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Procédure pénale : Introduction générale

Définition et objectifs poursuivis


Rappel
Le droit pénal matériel concerne les règles de fond et vise donc les principes, les infractions et les
peines. Il est contenu dans le Code Pénal de 1867 mais également dans les lois complémentaires telles
que les lois relatives à la protection de la jeunesse et les lois sur l’internement. On peut également le
trouver dans les lois particulières telles que la loi sur les stupéfiant.
En ce qui concerne le droit pénal formel, il concerne le droit de la procédure pénale et vise tout ce qui
touche à l’organisation judiciaire, aux compétences des cours et tribunaux, à la procédure devant les
cours et tribunaux avec, notamment, l’information, l’instruction, le jugement et le recours. Ce droit est
contenu dans la Constitution, les traités internationaux, le Code d’instruction criminelle de 1808, dans
la loi de 1878 consacrant le Titre préliminaire du Code de procédure pénale mais également dans des
lois complémentaires telles que la loi sur la fonction de police ou la loi sur la détention préventive.
On retrouve également le droit de l’exécution des peines qui est une branche émergente du droit pénal.

La définition de ‘procédure pénale’


La procédure pénale concerne l’ensemble des règles relatives à la recherche des infractions, de leurs
auteurs et au jugement de ceux-ci. Elle doit permettre une application effective du droit pénal dans le
respect des droits humains. C’est un droit d’application direct dont les règles permettent de mettre en
œuvre le droit pénal. En effet, la procédure pénale permet de répondre aux questions suivantes :
o Qui peut poursuivre ?
o Comment poursuivre ? et donc quelles sont règles relatives à l’information, l’instruction, le
jugement et l’exécution des peines.
o Qui peut être poursuivi, pour quelles raisons, à quelles conditions ?
o Devant quelle juridiction ? et donc comment sont l’organisation judiciaire, la compétence et le
fonctionnement des juridictions.
o Quelles garanties procédurales ?
o Quelles voies de recours ?
La procédure pénale est très médiatisée et il est très rare de passer une journée
sans qu’on en parle sur dans les médias. En ce moment, on en parle énormément
dans l’affaire Nethys dans le cadre du transfert de Stéphane Moreau à la prison
de Marche-en-Famenne. On en parle également dans de nombreuses séries telles
que ‘The Twelve’ mais il faut toutefois faire attention aux fausses idées que
celles-ci véhiculent puisque, la plupart des séries étant américaines, elles se
basent sur la Common Law dont la procédure pénale est très différente de la
nôtre. Il reste même prudent de se méfier des séries françaises qui ne reflètent
pas non plus avec exactitude notre système et il faut donc rester très critique sur
ces séries.
Les objectifs
La procédure pénale repose sur 2 grands impératifs en tension que sont :
o Une application effective de la loi pénale et une recherche de la vérité judiciaire : la société
doit se donner les moyens de lutter efficacement contre la criminalité et faire en sorte que les
auteurs d’infractions soient recherchés, découverts, poursuivis et jugés avec rapidité et
certitude.
o Une garantie des droits fondamentaux du justiciable que sont : la présomption d’innocence, le
secret professionnel, l’inviolabilité du domicile, la liberté individuelle, le respect de la vie
privée, le droit au procès équitable, …
L’objectif de la procédure pénale réside donc dans la recherche d’un équilibre entre ces 2 impératifs :
cet objectif est difficile à atteindre mais il est indispensable au fonctionnement de l’État démocratique.

