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La fraude à l'assurance porte atteinte à un contrat qui est dominé par la bonne foi et régi par des règles

propres au droit
des assurances. La variété des fraudes relatives à la formation ou à l'exécution du contrat d'assurance sont autant de
manifestations de la déloyauté de l'assuré. Cette denière perturbe l'ordre contractuel, retentit sur la mutualité des
assurés et, in fine, porte atteinte à l'institution de l'assurance. L'étude du phénomène de la fraude à l'assurance permet
de conclure à l'absence d'une nature spécifique de celle-ci. En effet, le législateur n'a pas laissé au seul juge le soin de
maintenir l'équilibre du contrat et de corriger les imperfections du droit, comme pour la fraude en général ; il a mis en
place, avec l'aide des usagers, un arsenal permettant de la détecter et de la sanctionner avec efficacité, grâce à
l'application combinée de règles propres au droit des assurances et à celles relatives au droit commun des contrats et
au droit pénal.
Cette thèse propose une étude de la fraude en assurance. En particulier, l'analyse porte sur les moyens dont disposent
les assureurs pour combattre la fraude. L'objectif du premier chapitre est de montrer comment l'incapacité des
assureurs à s'engager dans des mesures de contrôle crédibles contribue à détériorer le système d'assurance. Dans un
contexte de non-engagement, nous montrons que le comportement stratégique de chacune des parties altère le contrat
d'assurance de façon inattendue. Deux résultats majeurs sont obtenus. A la différence de Mookherjee et Png (1989),
nous montrons que le contrat d'assurance optimal procure une indemnité identique, que l'assuré soit ou non contrôlé.
De plus, si le coût de l'audit est trop élevé, alors le contrat d'assurance optimal devient un contrat avec sur-assurance.
Dans le deuxième chapitre, l'audit est supposé imparfait. D'une part, l'assureur n'est pas toujours capable de détecter la
fraude. D'autre part, il existe une imperfection liée à une mauvaise évaluation du dommage par l'assureur et donc une
probabilité positive de sanctionner injustement un assure honnête. L'analyse révèle que l'effet isolé du premier type
d'erreur n'affecte pas de manière conséquente la forme du contrat d'assurance optimal. Mais l'assuré étant adverse au
risque, la possibilité d'être sanctionné par erreur introduit un risque supplémentaire, qui peut l'inciter à ne pas déclarer
son dommage. Cela nous amène à reconsidérer les différents équilibres possibles résultant des comportements
stratégiques des deux parties. Nous montrons alors que la possibilité d'être sanctionné injustement permet de résoudre
le problème de crédibilité de l'assureur en rendant crédible la menace de l'audit. Le dernier chapitre pose la question de
l'efficacité des contrôles en présence d'assurés se différenciant par leur perception de la probabilité d'audit. Le marché
d'assurance est un marché concurrentiel en présence de deux types d'assurés, un premier groupe sur-évaluant la
probabilité de contrôle, et un second composé d'assurés qui la sous-évaluent. L'objectif de ce chapitre est alors
d'analyser comment cette hétérogénéité dans les croyances peut modifier les relations entre un assureur et ses
assures. Il apparait ainsi qu'il peut être optimal de ne dissuader que les assures les plus pessimistes, et laisser l'autre
partie des individus frauder de façon systémique.
Cette thèse tente de définir la notion de fraude a l'assurance dans le droit français, une notion faisant partie intégrante
des mœurs de notre société. La fraude est présente dans toute les branches de l'assurance et dans toutes les classes
socioprofessionnelles qui n'ont pas toujours conscience de la gravite de leurs actes pouvant être sanctionnes sur les
fondements du code civil, du code des assurances, mais également du code pénal entre en vigueur en 1994. La
diversité de la législation permet aux assureurs de poursuivre un individu en prenant en considération son
comportement et sa dangerosité. La fraude a l'assurance est une atteinte au contrat fonde sur la bonne foi des parties,
et une atteinte a la mutualité des assures qui subissent les conséquences de ces malversations car c'est par la
collectivisation de leurs primes que le système de l'assurance permet d'indemniser les fraudeurs. Devant l'ampleur de
ce phénomène et le désengagement des services publics, les compagnies d'assurances ont du réagir afin de créer des
organismes charges de lutter efficacement contre les fraudeurs. Cette création, malgré sa nécessite, se trouve être une
substitution de l'institution judiciaire, ce qui peut être dangereux pour la protection du justiciable.
