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EL02 – Une charogne

Poème 29

A paru dans le 1er recueil de 1857.


Cette pièce n’a pas été condamnée, mais a beaucoup choqué.
Vite devenue célèbre.
Baudelaire accusé de « réalisme grossier » .
Charogne = cadavre en état de décomposition
(sens figuré = personnage qui se rend odieux par ses comportements odieux, par sa déchéance)
Poème n°29, dans l partie « Spleen et idéal »
Thème du poème = Charogne, cadavre, laid, repoussant, comme sujet de la poésie
Thème du memento mori (souviens-toi que tu vas mourir) qui est un thème de la poésie baroque,
beaucoup lue par Baudelaire dans sa jeunesse. (ex Théophile de Viau, début XVIIe , condamné à mort
pour libertinage).
Poésie provocatrice et moderne, renouvellement du memento mori
Alchimie de la boue en or = Transformer la laideur en beauté
La femme évoquée peut être Jeanne Duval. (Comédienne d’origine haïtienne rencontrée en 1842).
Alternance d’alexandrins et d’octosyllabes = référence au distique élégiaque, forme grecque et
latine, qui alterne vers long et vers plus court. L’élégie est une forme poétique définie par cette
alternance de longueur. Progressivement elle prend le sens d’une poésie de la plainte, qui parle du
deuil. Baudelaire choisit cette forme en toute connaissance de cause, ce qui montre sa grande
maîtrise de l’art poétique.
Opposition entre modernité du poème et classicisme de la forme

Problématique : Comment Baudelaire arrive-t-il à extraire la beauté de la laideur ?


Mouvements
1 str 1 à 4 : une promenade paradoxale
2 str 5 à 9 : Une vision onirique
3 str 10 à 12 : apologue

V1v2v3 : « Rappelez-vous » = évocation d’un souvenir, logiquement agréable


, « Mon âme » = apostrophe = interruption du discours pour s’adresser à qqn ou vocatif = s’adresse à
l’être aimé, à la femme, qui sera destinataire d’un message

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(« vous serez semblable à cette ordure »)
V1 « nous vîmes » = le nous du couple amoureux – cf v34 « nous regardait d’un air fâché » : couple
uni
V2v3 : « ce beau matin d’été si doux » = rythme 2 + 4 + 2 = enjambement à l’hémistiche,
rayonnement du soleil
« ce » : adjectif démonstratif = ce jour précis = appel au souvenir commun, complicité
Trois épithètes mélioratives: « beau » , « d’été » , « si doux » (adv d’intensité) => nature belle et
douce en harmonie avec le sentiment amoureux
V3 « au détour d’un sentier » = promenade amoureuse , paysage de carte postale, beauté et
douceur ,
 QQ
 Trouvez un adjectif qui désigne un poème ou une ambiance en rapport avec la campagne,
les bergers et les troupeaux
 RR
 Pastorale , bucolique
V3 « une charogne infâme » = deux hémistiches symétriques, effet de surprise
V1v3 rime « mon âme » / « infâme » = (qui cause la répugnance par sa laideur)
= opposition par la rime entre le beau et le laid
V2v4 « doux » – « caillou » = opposition par la rime
V3 rythme binaire = au détour d’un sentier – une charogne infâme = ++ / --
V4 rythme binaire : sur un lit – semé de cailloux = ++ / -- = jeu de mots sur le lit amoureux , lit de la
rivière

Str2
V5 : « Les jambes en l’air, comme une femme lubrique »
« comme » contre-rejet interne, contre-rejet à l’hémistiche = 5 + 1 / 3 + 3
NB alexandrin régulier = 3 + 3 // 3 + 3
Ex
Je le vis/, je rougis,// je pâlis/ à sa vue/
— Racine, Phèdre, I, 3, v.273
Ex
Mon cœur,/ comme un oiseau,// voltigeait/ tout joyeux
— Baudelaire, Les Fleurs du mal, « Un voyage à Cythère »
>> comparaison de la charogne à une femme
Question : un animal mort peut-il avoir les jambes en l’air
Femme lubrique = Rappelons que le premier titre des Fleurs du Mal était « Les lesbiennes »

