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Poème 29
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(« vous serez semblable à cette ordure »)
V1 « nous vîmes » = le nous du couple amoureux – cf v34 « nous regardait d’un air fâché » : couple
uni
V2v3 : « ce beau matin d’été si doux » = rythme 2 + 4 + 2 = enjambement à l’hémistiche,
rayonnement du soleil
« ce » : adjectif démonstratif = ce jour précis = appel au souvenir commun, complicité
Trois épithètes mélioratives: « beau » , « d’été » , « si doux » (adv d’intensité) => nature belle et
douce en harmonie avec le sentiment amoureux
V3 « au détour d’un sentier » = promenade amoureuse , paysage de carte postale, beauté et
douceur ,
QQ
Trouvez un adjectif qui désigne un poème ou une ambiance en rapport avec la campagne,
les bergers et les troupeaux
RR
Pastorale , bucolique
V3 « une charogne infâme » = deux hémistiches symétriques, effet de surprise
V1v3 rime « mon âme » / « infâme » = (qui cause la répugnance par sa laideur)
= opposition par la rime entre le beau et le laid
V2v4 « doux » – « caillou » = opposition par la rime
V3 rythme binaire = au détour d’un sentier – une charogne infâme = ++ / --
V4 rythme binaire : sur un lit – semé de cailloux = ++ / -- = jeu de mots sur le lit amoureux , lit de la
rivière
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V5 : « Les jambes en l’air, comme une femme lubrique »
« comme » contre-rejet interne, contre-rejet à l’hémistiche = 5 + 1 / 3 + 3
NB alexandrin régulier = 3 + 3 // 3 + 3
Ex
Je le vis/, je rougis,// je pâlis/ à sa vue/
— Racine, Phèdre, I, 3, v.273
Ex
Mon cœur,/ comme un oiseau,// voltigeait/ tout joyeux
— Baudelaire, Les Fleurs du mal, « Un voyage à Cythère »
>> comparaison de la charogne à une femme
Question : un animal mort peut-il avoir les jambes en l’air
Femme lubrique = Rappelons que le premier titre des Fleurs du Mal était « Les lesbiennes »
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Lubrique = qui a un penchant effréné pour les désirs sexuels
L’érotisme féminin est un motif de provocation chez Baudelaire.
V6v7 adjectifs et participes : brûlante – suant – = comme si le cadavre était vivant = Paradoxe
Nonchalante et cynique = hémistiche entier => elle prend son temps – sens des adjectifs = attitude
physique et morale = lascive, sans pitié, provocante
Rime v5v7 lubrique – cynique = description morale , étonnzant pour un cadavre => le poète fait tout
pour donner vie au cadavre, et donc pour relier le cadavre au personnage de la femme => donc le
cadavre devient une allégorie de la féminité
V7v8 ouvrait son ventre plein d’exhalaisons = image de fécondité , inversée
V8 ouvrait = verbe d’action => le cadavre est décrit comme un personnage qui agit
V8 son ventre = fécondité + les tripes + connotation sexuelle
V8 : Exhalaisons = pourrait être connoté positivement , ici ce n’est pas le cas
Paradoxe = un cadavre ressemble à une femme mue par le désir
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Laideur et douleur procurent au poète une intensité romantique
Car l’âme romantique recherche l’intensité des sentiments et des sensations – cf Faust de
Goethe
V15 que sur l’herbe / v16 vous crûtes vous évanouir = contre rejet qui symbolise la chute de la
femme sur l’herbe
V 15 « vous crûtes » : emploi faussement précieux du passé simple , pour imiter avec ironie la poésie
pétrarquisante
V14 v16 rime antinomique = épanouir / évanouir => le cadavre prend vie et la femme s’éteint
V15 si forte + évanouir = hyperbole => la charogne redevient infâme
Ces effets de cascade symbolisent le long fleuve ininterrompu des larves qui coulent , qui
coulent sans interruption => insistance sur l’aspect ininterrompu => l’impression de
pérennité , de temps long , qui s’oppose à la mort qui est un arrêt brutal de la vie => B donne
vie au tableau
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V 17 « bourdonnaient, v18 « sortaient » , v 19 « coulaient »
= champ lexical du mouvement
Paradoxe du mouvement de la vie pour évoquer la mort
+ association image et son => effet de synesthésie
V19 : de larves = rejet => ajoute à l’effet repoussant de l’image
+ effet de cascade qui simule le torrent qui coule
V18 bataillons = métaphore militaire , => décrit la violence de la putréfaction
=➔ registre épique = genre littéraire qui célèbre les exploits guerriers d’un héros, dans un style
grandiloquant (ex : La chanson de Roland)
Image + son = synesthésie
Synesthésie = association d’une impression sensorielle éprouvée par un sens à une autre association