Les sources formelles de la procédure et le processus de réforme


Les sources du droit de la procédure
La Constitution
La Constitution contient certaines règles relatives à l’exercice des droits et libertés individuelles ainsi
qu’à la compétence et à l’organisation judiciaire. Ces garanties s’appliquent de telles sortes que le
droit de la procédure pénale figure comme une concrétisation du droit constitutionnel.
Les traités internationaux
Parmi les traités internationaux, on retrouve notamment la Convention européenne des droits de
l’Homme et des libertés fondamentales qui joue un rôle de plus en plus considérable dans la procédure
pénale et ce, notamment parce que bon nombre de ses dispositions ont des effets directs dans l’ordre
juridique interne. De plus, la jurisprudence de la Cour EDH de Strasbourg est de plus en plus
significative pour la jurisprudence de nos tribunaux mais aussi sur notre processus législatif :
beaucoup de loi ayant vu le jour à la suite de décision prise par cette Cour.
Outre cette Convention, on note d’autres sources telles que :
o Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui prévoit notamment le droit au
silence.
o Le Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne qui est contraignante pour tous les
États membres de l’Union.
o La Convention relative aux droits de l’enfant qui consacre notamment le droit de l’enfant
d’être entendu dans toute procédure l’intéressant, soit directement, soit par l’intermédiaire
d’un représentant ou d’un organisme approprié.
Il existe encore bien d’autre traités sources du droit de la procédure.
Le Code d’instruction criminelle de 1808
La procédure pénale est principalement régie par le Code d’instruction criminelle promulgué par
Napoléon même si ce code a subi certaines modifications. Toutefois, aucune refonte globale ni même
radicale n’a été faite sur celui-ci, ce qui n’est cependant pas faute d’être profondément nécessaire. En
effet, on peut seulement remarquer que le Code d’instruction criminelle a été complétés par de
nombreuses lois complémentaires notamment en ce qui concerne les circonstances atténuantes, les
extraditions ou encore la détention préventive, la fonction de police, la responsabilité des Ministres, …
En effet, la seule réforme réellement important qu’ait subi le Code est celle ayant abouti à l’écriture du
Titre préliminaire du Code de procédure pénale en 1878. Ce Titre sera par la suite quelque peu modifié
avec la Loi Franchimont en 1998.
Le Code judiciaire
Selon l’article 2 du Code judiciaire, ‘les règles énoncées dans le présent code s'appliquent à toutes les
procédures, sauf lorsqu'elles celles-ci sont régies par des dispositions légales non expressément
abrogées ou par des principes de droit dont l'application n'est pas compatible avec celle des
dispositions dudit code’. On peut donc voir que le Code judiciaire prévoit le droit commun de la
procédure pénale et ne peut être appliqué qu’en l’absence de dérogations ou de règles spécifiques de
procédure pénale.

Les réformes de la procédure


Outre les sources déjà citées, la procédure pénale se fonde également sur le Titre préliminaire du Code
de procédure pénale. Ce Titre nait dans le cadre du projet de réforme Nypels en 1850 mais la naissance
de celui-ci n’arrête pas la soif de réformer le droit de la procédure et d’autres projets voient le jour
notamment avec le projet Bekeart en 1962. Cependant, la véritable réforme commence à voir le jour
avec l’affaire Marc et Corinne en 1992 mais surtout avec l’affaire Dutroux
qui provoque un choc et relève de nombreux disfonctionnements au sein
des forces de police : celles-ci avaient effectivement effectué une première
perquisition sans jamais trouver Julie et Melissa qui étaient pourtant dans
la cave de la maison de Marc Dutroux et Michelle Martin. Ces histoires
vont alors donner naissance, dès 1998, à l’accord Octopus soutenu par plus
de 8 partis. À ce state, aucun Code de procédure n’est encore créé mais le
Petit Franchimont permettra toutefois d’améliorer la procédure pénale en
ce qui concerne l’information et l’instruction. Un autre projet de réforme
appelé Grand Franchimont verra le jour en 2002 mais il finira caduc
puisque les discussions à la Chambre ne se sont pas terminées avant la fin de la législature. Il est
important de noter que l’affaire Dutroux choque encore aujourd’hui et on a d’ailleurs pu voir que
lorsque Michelle Martin a été libérée sous condition en 2012, un réforme a vu le jour afin de rendre les
conditions de la libération conditionnelle beaucoup plus dures et sévères.
Une autre tentative de réforme a vu le jour sous la 53e législature avec un accord de gouvernement en
2011. Au cours de cet accord, l’Université de Gand avait été chargée d’effectuer une étude sur les
problèmes rencontrés dans le cadre de l’actuelle procédure pénale et elle avait alors proposé de
supprimer l’instruction et le juge d’instruction. Toutefois, cela va plus loin puisque sous la précédente
législature, le Ministre de la Justice Koen Geens avait proposé une réforme entière impliquant la
naissance d’un code : cela serait, semble-t-il, beaucoup plus simple et inciterait à moins recourir aux
peines de prison. Ce code ne verra malheureusement pas le jour. Notons encore qu’au sein de la
Vivaldi cette volonté d’adopter un Code persiste toujours et c’est d’ailleurs dans ce cadre que la
commission qui avait été mise en place par Koen Geens a été reformée. Actuellement, les propositions
de loi sont devant la Chambre. Beaucoup de mercuriales1 ont également vu le jour au sujet de cette
réforme : elles concernent notamment la population carcérale dans les prisons belges.
De nombreux articles de doctrine ont également vu le jour : l’un des plus important est celui de Marie-
Aude Beernaert, ‘Le nouveau Code de procédure pénale en projet : quelques lignes de force’. Cet
article avance quelles sont les principales lignes directives du projet de Code de procédure pénale qui

