1. Le management par l’analyse de portefeuille : dans le
ne sont pas remises en causes et la déstabilisation ou un changement management par l’analyse de portefeuille, il s’agit de maitriser
radical dans la façon de définir le métier ne sont pas envisagés. les résultats en reportant les ressources transférables d’une
Source : Conception de l’auteur sur la base de BOJIN J. et SCOETTL JM., (2005), Op. Cit., pp.
295-301
unité qui génère des liquidités vers une autre qui en a besoin
pour devenir profitable ;
Michael Porter propose une mise en perspective de l’analyse de
portefeuille dans l’ensemble des choix stratégiques d’un groupe 2. La stratégie de restructuration : cette dernière concerne
diversifié. Selon Porter, l’analyse de portefeuille n’est qu’un concept essentiellement les unités acquises issues d’organisations
parmi d’autres pour gérer stratégiquement un groupe car ce dernier défaillantes ou d’industries en pleine mutation. Le groupe
doit apporter une valeur supplémentaire : le groupe représente intervient alors pour modifier la stratégie ou introduire une
davantage que la simple somme des SBU qui le compose89. nouvelle technologie. Après assainissement, le groupe revend

89 90
Idem, p. 303. Idem, pp. 305-311.
M. Rahou Page 23 sur 41

Page 23
Les interconnexions entre Unités d’Activité Stratégiques de Michael PORTER

les unités les plus solides dont les résultats sont positifs pour
réduire le coût de l’acquisition. Il arrive fréquemment que les Chacune de ces quatre concepts stratégiques ne peut être mis en
groupes qui se restructurent profitent des stratégies de application qu’après avoir rempli les trois conditions définis (qu’on
portefeuille antérieures. Pour se distinguer de ses dernières, a auparavant cité92) par les tests essentiels de la création de valeur
les meilleures entreprises considèrent qu’elles n’acquièrent dans une diversification93.
pas seulement une entreprise mais qu’elles restructurent une
industrie ; Porter, après avoir étudié la stratégie et les résultats de nombreuses
entreprises, suggère que les activités partagées et les transferts de
3. Le transfert de compétences : le transfert de compétences compétences94 devraient à l’avenir générer davantage de valeur que
est une base solide pour la stratégie d’un groupe diversifié. la gestion de portefeuille95. En termes d’intérêt, une firme peut élaborer
Chaque SBU a une chaine de valeur spécifique91, mais il est à partir de l’exploitation des interconnexions96 :
possible de mettre en commun les compétences acquises entre
les différentes unités d’activité. Deux entreprises types qui se 1. Une stratégie horizontale avec les unités existantes ;
sont diversifiées en s’appuyant sur le transfert de compétences 2. Une stratégie de diversification pour entrer dans de nouveaux
sont : « 3M » et « Pepsico » ; secteurs.

4. Le partage d’activités : partager les activités consiste à relier Par ailleurs, l’identification des interconnexions possibles concernant
sur le terrain les domaines de plusieurs SBU. A titre d’exemple, un secteur, y compris les interconnexions de concurrence, permet à
Procter & Gamble emploie un système de distribution et une l’entreprise de prévoir quels seront les prochains concurrents les
force de vente commune pour les serviettes en papier et les plus probables. Ces derniers sont ceux pour lesquels le secteur est97 :
couches-culottes. Le partage d’activités dégage un avantage
compétitif en diminuant les coûts ou en permettant de se 92
Cf. p. 14 de ce document.
93
différencier plus encore (ex : services apportés aux clients). Idem, p. 305.
94
Bien entendu, au niveau de l’avantage concurrentiel, Porter identifie 3 types
Une analyse du coût et des bénéfices envisageables concernant
d’interconnexions potentielles entre UAS qui sont : (i) le partage d’activités, (ii) le
le partage d’activités doit permettre d’évaluer les synergies transfert de compétences et (iii) les interconnexions de concurrence. Néanmoins,
possibles. Le coût de la coordination doit être compensé par ce sont uniquement les 2 premières formes d’interconnexions qui sont permises
par la chaine de valeur et donc basées sur une analyse interne (Cf. p. 27 de ce
les avantages retirés. document).
95
Idem, p. 311.
96
PORTER M., (1999), Op. Cit., p. 384.
91 97
Cf. pp. 26-27 de ce document. Idem, p. 432.
M. Rahou Page 24 sur 41

Page 24
Les interconnexions entre Unités d’Activité Stratégiques de Michael PORTER

 Un moyen logique de créer ou d’étendre une interconnexion


importante ;
 Une extension nécessaire pour contrer les interconnexions
des concurrents.

L’analyse portérienne débouche sur le fait que chaque interconnexion


possible conduira à d’autres secteurs et que, inversement, l’entreprise
peut découvrir de nouvelles interconnexions, et donc de nouveaux
concurrents éventuels, en examinant les secteurs où les concurrents
sont présents mais dont la firme est absente. En identifiant des
secteurs connexes, une firme peut localiser les concurrents potentiels
dont l’entrée dans les secteurs où la firme est présente serait
logique98.

