TI Prognostic Health Management42136210-Mt9570

Réf.
: MT9570 V1
PHM – Prognostics and health

Date de publication : management - De la surveillance au
10 avril 2013
pronostic de défaillances de
systèmes complexes
Cet article est issu de : Génie industriel | Maintenance
par Rafael GOURIVEAU, Kamal MEDJAHER,

Emmanuel RAMASSO, Noureddine ZERHOUNI
Résumé Les exigences de performance globale conduisent les industriels à renforcer

leur capacité à anticiper les phénomènes de défaillance, et la mise en œuvre de solutions
de Prognostics and health Management (PHM) prend une part grandissante dans les
activités de maintenance. Cet article vise à présenter l'émergence de cette thématique de
PHM, à décrire les processus sous-jacents – notamment celui du pronostic –, et à
expliciter les bénéfices pouvant en être attendus.
Abstract Global performance requirements lead industrials to strengthen their capability

to anticipate degradation phenomena and failures. Following that, Prognostics and Health
Management (PHM) solutions are increasingly implemented in order to complete
maintenance activities. This paper aims at presenting the emergence of PHM theme, at
describing the underlying process – particularly that one of prognostics –, and at
explaining the benefits that can be expected from.
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PHM – Prognostics and health

management
De la surveillance au pronostic
de défaillances de systèmes complexes
par Rafael GOURIVEAU

Maître de conférences – ENSMM – Institut FEMTO-ST
rafael.gouriveau@femto-st.fr
Kamal MEDJAHER
Parution : avril 2013 - Ce document a ete delivre pour le compte de 7200083552 - universite de liege // alexandre FLAS // 193.190.208.37

kamal.medjaher@femto-st.fr
Emmanuel RAMASSO
emmanuel.ramasso@femto-st.fr
et Noureddine ZERHOUNI
Professeur des Universités – ENSMM – Institut FEMTO-ST
noureddine.zerhouni@femto-st.fr
1. Émergence du pronostic dans l’activité de maintenance............. MT 9 570 - 2

1.1 Nouveaux enjeux et évolutions de la fonction maintenance ................... — 2
1.2 Vers une anticipation des phénomènes de défaillance ............................ — 3
2. Pronostic et estimation de la durée de fonctionnement
avant défaillance (RUL) ........................................................................... — 4
2.1 Quoi ? le pronostic – définition et mesures ............................................... — 4
2.2 Comment ? les approches de pronostic..................................................... — 6
2.3 Mise en œuvre du pronostic ....................................................................... — 8
3. Des données au RUL : architecture CBM et processus PHM ....... — 10
3.1 Processus de détection, diagnostic et pronostic ....................................... — 10
3.2 Architecture CBM et processus PHM ......................................................... — 10
3.3 Données et traitements usuels ................................................................... — 12
4. Exemple d’application............................................................................. — 12
4.1 Description de l’exemple ............................................................................. — 12
4.2 Couche 1 : acquisition des données ........................................................... — 13
4.3 Couche 2 : prétraitement des données ...................................................... — 13
4.4 Couches 3 et 5 : détection d’état et pronostic de défaillance ................... — 15
5. Conclusion.................................................................................................. — 15
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. MT 9 570
es services « FMDS » (fiabilité, maintenabilité, disponibilité, sécurité) sont

L aujourd’hui largement sollicités pour réaliser des études ponctuelles ou
des analyses de fond. De fait, la maintenance industrielle s’avère source et
cible de développements industriels et scientifiques, ce qui se traduit par des
actions ponctuelles de partenariat « industrie-recherche ». De manière plus
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie

est strictement interdite. – © Editions T.I. MT 9 570 – 1
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PHM – PROGNOSTICS AND HEALTH MANAGEMENT _______________________________________________________________________________________
ciblée, au niveau des entreprises, les concepts traditionnels de maintenance

préventive et corrective sont peu à peu complétés par une prise en compte
plus réactive et proactive des phénomènes de défaillance. En effet, les indus-
triels tendent à renforcer leur capacité à anticiper les défaillances afin de
recourir à des actions préventives les plus justes possible dans un objectif de
réduction des coûts et des risques. Aussi, la mise en œuvre de solutions de
Prognostics and Health Management (PHM) prend une part grandissante dans
les activités de maintenance et le processus de pronostic est aujourd’hui
considéré comme un des principaux leviers d’action dans la recherche d’une
performance globale. D’abord, sur le plan environnemental, le pronostic indus-
triel s’inscrit dans une logique de développement durable : il permet
d’augmenter la disponibilité et d’allonger le cycle de vie des systèmes indus-
triels. Ensuite, l’anticipation des défaillances d’éléments critiques permet de
prévenir les risques industriels et d’assurer la sécurité des personnes et des
biens. Le pronostic permet en outre d’assurer une continuité des services et,
par là même, d’augmenter la qualité de ceux-ci. Enfin, la mise en œuvre de la
maintenance prévisionnelle (fondée sur le pronostic) nécessite une qualifica-
tion et participe à la valorisation du personnel technique de maintenance.
Au-delà de l’écho qu’elle peut rencontrer auprès du monde industriel, cette
thématique de pronostic-PHM devient naturellement un cadre de travaux de
recherche à part entière et tend à être de plus en plus visible au sein de la
communauté scientifique. De nombreux laboratoires s’y intéressent

aujourd’hui, et quatre conférences consacrées à la thématique du PHM sont
programmées chaque année. Cela étant, les solutions de PHM n’en restent pas
moins le fruit de l’évolution des techniques et technologies de maintenance.
Aussi, cet article vise à présenter l’émergence de cette thématique de PHM, à
montrer en quoi elle vient compléter les activités traditionnelles de mainte-
nance, à expliciter les processus sous-jacents, notamment celui du pronostic, à
décrire les bénéfices pouvant être attendus de la mise en œuvre de solutions
de PHM dans l’industrie, et enfin à apporter quelques éléments de réflexion sur
les problèmes majeurs et défis encore d’actualité.
1. Émergence du pronostic plus à la mise en œuvre des moyens permettant d’assurer le

« service des biens ». Des exigences de qualité, de sécurité et de
dans l’activité coût sont apparues, et les enjeux et prérogatives de la fonction
maintenance ont évolué ces vingt dernières années.
de maintenance
1.1.2 Enjeux et prérogatives de la fonction
maintenance
1.1 Nouveaux enjeux et évolutions
de la fonction maintenance Les enjeux de la fonction maintenance peuvent être discutés
selon plusieurs points de vue. D’abord, les équipements industriels
étant de plus en plus complexes, ils exigent une compétence en
1.1.1 Maintenance industrielle maintenance accrue. Ensuite, l’entreprise évolue dans un environ-
nement concurrentiel fort et les préoccupations financières sont
Selon la norme NF EN 13306 (2010), la maintenance peut être très prononcées. La maintenance n’échappe ainsi pas à la règle de
définie comme « l’ensemble de toutes les actions techniques, réduction des coûts. À un autre niveau, depuis quelques années,
administratives et de management durant le cycle de vie d’un les responsables industriels sont face à des contraintes environne-
bien, destinées à le maintenir ou à le rétablir dans un état dans mentales et sociales plus marquées. Il n’est plus suffisant de se
lequel il peut accomplir la fonction requise ». Elle comprend ainsi satisfaire d’une performance technique et économique, mais il
un ensemble d’actions de dépannage, de réparation, de contrôle et devient nécessaire, voire obligatoire, de prendre en compte les
de vérification des équipements matériels, et doit contribuer à « contraintes » environnementales : une usine laisse des déchets,
l’amélioration des processus industriels. Dans la vision tradition- pollue et contribue à l’effet de serre, etc. À cela s’ajoute le respect
nelle, la fonction maintenance permet de garantir les caractéris- de la dignité humaine qui constitue une contrainte sociale. Ces
tiques de sûreté de fonctionnement des matériels, notamment la derniers aspects ont récemment conduit à l’élaboration de textes
disponibilité. Elle vise donc globalement à appréhender les phéno- de loi qui incitent fortement les entreprises à intégrer la notion de
mènes de défaillance et à agir en conséquence, afin d’assurer que développement durable dans leur stratégie [1]. Cela se traduit
le système (le bien) soit à même de remplir la fonction pour concrètement par la recherche d’une triple performance dans
laquelle il a été conçu (maintien en condition opérationnelle, laquelle, certes, le rendement de l’entreprise reste indispensable,
MCO). Mais les missions de la fonction maintenance ne se limitent mais auquel s’ajoutent de nouvelles exigences sur le plan humain,

