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Rabat, le 18 juin 2018

Fiche a/s

des apports de la loi n°73-17 abrogeant et remplaçant le livre V de la loi n° 15-95 formant
code de commerce relatif au traitement des difficultés de l'entreprise

La présente fiche a pour objet de mettre en exergue les apports de la nouvelle loi 73.13
abrogeant et remplaçant le livre V de la loi 15.95 formant code de commerce relatif au
traitement des difficultés de l'entreprise  applicable à compter de la date de sa publication
au bulletin officiel (23 avril 2018) et qui constitue le nouveau cadre juridique régissant les
procédures collectives.

Cet amendement juridique a pour objectif d’instaurer les fondements de la bonne


gouvernance dans la gestion et la détection précoce des difficultés de l'entreprise, avant
l’intervention de la justice qui aboutit généralement à la liquidation judiciaire.

La nouvelle loi  a également pour objectif de mettre en place de nouvelles procédures de


prévention pour les entreprises en difficulté, le renforcement de la procédure de
redressement judiciaire, le rééquilibrage des pouvoirs entre le chef d'entreprise en
difficulté et ses créanciers et l'augmentation de l'efficacité de la procédure de la
liquidation judiciaire.

Principaux apports de la loi 73.13 relative au traitement des difficultés de l'entreprise

Les principales dispositions de la loi 73.17 susvisée peuvent être résumées comme suit :

Mise en place des règles de prévention interne et externes:

En vue de maintenir l’activité de l’entreprise en difficulté en évitant au maximum d’aller


vers le redressement ou la liquidation judiciaire. La loi prévoit des règles de prévention
interne pour les entreprises en difficulté permettant la réalisation d’un diagnostic précoce
des difficultés entravant l'activité de l'entreprise et d'œuvrer à les résoudre dans leurs
premières étapes.

A cet effet, l’article 547 de la loi dispose que « le commissaire aux comptes, s'il en existe,
ou tout associé dans la société informe le chef de l' entreprise des faits de nature à
compromettre la continuité de l' exploitation notamment les faits de nature juridique
économiques financières et sociales, et ce, dans un délai de 8 jours de la découverte des
faits et par lettre recommandée avec accusé de réception, l'invitant à redresser la
situation. Faute d' exécution par le chef d' entreprise dans un délai de 15 jours de la
réception ou s'il n'arrive pas personnellement ou après délibération du conseil
d' administration ou du conseil de surveillance, selon le cas, à un résultat positif, il est
tenu de faire délibérer la prochaine assemblée générale pour statuer, sur rapport du
commissaire aux comptes, à ce sujet.

Ainsi, en vertu des dispositions de l’article 547 lorsque l'assemblée générale ne délibère
pas à ce sujet, ou s'il a été constaté que malgré les décisions prises par cette assemblée, la

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continuité de l'exploitation demeure compromise, le président du tribunal en est informé
par le commissaire aux comptes ou par le chef d'entreprise ou tout associé.

Ainsi, à défaut de résolution des difficultés de l’entreprise à travers la prévention interne,


la loi prévoit dans l’article 549 et suivants des procédures de prévention externes de ces
difficultés notamment la désignation d’un mandataire spécial par le président du
tribunal de commerce chargé de résoudre les difficultés de nature à compromettre la
continuité de l' exploitation s'il apparaît que lesdites difficultés sont susceptibles d'être
aplanies grâce à l'intervention d'un tiers à même de réduire les oppositions éventuelles des
partenaires habituels de l'entreprise ou entre associés. Le président du tribunal assigne au
mandataire spécial une mission et un délai pour l’accomplir.

L’article 551 de la loi prévoit également une procédure de conciliation permettant de


trouver un accord entre le représentant de l'entreprise  en difficulté et
ses principaux créanciers. La négociation de cet accord est confiée à un conciliateur
désigné par le président du tribunal de commerce.

Notons à cet égard que les procédures précitées sont déclenchées avant que l’entreprise
soit en état de cessation de paiement.

Mise en place d’une procédure de sauvegarde:

La loi a mis en place une nouvelle procédure dite de «sauvegarde» qui vise à surmonter les
difficultés auxquelles est confrontée l’entreprise, afin d’assurer la continuité de ses
activités et un diagnostic précoce des contraintes. Cette procédure est volontaire
et ne peut être déclenchée que par les sociétés qui ne sont pas en état de cessation de
paiement.