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Séances au cours desquelles le Procureur général s’exprime sur l’actualité judiciaire, politique ou sociale lors
de la rentrée judiciaire.
devrait tenir compte des enseignements de la Cour EDH et instaurer une protection renforcée des
droits de la défense au cours de la phase de jugement. Ainsi, dans un premier temps, le Code poserait
un seul et même type d’enquête préliminaire aux poursuites : l’enquête sera faite par le Ministère
public et contrôlée par le juge de l’enquête. Cela permettra d’éviter des recours sur la
constitutionnalité de notre modèle actuel et ce, d’autant plus qu’il n’existe aucun critère objectif
permettant de savoir quand une affaire doit faire l’objet d’une instruction ou d’une information. Ce
changement permettra également au juge de se donner l’autorisation à lui-même mais également au
Ministère de rendre un réquisitoire sur une enquête qu’il n’a pas suivie. De plus, les justiciables
pourront orienter l’enquête ce qui permettra au suspect de voir ses droits renforcés puisqu’il pourra
désormais consulter le dossier sans désaccord après 6 mois et demander l’accomplissement de devoirs
complémentaires et de contrôle sur la longueur de l’enquête au même titre que la victime : cela
permettra de demander la fin des poursuites publiques si le dossier est toujours en cours au bout de 5
ans. De même, les parties changent de nom au cours de cette étape et on ne parlera donc plus que de
suspect et de personne lésée. En ce qui concerne la fin de l’enquête, le Ministère décide de
l’opportunité des poursuites mais une procédure accélérée et également prévue.
On peut également voir qu’au sein de cet article, Marie-Aude Beernaert parle de la suppression de la
partie civile : l’État disposerait du monopole des poursuites mais la victime pourrait toutefois se
joindre afin de demander une indemnisation de son dommage. Cette réforme vise à supprimer les
plaintes nuisant inutilement au bon fonctionnement de la justice même si la personne lésée garde la
possibilité de porter un recours contre une décision de classement sans suite. En ce qui concerne la
détention préventive, elle sera maintenant décidée par une autorité juridictionnelle et le mandat d’arrêt
ne pourra être délivré que s’il est d’une nécessité absolue pour la sécurité publique, qu’il y a des
indices sérieux de culpabilité relatifs à un fait punissable d’une peine d’emprisonnement correctionnel
principal d’un an ou plus, qu’il y a un danger de récidive, de soustraction à l’action de la justice, de
disparition des preuves ou de collusion avec des tiers et que des mesures alternatives ne pourraient
suffire à contrer ces risques. La mandat ne sera valable que 5 jours et au bout de ce délai, il devra
repasser tous les mois devant le juge pour voir s’il y a lieu ou non de continuer la détention.
Concernant l’appel, rien ne semble changer si ce n’est que le délai d’appel est ramené à 15 jours et à
10 jours pour les appels subséquents. Les preuves irrégulières seront d’offices rejetées à moins que
leur irrégularité ne soit pas le fruit d’une méconnaissance consciente ou inexcusable du droit ou de la
valeur protégée, que le degré d’atteinte au droit ou à la valeur protégée est de moindre importance par
rapport au poids de l’intérêt public à la poursuite de l’infraction en question et à la sanction de son
auteur ou que l’utilisation de la preuve irrégulière ne porte pas atteinte à l’intégrité de la justice.

L’application de la procédure dans le temps et dans l’espace


L’application dans le temps
En ce qui concerne l’application des lois de procédure pénale dans le temps, l’article 3 du Code
judiciaire prévoit que ‘sauf exceptions prévues par la loi et sous réserve du respect des droits de la
défense, les lois d’organisation judiciaire, de compétence et de procédure pénale sont d’application
directe’. Cela ne permet toutefois pas de dessaisir les juridictions qui ont été valablement saisie : la loi
nouvelle ne s’applique donc que pour des actes de procédure postérieurs à son entrée en vigueur.
Ainsi, dans le cadre de la Loi de mai 2020 affirmant la compétence du tribunal de police pour les
infractions COVID-19 même si elles avaient été commises avant l’entrée en vigueur de la loi, le
tribunal correctionnel, jusqu’alors compétent, ne pouvait pas être dessaisi étant donné qu’il avait était
valablement saisi. On notera également que, contrairement aux lois pénales, les lois de procédure
pénale peuvent être abrogées par désuétude.
De même, ces lois s’appliquent aux infractions commises avant leur entrée en vigueur et pour
lesquelles aucun jugement définitif n’a été rendu ou qui ne sont pas prescrites.