MT 9 570 − 2 est strictement interdite. − © Editions T.I.
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social et environnemental. Les prérogatives de la fonction mainte- architectures de maintenance sont apparues, la plus récente étant
nance se sont ainsi étendues et elle a dû évoluer en regard des celle de s-maintenance (« s » pour sémantique). Cette dernière
enjeux croissants : englobe le concept de e-maintenance et se fonde sur le principe de
• elle vise à augmenter la disponibilité des équipements tout en partage et de génération de connaissances formalisées en
réduisant les coûts directs d’exploitation (techniques et ontologie [3].
économiques) ; Mais en amont du développement d’architectures de mainte-
• elle doit assurer un fonctionnement sûr des équipements, nance visant à réduire la distance entre acteurs, ce sont les straté-
c’est-à-dire permettre d’éviter les accidents jugés néfastes pour gies de maintenance elles-mêmes qui évoluent. En effet, les
l’environnement (environnemental) ; mainteneurs souhaitent aujourd’hui aller au-delà de la mainte-
nance statique (sans anticipation de l’évolution de l’état des équi-
• elle est garante de conditions de travail satisfaisantes et de la pements), et mettre en œuvre des stratégies de maintenance plus
sécurité des hommes (social). « dynamiques ». La section suivante est consacrée à l’analyse de
cette évolution.
1.1.3 Évolution de la fonction maintenance
Compte tenu des exigences chaque fois plus grandes, les coûts 1.2 Vers une anticipation
de maintenance ont augmenté rapidement au cours des dernières des phénomènes de défaillance
années. À titre d’exemple, on estime que les coûts de maintenance
aux États-Unis étaient de 200 milliards de dollars en 1979, et qu’ils
ont subi une croissance de l’ordre de 10 à 15 % dans les années 1.2.1 Cartographie des formes de maintenance
qui suivirent [2]. Une partie importante de ce coût de maintenance
pourrait pourtant être évitée : une mauvaise planification se traduit Avant les années 1960, le service maintenance d’une entreprise
par du gaspillage en heures supplémentaires, et cela éventuel- avait pour principale mission d’intervenir sur les équipements en
lement sur des équipements qui n’ont pas un grand rôle dans la panne afin de les réparer le plus tôt possible. Ce type de mainte-
continuité de la production. nance, dite « corrective », a ensuite été peu à peu complété par
une approche plus anticipative des phénomènes de défaillance,

Cette augmentation des coûts ne justifie pas à elle seule le c’est-à-dire par une maintenance réalisée avant que la défaillance
besoin de remettre en cause les approches traditionnelles de main- ne se produise. Ces deux grands types de maintenance, corrective
tenance. D’abord, les systèmes de production évoluent en perma- et préventive, présentent certaines variantes exposées ci-après. La
nence et de nouvelles techniques de production sont apparues, figure 1 en donne une articulation globale.
notamment du fait de l’automatisation (les machines pouvant
assurer la production sans intervention humaine). Ensuite, les
entreprises cherchent davantage à adapter rapidement la quantité 1.2.2 Maintenances corrective et préventive
et la qualité de la production en fonction de la variation de la
demande des clients, ce qui nécessite un haut niveau de flexibilité La norme NF EN 13306 (2010) définit la maintenance corrective
des équipements industriels. Par conséquent, même si l’activité de comme une « maintenance exécutée après détection d’une panne
maintenance est aujourd’hui considérée comme une activité à part et destinée à remettre un bien dans un état dans lequel il peut
entière, les entreprises n’hésitent plus à l’externaliser afin de béné- accomplir une fonction requise ». Ce type de maintenance est
ficier des compétences métiers fortes de prestataires de service. généralement adapté pour les équipements pour lesquels :
Cette évolution est en grande partie due au développement des – les conséquences de la panne ne sont pas critiques ;
sciences et technologies de l’information et de la communication – la réparation est facile et ne nécessite pas beaucoup de temps ;
(STIC). À un autre niveau, depuis quelques années, de nouvelles – les coûts d’investissements sont faibles.
Maintenance
oui Occurrence de non

la défaillance ?
Maintenance Maintenance
corrective préventive
oui Caractère non oui Approche non

provisoire ? dynamique ?
Maintenance Maintenance Maintenance Maintenance

palliative curative systématique conditionnelle
Maintenance
prévisionnelle
Figure 1 – Formes de maintenance selon la norme NF EN 13306 (2010)

Deux formes de maintenance corrective peuvent être distin-

guées. Lorsque l’intervention de maintenance a un caractère provi- 2. Pronostic et estimation
soire, on parle de maintenance palliative. Si les travaux sont
définitifs, on parle de maintenance curative.
de la durée
La maintenance préventive vise à réduire les risques d’occur-
de fonctionnement
rence d’une défaillance. La norme NF EN 13306 (2010) la définit
comme une « maintenance exécutée à des intervalles prédétermi-
avant défaillance (RUL)
nés ou selon des critères prescrits et destinée à réduire la probabi-
lité de défaillance ou la dégradation du fonctionnement d’un
bien ». Lorsque l’intervention de maintenance est exécutée à inter- 2.1 Quoi ? le pronostic – définition
valles fixes et prédéfinis, on parle de maintenance préventive sys- et mesures
tématique. Ce type de maintenance est déclenché suivant un
échéancier (heures de travail, kilomètres effectués, etc.) et se tra-
duit par le remplacement périodique de pièces, sans contrôle préa- 2.1.1 Concept de pronostic
lable et quel que soit l’état de dégradation des biens. La Beaucoup de définitions du terme pronostic ont été proposées et
maintenance préventive systématique peut conduire à du il n’en existe pas de totalement consensuelle. Un trait marquant
« surentretien », c’est-à-dire à un excès d’interventions inutiles, et peut cependant être identifié : le pronostic est souvent assimilé à
donc à des gaspillages financiers pour l’entreprise. Pour pallier un processus de prédiction (une situation future doit être appré-
cela, d’autres formes de maintenance préventive, fondées sur la hendée). Ensuite, deux grandes acceptations du pronostic peuvent
surveillance de l’état réel des biens sont apparues : les mainte- être considérées comme fédératrices : il désigne selon les cas un
nances conditionnelle et prévisionnelle. processus visant à déterminer la durée de vie restante d’un sys-
tème, c’est-à-dire sa DEFAD (durée de fonctionnement avant
défaillance), ou la probabilité pour que le système fonctionne
1.2.3 Maintenances conditionnelle durant un certain temps (figure 2). La DEFAD est communément
et prévisionnelle appelée RUL (remaining useful life).

Le pronostic est généralement efficace pour les modes de
La maintenance conditionnelle est définie comme « une mainte- défaillance résultant d’un processus de dégradation progressive, le
nance préventive fondée sur une surveillance du fonctionnement du plus simple étant linéaire. Une défaillance doit donc être définie en
bien et/ou des paramètres significatifs de ce fonctionnement inté- termes de paramètres ou de descripteurs surveillés. Cela suppose
grant les actions qui en découlent ». Cette stratégie de maintenance évidemment que la situation courante peut être saisie. Par ailleurs,
repose ainsi sur l’analyse des données en temps réel des équipe- le concept même de défaillance implique que le pronostic doit être
ments industriels (par exemple les vibrations, la température, etc.). associé à un degré d’acceptabilité (un système doit exécuter une
Elle vise la détection d’anomalies dans le fonctionnement des fonction exigée). Le pronostic devrait donc être fondé sur les critè-
machines industrielles : la découverte de changements dans leurs res d’évaluation, dont les limites dépendent du système lui-même
caractéristiques préfigure à court terme d’une défaillance à venir. et d’objectifs de performance (figure 3). Tout cela nous conduit à
retenir la définition proposée par la norme ISO 13381 (2004) : « Le
La maintenance conditionnelle permet de mieux tenir compte
pronostic est l’estimation de la durée de fonctionnement avant
des conditions d’utilisation d’un équipement que la maintenance
défaillance et du risque d’existence ou d’apparition ultérieure d’un
systématique traditionnelle. Cela étant, elle ne permet pas de
ou de plusieurs modes de défaillance ».
dimensionner avec certitude les politiques de maintenance : la
date d’occurrence de la défaillance reste incertaine. La mainte-
nance prévisionnelle vise à pallier ce manque de connaissance.
Elle est définie comme « une maintenance conditionnelle exécutée
en suivant les prévisions extrapolées de l’analyse et de l’évaluation
de paramètres significatifs de la dégradation du bien ». L’idée
sous-jacente est de projeter l’état actuel du bien dans le futur, afin
d’estimer le temps de fonctionnement avant la défaillance. La
maintenance prévisionnelle est ainsi plus dynamique. Elle prend
en compte les conditions actuelles des équipements et tente de tc RUL tdéf.
prévoir l’évolution dans le temps de l’état des biens. Les interven-
tions de maintenance étant planifiées avec davantage de précision,
la maintenance prévisionnelle doit permettre de faire des écono-
mies substantielles et fait l’objet d’une attention grandissante a
depuis quelques années. Les bénéfices attendus sont effecti-
vement nombreux : état à l'instant t
– réduction du nombre de pannes ;