La demande doit être déposée par le dirigeant auprès du greffe du tribunal de commerce
accompagnée d’un plan de sauvetage. Ladite demande doit préciser les problèmes
auxquels se heurte la structure ainsi que tous les documents qui l’attestent. Le chef
d’entreprise doit également joindre à sa demande son plan de sauvegarde. Durant la
période de la procédure, le chef d’entreprise continue à gérer l’entreprise et reste soumis
au contrôle du syndic concernant l’exécution de son plan de sauvetage.

La procédure de sauvegarde est ouverte pour une durée maximum de 5 ans. Ainsi, la loi
confère au tribunal la prérogative de constater la non-exécution par l’entreprise de ses
engagements et de résilier le plan de sauvetage ainsi que de recourir à la procédure de
redressement ou de liquidation judiciaire.

Le syndic

La nouvelle loi pose dans l’alinéa 5 de l’article 673 de nouvelles conditions pour l’exercice
du métier de syndic et qui seront détaillées par la suite par un texte réglementaire qui
déterminera également les modalités de sa rémunération.

Ainsi, en sus du contrôle de l’exécution du plan de sauvegarde, le syndic est chargé de la


gestion des opérations de redressement et de liquidation judiciaire à compter de la date
du jugement ordonnant l’ouverture de l’une des procédures précitées jusqu’à la date de
clôture desdites procédures.

Le syndic est chargé également de l’exécution du plan de continuation ou de cession de


l’entreprise….etc.

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Fixation des règles relatives au redressement judiciaire

La procédure de redressement judiciaire est ouverte à l’encontre de toute entreprise en


état de cessation de paiement (art 575). Celle-ci est déclenchée à la demande du chef de
l’entreprise au plus tard dans les 30 jours qui suivent la cessation de ses paiements
(art 576).Ladite procédure peut également être ouverte sur l'assignation d'un créancier
quelle que soit la nature de sa créance (art 578). Le tribunal peut aussi se saisir d'office ou
sur requête du ministère public. En vertu de l’article 580 de la loi, la procédure peut être
ouverte à l'encontre d'un associé dans une société en nom collectif, dans le délai d'un an à
partir de sa retraite lorsque l'état de cessation des paiements de la société est antérieur à
cette retraite.

Les articles 579 et 580 de la loi 73.17 susvisée prévoient la possibilité d’ouverture de cette
procédure à l’encontre de tout commerçant ayant cessé son activité ou décédé, lorsque la
cessation de paiement est antérieure à ces faits.

Le redressement judiciaire est prononcé s'il apparaît que la situation de l'entreprise n'est
pas irrémédiablement compromise. A défaut, la liquidation judiciaire est prononcée (art
583).

Le jugement d'ouverture de la procédure prend effet à partir de sa date. Il est mentionné


sans délai au registre du commerce local et au registre du commerce central.

Dans les huit jours de la date du jugement, un avis de la décision est publié dans un
journal d'annonces légales et au Bulletin officiel. Il invite les créanciers à déclarer leurs
créances au syndic désigné. Cet avis est affiché par les soins du greffier au panneau
réservé à cet effet au tribunal. Dans le même délai de huit jours, le jugement est notifié à
l'entreprise par les soins du greffier.

Le syndic, avec le concours du chef de l'entreprise et l'assistance éventuelle d'un ou


plusieurs experts, doit dresser dans un rapport le bilan financier, économique et social de
l'entreprise. Au vu de ce bilan, le syndic propose soit un plan de redressement assurant la
continuation de l'entreprise ou sa cession à un tiers, soit la liquidation judiciaire.

Institution d’une assemblée des créanciers

La nouvelle loi susvisée prévoit l’institution d’une assemblée des créanciers à l’ouverture
de la procédure de redressement judiciaire pour toute entreprise tenue à l’obligation de
désignation d’un commissaire aux comptes en vertu des textes législatifs et réglementaires
en vigueur, ou dont le chiffre d’affaires dépasse 25 millions de DH et employant 25 salariés
minimum au cours de l’année précédant l’ouverture de la procédure de redressement
(art 606).