L’application dans l’espace


Les infractions commises sur le territoire national
Les juridictions belges sont compétentes pour connaitre des infractions commises en Belgique et ce,
sur base de l’article 3 du Code pénal qui prévoit que toutes les infractions commises sur le territoire du
royaumes sont punies conformément aux lois belges. On entend par territoire du Royaume tant
l’espace terrestre situé à l’intérieur des frontières que le plateau continental, la mer territoriale et
l’espace aérien. Il arrive toutefois que, dans certains cas, des infractions commises sur le territoire
belge échappent aux juridictions belges en raison de la qualité de l’auteur des faits ou du lieu
particulier où elles ont été commises.
De même, selon la théorie de l’ubiquité, les juridictions belges sont compétentes pour juger des
infractions qui sont commises partiellement sur le territoire belge : il suffit alors qu’un seul élément
constitutif de l’infraction ait été commis en Belgique.
Les infractions commises en-dehors du territoire national
Suivant le principe de souveraineté, les cours et tribunaux belges ne sont pas compétents pour
connaitre des cas exclusivement commis à l’étranger même si, conformément à l’article 4 du Code
pénal, ‘l'infraction commise hors du territoire du royaume, par des Belges ou par des étrangers, n'est
punie, en Belgique, que dans les cas déterminés par la loi’. Les poursuites sont alors intentées dans
les conditions énumérées aux articles 6 à 14 du Titre préliminaire du Code de procédure pénale : les
poursuites sont ainsi facultatives et reposent sur 4 critères. Ces critères sont les suivants :
o La compétence réelle qui permet la compétence du juge belge lorsque les intérêts primordiaux
de l’État sont menacés.
o Le principe de la personnalité active qui reprend comme critère de compétence des tribunaux
la nationalité de l’auteur de l’infraction : c’est le corollaire du principe de non-extradition des
nationaux.
o Le principe de la personnalité passive qui permet aux juridictions d’être compétences du fait
de la nationalité belge de la victime : cela permet d’identifier les intérêts particuliers des
nationaux victimes aux intérêts nationaux de l’État. Dans pareil cas, l’article 10 du Titre
préliminaire prévoit que pour être poursuivi, l’étranger devra être trouvé sur le territoire belge
ou si le fait qui a été commis est punissable, en Belgique, d’une peine d’au moins 5 ans de
privation de liberté. Les juridictions sont également compétentes pour juger les infractions
graves au droit international humanitaire contre un ressortissant belge ou contre un réfugié
reconnu en Belgique et y ayant sa résidence habituelle.
o La compétence universelle qui permet au juge de connaitre une infraction indépendamment du
fait de savoir le lieu où elle a été commise et la nationalité de l’auteur et de la victime. Cette
compétence est obligatoire puisqu’elle repose sur le principe de solidarité entre États dans la
lutte contre la criminalité portant atteinte à l’ordre international, au respect des obligations
internationales : elle résulte du principe ‘aut dedere, aut judicare’. On note également que les
juridictions belges ont une compétence universelle autonome dont la portée est plus large que
le seul droit international mais celle-ci n’est limitée qu’à certaines infractions.
Les phases et les acteurs du procès pénal
Les phases du procès pénal et son vocabulaire
Pour comprendre quel est le nom des parties à chaque stade du procès pénal et quelles sont les
institutions mobilisées au cours de celles-ci, voici un tableau récapitulatif :

Droit pénal Définition des incriminations : Réglementation des peines Droit de l’exécution
-→ infractions qui seront et mesures pouvant être des peines et
recherchées par parquet infligées par juges du fond mesures

Droit de la Phase préliminaire - phase Phase de jugement, Phase d’exécution


procédure d’enquête (presentencing) décisionnelle de la décision (post-
pénale (sentencing) sentencing)

Information Instruction Première Recours Exécution de la peine


instance / mesure prononcée

Parquet Juges et Juridictions de jugement Multiples


juridictions
(Aide police) « Juges du fond » (Parquet,
d’instruction
administration
(Aide police) pénitentiaire,
chambres de
l’application des
peines et chambres
de protection sociale
des TAP,
commissions de
probation, …)

« Suspect » « Inculpé » ‘Prévenu’ ou ‘Accusé’ « Condamné »


« Interné »

Il convient également de garder en tête que la procédure pénale n’est pas linéaire et qu’il est donc
possible d’être en prison mais également sous mandat d’arrêt dans le cadre d’une autre affaire.

