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Cours : Droit des assurances

Auteur : Didier Krajeski


Leçon n° 5 : La prime

Table des matières


Section 1. Le calcul de la prime............................................................................................................. p. 2
Section 2. Le paiement de la prime........................................................................................................p. 5
§ 1. L'exécution de l'obligation de payer......................................................................................................................p. 5
A. Les parties au paiement................................................................................................................................................................ p. 5
B. La date du paiement...................................................................................................................................................................... p. 5
C. Les modalités du paiement............................................................................................................................................................p. 6
D. La preuve du paiement..................................................................................................................................................................p. 6
§ 2. L'inexécution de l'obligation de payer...................................................................................................................p. 7

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En contrepartie de la garantie, l'assuré prend l'engagement de payer une prime ou une cotisation. La
prime c'est la contrepartie de la garantie fournie par l'assureur. Le calcul et le paiement de la prime
restituent cette idée. Les questions de paiement auraient dues être étudiées dans le titre second de
cette partie. Pour simplifier le cours, les deux questions ont été liées.

Section 1. Le calcul de la prime


La prime c'est avant tout la contribution du souscripteur à l'opération d'assurance : il finance
la capitalisation ou la mutualité. La prime qu'il paiera finalement comprendra cependant plus
d'éléments. Ces éléments ajoutés dépendent d'ailleurs du fait de savoir si l'on a affaire à une prime ou
une cotisation. En fait, la prime est calculée progressivement. Dans un premier temps, on procède à
un calcul purement technique on établit alors la prime pure ou prime technique. Ensuite, on détermine
la prime nette et enfin la prime totale.

La prime pure est la prolongation dans un contrat donné du calcul de l'assureur pour établir la
mutualisation du risque. C'est le coût du risque garanti. Pour l'établir, l'assureur se sert de deux
paramètres : le taux de prime qu'il applique à l'assiette de la prime. Cette dernière représente la
valeur de l'intérêt assuré (voiture, maison, machines).

Le taux de prime est une fraction mathématique que l'on applique à l'assiette de prime. Que trouve-t-
on dans cette fraction (sur cette question, le passionnant article de Théodore Corfias : « Les principes
de tarification du contrat d' assurance vie », RGDA 2009, 69) ?

L'écho de la mutualité : la probabilité du sinistre et son coût.

Le taux de prime est donc calculé par multiplication de la fréquence des sinistres par leur coût moyen.
En considération du bien assuré, on va déterminer quel est la fréquence de réalisation du risque et
quel coût représente habituellement le sinistre. On les calcule de la façon indiquée dans l'introduction
en arrivant à l'idée.

Exemple
Sur une période d'un an, pour 100000 véhicules assurés, 50 vols se produisent. Ces vols
représentent en moyenne un coût de X % du risque total. Pourquoi cette recherche du coût
moyen ? Parce que sur les X vols, tant de voitures sont retrouvées sans dommage, tant ne sont
pas retrouvées, tant sont retrouvées mais nécessitent des réparations à hauteur de tant. Pour une
voiture de 10000, le coût moyen par sinistre est de 5000, soit 50% par unité de valeur. Le taux de
prime est donc ici de X sur cent multiplié par 50% de l'unité de valeur donnée. Si notre unité de
valeur assurée est de150 €, le coût moyen est de 75. En général, 150 € est l'unité de valeur retenue
par les assureurs. La fréquence est de 50 pour 100000, le taux de prime est la fréquence multipliée
par 75 soit 0,0375 pour 150. Il faut appliquer ce rapport à l'assiette de la prime

Nous avons dit que l'assiette de la prime est la valeur de l'intérêt assuré. Il suffit donc de connaître
cette valeur pour connaître le montant de la prime pure. Le problème est qu'il est parfois difficile de
déterminer cette valeur. C'est relativement simple quand il s'agit d'un bien surtout s'il a une valeur
déterminée.

On peut retenir trois valeurs.


• La valeur vénale pour les biens destinés à être vendus.
• La valeur d'usage est une valeur de remplacement en l'état, pour un bien qui n'est plus dans
le commerce. Elle tient compte de la vétusté et l'obsolescence.
• La valeur à neuf représente le prix de vente du bien dans le commerce.

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Les valeurs vénale ou à neuf peuvent se déterminer avec des référents objectifs. Ce n'est pas le
cas de la valeur d'usage. Son propriétaire aura tendance à surestimer le bien, cela peut poser des
difficultés le jour du sinistre.