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Lubrique = qui a un penchant effréné pour les désirs sexuels
L’érotisme féminin est un motif de provocation chez Baudelaire.
V6v7 adjectifs et participes : brûlante – suant – = comme si le cadavre était vivant = Paradoxe
Nonchalante et cynique = hémistiche entier => elle prend son temps – sens des adjectifs = attitude
physique et morale = lascive, sans pitié, provocante
Rime v5v7 lubrique – cynique = description morale , étonnzant pour un cadavre => le poète fait tout
pour donner vie au cadavre, et donc pour relier le cadavre au personnage de la femme => donc le
cadavre devient une allégorie de la féminité
V7v8 ouvrait son ventre plein d’exhalaisons = image de fécondité , inversée
V8 ouvrait = verbe d’action => le cadavre est décrit comme un personnage qui agit
V8 son ventre = fécondité + les tripes + connotation sexuelle
V8 : Exhalaisons = pourrait être connoté positivement , ici ce n’est pas le cas
Paradoxe = un cadavre ressemble à une femme mue par le désir

3e mouvement , 3e strophe : Tableau harmonieux nature – cadavre


V9 le soleil rayonnait sur cette pourriture = alexandrine régulier , avec un hémistiche qui sépare le
beau et le laid => la nature met en valeur , rehausse la valeur esthétique du cadavre
V9 attention le mot « pourriture » a un sens concret seulement , pas de contresens
V9-v11 rime : pourriture – Nature = association provocante de deux termes , péjoratif et mélioratif
V10 comme afin de la cuire à point = le soleil est un chef cuisinier qui prépare une viande pour la
rendre comestible ! – déplacement de sens --- charogne --→ viande --→ comestible
V11-v12 et de rendre au centuple à la grande Nature
Tout ce qu’ensemble elle avait joint
= signifie que la nature avait fabriqué le corps, l’avait construit et assemblé, et que le soleil accomplit
un travail de séparation et de décomposition pour rendre à la nature des particules de matière ,
matière la plus désagrégée possible =➔ c’est le sens de la vie : tu es poussière et tu retourneras en
poussière = ce tableau est un memento mori = souvenir que tout doit mourir, c’est une vanité au
sens pictural du terme
Cf Vanitas de Philippe de Champaigne – ou – Le Radeau de la Méduse de Géricault
Cf : N’oublie pas que tu vas mourir, film de Xavier Beauvois, avec Chiara Mastroianni
V9-v13 le soleil … et le ciel = symétrie anaphorique des éléments naturels
V9 – v13 : rayonnait > regardait = la nature devient spectatrice
V13 la carcasse superbe = oxymore (adjectif laudatif )
V13 superbe = sens physique ou sens moral ? (la carcasse superbe = 6)=
V14 comme une fleur s’épanouir ( 4 + 4 ) = comparaison laudative et non métaphore => la
comparaison est explicite ce qui ajoute à la provocation – on retrouve le titre du recueil les fleurs du
mal = fabriquer du beau à partir de la boue = alchimie de la boue en or
V15 la puanteur = vocabulaire non poétique => B introduit la boue, l’infecte mais qui est intense

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 Laideur et douleur procurent au poète une intensité romantique
 Car l’âme romantique recherche l’intensité des sentiments et des sensations – cf Faust de
Goethe
V15 que sur l’herbe / v16 vous crûtes vous évanouir = contre rejet qui symbolise la chute de la
femme sur l’herbe
V 15 « vous crûtes » : emploi faussement précieux du passé simple , pour imiter avec ironie la poésie
pétrarquisante
V14 v16 rime antinomique = épanouir / évanouir => le cadavre prend vie et la femme s’éteint
V15 si forte + évanouir = hyperbole => la charogne redevient infâme