– fiabilisation des productions ; E1 0,5
– amélioration de la sécurité du personnel et de l’image de
l’entreprise ;
E2 0,3
– réduction des périodes, coûteuses, d’immobilisation des
équipements ;
E3 0,2
– augmentation du rendement de l’entreprise. prob
La mise en œuvre d’une politique de maintenance prévisionnelle b

repose sur le déploiement d’un processus clé visant à déterminer
les états futurs du système surveillé : celui du pronostic industriel. Figure 2 – Pronostic comme : a) estimation du RUL,
La section suivante lui est consacrée. b) probabilités d’états

MT 9 570 – 4 est strictement interdite. – © Editions T.I.
2.1.2.2 Mesures de performances du système de pronostic

■ Exactitude (accuracy)
performance
! Symptôme Défaillance
L’exactitude mesure la proximité de la date de défaillance pré-
vue avec la date de défaillance réelle. Le calcul de cette métrique
représente un point critique dans le processus de pronostic. Le
calcul de cette grandeur s’appuie sur l’existence de données histo-
riques sur plusieurs composants tombés en panne suite à des sol-
licitations subies tout au long d’une période de temps connue, ce
qui n’est pas toujours possible. Si un ensemble de N systèmes
sont tombés en panne (avec les pronostics associés), l’exactitude
temps est définie comme suit :
DEFAD = RUL
1 t =N − RUL
E (t )
T t∑
Exactitude = e réel (1)
=1
Figure 3 – Performance et RUL
αe
E (t ) = RULréel (t ) − RULestimé (t ) avec α e ∈ [1, 2]] et 1 t T (2)
2.1.2 Métriques de pronostic L’erreur E (t) est élevée à la puissance pour pénaliser les mau-
vaises prédictions (exemple : αe = 2 pour l’erreur quadratique).
La définition d’un ensemble de métriques appropriées pour des
applications de pronostic fait l’objet de nombreux travaux de cher- La fonction exponentielle est employée ici pour donner une
cheurs ainsi que d’industriels. Plusieurs mesures émergent de la lit- courbe lisse monotoniquement décroissante. L’exactitude est
térature. Elles ne peuvent toutes être présentées ici mais le lecteur grande (proche de 1) quand la valeur prévue est identique à la
intéressé peut consulter les références [4] et [5] pour davantage de valeur réelle et diminue quand la valeur prévue dévie de la valeur
détails. Deux classes de métriques au moins sont d’intérêt : réelle. Une illustration de cette métrique est proposée en figure 5,
point a.
• un premier ensemble de métriques est celui qui permet de
quantifier les risques encourus par le système surveillé ; ce type de ■ Précision (precision)
métriques correspond aux mesures de pronostic dont la principale La précision est une mesure de dispersion des prédictions du
est le temps restant avant défaillance (time to failure, TTF, ou remai- RUL. Elle permet d’évaluer comment les valeurs prédites sont
ning useful life, RUL). Une mesure de confiance doit également être groupées autour de l’intervalle dans lequel survient la défaillance.
construite afin d’indiquer le degré de certitude du RUL ; La précision dépend fortement du niveau de confiance et de la dis-
• compte tenu du fait que le pronostic est, par essence, un pro- tribution des prédictions :
cessus incertain, il est intéressant de pouvoir juger de sa qualité
dans le but d’imaginer des actions plus adéquates ; dans ce sens, 1N
 − i 
R ∑ (E −E )2
N i =1 i
plusieurs indicateurs peuvent être construits. Ce sont les mesures  1 N R0  1 N
de performance du système de pronostic ; les principales mesures Précision=  ∑ e  ×e
σ0 avec E = ∑E (3)
mises en avant dans la littérature sont l’exactitude, la précision et  N i =1  N i =1 i
l’opportunité des estimations.
Les grandeurs R0 et σ0 sont des facteurs de normalisation, et Ri
est l’intervalle de confiance de la prédiction pour l’expérimen-
2.1.2.1 Mesures de pronostic tation.
Comme mentionné précédemment, la principale métrique de De même, une fonction exponentielle est employée ici pour défi-
pronostic recherchée est le temps restant avant défaillance. En nir les relations entre l’écart-type de la prédiction, l’intervalle de
outre, une mesure de confiance peut être construite pour indiquer confiance et la précision. La précision a une valeur entre 1 et 0 (1
le degré de certitude du temps avant défaillance prédite. Par exten- indiquant la précision la plus élevée et 0 la plus basse). La
sion, et si on considère que les utilisateurs peuvent être intéressés complémentarité de l’exactitude et de la précision est illustrée sur
par l’évaluation du système au regard de limites de performance, la figure 5, point a.
le RUL et la confiance peuvent être généralisés : sur la figure 4,
TTxx est le temps restant pour dépasser la limite de performances ■ Opportunité (timeliness)
Perf/xx, et Conf/xxT est la confiance avec laquelle l’indication Cette métrique mesure la position relative de la fonction de den-
TTxx/T>T peut être prise. sité de probabilité du modèle de pronostic par rapport à l’apparition
Courbes de prédiction
taux dégradation (%) pdf Conf/xxT : "TTxx > T
avec 90 % de confiance"
100 % Défaillance
TTxx pdf
xx % Perf/xx
90 %
0
t0 TTxx t t0 T t
TTF = RUL
Figure 4 – Mesures de pronostic : RUL et confiance

Précision de pron 1 < Précision de pron 2 pron. 1 pdf

pdf
pron. 2 pdf
courbe d'exactitude
Exactitude de pron 1 > Exactitude de pron 2
time
Date de défaillance
Date de Date de
défaillance défaillance
pdf du TTF
prédit Limites pdf du TTF

d'acceptabilité prédit
t t t
Prédiction trop tôt Prédiction trop tard Bonne prédiction
Figure 5 – Mesures de performances du système de pronostic : a) exactitude et précision, b) opportunité
de l’événement de défaillance. Elle évolue à mesure que les don- 2.2 Comment ? les approches
nées sont disponibles et permet de juger du moment adéquat pour
effectuer la maintenance. P. Bonissone et K. Goebel préconisent de
de pronostic
définir des limites au plus tôt et au plus tard au-delà desquelles la
valeur prédite doit être considérée comme inacceptable d’un point 2.2.1 Classification des approches de pronostic
de vue performance [6]. Par exemple, si la prédiction est « trop tôt »,
l’alarme résultante sollicite trop tôt l’intervention pour vérifier le De nombreux outils et méthodes de pronostic de défaillance ont
potentiel d’apparition d’une défaillance, pour surveiller les diverses été proposées durant la dernière décennie. Elles diffèrent généra-
variables de processus et pour effectuer une modalité de reprise. lement par le type d’application considérée, alors que les outils
Dans l’autre cas, si la défaillance est prévue « trop tard », cette mis en œuvre dépendent principalement de la nature des données
erreur réduit le temps disponible pour évaluer la situation et réagir et connaissances disponibles pour construire un modèle de
en conséquence. La situation devient catastrophique quand la comportement du système réel incluant le phénomène de la
défaillance se produit avant qu’une prévision ne soit faite. Par dégradation. Aussi, ces méthodes et outils peuvent être regroupés
conséquent, il est, dans la plupart des situations, préférable d’avoir dans un nombre limité d’approches.
une polarisation positive des erreurs (prévisions « tôt »), plutôt que Le premier classement des approches de pronostic a été pro-
négative (prévisions « tard »). Toute prédiction en dehors des limi- posé par M. Lebold et M. Thurston [7]. Dans leur papier, les
tes est considérée comme inappropriée (figure 5, point b). auteurs suggèrent une classification pyramidale à trois niveaux
des approches de pronostic : les approches fondées sur l’expé-
■ Horizon de pronostic (horizon of prediction) rience, celles guidées par les données, et les approches fondées
sur les modèles. Pour dissocier ces trois types d’approche, les cri-
Cette métrique mesure la différence entre l’instant où la pre- tères suivants sont considérés : le coût et la complexité de mise en
mière prédiction entre dans un intervalle de confiance prédéfini et œuvre, la précision des résultats obtenus, et l’applicabilité des
la date réelle de la défaillance. Plus la valeur de l’horizon est approches. En 2006, D. Banjevic, D. Line et A.-K.-S. Jardine ont
grande, plus le pronostic est performant. proposé une nouvelle taxonomie des méthodes de pronostic, en
distinguant deux grandes catégories de méthodes [8]. La première
■ Convergence (convergence) regroupe les méthodes portant sur l’estimation de l’état futur du
composant, sous-système, ou système (estimation du RUL), et la
La convergence quantifie l’évolution dans le temps des mesures seconde catégorie concerne les méthodes permettant de détermi-
traditionnelles, comme l’exactitude et la précision. ner le RUL tout en intégrant le contexte de fonctionnement du

système (actions de maintenance et conditions d’exploitations).