Les acteurs du procès pénal


La police
Les fonctions de police
Les services de police exercent 2 grandes missions que sont des
missions de police judiciaire et des missions de police administrative.
Alors que la fonction de police administrative consiste à maintenir
l’ordre public sous l’autorité du bourgmestre, la fonction de police
judiciaire consiste en la recherche d’infraction sous l’autorité du
Ministère public et du juge d’instruction. Toutefois, si la distinction
entre les 2 fonctions est très nette en théorie, elle est beaucoup plus
étanche en pratique puisque dans le cadre d’une mission de maintien de l’ordre, un officier de police
pourrait très bien devoir constater des infractions. Ainsi, les missions de police judiciaire consistent à :
o Enregistrer les plaintes des victimes des infractions
o Constater les infractions
o Recueillir des informations de tiers ou de témoins en ce qui concerne l’existence d’infractions
o Découvrir l’infraction suite à des recherches effectuées d’initiative. Dans un tel cas, le
fonctionnaire qui découvre l’infraction doit informer le procureur du Roi de l’existence d’un
crime ou d’un délit en rédigeant un procès-verbal conformément à l’article 29 du Code
d’instruction criminelle. En ce qui concerne les infractions peu graves, celles-ci peuvent faire
l’objet d’une procès-verbal simplifié. De même, certains contentieux peuvent être réglés de
façon autonome et ne passeront donc pas devant le Parquet : c’est notamment le cas du
traitement policier autonome (TPA) ou encore de l’enquête policière d’office (EPO).
En ce qui concerne la rédaction des PV, ceux-ci ont des numéros de notice permettant de savoir quels
sont les faits visés et quand se sont-ils déroulés. Ainsi, le numéro de notice commence par ‘Initial’ ou
‘Subséquent’ suivi des initiales du lieu de l’infraction (BR = Bruxelles, MO = Mons, …). Après le lieu
de l’infraction, on retrouve un nombre faisant référence au type de fait (11 = vol avec violence, 37 =
mœurs, …). On retrouve également la zone de police qui a agi ainsi qu’un numéro, l’année et la date
de l’infraction.
On remarque également que, dans les services de police, certains fonctionnaires reçoivent la qualité
d’officier de police judiciaire (OPJ) ce qui leur permet d’accomplir certains actes judiciaires. Les
autres fonctionnaires peuvent également exercer des missions de police judiciaire qui ne sont pas
réservées aux OPJ.
La structure policière
Depuis l’accord Octopus né à la suite de l’affaire Dutroux, les 3 grands services de police qu’étaient la
police communale, la gendarmerie et la police judiciaire près des Parquets ont laissé place à un service
de police structuré en 2 niveaux : un service de police locale et un service de police fédérale. Ces 2
niveaux sont autonomes et dépendent de juridictions distinctes mais ils entretiennent quand même un
certain lien fonctionnel. En ce qui concerne la police locale, elle agit à un niveau communal ou
pluricommunal ne permettant l’établissement que d’un seul corps de police dans cette zone. Ces zones
ont pour mission d’assurer les fonctions de police judiciaire et administratives nécessaires à la gestion
des évènements locaux mais elles peuvent parfois remplir certaines missions fédérales. Ces missions
restent toutefois sous la direction du chef de corps lui-même resté sous l’autorité du bourgmestre ou de
collège de police.
La police fédérale est, quant à elle, composée de directions générales, de directions de coordination et
d’appui déconcentrées compétentes au niveau des arrondissement judiciaire pour les missions de
polices administratives, de directions judiciaires déconcentrées compétentes dans chaque
arrondissement, ainsi que du commissaire général. Ce commissaire reçoit les ordre des Ministres de la
Justice et de l’Intérieur.
On note également qu’on retrouve des agents ayant des compétences spéciales ou restreintes en
matière de police judiciaire. De même, les services de police sont placés sous la surveille des Comités
R et P qui sont, respectivement, le comité de contrôle des services de renseignement et le comité de
contrôles des services de police. Ces comités créés en 1991 disposent d’un service d’enquête dont les
membres sont des OPJ.
Le Ministère public
Le Parquet et ses fonctions
Le Ministère public est connu sous plusieurs noms tels que : Ministère
public, Parquet, procureur substitut, avocat général ou encore
magistrature debout. Toutefois, malgré ces différentes appellations, le
Ministère public est toujours la partie poursuivante au procès : elle
intente les poursuites et réclame les peines en tant que représentante
des intérêts de la société. Ainsi, conformément à l’article 138 du Code
judiciaire, le Ministère exerce l’action publique selon les modalités
déterminées par la loi et elle a donc le statut d’OPJ.
Le Ministère a plusieurs missions telles que :
o La recherche d’informations : il doit identifier les auteurs, rassembler les preuves et donc
constituer un dossier à l’aide de la police. Dans ce cadre, le Ministère demande l’accord du
juge et celui-ci donne alors des ordres afin de pouvoir accomplir les devoirs d’enquêtes : ces
ordres sont donnés au travers d’apostilles.
o La poursuite des infractions qui concerne la direction donnée au dossier : le Ministère trace un
réquisitoire et prend des réquisitions.
o L’exécution des peines puisqu’il est chargé de veiller à la bonne exécution des peines
prononcées par les cours et tribunaux.
o L’accueil des victimes qui se fait avec l’aide des maisons de justice.
o La protection de la jeunesse pour les mineurs délinquants et l’aide à la jeunesse pour les
mineurs en danger.
o L’avis qui peut être écrit ou oral et qui est rendu lorsque les affaires dépassent les intérêts des