L'objet de cette thèse est de dresser un panorama le plus complet possible des questions liées à la fraude à l'assurance
et à sa détection. Notre travail est d'essayer d'augmenter les compétences des experts de l'assurance en vue de mieux
détecter la fraude, voir même de la dissuader. Il apporte aussi une contribution à la littérature économique en proposant
un modèle optimal de détection de la fraude. Dans cette optique, le premier axe d'analyse établit une revue de
littérature qui traite à la fois les aspects théoriques et appliqués de la fraude. Le deuxième axe d'analyse développe une
procédure automatisée permettant d'améliorer la détection des fraudes à l'assurance en automobile en utilisant les
indicateurs les plus significatifs. La troisième partie propose un modèle optimal de détection de la fraude à l'assurance.
Elle établit un lien entre la théorie de l'audit optimal et les procédures d'audit de réclamations dans différents marchés
où la méthode du scoring est utilisée comme instrument pour l'implantation d'une stratégie d'audit.
consentement. Par conséquent, aucun doute ne doit subsister quant à l'origine des documents
produits par l'assureur21.
Au-delà de l'analyse du questionnaire soumis à l’assuré lors de la conclusion du contrat,
l'assureur peut, dans la majorité des cas, recourir à de véritables investigations effectuées
par
des spécialistes du domaine. Cependant, il peut établir la preuve formelle de la mauvaise foi
de son contractant.
Il est ainsi indispensable de faire appel à des recherches permettant de prouver la fausseté
des
déclarations de l'assuré, dès lors qu’il devient difficile pour le gestionnaire du dossier de
prouver de façon certaine la fraude dont la compagnie d'assurance est la victime. Ces
investigations englobent le plus souvent la vérification des faits déclarés par l’assuré,
l’appréciation de la cause du dommage, et l’évaluation de l’indemnité réparatrice du
préjudice
subi. Elles permettent de confirmer les doutes de l'assureur. C'est pour cette raison que des
expertises et des recherches approfondies sont indispensables pour vérifier la réalité des
faits
et démontrer éventuellement la mauvaise foi du déclarant.

2.1. Indicateurs de détection de fraude selon Belhadji & Dionne (1999)


Ainsi, divers auteurs se sont interrogés sur les indicateurs susceptibles d’être à l’origine de
la
fraude. Dans la continuité des travaux de Weisberg & Derrig (1993), Belhadji & Dionne
(1999) se
sont intéressés à la question et ont orienté leurs travaux dans ce sens pour constituer une
véritable référence dans le domaine. Leur étude avait pour but de mettre en exergue les
indicateurs les plus significatifs résumés au niveau de la figure 1 pour déterminer la
probabilité
de la fraude dans un dossier présenté pour indemnisation dans la perspective de mettre en
place
un modèle statistique de prédiction de fraude. En utilisant un modèle de régression Probit,
les
auteurs ont défini 16 indicateurs significatifs parmi une liste de 50.
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Tableau 1 : Indicateurs de détection de fraude en assurance automobile les plus significatifs selon
Belhadji & Dionne (1999)
1. Une collision mineure a
entraîné des coûts de
réparation excessifs.
2. Existence de tout dommage
non relié à la perte ou
incohérent avec les faits
del'accident.
3. Le véhicule est rapporté
volé et retrouvé peu de temps
après avec de lourds
dommages.
4. L'assuré éprouve des
difficultés financières
personnelles ou reliées à ses
affaires.
5. L'assuré est prêt à accepter
un montant de règlement
relativement petit plutôt que
d'avancer
tous les documents reliés à la
perte.