Récemment, A. Heng, J. Mathew, A. Tan Tan et S. Zhang [9] ont
proposé une nouvelle classification fondée sur les trois approches
suggérées par M. Lebold et M. Thurston auxquelles a été ajoutée
une quatrième classe qualifiée d’« intégrée ». Les auteurs sug-
gèrent alors de considérer les approches de pronostic selon le type
de données et de connaissances disponibles. En ce qui concerne le
premier type d’approche, ils proposent de regrouper les méthodes Méthodes
qui utilisent les données de retour d’expérience. Le deuxième type Physiques
d’approche correspond aux méthodes qui emploient les données
de surveillance (principalement celles fournies par des capteurs
installés sur le système) comme informations d’entrée des algo-
rithmes de pronostic. Ces méthodes peuvent être divisées en deux Ph Fus n
y io sio s +
sous-catégories, celles fondées sur des modèles mathématiques et Do siqu n Fu ique es
nn es s t
celles exploitant exclusivement les données de surveillance. Le y lis
ée +
s Ph iabi
dernier type d’approche correspond aux méthodes fusionnant des F
données de fiabilité et de surveillance.
Données +
Fiabilistes
Méthodes
Fusion
La classification des approches de pronostic n’est pas une fin en guidées par Méthodes
soi et il apparaît que la vision pyramidale de M. Lebold et M. les données fiabilistes
Thurston fait aujourd’hui référence [10]. Nous choisissons ainsi
pour la suite de distinguer les approches :
– fondées sur un modèle physique ;
– guidées par les données de surveillance ;
– fondées sur l’expérience, c’est-à-dire les approches fiabilistes.

Le positionnement relatif de ces types d’approche ainsi que
leurs principales caractéristiques sont schématisés sur la figure 6
proposée par K. Medjaher, D.-A. Tobon-Mejia et N. Zerhouni [11].
Notons que les approches guidées par les données de sur- Applicabilité
veillance et les approches fiabilistes sont parfois regroupées en - +
une seule catégorie d’outils orientés « données ». Aussi, certains
types d’applications permettent de fusionner des modèles
Coût
physiques et des méthodes guidées par les données en approches
hybrides. - +
Précision
2.2.2 Méthodes fondées sur un modèle physique
- +
Les méthodes fondées sur un modèle physique requièrent la Complexité
construction d’un modèle dynamique représentant le
comportement du système, et intégrant le phénomène de dégra- - +
dation (principalement des modèles de fatigue, d’usure ou de cor-
rosion) dont l’évolution est modélisée par une loi déterministe ou
un processus stochastique. Figure 6 – Taxonomie des approches de pronostic selon
K. Medjaher, D.-A. Tobon-Mejia et N. Zerhouni [11]
Ces méthodes offrent généralement des résultats plus précis
que ceux des deux approches restantes. Cependant, leur
inconvénient majeur réside dans le fait que, pour des systèmes Ces approches ne nécessitent pas de modèle analytique du
réels, il est difficile, voire impossible, d’obtenir le modèle dyna- comportement du système et de la dégradation et sont donc plus
mique sous forme analytique intégrant le phénomène de dégra- simple à mettre en œuvre que les méthodes à base de modèle
dation. Leur cadre applicatif en est ainsi restreint. physique. En revanche, elles perdent naturellement en précision à
mesure que les modèles appris dévient du comportement réel du
système. Elles constituent ainsi un compromis entre applicabilité
2.2.3 Méthodes guidées par les données et précision.
de surveillance
Le pronostic guidé par les données s’appuie sur le constat 2.2.4 Méthodes fiabilistes
suivant : les mesures (entrées-sorties) constituent souvent la plus
forte et la plus sûre source d’informations pour comprendre les Les méthodes fiabilistes reposent sur l’exploitation d’une fonc-
phénomènes de dégradation. Ce type d’approche vise ainsi à tion de fiabilité ou d’un processus stochastique de détérioration
apprendre (par les exemples) le phénomène de dégradation, et à dont les paramètres sont déterminés à partir d’expertises ou de
capturer les relations subtiles entre données, même si ces rela- données de retour d’expérience.
tions sont inconnues ou difficiles à décrire. Elles reposent donc sur
l’exploitation de données de surveillance – issues de capteurs – ou Ces méthodes sont relativement faciles à mettre en œuvre si
d’interventions de maintenance, lesquelles sont traitées afin l’on dispose d’un volume de données de retour d’expériences suf-
d’extraire des caractéristiques reflétant le comportement du sys- fisant et fiable pour chaque type de machine, système ou
tème et sa dégradation. Ces grandeurs sont ensuite utilisées pour composant. Cependant, en pratique, les bases de retour d’expé-
apprendre des modèles de prédiction des états actuel et futur du rience sont incomplètes ou quasiment inexistantes et l’approche
système, et ainsi donner une estimation du RUL. fiabiliste est finalement la moins précise.

Tableau 1 – Pronostic basé sur un modèle Tableau 3 – Pronostic fondé sur l’expérience –
physique approches fiabilistes
– Construire un modèle mathématique prédictif – Le pronostic est assimilé à une étude de
Principe du comportement intégrant le phénomène fiabilité prévisionnelle, l’objectif étant
de dégradation Principe d’identifier les paramètres d’une distribution
aléatoire décrivant le phénomène de dégradation
– Précision : le modèle est dédié ou de défaillance
– Flexibilité : si une propriété du système ou de la
dégradation change, le modèle peut être réajusté – Applicabilité très large
Avantages – Ne nécessite pas de connaissance pointue
– Interprétabilité : la connaissance de la structure
du modèle permet de relier la variation d’indica- Avantages des mécanismes physiques de dégradation
teurs à une modification de paramètre – Relativement simple à mettre en œuvre et
peu coûteux
– Le développement du modèle est extrêmement
coûteux et nécessite un niveau de qualification – Généralement centré sur des composants
élevé et une expérience certaine critiques
– Nécessaire de connaître les mécanismes – Développement d’approches orientées
de dégradation et les facteurs influents sur « système » rare
celle-ci – Décalage entre les modèles mis au point
Inconvénients Inconvénients
– Complexité de modélisation des interactions (mono-composant à 2 états) et la réalité indus-
– Difficultés de calcul – résolution d’un système trielle (système multi-composants à multi-états)
d’équations différentielles – Nécessite un historique d’expériences passées
– Il peut être impossible de généraliser représentatif de toutes les conditions d’utilisation
une approche fondée sur un modèle physique des systèmes
orientée « composant » à un niveau « système » – Lois de poisson, exponentielle, de weibull,

log-normal, etc.
– Observateurs, espace de parité, estimation Exemples
Exemples – ALM (accelerated life model), PHM (proportio-
paramétrique, modèles physico-chimiques
nal hazard model)
– Simulation de Monte-Carlo
Tableau 2 – Pronostic guidé par les données

de surveillance Tableau 4 – Approches de pronostic
– Sur la base de données capteurs, construire et type d'information nécessaire
des descripteurs reflétant l’état du système sur- Approches
Principe
veillé, et en apprendre l’évolution par des outils
d’intelligence artificielle notamment fondées guidées fondées
sur un modèle par les sur
– Compromis entre précision et applicabilité physique données l'expérience
– Mise en œuvre simple : ne requiert
pas la connaissance formelle des mécanismes Modèle Non
Nécessaire Utile
Avantages de dégradation du système nécessaire
– Transformation de données bruitées Historique des Non
en informations pertinentes Utile Nécessaire
défaillances nécessaire
– Adapté à tout type d’application instrumentée
Conditions Non
– Existence de données opérationnelles Nécessaire Utile
passées nécessaire
et de surveillance
Inconvénients – Acquisition et couverture des données Conditions
Nécessaire Nécessaire Utile
d’apprentissage actuelles
– Temps d’apprentissage
Reconnais-
Non
– Graphes de Markov et dérivés, réseaux Bayé- sance des Nécessaire Nécessaire
nécessaire
siens, filtres particulaires, réseaux de neurones défaillances
Exemples et réseaux neuro-flous, réseaux d’ondelettes, Historique de Non
fonctions de croyance, méthodes statistiques Utile Utile
maintenance nécessaire
(régressions, ARMA)
Capteurs, Pas de cap-
Capteurs
Général pas de teur, pas de
et modèle
modèle modèle
2.3 Mise en œuvre du pronostic
2.3.1 Du choix d’un outil de pronostic C. Byington, J. Kacprzynski, M. Roemer et G. Vachtsevanos [12]
dans le tableau 4. Bien entendu, les sorties attendues sont essentiel-
lement celles permettant de juger de l’état futur du système,
D’un point de vue applicatif, les informations requises pour c’est-à-dire les métriques présentées au paragraphe 2.1.2.
déployer les approches de pronostic sont de nature diverses :
modèles d’ingénierie, données, historiques des défaillances, Notons cependant que la distinction entre classes d’outils n’est
sollicitations du système, conditions de fonctionnement, etc. Les pas évidente. À titre d’exemple, un réseau bayésien peut être uti-
principales entrées et leur intérêt dans chacune des trois approches lisé pour générer un modèle dynamique d’un système et suivre
de pronostic peuvent être schématisés tels que proposé par l’évolution des caractéristiques dans le temps (approche fondée