On peut se satisfaire d'une valeur déclarée par le propriétaire en prenant le risque d'une surestimation
qui aboutira à une diminution de l'indemnité après expertise. Mieux vaut donc procéder à l'expertise
avant. Une autre méthode peut consister à se mettre d'accord sur la valeur du bien :c'est une valeur
agréée. En cas de sinistre et de désaccord entre les parties, il revient à l'assuré de démontrer que
le bien a bien la valeur déclarée, alors qu'il revient à l'assureur de démontrer qu'il n'a pas la valeur
agréée. Cette dernière établit une présomption simple. L'assureur peut démontrer que le bien n'a
plus cette valeur. Le but de ces preuves est que l'assuré ne s'enrichisse pas à l'occasion du sinistre.

Jurisprudence
La modification de la charge de la preuve est une avantage conséquent comme le souligne un arrêt
de la Cour de cassation (Cass. civ. I, 2 février 1988, Bull. civ. I, n 28). Un contrat comportait, dans
ses conditions générales, une clause par laquelle l'assuré devait apporter, en cas de sinistre la
preuve de la valeur des biens assurés. Les juges du fond ont vu un traitement particulier de bijoux,
pour lesquels ils ont cru pouvoir relever l'existence d'une clause de valeur agréée. Cette clause
résultant vraisemblablement de la présence d'un devis descriptif et estimatif des bijoux. L'expertise
réalisée aux bons soins de l'assureur leur ayant paru minorer la valeur des biens, la preuve de la
modification de valeur n'était pas apportée par l'assureur. Tout cela repose sur un pouvoir souverain
d'appréciation des juges du fond. Le recours à la commune intention des parties est très pratique...

En dehors de la détermination de la valeur des biens, il faut déterminer le prix d'une assurance
de responsabilité et d'une assurance de personne.
• Les assurances de personne posent moins de difficultés. Elles sont forfaitaires , du moins
si l'on exclut l'assurance des accidents corporels et l'assurance maladie, et ce sont les capitaux
assurés qui constituent l'assiette de la prime. Il faut donc déterminer le montant de ces capitaux
et la situation de la personne. A cet effet, l'article A. 335-1 du Code des assurances prévoit
la fixation d'un taux d'intérêt technique et l'utilisation des tables de mortalité. Le taux est
réglementé par l'article A. 132-1 du Code des assurances. Il prévoit les modalités de fixation car,
quelles que soient les fluctuations économiques, l'assureur devra respecter ses engagements
en remettant les sommes calculées grâce à l'application de ce taux. A la prime payée devra
correspondre le capital prévu ou les rentes. La réglementation varie selon le type de contrat.
Le contrat prévoit une prime unique ou en plusieurs paiements.
• Pour les assurances de responsabilité, les choses se compliquent mais elles ne sont pas
insolubles. S'il s'agit d'assurer la responsabilité par rapport à une valeur déterminée, c'est cette
valeur qui va servir d'assiette. .

Exemple
Par exemple, la valeur de l'immeuble pour l'assurance d'une location. S'il s'agit d'assurer
une activité, l'assiette peut être constituée si l'activité est quantifiable par un chiffre d'affaire
(responsabilité d'une entreprise) . Si l'activité n'est pas quantifiable, on se réfère aux coûts moyens
révélés par les statistiques.

Pour reprendre notre exemple et le terminer, si notre véhicule vaut 15000 € la prime pure est de 3,
75. Cela paraît léger mais nous ne l'avons calculé que pour un risque donné avec des chiffres bas.
Cette prime pure ne correspond pas, loin s'en faut au prix que va payer le souscripteur.

On passe à la prime nette en ajoutant à la prime les chargements commerciaux (Théodore


Corfias, « De la prime pure à la prime commerciale », RGDA 2009, 453). Il s'agit des frais du contrat
et des bénéfices réalisés par l'assureur. C'est ici que l'assurance par des sociétés commerciales
se distingue de l'assurance par des mutuelles. Ces dernières n'ont comme chargement commercial
que les frais de fonctionnement.

Pour arriver à la prime totale, il faut ajouter le chargement fiscal. Le chargement fiscal est
constitué par une taxe unique appliquée à tous les contrats d'assurance mais dont le taux varie selon
la branche d'assurance.
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Exemple
Ce taux est, par exemple, de 30% pour les assurances incendie, 18% pour les assurances
automobile.