particuliers.
Notons également qu’outre le fait d’être le représentant des intérêts de société, le Parquet doit rester
objectif et ne doit donc pas porter que les seuls intérêts de la répression. Toutefois, sa position reste
privilégiée à tous les stades du procès puisqu’il se trouve sur une estrade à côté du juge : cela est
d’ailleurs très critiqué étant donné qu’ils arrivent très souvent ensemble.
L’organisation du Parquet
En ce qui concerne l’organisation du Parquet, celui-ci assiste, en principe, chaque juridiction
répressive et il y a donc une hiérarchie entre ses membres :
o Le Parquet auprès de la Cour de Cassation est composé du procureur général et d’avocats
généraux : il n’exerce pas l’action publique sauf lorsqu’il intente une action dont le jugement
est attribué à la Cour de Cassation.
o Le Parquet fédéral est composé d’un procureur général assisté de magistrat fédéraux et exerce
l’action publique devant les différentes juridictions pénales.
Outre tout ce que nous pouvons voir ci-dessus, le Parquet dispose également d’un Collège des
procureurs composés des 5 procureurs généraux des ressorts de cours d’appel. Ceux-ci sont chargés de
la coordination de l’action des 5 Parquets généraux, du parquet fédéral et des parquets d’instance : ils
adoptent des circulaires dites COL et instituent des réseaux d’expertise, tout ça sous l’autorité du
Ministre de la Justice.
Il existe également un collège des procureurs du Roi qui regroupe les 14 procureurs du Roi des
arrondissements judiciaires. Ceux-ci rendent un avis au collège des procureurs généraux sur
l’harmonisation et l’application uniforme des dispositions ainsi que sur toute question en rapport avec
les missions du Ministère.
Le statut du Ministère
Le statut du Ministère est très compliqué parce qu’en plus d’être associé à l’autorité gouvernementale,
il est associé à l’administration de la justice. Toutefois, on peut tirer 4 grand principes sur lesquels
reposent ce statut :
o L’unité : le Ministère est un corps hiérarchisé dont chaque membre exerce une autorité sur les
membres placés au-dessous de lui. Cette subordination n’empêche cependant pas que chaque
membre du Parquet puisse exprimer oralement ses opinions lors de l’audience et ce, même si
celles-ci sont différentes de actes écrits qui lui ont été soumis. Ce principe est consacré par
l’adage : ‘La plume est serve mais la parole est libre’.
o L’indivisibilité : le magistrat du Ministère n’agit pas en son nom mais bien en celui de la
société et du Parquet. Sa personne se confond donc avec la personne morale du Parquet et les
membres du Ministère peuvent donc se suppléer et se succéder dans une même affaire, ce qui
n’est pas possible pour le juge.
o L’irrécusabilité : le membre du Ministère ne peut pas être récusé puisqu’en tant que partie
principale au procès, il n’est pas permis de récuser un adversaire.
o L’indépendance : le Ministère possède une indépendance totale vis-à-vis des cours et
tribunaux et les juridictions répressives ne peuvent donc pas adresser des injonctions au
Ministère ni même censurer son action. Le Ministère a également une indépendance relative
par rapport au pouvoir exécutif puisque, bien que celui-ci bénéficie de l’opportunité des
poursuites, le Ministre de la Justice peut l’obliger à exercer des poursuites dans une cause
déterminée : c’est le droit d’injonction positive.
Notons encore que le droit d’injonction positive s’inscrit dans le cadre de la politique criminelle qui
concerne l’ensemble des mesures ayant pour objet de réprimer les infractions, sanctionner leurs
auteurs et assister les victimes : ces mesures pouvant être législatives, judiciaire et administratives.
Outre ce droit d’injonction positive, d’autres règles régissent l’opportunité des poursuites : c’est
notamment le cas des COL et des directives de politiques criminelles. Les COL sont plus nombreuses
que les directives mais ne sont pas toujours rendues publiques.
Le juge d’instruction et les juridictions d’instruction
Le juge d’instruction est un juge du Tribunal de première instance désigné par arrêté pour un terme
d’un an renouvelable. Il n’a pas la qualité d’OPJ mais il peut poser tous les actes relevant de la police
judiciaire étant donné qu’il exerce des fonctions juridictionnelles et d’investigation. Il doit être
indépendant et impartial et, n’étant pas partie à l’action, il a donc pour seule mission de chercher les
éléments de preuves à charge et à décharge. Il peut également décider de la nécessité d’utiliser la
contrainte ou de porter atteinte aux droits individuels.
En ce qui concerne les juridictions d’instruction, on ne trouve que la Chambre du conseil (CC) en
première instance et la Chambres des mises en accusation (CMA) en degré d’appel. La Chambre du
conseil est une chambre du Tribunal correctionnel composée d’un juge unique siégeant à huis clos et
assisté par un greffier et un membre du Ministère ainsi que du juge d’instruction. Elle a pour rôle
contrôler la détention préventive et de régler la procédure au moment de la clôture de l’instruction. La
Chambre des mises en accusation est, quant à elle, une chambre de la Cour d’appel composée d’un
juge président et 2 juges conseillers siégeant, en principe, à huis clos et assistés par un greffier et un
membre du Ministère. Elle a pour rôle de recevoir les appels concernant les ordonnances rendues par
le juge d’instruction, les ordonnances de la Chambre du conseil en matière de détention préventive et
de règlement de procédure et elle contrôle la régularité de la procédure et le bon déroulement de
l’instruction. Elle est également la seule compétente pour décider de renvoyer une affaire devant la
Cour d’assises.