sur un modèle). Pour cela, il est possible d’utiliser un ensemble un pronostic de défaillance. Il est par exemple possible de suivre un
d’algorithmes permettant d’apprendre la structure et les para- synoptique tel que celui proposé en figure 7 par M. El-Koujok [13].
mètres du réseau (approche guidée par les données). Mais ces
paramètres peuvent également être estimés statistiquement à par- ■ Point 1 : définition d’un équipement – composant critique
tir d’une base d’historique disponible (approche fondée sur l’expé- Le déploiement de solutions de PHM se justifie principalement
rience). Le message n’est bien entendu pas ici de dire que la pour les équipements jugés critiques, c’est-à-dire ceux pour
classification des approches de pronostic est fausse, mais davan- lesquels les stratégies traditionnelles de maintenance peuvent se
tage qu’elle doit être considérée avec précaution. Au final, il appa- montrer limitées en terme de gains attendus.
raît qu’aucune approche de pronostic n’est universelle et que le L’identification de composants critiques est généralement réali-
choix d’une technique adéquate dépend de contraintes classiques sée par un expert du système ou de l’équipement sur lequel est
limitant l’applicabilité des outils : fondé le pronostic. Cette tâche nécessite une compréhension
– disponibilité des données et/ou connaissances et/ou expériences ; approfondie du système et l’utilisation de méthodes et d’outils
– dynamique et complexité des systèmes réels ; adéquats (AMDEC, décomposition fonctionnelle, etc.).
– contraintes d’implémentation (précision, temps de calcul, ■ Point 2 : identification de la nature des dégradations
etc.) ;
– possibilités de mesures (capteurs, système SCADA...), etc. Le pronostic prend toute sa dimension lorsque les défaillances à
prédire sont de nature progressive (par dégradation). En effet, ce
type de défaillance est généralement précédé de symptômes
2.3.2 Du choix d’une application cible avant-coureurs permettant d’envisager une stratégie de
maintenance plus « dynamique » qu’une maintenance préventive
Généralement, une analyse de système est réalisée en exploitant systématique.
différents modèles : un modèle fonctionnel pour décrire les fonc-
tions à fournir par le système, un modèle structurel pour décrire ■ Point 3 : choix de grandeurs à mesurer et instrumentation
l’architecture permettant la réalisation de ces fonctions, et un Si aucune formulation mathématique des phénomènes de
modèle événementiel pour décrire le comportement. Du point de dégradation n’est disponible, il n’en reste pas moins qu’il faut être
vue de la sûreté de fonctionnement, il peut être difficile d’identifier en mesure de les approximer. Cela suppose que des indicateurs de
les rapports existant entre fonctions, structures et comportement dégradation peuvent être construits à partir de grandeurs
(complexité du processus, manque de connaissance, relations cau- physiques mesurées sur le composant analysé (température, cou-
sales compliquées, etc.). Ces considérations rendent l’étape de rant électrique, tension, vibration, émission acoustique, etc.).
modélisation difficile, voire impossible, ce qui est valable dans la Ensuite, il est nécessaire de s’assurer, d’une part, que le
perspective de bâtir des systèmes de pronostic de défaillance. composant peut être instrumenté de capteurs, et d’autre part, que
Aussi, dans les faits, les systèmes de PHM fonctionnels s’avèrent des processus de traitement des données brutes existent (net-
dédiés à des composants cibles, et il est donc nécessaire de définir toyage de signal, extraction et sélection de caractéristiques). Ce
une stratégie d’identification des composants sur lesquels réaliser point est plus explicitement introduit dans la section suivante.
Parc matériel
Équipement jugé non

Pt 1 Stratégie de maintenance traditionnelle
critique ?
+
oui
Défaillance non
Pt 2 Maintenance préventive accentuée
progressive ?
+
oui
L'équipement peut être non

Pt 3 Reconception et améliorations
instrumenté ?
oui
Équipement Stratégie de maintenance conditionnelle

«cible» et prévisionnelle
Solutions
de PHM
Figure 7 – Pronostic de composants – stratégie de choix de l’application cible selon M. El-Koujok [13]

3. Des données au RUL :

architecture CBM Plan actions
et processus PHM
Décision
Détection Diagnostic
ordo.
3.1 Processus de détection, Système
diagnostic et pronostic
Pronostic
L’activité de maintenance fait appel à différents processus
métiers dont la finalité est de réduire les coûts de maintenance,
tout en augmentant la fiabilité, la disponibilité et la sécurité de ses a détection, diagnostic, pronostic et ordonnancement
équipements. Ainsi parle-t-on couramment de la détection de dans les systèmes de maintenance intelligente
défauts, du diagnostic de défaillance, du choix d’actions de maî-
trise (préventives ou correctives), de la planification de ces actions
dans le temps. De manière imagée, ces étapes correspondent à la
nécessité, d’abord, de percevoir certains phénomènes, ensuite, de des effets vers les causes :
les comprendre, et enfin, d’agir en conséquence. Cela étant, tel diagnostic
que nous l’avons déjà mentionné, une autre approche (complé-
État courant : tps
mentaire et non exclusive) consiste, non pas à comprendre a pos-
teriori un phénomène qui vient de se manifester (défaillance), mais détection
plutôt, à tâcher d’en anticiper l’apparition afin de recourir à des tps
actions protectrices en conséquence. C’est l’objectif du « pronostic des causes vers les effets :
pronostic
de défaillance ». Le positionnement relatif des processus de détec-
tion, diagnostic et pronostic est schématisé sur la figure 8, point a.
! tps
D’un point de vue phénoménologique, leur complémentarité peut
être expliquée comme suit [10] (figure 8, point b) :
b détection, diagnostic et pronostic :
• la détection vise à identifier le mode de fonctionnement du les aspects phénoménologiques
système, son état ;
• lorsqu’une défaillance est apparue, le diagnostic permet d’iso- Figure 8 – Complémentarité des activités de détection, diagnostic
ler et d’identifier le composant qui a cessé de fonctionner (des et pronostic
effets vers les causes) ;
• le pronostic vise la prédiction des états futurs du système (des
causes vers les effets). par le groupe MIMOSA s’avère fédératrice. Il s’agit de la OSA/CBM
(open system architecture for condition-based maintenance). Cette
Ainsi, les principales activités de maintenance industrielle énu- architecture est constituée de sept couches fonctionnelles pouvant
mérées ici se complètent parfaitement. Elles reposent cependant être considérées comme séquentielles (figure 9 tirée de [14]) ou dis-
naturellement sur une bonne compréhension des phénomènes de tribuées dans un réseau (figure 10 adaptée de [7]).
défaillance. Cela peut être délicat lorsque la dynamique des équi-
pements est marquée ou lorsque leurs conditions d’utilisation sont
variables : la modélisation des phénomènes peut parfois être diffi-
cilement assurée par un expert et il convient d’instrumenter les Remarque
systèmes afin de recueillir des données terrain permettant à terme
de déployer les différents processus de maintenance. Aussi, il Mimosa est une association à but non lucratif visant à dévelop-
apparaît que le processus de pronostic, bien qu’indispensable pour per et à encourager l’utilisation d’architectures de données
déployer une stratégie de maintenance prévisionnelle (des causes ouvertes. Le consortium Mimosa a notamment proposé un stan-
vers les effets), ne doit pas être considéré de manière isolée, mais dard d’architecture de données pour supporter les stratégies de
doit être vu comme une partie d’un processus plus global. maintenance conditionnelle et prévisionnelle (OSA-CBM).
Conformément à ce que préconisent les experts en maintenance,
différentes activités doivent être menées de front pour mettre en
œuvre une politique de maintenance prévisionnelle (et ainsi amé-
liorer les performances des interventions de maintenance). ■ Couche 1 – module capteurs
L’ensemble constitue ce qui est communément nommé un sys-
tème de CBM (condition-based maintenance). Ce module fournit au système des données numériques issues
de capteurs ou de transducteurs.
3.2 Architecture CBM et processus PHM ■ Couche 2 – module traitement du signal

Les signaux fournis par les capteurs sont récupérés au travers
3.2.1 Architecture CBM de cartes d’acquisition, sauvegardés, puis traités pour extraire des
descripteurs représentant l’évolution de la dégradation et de l’état
Quantité de travaux sont apparus récemment pour proposer des du système au cours du temps.
architectures de maintenance prévisionnelle, intégrant les activités
traditionnelles de maintenance telles que la surveillance, le diagnos- ■ Couche 3 – module de surveillance – détection d’état
tic et la logistique de maintenance. Dans ces travaux, les différences
n’apparaissent qu’à un niveau de détail relativement petit, et portent Le module de surveillance compare les données en ligne (des-
essentiellement sur la forme des architectures logicielles à mettre cripteurs extraits) avec certaines valeurs attendues ou connues ; il
en œuvre (locales, distribuées, par modules, etc). Dans l’ensemble, doit également être capable de générer des alertes en fonction de
l’architecture proposée par M. Lebold et M. Thurston [7] et diffusée seuils préalablement fixés.