Il faut ajouter à cette taxe les sommes servant à alimenter les fonds de garantie. Nous avons
évoqué le fonds d'indemnisation des victimes d'actes de terrorisme alimenté par l'assurance de
biens. Le fonds de garantie automobile est alimenté par l'assurance automobile avec plus de logique.
On comprendra que ce chargement fiscal est un des phénomènes qui empêche l'harmonisation
européenne. Comme toujours, la France est un des pays qui taxe le plus. Il faudrait vérifier que
les pays qui taxent le moins aient autant de fonds de garantie. La taxe représente une solidarité
nationale qui se perpétue avec la mutualisation. Ce doit être le cas tant que celle-ci ne couvre pas
la totalité d'une population menacée par un risque.

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Section 2. Le paiement de la prime
La collecte des primes va permettre à l'assureur de constituer les fonds qui vont servir à couvrir les
sinistres de l'année. Nous allons voir de quelle façon va s'exécuter l'obligation au paiement de la
prime avant de nous intéresser au problème de l'inexécution de cette obligation.

§ 1. L'exécution de l'obligation de payer


Selon l'article L. 113-2 du Code des assurances, «l'assuré est obligé de payer la prime ou
cotisation aux époques convenues».

Qui, quoi, quand, où sont les différentes questions que conduit à se poser le paiement de la prime.
Il faut y ajouter l'obsédante question de la preuve.

A. Les parties au paiement


Le débiteur de la prime est le souscripteur du contrat et non l'assuré ou le bénéficiaire de celui-ci. La
règle vaut dans le cas d'une assurance pour compte, elle vaut aussi dans le cas où le contrat a été
conclu par le biais d'un mandat ou d'une gestion d'affaires. C'est assez logique car dans les deux
cas, la personne qui intervient s'efface au profit de la personne pour laquelle elle le fait. S'agissant
de la gestion d'affaires, il faut bien entendu que les conditions en soient constituées (conditions
relatives au gérant, au géré et à la gestion), si c'est le cas aucune ratification n'est nécessaire. La
gestion d'affaires est encore utilisée en la matière. Elle justifie que le paiement soit effectué par
une autre personne que le souscripteur. La personne qui paie dans l'intérêt de l'autre possède alors
une action en restitution. Ce peut être le cas du créancier hypothécaire qui paie les primes à la
place du propriétaire négligent. Si une personne a payé par erreur, elle pourra obtenir restitution des
sommes (Répétition des primes versées par le conjoint se croyant bénéficiaire, Cass. 1re civ., 17
févr. 2010, n° 08-19789, RGDA 2010, 317, note Mayaux). On se souviendra que dans le mécanisme
de l'assurance de groupe, le débiteur n'est pas le souscripteur du contrat mais chaque adhérent.
Le créancier du paiement est évidemment l'assureur. Toute la question consiste à savoir si d'autres
personnes peuvent recevoir des paiements en son nom. Afin que le paiement effectué entre les
mains d'un courtier ou d'un agent général soit libératoire, il faut que celui-ci ou celui-là aient reçu
un mandat d'encaissement.

B. La date du paiement
Le Code des assurances ne fixe pas la date des paiements, celle-ci est donc librement convenue
entre les parties. La plupart du temps, le versement est anticipé. Il peut consister dans le versement
d'une prime unique ou fractionnée sur dix ou douze mois. Fractionnement de la prime n'est
pas divisibilité de la prime. La divisibilité permet de se faire rembourser le montant de la prime
correspondant à une période pendant laquelle la garantie ne joue pas. Si j'assure un véhicule pour
l'année et que je le vends en cours d'année, l'assureur me restitue la partie de la prime correspondant
à la période à partir de laquelle je ne suis plus propriétaire du véhicule. Si l'assuré continue à être
assuré pour d'autres risques auprès du même assureur, celui-ci pratiquera le plus souvent une
compensation avec les primes restant à verser. La compensation peut d'ailleurs être utilisée par
l'assureur dans d'autres hypothèses.
• Lorsqu'un sinistre a eu lieu, l'assureur devient débiteur de l'assuré. Il se peut que l'assuré
lui doive le paiement d'une prime. Dans ce cas, l'assureur peut déduire du montant de
l'indemnité la prime que lui doit l'assuré. Toute la question consiste à savoir dans quels cas
l'assureur peut opposer cette exception de compensation. Il le peut évidemment dans ses
rapports avec l'assuré. L'art. L. 112-6 du Code des assurances dispose que «L'assureur
peut opposer au porteur de la police ou au tiers qui en invoque le bénéfice les exceptions
opposables au souscripteur originaire». Peut-il opposer l'exception de compensation au tiers-
victime qui sollicite le bénéfice de l'indemnité ? On se place dans le cadre des assurances de
responsabilité : le tiers-victime détient une action directe contre l'assureur du responsable.