L’exploitation des interconnexions devient fondamentale pour se


procurer un avantage concurrentiel par rapport à ses concurrents.

98
Idem.
M. Rahou Page 25 sur 41

Page 25
Les interconnexions entre Unités d’Activité Stratégiques de Michael PORTER

Les interconnexions entre Unités d’Activité Stratégiques

Pour développer des synergies, il faut que les SBU ne soient pas
seulement en concurrence mais qu’elles coopèrent. Un des moyens Figure n°5 : La chaine de valeur de Michael Porter
de concevoir ces liaisons s’appuie sur la chaine de valeur99.

En effet, le concept de chaîne de valeur a été introduit en 1986 par


Michael Porter dans son ouvrage "L'avantage concurrentiel". La
chaine de valeur, qui décompose l'activité de l'entreprise en séquence
d'opérations élémentaires, se voit comme un outil de repérage des
activités et des fonctions qui distinguent l’organisation de ses
concurrents en positif ou en négatif.

Basée principalement sur une analyse de la valeur, des coûts et des


marges, la chaine de valeur permet de prendre conscience des
activités clés déterminant la capacité d'une organisation à obtenir
un avantage concurrentiel dans un secteur ou segment. Il y a trois
grandes catégories d’activités dans une chaîne de valeur :

1. Les activités primaires liées à la production : fabrication ;


2. Les activités primaires liées à la vente et à la relation
client : commercialisation, marketing, services après-vente ; Les activités principales bénéficient du support des activités de
3. Les activités de soutien : infrastructures de l’entreprise,
soutien qui contribuent à augmenter leur efficacité ou efficience. Le
gestion des ressources humaines, R&D, achats. niveau de détail de la décomposition en activités élémentaires doit
être guidé par l’importance des dites activités à l’égard de l’avantage
99
concurrentiel. La chaîne de valeur permet de mettre en évidence les
BOJIN J. et SCOETTL JM., Op. Cit., p. 309.
M. Rahou Page 26 sur 41

Page 26
Les interconnexions entre Unités d’Activité Stratégiques de Michael PORTER

activités clés de la firme, c’est à dire celles qui ont un impact réel en Les interconnexions de concurrence surviennent quand les rivaux
termes de coût ou de différenciation par rapport aux concurrents100. de la firme se combattent sur plusieurs terrains. Ces derniers,
appelés « concurrents multipolaires », créent inévitablement des
Chaque segment ou encore SBU correspond à une chaine de valeur liaisons entre secteurs parce que les actions qu’ils entreprennent
spécifique qui va de la conception à la vente décrivant la série des dans un secteur ont des incidences sur un autre. Lorsqu’on est face
étapes et activités discrètes réalisées par une unité dans son domaine à des interconnexions de concurrence, l’organisation lutte contre
d’activité et c’est sur cette chaine que la SBU dégage des avantages ses concurrentes diversifiées par l’intermédiaire de plusieurs unités.
concurrentiels. La chaine de valeur permet deux types de relations L’avantage concurrentiel de la firme face à ces concurrents alors
entre les SBU101 : multipolaires dépend en grande partie de la pertinence et l’efficience
des interconnexions qu’exploitent les unités en question.
1. Le transfert de compétences ou interconnexions intangibles ;
2. Le partage des activités appelé « interconnexions tangibles ». Les trois types d’interconnexions peuvent apparaitre simultanément.
Les interconnexions tangibles qui concernent certaines activités
Quoique le transfert de compétences et le partage des activités sont créatrices de valeur peuvent être complétées par des interconnexions
les deux types d’interconnexions permises par la chaine de valeur intangibles entre d’autres activités. Les activités communes à deux
entre SBU, Michael Porter et dans son chef d’œuvre "L’avantage activités peuvent être améliorées par un savoir-faire acquis dans des
concurrentiel"102 apparu en 1985, identifie 3 types d’interconnexions activités similaires d’autres unités.
possibles entre les UAS d’une organisation : (i) les interconnexions
tangibles, (ii) intangibles et (iii) de concurrence. Des interconnexions tangibles et intangibles interviennent souvent
quand des concurrents multipolaires sont présents. Mais chaque type
Ceux-ci forment les trois types d’interconnexions possibles entre d’interconnexion conduit à un avantage concurrentiel par des voies
unités d’activité qui, pour Porter, « Toutes ont des effets importants, différentes. Si les interconnexions de concurrence sont indépendantes
mais distincts, sur l’avantage concurrentiel.103 ». des interconnexions tangibles et intangibles, elles coexistent souvent
par ce que ces deux dernières offrent une base de différenciation ; les
interconnexions de concurrence rendent crucial la découverte et
100
YAN H., (2000/2001), Op. Cit. l’exploitation des interconnexions tangibles et intangibles. Partant,
101
BOJIN J. et SCOETTL JM., Op. Cit., p. 309. un concurrent multipolaire peut obliger une firme à exploiter une
102
Il sera affaire au niveau de cette section d’une reproduction synthétique du
chapitre 9 dudit ouvrage appelé « Les interconnexions entre unités de l’entreprise », interconnexion au risque de subir un désavantage concurrentiel104.
sans pour autant se prêter à une analyse supplémentaire.
103 104
PORTER M., (1999), Op. Cit., p. 388. Idem, pp. 389, 390 et 421.
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Les interconnexions entre Unités d’Activité Stratégiques de Michael PORTER