Physical Models
Data
Acquisition
Passive/ Data Condition Health Prognostics Automatic
Smart Sensor Manipulation Monitor Assessment Decision
Reasoning
S1 - Pre-processing - Thresholds - Component - Feature- - Data Fusion
- Feature Specific Based Human-
Complex
S2 Extraction - Fuzzy Logic Feature Prognostics - Classifier Computer
System
- Signal Extraction Interface
Charact. - Anomaly & - Model-Based - Response
Diagnostic Prognostics Generator
Reasoners
SN
Mission Plans
Figure 9 – Architecture OSA/CBM séquentielle selon D. Boylan, M. Lebold et K. Reichard [14]

Diagnostic
Détection Pronostic
Prétraitement Informations Aide à la

des données et connaissances décision
Acquisition
Interface HM
de données
Figure 10 – Architecture OSA/CBM adaptée de M. Lebold et M. Thurston [7]
■ Couche 4 – module de diagnostic ■ Couche 6 – module d’aide à la décision

Sur la base de l’état détecté, ce module détermine si le système Sa fonction principale est de recommander des actions de main-
ou composant surveillé est dégradé ou non, et suggère les causes tenance ou d’autres alternatives pour faire fonctionner le système
probables de défaillance. jusqu’à l’accomplissement de sa mission. Cette phase de décision
est notamment fondée sur les estimations de RUL.
■ Couche 5 – module de pronostic
■ Couche 7 – module de présentation
Ce module s’appuie sur les données issues des modules précé-
dents afin de prédire l’état futur du système ou du composant sur- Ce module reçoit les informations de tous les modules précé-
veillé, et de donner une estimation de la durée de fonctionnement dents. Il peut être construit sous forme d’une IHM (interface
avant défaillance (RUL). homme-machine).

3.2.2 Processus PHM ■ Données événementielles

Les données événementielles, bien qu’aussi importantes que les
Si la structure OSA-CBM a été définie dans une optique d’implé- données observées, sont beaucoup moins utilisées. L’argument
mentation informatique d’un système de maintenance intelligente, souvent mis en avant est que ces données s’avèrent inutiles dès
elle n’en reste pas moins révélatrice de l’ensemble des processus élé- que les données observées sont fiables pour la prédiction des
mentaires nécessaires pour bien appréhender et gérer les phénomè- états du système. Il apparaît qu’en réalité les données événemen-
nes de défaillance. Aussi, cette même décomposition est aujourd’hui tielles sont négligées car il existe peu de méthodes permettant de
indifféremment retenue pour décrire les processus du prognostics les exploiter. Par ailleurs, les données événementielles sont sou-
and health management (PHM). Le PHM est d’ailleurs un terme pour vent collectées manuellement par des opérateurs et, par
lequel aucune définition consensuelle n’a été proposée. Selon le conséquent, l’exploitation de celles-ci en conjonction avec celles
CALCE Center, l’un des groupes de recherche les plus actifs dans le observées est plus assujettie aux erreurs (notamment de saisie).
domaine, le PHM est « the means to predict and protect the integrity
of equipment and complex systems, and avoid unanticipated opera-
tional problems leading to mission performance deficiencies, degra- 3.3.2 Traitement des données
dation, and adverse effects to mission safety ». Autrement dit, le
cadre applicatif du PHM ne se limite pas à la maintenance industrielle, Trois types de traitement des données (couche 2 de l’architecture
mais les processus élémentaires auxquels il fait appel sont les PHM) sont généralement retenus : le nettoyage, l’analyse (l’extrac-
mêmes que ceux de la décomposition OSA-CBM. La principale diffé- tion de descripteurs) et la réduction de l’espace des données.
rence réside dans la nature des décisions à prendre : le PHM se veut ■ Nettoyage des données
plus général et pouvant être appliqué à tout type d’activité.
Le nettoyage des données vise à s’assurer que les données ne
présentent pas d’erreur, et à en réduire les bruits par des
techniques de filtrage. Les erreurs de données les plus usuelles
3.3 Données et traitements usuels sont dues à des défauts de capteurs.
Il n’est pas envisageable d’approfondir ici l’analyse de chacune ■ Analyse des données – extraction de descripteurs
des sept couches du processus PHM (figures 9 et 10). En effet, L’analyse des données consiste à construire des indicateurs (des-
l’objectif de chacun des modules, la nature des données manipu- cripteurs) interprétables, ou tout au moins portant suffisamment
lées, les outils et techniques utilisables, etc., sont intimement liées à d’informations pour que des algorithmes de détection, de diagnos-
l’application visée et au système surveillé. À titre d’exemple, l’ana- tic, et de pronostic puissent être construits (appris) et utilisés. Le
lyse prévisionnelle de l’état de charge d’une batterie pour une appli- choix d’une méthode d’extraction de descripteurs dépend principa-
cation embarquée, l’optimisation des stratégies de maintenance lement du type de données recueillies, et de l’application
d’un champ d’éoliennes, ou encore la prédiction de la propagation considérée. En particulier, une donnée observée peut être de trois
d’un défaut au sein d’un roulement, ne font bien évidemment pas types et les traitements associés y sont intimement liés :
appel aux mêmes types de données et traitements, ne serait-ce que
parce que ces trois problèmes n’ont pas la même dynamique et ne • donnée de type « valeur » : c’est-à-dire à valeur unique recueillie
répondent pas aux mêmes problèmes physico-chimiques. Aussi, à un instant précis ; c’est par exemple le cas des données issues
nous nous limitons ci-après à quelques considérations générales d’analyse d’huile, de température, de pression ou d’humidité ;
sur les données et traitements les plus usuels. • donnée de type « signal » : dans ce cas, la donnée prend la
forme d’une série temporelle d’une variable à valeur unique ; c’est
par exemple le cas des données vibratoires et acoustiques ;
3.3.1 Acquisition de données
• donnée « multidimensionnelle » : dans ce cas, la donnée est
L’acquisition de données est une étape essentielle consistant à composée d’un ensemble de valeurs à tout instant ; l’exemple clas-
collecter et à stocker des informations pertinentes émanant du sys- sique de données multidimensionnelles sont les images comme
tème physique en cours de fonctionnement. Ces informations peu- celles issues de thermographes infrarouge ou à rayons X.
vent prendre la forme d’événements et d’observations (données Dans la plupart des cas d’étude, le traitement des données
de surveillance). Les données événementielles indiquent avec pré- s’appliquent aux signaux temporels monodimensionnels ou multi-
cision ce qui s’est passé sur le système, par exemple, une installa- dimensionnels. Dans ce cadre, de très nombreuses méthodes ont
tion, une panne ou une révision. Elles indiquent également ce qui été développées pour analyser et interpréter les données.
a été fait sur le système, par exemple, une réparation mineure, une
opération de maintenance préventive ou encore un changement ■ Réduction des données
d’huile. Les données dites « observées » sont quant à elles des La réduction de l’espace des données vise à ne conserver que
mesures effectuées sur le système à l’aide de capteurs. Ces don- les données portant l’essentiel de l’information, c’est-à-dire
nées observées informent (généralement de manière indirecte) sur s’affranchir des doublons, ou encore des données ne présentant
I’« état de santé » du système. que peu d’intérêt. À titre d’exemple, les données à faible pouvoir
discriminant ne sont généralement pas retenues.
■ Données de surveillance
Dans la pratique, les données observées sont les plus utilisées.
Elles peuvent inclure des données sur les vibrations, les données
acoustiques, des données d’analyse d’huile, température, pression,
humidité, et toutes les autres observations physiques, notamment
4. Exemple d’application
les indices visuels, qui ont trait à l’état physique de fonctionnement
dans son environnement. Un panel de capteurs (micro-capteurs, 4.1 Description de l’exemple
des capteurs à ultrasons, capteurs d’émission acoustique, thermo-
graphie imageurs, etc.) a été conçu pour recueillir ces données. Les L’illustration présentée ci-après porte sur l’étude PHM d’un rou-
technologies sans fil ont fourni une alternative financièrement lement, composant critique de tout système rotatif. En effet, selon
attractive à la communication filaire. Avec le développement rapide les études menées dans le domaine, plus de 40 % des pertes de
de l’informatique et des technologies avancées pour les capteurs, fonctionnalité des moteurs asynchrones sont dues à des défail-
les technologies pour l’acquisition de données sont devenues plus lances de roulements. Aussi, bien que graduelle, la dégradation
puissantes et moins onéreuses entraînant une croissance exponen- d’un roulement peut entraîner l’usure prématurée d’autres
tielle des bases de données. éléments du système.