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Jurisprudence
La jurisprudence a d'abord considéré que le texte visait aussi la situation du tiers-victime. Son droit
à réparation s'en trouvait donc réduit. La Cour de cassation a modifié sa position par deux arrêts du
31 mars et 28 avril 1993 (Cass. civ. I, 31 mars 1993, Bull. civ. I., n 132 ; RCA 1993, chr. n 18 et com.
210 ; D. 1993, 519, note Ch.Larroumet) . Elle considère désormais que l'art. L. 112-6 «n'autorise
pas l'assureur de responsabilité à déduire de l'indemnité due à la victime le montant des primes
échues à la date du sinistre et non réglées».
• Lorsque le souscripteur a souscrit plusieurs polices, il doit préciser quelle prime il paie. S'il
n'a pas apporté cette précision, l'imputation se fait en application de l'art. 1256 du Code civil.
Celui-ci prévoit que le paiement doit être imputé sur la dette que le débiteur a le plus d'intérêt à
acquitter. Si dans le lot des polices figure une assurance obligatoire, c'est celle-là que l'assuré
a le plus d'intérêt à conserver. Il reste à s'interroger sur les modalités du paiement et la preuve
de celui-ci

C. Les modalités du paiement


Le droit des assurances connaît des règles originales par rapport au droit commun du paiement.
• La première règle originale concerne le lieu du paiement. En principe le paiement est
quérable par le créancier. En droit des assurances le paiement est portable. Selon l'art. L. 113-3
du Code des assurances : «La prime est payable au domicile de l'assureur ou du mandataire
désigné par lui à cet effet».
• La seconde règle originale concerne l'instrument du paiement.En principe, et sauf
disposition particulière, le paiement peut se faire par tout moyen : espèces, virement, ou chèque
et autres titres de paiement. Lorsque le paiement est effectué par chèque, la jurisprudence
considère que le paiement est effectué par la seule remise du chèque (Cass. civ. I, 2 décembre
1968, JCP 1969, II, 15775, concl. Lindon, obs. A. Besson) . En principe le paiement par chèque
n'est effectif que lors de l'encaissement. La jurisprudence rend donc une solution de faveur pour
l'assuré. Pourquoi cette interprétation de faveur pour le débiteur ? Il arrive assez souvent que le
contrat subordonne la mise en oeuvre de la garantie au versement de la prime. La jurisprudence
a donc décidé de considérer que ce versement a lieu le plus vite possible. Il ne faut pas voir là
une dérogation à l'art. 62 du décret-loi de 1935 sur le chèque. En fait, la jurisprudence considère
que si le chèque est provisionné lors de l'encaissement, cet encaissement commence à courir
à la remise. En revanche si le souscripteur a remis un chèque sans provision, il ne bénéficie
pas de cette règle de faveur (Cass. 1re civ., 4 avr. 2001, Bull. civ. I, n 102 ; RGDA 2001, 946,
Fondallosa) . La garantie n'est pas due. La solution ne vaut donc que pour le souscripteur de
bonne foi. Il ne doit pas subir le manque de diligence de l'assureur qui mettrait du temps à
encaisser son chèque.

Exemple
J'assure mon véhicule automobile vendredi et je fais immédiatement un chèque. Le chèque est
encaissé lundi matin, il est provisionné. Si un sinistre survient samedi je suis couvert même si le
contrat comporte une clause selon laquelle la garantie est effective à compter du paiement de la
prime. La présence de cette clause est indispensable si l'assureur veut pouvoir refuser sa garantie,
sinon, il doit mettre en place la procédure applicable en cas d'inexécution. Sans cette clause, on
considère que le contrat produit ses effets dès sa formation (Cass. civ. I, 25 octobre 1994, RGAT
1994, 1136, obs. J. Landel) .