d’un autre sens
NB Les synesthésies
Ici : image + odeur + son
V20 haillons = vieux vêtements déchirés et usés
Vivants haillons = hypallage
Hypallage = figure de style qui consiste à associer à un mot un 2e terme qui devrait se rapporter à
autre chose = ici , l’adjectif vivant devrait se rapporter aux mouches ou au corps , mais pas à des
vêtements = une hypallage est anomalie de construction => cette hypallage montre la volonté du
poète de donner vie au tableau
6e strophe
V20 – v24 = vivants – vivaient = répétition => B donne vie au tableau et au cadavre , et non à la
femme qui l’accompagne
V 20 « de ces vivants haillons » = adjectif anté-posé = hypallage , le cadavre prend vie
V21 « tout cela » = souffle épique
V21 « Tout cela descendait , montait comme une vague »
= métaphore filée du liquide , ici mouvement de la vague qui est un mouvement perpétuel
+ Gradation = descendait – montait – s’élançait – pétillant = mouvement de plus en plus en plus
intense
Pétillant = on retrouve les sensations sonores
V23 on eût dit (= on aurait cru) = parallélisme avec « vous crûtes vous évanouir »
Parallèle entre la femme qui perd sa force de vie , et le cadavre, qui devient vivant (le
« souffle » est le souffle de la vie )
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=> l’alchimie de la boue en or est une inversion des valeurs
V 23 v 24 : « On eut dit que le corps, enflé d’un souffle vague,
Vivait en se multipliant »
= enjambement qui met en valeur le verve « vivait »
V24 se multipliant = champ lexical de la quantité + renforcé par l’expression « tout cela » (+ v 25 « et
ce monde »)
Gradation par les sons et par la quantité => non seulement le cadavre prend vie , mais il
devient un monde à part => La charogne devient un microcosme .
+ par la suite dans le 8e strophe , le tableau vivant s’efface , il ne peut être reconstitué que par le
travail du poète .
Conclusion
Le message général est suivant : chère femme , votre beauté est éphémère. Votre corps va s’abîmer
et se décomposer. Et le rôle du poète, grâce à son travail de transformation poétique (alchimie) , sera
de rendre sa vie et son éclat à votre beauté disparue .
Donc Baudelaire s’inscrit dans une tradition poétique , celle de Pétrarque et des poètes de la Pléiade
(cf Ronsard , Mignonne allons voir si la rose) , et celle du memento mori.
Sauf que chez Baudelaire l’inversion est double : la beauté devient laideur (provocation plus
choquante que dans la Pléiade) et la laideur devient beauté , puisque le spectacle de la putréfaction
est élevé au statut d’œuvre d’art. Le travail poétique est celui d’un alchimiste qui transforme l’or en
métal (cf Alchimie de la douleur) et la boue en or .
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EL 02 BIS = Une charogne , Explication des vers 25 à 48
Str 7
V25 et ce monde = on dirait que le poète parle d’une foule bien vivante, alors qu’il parle d’un cadavre
envahi par les mouches => le travail poétique transforme la matière décrite
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V 27 : le grain = le grain est ce qui donne la vie
Le poète , par son travail poétique , est celui qui insuffle la vie à la scène décrite
V 27 : « ou le grain qu’un vanneur » = le vanneur renvoie à la terre , dernier des 4 éléments :
L’air (exhalaisons, v8) ; l’eau (comme un épais liquide , v 19) ; le feu (le soleil rayonnait , v9) ; la terre
(ou le grain qu’un vanneur , v 27)
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V33 derrière les rochers : ns pourrions être au bord de la mer , et entendre le bruit des vagues
V34 nous regardait d’un air fâché = jeu de croisement de regards :
Le couple regarde la charogne , ils sont choqués par ce spectacle inopportun
La chienne est inquiète par la présence inopportune de ces spectateurs
Le thème du regard et du spectateur confirme qu’in s’agit bien d’un tableau , et que le poète est
comparé à un peintre . De plus l’imparfait donne une impression de durée , qui contraste avec le
passé simple « nous vîmes » =➔ nous sommes passés d’un récit d’action , à la description d’un
tableau
Les deux spectateurs sont venus déranger l’ordre naturel du monde , et la cruauté ou le cynisme des
animaux entre eux
Géricault lui aussi dépeint la mort et lafaim sur le radeau de la méduse
La 9e strophe , avec le personnage de la chienne, vient clore le spectacle, avant la morale
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Str 10-11-12 = Morale
Ce poème se présente comme un apologue (court récit dont se dégage une vérité morale) , il délivre
une morale.