Les interconnexions tangibles 1. Le partage améliora nettement la différenciation s’il concerne


une activité importante pour la différenciation. En outre, la
Ou le partage des activités mise en commun peut jouer sur la différenciation soit (i) en
accentuant le caractère unique de l’activité commune quand
cette dernière devient plus intéressante pour l’acheteur ou (ii)
« La chaine de valeur constitue le point de départ de l’analyse des
en réduisant le coût de cette singularité via les facteurs qui
interconnexions tangibles.105 ». C’est par cette réplique que commence
commandent l’évolution des coûts des activités différenciées ;
notre auteur ses propos concernant les interconnexions tangibles
dans son ouvrage référentiel.
2. La mise en commun d’activités n’aura d’effet sensible sur

Les interconnexions tangibles correspondent à la mise en commun les coûts totaux de la firme que si les activités créatrices de
d’activités créatrices de valeur appartenant à différentes unités de valeur concernées représentent une fraction importante des
l’entreprise, qu’autorisent des clients, des canaux de distribution, coûts d’exploitation ou des actifs immobilisées.
des technologies ou d’autres facteurs communs106.
Généralement, il est rare que toutes les unités concernées par une
Une unité peut pratiquement partager n’importe quelle activité interconnexion y voient un avantage équivalent car la mise en
créatrice de valeur avec une autre unité de la firme, qu’il s’agisse commun d’une activité n’aboutira pas à une amélioration égale des
d’une activité principale ou d’une activité de soutien, d’une ou de coûts, ou encore de la différenciation, à l’égard de toutes les unités
plusieurs activités. Toutefois, si presque toutes les activités créatrices de l’entreprise. La portée des interconnexions dépend108 :
de valeur sont communes, on n’a en réalité plus affaire à des UAS
distinctes, mais à une seule. 1. D’échelle des unités : généralement, les grandes unités d’une
entreprise se montrent rarement enthousiastes devant les
La mise en commun des activités crée ainsi un avantage concurrentiel interconnexions avec des unités plus petites. En fait, alors que
lorsqu’elle permet une baisse des coûts ou un accroissement de la ces dernières connaitront une amélioration extraordinaire de
différenciation de manière à compenser les coûts supplémentaires leurs coûts, les grandes unités ne tireront pas grand profit, par
qu’elle engendre107 : les coûts, d’une mise en commun d’une activité ;
2. Des différences dans la structure des secteurs propre à
105
Idem, p. 391. chaque unité : une faible amélioration des coûts peut, entre
106
Idem, p. 388.
107 108
Idem, pp. 391-395. Idem, pp. 396-397.
M. Rahou Page 28 sur 41

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Les interconnexions entre Unités d’Activité Stratégiques de Michael PORTER

autres, ne pas avoir la même importance selon qu’il s’agit d’un  Bien que deux produits puissent être vendus par l’intermédiaire
secteur où la firme lutte par les coûts (stratégie de domination de grands magasins, il n’y aura probablement que de faibles
par les coûts) ou par la qualité (stratégie de différenciation) ; interconnexions entre circuits de distribution si l’un est vendu
3. Des stratégies des unités concernées : une interconnexion dans des chaines populaires et l’autre dans des grands magasins
qui renforce la singularité peut être très intéressante pour une de prestige.
unité et peu pour une autre !
Enfin, il est souvent plus facile de mettre en commun des activités
Pour identifier les interconnexions tangibles dans une firme, il est indirectes, comme les études de marché, la gestion de la force de
utile de commencer par recenser toutes les formes de mise en vente et la production de publicité, que des activités directes parce
commun d’activités qui interviennent dans la pratique ainsi que les qu’elles entrainent moins de coûts de compromis111.
différentes façons par lesquelles elles peuvent créer un avantage
concurrentiel. Michael Porter identifie cinq grandes catégories au  Interconnexions dans la production : ce type d’interconnexions
sujet des formes de mise en commun des activités dont chacune renvoi à la mise en commun d’activités créatrices de valeur situées
d’elles soulève des problèmes spécifiques. Il s’agit des109 : en amont, telles que la logistique interne, la fabrication des pièces,
l’assemblage, la vérification, et des fonctions indirectes tel que
 Interconnexions tenant au marché : elles concernent toute mise l’entretien et l’infrastructure du site. Le choix des activités à mettre
en commun d’activités principales qui touchent à la clientèle, depuis en commun dépendra des stratégies des unités concernées : deux
la logistique externe jusqu’aux services, chose qui inclut la vente et unités ayant opté pour une stratégie de différenciation auront plus
le service après-vente. Les possibilités de mise en commun sont plus de chances d’avoir des seuils de tolérance ou normes de vérification
riches quand les unités ont des clients et des circuits de distribution proches que deux unités dont l’une choisit la domination par les coûts
communs à condition de s’éloigner de la tendance à considérer de et l’autre la différenciation112.
façon trop large les clients et les circuits. En effet110 :
 Interconnexions dans les approvisionnements : elles font
 Les interconnexions dans le marché ne sont potentiellement référence à la mise en commun des moyens de production communs
intéressantes que lorsque les acheteurs du produit sont les achetés à l’extérieur et qui existent souvent (moyens de production
mêmes ou en contact les uns avec les autres ; communs) dans les firmes diversifiées, indépendamment des matières
premières et des grands équipements. Les interconnexions dans les