D. La preuve du paiement
La faveur de la jurisprudence pour la libération du souscripteur va influencer les règles de preuve
du paiement.

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Jurisprudence
La jurisprudence considère que la date de la remise est présumée être celle mentionnée sur le
chèque. Si la remise a lieu près sinistre, donc la garantie n'est pas due, et que le chèque porte une
date antérieur au sinistre, l'assureur doit démontrer que la remise est postérieure. La date figurant
sur le chèque fait preuve de la date du paiement (Cass. civ. I, 11 décembre 1990, RGAT 1991,
76, obs. R. Maurice ; Cass. 1re civ., 22 janv. 2002, RGDA 2002, p. 394, note Bruschi ; Cass. 2e
civ., 16 nov. 2006, RCA 2007, 103 ; Cass. 2e civ., 22 janv. 2009, n° 08-10.682, RCA 2009, 118,
obs. H. Groutel).

§ 2. L'inexécution de l'obligation de payer


L'article L. 113-3 du Code des assurances met en place une procédure relativement complexe en cas
de non-paiement. Cette procédure est assez longue et elle ménage, à tout moment, la possibilité pour
le souscripteur de régulariser sa situation en payant la prime. L'assureur doit être patient. Surtout, il
ne peut utiliser d'autres voies de résiliation à l'exclusion, bien entendu de la résiliation amiable (Cass.
2e civ., 2 oct. 2008, n° 07-18.327, RCA 2008, 345, obs Groutel). Si la procédure que nous allons
décrire n'est pas respectée, le contrat est maintenu et l'assuré est en droit, même des années plus
tard, de solliciter la garantie alors qu'il a cessé de verser des primes depuis bien longtemps (Cass.
2e civ., 22 janv. 2009, n° 07-20730, RGDA 2009, 468, obs. Mayaux ; RCA 2009, 123). Dernière
précision relative à cette procédure : elle n'est applicable que pour le non paiement de la prime et
non pour le remboursement de frais de recouvrement (Cass. 2e civ., 16 juin 2011, n° 10-21078,
RGDA 2012, 51, note Bigot).

L'assureur doit attendre un premier délai de dix jours après l'échéance de la prime pour envoyer
une lettre de mise en demeure. Cette mise en demeure laisse courir un délai de 30 jours pendant
lesquels on attend une réaction du souscripteur. L'assureur doit encore sa garantie pendant ce délai.
A l'issue de la période de 30 jours, la garantie est suspendue. 10 jours après l'expiration du délai
de 30 jours, l'assureur a la possibilité de résilier le contrat d'assurance. L'assureur peut cependant
décider de laisser courir le contrat dont la garantie est suspendue. La jurisprudence vérifie que la
procédure est scrupuleusement respectée.

Une lettre de mise en demeure peut être envoyée par l'assureur dix jours après l'échéance de la
prime. Selon l'art. R. 113-1 du Code des assurances, cette mise en demeure résulte «de l'envoi
d'une lettre recommandée, adressée à l'assuré, ou à la personne chargée du paiement des primes, à
leur dernier domicile connu de l'assureur». Il s'agit d'une lettre recommandée simple. Elle doit porter
une formule indiquant la gravité de la situation et mentionner les conséquences du non paiement.
L'assureur doit faire preuve de quelques diligences s'agissant du domicile du souscripteur. Ce dernier
est tout de même censé l'informer d'un changement de domicile. Si la mise en demeure n'est pas
suffisamment précise, elle n'est pas valable (Cass. 2e civ., 20 déc. 2007, RGDA 2008, 75, note
Abravanel-Jolly). Un bordereau d’envoi en nombre suffit à prouver l’envoi (Cass. crim., 17 nov. 2009,
n° 09-81.017, RCA 2010, 56, obs. Groutel).

L'assureur doit cependant s'assurer qu'il a l'adresse du domicile du souscripteur. Au moins celle qui
figure sur la ou les polices. En essayant de déduire des plus récentes l'adresse la plus actuelle de
l'assuré.

Jurisprudence
Un arrêt de la Cour d'appel de Toulouse indique la raison pour laquelle la jurisprudence est si
exigeante (Toulouse, 19 novembre 1991, Juris-Data n 050842) : «L'envoi de la mise en demeure
est un acte grave car il constitue le moyen d'attirer l'attention du souscripteur sur l'ultime délai
de régularisation». Il incombe donc à l'assureur de démontrer qu'il a correctement accompli ces
diligences.