Vérin pneumatique
Roulement
testé Transmission
de force
Figure 11 – Principaux éléments de la plateforme PRONOSTIA [15]
L’application considérée est tirée d’une campagne d’expériences

menées au sein de l’institut FEMTO-ST. Les données sont issues
de la plateforme PRONOSTIA, plateforme développée afin de tes-
ter et de valider des algorithmes de détection, de diagnostic, et de
pronostic de défaillance. Les données sont disponibles en ligne et
ont fait l’objet d’une compétition lors de la conférence IEEE
PHM’2012 [15].
L’objectif principal de PRONOSTIA est de fournir des données
expérimentales réelles caractéristiques de la dégradation d’un rou-
lement durant toute sa durée de vie utile. PRONOSTIA permet de
maintenir le roulement testé dans des conditions de fonction-
nement sévères (figure 11) : une force radiale (réglable) est exer-
cée sur le roulement testé, ce qui permet, au choix, de simuler des
conditions réelles de fonctionnement, ou de conduire une expéri-
mentation en quelques heures. Quelques photos d’un roulement
avant et après expérimentation sont données en figure 12.
4.2 Couche 1 : acquisition des données

La caractérisation de la dégradation du roulement se fait par
analyse vibratoire et thermique. Deux types de capteurs sont Figure 12 – Roulement avant expérimentation (haut gauche)
et après expérimentation (avec détail sur la cage et les billes)
utilisés :
– deux accéléromètres miniaturisés sont positionnés à 90o l’un
de l’autre sur la bague de bridage du roulement ; les mesures sont tation est stoppée lorsque la valeur de 20 g est atteinte pendant
échantillonnées à 25,6 kHz ; quelques secondes.
– une sonde de température de type céramique, échantillonnée à
10 Hz.
Une application développée sous LABVIEW© permet de visuali- 4.3 Couche 2 : prétraitement des données
ser les signaux issus des différents capteurs. Ainsi, toutes ces don-
nées sont visibles en temps réel sur des graphes déroulants, et
À partir des signaux issus des capteurs, une batterie d’algo-
sont formatées, horodatées et enregistrées en local dans différents
rithmes de traitement du signal permet d’obtenir un nouvel ensem-
fichiers, en vue de leur exploitation pour l’identification des des-
ble de signaux appelés « caractéristiques pertinentes de la
cripteurs de surveillances adaptés au pronostic de défaillance des
dégradation du roulement ». En particulier, la transformée de
roulements.
Fourier à fenêtre glissante est appliquée sur le signal vibratoire
Un exemple de signal vibratoire est donné en figure 13. L’accé- fourni par les accéléromètres afin d’identifier au cours du temps les
lération varie dans une plage assez importante et l’expérimen- fréquences présentant le maximum d’énergie (figure 14). Il existe

50
40
30
20
accélération (g)
10
-10
-20
-30
-40
-50
0 1 2 3 4 5 6 7
temps (s) x 106
Figure 13 – Exemple de signal vibratoire issu d’un accéléromètre pour une expérimentation complète
bien d’autres caractéristiques [16], telles que le RMS (écart quadrati-

que par rapport à une moyenne), le skewness, le kurtosis, etc.
Amplitude (m2 · s–4), échelle log.
– 20
– 40
– 60
– 80
– 100
12 0
14 000
0 6 000
Figure 14 – Exemple de spectrogramme (en décibels) pour le signal de la figure 13
L’extraction de caractéristiques pertinentes permet de réduire la s’ensuit généralement une sélection des fréquences les plus perti-
taille des signaux issus des capteurs. Par exemple, le signal affiché nentes, par exemple par analyse en composantes principales. Le
sur la figure 14 présente beaucoup moins de points sur l’axe tem- sous-ensemble de caractéristiques obtenu est ainsi injecté dans un
porel que sur la figure 13, la réduction de la dimension étant fonc- algorithme de pronostic. Ce dernier peut être fondé sur un proces-
tion de la taille de la fenêtre et du recouvrement utilisés dans la sus de détection permettant de déterminer l’état courant du sys-
transformée de Fourier. La prise en compte de toutes les plages de tème, suivi d’une prédiction afin d’estimer le temps restant avant
fréquence augmente cependant la dimension des données et il défaillance.

PSD (m2 · s–4)

– 25
– 30
– 35
– 40
– 45
– 50
0,02 0,04 0,06 0,08 0,1 0,12 0,14 0,16

RMS (m · s–2)
Données de test
Données d’apprentissage
Modes estimés
Nouveaux modes détectés
Figure 15 – Détection des modes sur deux roulements présentant des caractéristiques de dégradation éloignées
4.4 Couches 3 et 5 : détection d’état maintenance préventive et corrective sont peu à peu complétés
par une prise en compte plus réactive et proactive des défail-
et pronostic de défaillance lances. L’estimation du temps résiduel avant défaillance d’un équi-
pement (RUL) et la confiance pouvant être associée à cet
La figure 15 représente deux caractéristiques (une dimension du indicateur doivent permettre d’éviter des dépenses de mainte-
spectrogramme et le RMS) pour deux roulements différents. Un pre- nance inutiles, et le pronostic connaît un intérêt croissant ces
mier roulement (correspondant aux points rouges) est utilisé pour quinze dernières années. Il fait l’objet d’une norme internationale
apprendre les paramètres du système de détection d’états et de récente et est aujourd’hui considéré comme un processus clef
prédiction [17]. Les paramètres sont ensuite adaptés avec l’acquisi- dans les stratégies de maintenance. L’analyse de la littérature per-
tion de nouvelles données suite à une nouvelle expérimentation sur met de constater que beaucoup d’alternatives existent a priori
un deuxième roulement (points verts). Les croix et les ronds appa- pour supporter l’activité de pronostic : approches fondées sur un
raissant dans les nuages de points correspondent à des états de modèle, approches guidées par les données, approches fondées
fonctionnement détectés par le système au fil des acquisitions. sur l’expérience.
À chaque état est associé un modèle d’évolution reliant les valeurs Cependant, si le processus de pronostic vise la quantification du
des caractéristiques passées aux valeurs futures. Ainsi, le système RUL, il ne peut être considéré de manière isolée. Ce point est parti-
peut être interrogé sur les valeurs futures prises à un horizon donné. culièrement perceptible dans le concept de condition based mainte-
La figure 16 illustre la prédiction d’une des caractéristiques 100 pas nance (CBM). D’une part, l’anticipation des défaillances ne peut se
en avant à partir de l’instant courant. Les variations dans les prédic- faire que si les phénomènes de dégradation sont correctement
tions proviennent de l’adaptation du système au fil des acquisitions. appréhendés (acquisition de données, extraction de descripteurs,
Les plus fortes variations apparaissent sur les premiers points car ils détection, diagnostic). D’autre part, dans la pratique, le RUL n’est
correspondent à la transition entre les nuages de points rouge et vert pas une fin en soi : son estimation doit en revanche permettre de
(figure 15). Puis la dégradation est faible, menant à des prédictions mettre en œuvre des politiques de réaction adéquates (aide à la
très lissées entre les instants 150 et 700, contrastant avec celles esti- décision). Ainsi, le déploiement du pronostic requiert un ensemble
mées après 700 unités de temps correspondant à une dégradation de tâches (modules) qu’il est commun de regrouper sous le terme
marquée du roulement. La défaillance devient imminente lorsque la de PHM (prognostics and health management). Aussi, même s’il
prédiction 100 pas en avant dépasse un seuil donné. s’agit d’une approche plutôt rationnelle, la mise en œuvre d’un pro-
cessus de pronostic s’avère délicate. En effet, au même titre que les
activités de détection et de diagnostic, la mise en place d’outils de
pronostic doit faire face aux spécificités des problèmes traités : don-
5. Conclusion nées non stabilisées (incertitude, aléas), connaissances utiles mal
« bornées » (formalisation des problèmes difficile), mauvaise appré-
ciation des contours d’une étude (expertise forte et distribuée),
Le maintien en condition opérationnelle à moindre coût des sys- dynamique prononcée de l’évolution de l’équipement... Aussi, la
tèmes industriels est devenu un facteur critique quant à la perfor- recherche ne propose pas encore d’outil « universel » : le pronostic
mance des entreprises, et les concepts traditionnels de de pannes et l’évaluation de la gravité de ces pannes restent des

- 30
- 32
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y
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100 200 300 400 500 600 700 800 900 1 000
Réel
Approximation
Figure 16 – Prédiction 100 pas en avant sur un deuxième roulement selon L. Sérir, E. Ramasso, P. Nectoux et N. Zerhouni [17]
activités en développement. Les seules approches stabilisées sont tifique internationale travaillant sur le pronostic souffre d’un
du type « fouille de données » et reposent donc sur un historique manque de moyens de validation des approches développées
des incidents assez conséquent pour être représentatif des événe- (benchmarks, preuves, mesures, etc.). C’est l’un des principaux
ments potentiellement prévisibles. Ce point est d’autant plus criti- défis pour les années à venir.
que que les systèmes évoluent dans leur complexité (systèmes Notons pour finir que la thématique du PHM s’étend aujourd’hui
mécatroniques) et dans leur échelle (systèmes distribués). à un panel d’applications pour lesquelles elle n’a pas été initia-
À un autre niveau, il est difficile d’être à même de juger a priori lement développée. Des travaux existent désormais sur le PHM
de la qualité d’un système de pronostic sans attendre la détério- des piles à combustible, le PHM des structures composites (SHM),
ration d’un système réel. Plus encore, toute la communauté scien- le PHM biomédical, le PHM des MEMS...