109 111
Idem, pp. 403-405. Idem, p. 409.
110 112
Idem, pp. 405 et 408. Idem, pp. 409-410.
M. Rahou Page 29 sur 41

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Les interconnexions entre Unités d’Activité Stratégiques de Michael PORTER

approvisionnements sont évidemment intéressantes d’autant plus grand effet sur l’avantage concurrentiel, parce que l’infrastructure ne
que les fournisseurs sont de plus en plus désireux de négocier des représente pas une fraction importante des coûts et que la mise en
contrats qui couvrent l’ensemble des besoins mondiaux d’une firme commun n’a guère d’effet sur la différenciation.
et de jouer sur les prix. Cependant, il ne faut pas aller loin dans la
voie d’approvisionnements communs faute de ne pas percevoir les En matière des interconnexions dans l’infrastructure, celles financières
coûts de compromis potentiels ou de mise en place d’un processus ont été considérées comme un avantage important que la firme
d’approvisionnement rigide qui ne laisse aucune place à des occasions diversifiée procure à ses unités et il en existe deux sources : (i) la
de négociation impromptues113. collecte et (ii) l’utilisation des capitaux (essentiellement le fond de
roulement). On discute si souvent des interconnexions financières
 Interconnexions technologiques : qui dit interconnexions par ce qu’elles sont les plus faciles à exploiter et par ce qu’elles
technologiques dit une mise en commun de l’une des activités de entrainent, en général, peu de coûts de compromis.
développement technologique au niveau de la chaine de valeur. Les
interconnexions technologiques naissent d’un partage des activités Toutefois, les interconnexions financières sont rarement la base d’un
principales et interviennent le plus souvent en conjonction avec les avantage concurrentiel important vu que les économies d’échelle
interconnexions de production ou celles de marché. Néanmoins, les sont généralement modestes dans le financement. D’autres formes
promesses de certaines interconnexions technologiques peuvent d’interconnexions dans l’infrastructure peuvent avoir de l’importance
être illusoires particulièrement quand les disciplines scientifiques dans certains secteurs. Ainsi et à titre d’exemple :
partagées sont bien moins vitales pour la réussite des unités que
celles qui ne le sont pas. Par surcroit, pour avoir un impact, les  Une infrastructure commune pour l’embauche et la formation
interconnexions technologiques doivent porter sur des technologies peut avoir un intérêt pour les prestataires de services ;
qui font la différence en termes de coûts ou de différenciation114.  Des relations communes avec les pouvoirs publics peuvent
constituer un avantage substantiel pour les firmes spécialisées
 Interconnexions dans l’infrastructure : cette catégorie porte dans les ressources naturelles115.
sur des activités telles que la gestion financière, le service juridique,
la comptabilité ou la gestion des ressources humaines. Certaines Porter stipule que le partage d’activités implique, pourtant, des
activités relatives à l’infrastructure sont presque toujours communes coûts qui vont des coûts de coordination à la nécessité de modifier
dans les firmes diversifiées. La mise en commun n’a, souvent, pas les stratégies des unités pour faciliter le partage. On en distingue116 :

113 115
Idem, p. 410. Idem, pp. 416-417.
114 116
Idem, pp. 414-415. Idem, p. 391.
M. Rahou Page 30 sur 41