4e mouvement = str5 et 6 = un tableau vivant et musical


Str 5 – 6 – 7 = le cadavre s’anime , et devient une scène
Str 8 = c’est désormais un tableau de peintre
Verbes d’action : bourdonnaient , sortaient , coulaient , = verbes de mouvement , ou le mouvement
relève du thème de la vie
Subordination en cascade : cf schéma ci-dessous :
Les mouches bourdonnaient
---- > sur ce ventre putride
----- > d’où sortaient (…) de larves
--- > qui coulaient comme un épais liquide

 Ces effets de cascade symbolisent le long fleuve ininterrompu des larves qui coulent , qui
coulent sans interruption => insistance sur l’aspect ininterrompu => l’impression de
pérennité , de temps long , qui s’oppose à la mort qui est un arrêt brutal de la vie => B donne
vie au tableau

V17 : bouRdonnaient – ventRe – putRide + v18 soRtaient – noiRs + v19 LarRves


= allitération en r => on entend le bourdonnement des mouches , cela ajoute à l’impression de
mouvement et d’agitation

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V 17 « bourdonnaient, v18 « sortaient » , v 19 « coulaient »
= champ lexical du mouvement
 Paradoxe du mouvement de la vie pour évoquer la mort
+ association image et son => effet de synesthésie
V19 : de larves = rejet => ajoute à l’effet repoussant de l’image
+ effet de cascade qui simule le torrent qui coule
V18 bataillons = métaphore militaire , => décrit la violence de la putréfaction
=➔ registre épique = genre littéraire qui célèbre les exploits guerriers d’un héros, dans un style
grandiloquant (ex : La chanson de Roland)
Image + son = synesthésie
Synesthésie = association d’une impression sensorielle éprouvée par un sens à une autre association
d’un autre sens
NB Les synesthésies
Ici : image + odeur + son
V20 haillons = vieux vêtements déchirés et usés
Vivants haillons = hypallage
Hypallage = figure de style qui consiste à associer à un mot un 2e terme qui devrait se rapporter à
autre chose = ici , l’adjectif vivant devrait se rapporter aux mouches ou au corps , mais pas à des
vêtements = une hypallage est anomalie de construction => cette hypallage montre la volonté du
poète de donner vie au tableau

Str6-str7 = multiplication des comparaisons , saturation d’images positives et pastorales


=➔ vision onirique

6e strophe
V20 – v24 = vivants – vivaient = répétition => B donne vie au tableau et au cadavre , et non à la
femme qui l’accompagne
V 20 « de ces vivants haillons » = adjectif anté-posé = hypallage , le cadavre prend vie
V21 « tout cela » = souffle épique
V21 « Tout cela descendait , montait comme une vague »
= métaphore filée du liquide , ici mouvement de la vague qui est un mouvement perpétuel
+ Gradation = descendait – montait – s’élançait – pétillant = mouvement de plus en plus en plus
intense
Pétillant = on retrouve les sensations sonores
V23 on eût dit (= on aurait cru) = parallélisme avec « vous crûtes vous évanouir »
 Parallèle entre la femme qui perd sa force de vie , et le cadavre, qui devient vivant (le
« souffle » est le souffle de la vie )

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 => l’alchimie de la boue en or est une inversion des valeurs
V 23 v 24 : « On eut dit que le corps, enflé d’un souffle vague,
Vivait en se multipliant »
= enjambement qui met en valeur le verve « vivait »
V24 se multipliant = champ lexical de la quantité + renforcé par l’expression « tout cela » (+ v 25 « et
ce monde »)
 Gradation par les sons et par la quantité => non seulement le cadavre prend vie , mais il
devient un monde à part => La charogne devient un microcosme .
+ par la suite dans le 8e strophe , le tableau vivant s’efface , il ne peut être reconstitué que par le
travail du poète .