Les avocats
Les avocats sont regroupés en barreaux, au nombre de 12 que sont :
o Le barreau de Bruxelles o Le barreau de Dinant
o Le barreau du Brabant Wallon o Le barreau de Charleroi
o Le barreau d’Eupen o Le barreau de Tournai
o Le barreau de Verviers o Le barreau du Luxembourg
o Le barreau de Namur o Le barreau de Huy
o Le barreau de Mons o Le barreau de Liège
Chaque barreau possède un bâtonnier et un vice-bâtonnier ainsi qu’un conseil de l’ordre, un conseil de
discipline et un bureau d’aide juridique. Les bureaux d’aides juridiques permettent de trouver des
avocats pro deo, aussi appelés avocats commis d’office en France.

Le SPF (Service Public Fédéral) Justice


Le SPF justice est dirigé par le Ministre de la Justice qui est chargé de la mise en place de la politique
criminelle et de la politique pénitentiaire. Il est composé de 3 grandes directions générales chargées
respectivement de la législation, des libertés et des droits fondamentaux ; de l’organisation judiciaire ;
des établissement pénitentiaires.
On peut également y retrouver l’Institut Nationale de Criminalistique et de Criminologie (INCC) dont
la direction opérationnelle criminalistique est chargée d’identifier et d’analyser les traces de suspects
ainsi que le modus operandi qui permettront d’aider à trouver les auteurs des crimes et d’établir la
charge de la preuve. Il comporte également une direction opérationnelle de criminologie chargée
d’examiner le fonctionnement du système pénal et la manière dont il peut être amélioré.
La maison de justice
Les maisons de Justice sont au nombre de 13 en Fédération Wallonie-Bruxelles et sont composées
d’assistants de justice chargés de nombreuses compétences sociales en matière de justice. Ainsi, en
matière pénale, les assistants de justice exercent des missions d’aide à la décisions mais également des
missions de suivi des décisions judiciaires et d’assistance aux victimes.

Les principes directeurs


o La procédure accusatoire et la procédure inquisitoire : la procédure accusatoire est une
procédure publique, orale et contradictoire permettant de garantir les droits de la défense mais
pouvant toutefois nuire au bon déroulement de l’enquête pénale et à la présomption
d’innocence. La procédure inquisitoire se fait, quant à elle, dans le secret, de manière écrite et
unilatérale. Elle permet un bon déroulement de l’enquête pénale et la présomption d’innocence
mais elle peut toutefois nuire aux droits de la défense.
Face à de tels problèmes, la Belgique a alors opté pour un régime mixte où la phase
préliminaire du procès pénale est plutôt inquisitoriale alors que la phase de jugement est plus
proche du type accusatoire. Toutefois, la phase de jugement n’est pas aussi accusatoire que
dans les pays de Common Law puisqu’ici nous devons confirmer la vérité et que le procès
n’est pas entièrement refait à l’audience sauf lorsque l’on est jugé devant la Cour d’assises.

o Le procès équitable : le droit à un procès équitable est prévu par l’article 6 de la CEDH et
consacre le droit à toute personne accusée d’une infraction en matière pénale à ce que sa cause
soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal
indépendant et impartial établi par la loi. Le respect de cette règle de droit s’apprécie de
manière globale mais une fois qu’il est porté atteinte à cette garantie, la cause est irrecevable
dans le cadre de l’action publique.