Page 30
Les interconnexions entre Unités d’Activité Stratégiques de Michael PORTER

grands, lorsque les stratégies des unités concernées sont cohérentes


 Les coûts de coordination : il s’agit des coûts qu’implique la à l’égard du rôle que joue l’activité créatrice de valeur commune.
coordination en termes d’argent, de personnel ou encore de temps.
Ces coûts se diffèrent en fonction du degré de complexité de l’activité Cette cohérence n’exige que peu de sacrifice, ou même aucun de la
partagée et du partage proprement dit. Souvent considérés comme part des unités concernées, si leurs orientations stratégiques sont
élevés par les petites unités, les coûts de coordination sont perçus coordonnées. De même, ces coûts sont souvent moindres lorsqu’une
différemment par les diverses unités117. activité est conçue pour être mise en commun que lorsqu’elle est
partagée après coup. Les coûts de compromis nécessaires pour
 Les coûts de compromis : ils concernent les coûts nécessaires exploiter une interconnexion seront des préoccupations bien réelles
pour que la mise en commun soit conduite de façon optimale pour que les unités mettront en avant quand une mise en commun sera
chacune des unités concernées, autrement dit, pour que l’activité discutée118.
créatrice de valeur soit mise en commun d’une manière à ce qu’elle
satisfera les besoins de toutes les unités concernées par ce partage.  Les coûts de rigidité : la rigidité selon Porter peut se manifester
par une difficulté potentielle à réagir face à la concurrence ou par
Les coûts de compromis varieront souvent d’une unité de l’entreprise des obstacles à la sortie du domaine d’activité ; une mise en commun
à l’autre. Il se peut qu’une unité dont le produit est difficile à vendre peut rendre plus difficile une réaction rapide face aux concurrents.
doive consentir un compromis plus grand pour bénéficier d’une force La mise en commun peut aussi élever les obstacles à la sortie puisque
de vente commune, puisqu’il se peut qu’une force de vente commune le désinvestissement d’une unité peut nuire à d’autres unités avec
signifie que les vendeurs accordent moins d’attention au produit de lesquelles elle partage une activité. A la différence des autres, les coûts
chacune des unités et les connaissent moins bien qu’une force de de rigidité ne sont pas immédiats, ils dépondront de la probabilité
vente qui se consacrerait exclusivement au produit d’une unité. Les qu’apparaisse un besoin de réagir ou encore de sortir d’un secteur
coûts de compromis peuvent aussi varier, par ce que les stratégies d’activité119.
des différentes unités donnent à l’activité, créatrice de valeur, mise
en commun un poids différent. Il faut comparer les avantages que procure le partage d’une activité
avec ses coûts de coordination, de compromis et de rigidité en vue de
Les compromis sont quasiment inévitables. Leurs coûts peuvent déterminer l’avantage concurrentiel net de cette mise en commun.
être minimes ou, au contraire, si grands qu’ils annulent l’intérêt de Il faut procéder à une évaluation séparée de l’avantage concurrentiel
la mise en commun. Les coûts de compromis sont beaucoup moins
118
Idem, pp. 398-401.
117 119
Idem, p. 398. Idem, p. 401.
M. Rahou Page 31 sur 41

Page 31
Les interconnexions entre Unités d’Activité Stratégiques de Michael PORTER

tiré d’une interconnexion pour chacune des unités de l’entreprise


concernées. La valeur de l’interconnexion pour la firme est alors la Les interconnexions intangibles
somme des avantages nets des unités concernées120. Ou le transfert de compétences

Quoique les développements accélérés des nouvelles technologies, la


Les interconnexions intangibles passent en fait par le transfert
déréglementation et l’accentuation de la concurrence ont multiplié
de compétences génériques ou de savoir-faire de gestion particulier
les avantages du partage d’activités121, à même de réduire les coûts
d’une unité à l’autre, voire d’une chaine de valeur à une autre, afin
de coordination, de compromis et, dans une moindre mesure, ceux
de permettre à l’unité bénéficiaire de se procurer d’un avantage
de rigidité, les unités peuvent tout de même se montrer hostiles
concurrentiel et de lutter de mieux contre ses concurrents.
face à l’exploitation d’une interconnexion peut être par ce que122 :
Autrement dit, le savoir-faire acquis par l’organisation en matière
 Les coûts nécessaires pour l’exploitation d’une interconnexion d’exploitation d’une unité existante peut très bien être transféré à
peuvent paraitre beaucoup plus évidents que ses avantages une nouvelle unité structurellement semblable en lui permettant
qui peuvent sembler théoriques ou hasardeuses ; d’améliorer la façon dont elle lutte contre ses concurrents.
 La mise en commun d’une activité soulève le plus souvent des
questions d’organisation, de protection du domaine d’activité En effet, les unités qui ne peuvent mettre en commun certaines
et d’autonomie. Les interconnexions ne seront ainsi exploitées activités (partage d’activités) peuvent néanmoins se ressembler à
que s’il existe une stratégie horizontale explicite ; plusieurs égards : type de client, type d’achat du client, type de
 L’avantage concurrentiel net que procure une interconnexion processus de fabrication, type de rapports avec les pouvoirs publics...
sera plus ou moins durable selon les réactions que les concurrents Cela étant, diverses ressemblances structurelles entre unités d’une
feront montrer pour contrer l’avantage concurrentiel suscité entreprise peuvent être à l’origine des interconnexions intangibles123 :
par l’interconnexion. Là-dessus, deux possibilités existent : soit
(i) reproduire l’interconnexion ou (ii) la contrer par d’autres 1. Une stratégie de base identique ;
moyens comme l’augmentation de la part de marché ou 2. Un même type de client (pas forcément les mêmes clients) ;
l’exploitation d’une autre interconnexion. 3. Une configuration identique de la chaine de valeur (comme
les sites dispersés d’extraction et de traitement des minerais) ;
4. Des activités créatrices de valeur importantes identiques (ex :
120
Idem, pp. 401-402. relations avec les pouvoirs publics).
121
BOJIN J. et SCOETTL JM., Op. Cit., p. 311.
122
PORTER M., (1999), Op. Cit., pp. 401-402. 123
Idem, pp. 389 et 418.
M. Rahou Page 32 sur 41