Le tribunal peut instituer une assemblée des créanciers en l’absence des conditions
précitées, sur demande du syndic et en vertu d’un jugement motivé.

L’assemblée précitée est composée du syndic (président de l’assemblée), du chef de


l’entreprise et des créanciers inscrits dans la liste des créances déclarés et acceptés par le
juge commissaire.

Ladite assemblée délibère au sujet :

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 du projet du plan de redressement afin de continuer l’exploitation de l’entreprise
prévu à l’article 595 ;
 du projet du plan de redressement proposé par les créanciers conformément au
paragraphe 3 de l’article 615 ;
 de la modification des modalités et des finalités du plan de redressement afin de
continuer l’exploitation de l’entreprise en application de l’article 629 du code de
commerce ;
 de la demande de remplacement du syndic désigné conformément à l’article 677,
 de la cession d’un ou plusieurs actifs importants de l’entreprise.

Liquidation judiciaire

La procédure de liquidation judiciaire est ouverte d'office par le tribunal ou sur requête
du ministère public ou à la demande du chef d’entreprise ou d’un créancier lorsque la
situation de l'entreprise est irrémédiablement compromise.

Le jugement qui prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit dessaisissement


pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens, même de ceux qu'il a
acquis à quelque titre que ce soit, tant que la liquidation judiciaire n'est pas clôturée.

Les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la
durée de la liquidation judiciaire par le syndic. Toutefois, le débiteur peut exercer les
actions personnelles; il peut se constituer partie civile dans le but d'établir la culpabilité
de l'auteur d'un crime ou d'un délit dont il serait victime; toutefois, les dommages-intérêts
qu'il obtiendra, éventuellement, bénéficieront à la procédure ouverte.

En vertu des dispositions de l’article 654 Les ventes d'immeubles ont lieu suivant les
formes prescrites en matière de saisie immobilière. Toutefois, le juge-commissaire fixe,
après avoir recueilli les observations des contrôleurs, le chef de l'entreprise et le syndic
entendus ou dûment appelés, la mise à prix et les conditions essentielles de la vente et
détermine les modalités de la publicité.

Le syndic règle l'ordre entre les créanciers et répartit le produit des ventes.

A tout moment, le tribunal peut prononcer, même d'office, et sur rapport du


juge-commissaire, la clôture de la liquidation judiciaire :

- lorsqu'il n'existe plus de passif exigible ou que le syndic dispose des sommes suffisantes
pour désintéresser les créanciers;

- lorsque la poursuite des opérations de liquidation judiciaire est rendue impossible en


raison de l'insuffisance de l'actif.

Le syndic procède à la reddition des comptes.

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Autres dispositions

La loi a prévu d’autres dispositions à savoir :

 l’institution de procédures transfrontalières des difficultés de l’entreprise:


reconnaissance des procédures étrangères; coopération avec les juridictions
étrangères et les représentants étrangers; coordination entre les procédures
nationales et étrangères ;

 Sanctions disciplinaires et pénales et voies de recours;

 Abrogation de l’article 20 du dahir du 12 août 2013 sur la condition civile des


français et des étrangers dans le Protectorat français du Maroc.

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 Dispositions communes aux procédures de redressement et de liquidation
(désignation par le tribunal du juge commissaire, d’un juge commissaire suppléant,
et du syndic qui peut être un parent du chef de l’entreprise jusqu’au 4ème degré,
appel des décisions du juge commissaire dans un délai de 10 jours ; désignation par
le juge commissaire d’un à trois contrôleurs parmi les créanciers pour assister le
syndic dans ses fonctions ; suspension des mesures individuelles et actions en
justice pour le paiement d’une somme d’argent; suspension des mesures
d’exécution et du cours des intérêts légaux et conventionnels ; interdiction de
payer les créances antérieures à l’ouverture ainsi que l’inscription des
hypothèques, gages et privilèges; nullité de tout contrat conclu par le débiteur
après l’ouverture de la procédure; obligation pour le conjoint de présenter un
inventaire de ses biens personnels avec possibilité pour le syndic de demander
l’annexion de ces biens aux actifs de l’entreprise s’il apporte la preuve qu’ils ont
été acquis par le débiteur; fixation de la durée de suspicion, de la date de la
cessation de paiement et de déclaration des créances).

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