Conclusion
Le message général est suivant : chère femme , votre beauté est éphémère. Votre corps va s’abîmer
et se décomposer. Et le rôle du poète, grâce à son travail de transformation poétique (alchimie) , sera
de rendre sa vie et son éclat à votre beauté disparue .
Donc Baudelaire s’inscrit dans une tradition poétique , celle de Pétrarque et des poètes de la Pléiade
(cf Ronsard , Mignonne allons voir si la rose) , et celle du memento mori.
Sauf que chez Baudelaire l’inversion est double : la beauté devient laideur (provocation plus
choquante que dans la Pléiade) et la laideur devient beauté , puisque le spectacle de la putréfaction
est élevé au statut d’œuvre d’art. Le travail poétique est celui d’un alchimiste qui transforme l’or en
métal (cf Alchimie de la douleur) et la boue en or .

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EL 02 BIS = Une charogne , Explication des vers 25 à 48

Str 7
V25 et ce monde = on dirait que le poète parle d’une foule bien vivante, alors qu’il parle d’un cadavre
envahi par les mouches => le travail poétique transforme la matière décrite

V25-v27 : rime = musique – rythmique


= B fait appel aux sonorités , il passe progressivement de l’odeur au son ,
Il opère un déplacement d’un sens à un autre
V 26 : comme l’eau courante et le vent = tableau pastoral, d’une nature légère et heureuse ,
comparaison laudative
 Ce n’est plus un tableau de la mort , c’est un tableau de la vie
 => la transsubstantiation est opérée : odeur > son ; mort > vie
V 26-27-27 = allitération vvv = vent , vanneur , van = allitération du vent , du souffle , de la vie
(ce n’est pas un van wolkswagen)

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V 27 : le grain = le grain est ce qui donne la vie
 Le poète , par son travail poétique , est celui qui insuffle la vie à la scène décrite
V 27 : « ou le grain qu’un vanneur » = le vanneur renvoie à la terre , dernier des 4 éléments :
L’air (exhalaisons, v8) ; l’eau (comme un épais liquide , v 19) ; le feu (le soleil rayonnait , v9) ; la terre
(ou le grain qu’un vanneur , v 27)

Str6-str7 = multiplication des comparaisons , saturation d’images positives et pastorales


=➔ vision onirique

Str8 = le rôle de l’artiste = alchimie poétique


Opposition passé – présent :
V 29 : « les formes n’étaient plus qu’un rêve »
= mise en abyme du travail du poète , qui a multiplié les comparaisons pour brouiller les pistes, si
bien qu’on ne sait plus tellement bien qu’est-ce qui est l’image de quoi, et si le poète veut faire du
laid et provoquer , ou bien du beau
V29-30 s’effaçaient, n’étaient plus , / à venir
= jeu sur le temps = est-ce que les images sont en train de disparaître , ou bien en, train d’apparaître
V 31 : oubliée , souvenir = opposition qui fait apparaitre le poète comme celui qui , après l’oubli, fait
renaître le souvenir => donc le poème décrit deux temps : le 1e temps , celui de la destruction, mort,
putréfaction ; le 2E temps , celui du souvenir, où la beauté réapparait
Double comparaison = a – le cadavre ressemble à un tableau – b – le poète ressemble à un peintre
(« l’artiste »

Str 9
V33 derrière les rochers : ns pourrions être au bord de la mer , et entendre le bruit des vagues
V34 nous regardait d’un air fâché = jeu de croisement de regards :
Le couple regarde la charogne , ils sont choqués par ce spectacle inopportun
La chienne est inquiète par la présence inopportune de ces spectateurs
Le thème du regard et du spectateur confirme qu’in s’agit bien d’un tableau , et que le poète est
comparé à un peintre . De plus l’imparfait donne une impression de durée , qui contraste avec le
passé simple « nous vîmes » =➔ nous sommes passés d’un récit d’action , à la description d’un
tableau
Les deux spectateurs sont venus déranger l’ordre naturel du monde , et la cruauté ou le cynisme des
animaux entre eux
Géricault lui aussi dépeint la mort et lafaim sur le radeau de la méduse
La 9e strophe , avec le personnage de la chienne, vient clore le spectacle, avant la morale