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Les interconnexions entre Unités d’Activité Stratégiques de Michael PORTER

justifier une interconnexion intangible ou de révéler des compétences


Les interconnexions intangibles peuvent s’opérer réciproquement applicables à de nouveaux secteurs d’activité.
de la même manière, c'est-à-dire d’une nouvelle unité vers des unités
existantes. Egalement, ce type d’interconnexions, à savoir le transfert Le savoir-faire existant dans une unité a déjà été payé, son transfert
de compétences, se traduit souvent par le fait qu’une firme utilise la implique toujours un coût, qui devra, alors, rester inférieur au coût
même stratégie de base dans plusieurs de ses unités. Cela ne fait que du développement du savoir-faire en interne dans l’unité bénéficiaire.
refléter les compétences acquises par les cadres dans la mise en œuvre Ces coûts de transfert varient entre125 :
d’une stratégie particulière.
 Le temps passé par une personne qualifiée en charge du transfert
Le transfert d’un savoir-faire général peut intervenir n’importe où du savoir ;
dans la chaine de valeur124 :  Le risque de fuite du savoir à l’extérieur ;
 Les coûts d’adaptation.
 Philip Morris a transféré ses compétences en matière de
commercialisation des biens de consommation conditionnés Les interconnexions intangibles ont une influence sur l’avantage
du secteur des cigarettes aux bières ; concurrentiel lorsque le transfert du savoir-faire permet à l’unité qui
 Emerson Electric a transféré son savoir-faire de conception en bénéficie une réduction de ses coûts ou un renforcement de son
d’usine et de réduction des coûts, lorsque fut acquis le fabricant caractère unique, voire de sa différenciation _qui dépasse les coûts
de tronçonneuses Beaird-Poulant. du transfert_ grâce à des changements de politique ou à une meilleure
compréhension des facteurs qui régissent l’évolution des coûts et la
Effectivement, la chaine de valeur offre un moyen systématique pour différenciation.
rechercher les interconnexions intangibles du moment qu’il est
impossible de dresser une liste complète des principaux types de Porter précise également 3 questions qui priment pour l’avantage
transfert de compétences, puisque les ressemblances structurelles concurrentiel lors de l’identification de ce genre d’interconnexions
possibles entre unités se comptent par milliers. et auxquels il faut répondre simultanément126 :

Une firme peut donc examiner les principales activités créatrices de 1. Jusqu'à quel point les activités créatrices de valeur des
valeur dans ses unités afin de mettre à jour toute ressemblance, unités de l’entreprise sont-elles semblables ?
entre elles ou dans leur configuration, qui serait susceptible de
125
Idem, pp. 418-419.
124 126
Idem. Idem, pp. 418 et 420.
M. Rahou Page 33 sur 41

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Les interconnexions entre Unités d’Activité Stratégiques de Michael PORTER

2. Quelle est l’importance des activités créatrices de valeur 1. Impliquant la diffusion des mêmes compétences, le transfert
concernées dans la lutte contre la concurrence ? de savoir-faire engendre le plus souvent une réticence de la part
3. Quel serait l’impact du savoir-faire éventuellement transféré du personnel de l’unité propriétaire du savoir-faire qui peut
sur l’avantage concurrentiel de l’unité qui en bénéficie ? hésiter à prendre sur son temps et se révéler jaloux ;
2. De sa part, le personnel de l’unité bénéficiaire du transfert peut
C’est pourquoi, le piège le plus fréquent consiste à identifier des se montrer circonspect ou hésitant quant à la valeur du savoir-
interconnexions intangibles illusoires ou sans importance pour faire hérité ;
l’avantage concurrentiel, soit par ce que le savoir-faire transférable127 : 3. Encore, le transfert de compétences demeure un processus
délicat et les dirigeants peuvent avoir du mal à en saisir les
1. N’a pas d’effet sur les activités créatrices de valeur ; avantages lorsqu’ils le comparent aux interconnexions tangibles,
2. Ou qu’il procure des informations déjà connues de la part de du moment que la notion du savoir-faire acquière une dimension
la concurrence. subjective !