o L’impartialité, l’indépendance et la séparation des fonctions de justice répressive : le


principe d’indépendance et d’impartialité du juge constitue une garantie essentielle du procès
équitable et est prévue à l’article 6.1 de la CEDH. En ce qui concerne l’indépendance des
autorités judiciaires, celle-ci est né du principe de séparation des pouvoirs et a pour objectif de
prémunir le juge des pressions extérieures. Pour être certaine de l’indépendance des juges, la
Cour EDH analyse notamment le mode de désignations des magistrats ainsi que la durée de
leur mandat.
En ce qui concerne l’impartialité des magistrats, celle-ci est présumée jusqu’à preuve contraire
et est garantie par le Code judiciaire qui interdit notamment : le cumul des fonctions
judiciaires, les incompatibilités, les causes de récusation, le dessaisissement pour cause de
suspicion légitime, l’interdiction d’être juge et partie dans une même cause, …
Il convient toutefois de distinguer l’impartialité objective de l’impartialité subjective. En effet,
l’impartialité objective consiste à vérifier si, par ses aspects ou ses fonctions, le juge peut être
légitimement consacré comme impartial. L’impartialité subjective exige du juge qu’il aborde
l’affaire pénale qui lui est soumise sans aucun préjugé.
Pour ce qui est de la séparation des fonctions de justices répressives, celle-ci vise à éviter les
abus de droit et donc à confier à des organes différents les fonctions de poursuites,
d’instruction et de jugement. Ainsi, il est totalement interdit d’empiéter sur les attributions des
autres.
o La présomption d’innocence : le droit à la présomption d’innocence prévoit que ‘toute
personne accusée d’une infraction est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été
légalement établie’. Ainsi, celle-ci est considéré comme méconnue si une décision concernant
un prévenu reflète le sentiment qu’il est coupable alors que sa culpabilité n’a pas encore été
établie.

o Le droit au silence est justement lié à ce principe de présomption d’innocence reconnus, tout
2, dans l’article 6 de la CEDH. Ainsi, toute personne accusée d’une infraction pénale a droit à
ne pas être forcée de témoigner contre elle-même ou de s’avouer coupable et la personne
soupçonnée est donc libre ou non de répondre aux questions et ne peut être auditionnée sous
serment dans sa propre cause.

o Le respect des droits de la défense n’est pas clairement exprimé dans le droit belge mais il
est cependant unanimement reconnu dans notre système juridique. Une fois que l’un des droits
de la défense est violé, cela peut mener à l’irrecevabilité des poursuites, l’écartement de
l’élément obtenu en violation de ces droits et de tous les éléments obtenus ensuite. S’il a été
remédié à cette violation, celle-ci est sans incidence.

o La publicité des débats devant les juridictions de jugement : le huis clos ne peut être
prononcé qu’à titre exceptionnel puisque la presse et le public doivent pouvoir contrôler les
débats afin d’empêcher les dérives. Toutefois, un projet de loi est un cours afin d’inverser la
tendance et de faire du huis clos la règle : cela a d’ailleurs fait énormément de bruit dans le
cadre de l’affaire Julie Van Espen où un huis clos a été prononcé.

o Le délai raisonnable : tout le monde a le droit à ce que sa cause soit entendue dans un délai
raisonnable, ce délai prenant cours au moment où l’intéressé est accusé du chef d’infraction.
Son appréciation se base sur des éléments concrets et propres à la cause, cette appréciation
étant la mission des juridictions de fond.

o La motivation des décisions judiciaires et le droit à un double degré de juridiction : en


principe, toute décision juridictionnelle prise par un juge doit être motivé. Cela impose donc
de se livrer à un examen des moyens, des arguments et des offres de preuves des parties. De
même tout le monde doit avoir la possibilité d’exercer un recours contre une décision rendue
en première instance même si cela ne semble pas être toujours possible en Belgique.

o Le droit à la liberté individuelle est consacré à l’article 5 de la CEDH et limite la possibilité


de priver une personne de sa liberté. L’atteinte à celle-ci n’est possible que dans les cas prévus
par la loi, à certaines conditions énumérées de manière limitative.

o Le droit au respect de la vie privée et familiale : ce droit donne notamment droit à la


protection du domicile et de la correspondance et est mis en place par les articles 22, 15 et 29
de la Constitution ainsi que par l’article 8 de la CEDH. Ce droit n’est toutefois pas absolu et
certaines ingérences sont possibles pour autant qu’elles soient prévues par la loi (principe de
légalité) et qu’elles constituent une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire
(principe de proportionnalité) aux buts poursuivis (principe de finalité).

o Le droit à l’égalité de traitement et à la non-discrimination : ce droit est contenu aux


articles 10 et 11 de la Constitution et se trouve très souvent appliqué dans le cadre du droit de
la procédure pénale et ce, sous l’impulsion de la Cour constitutionnelle.

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