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Str 10-11-12 = Morale
Ce poème se présente comme un apologue (court récit dont se dégage une vérité morale) , il délivre
une morale.
V37 et pourtant vos serez semblable à cette ordure
= nouvelle inversion poétique
Phase 1 :le cadavre ressemble à une femme lubrique
Phase 2 : la femme aimée ressemble au cadavre
La 1e comparaison préparait le message de la fin du poème
V 37-38-39-40 = opposition entre deux styles
V 37-38 : style prosaïque
V 39-40 : style lyrique
Cette opposition est dans un ordre inverse à la première moitié du poème .
L’intégralité du poème est à comparer avec le poème de Ronsard , Ode à Cassandre , ou Mignonne
allons voir si la rose ,
Qui date du 16e siecle

Ce motif a été très utilisé par les poètes de la Pléiade (Humanisme du XVIe siècle, Renais-
sance). Ainsi, on peut immédiatement songer à l’intertexte de Ronsard, « Ode à Cassandre » dans
Les Amours, deuxième édition de 1553, dont voici le texte :

Mignonne, allons voir si la rose


Qui ce matin avait déclose
Sa robe de pourpre au soleil
A point perdu cette vêprée
Les plis de sa robe pourprée,
Et son teint au vôtre pareil.

Las ! voyez comme en peu d’espace,


Mignonne, elle a dessus la place
Las, las, ses beautés laissé choir !
O vraiment marâtre Nature,
Puisqu’une telle fleur ne dure
Que du matin jusques au soir !

Donc, si vous me croyez, mignonne,


Tandis que votre âge fleuronne
En sa plus verte nouveauté,
Cueillez, cueillez votre jeunesse :
Comme à cette fleur, la vieillesse
Fera ternir votre beauté.

Donc deux conceptions de la poésie lyrique : a – poésie lyrique traditionnelle , qui respecte la
bienséance ; b – poésie lyrique moderne, qui doit descendre au niveau de la réalité , y compris la
plus sordide

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V 37 Et pourtant vous serez
Cf : « et pourtant elle tourne » (E pur si muove ! ) de Galilée en 1633
« vous serez » = futur de certitude
V37-39 : ordure – nature = rimes antinomiques
V 38 « cette horrible infection » = adj anté-posé + diérèse
V38-40 : infection – passion = rimes antinomiques + diérèse qui accentue le ton lyrique de
l’apostrophe
V 39 « Etoile de mes yeux, soleil de ma nature, »
= gr = ces deux expressions peuvent être deux appositions à « vous » , ou bien vocatif en fonction
d’apostrophe => reprise classique du genre de l’ode à la bien aimée
= voc = métaphore des astres (étoile, soleil) = le poète fait appel au cosmos pour célébrer la femme
V39-40 = éloge hyperbolique de l’être aimé , avec 2 fois un rythme binaire , et 4x le possessif mon -b
mes , mes yeux , ma nature , mon ange , ma passion
V41 = « ô la reine de grâces » + v 45 « Alors , ô ma beauté, »
= interjection ô à valeur vocative + valeur admirative (mais on se demande s’il n’y a pas un peu
d’ironie dans ces expressions laudatives)
Qui contraste avec le vers péjoratif du v37 (vous serez semblable à cette ordure)
 Le message principal est la contraste entre la beauté passée et la putréfaction présente.
 L’ode élogieuse , le panégyrique est une parodie …