Le délai de 30 jours qui suit la mise en demeure débute le lendemain de l'expédition de la lettre
à 0 heure (Cass. 2e civ., 8 sept. 2005, Gaz. Pal. 2006, n° 43, obs. Leducq). Pendant ce délai,
l'assuré bénéficie de la garantie. Si un sinistre survient, l'assureur doit l'indemniser. La situation est
radicalement différente à l'issue de ce délai, si le contrat est maintenu, la garantie n'est pas due. En
cas de survenance de sinistre à compter de ce délai, l'assuré n'a droit à rien. Jusqu'à la résiliation
du contrat, le souscripteur peut intervenir à tout moment pour payer la prime. Si la garantie est
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suspendue, elle reprend le lendemain midi après le paiement sans autre formalité. Une fois que le
contrat est résilié, c'est terminé.

L'assureur doit notifier son intention de résilier le contrat et indiquer la date. Il peut le faire par
une nouvelle lettre recommandée ou mentionner son intention dans la lettre de mise en demeure.
Cela souligne l'importance de cette mise en demeure. La résiliation du contrat ne suppose pas
l'intervention d'un juge contrairement au droit commun. L'assureur a un véritable pouvoir de
résiliation. Nous verrons que l'assuré aussi dans une certaine mesure et pour d'autres raisons. La
résiliation n'est pas la fin des problèmes de l'assuré puisqu'il doit toujours les primes qu'il n'a pas
payées. Il peut faire l'objet d'une action en paiement..

Il arrive que les parties se trouvent dans une situation ambiguë. L'assuré ne sait plus si le contrat est
résilié ou s'il est toujours valable. Que dire si l'assureur continue à encaisser les primes que l'assuré
lui envoie après résiliation. Peut-on considérer que l'assureur a finalement renoncé à la résiliation.
Les juges du fond sont partagés. Si le courtier d'assurance reçoit les primes sans être informé de
la résiliation, la renonciation n'est pas admise. Cependant, si l'assureur organise pour un sinistre
postérieur à la date d'effet de la résiliation une expertise amiable et règle l'indemnité, on peut y
voir une renonciation à la résiliation. Si l'assureur reçoit après résiliation la prime sans réserves, la
jurisprudence considère que cela ne manifeste pas suffisamment une volonté de renoncer (Cass. 2e
civ., 24 mai 2006, RCA 2006, 321, obs. Groutel. - même sens : Cass. crim., 16 mai 2006, JCP G 2006,
II). Il en va différemment s'il accepte de couvrir un sinistre postérieurement à 1a résiliation (Cass. 1re
civ., 30 janv. 2001, RGDA 2001, p. 951, note Chardin) . La décision est intéressante car elle indique
la portée de cette renonciation. Si un second sinistre intervient dans un court délai, l'assureur doit
sa garantie. On ne renonce pas aisément à une renonciation ! La garantie sera aussi maintenue
si, postérieurement à la résiliation, l'assuré reçoit une attestation d'assurance (Cass. crim., 27 nov.
2007, RGDA 2008, 60, obs. Landel).

Concernant les assurances sur la vie, la situation est différente. Dans ces contrats, le souscripteur
est censé pouvoir sortir de la relation en utilisant la faculté de rachat. Le défaut de paiement n'est
pas un manquement : il ne peut y avoir de poursuites (C. ass., art. L. 132-20, al. 4 ). C'est un
comportement dont il faut tenir compte. Une procédure est prévue comparable à celle de l'article
L. 113-3 du Code des assurances. Dans les dix jours de l'échéance, l'assureur adresse une lettre
recommandée indiquant que le défaut de paiement de la prime ou de la fraction de prime échue
dans les quarante jours entraîne la résiliation ou la réduction du contrat. L'issue dépend du type
d'assurance souscrite.
Cette disposition ne vaut cependant que dans les assurances sur la vie simples. Si le contrat se
complique d'une autre sorte de garantie (décès accidentel, invalidité, incapacité), elle est mixte et
c'est alors la disposition de l'article L. 113-3 qui s'applique (Cass. 2e civ., 4 oct. 2012, n° 11-19431,
EDA 2012, 149, obs. Abravanel-Jolly).

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