V37 et pourtant vos serez semblable à cette ordure
= nouvelle inversion poétique
Phase 1 :le cadavre ressemble à une femme lubrique
Phase 2 : la femme aimée ressemble au cadavre
La 1e comparaison préparait le message de la fin du poème
V 37-38-39-40 = opposition entre deux styles
V 37-38 : style prosaïque
V 39-40 : style lyrique
Cette opposition est dans un ordre inverse à la première moitié du poème .
L’intégralité du poème est à comparer avec le poème de Ronsard , Ode à Cassandre , ou Mignonne
allons voir si la rose ,
Qui date du 16e siecle
Ce motif a été très utilisé par les poètes de la Pléiade (Humanisme du XVIe siècle, Renais-
sance). Ainsi, on peut immédiatement songer à l’intertexte de Ronsard, « Ode à Cassandre » dans
Les Amours, deuxième édition de 1553, dont voici le texte :
Donc deux conceptions de la poésie lyrique : a – poésie lyrique traditionnelle , qui respecte la
bienséance ; b – poésie lyrique moderne, qui doit descendre au niveau de la réalité , y compris la
plus sordide
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V 37 Et pourtant vous serez
Cf : « et pourtant elle tourne » (E pur si muove ! ) de Galilée en 1633
« vous serez » = futur de certitude
V37-39 : ordure – nature = rimes antinomiques
V 38 « cette horrible infection » = adj anté-posé + diérèse
V38-40 : infection – passion = rimes antinomiques + diérèse qui accentue le ton lyrique de
l’apostrophe
V 39 « Etoile de mes yeux, soleil de ma nature, »
= gr = ces deux expressions peuvent être deux appositions à « vous » , ou bien vocatif en fonction
d’apostrophe => reprise classique du genre de l’ode à la bien aimée
= voc = métaphore des astres (étoile, soleil) = le poète fait appel au cosmos pour célébrer la femme
V39-40 = éloge hyperbolique de l’être aimé , avec 2 fois un rythme binaire , et 4x le possessif mon -b
mes , mes yeux , ma nature , mon ange , ma passion
V41 = « ô la reine de grâces » + v 45 « Alors , ô ma beauté, »
= interjection ô à valeur vocative + valeur admirative (mais on se demande s’il n’y a pas un peu
d’ironie dans ces expressions laudatives)
Qui contraste avec le vers péjoratif du v37 (vous serez semblable à cette ordure)
Le message principal est la contraste entre la beauté passée et la putréfaction présente.
L’ode élogieuse , le panégyrique est une parodie …
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V 42 – 44 « sacrements – « ossements » = stade ultérieur au cadavre = les funérailles – l’enterrement
Il s’agit d’une étape plus solennelle, plus digne , plus poétique .
V44 moisir parmi les ossements = rejet en fin de strophe => stade plus avancé que le cadavre , on
arrive au stade du squelette . D’ailleurs , le motif du crâne est très souvent utilisé en peinture dans
les tableau qu’on appelle les vanités.
Cg Philippe de Champaigne , Vanités
Cf Damien Hirst , For the love of God
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V 47 « Que j’ai gardé la forme » : cf v 29 « les formes s’effaçaient » (…) artiste achève (…) seulement
par le souvenir
= le message principal du poème est la supériorité du poète capable de créer un souvenir immortel.
V47 que j’ai gardé la forme et l’essence divine = j’ai conservé l’apparence , par un travail de peintre,
et l’essence , donc le principe abstrait de la beauté , le principe essentiel , le principe chimique de
l’alchimiste
Essence = sens philosophique = ce qu’une être est = fond de l’être, de nature conceptuelle = principe
essentiel d’un être
Essence = principe essentiel d’une substance chimique
Conclusion
Alchimie de la boue en or = on y est = la charogne transformée en beau souvenir poétique.
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Il y a de la provocation dans ce poème, c’est cet aspect qui a été retenu par le public de l’époque.
Sainte-Beuve reprochait à Baudelaire d’avoir « pétrarquisé sur l’horrible ».
Mais le sujet final est bel et bien la supériorité de l’alchimie poétique.
Baudelaire dans une note (source PLéide, p891 ) : « Toute forme, créée par l’homme, est immortelle.
Car la forme est indépendante de la matière (…) »
Forme : signifie mise en forme , processus d’invention poétique.
Contrairement au poème de Ronsard, la conclusion n’est pas celle de la beauté éphémère et
perdue de la femme , mais la conclusion est celle de la beauté retrouvée grâce au travail
d’alchimiste du poète.
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Romantisme noir :
Les chants de Maldoror, de Lautréamont
Une martyre
Un voyage à Cithère
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TC = Mignonne allons voir si la rose
PC = Le radeau de la Méduse , de Géricault
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