6. L'assuré est
extraordinairement familier
avec le jargon des assurances
ou des réparations de
véhicules.
7. L'assuré (ou le réclamant)
est trop enthousiaste ou trop
franc pour prendre le blâme de
l'accident.
8. L'accident (ou la perte) a eu
lieu peu de temps après
l'enregistrement et l'achat
d'assurance
pour le véhicule, ou dans le
mois qui précède la fin de la
police (ou de la couverture.
9. Nombreux reçus de taxi, ou
bien factures de location de
véhicule provenant d'un
magasin de
débosselage.
10. Factures ou preuves
semblent fausses ou
fabriquées.
11. La documentation de
l'estimation et de la réparation
n'est pas disponible.
12. Témoignages
contradictoires concernant les
circonstances de la perte.
13. Accident impliquant un
seul véhicule.
14. L'achat du véhicule s'est
fait au comptant.
15. Réclamant est très agressif
(menace de faire appel à un
avocat, au gouvernement, etc.)
16. Lors de l'enquête, l'assuré
est nerveux et semble confus.
1.2.2. Indicateurs de
détection de fraude
selon Benedek&
Laszlo (2019)
Source : Résultats de l’étude de Belhadji & Dionne (1999).
Toutefois, l’étude a tout de même été sujette à critiques notamment par rapport à
l’échantillon
jugé petit pour que les résultats en soient extrapolés ou encore par rapport à la méthode
statistique choisie qualifiée d’inappropriée voire même dépassée.
Mais ceci n’a pas découragé d’autres auteurs à l’utiliser comme étant une référence en
termes
d’indicateurs de suspicion de fraude. Ceci a été le cas d’études réalisées deux décennies plus
tard
par Benedek& Laszlo, 2019 dont les résultats seront exposés dans ce qui suit.
En vue d’identifier les indicateurs les plus pertinents, Benedek& Laszlo (2019) ont utilisé des
algorithmes d’arbre de décision, de Naive Bayes et de réseau de neurones.
Dans un premier temps, les indicateurs ont été scindés en quatre catégories :
caractéristiques du
véhicule, caractéristiques de l’accident, caractéristiques du conducteur et caractéristiques
du
réclamant. Chacune de ces catégories englobe divers indicateurs susceptibles d’être
significatifs
en termes de suspicion de fraude.
Les résultats ont donné lieu à une totalité de 12 indicateurs pertinents sur les 23 étudiés
(Tableau
2). Les auteurs ont ainsi identifié dans un premier temps le type de police, la faute (si elle est
commise par le souscripteur ou par une tierce personne) et la catégorie du véhicule comme
indicateurs clés de la suspicion de fraude. L’analyse par réseau de neurones a identifié deux
autres
indicateurs comme la zone de l’accident (urbaine ou rurale) ou encore le mois de l’accident.
Revue ame , Vol 4, No 2 (Avril, 2022) 420-436 Page 426
D’autres indicateurs ont été également jugés importants comme le sexe, le nombre de
sinistres
et l’âge du conducteur. Pour ce qui est des caractéristiques du véhicule, la catégorie, la
marque,
l'âge et le prix du véhicule ont été jugés les plus pertinents.
Tableau 2 : Indicateurs de détection de fraude les plus significatifs selon
Benedek& Laszlo
(2019)
1. Le type de police.
2. La faute.
3. La catégorie du véhicule.
4. La zone de l’accident.
5. Le mois de l’accident.
6. Le sexe.
7. Le nombre de sinistres.
8. L’âge du conducteur.
9. La marque.
10. L’âge du véhicule.
11. Le prix du véhicule.
Source : Les résultats de l’étude de Benedek& Laszlo (2019).
Tableau Malgré quelques limites méthodologiques concernant principalement le nombre
d’observations analysées, les outils utilisés par les auteurs restent plus récents et plus
performants. C’est pour cela que nous avons conservé les résultats tels qu’ils sont en vue de
les
tester.
Section 3 : le secteur dassurance

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