Fréquemment, semble-t-il d’après M. Porter, les interconnexions de Certainement, le transfert de compétences doit s’accompagner de
type intangibles sont artificielles ; elles représentent plutôt une mécanismes institutionnels, d’un échange de cadres et d’employés,
rationalisation à postériori de diversifications entreprises pour et être, notamment, soutenu par la volonté des dirigeants.
d’autres motifs… Une exploitation efficace des opérations de transfert
de compétences exige une compréhension des unités de l’entreprise Pour conclure, alors que les interconnexions intangibles sont très
concernées et des secteurs dans lesquels elles luttent. répandues, sous une forme ou une autre, et qu’il est toujours possible
de mettre le doigt sur quelques ressemblances structurelles dans
Le transfert effectif du savoir-faire est en outre aussi important que une activité créatrice de valeur pour n’importe quel couple d’unités
le savoir-faire proprement dit, quel que soit l’intérêt de ce dernier de l’entreprise ou presque129, cette forme d’interconnexion, c'est-à-
pour l’unité bénéficiaire. Pourtant, il y a des facteurs qui rendent les dire le transfert de compétences d’une unité à une autre, est d’après
interconnexions intangibles difficiles à exploiter à moins de mettre Michael Porter, peut-être la plus éphémère et ce sont les partages
en place une configuration structurelle, voire une forme d’organisation d’activités et les interconnexions de concurrence qui ont des liens
favorable128 : les plus forts avec l’avantage concurrentiel, et ce sont les plus faciles
à mettre en œuvre.

127
Idem, p. 421.
128 129
Idem, pp. 420-421. Idem, p. 419.
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Les interconnexions entre Unités d’Activité Stratégiques de Michael PORTER

Le rôle des interconnexions intangibles quoique potentiellement


important, est souvent incertain dans la création d’un avantage
concurrentiel et truffé d’embuches. Il n’est donc pas étonnant que
de nombreuses firmes aient éprouvé beaucoup de difficultés à en
tirer profit dans la pratique130.

130
Idem, p. 390.
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Les interconnexions entre Unités d’Activité Stratégiques de Michael PORTER

Conclusion

Avec le chapitre qu’il a consacré aux interconnexions entre unités


de l’entreprise au niveau de "L’avantage concurrentiel", Michael l’analyse stratégique mais qui mérite d’être complétée par d’autres
Porter avait pour objectif d’exposer la logique stratégique des concepts notamment par ce qu’elle ne prend pas en compte les
interconnexions dont l’exploitation est susceptible de produire un synergies entre segments.
avantage concurrentiel via un accroissement de la différenciation des
unités bénéficiaires ou une réduction de leurs coûts qui dépasse Pour Porter, des interconnexions d’importance stratégique existent
ceux que l’interconnexion implique, et à condition que les concurrents depuis longtemps dans un grand nombre de firmes diversifiées. Mais
aient du mal à en faire autant. on n’a guère cherché à les identifier et exploiter de façon systématique.
Pour en tirer parti, il faut beaucoup plus qu’une simple perception
La question d’exploitation des interconnexions se qualifie comme de leur existence. De multiples obstacles tenant à l’organisation
étant centrale lorsqu’on cherche à décrire la stratégie globale d’un s’opposent à leur exploitation, et ils sont difficiles à surmonter même
organisme diversifié, c'est-à-dire une entreprise ayant entré dans un quand les avantages stratégiques sont clairs131.
nouveau domaine d’activité par l’ajout d’un nouveau métier
correspondant à une chaine de valeur spécifique. Conformément, le groupe doit mettre en place des mécanismes
horizontaux en vue de favoriser les interconnexions : forte culture
Alors que jadis, l’analyse de portefeuille était l’instrument de conduite d’entreprise, énoncé clair de la mission qui intègre les stratégies des
de la stratégie d’un groupe diversifié, Michael Porter a tracé les SBU, système inventif pour récompenser les résultats positifs…132
pivots d’un management stratégique suivant les liaisons entre unités
d’activité. Sur le plan pratique, il s’agit d’abord d’identifier les interconnexions
existantes et d’évaluer leur importance pour l’avantage concurrentiel.
Là-dessus, M. Porter a mis en relief les deux notions du partage Il devient alors possible de concevoir une stratégie horizontale
d’activité et transfert de compétences comme d’autres grilles qui coordonnée visant à exploiter et renforcer les interconnexions les plus
insistent davantage sur les relations entre les SBU, à la différence 131
Idem, p. 383.
de la gestion de portefeuille qui représente, certes, une étape dans 132
BOJIN J. et SCOETTL JM., Op. Cit., p. 311.
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importantes. C’est en procédant de la sorte qu’une stratégie de


diversification peut accroître l’avantage concurrentiel dans les secteurs Comme cité auparavant, les enjeux offerts par une concrétisation
déjà investis ou créer un avantage durable dans de nouveaux secteurs. appropriée des interconnexions tournent autour de l’élaboration
Il faut toutefois rester prudent dans la recherche des interconnexions. d’une stratégie horizontale avec les unités existantes et d’une stratégie
Il ne faut ni les négliger, ni s’imaginer que la moindre ressemblance de diversification pour entrer dans de nouveaux secteurs.
superficielle, dans la technologie ou encore dans les procédures, est
une interconnexion potentielle133. En fait, les enjeux d’exploitation des interconnexions entre unités
d’activité stratégiques ouvrent des perspectives de recherches, à
Figure n°6 : Clés conceptuelles de la recherche l’exemple de :