Str11
V 42 – 44 « sacrements – « ossements » = stade ultérieur au cadavre = les funérailles – l’enterrement
Il s’agit d’une étape plus solennelle, plus digne , plus poétique .
V44 moisir parmi les ossements = rejet en fin de strophe => stade plus avancé que le cadavre , on
arrive au stade du squelette . D’ailleurs , le motif du crâne est très souvent utilisé en peinture dans
les tableau qu’on appelle les vanités.
Cg Philippe de Champaigne , Vanités
Cf Damien Hirst , For the love of God

V 43 v 44 : sous l‘herbe et les floraisons grasses ,


Moisir parmi les ossements
= alliance du thème de la nature et du thème de la mort ,
=>Mouvement vers les bas : les herbes > sous le sol
=> Les Fleurs du mal sont les fleurs du laid , du bas, du décomposé, de la mort.

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Str12

V45 ô ma beauté = apostrophe + interjection ô


Jeu sur les temps : alors – dites (v45) – qui vous mangera v46 – que j’ai gardé la forme v47
= mélange du passé , du présent , du futur
 Le travail poétique ne consiste pas seulement à transformer la boue en or, la putréfaction en
beauté ; il consiste aussi à vaincre le temps qui passe grâce à la beauté du souvenir
 Donc opposition entre la femme , promise à la déchéance , et le poète qui triomphe du
temps grâce au travail poétique
V45-47 : vermine – divine = rime antinomique , mais dans un sens cette fois inversé , car le cadavre
se transforme en divinité éternelle => C’est l’hommage du poète qui transforme la femme aimée en
divinité éternelle .
 Il y a donc deux étapes a = femme comparée à un cadavre – b = corps en décomposition
transformé en divinité éternelle
V45 (alors ô ma beauté ) dites = impératif
= rappelle l’impératif du v1 « Rappelez-vous »
 Le poète appelle d’abord l’évocation du passé , puis appelle à la fin l’évocation du futur v 37 :
« et pourtant vous serez »

V 46 « qui vous mangera » = futur de certitude


V46 : qui vous mangera de baisers = syllepse = le mot baiser rerésente à la fois l’amour et la mort ,
eros et thanatos
B parvient à faire la synthèse entre l’amour et la mort.
V 46 « vermine » = ensemble des insectes parasites de l’homme = la vermine qui vous mangera de
baisers => ironie d’un topos littéraire détourné

V 47 « Que j’ai gardé la forme » : cf v 29 « les formes s’effaçaient » (…) artiste achève (…) seulement
par le souvenir
= le message principal du poème est la supériorité du poète capable de créer un souvenir immortel.

V47 que j’ai gardé la forme et l’essence divine = j’ai conservé l’apparence , par un travail de peintre,
et l’essence , donc le principe abstrait de la beauté , le principe essentiel , le principe chimique de
l’alchimiste
Essence = sens philosophique = ce qu’une être est = fond de l’être, de nature conceptuelle = principe
essentiel d’un être
Essence = principe essentiel d’une substance chimique
Conclusion
Alchimie de la boue en or = on y est = la charogne transformée en beau souvenir poétique.

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Il y a de la provocation dans ce poème, c’est cet aspect qui a été retenu par le public de l’époque.
Sainte-Beuve reprochait à Baudelaire d’avoir « pétrarquisé sur l’horrible ».
Mais le sujet final est bel et bien la supériorité de l’alchimie poétique.
Baudelaire dans une note (source PLéide, p891 ) : « Toute forme, créée par l’homme, est immortelle.
Car la forme est indépendante de la matière (…) »
Forme : signifie mise en forme , processus d’invention poétique.
Contrairement au poème de Ronsard, la conclusion n’est pas celle de la beauté éphémère et
perdue de la femme , mais la conclusion est celle de la beauté retrouvée grâce au travail
d’alchimiste du poète.

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Romantisme noir :
Les chants de Maldoror, de Lautréamont
Une martyre
Un voyage à Cithère

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TC = Mignonne allons voir si la rose
PC = Le radeau de la Méduse , de Géricault

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