P
O
U
PHM – Prognostics and health R
management
E
De la surveillance au pronostic N
de défaillances de systèmes complexes
S
Rafael GOURIVEAU
par
Maître de conférences – ENSMM – Institut FEMTO-ST A
rafael.gouriveau@femto-st.fr
Kamal MEDJAHER V
kamal.medjaher@femto-st.fr O
Emmanuel RAMASSO
I

emmanuel.ramasso@femto-st.fr
et Noureddine ZERHOUNI
Professeur des universités – ENSMM – Institut FEMTO-ST
R
noureddine.zerhouni@femto-st.fr
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est strictement interdite. – © Editions T.I. Doc. MT 9 570 – 1
P PHM – PROGNOSTICS AND HEALTH MANAGEMENT _______________________________________________________________________________________
O
U À lire également dans nos bases
R DUCHEMIN (G.). – Maintenance des machines et

des moteurs. [BM 4 188].
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nance prédictive. [R 6 100].
ZWINGELSTEIN (G.). – Sûreté de fonctionnement
des systèmes industriels complexes. [S 8 250].
MECHIN (B.). – Introduction aux méthodes de MORTUREUX (Y.). – La sûreté de fonctionnement :
maintenance. [MT 9 280]. méthodes pour maîtriser les risques. [SE 1 020].
E Outils logiciels
N CALCE Center for Advanced Life Cycle Engineering, Simulation Assisted

Reliability Assessment SARA®, [Logiciel] : outil de simulation
http://www.calce.umd.edu/
C-MORE, EXAKT : condition-based maintenance optimizer, [Logiciel] déve-
loppé par le Centre for Maintenance Optimization and Reliability Enginee-
ring C-MORE
NI, Watchdog Agent™ Prognostics Toolkit for LabVIEW, [Logiciel] toolbox http://cmore.mie.utoronto.ca//index.html
développée par National Instrument et IMS
http://sine.ni.com/nips/cds/view/p/lang/en/nid/210191
S
Sites Internet
A CALCE : site web du Center for Advanced Life Cycle Engineering, Université encourager l’utilisation d’architectures de données ouvertes. Le
du Maryland consortium Mimosa a notamment proposé le standard d’architecture de
V http://www.calce.umd.edu/
CPHM : site web de la China Prognostics and Health Management Society
données OSA-CBM pour supporter les stratégies de maintenance
conditionnelle et prévisionnelle.
http://www.chinaphm.com/ NASA PCoE : site web consacré au PHM du NASA Prognostics Center of
O Georgia Tech : site web du Center for Integrated Diagnostics, intelligent
control systems laboratory de l’université du Minnesota
Excellence
http://ti.arc.nasa.gov/tech/dash/pcoe/
http://icsl.gatech.edu/icsl/Main_Page S’y trouvent notamment quelques références bibliographiques et les jeux
I
de données mis à disposition par la communauté.

IEEE PHM 2012 Data Challenge : site web de la « compétition de pronostic »
organisée lors de la conférence IEEE PHM 2012, conjointement entre la Prognostics and Health Management (PHM) professionals) : forum de dis-
IEEE Reliability Society et l’équipe PHM de l’Institut FEMTO-ST : cussion sur le PHM
R http://www.femto-st.fr/ieee-PHM2012-data-challenge
MIMOSA : site web de l’association Mimosa
http://www.linkedin.com/groups/Prognostic-Health-Manage-
ment-PHM-Professionals-1053007
http://www.mimosa.org/ PHM Society : site web du consortium PHM society
Mimosa est une association à but non lucratif visant à développer et à http://www.phmsociety.org
P Événements
L Deux conférences (l’une internationale, l’autre européenne) sont organisées

annuellement par la PHM Society
http://www.phmsociety.org/
Society
http://www.rs.ieee.org/
Le GdR MACS (Modélisation, Analyse et Conduite des Systèmes dynamiques)
U Deux conférences internationales sont organisées annuellement par la
société savante IEEE, avec le soutien notamment de la IEEE Reliability
organise des journées d’étude sur des thèmes liés au PHM, en particulier
l’axe scientifique 4 intitulé Sûreté, Supervision et Maintenance
http://www.univ-valenciennes.fr/GDR-MACS
S
Normes et standards
X60-319/NF EN 13306 2010 AFNOR Terminologie de la maintenance. ISO 13381-1 2004 Surveillance et diagnostic des machines –
pronostic – partie 1 : Lignes directrices
générales.
Brevets
System and method for health assessment of downhole tools, patent Embedded prognostic health management system for aeronautical
WO/2009/132281. machines and devices and methods thereof, patent WO/2012/058260.
Systems and methods for predicting failure of electronic systems and asses-
sing level of degradation and remaining useful life, patent
WO/2008/036921.
Annuaire
Laboratoires – Bureaux d’études – Écoles – Centres LAGIS : Laboratoire d’automatique, génie informatique et signal, Lille
de recherche (liste non exhaustive) http://www.lagis.ec-lille.fr
CRAN : Centre de Recherche en Automatique de Nancy LAMIH : Laboratoire d’Automatique, de Mécanique, et d’Informatique Indus-
http://www.cran.uhp-nancy.fr trielles et Humaines, Valenciennes
http://www.univ-valenciennes.fr/LAMIH
FEMTO-ST : Institut Franche-Comté Électronique, Mécanique, Thermique et
Optique – Sciences et Technologies, Besançon LGP : Laboratoire de Génie de Production, Tarbes
http://www.femto-st.fr http://www.enit.fr/fr/recherche-et-valorisation/le-laboratoire-genie-de-pro-
duction.html
GSCOP : Laboratoire des Sciences pour la Conception, l’Optimisation et la
Production de Grenoble LSIS : Laboratoire des Sciences de l’Information et des Systèmes, Marseilles
http://www.g-scop.grenoble-inp.fr http://www.lsis.org
LAAS : Laboratoire d’Analyse et d’Architecture des Systèmes, Toulouse UTT-ICD : Université de Technologie de Troyes et Institut Charles Delaunay
http://www.laas.fr http://www.utt.fr

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PHM – Prognostics and health

Cet article est issu de : Génie industriel | Maintenance

par Rafael GOURIVEAU, Kamal MEDJAHER,

Résumé Les exigences de performance globale conduisent les industriels à renforcer

Abstract Global performance requirements lead industrials to strengthen their capability

Pour toute question :

PHM – Prognostics and health

par Rafael GOURIVEAU

Maître de conférences – ENSMM – Institut FEMTO-ST

1. Émergence du pronostic dans l’activité de maintenance............. MT 9 570 - 2

es services « FMDS » (fiabilité, maintenabilité, disponibilité, sécurité) sont

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ciblée, au niveau des entreprises, les concepts traditionnels de maintenance

communauté scientifique. De nombreux laboratoires s’y intéressent

1. Émergence du pronostic plus à la mise en œuvre des moyens permettant d’assurer le

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_______________________________________________________________________________________ PHM – PROGNOSTICS AND HEALTH MANAGEMENT

une approche plus anticipative des phénomènes de défaillance,

oui Occurrence de non

oui Caractère non oui Approche non

Maintenance Maintenance Maintenance Maintenance

Figure 1 – Formes de maintenance selon la norme NF EN 13306 (2010)

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Deux formes de maintenance corrective peuvent être distin-

et prévisionnelle appelée RUL (remaining useful life).

– réduction du nombre de pannes ;

La mise en œuvre d’une politique de maintenance prévisionnelle b

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2.1.2.2 Mesures de performances du système de pronostic

Figure 4 – Mesures de pronostic : RUL et confiance

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Précision de pron 1 < Précision de pron 2 pron. 1 pdf

Exactitude de pron 1 > Exactitude de pron 2

prédit Limites pdf du TTF

Prédiction trop tôt Prédiction trop tard Bonne prédiction

Figure 5 – Mesures de performances du système de pronostic : a) exactitude et précision, b) opportunité

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système (actions de maintenance et conditions d’exploitations).

– fondées sur l’expérience, c’est-à-dire les approches fiabilistes.

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orientée « composant » à un niveau « système » – Lois de poisson, exponentielle, de weibull,

Tableau 2 – Pronostic guidé par les données

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Équipement jugé non

L'équipement peut être non

Équipement Stratégie de maintenance conditionnelle

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3. Des données au RUL :

3.2 Architecture CBM et processus PHM ■ Couche 2 – module traitement du signal

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Figure 9 – Architecture OSA/CBM séquentielle selon D. Boylan, M. Lebold et K. Reichard [14]

Prétraitement Informations Aide à la

Figure 10 – Architecture OSA/CBM adaptée de M. Lebold et M. Thurston [7]