 La première perspective propose de vérifier en quoi est-ce qu’une


exploitation pertinente des interconnexions amène à consolider le
sens de fidélité et d’employabilité du personnel de la firme, via
l’instauration d’une perception transversale et le renforcement de la
communication interne ?? Rappelant à ce stade que les ressources
humaines sont à la base de la pérennité et de la performance d’une
organisation…, voire à la base d’un avantage concurrentiel durable.

Figure n°7 : Enjeux d’exploitation des interconnexions entre SBU

Source : Conception de l’auteur


Source : Conception de l’auteur

133
FLEURY H., (1998/1999), Op. Cit, pp. 8-9.  La deuxième perspective offerte jaillit du fait que :
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Les interconnexions entre Unités d’Activité Stratégiques de Michael PORTER

1. D’une part, l’importance des interconnexions fait naître le


besoin d’une nouvelle forme d’organisation ; une organisation
horizontale basée sur une vision transversale ;
2. D’autre part, la concrétisation des interconnexions ne peut
être obtenue à moins de dénouer la réticence et le manque
d’enthousiasme susceptibles d’être exprimés par le personnel
des unités devant le partage d’une activité ou le transfert de
compétences.

Du coup, la problématique qui se dégage consiste à examiner en


quoi la décision de mettre en commun une activité ou de transférer
un savoir-faire constitue une situation favorable pour enclencher un
changement organisationnel ?? Si oui, quel processus de conduite
du changement à adopter pour garantir la réussite du projet des
interconnexions ??

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Les interconnexions entre Unités d’Activité Stratégiques de Michael PORTER

Bibliographie

Bibliographie primaire

 BOJIN J. et SCOETTL J-M., (2005), Les outils de la stratégie, Editions http://www.amazon.fr/Strat%C3%A9gie-lentreprise-Pourquoi-


d’Organisation comment-entreprise/dp/2100051539

 DURAND R., (2005), Strategor, Dunod, 4ème Edition @ « First mover, Définitions marketing : Le glossaire illustré du
marketing »
 FRERY F. et al., (2005), Stratégique, Pearson Education http://www.definitions-marketing.com/Definition-First-mover

 PORTER M., (1999), L’avantage concurrentiel : Comment @ FLEURY H., (1998/1999), « L’avantage concurrentiel : Comment
devancer ses concurrents et maintenir son avance, Edition Dunod devancer ses concurrents et maintenir son avance – Résumé de
l’édition traduite de l’américain par Philippe de Lavergne »
Bibliographie secondaire http://lverdon.free.fr/resumes/avantage.doc

@ BARON-GAY. MESSIER. et SIMARD., (2005), « La segmentation @ GODELIER E., (2006), « Modèles et pratiques de la stratégie
stratégique » d’entreprise »
http://managementworld.a.m.f.unblog.fr/files/2008/06/segmentati http://asity.fr/images/stories/ressources/godelier_modeles-
onstrat.ppt strategiques-d-entreprise_2006.pdf,

@ BOISSEAU C., (2003/2004), « Marketing 1 : Stratégie et politique  KESSAB E., (2010), Cours de « Management stratégique » (prise
générale d’entreprise » de note), ENCG – Oujda
https://ufr-segmi.u-
paris10.fr/servlet/com.univ.collaboratif.utils.LectureFichiergw?ID_F  LECOCQ X. et al., (2009), Stratégie, Pearson Education France
ICHIER=1348818741217&INLINE=FALSE
@ WIKIPEDIA., (2015), « Prise de décision », dernière modification
@ BOUAYAD A., (2000), Stratégie et métier de l'entreprise : Pourquoi effectuée le 15/05/2015 à 11:48
et comment définir le métier de votre entreprise, Edition Dunod https://fr.wikipedia.org/wiki/Prise_de_d%C3%A9cision
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Page 39
Les interconnexions entre Unités d’Activité Stratégiques de Michael PORTER

@ WIKIPEDIA., (2015), « Stratégie », dernière modification effectuée


le 04/04/2015 à 04:56
http://fr.wikipedia.org/wiki/Strat%C3%A9gie

@ YAN H., (2000/2001), « Les fiches de lecture de la Chaire D.S.O –


Michael Porter : L’avantage concurrentiel »
http://mip-
ms.cnam.fr/servlet/com.univ.collaboratif.utils.LectureFichiergw?ID_
FICHIER=1295877017838

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Pour d’autres documents de synthèses, rendez-vous sur :

https://www.calameo.com/accounts/5712692


mary.dphn@hotmail.com

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